Non-alignés ou pro-Russes, les tenants d’un « nouvel ordre mondial », exposent leurs visions divergentes à l'Assemblée générale
Au cinquième jour du débat général, marqué notamment par le discours du Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, nombre des intervenants ont présenté devant l’Assemblée générale leurs perceptions et leurs souhaits quant à la gestation d’un nouvel ordre mondial. Peu de dirigeants occidentaux s’étant exprimés aujourd’hui, les positions se sont distribuées entre tenants d’une analyse proche de celle de la Fédération de Russie et défenseurs du non-alignement, tous étant d’accord pour juger l’ordre actuel injuste et condamné.
« Un nouvel ordre mondial est en train de naître sous nos yeux », a ainsi affirmé le Ministre russe, en évoquant une lutte entre une majorité d’États qui défendent une diversité civilisationnelle et une répartition plus équitable des richesses et une poignée d’autres qui « utilisent des méthodes néocoloniales d’assujettissement pour maintenir leur domination ». « Ils font tout pour empêcher la formation d’un ordre mondial véritablement multipolaire et juste », a lancé M. Sergey Lavrov, qui a accusé les États-Unis et le « collectif occidental qui leur est subordonné » de mépriser le reste du monde, de multiplier les promesses et de contracter des obligations contraignantes pour s’y soustraire ensuite et de générer des conflits qui entravent la réalisation d’objectifs communs.
M. Lavrov a pourtant jugé le processus « inexorable », mettant particulièrement en avant le rôle des BRICS et « d’autres associations qui offrent aux pays du Sud des opportunités de développement commun et défendent la place qui leur revient dans l’architecture multipolaire objectivement émergente ». Pour la première fois peut-être depuis la création de l’ONU en 1945, une véritable démocratisation des affaires mondiales existe, s’est-il félicité, y voyant une source d’optimisme pour tous ceux qui croient en la suprématie du droit international et souhaitent la renaissance de l’ONU en tant qu’organe central de coordination de la politique mondiale.
Si le monde actuel va si mal, c’est, pour Djibouti, en raison d’une lente érosion de la confiance mutuelle, attribuée à une compétition géopolitique récemment renforcée, mais aussi à une « résistance implacable au changement » des institutions mondiales créées après 1945 et à une inégalité « qui se creuse et se fossilise ». « Depuis les dures tranchées de la périphérie », le Premier Ministre de Saint-Vincent-et-les Grenadines a quant à lui « posé trois questions obsédantes: Quoi de neuf? Quel monde? Et qui donne les ordres? »
« Comme en 1955, nous nous trouvons aujourd’hui à un carrefour stratégique », a estimé la Cheffe de la diplomatie de l’Indonésie, évoquant les principes de la Conférence de Bandung, fondés sur la solidarité mondiale et la responsabilité collective comme réponses au déficit de confiance et aux inégalités mondiales. Son homologue du Mexique a appelé à un changement de paradigme de développement pour « redistribuer le pouvoir et la richesse et combler les écarts inacceptables entre les riches et les pauvres et entre les pays ». Comme plusieurs autres intervenants, il a aussi préconisé une réforme en profondeur de l’architecture financière internationale pour « renforcer la solidarité mondiale et donner une voix à tous les peuples du Sud ». Pour sa part, M. Lavrov a appelé à dépolitiser le G20 pour lui « permettre de faire ce pour quoi il a été créé »: élaborer des mesures généralement acceptables de gestion de l’économie et des finances mondiales. Comme lui, les responsables de plusieurs pays, dont le Bélarus, Saint-Kitts-et-Nevis ou le Venezuela, ont demandé la suppression des régimes de sanctions unilatérales, jugés incompatibles avec la réalisation des objectifs de développement durable dans les pays du Sud.
Certains pays ont prôné des changements radicaux, comme l’Érythrée, qui a souhaité « un bouleversement complet » de l’architecture de gouvernance mondiale, supposant de profondes réformes de l’ONU. Le Conseil de sécurité a été particulièrement visé, de nombreux pays demandant une meilleure représentation des pays du Sud.
Beaucoup ont surtout souhaité une plus grande coopération pour résoudre les grands défis mondiaux. Plusieurs exemples positifs ont été cités, en particulier l’adoption récente du traité sur la biodiversité marine (BBNJ), saluée aussi bien par le Samoa que la Nouvelle-Zélande ou l’Islande. Mais là aussi, l’Occident a été sommé de respecter ses engagements, en particulier dans le domaine climatique. Le Samoa, l’Égypte et Djibouti ont ainsi souhaité que la COP28, en fin d’année, permette de rendre opérationnel le plus rapidement possible le fonds pour les pertes et les préjudices décidé il y a un an à Charm el-Cheikh.
Parmi les autres interventions du jour figuraient celles des Ministres des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie, au lendemain de l’offensive du premier au Haut-Karabakh. Réaffirmant les positions exprimées deux jours plus tôt devant le Conseil de sécurité, l’Arménie a accusé l’Azerbaïdjan de nettoyage ethnique dans la région de ce pays à population arménienne et de chercher à étendre le conflit à son propre territoire. L’Azerbaïdjan a défendu une opération antiterroriste limitée et d’ailleurs achevée, ajoutant que la population du Haut-Karabakh bénéficierait désormais des mêmes droits et protection que le reste de la population du pays.
Par ailleurs, le Chef de la diplomatie du Mali a dit s’exprimer au nom du Président de la transition de son pays, du peuple malien et du « Chef d’État du Niger », M. Abdourahmane Tiani, arrivé au pouvoir par le coup d’État du 26 juillet, « empêché de s’exprimer » à la tribune de l’Assemblée générale.
L’Assemblée générale reprendra et conclura son débat général mardi 26 septembre, à partir de 9 heures.
SUITE DU DÉBAT GÉNÉRAL
Déclarations
M. RALPH E. GONSALVES, Premier Ministre de Saint-Vincent-et-les Grenadines, a brossé un sombre tableau de la situation mondiale, rappelant que les cibles essentielles des objectifs du développement durable (ODD) ne seraient pas atteintes d’ici à 2030 et que la lutte contre les changements climatiques était « en panne », enregistrant même des reculs dans certains domaines, avec des conséquences pour l’humanité entière, notamment dans les pays les plus vulnérables. Le Premier Ministre a dénoncé des conflits « absurdes », s’inquiétant de la situation en Ukraine, où « les principaux adversaires -l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et la Fédération Russie- pourraient, sans le vouloir, ouvrir les portes d’une apocalypse nucléaire ». Il a fustigé le refus des anciennes puissances coloniales de répondre aux exigences de réparation, ainsi que celui des plus grands émetteurs de carbone de fournir les ressources nécessaires pour l’adaptation, l’atténuation et les pertes et dommages des pays vulnérables. M. Gonsalves a estimé que les grandes puissances et les grands blocs avaient tourné le dos au multilatéralisme au profit de réflexes impérialistes à visée hégémonique, déguisés en appels hypocrites à l’émergence d’un nouvel ordre mondial destiné à servir leurs intérêts. « Depuis les dures tranchées de la périphérie, Saint-Vincent-et-les Grenadines pose trois questions obsédantes: Quoi de neuf? Quel monde? Et qui donne les ordres? »
Appelant à se débarrasser de certaines « toiles d’araignée idéologiques », M. Gonsalves a rejeté la thèse erronée d’une lutte entre démocraties et autocraties, décrivant plutôt un affrontement entre puissances dominantes pour le contrôle des ressources mondiales. Raillant la « schizophrénie historique » des grandes puissances, il a considéré que même si elles détiennent toutes les armes de la domination, elles restent accablées d’insécurités déconcertantes qui les transforment en « bêtes insensés » à leur propre détriment et au détriment de toute l’humanité. Le Chef du Gouvernement a exhorté les États-Unis à mettre un terme aux sanctions unilatérales contre Cuba, le Nicaragua et le Venezuela. Il est d’après lui « idiot » et « incorrect » de considérer Cuba comme un État parrain du terrorisme. Il a encore regretté que l’utilisation du dollar comme arme contre le Venezuela ait provoqué l’effondrement de l’accord Petro Caribe qui bénéficiait largement à une dizaine de pays des Caraïbes, dont Saint-Vincent-et-les Grenadines.
Le Premier Ministre a affirmé qu’il était « grand temps que la République de Chine –Taiwan- sorte de l’isolement diplomatique ». « La paix dans le détroit de Taiwan est un impératif pour la prospérité et la sécurité du monde entier », a-t-il affirmé. Dénonçant la « douce musique » jouée par les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre, États et entreprises, M. Gonsalves a déploré un manque de mesures de réparation effectives. Selon lui, la COP28 sera un test décisif en la matière. Une attention particulière doit être portée aux pays les plus vulnérables, comme les petits États insulaires en développement (PEID) des Caraïbes et du Pacifique, ainsi qu’aux communautés les plus pauvres des régions d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine. Il a exhorté l’Assemblée générale à soutenir l’initiative de Bridgetown et l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle concernant les PEID, cruciales pour réformer le financement du développement. Il a également appelé à faire disparaître « l’emprise » de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur les questions de la fiscalité internationale qui devraient incomber à l’ONU.
« Nous ne pouvons pas nous permettre de nous lasser de la question haïtienne », a-t-il enfin martelé, plaidant en faveur d’un véritable plan Marshall financé par la communauté internationale. Dénonçant un « tabou », le Premier Ministre a abordé plus largement la question des réparations de la part des États européens à la suite d’un sous-développement hérité du génocide des peuples autochtones et de l’esclavage des corps africains. « Le temps des maîtres et des esclaves est révolu et les jours de l’impérialisme sont comptés. »
Mme FIAMĒ NAOMI MATA’AFA, Première Ministre et Ministre des affaires étrangères et du commerce du Samoa, a passé en revue les catastrophes dévastatrices qui se sont produites ce dernier semestre en Afrique, en Asie, en Europe et en Amérique, décimant vies et moyens de subsistance. Il faut se rendre à l’évidence, les effets des changements climatiques ont un impact de plus en plus profond et de plus en plus dévastateur sur nos vies, et les nier ne fera qu’aggraver la situation, a-t-elle prévenu. Elle a appelé à s’attaquer à leurs causes profondes, rappelant que les scientifiques ont mis en garde contre des événements météorologiques plus fréquents et plus extrêmes, entraînant davantage de pertes en vies humaines et de dégâts aux infrastructures.
La Première Ministre a recommandé de s’orienter vers des énergies propres et abordables, et d’évoluer vers des économies vertes et résilientes. Protéger la nature doit être la priorité de chacun pour le bien de l’humanité, a-t-elle martelé, estimant que des solutions ciblées doivent être complétées par la garantie d’un financement climatique pour les pays en première ligne et par l’utilisation des meilleures sciences et technologies disponibles.
C’est pourquoi, la prochaine COP28 doit inclure des engagements pour concrétiser la réalité imaginée, a-t-elle affirmé. Elle a évoqué en particulier l’importance de rendre opérationnel le fonds pour les pertes et les préjudices le plus rapidement possible.
De fait, franchir ce seuil de 1,5° C signifierait la fin de bon nombre de nos sociétés insulaires, a-t-elle averti, expliquant que la crise climatique cause des dommages à la biodiversité qui constitue le réseau de la vie dont son pays dépend pour ses moyens de subsistance et sa croissance économique. Elle a également plaidé pour une meilleure protection de la biodiversité et à veiller à une gestion durable des ressources marines, exhortant notamment à une ratification rapide du nouveau traité sur la protection de la biodiversité marine en haute mer. À cet égard, la dignitaire a exhorté les États Membres à contribuer à la lutte contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée qui prive les petits États insulaires en développement (PEID) de revenus indispensables à une époque de tensions budgétaires accrues.
Au plan national, elle a attiré l’attention sur les maladies non transmissibles (MNT) qui représentent près de la moitié des décès dans son pays. En outre, le Samoa enregistre l’un des taux d’obésité les plus élevés au monde, parmi les enfants notamment. C’est pourquoi, a-t-elle informé, son gouvernement a fait des services de santé centrés sur la personne et de la lutte contre les MNT une priorité du Plan de développement du Samoa 2019-2025. Elle a également insisté sur l’importance de moins dépendre de la nourriture industrielle importée. La nutrition et l’exercice physique, associés à d’autres changements de mode de vie, contribueront le plus à la lutte contre les MNT, mais ces efforts doivent être renforcés par un soutien financier afin d’appuyer la sensibilisation et le renforcement des capacités des professionnels de la santé et de l’éducation.
