En ouverture de son débat annuel, l’Assemblée générale résonne d’appels à la solidarité mondiale, au respect de la Charte et à la réforme du Conseil de sécurité
« Obscurci » pour la deuxième année consécutive par « l’ombre de la guerre de conquête illégale et de provocation de la Russie contre l’Ukraine », selon la formule du Président des États-Unis, le débat annuel de l’Assemblée générale s’est ouvert, aujourd’hui, sur des appels à la solidarité avec le monde en développement, au respect des principes de la Charte des Nations Unies et à la réforme des institutions multilatérales, au premier rang desquelles le Conseil de sécurité. Bon nombre des chefs d’État qui se sont exprimés ont également plaidé pour l’intensification de l’action climatique, thème cher au Secrétaire général de l’Organisation, pour qui il est encore temps d’agir pour tenir les objectifs de l’Accord de Paris. Le Président de l’Assemblée a, lui, insisté sur l’aide aux plus vulnérables en matière d’atténuation et d’adaptation aux variations du climat.
Dans une intervention à la tonalité sombre, le Chef de l’ONU a d’emblée constaté que, face aux tensions géopolitiques qui s’accentuent et aux défis mondiaux qui se multiplient, « nous semblons incapables de nous rassembler pour répondre ». Mettant en garde contre le risque d’une « grande fracture » dans les systèmes économiques et financiers et dans les relations commerciales, M. António Guterres a jugé opportun de renouveler les institutions multilatérales sur la base des réalités économiques et politiques du XXIe siècle. Cela implique de réformer le Conseil de sécurité « en fonction du monde d’aujourd’hui », a-t-il souligné, avant de réitérer son appel lancé au G20 en faveur d’un « compromis mondial ».
Il a été rejoint dans cette conclusion par plusieurs intervenants, à commencer par le Président du Brésil, qui a vu dans la paralysie du Conseil de sécurité la preuve même de la « nécessité de sa réforme ». Conflit en Ukraine oblige, le Président de la Pologne s’est dit du même avis, compte tenu de « l’impasse décisionnelle » au sein du Conseil, tandis que son homologue des États-Unis renouvelait sa proposition d’élargissement de l’organe à de nouveaux membres. À cet égard, le Président du Portugal a soutenu la promotion du Brésil et de l’Inde à des sièges permanents, le Chef de l’État sud-africain souhaitant quant à lui que la voix de son continent soit mieux entendue au sein des instances multilatérales. De son côté, le Président de la Türkiye a estimé urgent de bâtir une architecture globale de sécurité capable de répondre aux intérêts de toutes les régions du monde, celui-ci ne se résumant pas à « cinq pays ».
Également favorable à une réforme profonde de l’architecture financière internationale, aujourd’hui « dysfonctionnelle, dépassée et injuste », le Secrétaire général a appelé à faire progresser le plan de relance des objectifs de développement durable (ODD) de 500 milliards de dollars par an, en allégeant le fardeau financier des économies en développement et émergentes, en intensifiant le financement du développement et en garantissant des mécanismes efficaces d’allégement de la dette. Dans le même esprit, le Président de la soixante-dix-huitième session de l’Assemblée générale a invité les États Membres à « raviver la solidarité mondiale », appuyé par la plupart des pays du Sud.
M. Dennis Francis s’est par ailleurs alarmé de la succession de coups d’État en Afrique qui, selon lui, sont autant de revers pour les progrès accomplis par le continent ces dernières années dans le cadre de l’Agenda 2063 de l’Union africaine. La recrudescence des conflits et des coups de force rend plus important que jamais l’engagement de paix énoncé dans la Charte des Nations Unies, a renchéri M. Guterres, pour qui toutes les voies doivent être explorées pour alléger les souffrances des civils en Ukraine et au-delà, l’Initiative de la mer Noire -dont la Russie s’est retirée- étant l’une d’elles.
Présent à ce débat annuel pour la première fois depuis le début de l’invasion de son pays, le Président de l’Ukraine a appelé de ses vœux un dialogue qui n’ait pas lieu « derrière des portes closes » mais qui soit un travail « ouvert » de toutes les nations pour la paix. Il a ajouté qu’il détaillerait demain, lors d’une réunion spéciale du Conseil de sécurité, sa « formule pour la paix ». Se réjouissant que, fait sans précédent dans l’histoire moderne, la possibilité existe de mettre fin à l’agression « selon les conditions de la nation attaquée », il a réfuté toute tentative d’entente dans les coulisses en expliquant qu’on ne peut pas faire confiance au mal. « Demandez à Prigozhin si Putin tient ses promesses », a-t-il lancé, avant de terminer son intervention sous des applaudissements nourris.
Au-delà des tensions actuelles et des risques émergents, la priorité reste de s’attaquer aux effets dévastateurs des changements climatiques, a maintenu le Secrétaire général. Regrettant que les actions dans ce sens soient encore « extrêmement insuffisantes », il a tenu à assurer qu’il est encore temps de maintenir la hausse des températures dans la limite de 1,5 degré fixée par l’Accord de Paris. Dans le prolongement de son pacte de solidarité climatique, il a appelé à la fin du charbon d’ici à 2030 pour les pays de l’OCDE et d’ici à 2040 pour le reste du monde, ainsi qu’à la fourniture par les pays développés de 100 milliards de dollars pour l’action climatique des pays en développement, « comme promis ».
Un appel auquel ont été sensibles la Présidente de la Slovénie et ses homologues du Brésil et de la Colombie, ce dernier reprochant vertement aux pays développés de ne pas tenir leur promesse de financement de l’adaptation: « Ils n’ont pas 100 milliards de dollars à donner aux pays en développement pour se défendre contre les inondations, les tempêtes et les ouragans, mais ils peuvent les débourser en un seul jour pour que Russes et Ukrainiens puissent s’entretuer », a-t-il déploré. Sur cette même ligne, le Chef de l’État cubain a indiqué qu’en vue de la COP28, qui se tiendra en fin d’année à Dubaï, le Groupe des 77 et la Chine s’emploieraient à défendre la mise en œuvre du nouveau fonds pour les pertes et dommages et à accélérer l’élaboration d’un nouveau cadre de financement climatique.
Lui-même citoyen d’une région gravement exposée aux changements climatiques, les Caraïbes, le Président de l’Assemblée générale a pour sa part invité les États Membres à reconnaître les impacts croissants de ce phénomène, notamment en soutenant financièrement les plus vulnérables dans les domaines de l’atténuation, de l’adaptation et du renforcement de la résilience. M. Francis a du reste annoncé son intention de créer prochainement un groupe consultatif de haut niveau sur les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petit États insulaires en développement.
RAPPORT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR L’ACTIVITÉ DE L’ORGANISATION (A/78/1)
Déclarations liminaires
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétairegénéral de l’ONU, a dédié ses premières pensées aux milliers de personnes qui, à Derna, en Libye, ont perdu la vie dans des inondations sans précédent, victimes du chaos climatique, d’années de conflit et de dirigeants qui n’ont pas réussi à trouver le chemin de la paix. À ses yeux, Derna est un « triste instantané de l’état de notre monde », fait d’iniquité, d’injustice et d’incapacité à relever les défis. De fait, a relevé le Chef de l’ONU, face aux tensions géopolitiques qui s’accentuent et aux défis mondiaux qui se multiplient, « nous semblons incapables de nous rassembler pour répondre ». Il a constaté que nous nous dirigeons désormais vers un monde multipolaire, notant que cette évolution peut être positive pour la justice et l’équilibre dans les relations internationales. « Mais la multipolarité ne peut à elle seule garantir la paix », a-t-il mis en garde.
Face à la menace d’une grande fracture dans les systèmes économiques et financiers et dans les relations commerciales, il est grand temps, a-t-il dit, de renouveler les institutions multilatérales sur la base des réalités économiques et politiques du XXIe siècle. « Cela signifie réformer le Conseil de sécurité en fonction du monde d’aujourd’hui », a-t-il souligné, soutenant que « l’alternative à la réforme n’est pas le statu quo » mais « une fragmentation accrue ». Alors que les divisions se creusent au sein des pays, que la démocratie est menacée, que l’autoritarisme est en marche, que les inégalités s’accentuent et que les discours de haine se multiplient, notre monde a besoin d’un « sens politique », a-t-il affirmé, avant de réitérer son appel lancé au G20 en faveur d’un « compromis mondial ».
Cela commence par la détermination à respecter l’engagement de paix énoncé dans la Charte des Nations Unies, a poursuivi le Secrétaire général, pour qui la recrudescence des conflits, des coups d’État et du chaos crée un monde d’insécurité pour tous. Dénonçant les « horreurs » déclenchées par l’invasion de l’Ukraine par la Russie, il a rappelé que cette guerre a de graves conséquences pour l’ensemble de la communauté internationale. Nous devons explorer toutes les voies possibles pour alléger les souffrances des civils en Ukraine et au-delà, a-t-il plaidé, non sans relever que l’Initiative de la mer Noire était « l’une de ces pistes ».
Le Chef de l’ONU a ensuite constaté que, partout dans le monde, d’anciennes tensions s’enveniment et de nouveaux risques émergent, évoquant notamment les crises et conflits en cours au Sahel, au Soudan, dans l’est de la République démocratique du Congo, en Haïti, en Afghanistan, au Myanmar et au Moyen-Orient. Face à ces crises croissantes, le système humanitaire mondial est au bord de l’effondrement, a-t-il alerté, exhortant tous les pays à financer l’Appel humanitaire mondial car « si nous ne nourrissons pas ceux qui ont faim, nous alimentons les conflits ». Il a également fait savoir que l’ONU soumet à l’examen des États Membres des idées pour un Nouvel Agenda pour la paix. Il s’agit, a-t-il détaillé, de réaffirmer l’engagement en faveur d’un monde exempt d’armes nucléaires, de renforcer la prévention aux niveaux mondial et national, de placer le leadership des femmes au centre des prises de décisions, de rendre le maintien de la paix plus agile et plus adaptable, mais aussi de soutenir les opérations de paix menées par les organisations régionales, notamment l’Union africaine, avec des mandats du Conseil de sécurité et un financement prévisible.
Favorable à une réforme profonde de l’architecture financière internationale « dysfonctionnelle, dépassée et injuste », le Secrétaire général a également appelé à faire progresser le plan de relance des objectifs de développement durable (ODD) de 500 milliards de dollars par an, en allégeant le fardeau financier des économies en développement et émergentes, en intensifiant le financement du développement et du climat, et en garantissant des mécanismes efficaces d’allégement de la dette. Mais la priorité reste, selon lui, de s’attaquer à la menace des changements climatiques. Mais face à cette menace, les actions sont extrêmement insuffisantes, s’est indigné le Chef de l’ONU, pour qui il est encore temps de maintenir la hausse des températures dans la limite de 1,5 degré fixée par l’Accord de Paris.
Dans le prolongement de son Pacte de solidarité climatique, M. Guterres a notamment appelé à la fin du charbon d’ici à 2030 pour les pays de l’OCDE et d’ici à 2040 pour le reste du monde; à la fin des subventions aux combustibles fossiles et à la fixation d’un prix sur le carbone; à la fourniture par les pays développés de 100 milliards de dollars pour l’action climatique des pays en développement, « comme promis »; au doublement du financement de l’adaptation d’ici à 2025 et à la reconstitution du Fonds vert pour le climat.
Poursuivant, M. Guterres a constaté qu’à travers le monde, les femmes voient leurs droits, y compris les droits sexuels et reproductifs, réduits voire supprimés, et leurs libertés restreintes, et a applaudi celles qui défient le patriarcat. « Je suis à leurs côtés », a-t-il dit en français. Il a exhorté les gouvernements à adopter et appliquer des lois visant à protéger les personnes vulnérables, à cesser de cibler les minorités et à placer les droits et la dignité humaine au cœur de leurs politiques sociales, économiques et migratoires. De même, face aux menaces que font peser les nouvelles technologies sur les droits humains, il a plaidé pour l’élaboration d’un Pacte numérique mondial et fait savoir qu’il nommera ce mois-ci un organe consultatif de haut niveau sur l’intelligence artificielle. Avant de conclure, il a signalé que, grâce aux ressources et moyens mobilisés par l’ONU, le contenu du superpétrolier Safer, en décomposition au large du Yémen, a été transféré avec succès le mois dernier, ce qui a « sauvé la mer Rouge ». La détermination de l’ONU a permis d’accomplir le travail, s’est-il félicité, assurant que, malgré la longue liste des défis mondiaux, « ce même esprit de détermination peut nous guider ».
M. DENNIS FRANCIS, Président de la soixante-dix-huitième session de l’Assemblée générale de l’ONU, a estimé qu’une approche commune et coordonnée est nécessaire aujourd’hui plus qu’à tout autre moment de notre histoire. « Guerres, changements climatiques, dette, crises énergétiques et alimentaires, pauvreté et famine: autant de crises qui ont un impact direct sur la vie et le bien-être de milliards de personnes à travers le monde », s’est-il alarmé, rappelant qu’un tel fardeau se transmet de génération en génération. Aussi M. Francis a-t-il demandé aux États Membres de mobiliser le forum unique qu’est l’Assemblée générale pour renouer la confiance et raviver la solidarité mondiale. Ce message est d’autant plus urgent selon lui à l’heure de la violation continue de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale de l’Ukraine, où une guerre horrible se déroule, avec des répercussions qui ont ébranlé le monde en développement, en proie à de graves pénuries de produits de base et à la volatilité des prix de l’énergie. La menace inadmissible d’une guerre nucléaire est même redevenue d’actualité, s’est ému le Président, en réclamant une paix juste et durable.
M. Francis a exprimé une préoccupation semblable vis-à-vis des coups d’État en Afrique, qui constituent un revers pour les progrès accomplis par le continent au cours des dernières années, dans le cadre de l’Agenda 2063. De même, en dépit de certains progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de développement durable, des retards et des reculs inacceptables demeurent, a regretté le Président, en rappelant la nécessité de rattraper l’élan perdu au cours des sept années restantes avant l’échéance de 2030.
Citoyen d’une région vulnérable aux changements climatiques –les Caraïbes– M. Dennis a ensuite exhorté les États Membres à reconnaître les impacts continus et croissants de ce phénomène. Pour le Président de l’Assemblée générale, cela passe par des financements et des ressources suffisants pour soutenir les plus vulnérables dans les domaines de l’atténuation, de l’adaptation et du renforcement de la résilience. Il a d’ailleurs annoncé son intention de créer prochainement un groupe consultatif de haut niveau sur les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petit États insulaires en développement.
M. Francis s’est en outre fermement engagé à promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, raison pour laquelle il a nommé une envoyée spéciale et une conseillère spéciale pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes. Il a estimé qu’en dépit de la multiplicité et de la complexité des défis auxquels la communauté internationale est confrontée, les capacités de changement existent. « Ce qui nous manque, c’est la volonté d’agir », a-t-il affirmé. Il a donc conclu en citant les mots de Steven Pressfield, un auteur de la Trinité-et-Tobago: « L’aspect le plus pernicieux de la procrastination est qu’elle peut devenir une habitude. Nous ne remettons pas simplement notre vie à plus tard aujourd’hui, nous la remettons à notre lit de mort. N’oubliez jamais: dès maintenant, nous pouvons changer nos vies. Il n’y a jamais eu un moment, et il n’y en aura jamais, où nous serons privés du pouvoir de modifier notre destin. »
OUVERTURE DU DÉBAT GÉNÉRAL
M. LUIZ INÁCIO LULA DA SILVA, Président du Brésil, a livré un véritable plaidoyer contre les inégalités, chargeant l’ONU de guider la communauté internationale vers un monde où les puissants renonceraient à leurs divisions. Il a signalé que la faim touche aujourd’hui encore 735 millions de personnes, signe selon lui d’un monde plus inégalitaire que jamais. Il a appelé à conjurer le renoncement et la fatalité en faisant, comme le Brésil a su le faire, le pari de la démocratie pour surmonter la haine, la désinformation et l’oppression. Le Brésil est de retour! s’est-il exclamé, assurant qu’il s’attelle à reconstruire un pays souverain, équitable et joyeux, à même d’apporter ses contributions à la résolution des nombreux enjeux internationaux.
