9236e séance – après-midi
CS/15167

Le Conseil de sécurité s’alarme d’actions du Gouvernement israélien susceptibles de perturber le statu quo autour des Lieux saints de Jérusalem 

À la demande initiale de la Chine et des Émirats arabes unis, appuyée ensuite par la France et Malte, le Conseil de sécurité s’est réuni cet après-midi pour une séance d’information publique consacrée à la situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne, afin de discuter de récents événements survenus dans les Lieux saints de Jérusalem, des faits qualifiés de préoccupants par le Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique au Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix (DPPA). 

Le 3 janvier, a relaté M. Khaled Khiari dans son exposé, le nouveau Ministre de la sécurité nationale d’Israël, M. Itamar Ben Gvir, s’est rendu, entouré d’un important dispositif de sécurité, dans le périmètre de l’esplanade des Mosquées, une première pour un ministre israélien depuis 2017.  Bien que cette visite n’ait pas été accompagnée de violences, il l’a qualifiée de « particulièrement incendiaire », compte tenu des plaidoyers passés de M. Ben Gvir en faveur de modifications du statu quo. 

« De nombreuses personnalités, dans la région et au sein de la communauté internationale, y ont vu une provocation susceptible de déclencher de nouvelles effusions de sang; beaucoup ont également mis en garde contre toute modification du statu quo dans les Lieux saints », a précisé le haut fonctionnaire, selon lequel le moindre incident dans les Lieux saints pourrait déclencher des violences dans tout le Territoire palestinien occupé, en Israël et ailleurs dans la région. 

En tant que gardienne des lieux saints islamiques et chrétiens de Jérusalem, sur lesquels elle exerce une tutelle, la Jordanie a condamné l’incursion du Ministre israélien, dénonçant une violation du caractère sacré de l’esplanade des Mosquées mais aussi du statu quo historique.  Rappelant que c’est au royaume hachémite qu’incombe la gestion des entrées sur le site, la délégation jordanienne a sommé Israël, Puissance occupante, de respecter ses engagements au titre du droit international.   

Les délégations dans leur ensemble ont dit craindre que l’action du Gouvernement israélien n’entraîne une reprise du cycle de violence à grande échelle, dans un contexte déjà très tendu, marqué notamment par un nombre record de décès de civils palestiniens l’an dernier et une multiplication des attentats meurtriers en Israël.  La Fédération de Russie a rappelé qu’en 2000, une visite au même endroit de l’ancien Premier Ministre israélien, Ariel Sharon, avait déclenché une intifada.  Compte tenu de la fragilité de la situation, il importe que toutes les parties concernées fassent preuve d’un maximum de retenue et s’abstiennent de toute action ou rhétorique incendiaire, a plaidé le Japon. 

Toutes les délégations sans exception ont appelé au maintien du statu quo historique, en insistant sur le rôle joué par la Jordanie dans cet équilibre délicat de gestion des Lieux saints, un rôle qui, comme l’a relevé le Brésil, est prévu par les accords de 1994 entre Israël et le royaume jordanien.  Ce statu quo historique et juridique est fondamental pour la coexistence pacifique des peuples israéliens et palestiniens, a insisté le Gabon. 

Face à ces inquiétudes unanimes, Israël a pris le parti de l’étonnement, se disant abasourdi que le Conseil tienne une réunion d’information pour un « non-événement », un motif aussi « trivial » et « mineur » que la visite « pacifique » d’un ministre israélien dans un Lieu saint de Jérusalem.  Qualifiant cette séance d’« insulte à l’intelligence », la délégation israélienne a rejeté la responsabilité de la discorde sur l’Autorité palestinienne, qu’elle a accusée d’agressivité, d’intolérance et d’antisémitisme.  « Tout juif a le droit de se rendre sur le mont du Temple, et cela vaut pour le Ministre israélien chargé de la sécurité de ces lieux », a-t-elle martelé. 

En retour, l’Observateur permanent de l’État de Palestine a accusé Israël de mépriser le caractère sacré de la vie palestinienne et la sainteté de l’esplanade des Mosquées.  « L’histoire montre que l’entêtement d’Israël dans cette voie ne pousse jamais à se rendre mais à se soulever », a averti l’Observateur permanent de l’État de Palestine, selon lequel Israël n’a aucun droit sur ce lieu saint qui fait partie intégrante du Territoire palestinien occupé. 

