Le Conseil de sécurité examine de nouveau la question des dommages causés aux gazoducs Nord Stream après les accusations lancées dans certains médias
À la demande de la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité a de nouveau examiné aujourd’hui la question du sabotage qui avait visé en septembre dernier les gazoducs Nord Stream 1 et Nord Stream 2, infrastructures énergétiques devant approvisionner plusieurs pays européens en gaz russe. La demande russe faisait suite à la publication d’une enquête par un journaliste américain mettant en cause les États-Unis. La Fédération de Russie a annoncé son intention de présenter un projet de résolution demandant au Secrétaire général de lancer une enquête internationale.
Le Conseil avait examiné la question une première fois le 30 septembre 2022. À l’époque, tous les membres du Conseil avaient dit souhaiter une enquête sur les origines de ce sabotage aux conséquences économiques et environnementales potentiellement très graves, dont Russes et Occidentaux s’accusaient mutuellement. Or, a fait remarquer devant le Conseil le professeur Jeffrey D. Sachs, de l’Université Columbia, la Suède, qui a enquêté sur le sabotage, a gardé les résultats de son enquête secrets pour le reste du monde, refusant notamment de partager ses conclusions avec la Fédération de Russie. Vu la gravité de l’acte, le professeur a estimé que, « dans l’intérêt de la paix mondiale », le Conseil « devrait exiger que ces pays lui remettent immédiatement les résultats de leurs enquêtes », d’autant que, selon certains médias américains, l’OTAN aurait conclu que la Fédération de Russie n’était pas impliquée, alors qu’un autre journaliste américain a mis directement en cause les États-Unis.
La Secrétaire générale adjointe aux affaires adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Rosemary DiCarlo, a rappelé que les Nations Unies « ne sont pas en mesure de vérifier ou de confirmer les allégations relatives à ces incidents » et attendent les conclusions des enquêtes nationales en cours. « Compte tenu du caractère sensible et spéculatif de cette question », elle a demandé instamment à toutes les parties concernées de faire preuve de retenue et d’éviter toute spéculation afin de ne pas aggraver les tensions dans la région et d’entraver la recherche de la vérité. « Quelle que soit la cause de l’incident, ses retombées comptent parmi les nombreux risques que l’invasion de l’Ukraine a déclenchés », a-t-elle ajouté, affirmant qu’il fallait redoubler d’efforts pour y mettre fin.
Le représentant de la Fédération de Russie a estimé que les faits étaient tellement évidents et les éléments de preuve probants qu’aucun avocat ne saurait défendre les États-Unis. Il a affecté de s’étonner que la Suède, le Danemark et l’Allemagne n’aient pas répondu à la demande russe d’être associée aux enquêtes sur le sabotage, estimant que celles-ci ne visaient en fait qu’à protéger les États-Unis. Disant faire confiance au Secrétaire général des Nations Unies, il a annoncé que sa délégation préparait un projet de résolution qui le prierait d’initier une enquête sur le sabotage afin d’établir la vérité. Le niveau d’engagement des délégations en faveur du texte déterminera notre approche pour la suite, a-t-il ajouté.
Les États-Unis « n’ont nullement été impliqués » dans cet acte de sabotage, a répliqué leur représentant, qui a dit ne pas être convaincu de la pertinence des connaissances des intervenants extérieurs. Il a accusé la Fédération de Russie d’abuser de son statut de membre permanent pour transformer le Conseil en plateforme de diffusion de sa désinformation, à l’image de leur projet de résolution qui, selon lui, n’a d’autre but que de pousser les pays vers des explications prédéterminées par la Russie.
L’Albanie, qui a, elle aussi, accusé la Fédération de Russie de manipuler le Conseil, a jugé inutile actuellement une résolution du Conseil sur cette question. Son représentant a en revanche invité l’ensemble des membres de l’ONU à soutenir pleinement la résolution sur une paix globale, juste et durable en Ukraine qui sera présentée à l’Assemblée générale cette semaine et à confirmer ainsi une nouvelle fois que l’ONU reste une base solide pour la paix et le progrès contre l’agression et la régression.
La Chine, en revanche, a salué le projet de résolution russe en préparation. « Trouver des moyens d’esquiver la réunion d’aujourd’hui ne signifie pas que le vrai peut être dissimulé », a fait observer son représentant.