Poursuivant, M. Lula da Silva a réaffirmé sa conviction que la clef se trouve dans l’universalisme, et dans le partage des solutions les plus justes socialement pour mettre fin aux inégalités. Il a mis en garde contre un échec de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Cet échec serait terrible pour l’Organisation et la planète, a-t-il affirmé. Faisant référence aux politiques menées dans son pays, il a estimé incontournable, pour éradiquer la pauvreté, que les nantis paient plus d’impôts et que les États intègrent leurs propres ODD à leur législation pour parvenir à l’égalité raciale et mettre un terme définitif à l’insécurité alimentaire et sanitaire et à l’inégalité entre les sexes.
En outre, le Président brésilien a fait le constat de l’échec catastrophique des modèles de croissance des pays riches, tous basés d’après lui sur l’émission paroxystique de gaz à effet de serre. Corrigeons ensemble le tir en pensant au sort des pays les plus vulnérables aux changements climatiques, a-t-il prôné, appelant de ses vœux l’universalisation d’un autre modèle de développement, « durable et juste d’un point de vue social ». À cet égard, il a affirmé que le Brésil reste à la pointe de la transition énergétique, son système de production se situant parmi les plus propres du monde grâce à la place accordée à l’énergie solaire et au biodiesel et au renforcement drastique de la lutte contre les crimes environnementaux en Amazonie. Sur ce dernier point, il a indiqué que la déforestation y a été réduite de près de 50% ces dernières années.
Le Chef de l’État a ensuite déploré que l’engagement d’allouer 100 milliards de dollars par an aux pays en développement pris au titre de l’Accord de Paris soit resté lettre morte. Il a annoncé que, dans le cadre de sa présidence du G20, le Brésil allait concentrer ses efforts sur la refonte des institutions financières, en les orientant contre la dérégulation des marchés, et le rôle des États. Il faut lutter contre le protectionnisme économique des pays riches en sortant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de la paralysie, a-t-il dit. « Nous devons réduire la dissonance entre la voix des marchés et celle des peuples. » Et pour la paix, y compris en Ukraine, réduisons les dépenses militaires, qui, chaque année, s’avèrent au moins 20 fois supérieures au budget de l’ONU! a-t-il ensuite lancé.
M. Lula da Silva a également signalé que les sanctions unilatérales entraînent d’immenses souffrances parmi les populations des pays visés sans pour autant aboutir aux objectifs de sécurité voulus, déplorant toute tentative de diviser le monde en aires d’influence. Il a également vu dans la paralysie du Conseil de sécurité la preuve de la nécessité de sa réforme. Les inégalités devraient nous enrager et, forts de cette rage, nous devrions agir de manière infaillible pour changer notre monde et le rendre plus solidaire et équitable sous l’égide de l’ONU, a-t-il conclu.
M. JOSEPH R. BIDEN, Président des États-Unis, a commencé par rappeler son récent déplacement au Viet Nam, une visite qui démontre, selon lui, que « notre histoire n’a pas à dicter notre avenir » et qu’il est possible de panser des plaies profondes. Il a rappelé qu’aucun pays ne peut à lui seul relever les défis d’aujourd’hui et a observé qu’avec la création de l’ONU, le monde a progressé pour améliorer le quotidien de chacun. Pour poursuivre sur la voie du progrès, nous devons avoir plus de leadership et renforcer les capacités pour relever des défis plus complexes et plus interconnectés, a-t-il plaidé. Cela passera par une réforme du Conseil de sécurité, a estimé le Président, qui s’est déclaré favorable à l’élargissement de l’organe en augmentant le nombre des membres permanents et non permanents. Il a également appelé à sortir de l’impasse qui, trop souvent, bloque tout consensus au Conseil de sécurité. À cet égard, il a souhaité que celui-ci autorise l’envoi d’une mission en Haïti, où la population « n’en peut plus d’attendre ».
M. Biden a ensuite affirmé que les États-Unis sont disposés à faire en sorte que les institutions internationales soient plus efficaces et plus inclusives, comme le prouvent les mesures prises pour renforcer la Banque mondiale et élargir son financement à des pays à revenu faible et intermédiaire. Il a également dit avoir demandé au Congrès américain de débloquer davantage de fonds à cette fin. Selon lui, réformer les institutions peut changer la donne car il importe que les pays en développement aient leur mot à dire, en particulier dans la représentation du Fonds monétaire international (FMI). De même, a-t-il poursuivi, nous allons continuer d’essayer de réformer l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour préserver la transparence, la concurrence et l’état de droit, tout en tenant compte d’impératifs tels que la transition énergétique propre, la protection des travailleurs et la croissance durable.
Poursuivant, le Président américain a mis l’accent sur le potentiel colossal des nouvelles technologies et sur les risques qu’elles comportent. À ses yeux, il faut veiller à ce que l’intelligence artificielle et les technologies correspondantes soient sûres avant d’être proposées au public. C’est pourquoi, a-t-il dit, les États-Unis sont prêts à coopérer avec l’ONU et d’autres organisations et pays pour mieux exploiter ces nouvelles ressources. Dans chaque région, a ajouté M. Biden, les États-Unis mobilisent des alliances pour proposer des solutions. Ils ont ainsi réuni 21 nations occidentales pour appuyer la Déclaration de Los Angeles sur les migrations et la protection et font progresser la coopération avec leurs partenaires dans la région de l’Indo-Pacifique. Nous avons aussi formé une coalition de plus de 100 pays contre le fentanyl et les drogues synthétiques, s’est-il enorgueilli, avant de rappeler l’organisation par son pays d’un sommet pour la démocratie, alors que des gouvernements démocratiquement élus ont récemment été renversés. Sur ce point, « nous sommes aux côtés de la CEDEAO, de l’Union africaine et d’autres organisations qui défendent le droit constitutionnel », a-t-il dit.
M. Biden a également souligné les efforts de son pays pour créer un Moyen-Orient plus durable et solide, en promouvant la coopération d’Israël avec ses voisins et une paix juste et durable avec les Palestiniens. S’agissant de la Chine, nous cherchons à gérer de manière responsable la concurrence entre nos deux pays « pour ne pas tomber dans le conflit », a-t-il précisé, insistant sur l’importance de travailler sur un pied d’égalité sur les questions climatiques. Observant que les récentes catastrophes naturelles nous montrent « ce qui nous attend si nous n’arrivons pas à réduire notre dépendance aux énergies fossiles », il a dit s’être attelé à ce dossier dès son entrée en fonctions, notamment en promulguant une loi « historique » pour conduire le monde vers un avenir non polluant. Mais il faut faire plus en aidant les pays à s’adapter à l’impact des changements climatiques et en honorant la promesse de verser 100 milliards de dollars à l’action climatique, a-t-il affirmé. Alors que la réalisation des ODD a pris du retard du fait de la pandémie et des autres crises, il s’est dit déterminé à « remettre le train sur des rails », en forgeant des partenariats et en mobilisant le secteur privé.
Sur le plan géopolitique, le Président américain a regretté qu’après plus de 50 ans de progrès en matière de non-prolifération, la Russie se soit retirée des accords sur les forces conventionnelles. Les États-Unis continueront de travailler de bonne foi pour contrer la menace des armes de destruction massive, a-t-il assuré, indiquant que son pays a détruit cette année ses derniers stocks chimiques. Il a par ailleurs condamné les violations par la République populaire démocratique de Corée des résolutions du Conseil de sécurité et s’est dit résolu quant au fait que l’Iran ne doit jamais acquérir l’arme nucléaire. Soulignant également le caractère sacro-saint de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et des droits humains, il a noté que, pour la deuxième année consécutive, ce débat est obscurci par « l’ombre de la guerre de conquête illégale et de provocation de la Russie contre l’Ukraine ». Réaffirmant l’appui de son pays à l’Ukraine pour qu’elle parvienne à un règlement pacifique, il a jugé que la Russie est la seule à pouvoir faire cesser cette guerre mais aussi la seule à faire obstacle à la paix. Pour elle, le prix de la paix est la capitulation de l’Ukraine, a-t-il dénoncé, avant d’appeler la communauté internationale à s’opposer à cette agression « pour dissuader toute nouvelle agression demain ».
Évoquant enfin la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui a 75 ans cette année, M. Biden a souhaité que le monde ne détourne pas le regard face aux abus, que ce soit au Darfour ou en Iran. Nous devons veiller à ce que les femmes et les filles aient des droits égaux et que les groupes minoritaires ne fassent pas l’objet de discrimination, a-t-il dit, notant que lorsque ces droits sont absents quelque part, leur absence se fait ressentir partout. Nous serons jugés à l’aune de notre façon d’honorer nos promesses, pour protéger la planète, protéger la dignité humaine et défendre les principes des Nations Unies, a-t-il conclu, en appelant à faire ce travail « ensemble ».
M. GUSTAVO PETRO URREGO, Président de la Colombie, a estimé que toutes les crises que subit le monde actuellement n’en forment qu’une, la « crise de la vie »: il semble que les dirigeants du monde soient devenus des ennemis de la vie, a-t-il conclu. Selon lui, l’exode massif de populations du Sud vers le Nord permet de mesurer avec précision l’ampleur de l’échec des gouvernements au cours de l’année écoulée, qualifiée de « période de défaite pour l’humanité ». Le Chef de l’État a proposé que l’ONU organise « dès que possible » deux conférences de paix, l’une sur l’Ukraine, l’autre sur la Palestine, non pas parce qu’il n’y a pas d’autres guerres auxquelles il faut mettre fin dans le monde, mais parce que ces conférences encourageraient à faire la paix partout ailleurs, en mettant fin à l’hypocrisie politique.
M. Petro Urrego a ensuite dénoncé les injustices qui accablent les pays en développement, comme le manque d’accès aux vaccins contre la COVID-19 de l’Amérique latine, où 30% des décès provoqués par la pandémie ont été enregistrés alors que la population du continent ne représente que 6% de la population mondiale. Il a accusé les pays développés de n’avoir pas tenu leur promesse de financer l’adaptation aux changements climatiques. Ils n’ont pas 100 milliards de dollars à donner aux pays en développement pour se défendre contre les inondations, les tempêtes et les ouragans, « mais ils peuvent les débourser en un seul jour pour que Russes et Ukrainiens puissent s’entre-tuer », a lancé le Chef de l’État. Aujourd’hui, ce ne sont plus 100 milliards qui sont nécessaires, mais 3 000 milliards pour surmonter la crise climatique et la facture augmente à chaque seconde, a-t-il mis en garde.
Le Président a dénoncé une autre injustice dans la « guerre à la drogue », dénonçant l’arrestation de paysans qui cultivent du cannabis et des feuilles de coca en lieu et place de traiter la solitude dans laquelle végète la jeunesse du pays « qui possède la plus grande puissance économique et militaire de l’histoire de l’humanité ». Ceux qui ont mené cette guerre contre les hippies qui consommaient de la marijuana en protestant contre la guerre au Viet Nam ont provoqué « un million de morts » parmi les millions de Noirs et de Latinos enfermés dans des prisons privées et ont détruit les démocraties en Amérique latine, mais n’ont jamais emprisonné ceux qui s’étaient mis à consommer de la cocaïne, « drogue du libéralisme », a accusé M. Petro Urrego. Pour lui, le résultat de l’interdiction des drogues, ce sont aujourd’hui les 100 000 morts par an du fentanyl aux États-Unis.
En tant que Président du « pays de la beauté », M. Petro Urrego a proposé de rattraper le temps perdu en mettant fin à la guerre et en réformant le système financier mondial. Pour lui, il est clair que les objectifs de développement durable ne pourront être réalisés, car ce qui a été semé sur la planète, a-t-il insisté, c’est l’injustice. La majorité des investissements pour décarboner l’économie mondiale doivent venir de fonds publics, du rapprochement des États pour rassembler l’humanité, d’une gouvernance multilatérale de la Terre, d’un « plan Marshall pour la revitalisation de la planète ». Le marché nous aidera un peu, mais nous ne pouvons pas attendre de solutions d’un mécanisme inhumain qui est à l’origine du problème, a affirmé M. Petro Urrego. Si la dette de tous les pays est réduite, en remettant celles-ci grâce à l’émission de droits de tirage spéciaux par le FMI, il y aura une diminution de la dette publique mondiale et une augmentation réelle des budgets et des fonds publics. Ainsi, a prédit le Président colombien, nous pourrons financer le Plan Marshall pour les ODD.
M. ABDULLAH II IBN AL HUSSEIN, Roi de Jordanie, a fait observer que plus de 345 millions de personnes dans le monde sont confrontées à l’insécurité alimentaire et à la faim au quotidien. Parmi les plus vulnérables figurent 108 millions de réfugiés et 40% d’entre eux sont des enfants, s’est-il alarmé, ajoutant que ces personnes comptent sur les Nations Unies pour mettre fin aux crises qui les ont poussés à quitter leur pays. Alors que leur survie dépend de la communauté internationale, plusieurs agences de l’ONU ont annoncé qu’elles devaient réduire leurs services vitaux faute de disposer des fonds internationaux nécessaires. « Est-ce là où nous en sommes arrivés? » a déploré le monarque. Rappelant qu’en Jordanie les réfugiés représentent plus d’un tiers de la population, il a expliqué que l’impact de ces déficits humanitaires ne se limite pas à un pays ou à une région: « la peur et le besoin entraînent une forte augmentation du nombre de réfugiés fuyant vers l’Europe et au-delà, dans des voyages qui se terminent trop souvent par une tragédie ».
En Jordanie, tout est fait pour garantir une vie digne aux réfugiés, a assuré le Roi, qui a rappelé que près de la moitié des 1,4 million de Syriens accueillis ont moins de 18 ans et que, pour beaucoup de ces réfugiés, la Jordanie est le seul endroit qu’ils ont jamais connu. Il a rappelé que le pays partageait des ressources précieuses pour les aider à satisfaire leurs besoins fondamentaux, en particulier l’eau, alors même que la Jordanie l’un des pays les démunis en eau et est confrontée aux effets des changements climatiques. Mais aujourd’hui, la capacité du pays à fournir ces services a atteint ses limites, a averti le souverain, pour qui l’avenir des réfugiés syriens est dans leur pays et non dans les pays d’accueil. Pourtant, davantage de Syriens risquent de quitter leur pays à mesure que la crise persiste, a-t-il prévenu, appelant à trouver une solution politique conforme à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité et à considérer l’approche « étape par étape » que propose la Jordanie. D’ici là, nous protégerons notre pays contre toute menace future que cette crise pourrait faire peser sur notre sécurité nationale, a-t-il ajouté.
Pour le monarque, le Moyen-Orient continuera à souffrir jusqu’à ce que le monde parvienne à « dissiper l’ombre du conflit israélo-palestinien ». Sans une vision claire de l’avenir des Palestiniens, il sera impossible de converger vers une solution politique, a-t-il averti, non sans rappeler que chaque résolution de l’ONU depuis le début du conflit reconnaît l’égalité des droits du peuple palestinien à un avenir de paix, de dignité et d’espoir. Ces valeurs sont au cœur de la solution des deux États, « la seule voie vers une paix globale et durable ». Si le peuple israélien a le droit de se défendre activement et d’exprimer son identité nationale, le peuple palestinien ne peut être privé de ce même droit, a-t-il fait valoir, avant d’appeler à la création d’un État palestinien indépendant et viable dans les frontières du 4 juin 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.
Après avoir rappelé la tutelle du Royaume hachémite sur les Lieux saints de Jérusalem et sa responsabilité dans la préservation de cette ville de foi pour l’islam, le christianisme et le judaïsme, le Roi a une nouvelle fois demandé de ne pas abandonner les réfugiés palestiniens aux forces du désespoir. Il a donc appelé à soutenir l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), qui a un besoin urgent de financement durable. C’est essentiel pour protéger les familles, maintenir la stabilité des communautés et protéger les jeunes des extrémistes qui profitent de leurs frustrations, a-t-il conclu.