Si plusieurs membres du Conseil, comme le Ghana ou Malte, ont pris note d’une clarification énoncée par le Gouvernement israélien, notamment l’engagement du Premier Ministre israélien, M. Benyamin Netanyahu, de faire respecter le statu quo, la France et les États-Unis ont souhaité que cette prise de position soit suivie d’effets sur le terrain. 

Dans un quasi-consensus, les délégations ont réaffirmé leur soutien à la recherche d’une solution politique, pacifique, définitive et juste, dans le cadre du droit international, afin de réaliser la solution des deux États, la Palestine et Israël, sur la base des frontières d’avant 1967.  La Chine a ainsi enjoint la communauté internationale à pousser les parties à reprendre des pourparlers directs.  Le retour à des négociations efficaces exige cependant une volonté politique, du courage et une vision à long terme de la part des dirigeants des deux camps, a souligné l’Équateur, en formant le vœu que « dans un avenir pas trop lointain », cette question ne soit plus à l’ordre du jour du Conseil. 

Rappelant le coût « très élevé » des mesures unilatérales prises au cours du long conflit israélo-palestinien et leurs effets délétères pour la solution des deux États, les Émirats arabes unis ont, pour leur part, exhorté le Conseil à adopter une position unifiée contre toute action susceptible de provoquer une nouvelle escalade de la violence dans la région. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. KHALED KHIARI, Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique au Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix (DPPA), a tout d’abord informé le Conseil que le Coordonateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. Tor Wennesland, fera son exposé régulier et complet sur la situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne, le 18 janvier.  Il a ensuite fait part de sa préoccupation quant aux événements de la semaine dernière à Jérusalem et aux tensions et violences qui se poursuivent en Cisjordanie occupée.  Le 3 janvier, a-t-il rappelé, le nouveau Ministre de la sécurité nationale d’Israël, M. Itamar Ben-Gvir, s’est rendu, entouré d’un important dispositif de sécurité, dans les Lieux saints de Jérusalem, une première pour un ministre israélien depuis 2017.  Bien que ladite visite n’ait pas été accompagnée de violences, elle est considérée comme « particulièrement incendiaire », étant donné les plaidoyers passés de M. Ben-Gvir en faveur de modifications du statu quo, a-t-il souligné, ajoutant que cette action a été vivement condamnée par l’Autorité palestinienne.  De nombreuses personnalités, dans la région et au sein de la communauté internationale, y ont vu une provocation susceptible de déclencher de nouvelles effusions de sang; beaucoup ont également mis en garde contre toute modification du statu quo dans les Lieux saints, a encore indiqué le haut fonctionnaire. 

Le Bureau du Premier Ministre israélien et d’autres hauts responsables israéliens ont assuré que le Gouvernement s’engageait à respecter le statu quo et que la visite ne représentait pas une « déviation » de celui-ci, a poursuivi M. Khiari.  Toutefois, a-t-il averti, la situation dans les Lieux saints de Jérusalem demeure profondément fragile: le moindre incident pourrait déclencher des violences dans tout le Territoire palestinien occupé, en Israël et ailleurs dans la région.  Compte tenu de cette réalité, le Sous-Secrétaire général a réitéré l’appel lancé à toutes les parties par le Secrétaire général pour qu’elles s’abstiennent de prendre des mesures susceptibles d’aggraver les tensions à l’intérieur et autour des Lieux saints et respectent le statu quo ainsi que le rôle particulier du royaume hachémite de Jordanie dans cet équilibre. 

L’ONU est en contact étroit avec les parties concernées afin de désamorcer la situation, a précisé M. Khiari, selon lequel ces échanges se poursuivront dans les jours et les semaines à venir.  En ce moment sensible, il a encouragé tout effort visant à faire baisser les tensions et rejeté « les provocations, les mesures incendiaires, les actions unilatérales et les menaces de violence ». 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a fermement condamné l’intrusion sur le site de la mosquée Al-Aqsa d’un ministre israélien sous protection policière, jugeant ces actions provocatrices.  Il a également condamné le vandalisme du cimetière chrétien du mont du Temple.  Les personnes responsables de la profanation de tombes et de sites historiques et religieux doivent être tenues pour responsables de leurs actes, de nature à encourager d’autres violations, s’est-il emporté.