De fait, les autres membres occidentaux du Conseil ont estimé inutile la présente séance. « Aucune urgence, ni aucune information crédible nouvelle ne justifie l’organisation d’une telle réunion, en urgence, cinq mois après l’incident », a affirmé la France, qui a dénoncé une « tentative éhontée de détourner l’attention de la communauté internationale alors que cela fera vendredi un an que la Russie a déclenché sa guerre d’agression contre l’Ukraine ». Son homologue du Royaume-Uni a tenu des propos très proches, parlant aussi « d’accusations délirantes » de la part de médias pro-russes.
D’autres membres du Conseil se sont montrés plus nuancés et ont préféré recentrer le débat sur les conséquences de cette guerre sur les civils. Malte, notamment, a rappelé l’interdiction aux termes du droit international des attaques dirigées contre eux, tandis que la Suisse a réitéré sa condamnation de principe de toute attaque contre les infrastructures critiques. De même, le Japon a décrié le vandalisme contre les infrastructures essentielles. L’Équateur, le Brésil ou encore les Émirats arabes unis ont attiré l’attention sur les répercussions des incidents sur l’environnement.
Plusieurs membres ont souligné l’importance d’une enquête approfondie. Se référant parfois à une lettre conjointe du Danemark, de la Suède et de l’Allemagne relative à l’enquête en cours transmise le jour même aux membres du Conseil, certains, comme l’Équateur, ont demandé que les enquêtes diligentées par ces pays soient préservées de toute ingérence disruptive. Un activiste politique, ancien officier du renseignement américain, Ray McGovern, a pour sa part invité les États-Unis à « tendre la main » à la partie russe en vue de reprendre la voie des négociations autour de la crise ukrainienne.
MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES
Déclarations
Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a rappelé la chronologie des événements relatifs au sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2 en septembre 2022, ainsi que les informations fournies par le Secrétariat. Elle a en particulier rappelé que, le 30 septembre 2022, le Sous-secrétaire général pour le développement économique au département des affaires économiques et sociales, Navid Hanif, avait informé le Conseil des fuites signalées dans les gazoducs « sur la base des informations et des données provenant de sources accessibles au public ». De même, a-t-elle ajouté, l’exposé de ce jour est basé « sur les informations publiquement disponibles dont nous disposons à ce jour ». Elle a également rappelé qu’au moment des incidents, aucun des deux gazoducs n’était en service, mais auraient contenu plusieurs centaines de millions de mètres cubes de gaz naturel.
Mme DiCarlo a ensuite rappelé la chronologie des enquêtes, distinctes, annoncées par les autorités danoises, allemandes et suédoises. Elle a précisé que la Fédération de Russie s’était montrée intéressée à se joindre à ces enquêtes. Elle a expliqué que les autorités danoises et suédoises avaient rapidement annoncé que les gazoducs avaient été endommagés par de « puissantes explosions » tout en disant comprendre que les enquêtes menées séparément par les trois pays étaient toujours en cours.
Mme DiCarlo a répété que les Nations Unies « ne sont pas en mesure de vérifier ou de confirmer les allégations relatives à ces incidents » et attendent les conclusions des enquêtes nationales en cours. « Compte tenu du caractère sensible et spéculatif de cette question », elle a demandé instamment à toutes les parties concernées de faire preuve de retenue et d’éviter toute spéculation. « Nous devons éviter toute accusation infondée susceptible d’aggraver les tensions déjà vives dans la région et d’entraver la recherche de la vérité », a-t-elle insisté.
Toutefois, a fait observer la Secrétaire générale adjointe, si l’on ne sait toujours pas exactement ce qui s’est passé sous les eaux de la mer Baltique en septembre 2022, « une chose est sûre: quelle que soit la cause de l’incident, ses retombées comptent parmi les nombreux risques que l’invasion de l’Ukraine a déclenchés ». Un an après le début de la guerre, nous devons redoubler d’efforts pour y mettre fin, conformément au droit international et à la Charte des Nations Unies, a-t-elle conclu.
M. JEFFREY D. SACHS, professeur d’université à l’Université Columbia, qui a précisé qu’il s’exprimait en son nom propre, a estimé que l’endommagement des gazoducs Nord Stream le 26 septembre 2022 constituait un acte de terrorisme international et représentait une menace pour la paix. C’est donc la responsabilité du Conseil de sécurité de se saisir de la question, afin que le responsable soit traduit devant la justice internationale et que des réparations soient entreprises pour dédommager les parties lésées et empêcher de telles actions à l’avenir, a-t-il estimé.