M. ANDRZEJ DUDA, Président de la Pologne, a rappelé que les décisions courageuses prises par les dirigeants du monde occidental pendant la Deuxième Guerre mondiale avaient donné naissance aux principes importants sur lesquels l’ordre mondial de l’après-guerre devait être fondé, comme l’autodétermination des nations, l’inviolabilité des frontières, la coopération économique ou les droits humains, ordre que l’agression de la Russie contre l’Ukraine met aujourd’hui à l’épreuve.
Du fait de son histoire, la Pologne comprend la tragédie de l’Ukraine mieux que n’importe quel autre pays du monde, a-t-il déclaré. Il a appelé à mettre un terme à cette guerre brutale et éviter qu’elle devienne un conflit gelé. Il a également exhorté au respect absolu des frontières internationalement reconnues, leur inviolabilité étant un élément fondamental de l’ordre mondial. Le Président a par ailleurs souligné que les crimes contre l’humanité ne devaient pas rester impunis, car dans le cas contraire, d’autres auraient la permission de commettre des crimes similaires. C’est pour cette raison, a-t-il expliqué, que la Pologne soutient le travail de la Cour pénale internationale (CPI) et de la Cour internationale de Justice (CIJ), tout comme la création d’un tribunal spécial.
M. Duda a également dénoncé la guerre de l’information à laquelle se livre la Russie pour tenter de façonner l’opinion publique internationale en construisant une vision erronée de la réalité, notamment contre la Pologne. Accuser ceux qui fournissent les armes nécessaires à l’Ukraine dans sa guerre de défense de prolonger le conflit, c’est faire preuve d’une logique erronée, a-t-il affirmé. Pour résister, l’Ukraine a besoin de l’aide d’autres pays, en premier lieu des États-Unis qui jouent depuis un siècle un rôle central dans le maintien de la sécurité en Europe, qui a elle-même trop souvent tendance à oublier qu’elle doit sa prospérité à l’engagement de ce pays, a-t-il noté.
Rappelant que la Pologne avait « disparu des cartes du monde » pendant 123 ans, le Président polonais a insisté sur le soutien de son pays à ceux qui ont souffert du colonialisme en se concentrant plus particulièrement sur les pays de la région subsaharienne et sur les régions où les crises alimentaires s’aggravent, en Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes notamment. Il a aussi appuyé les ambitions de l’Union africaine et le principe de « solutions africaines aux problèmes africains ».
Rappelant que son pays s’était libéré du communisme grâce au mouvement Solidarité, le Chef de l’État a souligné que la Pologne avait fait preuve de cette même solidarité dans l’accueil des réfugiés ukrainiens. Il a également appuyé l’idée d’un développement solidaire, « flambeau pour la sécurité et la prospérité ». Préoccupé par « l’impasse décisionnelle » au sein du Conseil de sécurité, M. Duda s’est dit convaincu de la nécessité des Nations Unies, car aucun meilleur système de coopération internationale n’a encore été inventé.
M. MIGUEL DÍAZ-CANEL BERMÚDEZ, Président de Cuba, a déclaré que les pays du Groupe des 77 et la Chine demeurent unis par la nécessité de changer le monde. Il a ajouté qu’ils le souhaitent d’autant plus qu’ils sont les principales victimes de la crise mondiale actuelle, marquée par l’inégalité économique, le fossé scientifique et technique entre riches et pauvres et la dégradation de l’environnement. Tous les pays représentés au G77/Chine, où vivent plus de 80% de la population mondiale, sont déterminés à modifier les structures qui les maintiennent à l’écart du progrès social, a ajouté le Président, appelant de ses vœux la conclusion d’un nouveau contrat mondial plus juste. Selon lui, il est scandaleux que près de 800 millions de personnes souffrent encore de la faim alors que la planète produit suffisamment pour nourrir tout le monde. Tout aussi scandaleux est le fait qu’à l’ère de la connaissance et du développement accéléré des technologies de l’information et des communications, plus de 760 millions de personnes, dont deux tiers de femmes, ne savent ni lire ni écrire, a-t-il poursuivi, appelant les pays riches à soutenir réellement les efforts des pays en développement pour mettre en œuvre les ODD.
Par actions concrètes, nous entendons, notamment, avoir un accès facilité aux marchés et au financement du développement à des conditions équitables et préférentielles. Nous entendons bénéficier du transfert de technologie et des produits d’une coopération Nord-Sud fructueuse, a souligné M. Díaz-Canel Bermúdez. « Nous ne demandons pas l’aumône ni des faveurs », a-t-il insisté, précisant que le Groupe des 77 ne réclame que le droit d’exiger la transformation profonde de l’architecture financière internationale actuelle, celle-ci étant injuste, anachronique et dysfonctionnelle. Conçue pour profiter des réserves du Sud et perpétuer un système de domination qui accroît le sous-développement et reproduit un modèle de colonialisme moderne, cette architecture doit laisser la place à des institutions financières internationales dans lesquelles nos pays puissent avoir une véritable capacité de décision et un accès au financement, a-t-il encore plaidé. Alors que les pays les plus riches ne respectent pas leur engagement d’allouer au moins 0,7% de leur PIB à l’aide publique au développement, les pays du Sud doivent dépenser jusqu’à 14% de leurs revenus pour payer les intérêts associés à la dette extérieure, le Président a demandé: « quel développement durable peut-on réaliser avec ce nœud coulant autour du cou »? Le G77/Chine appelle les créanciers publics, multilatéraux et privés à refinancer la dette grâce à des garanties de crédit, des intérêts plus bas et des échéances plus longues, et insiste sur la nécessité de mettre en place un mécanisme multilatéral de rééchelonnement de la dette souveraine avec la participation effective des pays du Sud. « Il est en effet impératif de repenser, une fois pour toutes, l’instrument de la dette et d’inclure des dispositions d’activation pour l’atténuer et le rééchelonner, dès qu’une nation vulnérable est touchée par des catastrophes naturelles ou d’autres périls », a martelé M. Díaz-Canel Bermúdez. En vue de la tenue de la COP28, les pays du G77 auront pour priorité de défendre la mise en œuvre du fonds pour les pertes et dommages et d’accélérer l’élaboration d’un nouveau cadre de financement climatique.
Le Président s’en est ensuite pris aux « États puissants qui entendent agir en juges universels, affaiblir et détruire les économies et isoler et soumettre d’autres États souverains ». Cuba n’est pas le premier État souverain contre lequel des mesures de ce genre sont appliquées, mais il est celui qui les subit depuis le plus longtemps, cela malgré la condamnation qui s’exprime chaque année à la quasi-unanimité au sein de cette Assemblée. Il a déploré que cette condamnation massive ne soit même pas entendue par le Gouvernement de la plus grande puissance économique, financière et militaire du monde. Depuis maintenant 60 ans, Cuba subit un blocus économique asphyxiant, conçu pour faire baisser ses revenus et le niveau de vie de son peuple, pour favoriser une pénurie continue de nourriture ou de médicaments et pour nuire à son potentiel général de développement, a-t-il accusé. Pour lui, telle est la nature et les objectifs de la politique de coercition économique et de pression maximale appliquée par le Gouvernement américain contre Cuba, en violation du droit international et de la Charte des Nations Unies. Jugeant le comportement américain à l’égard de Cuba « unilatéral et injustifié », il a affirmé que le peuple cubain résiste et surmonte l’isolement jour après jour contre cette guerre économique impitoyable laquelle, depuis 2019, en pleine pandémie de COVID, a pris selon lui une tournure inhumaine.
M. RECEP TAYYIP ERDOĞAN (Türkiye) a exprimé son pessimisme face aux défis de plus en plus complexes et dangereux auquel le monde est, partout, confronté. Il a ainsi dénoncé le terrorisme qui sévit en Syrie ou en Afrique de l’Ouest, ou encore le racisme et la xénophobie, mais aussi les changements climatiques et les catastrophes naturelles, citant comme exemple le séisme qui a accablé son propre pays le 6 février dernier. Il a remercié la centaine de pays qui ont fait preuve de générosité vis-à-vis du sien pour l’aider à reconstruire les zones dévastées par le tremblement de terre, avant de rappeler qu’aujourd’hui, c’est au tour de la Türkiye de prêter assistance à la Libye, au lendemain des inondations meurtrières qui ont endeuillé la ville de Derna et sa région.
Pour M. Erdoğan, les récents événements à Chypre témoignent de la manière dont des conceptions géopolitiques dépassées prennent en otage une situation donnée. Puis le Chef de l’État a réaffirmé son intention de contribuer à mettre fin à la guerre en Ukraine, rappelant que l’Initiative de la mer Noire avait permis d’acheminer des denrées alimentaires à des nécessiteux dans les pays en développement. Il a estimé que la tragédie humanitaire en cours en Syrie continue de porter atteinte aux conditions de vie de toutes populations de la région, quelle que soit leur confession. Il s’est alarmé de l’appui apporté à des organisations terroristes qui sévissent dans ce pays, dont le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui s’appuie sur les divisions sectaires. En tant que dirigeant d’un pays qui a livré la plus grande bataille contre Daech et lui a infligé les plus lourdes pertes, la Türkiye est « fatiguée » de l’hypocrisie de ceux qui se servent de Daech pour dissimuler leurs intérêts en Syrie, en Iraq et au Sahel, a-t-il déclaré. Pour M. Erdoğan, la véritable menace, ce sont les éléments terroristes locaux qui sont instrumentalisés et soutenus pour livrer des guerres par procuration. Il est temps de bâtir une architecture globale de sécurité capable de répondre aux intérêts de toutes les régions du monde, car celui-ci ne se résume pas à « cinq pays », a-t-il tranché sous des applaudissements.
Pour la Türkiye, la transformation de la Méditerranée en zone de paix ne sera réussie que si tous les droits de toutes les populations sont respectés. Les Chypriotes turcs ont toujours œuvré à la recherche d’une solution durable et pérenne à cet égard, a affirmé le Président, pour qui le modèle fédéral actuel ne peut plus répondre à la crise sur l’île. Aussi a-t-il plaidé en faveur de la proclamation de l’indépendance de la partie chypriote turque, tout en exhortant à l’impartialité la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP), qu’il a jugée déjà bien « discréditée ». Par ailleurs, il a dit attendre que l’Union européenne honore ses obligations « trop longtemps ignorées »à l’égard de son pays, affirmant que son attitude ambiguë doit cesser.
La Türkiye a entamé avec l’Arménie un processus de normalisation « totale » de ses relations, a affirmé M. Erdoğan, qui a précisé que son pays avait aussi appuyé les négociations entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, avant de reprocher à ce dernier pays de ne pas saisir toutes les occasions qui se présentent actuellement. Nous espérons un accord complet entre les deux belligérants qui sera rapidement mis en œuvre, a-t-il ajouté, rappelant que le Haut-Karabakh est un territoire azerbaïdjanais. Aucun autre statut ne sera accepté, a-t-il tranché, avant d’estimer que la coexistence y est possible, y compris pour les Arméniens. Il a invoqué un slogan, « deux nations, un État », qui doit être respecté. Enfin, le Président Erdoğan a déclaré appuyer toutes les initiatives visant à lutter contre l’islamophobie, considérant qu’aucune religion ne saurait être l’objet d’attaques odieuses.
MARCELO REBELO DE SOUSA, Président du Portugal, a réaffirmé son soutien inconditionnel aux objectifs de développement durable (ODD), aux droits humains et à la lutte contre les changements climatiques. Il s’est ainsi engagé à soutenir divers sommets internationaux -Sommet de l’avenir en 2024, Forum de l’Alliance des civilisations des Nations unies en 2024, Sommet social mondial en 2025- soulignant l’importance de la coopération multilatérale. Face à l’urgence mondiale, le Président a insisté sur le besoin de restaurer les principes fondateurs de la Charte des Nations Unies, sans laquelle « il n’y a pas de paix possible ». Il a exprimé son inquiétude concernant les implications mondiales de la guerre en Ukraine et plaidé pour un dialogue constructif entre l’Europe, l’Afrique et les autres continents stratégiques. « Nous ne pouvons différencier la lutte du peuple ukrainien de celle pour le respect de la Charte des Nations unies », a‑t‑il affirmé.
M. de Sousa a ensuite souligné l’importance d’une action ambitieuse contre les changements climatiques, en s’appuyant sur des décisions politiques éclairées par la science, et ce, dès la prochaine COP 28. Il a valorisé le rôle des jeunes en tant que champions de la lutte climatique, de la justice intergénérationnelle et de solutions économiques plus durables. En ce sens, il a appelé à la transformation des dettes étrangères en investissements dans les énergies renouvelables et la biodiversité, comme le Portugal vient de le faire avec Cabo Verde et s’apprête à le faire avec les autres pays lusophones, représentant environ 300 millions de personnes. L’architecture financière internationale ne parvenant pas à financer le développement durable, il est urgent de signer un « nouveau Bretton Woods », a‑t‑il exhorté.
Enfin, le Président portugais a insisté sur l’urgence de réformer le Conseil de sécurité. Il a notamment soutenu la promotion du Brésil et de l’Inde en tant que membres permanents du Conseil de sécurité, et a plaidé pour une plus grande transparence, cohérence et responsabilité au sein de cet organe. « Il ne peut y avoir ni paix, ni développement durable, ni réforme institutionnelle, ni réforme du système financier sans respect pour la Charte des Nations Unies », a‑t‑il martelé, « et il n’y aura pas de respect pour la Charte sans avancée sur les autres problèmes », a‑t‑il prévenu.
M. TAMIM BIN HAMAD AL THANI, Émir de l’État du Qatar, a déclaré que le développement accéléré de la technologie et le recours croissant à celle-ci ouvrent des horizons sans précédent pour un meilleur développement de l’humanité. Il ne fait aucun doute que la science et la technologie sont la clef pour accroître la productivité et améliorer la qualité de la vie humaine, a-t-il considéré, ajoutant qu’il est nécessaire d’y recourir de manière responsable et sûre. Ainsi est-il selon lui du devoir de l’ONU de suivre le développement scientifique et technique dans les pays tout en s’efforçant de lever les barrières qui entravent ce développement. Le dirigeant a réitéré l’appel du Qatar à unifier les efforts internationaux pour empêcher l’utilisation abusive du cyberespace et réglementer cet aspect essentiel sur la base de traités internationaux. Dans ce contexte, le « Web Summit 2024 » qui se tiendra l’an prochain à Doha sera l’occasion de discuter des moyens de faire en sorte que les technologies de l’information et des communications profitent au développement socioéconomique de l’humanité tout entière, a encore estimé M. Al Thani.
Préoccupé par la situation au Moyen-Orient en matière de sécurité, M. Al Thani a jugé inadmissible que le peuple palestinien reste prisonnier de l’occupation coloniale israélienne et du rejet des gouvernements israéliens successifs de toute solution politique porteuse de justice et conforme aux principes du droit international. Il a ajouté que son pays continuera d’apporter son soutien politique et humanitaire au « peuple palestinien frère » ainsi qu’à la reconstruction de la bande de Gaza, qui année après année, « ploie sous le joug du siège ». Quant à la Syrie, il a appeléà la mise en œuvre des dispositions du Communiqué de Genève et de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, afin que puissent enfin se réaliser les aspirations du peuple syrien à l’unité, à la souveraineté, à l’indépendance et à la prospérité de la Syrie. En outre, l’Émir du Qatar s’est réjoui du rétablissement des relations diplomatiques entre l’Arabie saoudite et l’Iran ainsi qu’entre l’Égypte et la Türkiye. Par ailleurs, il s’est dit conscient que, dans le contexte géopolitique et environnemental actuel, l’exportation d’énergie impose à son pays des engagements particuliers envers les pays du monde et les générations futures. Ainsi, le Qatar continue-t-il de développer son fonds souverain et de diversifier ses sources de revenus, notamment en investissant dans les énergies propres, a-t-il assuré, ajoutant que c’est dans cet esprit que Doha accueillera, le mois prochain, la Foire internationale de l’horticulture. En guise de conclusion, il a souligné la nécessité de lutter contre le racisme et les campagnes d’incitation à la haine contre des peuples, des religions ou des civilisations.