C’est pourquoi il a réitéré sa position ferme sur la nécessité d’assurer une protection totale à la mosquée Al-Aqsa et de mettre fin à toutes les violations qui portent atteinte aux sensibilités de millions de musulmans dans le monde.  Il a de même souligné la nécessité de respecter le rôle de gardien des Lieux saints du Royaume hachémite de Jordanie, conformément au droit international et au statu quo historique. 

Les événements de l’an dernier et la longue histoire de ce conflit révèlent que le coût des mesures unilatérales est très élevé, car elles sont une cause première de la violence et de l’instabilité, a estimé le représentant.  Elles sapent également les efforts déployés pour trouver une solution juste et durable au conflit israélo-palestinien et parvenir à la solution des deux États sur la base des résolutions pertinentes des Nations Unies.  C’est pourquoi le représentant a exhorté le Conseil de sécurité à adopter une position unifiée contre toute action susceptible d’attiser les tensions ou d’entraîner une escalade dans la région.

M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que la visite de représentants du Gouvernement israélien sur le périmètre de la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem n’est « clairement pas la meilleure manière de débuter l’année ».  Cet acte a en effet engendré une fragilité de la situation sur le terrain, a-t-il déploré, avant d’appeler Israël à mettre fin à toute provocation et toute démarche pouvant conduire à une nouvelle détérioration.  Le représentant a rappelé que les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité condamnent toute mesure visant à modifier le statu quo, y compris à Jérusalem-Est.  Il a dit espérer que les engagements des dirigeants israéliens en faveur de la préservation du statu quo seront respectés.  Il a en outre appelé la communauté internationale à pousser les deux parties à reprendre les pourparlers en faveur de la solution des deux États.  La Chine soutient la mise en place d’un État palestinien souverain, sur les frontières d’avant 1967 et avec Jérusalem-Est comme capitale, a-t-il conclu. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a défendu la solution des deux États, avant de dénoncer toute initiative unilatérale de nature à exacerber les tensions et à saper ladite solution.  Il a plaidé pour le maintien du statu quo historique sur les Lieux saints de Jérusalem et rappelé le rôle central de la Jordanie.  Il est crucial que chaque partie fasse preuve de retenue, a déclaré le délégué, en dénonçant toute démarche unilatérale s’écartant dudit statu quo.  Il a pris note de l’engagement du Premier Ministre israélien à faire respecter ce statu quo, avant de souhaiter que cette position soit suivie d’effets en pratique.  Nous devons faire en sorte que la solution des deux États demeure une réelle possibilité, a conclu le délégué.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a souligné la nécessité d’éviter toute démarche venant saper l’atmosphère favorable à une quête de paix.  Les Accords d’Oslo semblent loin, et les espoirs qu’ils ont suscités semblent perdus, a-t-il déploré, avant de dire qu’il faut préserver la paix et le statu quo des Lieux saints et de condamner la rhétorique et les actes de nature belliqueuse.  Prenant note des propos du Gouvernement israélien visant à rassurer la communauté internationale quant à sa volonté de préserver le statu quo, le représentant n’en a pas moins relevé que la situation actuelle en dit long sur la nécessité de recréer un horizon politique dès que possible, ainsi que sur la nécessité d’un engagement sincère en faveur d’une solution à deux États basée sur l’instauration d’un État de Palestine indépendant, selon le tracé des frontières d’avant 1967, et avec Jérusalem-Est pour capitale.  Toute autre voie serait « dangereuse », « non viable », et affaiblirait les espoirs de paix.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a jugé « très préoccupante » la visite d’un ministre israélien sur le site de la mosquée d’Al-Aqsa à Jérusalem.  Pour le représentant, cet incident ne peut être perçu autrement que comme un pendant de ce qui s’est produit en 2000, lors de la visite dans les Lieux saints, sous haute protection policière, de l’ancien Premier Ministre israélien Ariel Sharon, qui avait déclenché une intifada et emporté la vie de milliers de personnes des deux côtés.  Le délégué a estimé qu’il est « inacceptable » de porter atteinte au statu quo entourant les Lieux saints qui accueillent les trois grandes religions monothéistes.  Il a tenu à rappeler, à cet égard, le rôle essentiel joué par la Jordanie, qui est historiquement responsable de la protection de ce statu quo.  Les désaccords autour de Jérusalem restent parmi les principales sources d’instabilité pour le conflit israélo-palestinien mais également pour tout le Proche-Orient, a-t-il averti, appelant les deux parties à faire preuve de retenue et à renoncer à toute provocation. 