Le professeur a expliqué que cet acte avait conduit à d’énormes pertes économiques liées au gazoduc lui-même et à son utilisation potentielle future. Cela pose aussi, a-t-il dit, une menace accrue pour les infrastructures transfrontalières de toutes sortes: câbles Internet sous-marins, pipelines internationaux pour le gaz et l’hydrogène, transport d’électricité transfrontalier, éoliens offshore, et plus encore. Il a expliqué que la transformation mondiale vers l’énergie verte nécessitera des investissements considérables en termes d’infrastructures transfrontalières, y compris dans les eaux internationales. De ce fait, les pays doivent avoir pleinement l’assurance que leur infrastructure ne sera pas détruite par des tiers. Pour toutes ces raisons, une enquête de l’ONU sur les explosions du Nord Stream est une grande priorité mondiale.
Le professeur a fait observer que la destruction des gazoducs Nord Stream a nécessité un très haut degré de planification, d’expertise et de capacité technologique. Les pipelines Nord Stream 2 sont une merveille d’ingénierie, a-t-il expliqué, fournissant diverses informations techniques. Selon lui, la destruction d’un tel équipement à une profondeur de 70 à 90 mètres nécessite des technologies très avancées pour le transport des explosifs, la plongée pour installer les explosifs et procéder à la détonation. Le faire sans être détecté, dans les zones économiques exclusives du Danemark et de la Suède, ajoute considérablement à la complexité de l’opération.
Pour l’universitaire, une action de ce type doit avoir été menée par un acteur étatique, et seule une poignée d’États ont à la fois la capacité technique et l’accès à la mer Baltique pour mener cette action. Il s’agit notamment de la Russie, des États-Unis, du Royaume-Uni, la Pologne, la Norvège, l’Allemagne, le Danemark et la Suède, soit individuellement, soit en combinaison. Il a expliqué que l’Ukraine manque des technologies nécessaires, ainsi que d’un accès à la mer Baltique.
Le professeur Sachs a indiqué que dans un article récent, le Washington Post avait révélé que les agences de renseignement de l’OTAN avaient conclu à l’absence de preuve que la Russie ait exécuté cette action. Celle-ci n’avait en outre aucun motif évident de procéder à cet acte de terrorisme sur sa propre infrastructure critique. En effet, la Russie devrait supporter des sommes considérables en frais de réparation des canalisations. Le professeur a rappelé que trois pays auraient mené des enquêtes sur le sabotage: le Danemark, l’Allemagne et la Suède. Pour lui, la Suède est peut-être le pays qui a le plus à dire au monde sur la scène de crime, sur laquelle ses plongeurs ont enquêté. Pourtant, au lieu de partager ces informations à l’échelle mondiale, la Suède a gardé les résultats de son enquête secrets et a refusé de les partager avec la Russie, refusant même une enquête conjointe avec le Danemark et l’Allemagne. Dans l’intérêt de la paix mondiale, le Conseil de sécurité devrait demander à ces pays de remettre immédiatement les résultats de leurs enquêtes au Conseil de sécurité de l’ONU, a-t-il plaidé.
Pour le professeur Sachs, il n’existe actuellement qu’un seul récit public détaillé de la destruction du Nord Stream, celui récemment publié par le journaliste d’investigation Seymour Hersh, apparemment sur la base d’informations divulguées par une source anonyme. M. Hersh attribue la destruction du Nord Stream à une décision ordonnée par le Président américain Joe Biden et menée par des agents américains dans une opération secrète qui est décrite en détail. La Maison Blanche a décrit le récit de Hersh comme « complètement et totalement faux », mais n’a fourni aucune information contredisant le récit et n’a pas offert d’autre explication.
Le professeur a en outre rappelé que de hauts responsables américains avaient fait des déclarations avant et après l’endommagement du gazoduc qui montraient l’animosité des États-Unis à l’encontre de celui-ci. Il a rappelé, entre autres, les propos tenus le 28 janvier 2023 par la Sous-Secrétaire Nuland qui a déclaré au sénateur Ted Cruz: « je pense que l’Administration est très heureuse de savoir que Nord Stream 2 est maintenant, comme vous aimez le dire, un morceau de métal au fond de la mer ».