M. TERRANCE MICHEAL DREW, Premier Ministre de Saint-Kitts-et-Nevis, regrettant l’existence de fortes disparités de revenus et de bien-être au niveau mondial, mais aussi la défiance croissante vis-à-vis des États, des organisations internationales et des médias traditionnels, a noté l’importance de la prévention, de la coordination et du partenariat. Il a souligné que les pays en développement souffraient de plus en plus de fardeaux dont ils ne sont pas à l’origine, en rappelant notamment les injustices de l’esclavage, source de richesses pour les pays développés. Il est donc temps, a déclaré M. Drew, de rechercher une forme de justice réparatrice et de justice climatique, car des pays comme Saint-Kitts-et-Nevis sont, alors même que leur empreinte carbone est négligeable, obligés de remédier à la crise climatique en empruntant à des taux exorbitants auprès des pays qui sont à l’origine du problème. Dénonçant les insuffisances de l’architecture financière internationale, il a appelé à une réforme de sa gouvernance ainsi qu’à la mise en place d’un mécanisme multilatéral de gestion de la dette souveraine et d’un indice multidimensionnel de vulnérabilité. Il s’agit, a-t-il précisé, de tenir compte d’indicateurs comme la dette des pays concernés ou encore les risques et coûts d’événements environnementaux catastrophiques, susceptibles d’effacer jusqu’à 5% du PIB.
Concernant les progrès en matière de développement, le Premier Ministre a expliqué que la vision de son gouvernement reposait sur plusieurs piliers, comme la sécurité alimentaire, la transition vers une énergie verte, la diversification économique, ou encore les industries durables. Il s’est félicité des investissements réalisés par Saint-Kitts-et-Nevis dans la production d’énergie géothermique, des leçons tirées de la pandémie de COVID-19, de l’adoption de lois sur l’intégrité de la vie publique et la bonne gouvernance ou encore des programmes qui s’adressent aux plus vulnérables comme les femmes, les jeunes, les personnes âgées, les handicapés et la communauté rastafari.
S’agissant de la prolifération d’armes illicites et indétectables qui entrent dans la région caraïbe, le Chef du Gouvernement a invité les États qui fabriquent ces armes à assumer une plus grande responsabilité dans la lutte contre leurs flux illégaux, qui constituent une vraie menace pour la sécurité et la stabilité nationales et régionales. M. Drew a ensuite rappelé que certains pays continuaient à être victimes d’inégalités au niveau mondial: le Venezuela et Cuba, du fait des sanctions et des embargos qui les frappent et causent des souffrances à des peuples qui ne les méritent pas, ou encore Taiwan qui, tout en étant un partenaire fiable de développement pour Saint-Kitts–et-Nevis, compte 23 millions d’habitants qui ne sont pas adéquatement représentés à l’ONU. Il a en outre appelé à une solution politique de toute urgence en Haïti.
Abordant la question de la réforme du Conseil de sécurité de l’ONU, le Premier Ministre a rappelé la nécessité d’un rôle et d’une présence renforcés des pays en développement du Sud au sein du Conseil pour mieux refléter les réalités géopolitiques contemporaines et renforcer son efficacité. Il a jugé cette réforme essentielle, en rappelant que le monde était à la croisée de « ce qui est » et de « ce qui pourrait être ».
M. JOSÉ ULISSES CORREIA E SILVA, Premier Ministre et Ministre de la réforme de Cabo Verde, a déclaré qu’en cette période de « crise intense », caractérisée par la résurgence de l’extrémisme, des attaques contre la démocratie et des coups d’État successifs en Afrique, son pays se range du côté de la liberté et du respect de la souveraineté des nations. Sur cette base, il a condamné l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie ainsi que le recours aux coups de force pour accéder au pouvoir. Selon une enquête récente, les deux tiers des Africains préfèrent la démocratie à toute autre forme de gouvernement, mais seulement 38% d’entre eux sont satisfaits du fonctionnement de la démocratie dans leur pays. Des données qui laissent présager une meilleure gouvernance et une plus grande responsabilisation des citoyens, notamment à l’égard de fléaux tels que la corruption, a-t-il estimé. Pour raffermir la confiance des citoyens dans la démocratie, le Premier Ministre a préconisé des systèmes électoraux et judiciaires crédibles, la liberté de la presse et des institutions publiques fortes. Il s’est dit prêt à travailler avec détermination aux côtés des États Membres pour lutter contre l’insécurité et favoriser la stabilité en Afrique de l’Ouest.
Dans un monde de plus en plus interconnecté, l’insécurité se propage et ne respecte pas les frontières, a prévenu M. Silva. Un « partenariat entre les nations » est donc essentiel pour surmonter les menaces à la sécurité mondiale, sanitaire et climatique ainsi qu’à la sécurité alimentaire. Il s’est également inquiété des effets sur la région du trafic de drogue, du terrorisme et de la piraterie qui, tous, recèlent un potentiel pandémique énorme. Qui plus est, les défis liés à la réalisation des ODD continuent de s’accroître et nécessitent des réformes et des investissements accélérés. Nous devons encore revoir l’architecture financière internationale, alléger la dette des pays les moins avancés (PMA) et augmenter considérablement les droits de tirage spéciaux, a-t-il ajouté, tout en simplifiant les règles régissant leur attribution. Le Premier Ministre a plaidé en faveur d’une représentation juste des pays africains au sein du Conseil de sécurité et dans les institutions financières internationales. De même, le recours à l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle en tant que critère d’accès à un financement à faible coût et à long terme pour les petits États insulaires en développement (PEID) est essentiel.
De façon générale, M. Silva a expliqué que l’Afrique doit croître davantage et être mieux intégrée à l’économie mondiale afin de produire, exporter et créer des emplois bien rémunérés. À ce titre, des transformations structurelles en matière de connectivité, qui constitue une contrainte majeure à l’intégration économique africaine, sont nécessaires. Il a fait savoir que le Portugal et Cabo Verde ont récemment signé un accord visant à convertir la dette bilatérale de ce dernier en financement climatique pour atteindre ces objectifs, tout en créant des possibilités d’investissement pour le secteur privé et des emplois qualifiés pour les jeunes. Dans l’intervalle, le dirigeant a indiqué que son pays a pour ambition d’éradiquer l’extrême pauvreté d’ici à 2026, de diversifier son économie et de devenir une nation numérique.
M. HAMZA ABDI BARRE, Premier Ministre de la Somalie, a critiqué la contradiction entre les promesses et la dure réalité à laquelle fait face le monde, pointant les conséquences négatives de l’inaction pour les personnes vulnérables lorsque le développement n’est pas réalisé. Il faut raviver l’action, a-t-il exhorté, s’élevant contre la complaisance alors que le monde est à mi-parcours de la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD). Il faut trouver une solution innovante aux problématiques et aux crises et créer des partenariats effectifs pour que les promesses se transforment en politique et les engagements en mesures concrètes.
La pandémie de COVID-19 a mis à nu les fragilités et démontré, dans le même temps, le pouvoir de la solidarité et la coopération lors de périodes difficiles. C’est pourquoi M. Barre a proposé la création de plateformes de coordination des politiques à l’échelle mondiale et régionale pour collecter des données et des connaissances afin de protéger les communautés contre les pandémies. Poursuivant, le Chef du Gouvernement a souligné la nécessité de refondre l’ordre financier mondial, rappelant les inégalités dans l’accès aux ressources lors de la pandémie. Il s’agit, a-t-il dit, d’adapter un système financier obsolète et de corriger les maux historiques au bénéfice du progrès collectif.
Le Premier Ministre a relevé les défis inédits marqués par une augmentation des violences, liées notamment aux nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle -une « menace terrifiante »-, les conflits armés et les coups d’État en hausse sur le continent africain. Ces conflits sont une source de vive préoccupation, en raison notamment de leurs effets destructeurs sur les civils condamnés aux déplacements et à la pauvreté. À une époque marquée par la haine et la violence, la Somalie, a assuré M. Barre, reste guidée par les principes de l’islam noble. Il a défendu la tolérance entre les différentes fois, la discrimination raciale et l’oppression qui visent les communautés musulmanes dans diverses régions du monde. « Ce phénomène obscurantiste est une honte pour tous. »
Le Chef du Gouvernement a salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU, qui vient rappeler que les conflits proviennent souvent de l’inaction face aux inégalités. Abordant le volet des changements climatiques, il a, là encore, mis en relief les conséquences de l’inaction collective. Au cours des dernières années, la Somalie a connu un cercle vicieux d’inondations et de sécheresses ayant conduit au déplacement de millions de personnes. M. Barre a appelé la communauté internationale à appuyer son pays pour renforcer sa résilience.
Pour finir, le Premier Ministre est revenu sur les progrès significatifs réalisés en Somalie, au cours de la décennie écoulée, vers la paix et la sécurité ainsi que sur le front économique. Il s’est félicité des campagnes couronnées de succès lancées contre les groupes terroristes, notamment les Chabab. Aujourd’hui, 45% des zones contrôlées par ce groupe terroriste ont été récupérées. De fait, a-t-il expliqué, « si nous coopérons avec les communautés locales, les terroristes n’auront nulle part où se cacher », une approche qu’il recommande à l’échelle mondiale. Pour finir, M. Barre a salué le courage et le sacrifice de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) ainsi que les pays contributeurs de troupes. Son pays, a-t-il conclu, s’est engagé à la pleine mise en œuvre du plan de transition en matière de sécurité et à assurer l’ensemble des prérogatives en la matière après le départ de la mission en 2024.
M. SALEUMXAY KOMMASITH, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la République démocratique populaire lao, a indiqué que tout en défendant le multilatéralisme, son pays était convaincu que l’ONU, pour pouvoir remplir efficacement son mandat, devait être réformée. Il a appelé au dialogue en Ukraine et au Moyen-Orient, en estimant que l’unilatéralisme contrevenait aux principes de la Charte des Nations Unies et entravait le développement. Il a en outre réitéré l’appel de son pays à lever l’embargo économique contre Cuba et à retirer ce pays de la liste des États soutenant le terrorisme.
Notant que lors du Sommet du G77 et de la Chine qui s’est tenu à La Havane la semaine dernière, les chefs d’État et de gouvernement des pays en développement avaient identifié la science, la technologie et l’innovation comme des mécanismes moteurs du développement, le Vice-Premier Ministre a appelé de ses vœux un système de gouvernance mondiale fondé sur ces mécanismes. Il a noté que l’un des principaux obstacles à la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) avait toujours été l’insuffisance du financement et la faible participation des pays en développement au processus décisionnel économique international. Il a indiqué que son pays avait ajouté un dix-huitième ODD pour permettre à sa population de vivre à l’abri des munitions non explosées, un obstacle à la réalisation d’autres objectifs. M. Kommasith a appelé à la poursuite d’une assistance de la communauté internationale dans cette tâche.
S’agissant des autres ODD, le Vice-Premier Ministre a reconnu que nombre d’entre eux stagnaient ou régressaient et a indiqué que la République démocratique populaire lao cherchait actuellement à identifier ceux qui nécessitaient un soutien et des financements supplémentaires. Il a rappelé que son pays disposait d’un capital naturel considérable avec des opportunités de développement des énergies renouvelables et d’investissement dans le captage et le stockage du carbone. M. Kommasith a souligné que même si son pays faisait partie de ceux qui contribuaient le moins aux émissions mondiales, son gouvernement avait adopté une stratégie nationale sur les changements climatiques dont il a demandé qu’elle bénéficie de ressources financières et d’une assistance technique suffisantes en appelant à la concrétisation de l’engagement international à hauteur de 100 milliards de dollars de financement climatique pour les pays qui en ont le plus besoin.
Il a conclu en soulignant que son pays était déterminé à renforcer l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), qui joue un rôle central dans la promotion de la paix, de la sécurité et du développement dans la région et a rappelé qu’en 2024, son pays assumerait la présidence de l’ASEAN sur le thème « ASEAN: renforcer la connectivité et la résilience ».