Il s’est par ailleurs déclaré déçu du fait que « nos collègues américains du Quartet » ne veuillent pas coopérer dans le cadre du règlement de la question palestinienne et essaient d’imposer des démarches à la Palestine.  Pour sa part, a-t-il dit, la Fédération de Russie continuera de déployer davantage d’efforts pour mettre en place un consensus international et coordonner des actions avec les Palestiniens et les Israéliens.  Un dialogue direct doit avoir lieu, avec une contribution vigoureuse du Quartet, a-t-il conclu en appelant le Conseil à aborder avec le plus de sérieux la relance du processus de paix. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a souligné que le respect du statu quo historique et juridique des Lieux saints de Jérusalem est fondamental pour la coexistence pacifique des peuples israéliens et palestiniens.  C’est un consensus essentiel qu’aucune des parties ne doit remettre en cause au risque de compromettre les chances du dialogue dans le processus de paix au Moyen-Orient, a-t-il ajouté.  Le délégué a aussi condamné les récentes profanations de tombes dans le cimetière chrétien historique de Jérusalem qui participent à cette dynamique dangereuse de violations des sites et de l’identité religieuse des différentes communautés.  Selon lui, il est fondamental que la communauté internationale puisse veiller à ce que la crise israélo-palestinienne ne porte pas en elle les germes d’un antagonisme entre les trois religions monothéistes.  Il a rappelé que l’année 2022 a été particulièrement meurtrière dans les territoires occupés et que nous devons empêcher que ce tragique scénario ne se reproduise en 2023.  C’est pourquoi le représentant a appelé l’ensemble des parties à reprendre les négociations de bonne foi, en vue du rétablissement de la confiance.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) s’est dite préoccupée par les récents événements qui se sont déroulés dans les Lieux saints et qui sont de nature à exacerber les tensions, la priorité devant être le retour au calme.  Il convient d’éviter toute action unilatérale qui pourrait encore aggraver la volatilité du contexte actuel, a tranché la déléguée.  Elle a réitéré son attachement au respect du statu quo historique sur les Lieux saints de Jérusalem, toute violation étant inacceptable.  La déléguée a pris note de l’engagement du Premier Ministre israélien à faire respecter ce statu quo, exprimant le souhait que cette prise de position soit suivie d’effets dans la pratique.  Elle a dénoncé toutes les tentatives visant à s’emparer d’églises chrétiennes.  C’est une menace sérieuse à la coexistence pacifique des trois monothéismes à Jérusalem, a conclu la déléguée, avant d’apporter son soutien à la solution à deux États.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est dit très préoccupé par l’incursion du Ministre israélien sur l’esplanade des Mosquées mardi dernier.  Cette action marque selon lui une évolution très inquiétante de la situation et des tensions, dans une région marquée par une extrême volatilité.  Il a rappelé l’importance de respecter le rôle de la Jordanie dans le maintien du statu quo autour de la gestion des Lieux saints, comme prévu par les accords de 1994 entre Israël et la Jordanie.  La situation sape la recherche d’une solution juste et durable concernant la question palestinienne, a affirmé le représentant, qui s’est opposé à toute action menaçant l’équilibre des Lieux saints et le statu quo historique.  Les actions du Conseil doivent inviter les parties à favoriser la stabilité, la tolérance et la compréhension mutuelle, a-t-il insisté.  Les parties prenantes doivent faire preuve de retenue, éviter les actions unilatérales et les déclarations incendiaires, qui fragiliseraient encore davantage la confiance nécessaire à la reprise du dialogue, a-t-il déclaré en conclusion.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a déploré à son tour la récente visite du Ministre israélien de la sécurité nationale sur le site sacré de la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, jugeant que cet acte est de nature à provoquer un regain de tensions au Moyen-Orient.  Tout en appelant à la tolérance religieuse et à la coexistence pacifique, le représentant s’est dit préoccupé par les affrontements violents qui ont précédé et suivi la visite du Ministre israélien.  Dans ce contexte, il a salué le fait que le Premier Ministre et le Ministre des affaires étrangères d’Israël aient clarifié la position du Gouvernement israélien, à savoir qu’il n’y a aucun changement de politique concernant les Lieux saints de Jérusalem.  Il s’agit là d’un geste important de la part du nouveau Gouvernement israélien, a-t-il relevé, estimant crucial de maintenir le statu quo.  En conclusion, il a assuré que le Ghana continuera d’encourager les parties à rechercher la voie difficile de la paix par un dialogue renouvelé et constructif.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a insisté sur la nécessité de préserver le statu quo historique sur le mont du Temple, y compris de respecter le rôle de gardien des Lieux saints endossé par la Jordanie.  Elle a appelé toutes les parties à démontrer dans la pratique leur engagement à cet égard.  Dans un contexte déjà très tendu, notamment en raison du nombre record de décès de civils palestiniens l’année dernière et des attentats meurtriers en Israël, la visite du nouveau Ministre israélien de la sécurité nationale sur l’esplanade des Mosquées mardi dernier est préoccupante, a—t-elle relevé.  La déléguée a donc appelé les dirigeants de toutes les parties à éviter de recourir à des provocations ou des propos incendiaires susceptibles d’attiser le conflit et de provoquer davantage de violence.  Elle a encouragé les parties à se pencher sur les causes profondes du conflit et à restaurer un horizon politique en vue d’une solution négociée des deux États. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) s’est dit alarmé par la possibilité d’une nouvelle escalade du conflit israélo-palestinien.  Appelant toutes les parties au conflit à respecter les principes du droit international humanitaire, il a condamné les actions qui sapent l’espoir d’un règlement négocié sur la base des résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale en faveur d’une solution à deux États.  Il a également fait valoir que toute tentative visant à modifier le caractère et le statu quo des Lieux saints relève de la Cour internationale de Justice.  À cette aune, le représentant a réitéré la position de son pays en faveur du droit à l’autodétermination du peuple palestinien et du droit à l’existence de l’État d’Israël, deux peuples vivant côte à côte dans deux États indépendants et souverains, conformément à la résolution 242 (1967) du Conseil de sécurité.  Enfin, après avoir réaffirmé qu’un processus politique légitime est la seule voie à suivre pour résoudre ce conflit prolongé, il a exhorté le Conseil à redoubler d’efforts pour parvenir à une paix durable dans la région. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a réitéré l’appel aux parties à faire preuve de calme et de retenue et à s’abstenir de tous acte, décision ou mesure unilatérale susceptibles d’exacerber le conflit.  Il a demandé en particulier le respect du statu quo des lieux saints de Jérusalem et du rôle de la Jordanie en tant que gardienne de ces sites.  Le représentant a réaffirmé le soutien de son pays à la recherche d’une solution politique, pacifique, définitive et juste pour les parties, dans le cadre du droit international, afin de réaliser la solution à deux États, la Palestine et Israël, sur la base des frontières d’avant 1967.  Le retour à des négociations efficaces exige une volonté politique, du courage et une vision à long terme de la part des dirigeants, a-t-il recommandé, formant le vœu que dans un avenir pas trop lointain, cette question ne fasse plus partie de l’ordre du jour du Conseil.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a rappelé que les Lieux saints de Jérusalem, y compris la mosquée Al-Aqsa, revêtent une importance particulière pour de nombreuses personnes dans le monde, notamment pour les trois religions abrahamiques.  Dans ce contexte, a-t-elle affirmé, la visite du Ministre israélien de la sécurité nationale est susceptible d’accroître les tensions.  Réitérant le ferme appui du Royaume-Uni au statu quo historique qui régit les Lieux saints de Jérusalem, la représentante a salué le rôle crucial joué par la Jordanie en tant que gardienne de ces sites sacrés.  Elle a insisté sur l’importance de la coopération avec les autorités jordaniennes à cet égard, ajoutant que son pays s’est engagé à travailler avec toutes les parties pour maintenir ce statu quo.  Toutes les parties doivent éviter les actions susceptibles de saper la cause de la paix ou cherchant unilatéralement à modifier le statu quo, a-t-elle insisté.  La position britannique sur le statut de Jérusalem est claire depuis longtemps, à savoir qu’il doit être déterminé dans le cadre d’un règlement négocié entre Israéliens et Palestiniens, en garantissant que Jérusalem soit la capitale partagée des États israélien et palestinien, avec un accès et des droits religieux respectés par tous, a souligné la déléguée.  Selon elle, la solution des deux États, fondée sur les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale partagée, est le seul moyen d’assurer une paix durable entre les parties. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a exprimé sa préoccupation après la récente visite du Ministre israélien de la sécurité nationale sur l’esplanade des Mosquées.  La France, qui exerce un rôle historique de protection de plusieurs communautés religieuses à Jérusalem, réitère son attachement au respect du statu quo historique autour des lieux saints de Jérusalem, a déclaré le délégué, avant de souligner l’importance du rôle spécifique de la Jordanie à cet égard.  Il a pris note de l’engagement du Premier Ministre israélien à faire respecter ce statu quo, avant de souhaiter que cette position soit suivie d’effets sur le terrain.  « Ce type d’initiative ne fait que renforcer la défiance entre les parties et ne sert pas la paix », a ajouté le délégué.  La France rappelle par ailleurs l’urgence d’un arrêt de la politique de colonisation, qui met en danger la mise en œuvre d’une solution à deux États, a-t-il conclu.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a relevé que compte tenu d’une situation déjà tendue, il est crucial que toutes les parties concernées fassent preuve d’un maximum de retenue et s’abstiennent de toute action ou rhétorique inflammatoire qui pourrait encore aggraver les tensions, y compris toute tentative de modifier le statu quo historique sur les Lieux saints de Jérusalem.  Le délégué a exprimé également sa vive préoccupation que le nouveau Gouvernement israélien ait annoncé des lignes directrices politiques « pour faire avancer et développer des colonies dans toutes les parties de la terre d’Israël », ce qui semble comprendre les territoires occupés.  L’expansion des colonies est une violation évidente du droit international et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, et le représentant a donc instamment demandé à Israël de cesser immédiatement ces actions qui compromettent la réalisation d’une solution à deux États, a—t-il dit.  Il a enfin exhorté les parties à revenir sur la voie du dialogue et à se réengager sérieusement en faveur de la réalisation de la solution des deux États, en s’appuyant sur les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et les paramètres convenus au niveau international.