L’universitaire a dit espérer que les États-Unis et tous les autres membres du Conseil de sécurité condamneront cet acte odieux et s’uniront dans une enquête urgente dirigée par le Conseil. Pour lui, une enquête objective du Conseil de sécurité de l’ONU sur le sujet est importante pour la confiance mondiale dans cet organe, et plus important encore pour la paix mondiale et le développement durable.
M. RAY MCGOVERN, activiste politique, a indiqué qu’en tant qu’ancien officier du renseignement américain, il continue de croire en la nécessité vitale d’une lutte sans relâche contre la course aux armements et pour la stabilité stratégique. Il a regretté le désengagement des États-Unis vis-à-vis des accords de désarmement nucléaire, y compris les accords bilatéraux américano-russes. Pour l’intervenant, les États-Unis doivent continuer de « tendre la main » à la partie russe en vue de reprendre la voie des négociations autour de la crise ukrainienne. Il a par ailleurs estimé que l’article du Washington Post en question ne mérite pas d’être démenti, suggérant que la désinformation n’était l’apanage d’aucun pays en particulier, comme la première guerre en Iraq l’a démontré. Il s’est d’ailleurs demandé comment des informations pouvaient être qualifiées d’erronées sans que ne soient avancés des contre-arguments crédibles. Il a ensuite douté que l’agression de l’Ukraine n’ait pas résulté d’une provocation, s’interrogeant à ce propos sur les conséquences de l’expansion de l’OTAN à l’Est et jugeant que l’annexion de la Crimée résultait pour une large part du « coup d’État de Kiev » de février 2014. M. McGovern a achevé son intervention en soulignant l’intérêt de comprendre les intentions de M. Putin, lequel, d’après lui, ne tolère pas l’implantation de systèmes antimissiles de l’OTAN en Roumanie. « Mieux vaudra toujours négocier que tirer », a-t-il conclu en entonnant une chanson pacifiste.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a rappelé que les autorités américaines avaient averti que le gazoduc Nord Stream 2 serait détruit si la Russie ne se conformait pas à sa volonté. Le délégué a souligné qu’un article de presse du 8 février 2023, publié par un journaliste renommé, M. Seymour Hersh, a expliqué comment le gazoduc a été saboté par les États-Unis avec « leur complice de l’OTAN qu’est la Norvège ». Pour le représentant, les détails d’informations auxquels le journaliste a eu accès sont frappants. Il a dit être habitué au fait que les collègues américains se mettent hors-la-loi, puisqu’ils considèrent qu’eux-mêmes incarnent la loi. Il a rappelé que depuis la fin de la guerre froide, 251 cas d’utilisation de la force par les forces armées des États-Unis ont été répertoriés par le Congrès des États-Unis.
Nous ne nous livrons pas à une campagne de désinformation comme aiment le prétendre nos collègues occidentaux, a-t-il lancé. Selon lui, les faits sont tellement évidents et les éléments de preuve probants qu’aucun avocat ne saurait défendre les États-Unis. Le délégué a annoncé que sa délégation prépare une résolution qui prierait le Secrétaire général d’initier une enquête sur la question afin d’établir la vérité. Au sujet de la lettre reçue ce jour par les membres du Conseil, il a marqué sa surprise du fait que l’Allemagne, le Danemark et la Suède, qui l’ont rédigée, n’aient toujours pas répondu favorablement à la demande de collaboration judiciaire qui leur a été transmise en octobre dernier par le Procureur général de la Fédération de Russie. Selon lui, les enquêtes que ces pays disent mener n’ont pour seul but que de protéger les États-Unis. Il s’est aussi dit étonné que ces pays qui semblent engagés dans ces enquêtes n’aient pas souhaité prendre part à cette séance sur la question au centre des investigations. Le représentant russe a dit faire encore confiance au Secrétaire général de l’ONU sur cette question. Il a dit compter sur un fort soutien pour le texte en préparation. Le niveau d’engagement des délégations en faveur du texte déterminera notre approche pour la suite, a-t-il annoncé.
M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a souligné l’importance que soit menée une enquête approfondie pour que les faits puissent être établis de manière incontestable. À cette fin, il a indiqué que son pays était prêt à donner tout son soutien tant aux efforts du Danemark et de l’Allemagne qu’à ceux ambitionnant que de tels incidents dangereux pour l’environnement et la santé des hommes ne se reproduisent pas.