M. MATAMELA CYRIL RAMAPHOSA (Afrique du Sud) a rappelé que, malgré l’engagement pris il y a 78 ans, l’humanité est encore aux prises avec les conflits, la faim, les épidémies et des désastres environnementaux. La solidarité et la confiance entre les États se sont érodées, les inégalités et la pauvreté augmentent et, alors que les efforts de la communauté internationale devraient être consacrés à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, c’est la guerre qui mobilise notre attention et notre énergie.
Ces divisions et ces difficultés apparemment insolubles peuvent et doivent être surmontées, a affirmé M.Ramaphosa, qui a rappelé que, depuis des millénaires, l’humanité avait fait preuve de résilience et d’adaptation. Citant en exemple l’évolution de son pays de l’apartheid à la démocratie, il a réaffirmé la nécessité de travailler de concert, de dialoguer et de négocier afin de mettre fin aux guerres et d’établir une paix durable.
Ce sont ces principes qui ont amené l’Afrique du Sud à participer à l’initiative de paix africaine, qui vise à résoudre pacifiquement le conflit entre la Fédération de Russie et l’Ukraine, dans le plein respect de la Charte des Nations Unies, a expliqué le Chef de l’État. Il a notamment mis l’accent sur des mesures de confiance, comme le retour des enfants retirés d’Ukraine et l’échange des prisonniers de guerre, a dit s’en être entretenu avec le Président Volodymyr Zelenskyy et a souhaité une accélération des mesures en cours en ce sens. Il a aussi appelé la communauté internationale à permettre un dialogue digne de ce nom et à s’abstenir de toutes actions susceptibles d’alimenter le conflit.
M. Ramaphosa a appelé la communauté internationale à investir dans la prévention et dans la consolidation de la paix et a rappelé le soutien de l’Afrique du Sud au Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général. Il a estimé que la communauté internationale devrait être préoccupée par les différents changements inconstitutionnels de gouvernement survenus récemment en Afrique et l’a appelée à travailler avec l’Union africaine pour soutenir les efforts de paix dans les régions et pays africains en conflit. Il a rappelé la volonté du Conseil de paix et de sécurité de l’UA d’approfondir sa coopération avec le Conseil de sécurité des Nations Unies.
Appelant à faire preuve de la détermination nécessaire pour réaliser les objectifs de développement durable, M. Ramaphosa a réclamé des financements prévisibles et a reproché aux pays les plus riches de ne pas avoir respecté leurs engagements en matière de mobilisation de ressources. Il a en outre insisté sur l’autonomisation des femmes, rappelant qu’il s’agissait d’une condition sine qua non au progrès social et économique.
M. Ramaphosa a fait observer que le climat se réchauffe en Afrique plus vite qu’ailleurs, avertissant que les Africains ne se résoudraient plus à payer le coût de l’industrialisation et du développement des plus riches. Il a réclamé une mise en œuvre au même rythme des trois piliers de l’Accord de Paris sur le climat. À ce titre, il a mis en exergue la nécessité de soutenir financièrement les pays africains dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la réalisation de leurs objectifs relatifs au climat. Il a appelé au respect des engagements pris lors de la COP27, en particulier en ce qui concerne le fonds pour les pertes et les dommages.
M. SERDAR BERDIMUHAMEDOV, Président du Turkménistan, a observé qu’aujourd’hui, chaque État Membre de l’ONU, indépendamment de sa situation géographique, de sa population, de son économie ou de son modèle sociopolitique, est capable d’apporter une contribution significative à la résolution des problèmes auxquels la communauté internationale est confrontée. Les défis nombreux et graves auxquels celle-ci est confrontée ont le potentiel de changer le cours des relations interétatiques, tout en aggravant l’érosion de notre sécurité collective. « Nous ne pouvons pas laisser cela se produire », a insisté le Président, selon qui la sécurité militaire et politique ne peut être considérée indépendamment de la sécurité économique, technologique, énergétique, alimentaire, et de l’information.
Dans cette optique, la tâche principale de l’ONU consiste selon lui à proposer une approche globale des problèmes de sécurité, et à mobiliser les compétences, les idées et les initiatives des États Membres de manière constructive, tout en s’abstenant de rechercher des avantages à court terme aux dépends d’objectifs vitaux. Malgré les discussions en cours sur le rôle de l’ONU dans le monde moderne et les propositions de réforme, il n’existe pas d’alternative à l’ONU, a-t-il insisté. Il a donc jugé nécessaire de recourir à ses outils politiques et diplomatiques ainsi qu’à son « autorité morale » de manière cohérente afin de parvenir à une évaluation objective des événements et tendances actuels.
À cet égard, M. Berdimuhamedov a proposé d’entreprendre des discussions concernant l’élaboration d’une stratégie de sécurité mondiale qui mettrait l’accent sur la diplomatie préventive, la mobilisation du potentiel de la neutralité et le rétablissement d’une culture de dialogue de confiance. Considérant que le temps est venu d’engager un dialogue inclusif entre l’Asie centrale et l’ONU, le Turkménistan a organisé une conférence sur la sécurité en Asie centrale et dans les zones voisines, sous l’égide de l’ONU, qui se réunira pour la première fois en 2024 à Achgabat, a-t-il indiqué.
S’agissant des changements climatiques, le Président a indiqué que son pays a mis en place des programmes nationaux pour réduire et éliminer l’impact négatif des émissions de méthane. Il a appelé l’ONU à accorder davantage d’attention aux problèmes écologiques en Asie centrale qui se trouve dans une zone à risque et qui compte près de 80 millions d’habitants, ainsi que des ressources naturelles et une biodiversité unique. Il a donc recommandé la création, à Achgabat, d’un centre régional des technologies des changements climatiques en Asie centrale. De même, les pays côtiers de la mer Caspienne ont récemment adopté la Convention sur le statut juridique de la mer Caspienne afin d’intensifier leur coopération sur les questions écologiques. Pour appuyer ces actions, M. Berdimuhamedov a proposé la mise en place d’une « initiative écologique caspienne ». Il a par ailleurs fait observer que ces dernières années, les travaux du Turkménistan ont mené à l’adoption de six résolutions de l’Assemblée générale, dont la proclamation, cette année, de la Journée mondiale du transport durable. Il a également proposé d’organiser un forum international d’envergure sur la sécurité alimentaire.
M. VOLODYMYR ZELENSKYY, Président de l’Ukraine, a rappelé que pendant les années 90, l’Ukraine avait renoncé à son arsenal nucléaire, tandis que la communauté internationale décidait que la Russie pouvait maintenir le sien. « Les terroristes n’ont pas le droit de détenir des armes nucléaires », a-t-il ajouté. Il a accusé la Russie de militariser les pénuries alimentaires sur le marché mondial dans le but d’obtenir la reconnaissance des territoires capturés. La Russie, a-t-il ajouté, lance les prix des vivres comme des armes. Le Président ukrainien a remercié tous les dirigeants qui ont soutenu l’Initiative de la mer Noire aujourd’hui « sapée par la Russie », mais qui a néanmoins permis d’œuvrer collectivement pour assurer la stabilité alimentaire. Il a indiqué qu’un couloir temporaire d’exportation maritime avait été ouvert à partir des ports ukrainiens et que son pays travaillait d’arrache-pied pour préserver les routes terrestres pour les exportations de céréales. Il s’est ensuite inquiété de « ceux qui en Europe, pensant jouer leur propre rôle, dressent en fait la scène pour l’acteur de Moscou ».
Poursuivant, M. Zelenskyy a expliqué comment l’énergie avait elle aussi été militarisée par la Russie, qui utilise le pétrole et le gaz comme armes pour affaiblir les dirigeants d’autres pays. Il a souligné que l’énergie nucléaire était elle aussi devenue une arme pour ce pays, qui non seulement « répand des technologies de construction de centrales nucléaires peu fiables, mais transforme également les centrales électriques d’autres pays en véritables bombes sales ». « Regardez ce qu’elle a fait à notre centrale de Zaporizhzhia en la bombardant, en l’occupant et en s’en servant à présent pour faire du chantage », s’est-il indigné, notant que l’architecture de sécurité globale n’offrait aucune réponse ni protection contre les menaces des « maîtres chanteurs des radiations ».
De même, il a condamné les enlèvements et déportations massives d’enfants par la Russie dans les territoires occupés de l’Ukraine, affirmant avoir la preuve que des centaines de milliers d’enfants ont été kidnappés par la Russie. Il a rappelé que la Cour pénale internationale avait émis un mandat d’arrêt contre Vladimir Putin pour ce crime, qu’il a qualifié de « génocide ». La Russie déclenche une nouvelle guerre à chaque décennie, a poursuivi M. Zelenskyy, en rappelant l’occupation de certaines parties de Moldova et de la Géorgie, la transformation de la Syrie en champ de ruines, ou encore « l’avalement » du Bélarus et les menaces pesant sur le Kazakhstan et les États baltes. Selon lui, le but de la guerre contre l’Ukraine était de transformer ce pays, son peuple et ses ressources « en arme contre l’ordre international fondé sur des règles ».
Face à cette urgence, il a lancé un appel à l’unité contre ce type d’agression, et à un dialogue qui n’ait pas lieu « derrière des portes closes » mais qui soit un travail « ouvert » de toutes les nations pour la paix. En ce sens, il a indiqué qu’il détaillera demain, lors d’une réunion spéciale du Conseil de sécurité, la formule pour la paix ukrainienne. Pour la première fois de l’histoire moderne, nous avons la possibilité de mettre fin à l’agression selon les conditions de la nation attaquée, s’est-il félicité. Récusant toutes les tentatives de conclure des ententes douteuses dans les coulisses, il a averti qu’on ne peut pas faire confiance au mal. « Demandez à Prigozhin si Putin tient ses promesses »? a-t-il lancé.
M. ALEJANDRO EDUARDO GIAMMATTEI FALLA, Président du Guatemala, a déclaré que « nous vivons aujourd’hui un moment sans précédent », le monde assistant « avec horreur » à la guerre lancée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine, au mépris des principes les plus élémentaires de l’ordre international fondé après la Seconde Guerre mondiale. « Ce qu’il y a de pire, c’est que nous semblons nous y être habitués! », a-t-il ajouté.
Face aux grands problèmes de l’époque, le Président a estimé que l’ONU n’était pas l’organisation la plus active, appelant les États Membres à dépasser leurs positions idéologiques et à surmonter leurs conflits ancestraux pour la faire fonctionner. « Il s’agit de sauver l’espèce humaine, de sauver la planète, de permettre aux générations futures de se développer dans la paix. » M. Falla a appelé à exiger le respect du droit international et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, estimant que chaque pays devait crier « trop, c’est trop »! Il a joint la voix de son pays à l’appel mondial pour le retrait immédiat des forces russes, dans le respect de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.
Rappelant que le Guatemala était partie au Traité de Tlatelolco, au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, le Président s’est inquiété du risque de désastre en cas de destruction de la centrale nucléaire de Zaporizhzhia. Il a ensuite exigé que tous les États dotés d’armes nucléaires, y compris les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, parviennent à un désarmement nucléaire total.
Précisant que son pays était le quatrième contributeur de Casques bleus des Amériques, le Chef de l’État a réitéré son engagement ferme en faveur du développement du peuple haïtien. Il a annoncé que si l’ONU décidait de déployer une nouvelle mission de paix en Haïti, le Guatemala participerait à la formation de ses forces de sécurité. Plaidant pour davantage d’inclusion, il s’est demandé comment il était possible qu’un pays comme Taiwan soit exclu de l’ONU. Il a prié l’Organisation de tout faire pour garantir la paix et la sécurité dans le détroit éponyme, après avoir condamné les manœuvres militaires « constantes et croissantes » dans les eaux et l’espace aérien autour de Taiwan, qui mettent en danger la sécurité de la région et affectent le commerce international.
Affirmant que la région de l’Amérique centrale et des Caraïbes était celle qui souffrait le plus des effets des changements climatiques, même si elle ne générait qu’un pourcentage infime des gaz à effet de serre, le Président a rappelé les destructions à répétition causées par les cyclones, et les prêts qu’il fallait consentir pour reconstruire. Critiquant les rapports des Nations Unies qui déplorent le faible développement dans la région, il a demandé que les nations industrialisées qui n’agissent pas assez pour limiter leurs émissions de carbone soient elles aussi pointées du doigt. Dans la lutte contre le trafic de drogue, le Président a estimé important que l’ONU change son approche pour prendre en compte le fait que les grands pays consommateurs étaient aussi les principaux pays de blanchiment de l’argent sale, faisant ainsi de cette lutte une responsabilité de la communauté internationale. En conclusion, M. Falla a assuré que « contrairement aux allégations mensongères entendues aujourd’hui », il remettrait le pouvoir au Président élu le 14 janvier prochain. S’il a déploré « une ingérence internationale inutile » dans le processus électoral, il a vanté les mérites d’une démocratie guatémaltèque qui n’était certes pas parfaite mais bel et bien mature.
Mme KATALIN NOVÁK, Présidente de la Hongrie, a rappelé le passé tumultueux ponctué de guerres et de régimes opprimants auquel la Hongrie a été confrontée. Elle a notamment évoqué les marques indélébiles laissées par l’occupation soviétique de son pays, insistant sur l’importance des principes de liberté et de souveraineté. « Le rejet de toute sorte d’oppression », a-t-elle poursuivi, « est devenu instinctif pour nous ». Condamnant fermement les attaques injustifiées de la Russie en Ukraine en dépit du droit international, elle a attiré l’attention sur les efforts déployés par son pays pour fournir l’aide humanitaire nécessaire et accueillir les réfugiés ukrainiens. Elle a également indiqué que le conflit touche les Hongrois directement, précisant que 150 000 d’entre eux vivent en Transcarpatie, en Ukraine.
Poursuivant, la Présidente a dit comprendre le désir qu’a l’Ukraine de faire partie de la communauté des pays européens. Nous nous attendons donc à ce qu’elle honore les valeurs qui caractérisent notre communauté, y compris la protection et la pleine garantie des droits des minorités nationales. Revenant sur ses visites à Kiev où elle a pu constater la souffrance des familles ukrainiennes, elle a tout particulièrement déploré les conséquences de la guerre sur les enfants, et a espéré que les combats feront bientôt place à des négociations.
Mme Novák a ensuite mis en garde contre le déclin démographique qui met nombre d’États sous pression. Si des solutions ne sont pas trouvées rapidement, « l’hiver démographique devenu âge de glace » dans certains pays européens pourrait avoir des répercussions économiques, sociétales et sécuritaires irréversibles et bien pires que celles de la crise climatique, a-t-elle prévenu. Il n’y a aucun avenir sans progéniture et, donc, aucun intérêt à préserver la planète si ce n’est pour la transmettre aux générations futures, a-t-elle martelé. Estimant que c’est au sein des familles que sont transmises les valeurs en dépit des difficultés ou des traumatismes générationnels, elle s’est félicitée de l’importance accordée par la Hongrie au noyau familial, aux aides financières pour les familles et à la liberté parentale. À l’heure où les « idéologies anti-familles et anti-enfants » n’ont jamais été aussi présentes, il est nécessaire, selon elle, d’œuvrer pour des familles saines et unies, garantes de la sécurité.
M. ALAIN BERSET, Président de la Confédération suisse, a estimé que, face à la succession actuelle des crises, notre état d’esprit et notre attitude sont déterminants. « Le repli, les menaces et la violence n’ont jamais fourni la moindre solution aux problèmes et aux inégalités dans le monde », a-t-il affirmé. Estimant que l’ordre international actuel traverse « sa plus grande crise depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale », il a condamné la guerre de la Russie contre l’Ukraine, qualifiée d’attaque contre « le droit international et le multilatéralisme ». Rappelant que les principes de la Charte des Nations Unies constituent le « fondement d’une collaboration pacifique et d’une confiance mutuelle entre les États », il a estimé que les défis actuels ne sauraient être surmontés par des initiatives isolées et exigent une action collective.