« Quelles lignes rouges doit encore franchir Israël pour que le Conseil de sécurité finisse par dire que c’est assez et agisse en conséquence? », a demandé M. RIYAD MANSOUR, Observateur permanent de l’État de Palestine.  Il a accusé ce pays de mépriser le caractère sacré de la vie palestinienne et la sainteté de l’esplanade des Mosquées.  Il a déclaré que les Palestiniens commencent à perdre patience, tout en relevant que la modération dont ils font encore preuve ne doit pas être prise comme un signe de faiblesse.  « L’histoire montre que l’entêtement d’Israël dans cette voie ne pousse jamais à se rendre mais à se soulever ».  Le Ministre Ben-Gvir est connu pour son racisme et pour son extrémisme, a dénoncé M. Mansour, en accusant ce responsable gouvernemental israélien de vouloir mettre un terme au statu quo autour des Lieux saints.  Il a noté à cet égard que, loin d’avoir condamné les agissements de ce dernier, le Gouvernement israélien les a au contraire validés, en dépit du tollé international.  « L’argumentation israélienne est la suivante: cela s’est déjà produit, ce n’est pas si sérieux ».  Il a rappelé que le Ministre de la sécurité publique, M. Gilad Erdan, s’était également rendu sur l’esplanade des Mosquées pour les mêmes raisons qui animent M. Ben-Gvir, à savoir la modification dudit statu quo. 