Mme MONICA SOLEDAD SANCHEZ IZQUIERDO (Équateur) a attiré l’attention sur les répercussions des incidents Nord Stream 1 et 2 sur l’environnement marin et atmosphérique. Condamnant ces actes et appelant la communauté internationale à faire toute la lumière sur leurs causes, la représentante a demandé que les enquêtes diligentées par l’Allemagne et le Danemark dans le cadre du droit international soient préservées de toute ingérence disruptive qui pourrait en entraver la conduite et les résultats.
Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a souligné que le gaz méthane est 80% plus réchauffant que le dioxyde de carbone, et qu’en l’occurrence une dispersion de ce gaz dans la mer constitue un véritable désastre environnemental et une menace évidente pour la faune et la flore maritimes. Elle a pris note de l’ouverture d’enquêtes par un certain nombre de pays européens (Suède, Danemark et Allemagne) et des résultats des investigations préliminaires qui confirment des soupçons de sabotage du gazoduc Nord Stream 2. La représentante a condamné ces attaques injustifiables visant des infrastructures civiles. Elle a réitéré l’appel du Gabon en vue de l’ouverture d’une enquête internationale impartiale et indépendante, afin que les responsabilités soient clairement établies et que les auteurs répondent de leurs actes devant les juridictions compétentes.
M. THOMAS PATRICK PHIPPS (Royaume-Uni) a salué la lettre du Danemark, de la Suède et de l’Allemagne informant les États Membres de l’ONU que des enquêtes sont en cours. Le Royaume-Uni soutient pleinement ces enquêtes techniques menées par les autorités nationales compétentes et attend leurs conclusions, a-t-il ajouté, notant que le seul développement récent concernant Nord Stream porte sur une nouvelle série d’accusations par des médias contrôlés par l’État russe. Le représentant a pointé du doigt l’article d’un journaliste américain, qui ne cite qu’une seule source secrète et qui a été complètement démenti par d’autres sources. Le représentant n’a pas hésité à déclarer que la raison probable de l’urgence manifestée par la Russie aujourd’hui relève d’un désir désespéré de ce pays d’obscurcir la vérité un an après son invasion à grande échelle de l’Ukraine. C’est pourquoi il a considéré que l’initiative de la Russie aujourd’hui, comme ses appels à la création d’une commission d’enquête de l’ONU, ne sont rien d’autre qu’une tentative de plus de détourner l’attention de la communauté internationale de son agression continue en Ukraine.
M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a souligné que les explosions de l’année dernière ont eu des conséquences dévastatrices pour notre planète, conduisant à la pire fuite de gaz de méthane jamais enregistrée. Alors que nous travaillons ensemble pour prévenir et combattre les changements climatiques, de tels événements ne font que rendre nos efforts collectifs plus difficiles, a-t-il déclaré. Le délégué a appelé à des enquêtes crédibles, parallèlement à la nécessité de réduire les tensions. Il a souhaité que les enquêtes soient fondées sur la science et les faits, et non pas sur des postures politiques. Il est essentiel que nous envoyions un message fort et clair sur le fait que ce type d’acte ne peut être toléré, a-t-il plaidé.
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a souhaité, s’agissant des enquêtes diligentées par le Danemark, l’Allemagne et la Suède, qu’elles permettent de déterminer de manière concluante « toute la portée de l’incident ». Nous affirmons l’intérêt continu de la communauté internationale pour la question et demandons instamment que les processus d’enquête en cours s’efforcent de tenir les autorités et les opérateurs russes informés et que leur coopération soit recherchée si nécessaire, a ajouté le représentant. En outre, il a réitéré la position de son pays selon laquelle, conformément aux objectifs de la résolution 2341 (2017) du Conseil de sécurité, les infrastructures critiques, en particulier de nature transnationale, doivent être protégées et mises à l’abri de tout dommage en tant qu’ultime passerelle pour la coopération. Il a exhorté tous les acteurs à coopérer pour que les faits soient établis et que les auteurs des incidents soient tenus pour responsables de leurs actes dangereux pour l’environnement et les populations.
Mme ANDREA BARBARA BAUMANN-BRESOLIN (Suisse) s’est dite préoccupée par les dommages causés aux gazoducs Nord Stream 1 et 2, qui ont entraîné des fuites de gaz inquiétantes en septembre dernier. Elle a souligné que toutes les informations disponibles indiquent qu’il s’agit d’actes de sabotage. Elle a réitéré la position de principe de la Suisse qui condamne toute attaque contre les infrastructures critiques, comme les infrastructures énergétiques, et leurs conséquences sur l’approvisionnement de la population, sur l’économie et l’environnement. Il est important de nous en tenir aux faits et de soutenir tout effort crédible pour faire la lumière sur les explosions intervenues en septembre dernier, a-t-elle recommandé en mentionnant, à cet égard, la lettre transmise aujourd’hui par l’Allemagne, le Danemark et la Suède concernant les enquêtes en cours.