M. Berset a insisté sur le rôle essentiel d’« institutions multilatérales fortes » pour combattre les inégalités. Notant l’accroissement considérable des inégalités de revenus durant les 20 dernières années, il a vu dans celles-ci des sources de conflits qui encouragent les instabilités et conduisent à une perte de confiance envers les institutions et la démocratie. « Longtemps, nous avons considéré que la défense de nos intérêts et la protection des plus vulnérables étaient deux choses différentes. Aujourd’hui, nous savons que l’une ne va pas sans l’autre », a-t-il ajouté.
Les institutions multilatérales sont aussi indispensables à la promotion de la paix, a poursuivi M. Berset. La Suisse soutient le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU. Son président a souligné le rôle essentiel de la prévention dans l’effort de paix. Il a aussi rappelé le combat nécessaire contre les persécutions et les violences, notamment contre les femmes, ainsi que la nécessité d’offrir la justice aux victimes des conflits et des perspectives de prospérité aux jeunes.
Si les conflits armés sont tous différents, « tous ont pour dénominateur commun l’aggravation des inégalités et la souffrance des civils », a insisté M. Berset, qui a mis l’accent sur le rôle des institutions multilatérales pour garantir la protection des civils dans les zones de conflit et affirmé que le respect du droit international humanitaire est « au cœur » de l’engagement de la Suisse au Conseil de sécurité. Rappelant que, « lors de conflits armés, le manque de biens et de services essentiels pour la population civile coûte plus de vies que l’impact direct des hostilités », il a salué le travail des missions de paix des Nations Unies et celui de tous les acteurs humanitaires, qui « doivent être protégés et soutenus ». Il a notamment insisté sur la défense du Comité international de la Croix-Rouge, jugeant son travail « fondamental ». Par ailleurs, M. Berset a évoqué la nécessité de promouvoir la participation des femmes pour assurer un retour à la paix, évoquant l’engagement de la Suisse en faveur du programme pour les femmes et la paix et la sécurité des Nations Unies.
M. Berset a appelé les États Membres à bien discerner où se trouvent leurs intérêts communs, qu’il a situé « certainement pas dans le désordre mondial que certains essaient de faire progresser à leur profit » mais « dans un ordre mondial renouvelé ». C’est dans ce cadre qu’il a salué l’espoir que représente l’ONU, « un projet idéaliste, né à une époque de guerre, de brutalité et de désespoir » basé sur la certitude que la coopération internationale était indispensable. De même, il a souhaité un nouveau souffle aux objectifs de développement durable et au Programme de développement durable à l’horizon 2030, « notre feuille de route commune pour un avenir meilleur pour tous ».
Mme NATAŠA PIRC MUSAR, Présidente de la Slovénie, a décrit un monde profondément transformé démographiquement et technologiquement. C’est aussi un monde dans lequel la dignité humaine n’est toujours pas garantie pour tous, à commencer par les plus vulnérables, a-t-elle ajouté, parlant d’un monde « où règnent de nombreuses guerres, des conflits meurtriers, des agressions contre des États qui entraînent la destruction socioéconomique et provoquent d’immenses souffrances parmi les civils ».
La Présidente a poursuivi en évoquant un monde qui n’a pas universellement reconnu la gravité des changements climatiques qui se déroulent sous nos yeux, et où fait défaut la solidarité mondiale requise pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable. Selon elle, ce monde a besoin plus que jamais d’une ONU dotée d’un Conseil de sécurité réformé et représentatif, capable de répondre à tous les défis de manière efficace, adéquate et équitable, des défis que les États doivent relever ensemble. Si nous continuons à donner la priorité aux intérêts nationaux ou aux intérêts privés, et à remettre à plus tard la résolution des problèmes mondiaux, notre civilisation en pâtira, a-t-elle averti.
Face aux changements climatiques, Mme Musar a appelé à abandonner la « mentalité du statu quo », qui ne fonctionne pas. Parce que les changements climatiques « constituent le plus grand défi de notre temps », le monde entier, uni, doit investir dans un monde écologiquement durable, a-t-elle lancé, liant solidarité mondiale et justice climatique pour tous. La solidarité intergouvernementale –dans laquelle les États les plus riches contribuent davantage que les plus pauvres, et où les entreprises privées les plus riches apportent également leur juste part– doit être guidée par la compréhension que les changements climatiques sont la conséquence des activités humaines, a-t-elle ajouté. Dans un contexte pourtant très préoccupant de polarisation géopolitique, la Slovénie envisage d’augmenter sa contribution au Fonds mondial pour le climat de 50%, combler l’écart de financement croissant entre les besoins des pays en développement et les ressources financières disponibles étant en outre essentiel à la mise en œuvre Programme de développement durable à l’horizon 2030.
La Slovénie, qui sera membre du Conseil de sécurité en 2024 et 2025, ne manquera pas de rappeler sa position historique en faveur d’une réforme radicale de cet organe clef de l’ONU, a assuré Mme Musar. La Slovénie fait partie depuis toujours des États Membres pour qui un changement dans la composition des membres permanents et non permanents du Conseil de sécurité est indispensable, la répartition actuelle des sièges n’étant ni équitable ni représentative, a-t-elle ajouté. Elle s’est également dite favorable à une limitation du droit de veto, afin que le Conseil inspire de nouveau confiance et puisse agir enfin efficacement, en Syrie comme en Ukraine.
Protéger la liberté d’information, c’est lutter, dans un cadre mondial régi par l’ONU, contre les fausses informations, la manipulation et la tromperie, a déclaré Mme Musar. Faisant siennes les mises en garde répétées du Secrétaire général contre la prolifération de la haine et des mensonges dans l’espace numérique, elle a jugé que les plus grandes entreprises du secteur technologique devaient assumer plus systématiquement la modération des contenus qu’elles hébergent. Ces acteurs, impliqués au sein du Pacte numérique mondial, devraient mieux protéger les utilisateurs contre les discours de haine, la désinformation et autres contenus en ligne nuisibles, a-t-elle souligné
M. SHAVKAT MIRZIYOYEV, Président de l’Ouzbékistan, a fait état d’une crise de confiance mondiale, aggravée par les problèmes de fonctionnement des institutions garantes de la sécurité mondiale et les violations du droit international. Ces tensions géopolitiques engendrent de nouveaux obstacles à la libre circulation des échanges, des investissements et de l’innovation, a-t-il déploré, et à la solution de questions qui concernent le sort de l’humanité dans son ensemble, comme les changements climatiques. L’an dernier, l’Ouzbékistan a lancé l’initiative de solidarité de Samarkand, afin d’assurer la sécurité et le développement communs. M. Mirziyoyev s’est dit déterminé à poursuivre sa politique visant à créer « un nouvel Ouzbékistan, un État de droit, laïc, démocratique et social ». À cette fin, son gouvernement poursuit ses réformes en vue de renforcer les principes de démocratie et de justice, notamment avec la tenue, en avril dernier, d’un référendum national sur la refonte de la Constitution. La nouvelle loi fondamentale du pays réaffirme les principes d’égalité de tous les citoyens ainsi que la liberté d’expression et de conscience. Elle constitue aujourd’hui le fondement juridique de la stratégie de développement Ouzbékistan 2030, qui s’appuie sur les objectifs de développement durable de l’ONU, a expliqué le Président. L’Ouzbékistan aspire maintenant à devenir membre à part entière de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dans un avenir proche.
Ces dernières années, l’Ouzbékistan a obtenu des résultats « remarquables » en matière de protection des droits de l’homme, a indiqué M. Mirziyoyev, le travail forcé et le travail des enfants ayant été complètement abolis. Pendant un siècle, des millions de personnes ont été contraintes de récolter du coton, entraînant des boycotts du coton ouzbek. Grâce aux efforts communs des pays d’Asie centrale, l’Ouzbékistan a résolu ses problèmes de frontières nationales, de transport et d’utilisation de l’eau avec ses voisins, tandis que les échanges commerciaux ont été multipliés. « Notre région est devenue un centre prometteur de développement économique, un pont de transport et de communication reliant l’Est et l’Ouest, le Nord et le Sud », s’est félicité le Président. Afin de poursuivre sur cette lancée, il a proposé de créer un groupe de travail au sein de l’ONU destiné à soutenir le développement de la jeunesse dans la région.
Toutefois, l’Asie centrale continue de faire face à la « tragédie » de la mer d’Aral, a déploré le Président, qui aggrave sa vulnérabilité aux changements climatiques. Quelque 1,7 million d’hectares d’espaces verts abritant des plantes résistantes à la sécheresse ont récemment été aménagés sur le lit asséché de la mer d’Aral, avec le soutien de la communauté internationale. Dans ce contexte, il a exprimé son appui à la création du poste de représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU pour les ressources en eau, ainsi qu’à la création d’une plateforme de technologies hydriques en Asie centrale, en coopération avec le Mécanisme pour l’eau de l’ONU.
Par ailleurs, un plan d’action commun pour la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste mondiale de l’ONU en Asie centrale a été adopté en mars dernier, à Tachkent. M. Mirziyoyev a cependant jugé inacceptables les récentes manifestations « d’intolérance religieuse et d’islamophobie » dans certains pays. Considérant que les développements en Afghanistan ont un impact direct sur la sécurité internationale, le Président a appelé à l’élaboration de mécanismes permettant d’utiliser les avoirs internationaux gelés de l’Afghanistan pour répondre aux graves problèmes sociaux de ce pays.
M. LUIS ALBERTO ARCE CATACORA, Président de l’État plurinational de Bolivie, a rappelé combien le système capitaliste et les intérêts qu’il défendait entraient en contradiction avec la vie des êtres humains et l’existence de la planète. La paix et la sécurité sont compromises par le manque de volonté de la communauté internationale de mettre un terme aux efforts de guerre promus par les « sociétés de guerre transnationales », a‑t‑il expliqué, en appelant à la construction d’un nouvel ordre mondial « sans maîtres ni esclaves », ni deux poids, deux mesures. À cet égard, il a souhaité donner la prioritéà la « diplomatie populaire » afin de résoudre les conflits armés, en réitérant sa préoccupation face à l’escalade de la violence et l’utilisation d’armes de destruction massive en Europe de l’Est, et en déplorant plus généralement le niveau des dépenses militaires dans le monde.
Le dirigeant a appelé de ses vœux un « nouveau pacte pour l’avenir » pour répondre équitablement aux besoins des générations présentes et futures et a proposé, dans le contexte des changements climatiques, que chaque État consacre des ressources au fonds pour les pertes et les dommages à hauteur de sa responsabilité historique dans la production de gaz à effet de serre. Appelant à une réforme du système capitaliste après la « crise multidimensionnelle postpandémique exacerbée par les effets du conflit militaire en Europe de l’Est », M. Arce Catacora a noté que les pays du Sud, en comparaison, se développaient de manière pacifique et constructive, grâce à des processus de coopération et d’intégration, au sein de blocs commerciaux en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud. Malgré un contexte international défavorable, a‑t‑il expliqué, la Bolivie a appliqué le Plan de développement économique et social 2021-2025 sans pratiquer de politiques monétaires néolibérales et en prenant toujours soin des plus pauvres.
S’agissant de la crise climatique, M. Arce Catacora a déclaré qu’au vu des besoins d’adaptation de nombreux pays, les pays développés devaient assumer leur part correspondante de la dette climatique, notamment en honorant leurs engagements non encore respectés en matière de financement, de transfert de technologie et de développement des capacités. Dénonçant le transfert « systématique » des richesses du Sud vers le Nord, il a souligné qu’il n’y avait pas de démocratie sans développement et que dans son pays, la démocratie s’appuyait sur des droits collectifs protégés et garantis par l’État et sur une forte participation aux affaires de l’État des groupes sociaux, notamment celle des peuples autochtones et des femmes. Le Président a terminé son intervention en dénonçant le « blocus économique et financier illégal » imposé par les États-Unis à Cuba et en réaffirmant le soutien de la Bolivie à l’autodétermination du peuple palestinien.
M. KASSYM-JOMART TOKAYEV, Président du Kazakhstan, s’est inquiété de l’érosion des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies, et du fardeau que cela fait peser sur les structures actuelles de gouvernance internationale, sur l’économie, le commerce et la sécurité alimentaire ainsi que, plus généralement, sur la confiance dans le futur. « Les jeunes générations ne croient plus que le monde dont elles héritent sera meilleur », s’est-il lamenté. Il a appelé au dialogue comme « seul moyen de résoudre les conflits », tout en prônant une réforme du Conseil de sécurité pour le rendre « plus représentatif ». Il a également mis en avant certaines initiatives régionales, notamment en tant que Président en exercice de l’Organisation de coopération de Shanghai, qui prône, a-t-il assuré, un « dialogue ouvert entre le Sud et le Nord ».
Sur la question du nucléaire, M. Tokayev a rappelé l’engagement continu du Kazakhstan envers le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, et a plaidé pour un plan stratégique en vue de l’élimination complète des armes nucléaires d’ici à 2045, « ce qui pourrait bien être la contribution la plus importante de cette génération de dirigeants à la sécurité mondiale », a-t-il noté. De même, il a appelé à la création d’une agence internationale pour la sécurité biologique, soulignant les risques potentiels dans le contexte de la pandémie de COVID-19. Il s’est par ailleurs dit préoccupé par les actes récents de profond manque de respect à l’égard des livres saints, faisant référence aux récents autodafés du Coran, qui ne sauraient, selon lui, être acceptés comme manifestation de la liberté d’expression.
Dans la sphère économique, le Président a fait valoir le rôle croissant de la région d’Asie centrale dans le commerce international, et a appelé à un système multilatéral ouvert et transparent, basé sur les principes et les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Le Kazakhstan aspire à devenir un hub régional de l’approvisionnement alimentaire, a-t-il fait savoir, soulignant l’importance du couloir de transport transcaspien. En ce qui concerne la question du climat, M. Tokayev a mis l’accent sur les défis environnementaux spécifiques à l’Asie centrale. Il a appelé à une action coordonnée, qui ne doit néanmoins pas être l’occasion d’introduire des mesures restreignant le commerce et l’investissement, mais devrait plutôt, selon lui, se concentrer sur les actions positives. Tout en réaffirmant l’engagement de son pays en faveur de l’Accord de Paris, il a proposé de lancer un partenariat pour une transition énergétique juste au Kazakhstan, et promis d’organiser un sommet régional sur le climat en 2026. Il a aussi mentionné que l’eau serait un enjeu majeur dans le futur et que des ressources devaient être mobilisées pour y faire face.
Enfin, M. Tokayev a présenté un aperçu des efforts de réforme intérieure du Kazakhstan, soulignant les progrès dans la création d’un système politique plus inclusif et mieux gouverné, avec notamment la limitation à un seul mandat présidentiel de sept ans. « Nous adhérerons fermement à la formule: un président fort, un parlement influent et un gouvernement responsable », a-t-il résumé. Il a également introduit un quota de 30% de femmes, de jeunes et de personnes handicapées dans les listes électorales des partis. Le Président a terminé en mettant en lumière la priorité donnée à la jeune génération pour garantir le développement durable du pays.
M. SAIED EBRAHIM RAÏSSI, Président de la République islamique d’Iran, a rappelé que depuis sa dernière intervention, le monde fait face à des bouleversements historiques. Dans ce contexte, il a insisté sur la nécessité de poursuivre des idéaux de justice, de vérité et de raison en respectant des valeurs inaliénables qui trouvent leurs sources dans le Coran, dont il a brandi un exemplaire.
Tout en soulignant que le Coran proscrivait toute forme de violence, M. Raïssi a dénoncé l’islamophobie et l’apartheid culturel des minorités ayant cours dans les pays occidentaux, citant des mesures qualifiées d’indignes telles que l’interdiction du hijab dans les écoles ou le fait de brûler le Coran au nom de la liberté d’expression. Dénonçant le mensonge de l’Occident, il a exhorté l’ONU à mettre en place un cadre approprié pour garantir le respect de l’ensemble des religions. Après avoir dénoncé une guerre menée contre la famille, le chef d’État a aussi appelé à un mouvement mondial qui permette un réengagement de l’institution de la famille, incarnée par le mariage entre un homme et une femme.