M. DEMEKE MEKONNEN, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de l’Éthiopie, a estimé que la communauté internationale peut relever les défis actuels en faisant le pari de coopérer, plutôt que de privilégier «°des choix géopolitiques qui exacerbent les tensions ». Il a donc appelé les États Membres à se réengager en faveur de la Charte des Nations Unies et à travailler ensemble pour un système multilatéral inclusif et solidaire qui pourra juguler l’inflation mondiale, les changements climatiques ou encore la menace nucléaire. Réformer le Conseil de sécurité n’est pas un choix mais une nécessité absolue, a-t-il ajouté, estimant qu’allouer des sièges permanents pour l’Afrique serait moralement et politiquement justifié. S’il a salué les efforts de financement entrepris pour aider l’Union africaine dans ses opérations de soutien à la paix, M. Mekonnen a toutefois appelé à lever les sanctions économiques appliquées aux pays en développement. Par ailleurs, il a plaidé en faveur de la réforme du système onusien dans sa totalité pour le rendre « plus inclusif et efficace ». L’Éthiopie soutient les objectifs de développement durable (ODD), a poursuivi le Vice-Premier Ministre, et s’engage à accélérer ses réformes économiques et politiques pour les atteindre. À cet égard, il a demandé la pleine mise en œuvre du Programme d’action d’Addis-Abeba.
Par ailleurs, M. Mekonnen a souligné les efforts de stabilisation et de consolidation de la paix dans son pays, notamment via l’Accord de paix de Prétoria et la politique de justice transitionnelle. Exprimant la solidarité de l’Éthiopie avec le Soudan, il a espéré que la paix serait bientôt retrouvée, à travers l’intégration régionale et la coordination des initiatives de paix. Il a ensuite indiqué que l’Éthiopie continuera de promouvoir une approche concertée et la confiance mutuelle pour accroître l’intégration régionale et augmenter la connectivité entre les pays de la région. L’intégration régionale, couplée à des projets de développement des infrastructures, a des effets positifs sur les citoyens, a-t-il estimé, en soulignant l’immense potentiel de l’Afrique. Pour développer ce potentiel, il a néanmoins jugé nécessaire de mobiliser davantage de ressources et de résoudre rapidement la crise de la dette en Afrique, ce qui requiert une réforme de l’architecture financière internationale. L’égalité, l’espoir et la justice devraient être la pierre angulaire de cette Assemblée générale, a-t-il conclu, tout en rappelant l’importance d’inclure toutes les nations et d’œuvrer pour le consensus global.
M. JOHN ROSSO, Vice-Premier Ministre et Ministre de l’immigration, des terres et de l’aménagement du territoire de Papouasie-Nouvelle-Guinée, a expliqué que son pays est confronté à des problèmes de relèvement suite à la pandémie de COVID-19, ainsi qu’en raison des changements climatiques et de la guerre menée contre l’Ukraine. Ces questions sont abordées dans le nouveau Plan de développement quinquennal 2023-2027 de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, lancé en juillet de cette année. Il a précisé que le Gouvernement entend accroître l’économie de 31 milliards à 57 milliards de dollars par an, d’ici à 2030, et créer un million d’emplois supplémentaires. En outre, la « Vision 2050 », vise à faire passer la Papouasie-Nouvelle-Guinée dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure d’ici à 2030 et améliorer l’indice de développement humain d’ici à 2050.
M. Rosso a indiqué que son pays accorde une attention particulière à la santé, un défi majeur étant la prévention et le contrôle des maladies non transmissibles, la santé reproductive et maternelle ainsi que la tuberculose. Un partenariat de développement pour la santé est donc crucial pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée qui compte un nombre limité d’experts, de capacités et de ressources dans ce domaine. Le financement du développement est un autre défi de taille, a-t-il poursuivi, la Papouasie-Nouvelle-Guinée ayant besoin de 26 milliards de dollars, au cours des cinq prochaines années, pour atteindre « l’aspiration de développement » de 57 milliards de dollars par an. Pour maîtriser le risque d’endettement, le Gouvernement a mis en place des mesures pour mobiliser ses ressources nationales, notamment en lançant une réforme fiscale.
Le Premier Ministre a ensuite exigé une réforme urgente du système financier international afin de relever les défis économiques et financiers auxquels sont confrontés les petits États insulaires en développement (PEID). Il a également appelé à l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle afin de prendre en compte les facteurs de vulnérabilité de ces pays. Il faut en outre veiller à ce que l’application des lois « taille unique » de lutte contre le blanchiment d’argent ne constitue pas un obstacle à la croissance économique et au développement durable des petits pays en développement.
Le Chef de Gouvernement a aussi souligné l’urgence de lutter contre la crise climatique et exhorté les pays développés à tenir leur engagement de financement climatique de 100 milliards de dollars par an. Il a fait savoir que son gouvernement compte signer l’Accord sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine dès que les processus procéduraux et juridiques domestiques seront terminés. Sur le plan politique, M. Rosso a assuré que le processus de paix de Bougainville est une priorité pour son gouvernement.
M. JEYHUN BAYRAMOV, Ministre des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan, a dressé la liste des défis mondiaux transcendant les frontières et appelé à des actions audacieuses et concertées, malgré l’érosion du multilatéralisme. S’inquiétant d’une exacerbation de l’intolérance, des discours de haine et de l’islamophobie, il a mis en avant la tradition séculaire de diversité et de multiculturalisme de son pays.
Plaidant en faveur d’un système multilatéral revigoré et réformé, avec les Nations Unies en son centre, le Ministre a évoqué les initiatives mondiales proposées par son pays pour lutter contre la pandémie de COVID-19 et en a appelé à la solidarité internationale pour en atténuer les effets persistants. Il a mis en avant l’assistance humanitaire, technique et économique d’une valeur de 300 millions de dollars que son pays a apportée à plus de 130 nations depuis 2020. Il a aussi vanté les performances économiques de son pays et sa volonté de réaliser les objectifs de développement durable (ODD). Il a par ailleurs mis en avant la transition de son pays « du statut de fournisseur traditionnel de pétrole brut à celui de fournisseur fiable de gaz naturel » et son rôle dans la sécurité énergétique du continent, rappelant que l’Azerbaïdjan fournit actuellement du gaz à 7 pays européen, qui seront 10 dans un avenir proche.
Le Ministre s’est ensuite longuement étendu sur le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Affirmant que son pays avait entamé une normalisation des relations et offert la paix à son voisin, il a regretté que celui-ci ait « reproduit les schémas du passé en faisant mine de négocier, en revenant sur les engagements pris et en se livrant à des provocations politiques et militaires afin d’éviter de prendre des décisions concrètes ». Accusant l’Arménie d’avoir soutenu la présence de plus de 10 000 hommes équipés d’armes lourdes sur le sol souverain de l’Azerbaïdjan, notamment en utilisant abusivement la route de Latchine, il l’a accusée de mener depuis des mois une « campagne de manipulation » basée sur des allégations fabriquées de blocus, de crise humanitaire ou de nettoyage ethnique, ajoutant que c’est l’Arménie qui entravait la livraison de marchandises à la région azerbaïdjanaise de Garabagh.
Le Ministre a présenté l’offensive menée le 19 septembre comme une série d’opérations militaires « limitées et proportionnées » de lutte contre le terrorisme pour préserver sa souveraineté, son intégrité territoriale et de protéger ses résidents, « dans le respect total des normes du droit humanitaire ». Assurant que ces opérations avaient désormais cessé, il s’est félicité de l’ouverture, le 21 septembre, d’un dialogue entre son pays et les « résidents arméniens », ajoutant que tous les efforts ont été mobilisés pour répondre aux besoins immédiats des civils et que l’aide humanitaire leur parvient. L’Azerbaïdjan est déterminé à réintégrer les résidents arméniens de la région du Garabagh dans la société azerbaïdjanaise en tant que citoyens égaux, sur la base de la Constitution, de la législation nationale et des engagements internationaux du pays, a-t-il assuré.
Le Ministre a ensuite évoqué une « opportunité historique » pour l’Azerbaïdjan et l’Arménie d’établir des relations de bon voisinage. Appelant les acteurs internationaux désireux de soutenir le processus à s’engager de manière significative, il a en revanche invité « ceux qui ne sont pas en mesure de jouer un rôle d’intermédiaire honnête » à s’abstenir. Il a aussi demandé que justice soit rendue pour les crimes de guerre graves et les crimes contre l’humanité dont il a accusé l’Arménie, lui demandant en particulier de faire la lumière sur le sort de près de 4 000 citoyens azerbaïdjanais portés disparus pendant le conflit. Il a aussi appelé à faire respecter le droit au retour de quelque 300 000 Azerbaïdjanais, expulsés de force de leur terre ancestrale par l’Arménie entre 1987 et 1991.
M. SERGUEI LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a déclaré qu’un « nouvel ordre mondial est en train de naître sous nos yeux », ajoutant que les contours de l’avenir se dessinent dans une lutte entre une majorité d’États qui prônent la diversité civilisationnelle et une répartition plus équitable et une poignée d’autres qui « utilisent des méthodes néocoloniales d’assujettissement pour maintenir leur domination ». Il a accusé Américains et Européens, habitués à mépriser le reste du monde, de multiplier les promesses et de contracter des obligations contraignantes, avant de s’y soustraire. L’Occident est un véritable « empire du mensonge », a-t-il dit, reprenant une expression du Président Putin.
Après avoir accusé les États-Unis et le « Collectif occidental qui lui est subordonné » d’avoir cherché l’affrontement avec l’URSS puis, après la fin de la guerre froide, d’avoir trahi les assurances données à la Russie en matière d’architecture de sécurité européenne, M. Lavrov a rappelé qu’en 2021 les propositions russes visant à des accords sur des garanties mutuelles de sécurité en Europe sans modifier le statut de pays non aligné de l’Ukraine ont été rejetées avec arrogance. Il a accusé l’Occident de continuer à militariser systématiquement le régime russophobe de Kiev, porté au pouvoir à la suite d’un coup d’État sanglant et utilisé pour préparer le déclenchement d’une guerre hybride contre la Russie.
Disant avoir l’impression persistante que cet « Occident collectif » a décidé de donner à la doctrine Monroe une projection mondiale, M. Lavrov a dénoncé comme une nouvelle manifestation dangereuse de l’expansionnisme de l’OTAN la tentative d’étendre la zone de responsabilité du bloc à l’ensemble de l’hémisphère oriental sous le slogan de « l’indivisibilité de la sécurité de la région euro-atlantique et indopacifique » et par la création d’une série « d’alliances militaro-politiques miniatures » ouvertement focalisées contre son pays et la Chine, et menaçant l’architecture régionale inclusive développée autour de l’ASEAN.
Les États du monde ne veulent plus vivre sous les ordres mais échanger sur un pied d’égalité, a affirmé M. Lavrov, qui a dénoncé une division artificielle de l’humanité en blocs hostiles du fait des conflits générés par les États-Unis et le « collectif occidental », laquelle entrave la réalisation d’objectifs communs. « Ils font tout pour empêcher la formation d’un ordre mondial véritablement multipolaire et juste », a-t-il asséné.
Pourtant, la logique du processus historique est inexorable, a déclaré M. Lavrov, qui a mis en avant en particulier le rôle des BRICS et d’autres associations qui offrent aux pays du Sud des opportunités de développement commun et défendent la place qui leur revient dans l’architecture multipolaire objectivement émergente. « Pour la première fois peut-être depuis la création de l’ONU en 1945, une véritable démocratisation des affaires mondiales existe », a estimé le Ministre, y voyant une source d’optimisme pour tous ceux qui croient en la suprématie du droit international et souhaitent la renaissance de l’ONU en tant qu’organe central de coordination de la politique mondiale.
M. Lavrov a accusé l’Occident de continuer à se considérer comme supérieur au reste de l’humanité. Il a dénoncé le recours à des mesures coercitives unilatérales comme une violation flagrante du principe de l’égalité souveraine des États, « pierre angulaire de l’ordre mondial créée après la Seconde Guerre mondiale », exigeant notamment la levée de celles qui frappent Cuba et la Syrie. Il a de nouveau accusé l’OTAN d’avoir détruit l’État libyen, ouvrant les vannes à la propagation du terrorisme dans la région saharo-sahélienne et à des vagues de millions de migrants illégaux en Europe.