M. TAMAURA SHU (Japon), estimant que les ressources énergétiques, y compris le gaz naturel, sont essentielles à la vie des gens, a condamné toute forme de vandalisme contre les infrastructures essentielles, qu’il a qualifié d’acte inacceptable ayant un impact potentiel de vie ou de mort sur d’innombrables personnes. « Nous espérons que les enquêtes en cours de la Suède et du Danemark clarifieront la cause des incidents Nord Steam 1 et 2 et qu’à l’aune de leurs résultats, le Conseil pourra déterminer une position. » À cet égard, le représentant a appelé toutes les parties à coopérer pleinement aux enquêtes en cours et à fournir des informations crédibles de manière transparente.
M. JOHN KELLEY (États-Unis) a qualifié d’action délibérée les explosions des gazoducs Nord Stream. Selon lui, alors qu’approche le premier anniversaire de l’agression non provoquée de l’Ukraine par la Russie, ce pays essaie une nouvelle fois de détourner « notre attention de cet événement ». La Russie tente en quelque sorte de changer de sujet, utilisant l’enceinte du Conseil de sécurité pour amplifier des théories du complot, a poursuivi le représentant. Celui-ci a tranché: les accusations selon lesquelles les États-Unis seraient impliqués dans ce sabotage sont fausses. Il a ajouté que les pays qui enquêtent de manière approfondie, transparente et partiale sur les incidents le font par le biais de leurs institutions nationales, démontrant qu’en l’état ils n’ont pas besoin d’une enquête de l’ONU. Sur ce dernier point, il a rappelé que les États Membres se tournaient vers l’Organisation et les juridictions internationales quand ils ne pouvaient pas enquêter et établir des faits graves de manière impartiale. Le représentant a ensuite jugé que le projet de résolution russe qui implique les États Unis n’a d’autre but que de pousser les pays vers des explications prédéterminées par la Russie. En outre, il a estimé qu’en abusant de son statut de membre permanent pour utiliser le Conseil comme une plateforme de diffusion de sa désinformation, la Russie fait perdre son temps à cet organe essentiel de paix et de sécurité internationales. Dans les jours à venir, les États Membres voteront à l’Assemblée générale un texte réaffirmant l’importance de la Charte et appelant au règlement du conflit ukrainien dans le cadre de ce document fondateur de l’Organisation, a souligné en guise de conclusion le représentant américain.
M. ARIAN SPASSE (Albanie) a salué le fait que les enquêtes sont en cours, comme l’ont confirmé, par une lettre au Conseil de sécurité, l’Allemagne, le Danemark et la Suède. Il a donc dit « attendre avec impatience » les résultats de cette enquête. Dans ce contexte, nous ne voyons pas pourquoi il faut faire un doublon en diligentant une enquête parallèle, a—t-il dit. Le représentant a déclaré n’avoir rien entendu de nouveau au cours de la présente séance sur cette question, dénonçant le fait que le temps précieux du Conseil de sécurité soit ainsi gaspillé pour diffuser des informations de nature « complotiste ». Il a estimé que cette séance demandée par la Russie est une tentative de faire diversion à quelques jours du premier anniversaire de l’invasion de l’Ukraine. Aucun élément ne justifie ici la saisine du Conseil, a-t-il tranché en appelant tous les États Membres à voter en faveur du texte sur l’Ukraine qui sera présenté à l’Assemblée générale.
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a réaffirmé que la position brésilienne sur la question à l’examen reste la même que celle exprimée lors de la réunion convoquée peu après les événements, à savoir que toute réponse doit être basée sur des informations fiables et les résultats d’enquêtes impartiales. Nous demandons aux autres membres du Conseil de sécurité de procéder avec prudence face aux affirmations attribuables à une seule source anonyme, a-t-il souligné. Pour le représentant, compte tenu des implications politiques des incidents, il convient que prévalent la plus grande transparence dans la diffusion des faits établis et la retenue dans la propagation d’interprétations non prouvées. Ce n’est qu’ainsi qu’il nous sera possible de sortir du domaine de la spéculation, a-t-il considéré. Le représentant a également souligné que les conséquences néfastes pour l’environnement des explosions ayant entraîné des dommages sur les gazoducs Nord Stream 1 et 2 en mer Baltique doivent être soigneusement évaluées, le Brésil étant prêt à coopérer pour améliorer les mécanismes de surveillance, en vue d’empêcher la survenue d’incidents de ce type ayant un impact néfaste sur la vie marine et le niveau des émissions de gaz à effet de serre.