M. Raïssi s’est félicité d’avoir lancé un nouveau chapitre des relations constructives avec les pays voisins de l’Iran en intégrant des mécanismes régionaux tels que l’organisation de coopération de Shangaï et le Corridor économique Nord-Est. Plaidant en faveur d’un accroissement de la coopération régionale, il a appelé à la mise en place d’un ordre mondial juste et équitable en abandonnant l’arrogance au profit de la coopération régionale. Il a invité la Palestine, la République arabe syrienne, le Yémen et l’Afghanistan à prendre part à ce processus. Il a également insisté sur la détermination de son pays à lutter contre les effets des changements climatique en mettant à profit les capacités nationales de production d’énergies renouvelables.
En matière de sécurité, M. Raïssi s’est félicité de la politique de « bon voisinage » entreprise par son pays et visant notamment à empêcher l’ingérence étrangère du Caucase au golfe Persique. Toute présence étrangère ne contribuera à aucune solution, mais constituera un problème en soi, a-t-il affirmé. Indiquant que cette initiative devait s’accompagner d’une coopération économique, il a salué le travail entrepris par son prédécesseur en matière de lutte contre le terrorisme et rappelé qu’il s’agissait là d’une priorité régionale. Accusant le « régime d’occupation à Jérusalem » d’être à l’origine de violence dans la région, il a appelé à mettre fin à « 70 ans d’occupation des terres palestiniennes ». Concernant la guerre en Ukraine, il a affirmé que l’Iran n’appuyait aucune guerre et s’est dit en faveur de toutes mesures politiques visant à mettre fin à ce conflit.
M. Raïssi a affirmé que le Plan d’action global commun constituait une réponse inappropriée aux engagements de son pays dans le cadre de la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité. Il a exhorté les États-Unis à s’expliquer de manière transparente et trouver une solution pérenne. Il a également mis en cause la position des pays européens.
Le Président a répété que, depuis 20 ans, l’Iran cherche à faire valoir le droit de son peuple à l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. Après avoir déploré le non-respect du Traité sur la non-prolifération par les États-Unis, il a assuré que les sanctions que ces derniers imposent à l’Iran n’avaient pas procuré les résultats négatifs escomptés. Invitant les États-Unis à adopter une trajectoire différente, il a conclu en affirmant: « Nous représentons l’avenir, les autres représentent le passé. »
M. ABDELMADJID TEBBOUNE, Président de l’Algérie, a rappelé que son pays pointait depuis plus de 50 ans les dysfonctionnements de l’ordre mondial et appelait à un nouvel ordre fondé sur l’égalité entre les États Membres de l’ONU. Il a jugé sans précédent le niveau atteint par les conflits et les crises, décrivant des relations internationales soumises à des logiques de confrontation et de conflit qui mettent en péril les institutions internationales à l’heure où le monde est soumis à des pressions énormes.
Le Président a regretté la perte d’efficacité du Conseil de sécurité dans son rôle de maintien de la paix et de la sécurité internationales. L’Algérie, qui s’apprête à siéger au Conseil, est consciente de sa responsabilité à la lumière des défis immenses auquel le monde est confronté, a-t-il ajouté. Il a appelé à réformer l’ONU afin de garantir une répartition géographique équitable, à revitaliser le rôle central l’Assemblée générale, seul organe reflétant réellement la diversité des États Membres, et à faire avancer le processus de négociation intergouvernemental pour une réforme du Conseil de sécurité, plaidant en faveur de la Position africaine commune.
M. Tebboune a réaffirmé le soutien de son pays à la cause palestinienne, rappelant que l’Algérie avait, en 2022, organisé une conférence visant à unir les factions palestiniennes, laquelle a débouché sur la Déclaration d’Alger. Réitérant son attachement à l’Initiative de paix arabe, il a appelé à mettre fin à l’occupation, « principale source de déstabilisation au Moyen-Orient ». Il a appelé la Cour internationale de Justice à faire suite à la demande de l’Assemblée générale du 30 décembre 2022 pour qu’elle rende un avis consultatif sur les pratiques israéliennes affectant les droits humains dans les territoires occupés, y compris Jérusalem-Est. Il a également appelé le Conseil de sécurité à adopter une résolution protégeant la solution des deux États, et l’Assemblée générale à tenir une session extraordinaire en vue d’accorder à l’État de Palestine le statut de membre à part entière de l’ONU.
Le Président a appelé à mettre fin à la situation de « dernière colonie africaine » du Sahara occidental, en y organisant un référendum d’autodétermination conformément au plan de règlement du Conseil de sécurité de 1991, approuvé par les deux parties mais qui attend toujours d’être mis en œuvre. Dénonçant des tentatives visant à créer « une légitimité à partir d’une situation illégitime », il a demandé à l’ONU de préserver la crédibilité de ses résolutions et, ainsi, sa réputation.
Préoccupée par la situation en Libye, au Mali et au Niger, l’Algérie cherche à apporter son soutien à des solutions politiques négociées, a déclaré M. Tebboune, qui a appelé à la vigilance face au risque d’interventions militaires étrangères au Niger, lesquelles pourraient entraîner des répercussions dangereuses sur la sécurité de toute la région. Inquiet de la situation générale au Sahel, soumise à l’instabilité, aux changements climatiques et aux groupes terroristes, il s’est dit prêt à faire profiter les États concernés de l’expérience algérienne en matière de médiation internationale et de lutte contre le terrorisme. Il a par ailleurs appelé les parties soudanaises à mettre fin au conflit et à reprendre le fil du dialogue.
Le Président a expliqué que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est une priorité nationale, qui a été intégré aux politiques du Gouvernement algérien, lui permettant d’obtenir des résultats importants en matière d’éducation, de santé, d’électricité et d’accès à l’eau. Enfin, il a rappelé que l’Algérie avait présenté en novembre 2022 un nouveau rapport national dans le cadre de l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme et a affirmé que le respect des droits humains était la pierre angulaire de tout système politique crédible, comme en témoigne l’amendement de 2020 à la Constitution algérienne.
M. ALBERTI FERNÁNDEZ, Président de l’Argentine, a noté que, face aux multiples crises et changements, le véritable défi est d’aligner les intérêts et d’élaborer des solutions. Selon lui, il est impossible de façonner un avenir équitable si celui-ci s’inscrit dans des logiques similaires à celles qui ont engendré les inégalités actuelles. Pourtant, l’architecture financière internationale cherche toujours à imposer les mêmes modèles que ceux qui ont concentré les richesses dans une seule partie du monde, a-t-il déploré. Plutôt que de marginaliser de vastes régions, il a demandé un nouveau cadre de traitement des dettes souveraines placé sous le signe de la justice sociale. Mettant en garde contre les conséquences d’un endettement sans fin, il a regretté que le Fonds monétaire international (FMI) calque ses taux d’intérêts sur ceux du système fédéral de réserve américaine et applique des majorations d’intérêts à de nombreux pays, y compris l’Ukraine, pour qui le fardeau de la dette extérieure est déjà intenable.
Alors que l’Argentine est confrontée à une baisse drastique de ses exportations à la suite des conditions climatiques, le marché alimentaire international est malmené par la spéculation financière, a poursuivi le dirigeant. Il a jugé crucial de mettre en place un système commercial international « plus juste, plus transparent, plus équitable et plus prévisible ». Ce dernier doit éliminer les distorsions produites par les subventions et interdire la spéculation pour permettre les investissements et l’augmentation de la production et ainsi répondre aux besoins alimentaires croissants, a-t-il insisté. M. Fernández a également dénoncé l’occupation du territoire ukrainien par la Russie qui entraîne des niveaux d’inflation inégalés dans les secteurs énergétique et alimentaire.
Soulignant les quatre décennies de démocratie ininterrompue en Argentine après une dictature ponctuée de crimes contre l’humanité, le Président a réitéré son appel à adhérer à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Exhortant la communauté internationale à faire valoir la voix du peuple au Guatemala, il a également insisté sur la nécessité de consolider l’égalité entre les citoyens. Toute régression des droits humains met en danger les institutions démocratiques garantes de l’état de droit, a-t-il averti. M. Fernández a également prôné un financement multilatéral « juste, transparent et équitable, mais différencié » pour lutter contre la crise climatique, tout en réaffirmant l’engagement de l’Argentine envers l’égalité des sexes et la diversité. Le multilatéralisme permet également d’instaurer la paix, la coopération et la justice, a-t-il développé, citant les mécanismes d’intégration en Amérique du Sud. Il a souhaité que les pays de la région coopèrent pour augmenter leur compétitivité dans les secteurs énergétique et alimentaire.
Par ailleurs, le Président a exhorté la République islamique d’Iran à coopérer avec les autorités judiciaires argentines pour faire avancer l’enquête sur l’attaque de 1994 contre l’AMIA et appelé la communauté internationale à soutenir l’Argentine dans la lutte pour la justice. S’opposant fermement aux mesures coercitives unilatérales et aux pratiques commerciales discriminatoires, le Président a demandé la fin du blocus contre Cuba et des sanctions américaines imposées au Venezuela. Réitérant ensuite les « droits légitimes et imprescriptibles de souveraineté » sur les îles et espaces maritimes qui font partie intégrante du territoire argentin, il a demandé au Secrétaire général de convaincre le Royaume-Uni, qui occupe ces territoires, de revenir à la table des négociations pour mettre fin à cette « situation coloniale anachronique », conformément aux résolutions de l’Assemblée et de son Comité spécial de la décolonisation.
M. NAYIB ARMANDO BUKELE, Président d’El Salvador, a rappelé la nécessité de se réinventer, s’adressant en particulier « aux pays qui connaissent des circonstances similaires aux nôtres ». Il a vanté les succès de sa politique intérieure, basée sur l’indépendance. « Nous n’avons pas accepté le destin que d’autres nous avaient tracé », a-t-il déclaré. « En très peu de temps, El Salvador est passé du statut de pays le plus dangereux du monde à celui de pays le plus sûr d’Amérique latine ». À ceux qui s’interrogent sur les raisons de ce succès, le Président a répondu: « Ils doivent prendre leurs propres décisions et revendiquer leur droit à faire preuve de bon sens, à essayer leurs propres recettes. Aucun pays n’a le droit de leur imposer ses idées. »
Les déboires des gouvernements salvadoriens précédents, a analysé M. Bukele, relevaient d’une attitude visant à appliquer « ce que les autres disaient être le mieux pour nous ». D’après lui, des gouvernements de gauche et de droite, sous influence étrangère, ont importé le conflit entre l’Occident et l’Union soviétique et mené El Salvador à la guerre civile. « Au lieu de nous donner des médicaments pour guérir, ils nous ont donné du poison », a-t-il déploré, ajoutant que pour la première fois, son gouvernement a refusé la coupe et opté pour « sa propre médecine ». Le Chef de l’État a souligné avoir créé sa propre méthode, « adaptée à notre réalité », laquelle lui a valu deux votes de confiance de la population. Pour expliquer son succès, il a affirmé s’être occupé d’emblée du problème le plus urgent, l’insécurité. « Nos efforts pour améliorer la santé publique et l’économie n’auraient servi à rien si les gens continuaient d’être tués et si les juges et les procureurs laissaient les meurtriers en liberté », a-t-il insisté. Ces actions, a-t-il rapporté, lui ont valu les condamnations d’experts et de médias internationaux. « Si nous les avions écoutés, nous perdrions encore des milliers de concitoyens aux mains des terroristes. »
Le rétablissement de la sécurité a permis à El Salvador de s’ouvrir au monde, a poursuivi le Président, relevant notamment que cette année, le pays avait hébergé les Jeux d’Amérique centrale et des Caraïbes, signé un accord avec Google pour numériser certains services de l’État et connu une augmentation du tourisme. En outre, de nombreux Salvadoriens de l’étranger auraient commencé d’investir dans le pays ou envisageraient un retour au pays, dont 60% de ressortissants domiciliés aux États-Unis, a-t-il précisé, citant une étude réalisée en 2022 par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Il s’est également félicité de l’organisation prochaine de Miss Univers dans son pays, ainsi que du resserrement des relations avec des pays tiers désireux d’aider El Salvador à se reconstruire.
M. SADYR ZHAPAROV, Président du Kirghizistan, s’est alarmé des multiples changements intensifiant la concurrence, augmentant la fragmentation géo-économique et ébranlant la confiance entre les grandes puissances. Il est vital de construire un système multilatéral qui unira les membres de la communauté internationale, a-t-il déclaré. Saluant le Nouvel Agenda pour la paix, il a réitéré le soutien de son pays à l’ONU et reconnu en la diplomatie la force motrice du nouveau multilatéralisme.
S’exprimant ensuite sur l’Asie centrale, le Président a établi le renforcement des relations avec les pays de la région comme l’une des priorités du Kirghizistan, tout en soulignant les traditions culturelles, l’histoire et la vision du monde communes à ces pays. Ces dernières années, la coopération géo-économique s’est développée avec constance et succès, s’est-il félicité, voyant l’Asie centrale comme un intermédiaire géopolitique pour la coopération au niveau international. Le Kirghizistan entend poursuivre l’intégration régionale et interagir activement avec d’autres centres d’influence mondiaux de manière bilatérale et multilatérale. Il est toutefois nécessaire de régler les problèmes de frontières nationales, a estimé M. Zhaparov. Se remémorant les affrontements armés à la frontière avec le Tadjikistan qui avaient fait de nombreuses victimes, il a salué la volonté politique ayant permis d’éviter l’escalade et a prôné une résolution des conflits par la voie diplomatique et dans le respect des principes du droit international. Si le Kirghizistan respecte la souveraineté territoriale des autres États, il a néanmoins prévenu que son pays ne permettra aucune appropriation de son territoire, mentionnant l’accord sur la démarcation des frontières passé avec l’Ouzbékistan.
Le Chef de l’État a rappelé que le peuple afghan est menacé par une crise humanitaire qui menace la sécurité internationale, appelant les États à fournir l’aide économique et humanitaire nécessaire. Les problèmes mondiaux ne peuvent être réglés que par une solution collective globale qui nécessite la transformation des systèmes énergétique et alimentaire, a-t-il reconnu. Toutefois, les pays en développement sont confrontés à un double défi: investir dans le développement en s’adaptant aux changements climatiques. M. Zhaparov a appelé à la mise en œuvre urgente du Programme d’action d’Addis-Abeba visant à dédommager les pays en développement pour les pertes liées aux changements climatiques et à alléger le fardeau de la dette extérieure. Il a aussi jugé nécessaire de réviser l’Accord de Paris et d’augmenter les fonds pour répondre aux besoins des pays vulnérables face aux changements climatiques. Il a déploré que seule l’Allemagne ait accepté d’échanger une partie de la dette du Kirghizistan contre des projets environnementaux. Si les pays en développement ne sont pas soutenus par une réforme structurelle de l’architecture financière internationale, le fossé entre les pays continuera de se creuser, a-t-il averti.
La fonte des glaces dans les montagnes du Kirghizistan aggrave les problèmes d’eau potable et de dégradation du sol, menaçant la sécurité alimentaire, a souligné le Président. Avec les Nations Unies, le Kirghizistan a élaboré un plan d’action mondial pour préserver les écosystèmes et les glaciers. Prônant une coalition des pays montagneux, M. Zhaparov a également mentionné la feuille de route nationale qui prévoit des mesures mondiales et régionales sur cinq ans pour préserver les écosystèmes dans son pays. Enfin, il a insisté sur l’importance du Conseil de sécurité pour la sécurité internationale, même si son efficacité et sa représentativité doivent être repensées pour faciliter les consensus. En conclusion, le Président a espéré pouvoir compter sur le soutien des États Membres pour la candidature du Kirghizistan en tant que membre non permanent en 2027-2028.