M. Lavrov a par ailleurs dénoncé « l’égoïsme de la minorité occidentale », l’illustrant par ses « tentatives obsessionnelles d’ ’ukrainiser’ l’ordre du jour international » en repoussant au second plan d’autres crises régionales non résolues, notamment au Moyen-Orient, a-t-il affirmé, les Palestiniens attendent depuis plus de 70 ans l’État qui leur est solennellement promis.
M. Lavrov a ensuite comparé et opposé l’engagement non tenu de l’Occident de fournir aux pays en développement 100 milliards de dollars par an pour financer des programmes d’adaptation aux changements climatiques et les 170 milliards de dollars dépensés depuis février 2022 par les États-Unis, l’OTAN et l’Union européenne pour soutenir le « régime raciste de Kiev ».
Le Ministre a ensuite souligné l’urgence d’une réforme rapide de l’architecture de gouvernance mondiale existante. Il a ainsi demandé une redistribution des quotas de vote au FMI et à la Banque mondiale afin de reconnaître le poids économique et financier réel des pays du Sud, et demandé que le G20 cesse d’être politisé et ait la possibilité de faire ce pour quoi il a été créé: élaborer des mesures généralement acceptables de gestion de l’économie et des finances mondiales. Il a estimé que l’élargissement du Conseil de sécurité, « de plus en plus demandé » devrait se faire en éliminant la sous-représentation des pays de la majorité mondiale, ajoutant que les nouveaux membres, permanents ou non, devraient jouir de l’autorité à la fois dans leur région et au sein d’organisations mondiales telles que le Mouvement des pays non alignés, le Groupe des 77 ou l’Organisation de la coopération islamique. Il a aussi demandé des « méthodes plus équitables » pour former le Secrétariat de l’ONU, affirmant que les critères en vigueur ne reflètent pas le poids réel des États dans les affaires mondiales et assurent artificiellement une « domination prohibitive » des citoyens des pays de l’OTAN et de l’UE.
Rappelant que « l’histoire ne dépend que de nous », M. Lavrov a conclu en citant le Secrétaire général sur la responsabilité particulière des dirigeants de parvenir à un compromis pour concevoir notre avenir commun pour le bien commun, estimant qu’il s’agissait d’une « bonne réponse à ceux qui divisent le monde en démocraties et autocraties et ne dictent à tout le monde que leurs règles néocoloniales ».
Mme RETNO LESTARI PRIANSARI MARSUDI, Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, a évoqué les principes de la Conférence de Bandung de 1955, fondés sur la solidarité mondiale et la responsabilité collective en tant que réponse au déficit de confiance et aux inégalités mondiales. Comme en 1955, nous nous trouvons aujourd’hui à un carrefour stratégique qui entrave la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), en particulier dans les pays du Sud. Si nous réalisons toutes les promesses prononcées cette semaine devant cette assemblée, la situation mondiale ne ressemblera plus à celle que nous voyons actuellement, a lancé la Ministre. Le problème, a-t-elle ajouté, est que nous ne joignons pas le geste à la parole, d’où le déficit de confiance.
Selon Mme Marsudi, un monde pacifique et prospère est un droit et une responsabilité collective de tous les pays, grands et petits, du Nord et du Sud, développés et en développement. Le respect du droit international garantit que les différends seront réglés à la table des négociations plutôt que sur le champ de bataille. La Ministre a évoqué « notre responsabilité collective » de sauver les peuples de Palestine et d’Afghanistan, en particulier les femmes et les filles. Tandis que la chaîne d’approvisionnement mondiale demeure monopolisée par certains États, les pays en développement sont confrontés à des dettes et un manque de financement du développement.
En tant que Présidente de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour cette année, la Ministre a prévenu qu’elle ne laissera pas la région devenir un « pion des rivalités ». « L’Asie du Sud-Est doit plutôt être un épicentre de croissance dont tous les pays peuvent bénéficier de manière significative ». Concernant le Myanmar, elle a exhorté la junte militaire à mettre en œuvre le consensus en cinq points.
Mme ALICIA BÁRCENA IBARRA, Ministre des affaires étrangères du Mexique, s’est alarmée de la stagnation dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), appelant de ses vœux un changement de paradigme de développement, « qui redistribue le pouvoir et la richesse et comble les écarts inacceptables entre les riches et les pauvres et entre les pays ». Selon elle, c’est précisément ce que s’efforce de faire le gouvernement du Président Andrés Manuel López Obrador en mettant en œuvre des politiques structurelles transformatrices. « Nous sommes déterminés à éliminer la culture des privilèges », a clamé la Ministre, pour qui la durabilité environnementale est un élément fondamental des stratégies de développement. Voyant dans les changements climatiques l’un des plus grands risques mondiaux, elle a averti que le coût de leurs effets affectera non seulement la croissance économique mais aussi les secteurs les plus vulnérables. Il importe donc de donner la priorité à l’adaptation, ce que fait valoir le Mexique en préconisant une réforme en profondeur de l’architecture financière internationale.
Dénonçant à cet égard le manque de solidarité mondiale, la Ministre a estimé que l’époque actuelle nécessite « la somme de plus de volontés pour donner une voix à tous les peuples du Sud ». C’est pourquoi, a-t-elle expliqué, le Mexique envisage de participer aux efforts du Groupe des 77 et la Chine visant à renforcer la position de négociation des pays du Sud. Au niveau régional, le Mexique agit comme garant de la paix, comme l’atteste sa participation au dialogue entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN) et à la recherche de solutions politiques au Venezuela. S’agissant du conflit entre l’Ukraine et la Russie, Mme Bárcena a condamné l’invasion russe et reconnu que tout État souverain a le droit de recouvrer son intégrité territoriale. Cependant, a-t-elle nuancé, « il est également vrai que la course aux armements nous éloigne encore plus d’une solution pacifique ». Il faut donc « cesser de parler de guerre et commencer à parler de paix », a-t-elle plaidé.
La Ministre s’est ensuite inquiétée de l’augmentation du trafic illicite d’armes à feu, faisant observer que 200 000 armes à feu sont introduites chaque année dans son pays et tombent entre les mains de la criminalité organisée. Elle a averti que les efforts déployés par le Mexique pour lutter contre le trafic de drogue resteront limités tant que les pays de fabrication et d’origine des armes trafiquées n’assumeront pas leur responsabilité face à ce fléau. Notant à ce propos que la violence des gangs à laquelle fait face Haïti est due en grande partie au trafic illicite d’armes, elle a souhaité que la communauté internationale agisse de manière décisive pour aider ce pays à retrouver sa stabilité. De même, elle a appelé à la levée de l’embargo économique « injustifié » que subit Cuba.
Mme Bárcena a d’autre part rappelé que son pays fait face au défi de la mobilité humaine, avant d’insister sur l’urgence de lutter contre les causes structurelles de la migration. Il convient, a-t-elle dit, de renforcer le développement intégral des pays d’origine avec le soutien de tous les pays, en particulier de ceux qui bénéficient le plus du travail des migrants. À ses yeux, il est également essentiel d’évoluer vers des modèles de gestion des migrations offrant des espaces d’insertion qui facilitent, dans le respect des droits humains, l’intégration dans les sociétés d’accueil et le retour volontaire dans le pays d’origine. À l’approche de l’échéance de 2030, a conclu la Ministre, nous devons avoir le courage de créer un monde égalitaire et juste, « où les droits ne sont pas des marchandises et où la nature n’est pas la victime inévitable de nos modes de production et de consommation ».
M. ENRIQUE MANALO, Secrétaire aux affaires étrangères des Philippines, a plaidé pour adapter les efforts à la réalité, en plaçant les personnes et les communautés au cœur de l’action. Guidées par une politique étrangère indépendante, les Philippines travaillent activement avec les nations pour promouvoir un ordre international fondé sur des règles et prônent le règlement pacifique des différends, conformément au droit international. Telle a toujours été la position de son pays concernant les différends en mer des Philippines occidentales, a indiqué M. Manolo en réitérant sa détermination à défendre sa souveraineté, ses droits et son intégrité territoriale.
En tant qu’archipel dont le destin est étroitement lié à l’océan, les Philippines sont un champion de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a affirmé le Secrétaire aux affaires étrangères, se disant fier d’être parmi les premiers États à signer cette semaine l’accord sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine, qui ouvre de nouvelles possibilités de coopération pour assurer la gestion responsable de la haute mer. La primauté de la Convention sur le droit de la mer a été réaffirmée, à ses yeux, par la sentence arbitrale de 2016 sur la mer de Chine méridionale, qui a réglé de manière définitive le statut des droits historiques et maritimes dans cette zone. Le respect du droit international permet, selon M. Manalo, de faire en sorte que la zone indopacifique reste stable, en paix et ouverte. « Nous sommes guidés par ces principes. »
Abordant ensuite les menaces liées aux armes de destruction massive, le Secrétaire aux affaires étrangères a déploré une situation marquée par la course aux armements et l’émergence de nouveaux outils de guerre, notamment dans le cyberespace, qui sont venus transformer le panorama stratégique du XXIe siècle, raison de plus pour respecter l’état de droit. À cet égard, il a annoncé l’organisation par son pays d’une réunion des pays de la région indopacifique en décembre, visant à prôner l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique. Il s’agit d’établir davantage de responsabilité pour réduire les menaces dans l’espace, a-t-il précisé. Pour finir, il a abordé la question des changements climatiques, qui doit être traitée dans le cadre d’une coopération multilatérale, car « nous avons besoin de solutions décisives, justes et durables, tenant compte des populations et préservant les individus les plus vulnérables » du fait de leur situation géographique.
Mme NANAIA MAHUTA, Ministre des affaires étrangères et des gouvernements locaux de Nouvelle-Zélande, a rappelé que, pour la première fois depuis des générations, il existait une possibilité très réelle d’un conflit entre grandes puissances et que, dans notre monde interconnecté et interdépendant, les sociétés humaines « prospéreraient ou périraient ensemble ». Elle s’est dite choquée de voir un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU lancer une attaque non provoquée contre un État souverain, l’Ukraine, tenter d’annexer son territoire et faire la guerre à sa population civile, affirmant que son pays soutenait fermement les efforts visant à demander des comptes à la Russie devant la Cour internationale de Justice et la Cour pénale internationale.
La Ministre a ensuite dénoncé les dangers des armes nucléaires et de leur « héritage toxique », visibles aussi dans la région du Pacifique, mais aussi les risques liés aux systèmes d’armes autonomes, et appelé à établir des normes claires sur l’utilisation responsable d’autres technologies nouvelles et émergentes comme l’intelligence artificielle. Elle a rappelé l’engagement de son gouvernement dans la lutte contre les cybermenaces et l’extrémisme en ligne, notamment dans le cadre de l’Appel à l’action de Christchurch, qui mobilise des gouvernements, la société civile et les industriels du secteur pour éliminer les contenus terroristes et extrémistes violents en ligne.
S’agissant des crises humanitaires, la Ministre a rappelé que la nourriture ne devait pas être utilisée comme une arme et a regretté que l’instabilité et la violence dans de nombreuses régions ait placé des millions de personnes dans des situations humanitaires d’urgence cruelles et immorales. Elle s’est aussi dite préoccupée par l’effritement de la prospérité et de la sécurité dans la région du Pacifique bleu et s’est félicitée, dans ce cadre, du rôle central du Forum des îles du Pacifique et de l’adoption d’une feuille de route pour ces pays, la Stratégie pour le continent du Pacifique bleu 2050.
Notant qu’aucun pays n’était à l’abri des impacts des changements climatiques, Mme Mahuta a souligné que les pays du Pacifique subissaient déjà des pertes et des dégâts irréversibles. Elle a demandé aux grands émetteurs d’adapter leurs actions à l’objectif d’une limitation de l’augmentation des températures à 1,5 degré et d’éliminer progressivement l’utilisation des combustibles fossiles à l’échelle mondiale.
La Ministre a présenté les mesures ambitieuses prises par son pays, qui s’est engagé à réduire ses émissions de 50% par rapport aux niveaux de 2005 d’ici à 2030. La Nouvelle-Zélande aidera ses partenaires du Pacifique à se préparer et à répondre aux événements liés au climat, notamment sur la question prioritaire des pertes et des dommages, a-t-elle assuré. Elle a par ailleurs salué l’adoption du traité mondial sur la biodiversité des océans et le lancement des négociations sur un instrument international juridiquement contraignant pour mettre fin à la pollution plastique.