Le représentant a prévenu que ceux qui recherchent à s’emparer de l’esplanade des Mosquées « n’y parviendront pas ».  Il a pointé la responsabilité de ce Conseil et de tous les États à faire respecter le droit international et à défendre le statu quo historique autour des Lieux saints.  Ils doivent arrêter Israël, mais ne vous méprenez-pas, s’ils échouent, notre peuple le fera, a-t-il assuré.  Affirmant que l’esplanade des Mosquées fait partie intégrante du Territoire palestinien occupé, l’Observateur permanent a fait valoir qu’Israël n’a aucun droit sur ce lieu saint.  Il a espéré qu’aucun État ne risquera sa crédibilité et ses valeurs en couvrant les agissements du Gouvernement israélien, avant d’accuser ce dernier de mettre en pratique un véritable « apartheid », comme cela se faisait en Afrique du Sud.  Enfin, le délégué a averti de « graves conséquences » si le statu quo venait à être modifié. 

S’exprimant ensuite en tant que Président du Groupe des États arabes pour le mois de janvier, M. RIYAD MANSOUR s’est félicité des condamnations, formulées par de nombreuses délégations, de l’approche belliqueuse d’Israël.  Le Groupe, a-t-il dit, réaffirme qu’il est nécessaire de déployer des efforts pour sécuriser le statu quo des Lieux saints.  Appelant à condamner les tentatives d’Israël de changer le statu quo, le Président du Groupe a appelé le Conseil de sécurité à se montrer à la hauteur en appliquant les résolutions destinées à mettre fin aux « provocations » et aux « mesures unilatérales illégitimes » commises par Israël.  Prônant une solution à deux États basée sur l’instauration d’un État de Palestine indépendant, selon le tracé des frontières d’avant 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale, il a exhorté le Conseil à agir rapidement pour faire pression sur Israël afin que la stabilité et la paix surviennent.