M. SANTIAGO PEÑA PALACIOS, Président du Paraguay, a constaté que les mécanismes de coopération et de gouvernance mondiaux existants sont dépassés face à la pauvreté, aux inégalités, aux migrations, au terrorisme international, à la criminalité transnationale organisée et aux tensions géopolitiques. L’inefficacité apparente des institutions multilatérales pour résoudre efficacement les problèmes mondiaux a généré de la frustration et conduit à une montée du sentiment selon lequel les intérêts nationaux devraient primer sur la coopération multilatérale, a-t-il noté. Or, l’histoire du Paraguay nous oblige à miser sur le dialogue et à rejeter l’usage de la force pour résoudre les différends. Il a appelé à entreprendre une réforme des mécanismes multilatéraux et des organisations multilatérales telles que l’ONU afin d’éviter de nouvelles guerres comme celle qui ravage l’Ukraine et mettre un terme « à l’impitoyable perte de tant de vies humaines ». S’agissant de la réforme et de l’élargissement du Conseil de sécurité, le Président a considéré que la structure de l’ONU devrait refléter la dynamique internationale sur une base démocratique et équitable. Dans ce contexte, il a exprimé son appui à la reconnaissance de la « République de Chine-Taiwan » en tant que partie intégrante du système de l’ONU.
Poursuivant, le Président a estimé que les changements climatiques constituent un défi planétaire nécessitant des mesures à la fois rigoureuses et équitables pour éviter de nouveaux dommages à la planète et à ses habitants. Les restrictions commerciales fondées sur les pratiques agricoles ou les normes environnementales constituent selon lui des barrières injustes et discriminatoires qui étendent les réalités des régions développées à celles en développement, sans tenir compte de leurs différences. Il est donc temps de répondre à ces préoccupations et de promouvoir une approche plus équitable et collaborative tenant compte des besoins spécifiques de chaque pays. Aujourd’hui, a-t-il ajouté, 44% du territoire paraguayen conserve son couvert forestier, notamment à l’aide de technologies durables telles que les semis directs et la rotation des cultures, dans le cadre d’une politique de zéro déforestation. Il s’agit là de la preuve irréfutable qu’il est possible d’atteindre un équilibre entre la production agricole et la conservation des ressources naturelles.
« Nous sommes aujourd’hui confrontés à quatre défis mondiaux générateurs de tensions géopolitiques: l’accès à l’eau, la sécurité alimentaire, la suffisance énergétique et la résilience des chaînes logistiques », a diagnostiqué le Président. Il a indiqué que le Paraguay aspire à devenir le centre logistique du corridor routier bio-océanique sud-américain, afin de transformer en possibilités sa « centralité géographique » et de renforcer son intégration avec les pays voisins et les marchés du Pacifique. Qui plus est, le Paraguay est déterminé à abandonner son image « d’île entourée de terre », pour devenir le « centre de l’intégration sud-américaine ».
Mme DINA ERCILIA BOLUARTE ZEGARRA, Présidente de la République du Pérou, a partagé sa fierté d’être la première femme présidente de son pays. Elle s’est décrite comme une « provinciale » dont la langue maternelle est le quechua, née sur les hauts plateaux du sud des Andes péruviennes. Le Gouvernement qu’elle dirige, a-t-elle ajouté, a, face à des défis difficiles, rétabli la stabilité et insufflé l’espoir dans un pays en quête de développement économique et de justice sociale. Rendant hommage aux Péruviennes, elle a scandé, dans son dialecte natal: « Plus jamais de violences contre les femmes »! Dans la région où elle a grandi, la Présidente a témoigné avoir connu de près les souffrances causées par la pauvreté. Elle est donc pleinement consciente que, comme réaffirmée dans la déclaration politique adoptée hier, l’éradication de la pauvreté est le plus grand défi auquel le monde est confronté et constitue une condition indispensable du développement durable. « C’est un engagement que nous ne pouvons et ne devons pas abandonner »! Les problématiques migratoires, a poursuivi la Présidente, exigent une coopération bilatérale, régionale et multilatérale. À cet égard, le Pérou a déployé d’énormes efforts, mais ce n’est que grâce à la coopération internationale que le monde parviendra collectivement à des migrations sûres, ordonnées et régulières.
Concernant la santé, le Pérou est parvenu à vacciner plus de 1,9 million d’enfants âgés de 2 mois à 5 ans contre la poliomyélite et la rougeole, et continue à travailler sans relâche pour débloquer 11 projets d’hôpitaux « paralysés par la négligence et la corruption » des gouvernements précédents. La Présidente s’est également dite préoccupée par l’internationalisation croissante des réseaux criminels, alimentée par la corruption de ces gouvernements, qui a sapé la crédibilité des institutions et de la démocratie, affectant le développement et le bien-être des citoyens. Nous ne pouvons pas baisser la garde face à la délinquance, au crime organisé et au trafic de drogue, a-t-elle lancé.
Le mois dernier, a souligné Mme Zegarra, huit pays se partageant la forêt amazonienne ont tenu un sommet présidentiel, au cours duquel ils se sont accordés sur des mesures de conservation et d’utilisation durable de l’Amazonie. Le Pérou y a présenté sa vision d’une « Amazonie à visage humain ». À visage humain parce que l’Amazonie, qui constitue 61% de la superficie du Pérou, n’est pas un sanctuaire occupé uniquement par la nature: elle abrite près de 5 millions de Péruviens, a rappelé leur Présidente, pour qui des mesures énergiques seront nécessaires pour parvenir à limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 degré Celsius, comme prévu dans l’Accord de Paris. Plus que jamais, il est urgent de mobiliser les 100 milliards de dollars par an pour l’action climatique dans les pays en développement à laquelle les pays développés se sont engagés, ainsi que d’établir le fonds pour les pertes et dommages convenu lors de la dernière COP, a insisté la dirigeante.
M. FILIPE JACINTO NYUSI, Président du Mozambique, a considéré que l’échec du Programme 2030 réside dans l’absence de confiance et de solidarité entre les pays riches et les pays pauvres. Le Chef de l’État s’est focalisé sur la paix et la sécurité, la lutte contre le terrorisme, les changements climatiques, la transition énergétique, l’économie bleue et la préservation de l’environnement. En matière de paix et de sécurité, il a rappelé que le règlement des cycles de conflits armés au Mozambique n’a été possible que grâce à un dialogue constructif fondé sur le respect mutuel. Le Mozambique étant confronté au terrorisme dans sa province de Cabo Delgado, le Gouvernement a renforcé les capacités de combat des Forces de défense et de sécurité avec le soutien du Rwanda. « Nous avons obtenu des succès tangibles sur le terrain, bien que les terroristes continuent de semer la terreur et la peur de manière sporadique dans des villages isolés. » L’amélioration de la sécurité et de la tranquillité a encouragé le retour des populations en grand nombre dans leurs régions d’origine pour reprendre une vie normale, a rapporté M. Nyusi. Il y a vu un exemple du principe de la « solution africaine aux problèmes africains ».
Afin d’atténuer les conséquences des changements climatiques sur les populations, le Gouvernement renforce le système de gestion des catastrophes avec la participation des acteurs publics et privés, de la société civile et des communautés locales, en mettant l’accent sur la prévention et l’adaptation, a expliqué le Président. De cette façon, le pays a réduit l’impact des catastrophes naturelles, une prouesse saluée par la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), l’Union africaine et l’ONU. La transition énergétique nécessitant d’importants investissements dans des projets de production d’électricité à partir de sources propres, le Président a invité les pays industrialisés à augmenter leurs fonds climatiques. Au Mozambique, le secteur de l’énergie est dominé par l’hydroélectricité, avec une capacité de 2 172 mégawatts tandis que l’énergie solaire fournit 95 mégawatts.
En outre, a poursuivi M. Nyusi, le Mozambique parie sur le développement de l’économie bleue pour tirer parti des vastes ressources de sa zone économique exclusive. En ce qui concerne la conservation de l’environnement, le Mozambique est devenu le premier pays africain à recevoir des paiements du fonds de la Banque mondiale pour réduire les émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts. Poursuivant, le Chef de l’État a dit que pour affronter les défis mondiaux actuels, le plus important est d’agir avec vigueur et en utilisant les ressources disponibles. Ensuite, il faut des mesures concrètes pour éradiquer la pauvreté, réduire les inégalités et préserver la nature en autonomisant les femmes, les jeunes et les autres groupes vulnérables. De plus, le système des Nations Unies a besoin de réformes profondes et enfin, il faut un système financier international plus inclusif, guidé par des règles transparentes et mutuellement bénéfiques dans lequel l’Afrique participe en tant que partenaire.
M. LAURENTINO CORTIZO COHEN, Président du Panama, a qualifié son pays de « carrefour au cœur des Amériques » où convergent toutes les routes, grâce à son exceptionnelle connectivité aérienne et maritime, la meilleure d’Amérique latine et des Caraïbes. Il a également indiqué que les lignes directrices des objectifs de développement durable (ODD) étaient incluses dans l’agenda de son administration, notamment en matière de lutte contre la pauvreté et les inégalités.
Le Président s’est cependant inquiété de l’impact de la crise climatique sur les trois premiers ODD. « Pouvons-nous réellement mettre fin à la pauvreté, à la faim, et garantir la santé pour tous au milieu des sécheresses, des incendies, des inondations et de l’élévation du niveau des océans »? a‑t‑il interrogé. Qualifiant la crise climatique de « bombe à retardement », il a insisté sur la nécessité d’agir rapidement.
M. Cortizo Cohen a rappelé l’effort extraordinaire du Panama pour préserver ses mers en atteignant l’objectif de 30% de zones protégées, neuf ans avant 2030, et en le portant à 54% cette année. Il a qualifié son pays de leader bleu, rappelant qu’il est l’un des sept pays au monde affichant une empreinte carbone négative.
Pour autant, le Panama fait partie des 15 pays du monde les plus exposés aux risques climatiques et naturels, a‑t‑il regretté, signalant que son pays avait déjà enregistré un premier cas de déplacement climatique avec la relocalisation de la population de l’île de Cartí Sugdupu, en raison de l’élévation du niveau de l’océan. Il a appelé les pays les plus émetteurs à respecter leurs engagements en matière de réduction des gaz à effet de serre.
Le Chef de l’État a ensuite plaidé en faveur d’une approche multilatérale des migrations irrégulières, mettant l’accent sur le respect des droits humains et des principes de solidarité et de responsabilité partagée. Il a assuré que son pays déployait un « effort titanesque » pour améliorer la protection des migrants irréguliers qui, toujours plus nombreux, traversent la frontière avec la Colombie et s’aventurent dans la dangereuse jungle du Darién, le plus grand parc naturel de toute l’Amérique centrale. Qualifiant la situation « d’intenable » et « d’inhumaine » pour des centaines de milliers de migrants, il a appelé la communauté internationale à prendre la pleine mesure du problème de la migration irrégulière, qui n’est pas réservé à la Méditerranée.
« Nous sommes engagés dans une course contre la montre pour la survie de l’humanité, qui est la raison d’être de l’organisation mondiale qui nous réunit », a martelé le Président, affirmant que son pays avait pour le monde les mêmes souhaits que pour son propre peuple: la paix, le bien-être, la justice et le développement.
M. BOLA AHMED TINUBU, Président du Nigéria, est revenu sur les échecs en matière de bonne gouvernance qui ont entravé le développement de l’Afrique, pointant dans le même temps « les promesses non tenues, les traitements injustes et l’exploitation pure et simple » de la part de pays étrangers qui ont également pesé lourdement sur la capacitéà progresser du continent.
L’occasion pour le Président de réitérer la demande de l’Afrique de bénéficier du même engagement politique et du dévouement en faveur de l’Europe au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans le cadre du Plan Marshall.
Certes, a reconnu M. Tinubu, les conditions et les causes sous-jacentes des défis économiques auxquels l’Afrique d’aujourd’hui est confrontée sont sensiblement différentes de celles de l’Europe de l’après-guerre. Mais, ce que l’Afrique recherche, a-t-il continué, c’est un engagement « tout aussi ferme » en faveur d’un partenariat et d’un renforcement de la coopération internationale pour la réalisation du Programme 2030. De fait, a recommandé le dirigeant, pour que le thème de l’actuelle session ait un impact, les institutions mondiales, les autres nations et le secteur privé doivent considérer le développement de l’Afrique comme une priorité, non seulement pour le continent, mais aussi dans leur propre intérêt.
Si le Nigéria veut remplir son devoir envers son peuple et le reste de l’Afrique, il lui faut créer des emplois et croire en un avenir meilleur, a fait valoir le Président. Il s’agit de montrer l’exemple, a-t-il ajouté en détaillant les différentes mesures mises en œuvre dans son pays, dont la suppression de la subvention du carburant, jugée « coûteuse et corrompue », pour favoriser la croissance économique et la confiance des investisseurs. De même, il a veillé à supprimer un système de taux de change néfaste, avant d’annoncer le lancement d’autres réformes axées sur la croissance et l’emploi. « Un train de réformes difficiles mais nécessaires » pour construire l’économie que le peuple mérite.
Le Chef de l’État s’est dit favorable à tous les partenariats tant que ceux-ci ne voient pas d’inconvénient à ce que le Nigéria et l’Afrique jouent un rôle plus important au sein de la communauté mondiale. Poursuivant, il a défendu une gouvernance démocratique, selon lui le meilleur garant de la volonté souveraine et du bien-être du peuple. C’est pourquoi il a condamné les coups d’État militaires, de même que « tout arrangement politique civil déséquilibré qui perpétue l’injustice ».
En tant que Président de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), M. Tinubu a dit chercher à aider à rétablir une gouvernance démocratique au Niger afin de relever les défis politiques et économiques auxquels cette nation est confrontée, y compris les extrémismes violents qui cherchent à fomenter l’instabilité dans la région. À cet égard, le Président nigérian a tendu la « main de l’amitié » à tous ceux qui soutiennent sincèrement cette mission, invitant le reste du monde à « marcher avec nous » comme de véritables partenaires. « L’Afrique n’est pas un problème à éviter ni à plaindre. L’Afrique n’est rien de moins que la clef de l’avenir du monde », a-t-il conclu.
M. LUIS LACALLE POU, Président de l’Uruguay, a rappelé l’engagement des États Membres de respecter les mêmes droits, devoirs et principes. Il s’est dit conscient des différents défis à relever, convaincu que la mondialisation, l’intelligence artificielle, ou encore la communication en temps réel sont autant d’instruments qui contribuent à l’intégration et au développement des peuples. Toutefois, a nuancé M. Lacalle Pou, cela doit s’accompagner d’une « responsabilité croissante », déplorant le « monde des discours sans action », où un dirigeant mondial peut, par de simples mots, engendrer des conflits internationaux, ou encore un effondrement bancaire.
Poursuivant, le Président a indiqué que la stabilité démocratique de son pays prend son essence dans une « tradition historique ». De fait, malgré la pandémie, les répercussions de l’invasion russe de l’Ukraine et les facteurs climatiques, l’Uruguay a retrouvé son économie prépandémie, s’est-il félicité, évoquant notamment l’amélioration de l’emploi, la baisse du chômage, les investissements dans les infrastructures, ainsi que les investissements étrangers directs, preuves, selon lui, de la confiance retrouvée. Aujourd’hui, l’Uruguay jouit de finances publiques ordonnées, d’une inflation au plus bas, et s’est engagé dans d’importantes réformes, s’est-il félicité.
Sur le plan climatique, son pays s’est auto-proclamé, il y a des années, « Uruguay naturel », en référence aux énergies renouvelables, à son programme de reboisement et à son processus de production durable. Le Président a également évoqué le lancement d’un « bon durable » basé sur un système de « récompenses ou punitions » selon le respect ou non des dispositions de l’Accord de Paris. Il a suggéré d’appliquer cette approche au plan international. Selon lui, imposer des sanctions ou accorder des récompenses pour les processus promouvant la durabilité est un moyen de motiver et de pousser les nations à s’améliorer et de consentir davantage d’efforts à cette question, ce qui aura un impact sur les économies nationales et internationales.
Dans le droit fil de cette idée, le Chef de l’État a décrit la situation que connaît son pays comme étant le « péché de bien faire les choses ». De fait, a-t-il déploré, depuis que l’Uruguay est parvenu à un développement humain et économique important, il n’a plus accès à certaines formes de coopération, de système préférentiel, ou d’instruments commerciaux internationaux essentiels à son développement. Il a appelé à revoir ces mécanismes en vue de motiver les pays sur la voie du développement durable.