En conclusion, Mme Mahuta s’est dite favorable à une réforme de l’ONU et du système multilatéral dans son ensemble en se félicitant à cet égard de la tenue du Sommet de l’avenir de l’année prochaine.
M. NABIL AMMAR, Ministre des affaires étrangères, de la migration et des Tunisiens à l’étranger de la Tunisie, a réitéré le soutien de son pays aux efforts du Secrétaire général pour promouvoir le multilatéralisme. Le monde, a-t-il fait remarquer, traverse une phase délicate de multiplication des crises géopolitiques, d’augmentation de la pauvreté, de ralentissement dans la réalisation des objectifs de développement durable et d’élargissement du fossé entre le Nord et le Sud. Ces éléments, a-t-il estimé, dessinent une image très éloignée des buts et des valeurs qu’incarnent les Nations Unies. Il a donc appelé à renforcer la coopération et la solidarité internationale « sur la base de responsabilités communes mais différenciées ».
Des centaines de millions de personnes avaient fondé de grands espoirs dans la réalisation du Programme 2030, a relevé le Ministre, qui a regretté que les résultats actuels ne soient pas à la hauteur. À ce titre, il a réaffirmé le soutien de son pays au projet du Secrétaire général pour sauver les objectifs de développement durable et mis l’accent sur les mesures visant à pallier les problèmes de financement. Il s’est félicité de la création par le Secrétaire général d’un groupe pour limiter les répercussions de la guerre en Ukraine sur les prix de l’alimentation et de l’énergie. Dans le même élan, il a évoqué l’appel récent du Président de la Tunisie pour créer un stock stratégique mondial de céréales.
Pour M. Ammar, le système monétaire mondial a failli. Censé fournir un soutien aux pays en développement, il a fini par élargir le fossé qui les sépare des pays développés, a-t-il estimé, relevant que les pays en développement doivent maintenant choisir entre le remboursement de leur dette et les besoins de leur population. Il a lancé un appel à la réforme de la finance mondiale et préconisé des mesures pour faciliter le recouvrement des fonds pillés à l’étranger, afin qu’ils bénéficient aux populations des pays lésés.
Nous devons faire tout notre possible pour relever le défi des changements climatiques, a affirmé le Ministre, soulignant que, pourtant, « nos pays ne sont pas responsables de l’état de la planète ». Il a salué le lancement d’un Sommet sur l’ambition climatique par le Secrétaire général. Dans ce cadre, il a plaidé en faveur de l’octroi de financements climatiques aux pays les plus touchés.
S’inquiétant de l’aggravation de la situation migratoire, le Ministre a insisté sur la nécessité d’une approche globale de l’immigration illégale qui repose sur ses causes profondes. Cependant, a-t-il averti, il faut que toutes les parties assument leurs responsabilités: pays d’origine, de transit et de destination. La Tunisie n’acceptera pas l’implantation voilée de migrants en situation irrégulière sur son territoire et condamne les exploitations politiques ou médiatiques de la situation.
Enfin, M. Ammar a rappelé que son pays s’est engagé dans le processus de Notre Programme commun du Secrétaire général, une vision qui implique un système mondial plus équilibré, « sans différence entre les États », a-t-il insisté. Dans ce cadre, il a dénoncé « l’injustice historique infligée au peuple palestinien » et encouragé le Conseil de sécurité à fixer un cadre qui permette au peuple palestinien de construire un « État unique, contigu, sur la base des frontières de 1967 et avec Jérusalem comme capitale ». Réclamant l’arrêt des actions militaires en Libye et de l’escalade de la violence au Soudan, il a estimé que nous nous trouvions maintenant à la croisée des chemins, préconisant le respect de l’humanité, de notre croyance en un destin commun et de la Charte des Nations Unies pour rendre sa crédibilité au système multilatéral.
Mme THÓRDÍS KOLBRÚN REYKFJÖRD GYLFADÓTTIR, Ministre des affaires étrangères de l’Islande, a souligné que l’humanité vivait désormais, plus que jamais dans l’histoire, dans un état d’interdépendance, pour le pire mais aussi pour le meilleur: les problèmes dans une région peuvent en affecter d’autres, mais les solutions trouvées quelque part peuvent aussi être appliquées partout, instantanément. Hélas, c’est lorsqu’on en a le plus besoin que le multilatéralisme connaît sa crise la plus profonde, s’est-elle lamentée, estimant que nous étions tous « à la croisée des chemins ».
Notant que seuls 15% des objectifs de développement durable sont en bonne voie pour 2030, la Ministre a insisté sur la nécessité d’actions concrètes et s’est engagée à maintenir le cap en Islande où, a-t-elle admis, le bilan est contrasté, comme dans la plupart des pays. Elle a également mis en garde contre les risques climatiques accrus, rappelant que les plus vulnérables subissent le plus grand impact de ces crises. Sur le plan de la coopération internationale, la Ministre a célébré l’accord BBNJ sur la biodiversité marine comme un triomphe du multilatéralisme, reconnaissant l’importance de ce type d’accords pour faire face aux défis environnementaux.
Présentant la candidature de l’Islande au Conseil des droits de l’homme pour le mandat 2025-2027, Mme Gylfadóttir s’est inquiétée de la dégradation de ces droits à travers le monde —notamment en Afghanistan, en Iran, au Bélarus, au Soudan, au Myanmar ou en Israël et Palestine— et a salué les courageuses voix qui continuent de lutter pour les libertés. Elle a critiqué les politiciens populistes qui sapent les valeurs démocratiques tout en se protégeant par les mêmes droits humains qu’ils attaquent. Elle a également mis en garde contre les dangers de l’intelligence artificielle et a insisté sur la liberté d’expression comme un droit humain fondamental, non extensible aux « bots programmés pour propager la haine et les mensonges ».
La Ministre a dénoncé l’agression russe en Ukraine et a rappelé que son pays présidait le Conseil de l’Europe quand il a décidé d’établir un Registre des dommages. La Russie est l’agresseur et doit être arrêtée, a-t-elle tranché, appelant au soutien international en faveur de l’Ukraine qui défend, selon elle, notre système international. L’ONU, « un miracle de l’esprit humain depuis sa création », reste l’institution la plus pertinente pour inventer des solutions aux problèmes internationaux, a-t-elle ajoutant, jugeant néanmoins nécessaire de la réformer, en particulier le Conseil de sécurité. « Nous n’avons pas d’autre choix que de nous adapter », a-t-elle jugé.
M. SAMEH HASSAN SHOUKRY SELIM, Ministre des affaires étrangères de l’Égypte, a présenté le point de vue de son pays sur les priorités destinées à restaurer la confiance dans le multilatéralisme. Rappelant que, dans un monde dont l’interdépendance et la mondialisation sont les principales caractéristiques, « personne n’est en sécurité si tout le monde ne l’est pas », il a estimé que le succès de la sécurité collective dans de telles conditions dépend de celui des efforts communs pour assurer l’application efficace et non sélective des principes de la Charte des Nations Unies.
Les défis auxquels notre monde est confronté sont nombreux et interdépendants, a ajouté le Ministre, et la communauté internationale est loin d’avoir trouvé des solutions efficaces aux fléaux des conflits armés, de l’insécurité alimentaire et du terrorisme. Pour lui, les graves implications du conflit en Ukraine ont clairement montré que la sécurité et la stabilité d’une partie au conflit ne peuvent être abordées à l’exclusion d’une autre et que la responsabilité de la résolution de la guerre incombe in fine « à nous tous, et pas seulement à ceux qui sont directement touchés ». C’est dans cet esprit que l’Égypte a rapidement agi en créant un groupe de contact arabe et en participant à l’initiative des dirigeants africains pour mettre fin « à l’effusion de sang et rechercher un règlement pacifique de la crise russo-ukrainienne ».
M. Selim a ensuite appelé à la réforme immédiate et radicale des mécanismes de gouvernance internationale, héritages inefficaces dans le monde actuel des systèmes de sécurité de l’après-guerre. Ainsi a-t-il affirmé que seul l’octroi de deux sièges permanents du Conseil de sécurité à l’Afrique, avec pleins droits et privilèges, permettrait de corriger les injustices faites depuis des décennies « à notre continent ». L’Égypte aspire en outre à contribuer efficacement à la prospérité des BRICS, cela en défendant les intérêts et les ambitions du Sud, qui ne représente actuellement pas moins de 30% de l’économie mondiale, a-t-il dit.
À propos des changements climatiques, le Ministre, qui a rappelé que son pays avait réussi à mobiliser un consensus international en faveur de la justice climatique lors de la COP27 tenue l’an passé à Charm el-Cheikh, a appelé à la concrétisation du fonds pour les pertes et les préjudices lors de la COP28, qui aura lieu cet automne aux Émirats arabes unis. Sur la question de l’eau, M. Selim, qui a rappelé que les 100 millions d’Égyptiens dépendent du Nil pour 98% de leurs besoins, a rejeté toute mesure unilatérale relative à la gestion des ressources en eau transfrontalières. Il a cité comme mesure de cette nature le Grand barrage de la Renaissance éthiopienne, affirmant que sa construction avait été lancée sans consultations préalables ni études suffisantes quant à ses effets sur les États riverains. Il a reproché à l’Éthiopie de continuer d’exploiter ce barrage « en violation directe du droit international, de la Déclaration de principes de 2015 et de la Déclaration présidentielle de 2021 du Conseil de sécurité. En dépit de ces agissements, il a assuré que l’Égypte demeure optimiste que l’Éthiopie saura contribuer à un accord sur le partage des eaux du Nil qui sauvegardera ses intérêts, ceux de son pays et ceux du Soudan.
M. FAISAL BIN FARHAN AL FURHAN AL-SAUD, Ministre des affaires étrangères de l’Arabie saoudite, a souligné l’importance capitale de la Charte des Nations Unies et du droit international, avant de dire que son pays fait son possible pour, à l’horizon 2030, répondre aux aspirations des générations futures, notamment par l’autonomisation des femmes et des jeunes. Les droits humains revêtent une importance capitale pour l’Arabie saoudite, a-t-il également assuré, ajoutant que la législation nationale comporte des textes clairs à ce propos.
Le Ministre a poursuivi en plaidant pour un règlement de la situation palestinienne, fondé sur le droit international, en vue d’un État palestinien indépendant, dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale. Il a condamné les mesures unilatérales, arguant qu’elles violent le droit international et sapent les efforts vers une solution politique. Sur la même lancée, il a fait part de son souci quant à l’instabilité en Syrie, en Iraq, au Yémen, en Libye, au Liban et au Soudan, qui fait planer des menaces sur la sécurité régionale et mondiale. En outre, souhaitant que l’Afghanistan ne soit pas un refuge pour les terroristes, il a appelé au respect des droits du peuple dans le pays, y compris des droits de la femme. Pour illustrer le rôle pacificateur de l’Arabie saoudite dans la région, il a mentionné la reprise des relations diplomatiques avec l’Iran.
Concernant la guerre en Ukraine, M. Al Furhan Al-Saud a appelé les belligérants à conclure un accord dans le respect du droit international. Il a fait valoir que l’Arabie saoudite avait déployé des efforts soutenus en appui aux pays concernés, notamment pour obtenir la libération de prisonniers de nationalités diverses. En outre, a-t-il mentionné, son pays a invité l’Ukraine à la trente-deuxième session des États arabes à Djedda. Relevant par ailleurs l’importance des efforts visant à éliminer les armes nucléaires, il a exhorté la communauté internationale à honorer ses engagements.
Se félicitant des succès de son pays contre le terrorisme, il a mis en garde contre toute forme d’atteinte aux « valeurs sacrées » et contre la propagation de la haine et de l’islamophobie, appelant à empêcher de brûler le saint Coran. Il s’est félicité à ce sujet de la récente adoption par le Conseil des droits de l’homme de la résolution portant sur la lutte contre la haine religieuse constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence. Enfin, le Ministre a assuré du rôle prépondérant que joue son pays en faveur de la stabilité des marchés mondiaux de l’énergie, assurant qu’il contribue à la fiabilité, la durabilité et la sécurité des marchés mondiaux du brut, pour garantir à l’échelle mondiale une économie saine tant pour les producteurs que pour les consommateurs, par exemple à travers la coopération avec l’OPEP+.