Mme ISIS MARIE DORIANE JARAUD-DARNAULT (France) a rappelé la préoccupation de son pays après les explosions sous-marines qui ont frappé les gazoducs Nord Stream 1 et 2. L’évaluation de ces événement par la France demeure inchangée, a-t-elle expliqué: ces évènements sont sans précédent et doivent être pris au sérieux, d’autant que les informations disponibles indiquent que ces explosions sont le résultat d’un acte délibéré et ont une origine humaine.
La représentante a rappelé que des enquêtes avaient été diligentées par l’Allemagne, le Danemark et la Suède et a dit n’avoir aucune raison de douter du sérieux de ces procédures actuellement en cours et qui doivent aller à leur terme. En revanche, elle a mis en doute le bien-fondé de la démarche russe, estimant « qu’aucune urgence, ni aucune information crédible nouvelle ne justifie l’organisation d’une telle réunion, en urgence, cinq mois après l’incident ».
S’étonnant du « zèle » avec lequel la Russie œuvre pour faire diligenter une enquête sur Nord Stream « alors qu’elle fait tout pour empêcher qu’une mission du Secrétariat soit déployée à Kiev pour inspecter les débris de drones iraniens qui s’y trouvent », la représentante a estimé qu’on assistait aujourd’hui à une « tentative éhontée de détourner l’attention de la communauté internationale alors que cela fera vendredi un an que la Russie a déclenché sa guerre d’agression contre l’Ukraine ».
M. ZHANG JUN (Chine) a relevé que les éléments en présence laissent croire que le sabotage des gazoducs russes est le fait de plusieurs acteurs étatiques. Il a rappelé qu’au cours de la réunion de septembre dernier, plusieurs orateurs avaient appelé à une enquête impartiale sur la question. Si nous n’établissons pas les auteurs de ces actes et les mobiles, alors nous enverrons un mauvais signal, a-t-il dit. Il a estimé que les constatations de l’enquête doivent être publiées, pour l’intérêt de tous les pays. Selon le représentant, l’ONU peut jouer un rôle à cet effet. Il a d’ailleurs salué le projet de résolution en préparation sur la question. Le délégué a ensuite pris note des informations détaillées récemment publiées sur la question. Selon lui, « esquiver la séance de ce jour » ne permettra nullement d’occulter la vérité. En outre, de son avis, l’incident Nord Stream invite à discuter du concept de sécurité globale, notamment l’initiative de sécurité mondiale proposée par le Président chinois afin d’assurer la sécurité de tous.
M. DARREN CAMILLERI (Malte) a rappelé que les informations disponibles relatives à l’endommagement des pipelines Nord Stream 1 et 2 en septembre dernier indiquent que ces fuites sont le résultat d’un acte délibéré et a jugé « dangereuse et irresponsable » toute perturbation délibérée des infrastructures énergétiques, en particulier au milieu d’une crise énergétique mondiale. « La militarisation de l’énergie et des infrastructures est inacceptable », a-t-il ajouté.
Le représentant a également rappelé que les fuites de méthane avaient causé des dommages à l’environnement, menacé de priver l’Europe d’une voie d’acheminement essentielle d’une ressource énergétique cruciale et accru la pression sur les marchés mondiaux de l’énergie déjà affectés par la guerre en Ukraine, avec des répercussions jusque sur les pays en développement du monde entier.
M. Camilleri a affirmé la solidarité de Malte avec le Danemark, la Suède et l’Allemagne et dit soutenir fermement les enquêtes en cours pour établir toute la vérité derrière les fuites. « Ne nous laissons pas distraire aujourd’hui par l’ampleur des dégâts que les attaques de la Russie ont causés en Ukraine, en particulier aux civils », a ajouté le représentant, qui a rappelé que les attaques dirigées contre les civils « et les objets indispensables à la survie de la population civile » sont interdites par le droit international humanitaire. Malte les condamne dans les termes les plus forts possibles, a-t-il conclu.