M. PETR PAVEL, Président de la République tchèque, a apporté son appui aux réformes proposées par le Secrétaire général dans « Notre programme commun », notamment la réforme du Conseil de sécurité. L’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Fédération de Russie continue de constituer une violation manifeste de la Charte des Nations Unies et du droit international, a-t-il rappelé en demandant que la Russie retire sans condition ses troupes de l’Ukraine. Les dirigeants russes devant être tenus pour responsables du crime d’agression contre leurs voisin, M. Pavel a soutenu la création d’un tribunal spécial chargé de juger ledit crime. « Les responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité devront répondre de leurs actes. » Il a aussi appuyé l’établissement du Registre des dommages causés par l’armée russe appelant tous les États à se joindre à ces efforts. Il a assuré que son pays soutiendra l’Ukraine aussi longtemps que nécessaire. « La Tchéquie continuera de fournir une aide humanitaire à la population ukrainienne touchée par la guerre. » Par ailleurs, le Président a réitéré son appui aux pro-démocrates russes et biélorusses, aux journalistes et défenseurs des droits de l’homme dans le besoin. Le peuple ukrainien mérite la paix. Cette paix doit être la paix aux conditions de l’agressé et non de l’agresseur, a-t-il insisté avant d’appeler les dirigeants du monde libre à maintenir l’unité et le soutien de l’Ukraine.
S’agissant des crises sécuritaire, humanitaire et politique dans la région du Sahel, la communauté internationale doit trouver un moyen de mettre fin à la série de coups d’État militaires et d’assurer le retour à l’ordre constitutionnel, a exhorté le Président. En Asie et dans le Pacifique, il a déploré les actions militaires de la Chine qui attisent les tensions dans le détroit de Taiwan, et ses actions hostiles contre ses partenaires en mer de Chine méridionale. Tout différend doit être résolu de manière pacifique, a-t-il encouragé. En « Corée du Nord » et en Iran, l’escalade irresponsable des activités nucléaires ou de missiles balistiques intercontinentaux menace la sécurité internationale et régionale. Il a de même condamné tout soutien matériel à l’agression militaire de la Fédération de Russie en Ukraine, les livraisons d’armes aggravant les souffrances de la population ukrainienne.
Au Moyen-Orient, M. Pavel a applaudi les efforts de normalisation des relations entre Israël et ses voisins arabes en tant que facteurs de la stabilité et de la paix dans la région. Il a également exhorté à tenir la promesse du Programme 2030 en mettant l’accent sur le lien entre la paix, la sécurité et le développement, d’une part, et les droits de l’homme, la justice et des institutions fortes, d’autre part. En ce qui concerne les changements climatiques, le Président a rappelé que c’est sous la présidence tchèque du Conseil de l’Union européenne, l’année dernière, qu’a été finalisée une législation qui ouvre la voie vers la transition verte du secteur industriel. Enfin, il a recommandé une action collective afin de contrer les régimes autoritaires qui tentent de redéfinir les principes fondamentaux de l’ordre multilatéral.
M. SURANGEL S. WHIPPS JR, Président des Palaos, a affirmé qu’en tant que petit État insulaire en développement (PEID), les Palaos étaient vulnérables aux changements climatiques et confrontés à d’importants défis économiques, notamment en raison du coût élevé des importations. Il a rappelé que « les coups avaient commencé à pleuvoir » sur l’archipel, très dépendant du tourisme, en 2016, avec une baisse de 13% du nombre de touristes suivie par une baisse de 47% en 2019. La COVID-19 a ensuite entraîné une quasi-disparition des touristes: en 2021, leur nombre ne représentait que 2% de celui de 2015.
L’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie a encore aggravé la situation en faisant monter en flèche le prix du gaz, a ajouté le Président, appelant à une cessation immédiate des hostilités. Il a également exhorté toutes les parties impliquées dans le détroit de Taiwan à faire preuve de retenue et à rechercher une solution pacifique pour réduire les tensions, soulignant que le bien-être des nations est intrinsèquement lié à la paix et à la sécurité internationales.
Qualifiant les changements climatiques de « défis les plus importants pour notre développement durable », il en a déploré les impacts sur les zones côtières, les terres agricoles, les ressources marines, le patrimoine culturel et les moyens de subsistance. Il a affirmé que l’aide à l’atténuation et à l’adaptation face à ces impacts était cruciale pour la survie de son pays. Il a indiqué qu’une île où il avait l’habitude de pêcher avec son père dans sa jeunesse, avait vu sa superficie réduite de deux tiers en raison de l’élévation du niveau de l’océan, préfigurant le destin de l’archipel si des mesures suffisamment fortes n’étaient pas adoptées.
Le Président a appelé d’urgence les nations du G20, responsables de 80% des émissions mondiales de carbone, à respecter leurs engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris et à limiter le réchauffement à 1,5 °degré Celcius. Il a également exhorté l’ONU à simplifier l’accès des PEID et des autres communautés vulnérables aux fonds multilatéraux.
Il a salué ceux qui s’opposent à l’exploitation minière en eaux profondes, et les reports de projets obtenus afin d’effectuer des études d’impact complémentaires sur les écosystèmes sous-marins. S’inquiétant de la perturbation des fonds marins qui pourrait libérer le dioxyde de carbone y étant stocké, il a plaidé en faveur d’un moratoire mondial sur l’exploitation minière en eaux profondes, conformément au principe de précaution de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.
M. Whipps a ensuite annoncé que les Palaos adhéreraient demain à l’instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Qualifiant d’« essentielle » la participation universelle, il a souligné l’importance du rôle des pays développés pour fournir des moyens de mise en œuvre.
M. MACKY SALL, Président de la République du Sénégal, a relevé que depuis la dernière session, l’état du monde ne s’est pas amélioré. De fait, a soutenu M. Sall, pour des millions de personnes, le quotidien reste marqué par la peur, la violence, la pauvreté et les inégalités. Nombre de pays continuent de subir l’impact économique et social de la pandémie. Le réchauffement climatique a atteint un niveau sans précédent, a-t-il constaté. La tragédie de l’émigration clandestine rappelle la nécessité de mettre en œuvre le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, et de poursuivre sans relâche la lutte contre les réseaux criminels qui organisent le trafic illicite d’êtres humains.
Le Président a fait part de sa « grave préoccupation » face à la résurgence des coups d’État en Afrique, réitérant sa ferme condamnation de toute forme de changement anticonstitutionnel de gouvernement. L’urgence du moment, pour M. Sall, c’est aussi le terrorisme qui continue de gagner du terrain sur le continent, « sans réaction appropriée du Conseil de sécurité ». Il a rappelé que son pays avait alertéà maintes reprises, notamment lors de son mandat en tant que membre non permanent de l’organe en 2016-2017, sur l’inefficacité des opérations de maintien de la paix en Afrique dont les mandats et les équipements ne répondent guère à la nature des situations. « Il n’y a pas de paix à maintenir là où il s’agit plutôt de la restaurer, en combattant des groupes armés qui pillent et endeuillent au quotidien des populations innocentes, occupent des territoires entiers et menacent des États dans leur existence », a martelé le dirigeant, évoquant pour illustrer son propos les « péripéties tumultueuses » de deux missions de paix en Afrique.
Dans le même esprit, M. Sall a appelé à la désescalade et au règlement pacifique de la guerre en Ukraine et renouvelé son soutien au droit du peuple palestinien à un État viable, coexistant pacifiquement avec l’État d’Israël, chacun à l’intérieur de frontières sûres et internationalement reconnues. Il a, par ailleurs, estimé que le système multilatéral, héritage d’un « passé révolu », est devenu « obsolète ». Pour lui, un système qui continue d’ignorer les réalités de son temps et les besoins de plus des trois quarts de ses pays membres accentue les inégalités, génère les conditions de sa contestation, et provoque le risque de sa fragmentation. C’est pourquoi le Président a recommandé de réformer la gouvernance politique, économique et financière mondiale, afin qu’elle soit plus représentative de la diversité, et conforte ainsi sa légitimité. Il s’est dit convaincu que « nous pouvons y arriver si nous y mettons la volonté politique nécessaire ». Le G20 l’a d’ailleurs démontré en admettant l’Union africaine comme membre de plein droit.
Enfin, M. Sall a rappelé que le 25 février 2024 se tiendra l’élection présidentielle sénégalaise, qui, a-t-il assuré, sera, comme les précédentes, « démocratique, libre et transparente ». Et le 2 avril, a-t-il assuré, il passera le pouvoir à son successeur après 12 ans à la tête de son pays. Porter la voix du Sénégal, nouer et entretenir des amitiés dans ce concert des nations où s’harmonisent « nos efforts communs vers nos fins communes », aura été un grand honneur pour lui.
M. OLAF SCHOLZ, Chancelier de la République fédérale d’Allemagne, a rappelé que voici 50 ans, presque jour pour jour, deux États allemands rejoignaient l’ONU: la défunte République démocratique allemande et la République fédérale d’Allemagne. Cette étape historique revêt encore aujourd’hui une grande importance pour les Allemands. L’adhésion a en effet offert à son pays, « auteur de guerres terribles et de crimes atroces », la possibilité de réintégrer la famille des peuples pacifiques. Ce retour a été précédé d’une « politique visionnaire de détente », qui avait pour objectif de « combler les fossés de la guerre froide », comme l’a formulé un précédent Chancelier, lauréat du prix Nobel de la paix, Willy Brandt. L’une des conditions pour l’Allemagne était le renoncement à toute forme de révisionnisme -en reconnaissant comme inviolables ses nouvelles frontières créées après la Seconde Guerre mondiale. À l’époque, s’est souvenu M. Scholz, cette décision avait été rejetée par de nombreux citoyens d’Allemagne fédérale. « Avec le recul, elle s’est avérée être la bonne. »
S’il est revenu sur les débuts de l’adhésion allemande, a précisé M. Scholz, ce n’est pas seulement par intérêt historique, mais parce que l’interdiction du recours à la force constitue toujours la promesse centrale de l’ONU. Seule cette institution -sur la base des valeurs incarnées dans la Charte- résout pleinement l’exigence de représentation universelle et d’égalité souveraine entre tous. Cela ne vaut ni pour le G7 ou le G20 -aussi importants soient-ils pour la concertation mondiale- ni pour les pays du groupe BRICS ou d’autres groupes, a‑t‑il commenté. Certains argumentent face à cela que l’ONU est trop souvent impuissante, paralysée par les antagonismes de ses membres. À ceux-là, le Chancelier a répondu que le blocage de quelques-uns -aussi influents soient-ils- ne doit pas masquer que la très grande majorité des États sont d’accord sur beaucoup de choses. « Nous voulons tous, presque tous, que la violence reste un instrument politique proscrit », a‑t‑il affirmé.
S’agissant des changements climatiques d’origine humaine, les pays industrialisés classiques ont une responsabilité particulière dans la lutte contre la crise climatique, a reconnu le dirigeant. Parallèlement, de nombreux autres pays comptent aujourd’hui parmi les plus gros émetteurs. Au lieu d’attendre que les autres agissent, M. Scholz a appelé à en faire plus pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. L’Allemagne fait sa part en matière de financement international pour le climat. De 2 milliards d’euros en 2014 à 4 milliards d’euros en 2020, le pays a encore augmenté sa contribution l’an dernier, qui a atteint 6 milliards d’euros, « tenant sa parole ». Les pays industrialisés dans leur ensemble font de même, puisqu’ils atteindront sans doute cette année pour la première fois leur objectif de 100 milliards d’euros pour le financement international du climat: un signal important, qui n’a que trop tardé.
Un autre défi, selon le Chancelier, est de savoir comment mettre l’innovation et le progrès technologique au service de l’humanité tout entière. L’intelligence artificielle, par exemple, recèle de grandes opportunités; dans le même temps, elle peut cimenter la division du monde si seuls certains en profitent, si les algorithmes ne prennent en compte qu’une partie de la réalité, si l’accès est limité aux pays les plus riches. C’est pourquoi l’Allemagne encourage vivement les échanges sur le pacte numérique mondial, un cadre où l’utilisation éventuelle de l’intelligence artificielle générative comme arme devrait être débattu.
Concernant la composition du Conseil de sécurité, M. Scholz s’est réjoui que de plus en plus de partenaires -dont trois des membres permanents- aient déclaré vouloir progresser sur la question de la réforme. « Il est clair que l’Afrique doit avoir plus de poids, tout comme l’Asie et l’Amérique latine », a‑t‑il estimé. Dans cette optique, il est possible de négocier un texte avec différentes options. Aucun pays ne devrait bloquer de telles négociations ouvertes. L’Allemagne ne le fait pas non plus. En fin de compte, c’est à l’Assemblée générale de décider d’une réforme du Conseil de sécurité: d’ici-là, l’Allemagne souhaite prendre ses responsabilités en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité de l’ONU. Le Chancelier a enfin rendu hommage aux Ukrainiens luttant pour leur vie, leur liberté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de leur pays. Il a dénoncé la guerre d’agression de la Fédération de Russie, qui non seulement plonge l’Ukraine dans une grande souffrance, mais entrave aussi les citoyens du monde entier, du fait de l’inflation, de l’endettement croissant, de la pénurie d’engrais, de la faim et de la pauvreté croissantes entraînées par cette guerre.
M. KISHIDA FUMIO, Premier Ministre du Japon, a insisté sur le rôle de la coopération pour dépasser les divisions de la communauté internationale et répondre aux problèmes interdépendants que sont les maladies infectieuses, les changements climatiques ou les coups portés à l’état de droit. « Nous avons besoin d’un langage commun qui résonne en chacun de nous », a-t-il insisté. Expliquant être originaire d’Hiroshima, il a déclaré faire du désarmement nucléaire « la mission de ma vie », et a exprimé ses craintes face à la menace d’un renversement de la tendance à la diminution du nombre d’armes atomiques dans le monde. Pour généraliser la tendance au désarmement nucléaire, le Premier Ministre a appelé à dépasser les efforts purement gouvernementaux et à surmonter le débat sur le choix entre dissuasion ou désarmement. Pour ce faire, a‑t‑il déclaré, le Japon contribuera à la création d’une chaire pour un monde sans armes nucléaires dans des instituts de recherche et des groupes de réflexion internationaux. Il s’est également engagé à poursuivre la mise sur pied d’un réseau mondial de jeunes pour l’abolition des armes nucléaires, lancé l’année dernière en collaboration avec l’ONU.
Poursuivant,M. Kishida a insisté sur la nécessité de trouver un équilibre entre technologies numériques et dignité humaine, soulignant les risques de violation de la vie privée et des droits humains avant de plaider en faveur d’une régulation internationale. Le Premier Ministre japonais a aussi rappelé la nécessité de réduire les risques dans les pays vulnérables aux changements climatiques, notamment les États insulaires, et de se préparer à la prochaine pandémie en tirant les leçons de la lutte contre la COVID-19. Le Japon, a‑t‑il assuré, continuera à travailler avec les pays en développement pour permettre un accès équitable aux moyens médicaux en cas d’urgence sanitaire.
M. Kishida a également exprimé son intention de normaliser les relations du Japon avec la « Corée du Nord », conformément à la Déclaration de Pyongyang signée par le Japon et la République populaire démocratique de Corée. Il a espéré pouvoir ainsi résoudre des questions en suspens, telles que les enlèvements, les questions nucléaires et balistiques, ainsi que le « règlement de notre passé malheureux ». Il a aussi fait part de son souhait de rencontrer en personne le Président Kim Jong-Un, sans conditions préalables, et d’organiser un sommet aussi rapidement que possible. Plaidant pour des Nations Unies plus fortes, le Premier Ministre japonais a exprimé son soutien à une représentation accrue de l’Afrique au sein du Conseil de sécurité, de même qu’aux initiatives visant à limiter le recours au veto, qui « qui exacerbe les divisions » à l’ONU.