M. MAHAMOUD ALI YOUSSOUF, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de Djibouti, a jugé nécessaire de reconnaitre tacitement que la direction prise par le monde était opposée à l’accélération du Programme de développement durable à l’horizon 2030 dont la présente session de l’Assemblée générale a fait son objectif. Il a déploré la suspicion mutuelle, qui freine la coopération internationale, et la « logique de club », qui s’oppose à un multilatéralisme intégré. Il y a vu la conséquence d’une lente érosion de la confiance mutuelle, qu’il a attribuée à une « résistance implacable au changement » des institutions mondiales créées après 1945, à une inégalité « qui se creuse et se fossilise » et à une compétition géopolitique accrue. Pour le Ministre, cette évolution n’est toutefois pas irréversible. Il a appelé à un investissement massif dans les efforts multilatéraux, en particulier les Nations Unies, pour établir un système qui tienne compte des réalités géopolitiques du moment et dans lequel les groupes s’engageraient à renouer des liens de solidarité forts.
M. Youssouf a jugé accablant pour la crédibilité du système le retard pris dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD). Malgré les engagements pris, des pays sont aujourd’hui davantage dans le besoin qu’il y a une décennie, le Fonds monétaire international (FMI) a annoncé qu’un tiers de l’économie mondiale serait en récession en 2023 et le PNUD a constaté que l’indice de développement humain baissait dans 9 pays sur 10, a énuméré le Ministre, qui a demandé une réforme urgente de l’architecture financière internationale, notamment pour réformer le régime de la dette, qui empêche les pays en développement et les pays les moins avancés d’investir dans les ODD. Les moyens d’y parvenir sont identifiés, a rappelé le Ministre, qui a demandé qu’on prenne mieux en compte le plan de sauvetage du Secrétaire général.
Le Ministre a ensuite présenté les mesures prises par son pays pour réaliser les ODD, citant en particulier l’action climatique, Djibouti étant situé trouvant dans une région particulièrement vulnérable aux changements climatiques. À cet égard, il a jugé urgent d’honorer les engagements pris dans l’Accord de Paris et s’est dit profondément déçu que la promesse de mobilise chaque année 100 milliards de dollars n’ait jamais été tenue. Il s’est en revanche réjoui de la création d’un fonds pour les pertes et les préjudices décidé lors de la COP27 et a souhaité que la COP28 adopte les mesures qui en permettront la mise en œuvre la mise en place concrète.
Au plan régional, le Ministre a apporté son soutien au Gouvernement somalien mais s’est inquiété du calendrier actuel de réduction des effectifs de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS). Djibouti est en outre très préoccupé par la crise au Soudan et souhaite une accélération de la mise en œuvre de l’Accord revitalisé au Soudan du Sud. Rappelant la nécessité d’un accord de paix inclusif au Yémen, le Ministre s’est félicité du succès de transbordement de la cargaison du pétrolier Safer, rappelant le rôle de base arrière et de coordination que Djibouti avait joué à cette occasion et voyant dans toute l’opération un exemple modèle de coopération internationale. Enfin, il a affirmé que son pays était disponible pour achever le processus de normalisation de ses relations avec l’Érythrée et trouver un règlement pacifique au différend frontalier qui oppose les deux pays.
M. SERGEI ALEINIK, Ministre des affaires étrangères du Bélarus, a souligné le fossé entre la discussion et l’action au sein des Nations Unies, dressant un parallèle inquiétant avec la Société des Nations, qui n’avait pas réussi à éviter la Seconde Guerre mondiale et a été oubliée. Selon lui, l’ONU, si elle veut éviter un sort similaire, devait agir plutôt que d’être un « observateur passif ». Citant le diplomate américain George Kennan, qui estimait qu’un « certain degré de conflit est présent dans toutes les relations internationales », le Ministre a appelé au compromis pour régler les antagonismes.
Pour parvenir à réformer l’institution et à débloquer la situation actuelle, M. Aleinik a offert trois pistes de réflexion. D’abord, il a exigé la fin de l’ostracisme politique, arguant que chaque État Membre devait être traité avec égalité et respect. Il a ainsi réprouvé l’utilisation du terme « régime » pour qualifier certains États, et a dénoncé les tentatives de limiter la participation d’États Membres aux activités de l’organisation. « Traitons-nous les uns les autres avec respect et égalité », a-t-il insisté.
En second lieu, le Ministre a critiqué la politisation de l’ONU, soutenant que l’organisation était de plus en plus perçue comme un instrument de la politique étrangère des États Membres plutôt que comme une plateforme de coopération mondiale. Les problèmes bilatéraux ne doivent pas être portés devant les organisations internationales », a-t-il recommandé, plaidant pour un retour à la mission originelle de l’ONU, qui est de servir les intérêts des peuples du monde.
M. Aleinik a également proposé une classification des problèmes mondiaux en deux catégories, selon leur complexité et leur degré de conflictualité. La première catégorie, qui regroupe les questions sécuritaires, est la plus délicate. La seconde, plus facile et consensuelle, comprend des sujets comme les changements climatiques, les pandémies et la criminalité transnationale. Pour le Ministre, il convient de régler d’abord ces derniers avant de s’attaquer à ceux, plus épineux, de la 0première catégorie. Il a cité comme exemple le succès de la résolution sur la lutte contre la traite des êtres humains présentée par le Belarus lors d’une récente session de l’ONU à Vienne
Abordant la crise alimentaire mondiale, le Ministre a estimé qu’elle était d’origine humaine et non d’ordre systémique. Les sanctions unilatérales en sont pour lui la cause principale, et il a donc appelé à leur suppression immédiate. Persuadé que nous assistons à un « glissement de pouvoir » de l’Occident vers le reste du monde, il a par ailleurs exhorté à élargir le nombre de membres permanents au Conseil de sécurité des Nations Unies, et il a annoncé la tenue d’une conférence internationale sur La sécurité eurasienne, à Minsk, les 26 et 27 octobre prochains. Enfin, il a mentionné la situation en Ukraine, regrettant que ce pays soit devenu « une monnaie d’échange dans le grand jeu de l’Occident pour préserver son hégémonie mondiale », et a critiqué les livraisons d’armes occidentales, qui ne font selon lui que « poursuivre la guerre jusqu’au dernier Ukrainien ».
M. SAYYID BADR BIN HAMAD BIN AMOOD ALBUSAIDI, Ministre des affaires étrangères d’Oman, a rappelé que le dialogue était non seulement le principe cardinal de la politique internationale de son pays mais aussi une pratique effective, la plus à même de résoudre les conflits à travers le monde. Réaffirmant son attachement au multilatéralisme, il a appelé la communauté internationale à respecter la Charte des Nations Unies, pour qu’un monde de prospérité, de dignité et de sécurité puisse voir le jour. « Nous continuerons à appuyer les causes justes et équitables », a ensuite déclaré le Ministre. La cause palestinienne en fait partie, a-t-il défendu, avant de la qualifier d’injustice durant depuis plus de 70 ans. Il s’est toutefois félicité que le peuple palestinien reste ferme en dépit de l’occupation israélienne brutale, et a fait part de son appui à la solution des deux États.
Mentionnant le conflit ukrainien, le Ministre a estimé que celui-ci, outre ses retombées humanitaires, posait des défis importants pour la paix internationale et le bon fonctionnement des chaînes d’approvisionnement. Il a invité les parties prenantes à entamer des négociations de paix. Sur la question des changements climatiques, il a présenté le plan d’Oman pour encourager les investissements dans les projets d’énergie renouvelable, basé sur une stratégie de zéro émission de carbone d’ici à 2050, et a confirmé la participation de son pays à la prochaine COP28 en novembre à Doha. Il a enfin défendu la « Vision 2024 » pour le développement durable d’Oman, qui inclut notamment un plan de modernisation du système éducatif, à tous les niveaux. Une condition essentielle pour le développement.
Concernant les droits humains, le Ministre a assuré que son pays visait à les renforcer, et à créer une communauté mondiale équitable, respectueuse des valeurs religieuses et culturelles. Il a condamné les actes incitant à la violence, à la haine et à la discrimination basés sur la religion ou la race, exhortant la communauté internationale à les criminaliser. Les défis mondiaux complexes d’aujourd’hui, notamment les changements climatiques, les épidémies mondiales, la traite des êtres humains et les conflits, nécessitent une coopération mondiale, a-t-il martelé. Il a enfin appelé à la mise en œuvre des principes du droit international, en évitant le « deux poids, deux mesures ». C’est seulement à cette condition que la confiance règnera entre les États et les peuples, a-t-il estimé.
M. EAMON COURTENAY, Ministre des affaires étrangères de Belize, a relevé que le monde actuel est marqué par des promesses solennelles régulièrement non tenues et un nationalisme étroit. Seuls 12% des ODD sont en bonne voie d’être atteints, et, pour la première fois, l’indice de développement humain a diminué à l’échelle mondiale pendant deux années consécutives, imposant un fardeau encore plus lourd aux plus vulnérables, s’est-il inquiété. De même, il a déploré que les pays du G20, responsables de 80% des émissions de gaz à effet de serre, continuent de manquer à leur devoir de réduire drastiquement celles-ci, alors que les températures moyennes mondiales des trois derniers mois ont été les plus élevées jamais enregistrées.
Le Ministre a ensuite plaidé pour une réforme urgente de l’architecture financière internationale, souhaitant que les politiques des institutions de celle-ci soient mieux alignées sur les objectifs en matière de climat et de développement. Il a aussi recommandé de réformer les critères d’éligibilité aux financements pour le développement, arguant que les critères actuels excluent certains pays vulnérables de l’accès à ces financements. Il faut donc des critères qui tiennent compte de leurs besoins, a-t-il dit. De plus, le Ministre a prôné un élargissement de la gouvernance des institutions financières internationales, afin d’y inclure la voix des pays en développement. « Les décisions qui nous concernant ne peuvent plus être prises sans nous. » De plus, pour donner un coup d’accélérateur à la réforme du Conseil de sécurité, M. Courtenay a appelé à la tenue de négociations fondées sur des textes.
Par ailleurs, il a abordé la « terrible injustice et l’héritage empoisonné du génocide indigène, de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves », lesquels ne peuvent continuer à être ignorés sur le fond. Les descendants d’esclaves continuent de lutter contre une discrimination raciale persistante et une marginalisation, a-t-il déploré en soulignant les effets dévastateurs d’un « traumatisme générationnel ». Il a imputé notamment le sous-développement, la pauvreté et les inégalités structurelles qui minent des pays de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) aux conséquences de l’esclavage. La CARICOM a présenté un plan en 10 points qui aborde « le cœur de la justice réparatrice telle que nous la concevons », a signalé le Ministre en expliquant la nécessité d’une telle justice pour pouvoir laver un tort historique aussi indélébile. « Aux gouvernements des pays européens qui ont permis ce mal, nous disons que le temps de la rédemption, de la réparation et du respect est arrivé, et nous l’exigeons! »
M. OSMAN SALEH MOHAMMED, Ministre des affaires étrangères de l’Érythrée, a dit craindre que les tentatives d’imposer un ordre mondial unipolaire au cours des 30 dernières années poussent de plus en plus la communauté mondiale vers le « précipice ». Il a également regretté que, dans cette réalité mondiale calamiteuse, le continent africain reste marginalisé, contraint de supporter le poids de ces politiques destructrices. Saluant les mouvements de résistance qui se développent en Afrique en réaction à l’esclavage moderne, au pillage incessant et à la domination d’anciennes puissances coloniales, il a dit voir dans les groupes terroristes Al-Qaida, Daech et autres Chabab des entreprises criminelles soutenues et financées par ces mêmes forces de domination à des fins politiques. Rappelant à cet égard que son pays n’a pas été épargné par les actes de déstabilisation déclenchés par les « forces de l’hégémonie », il a estimé que les sanctions imposées à l’Érythrée de 2009 à 2018 constituent un autre acte récent de transgression nécessitant réparation et responsabilisation.