M.  GILAD MENASHE ERDAN (Israël) s’est dit abasourdi par la tenue de la réunion d’aujourd’hui, pour un événement aussi « trivial » et « mineur », que la visite « pacifique » du Ministre israélien de la sécurité nationale, un « non-événement absolu », selon lui.  Il a dénoncé une « campagne néfaste » des Palestiniens cherchant à briser tout lien historique et religieux entre le mont du Temple et le peuple juif, et à faire renommer ce lieu uniquement par son nom musulman.  Il s’est aussi indigné des « menaces » proférées par l’Observateur permanent palestinien à son encontre et ses tentatives de réécrire l’histoire. 

Revenant sur l’historique de la mise en place du statu quo, qu’il a qualifié de « compromis majeur », il a noté qu’avec le temps, le peuple juif a renoncé à son droit à la prière sur le mont du Temple.  Seuls les musulmans peuvent prier en ces lieux; chrétiens et juifs doivent se contenter d’une simple visite, en entrant par une entrée spécifique, selon des créneaux horaires limités, lors de visites en groupe et accompagnés de gardes, a-t-il déploré.  Parallèlement, depuis 1967, pas moins de trois mosquées ont ouvert leurs portes sur le mont du Temple.  « S’agit-il d’une tentative par Israël de modifier le statu quo, ou l’inverse? », s’est-il interrogé.  « Tout juif a le droit de se rendre sur le mont du Temple, et cela vaut pour le Ministre israélien chargé de la sécurité de ces lieux ».  Le fait que cette réunion se tienne est une insulte à l’intelligence, a-t-il ensuite asséné.  L’Autorité palestinienne « terroriste » privilégie la violence à l’intolérance, a renchéri le représentant, accusant cette dernière d’antisémitisme.  Selon lui, le statu quo est enfreint par l’Autorité palestinienne et c’est pourtant Israël que l’on blâme.  Peu importe qui se rend sur le mont du Temple: seule la religion de l’individu compte en fin de compte, a martelé le représentant, qui a dénoncé là encore une marque d’antisémitisme.  La réunion d’aujourd’hui est une « perte de temps » et même une façon de légitimer les mensonges « empoisonnés », « perfides », de l’Autorité palestinienne, a-t-il conclu en répétant, coiffé d’une kippa, que le mont du Temple restera ouvert à tous les juifs. 

M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a condamné dans les termes les plus fermes la récente incursion du Ministre israélien de la sécurité nationale sur l’esplanade des Mosquées Al-Aqsa sous la protection des forces d’occupation israéliennes.  Cette incursion est une violation du caractère sacré du site et un acte regrettable, a-t-il dénoncé.  Il s’agit aussi d’une violation du droit international et du statu quo historique, a insisté le représentant.  Il a fait part de sa crainte de l’exacerbation des tensions, exhortant à cesser à tout prix ce genre de provocation.

Il a réaffirmé, dans ce contexte, la position de son pays et rejeté toute mesure visant à modifier ou altérer le statu quo historique.  De fait, a insisté le représentant, la situation qui prévalait avant l’an 2 000 doit être réinstaurée.  L’esplanade des Mosquées qui s’étale sur quelque 144 hectares est un lieu sacré pour les musulmans.  En outre, l’Administration jordanienne est la seule ayant le droit de préserver ces lieux.  Elle en a la tutelle et c’est aussi à la Jordanie qu’incombe la gestion des entrées sur le site.  Israël, Puissance occupante, doit donc respecter ses engagements au titre du droit international et du droit international humanitaire, a encore demandé le délégué. 

Répondant ensuite à son homologue israélien qui vient, a-t-il dit, de « proférer un mensonge », en accusant la Jordanie d’avoir occupé la Cisjordanie et Jérusalem-Est, il a déclaré que ces allégations étaient fausses, soulignant que c’est dans une perspective d’unification des rives droite et gauche du Jourdain dans les années 50 que la Jordanie « a voulu faire prévaloir le droit à l’autodétermination de la Palestine ».

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