Dans ce contexte, le Ministre s’est félicité de la « résistance vigoureuse et persistante » des peuples du monde. Cette tendance montre selon lui que nous sommes à l’aube d’une nouvelle réalité, à un carrefour historique qui augure un nouvel ordre mondial. Reconnaissant que ce changement ne sera « ni facile ni réalisable en peu de temps », il a souhaité qu’il s’appuie sur un bouleversement complet de l’architecture de gouvernance mondiale. À ses yeux, toute mesure « cosmétique » ne ferait qu’engendrer de faux espoirs chez les peuples et les pays du monde qui aspirent à de véritables changements. Dans ce cadre, l’ONU sera amenée à entreprendre de profondes réformes, a estimé l’orateur, pour qui les changements souhaités doivent être à la mesure des aspirations en matière de justice et d’état de droit, de respect de l’indépendance et de la souveraineté nationales, et d’avènement d’une nouvelle ère de partenariat.
De l’avis de M. Mohammed, l’ONU doit être en mesure, en tant que principale plateforme internationale, de remplir son mandat avec « efficacité et puissance ». Pour ce faire, la réforme « tant attendue » du Conseil de sécurité ne peut selon lui se limiter à une augmentation du nombre et de la représentation géographique de ses membres. L’architecture du droit de veto et les autres « distorsions institutionnelles » qui empêchent le Conseil d’exercer ses responsabilités sur la base du droit international doivent être examinées en prenant pour modèle le bilan historique, a soutenu le Ministre, selon lequel les marchandages politiques et l’utilisation abusive de la qualité de membre pour promouvoir des intérêts nationaux étroits ne sont pas compatibles avec la responsabilité stipulée dans la Charte des Nations Unies. Les membres de cet organe doivent refléter le large éventail des États Membres de l’ONU, a-t-il conclu, non sans inviter l’Assemblée générale à examiner ces « paramètres complexes » au cours de la présente session.
M. ARARAT MIRZOYAN, Ministre des affaires étrangères de l’Arménie, a relevé que, s’il y a quelques années, « nous envisagions le déclin du multilatéralisme, aujourd’hui nous assistons à l’érosion de ce principe même et de ses fondements », ajoutant qu’il ne s’agissait pas « d’une inférence théorique mais d’une réalité avec laquelle le peuple arménien du Caucase du Sud fait face à la situation depuis trois ans ».
Affirmant que le Gouvernement arménien avait déployé des efforts importants « et dûment constatés » pour résoudra la crise qui oppose son pays à l’Azerbaïdjan, il a déploré n’avoir pas de partenaire pour la paix mais un pays qui déclare ouvertement que « le plus fort a raison » et utilise constamment la force pour perturber le processus de paix. Il a estimé que la récente « offensive à grande échelle » contre le peuple autochtone du Haut-Karabakh démontrait « un mépris ouvert et un défi de l’Azerbaïdjan contre la communauté internationale » réunie à New York. Pour lui, le message de l’Azerbaïdjan est clair: « Vous pouvez parler de paix et nous pouvons faire la guerre et vous ne pourrez rien changer. »
M. Mirzoyan a accusé l’Azerbaïdjan d’avoir « cyniquement défini l’atroce offensive à grande échelle qui a coûté des centaines de vies, dont des femmes et des enfants » comme une opération antiterroriste locale, alors qu’il s’agit en fait d’une « atrocité de masse planifiée et bien orchestrée » qui a débuté par le blocage, le 12 décembre 2022, du corridor de Latchine, seule route reliant le Haut-Karabakh à l’Arménie et au monde extérieur. Il a rappelé que, le 22 février dernier, la Cour internationale de Justice avait ordonné à titre provisoire à l’Azerbaïdjan d’assurer la libre circulation le long du corridor de Latchine, et que, lors d’une réunion, le 16 août dernier, du Conseil de sécurité, la majorité de ses membres avaient eux aussi insisté sur la nécessité de débloquer ce couloir. Il a également rappelé la séance du Conseil tenue le 21 septembre 2023, après l’offensive de l’Azerbaïdjan au Haut-Karabakh.
Pour le Ministre toutefois, il est clair que les problèmes ne peuvent pas être résolus simplement par des déclarations et des appels génériques. Dénonçant le recours à la famine comme méthode de guerre et faisant état des inquiétudes exprimées hier par la conseillère spéciale du Secrétaire général de l’ONU pour la prévention du génocide, il a averti que les affirmations selon lesquelles les Nations Unies ne sont pas présentes sur le terrain et n’ont donc pas la capacité de vérifier la situation ne pouvaient être une excuse pour l’inaction. Il a demandé à la communauté internationale de condamner la reprise des hostilités et le ciblage des colonies civiles et a réclamé, comme déjà dans le passé, l’envoi immédiat au Haut-Karabakh d’une mission interinstitutions d’évaluation des besoins et d’établissement des faits. Il s’est dit convaincu que des mécanismes doivent être mis en place pour garantir le retour des personnes déplacées depuis la guerre de 2020. Il a ensuite demandé que soit mis en place un mécanisme international durable et viable pour empêcher le nettoyage ethnique de la population autochtone du Haut-Karabakh. Il a également demandé que la communauté internationale exige le retrait de toutes les unités azerbaïdjanaises de toutes les colonies civiles du Haut-Karabakh.
La politique de nettoyage ethnique contre le Haut-Karabakh n’est qu’une partie d’un tableau plus vaste, a ensuite affirmé M. Mirzoyan, qui a accusé l’Azerbaïdjan de vouloir impliquer la République d’Arménie elle-même dans des actions militaires et d’élargir ainsi les hostilités. Il en a vu la preuve dans la réticence de l’Azerbaïdjan à s’engager de manière constructive dans un processus de paix avec son pays, notamment en reconnaissant son intégrité territoriale, en retirant ses forces armées des territoires arméniens occupés et en délimitant la frontière interétatique.
Le peuple arménien « défendra fermement notre souveraineté, l’indépendance et la démocratie et surmontera la guerre hybride déclenchée contre nous », a conclu M. Mirzoyan, après avoir réitéré la volonté de son pays de s’engager en faveur de la normalisation des relations et de l’établissement d’une paix durable.
M. BASSOLMA BAZIE, Ministre d’État et Ministre du service civil du Burkina Faso, a mis en garde contre l’ivresse du pouvoir, « l’hypocrisie diplomatique et les mensonges d’État » faisant courir l’ONU à sa perte. Dénonçant la paralysie du Conseil de sécurité, il a avancé que les preuves de la dissonance entre les discours s’agissant du respect des valeurs de la Charte –droit à l’autodétermination, souveraineté des États, inviolabilité du territoire et respect du droit international, entre autres– se trouvaient en Libye, au Sahel et dans « la crise entre la Russie et l’Ukraine ». Au sujet de la Libye, il a exigé des excuses de la communauté internationale pour l’avoir « saccagée et mise à genoux », avant que les eaux du déluge n’endeuillent le pays davantage. Il a désigné la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Union africaine (UA) et un ancien Président de la France, M. Nicolas Sarkozy, comme responsables de la chute du Colonel Kadhafi.
Partant de ce constat, il a dressé un parallèle entre cette ingérence en Libye et la situation actuelle au Niger. Du communiqué lu par les autorités du Niger, il en ressort que la France est, « de connivence avec le Secrétariat général de l’ONU », à la base de cette situation inqualifiable. L’ONU ne doit en aucun cas être un instrument dans les mains d’un quelconque pays, fut-il la France. Il a aussi mis en opposition les discours invitant au respect de la Charte et le fait que les dirigeants représentant le peuple frère du Niger aient été pratiquement interdits d’accès au Siège des Nations Unies. Le Ministre burkinabé a solennellement appelé tous les peuples d’Afrique à se mobiliser davantage dans la fraternité « afin d’éviter que les impérialistes mettent le feu au Niger comme en Libye ». La CEDEAO, l’UA et l’ONU, a-t-il insisté, doivent représenter les peuples, au lieu de servir une poignée de chefs d’État: « elles ne doivent pas être utilisées et instrumentalisées pour déstabiliser des pays frères en assassinant leurs leaders ».
Concernant l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie, le Ministre a reproché à plusieurs pays occidentaux, notamment les États-Unis et l’Union européenne (UE), de « déverser toute sorte de soutiens, notamment militaires », à l’Ukraine. Les populations civiles ukrainiennes engagées comme volontaires, dont certains pilotent même des chars, sont félicitées et traitées de patriotes, s’est-il étonné.
Vivement critique envers la France tout au long de son intervention, il l’a accusée d’être « venue de nulle part imposer son instrument qu’est le G5 Sahel », alors que le Mali, le Burkina Faso, le Niger et d’autres pays se sont organisés sur leurs frontières communes en mutualisant leurs forces pour faire face au terrorisme. Il a aussi très sévèrement critiqué la communauté internationale pour avoir imposé des sanctions au Burkina Faso à la suite du coup d’État du 30 septembre 2022, communauté internationale qu’il a qualifiée de « nébuleuse » et caractérisée par sa « non-assistance à un État en proie au terrorisme » et sa « complicité au pillage de l’Afrique », entre autres. De son point de vue, cette communauté internationale devrait être traduite devant la Cour pénale internationale (CPI).
Le Ministre a évoqué deux groupes armés agissant au Burkina Faso -les « forces de défense et de sécurité » et les « volontaires pour la défense de la patrie »- en des termes positifs, les qualifiant de « patriotes ». Or certains chefs d’État de la CEDEAO et de l’UA, s’est-il alarmé, tentent de faire croire à la communauté internationale que ce sont des milices: « C’est cela, le mensonge éhonté d’État! » Enfin, sur la question de la présence du groupe Wagner au Burkina Faso « chantée par une certaine presse téléguidée depuis l’Élysée », il a déclaré que ces groupes armés susdits constituaient en fait le groupe Wagner. « Oui, Monsieur le Président, c’est nous, les Wagner du Burkina Faso! », s’est exclamé le Ministre.
M. DATO SERI PADUKA AWANG HAJI ERYWAN BIN PEHIN DATU PEKERMA JAYA HAJI MOHD YUSOF, Ministre des affaires étrangères du Brunéi Darussalam, a rappelé qu’à mi-parcours du Programme 2030, il est opportun de réfléchir à une vision commune d’un monde durable afin d’effectuer des ajustements dans les domaines exigeant des efforts supplémentaires. Il s’est réjoui des réalisations nationales entreprises conformément au plan Wawasan Brunei 2035 visant à créer une économie dynamique et durable. Il a toutefois indiqué que des défis liés à la collecte des données fiables a entravé le suivi et l’évaluation précise des progrès accomplis pour réaliser les ODD. Il a parlé du lancement, dans son pays, du centre de l’ASEAN pour les changements climatiques, précisant que celui-ci permettra de renforcer la collecte de données sur l’action climatique.
Revenant sur le thème de cette session, le Ministre a rappelé la nécessité d’associer tolérance et respect aux principes de confiance et de solidarité. À ce titre, il a fustigé la multiplication d’actes d’intolérance, dénonçant notamment les actions haineuses dirigées contre la foi islamique. Notant que de tels actes sapent les efforts en faveur d’une paix durable, il a appelé à une action accrue contre la haine religieuse. Il est inacceptable de justifier la haine religieuse, même sous le prétexte de la liberté d’expression, a-t-il tranché. Le Ministre a ensuite réaffirmé le droit du peuple palestinien à l’autonomie, l’autodétermination et la paix, et dénoncé les politiques et pratiques agressives de la « puissance occupante », condamnant avec la plus grande fermeté les actions qui violent de manière flagrante les droits et la dignité du peuple palestinien. Il a également exhorté les Nations Unies à maintenir leur engagement en faveur de la solution des deux États.
Évoquant les répercutions multiples causés par la COVID-19, le Ministre a estimé que le monde était à un carrefour déterminant pour son avenir. Il a déploré le manque de détermination commune face à une situation caractérisée par des crises humanitaires et une méfiance globale, et appelé à ne pas céder aux divisions. Nous ne devons pas laisser la méfiance prendre le pas sur l’unité, a-t-il lancé.
M. YVAN GIL PINTO, Ministre du pouvoir du peuple et des affaires étrangères du Venezuela, a critiqué l’interventionnisme des États-Unis dans le différend territorial opposant son pays au Guyana, différend qu’il a décrit comme « un conflit territorial vieux de plus de 200 ans sur notre territoire de Guayana Esequiba ». Le Gouvernement des États-Unis, a-t-il détaillé, veut s’approprier les ressources pétrolières vénézuéliennes en utilisant la société Exxon Mobil, qui a incorporé dans son personnel des membres du Gouvernement du Guyana et accorde des concessions pétrolières dans une mer territoriale non délimitée, en violation totale du droit international. Il n’est pas possible de disposer unilatéralement d’un territoire contesté, mais le Gouvernement du Guyana persiste dans son comportement illégal, a fustigé le Ministre avant de dénoncer l’intention du Gouvernement des États-Unis de militariser la situation.
Plus largement, il a brocardé les provocations irresponsables des États-Unis, qui, en divisant le monde en blocs de pouvoir, exacerbe les conflits et entraîne l’humanité dans une course aux armement inquiétante. Il a aussi dénoncé la politique d’agression américaine se manifestant par l’application illégale de mesures coercitives unilatérales à l’encontre d’un tiers de l’humanité. C’est une attaque délibérée contre le droit au développement des peuples qui entrave la réalisation du Programme 2030, a-t-il fustigé. Le Ministre a précisé que plus de 930 mesures coercitives unilatérales ont été appliquées contre le Venezuela par le Gouvernement américain « et ses complices », pour des pertes estimées à plus de 232 milliards de dollars, sans compter la chute brutale du PIB vénézuélien. Il a également déploré la confiscation de milliards de dollars de ressources souveraines séquestrées dans le système financier international, dont 31 tonnes d’or séquestrées par le Gouvernement britannique à la Banque d’Angleterre.
Le Ministre a exigé la fin complète, immédiate et inconditionnelle de toutes les politiques illégales de sanctions et de blocus auxquelles sont soumis le Venezuela, Cuba, l’Érythrée, l’Iran, le Nicaragua, la Syrie, le Zimbabwe « et d’autres nations sœurs ». Pour y faire face, il a proposé la création d’une « zone libérée des mesures coercitives unilatérales » dans laquelle ces pays pourront effectuer leurs transactions financières et leurs paiements interbancaires. Cela leur permettrait, a-t-il expliqué, d’assurer des investissements directs et de faire commerce légalement entre nations, sans risques, ni obstacles arbitraires ou punitifs de la part des puissances occidentales.
Mme ANNE BEATHE TVINNEREIM, Ministre du développement international en Norvège, rappelant le soutien indéfectible de son pays aux principes de la Charte, a exprimé son inquiétude face à l’agression de la Russie envers l’Ukraine, pays voisin du sien. Elle a appuyé la formule de paix du Président de l’Ukraine et a indiqué que la Norvège continuera de fournir l’aide civile, militaire et humanitaire aux Ukrainiens aussi longtemps qu’il le faudra. Elle a également déploré les répercussions mondiales de cette guerre sur l’énergie, l’alimentation et l’inflation qui mettent en péril le Programme 2030 et détournent l’attention d’autres problèmes urgents. Pourtant, les ODD et les objectifs de l’Accord de Paris doivent être atteints, a-t-elle exhorté, soulignant les efforts environnementaux de son pays pour réduire les émissions, faciliter la création d’emploi et améliorer l’accès aux ressources énergétiques. Elle a également précisé les efforts pour améliorer la sécurité alimentaire, notamment les investissements dans les petits producteurs et la lutte contre le gaspillage, ainsi que pour assurer une gestion durable et multilatérale des océans en dépit des tensions géopolitiques. Elle a en outre appelé à investir dans la couverture sanitaire universelle pour mieux se préparer aux futures pandémies.
Revenant sur les tensions géopolitiques, la Ministre a souligné que sans dialogue, il est plus difficile de se comprendre et de résoudre les problèmes, appelant à un renouveau du dialogue régional au Moyen-Orient, en Colombie, dans la Corne de l’Afrique et en Afghanistan. En outre, elle a mentionné l’importance des droits humains, notant que les sociétés prospèrent lorsque les femmes et les filles peuvent y participer sur un pied d’égalité et jouir de leurs droits sexuels et reproductifs. Or les normes sont en train de s’éroder dans de nombreux endroits, s’est-elle inquiétée, soulignant que le potentiel humain est notre ressource la plus précieuse. Elle a ensuite exhorté les États Membres de se mettre au travail pour trouver des solutions communes, revitaliser le Programme 2030 et honorer les engagements internationaux.
M. ABDOULAYE DIOP, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Mali, a dit s’exprimer au nom du Président de la transition, du peuple malien et du « Chef d’État du Niger », M. Abdourahmane Tiani, « empêché de s’exprimer » à la tribune.
M. Diop a rappelé qu’avant une décennie de violences aux conséquences dévastatrices, la région du Sahel était autrefois connue pour être un havre de paix, de cohésion sociale et de vivre ensemble. Face aux menaces, le Mali a changé de paradigme et pris son destin en main, a-t-il affirmé, précisant que les forces de sécurité maliennes s’acquittent de leurs missions régaliennes. Le peuple malien a confiance dans l’engagement du Gouvernement contre les groupes terroristes a -t-il assuré.
Le Ministre a ensuite dénoncé les ingérences de puissances qui facilitent les activités de groupes armés terroristes au Mali et au Sahel. Le 15 août 2022, le Mali a alerté le Conseil de sécurité sur les actes d’hostilité commis par la France, a-t-il expliqué. Accusant la France d’avoir libéré des terroristes dans la zone frontalière du Burkina Faso, du Mali et du Niger, il a également dénoncé des manœuvres de déstabilisation visant à retarder ou empêcher des demandes de financements auprès des institutions internationales ou régionales.
Rappelant qu’une action militaire ne suffit pas à enrayer de manière durable le terrorisme, M. Diop a plaidé en faveur d’une stratégie intégrée, tout en indiquant qu’après 10 ans de présence la réponse sécuritaire internationale n’est pas à la hauteur des menaces et ne tient pas compte des attentes des populations. Alors qu’en 2013, l’insécurité ne concernait que les régions du nord, elle s’est, depuis, propagée au centre et au sud, a-t-il relevé. Il a rappelé qu’en juin 2023 le Conseil de sécurité avait approuvé la demande de retrait sans délai de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), qui interviendra en décembre 2023, conformément à la résolution 2690 (2023) du Conseil de sécurité.
Réaffirmant l’attachement du Mali aux idéaux de la Charte de l’Organisation des Nations Unies, M. Diop a déploré l’incapacité du Conseil de sécurité à parvenir à un consensus pour dénoncer les actes barbares commis le 7 septembre à Gao, Bourem et Bamba. De la part du Mali, la riposte aux terroristes sera immédiate, a-t-il averti.
Le Ministre a réitéré sa solidarité et son soutien au Gouvernement et au peuple du Niger. Il a dénoncé les actions et mesures coercitives prises par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union monétaire ouest-africaine contre ce pays. Réaffirmant l’opposition du Mali à toute intervention militaire au Niger, il a ajouté que celle-ci constituerait une menace directe pour la région et a rappelé les conséquences désastreuses de l’intervention menée en Libye et autorisée par le Conseil de sécurité en dépit de l’avis des dirigeants africains. Si une telle situation se reproduisait au Niger, le Mali ne resterait pas les bras croisés, a-t-il averti.
M. Diop a réitéré son soutien à une réforme du Conseil de sécurité afin de le rendre plus représentatif. Il a également salué l’ouverture des BRICS à de nouveaux états africains ainsi que l’élargissement du G20 à l’Union africaine, qualifié d’encourageant mais insuffisant. Enfin, réitérant son attachement à la coopération internationale, le Ministre a adressé une mention particulière à la Fédération de Russie et rappelé que l’alliance Mali-Burkina-Faso et Niger vise à renfoncer une intégration des peuples fondée sur la solidarité, le respect de la dignité, l’affirmation de la souveraineté et rejette toutes formes d’ingérence extérieure.
Mme REEM AL HASHIMY, Ministre d’État pour la coopération internationale des Émirats arabes unis, a relevé que la communauté internationale est capable de trouver des solutions innovantes aux problèmes grâce à ses institutions multilatérales fortes, ses cadres juridiques et la technologie. C’est une volonté politique forte et une vision de l’avenir perspicace qui manquent, a-t-elle regretté, prônant une réforme du Conseil de sécurité en matière de droit de veto, de membres permanents et non permanents, et de méthodes de travail. Elle a ensuite rappelé l’importance du respect du droit international, de l’intégrité territoriale, des solutions politiques, des valeurs communes, de la diversité politique et des disparités de développement, soulignant le rôle significatif des organisations internationales et régionales pour apaiser les tensions entre les puissances mondiales.
Après avoir appelé l’Iran à mettre fin à son occupation de trois îles émiriennes et l’Iraq à se pencher sur les effets négatifs de sa loi sur la navigation maritime dans la région de Khor Abdullah, elle a précisé que les Émirats arabes unis œuvrent en faveur de l’intégration économique régionale et font leur possible pour empêcher les groupes armés de maintenir une présence dans la région. Les conflits ne sont pas inévitables mais la sécurité et la prospérité ne peuvent être rétablies qu’avec une volonté politique, a-t-elle insisté, réitérant le soutien de son pays à l’établissement d’un État palestinien indépendant. Condamnant les discours de haine et l’extrémisme, la Ministre a déploré qu’il y ait deux poids, deux mesures en matière de promotion de la tolérance. Il est nécessaire de garantir les droits humains et de prohiber les pratiques racistes, a-t-elle exhorté, pointant également la discrimination envers les femmes en Afghanistan.
Elle a ensuite appelé la communauté internationale à s’occuper des risques de prolifération nucléaire, tout comme de l’aide humanitaire aux peuples affectés par les conflits dans des pays où des sanctions sont appliquées, annonçant à cette occasion le lancement d’une plateforme numérique pour une meilleure gestion de l’aide internationale dans les pays concernés. Par ailleurs, elle a appelé à des changements pour tenir les promesses de l’Accord de Paris. Elle a donné les quatre axes sur lesquels la COP28, qui aura lieu dans son pays, se penchera pour accélérer la transition énergétique et renforcer la résilience des communautés. La capacité de financement, l’amélioration de la structure financière internationale et la participation du secteur privé seront ici primordiaux, a-t-elle ajouté, appelant la communauté internationale à développer des solutions collectives. L’action multilatérale pour le climat permettra aussi de minimiser la crise alimentaire, la pénurie d’eau et les répercussions des catastrophes naturelles, a-t-elle fait valoir. L’action collective n’est plus une option mais un besoin urgent pour bâtir un avenir inclusif et durable, a-t-elle conclu.
Droits de réponse
La Chine a réagi à l’accusation des Philippines sur la prétendue violation du droit international en mer de Chine méridionale. Mon gouvernement, a-t-elle dit, ne reconnaît pas la décision de la Cour d’arbitrage qui ne saurait compromettre notre souveraineté. Nous sommes prêts à dialoguer avec les Philippines pour trouver des solutions communes à ce différend, a tout de même déclaré la Chine. À son tour, le Guatemala a répondu au Belize, en rappelant que plusieurs rapports publiés par les États d’Amérique du Sud ont reconnu sa culture de paix. Nous avons également, a-t-il ajouté, une collaboration bilatérale, au niveau militaire. Le Guatemala a insisté sur sa lutte contre le trafic de drogues et s’est présenté comme victime des attaques des groupes radicaux du Belize, au détriment de sa souveraineté. Malgré ces provocations, les soldats guatémaltèques n’ont jamais riposté car leur pays honore ses engagements et s’en remet à la compétence de la Cour internationale de Justice (CIJ). En attendant, a encore souligné le Guatemala, nous sommes l’un des principaux investisseurs au Belize.
L’Iran a réitéré sa souveraineté sur les îles d’Abou Moussa, de la Grande-Tounb et de la Petite-Tounb, qui feront toujours partie intégrante de son territoire. Il a tout de même exprimé sa volonté d’améliorer ses relations avec les Émirats arabes unis sans pour autant renoncer à sa souveraineté. Répondant au Koweït, il a réaffirmé que sa politique étrangère est fondée sur le respect du droit international et les relations de bon voisinage. Les différends sur l’exploitation d’hydrocarbures devraient être réglés dans le cadre de ces relations, a-t-il ajouté avant que les Émirats arabes unis ne soulignent que les trois îles font partie intégrante de son territoire. Ils ont dénoncé leur occupation et accusé l’Iran de rester sourd aux appels à la médiation. Ils ont tenu à rappeler à l’Iran la nécessité de respecter la Charte des Nations Unies et le droit international, afin de parvenir à un règlement pacifique de ce contentieux, par le biais de négociations directes ou la saisine de la CIJ.