Commission du développement social: les délégations présentent des mesures pour atténuer la faim et la pauvreté dans le contexte de la COVID-19
La Commission du développement social a clos la première semaine de sa soixantième session cet après-midi en entendant les délégations faire le point sur les mesures prises à l’échelon national pour atténuer la faim et la pauvreté exacerbées par la pandémie de COVID-19 et convenir que l’éradication de la pauvreté ne pourra être atteinte sans s’attaquer aux menaces qui pèsent sur la sécurité alimentaire.
La Pologne a ainsi expliqué s’être dotée d’un « bouclier de protection » qui a permis d’accorder des soutiens d’une valeur de 78 milliards de dollars et d’éviter une forte augmentation du chômage.
Avant l’Union européenne (UE) qui s’est engagée à tout faire pour que la reprise post-COVID-19 soit équitable pour les agriculteurs, le Luxembourg, notant que nombre d’entreprises rurales sont informelles, a souligné que les services financiers ont un rôle important à jouer, l’accès à des crédits responsables permettant à ces entreprises de redémarrer leur activité.
À son tour, la Bolivie a plaidé pour le renforcement des petits agriculteurs autochtones, afin d’appuyer la production de nourriture en harmonie avec la Terre nourricière, suggérant par ailleurs de relancer les « politiques ancestrales », les estimant plus efficaces pour réduire la pauvreté et atteindre l’objectif de « faim zéro ». De son côté, Israël a vanté les mérites de ses entreprises agrotechnologiques qui fournissent actuellement à un demi-million d’agricultrices rurales en Afrique des informations sur l’irrigation alimentées par l’intelligence artificielle.
Le thème de cette session est « Assurer un relèvement inclusif et résilient après la COVID-19 pour garantir à chaque personne des moyens de subsistance, le bien-être et la dignité: éliminer la pauvreté et la faim sous toutes leurs formes et dans toutes leurs dimensions aux fins de la réalisation du Programme 2030 ».
La Commission du développement social poursuivra ses travaux lundi, 14 février, à partir de 10 heures.
SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE - E/CN.5/2022/2
Thème prioritaire: Assurer un relèvement inclusif et résilient après la COVID-19 pour garantir à chaque personne des moyens de subsistance, le bien-être et la dignité: éliminer la pauvreté et la faim sous toutes leurs formes et dans toutes leurs dimensions aux fins de la réalisation du Programme 2030 - E/CN.5/2022/3
Examen des plans et programmes d’action pertinents des organismes des Nations Unies concernant la situation de certains groupes sociaux
Discussion générale
Face aux difficultés engendrées par la pandémie de COVID-19, M. PABLO ANSELMO TETTAMANTI, Secrétaire aux affaires étrangères de l’Argentine, a appelé à repenser le système financier international, les politiques publiques et créer un monde plus égalitaire. Le système multilatéral doit avoir une « vision genre », a plaidé M. Tettamanti qui a indiqué que son gouvernement a adopté pour la première fois un budget sensible au genre. Le Gouvernement a aussi mis en œuvre une politique de l’emploi pour les jeunes, un programme pour soutenir les revenus des ménages nécessiteux et des bons alimentaires. M. Tettamanti a aussi insisté sur l’importance de l’inclusion du handicap, de connecter à Internet les écoles dans les zones isolées et rurale, et de mettre en œuvre du Plan d’action international de Madrid sur le vieillissement. Il a par ailleurs souligné que les migrants ont droit à l’aide au logement, à la nourriture et aux vaccins.
M. FRANCISCO ANDRÉ, Secrétaire d’État aux affaires étrangères et à la coopération du Portugal, a indiqué la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté 2021-2030 de son pays vise à sortir 660 000 personnes de la pauvreté et réduire de moitié le taux de pauvreté chez les enfants. « Nous nous engageons fermement à garantir à chaque enfant un accès gratuit aux soins de la petite enfance, à l’éducation, aux activités scolaires, et à au moins un repas sain chaque jour d’école, a-t-il précisé. En outre, il a expliqué que le Sommet social de Porto, « point culminant de la présidence portugaise du Conseil de l’Union européenne », a permis la signature du premier accord européen entre gouvernements, employeurs et travailleurs sur la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux. Il a expliqué que conformément au compromis de Porto, l’Europe devrait atteindre un taux d’emploi d’au moins 78% d’ici à 2030 et permettre à 60% des adultes européens de suivre des formations annuelles.
Le Mexique a déploré la persistance des inégalités qui entravent la réalisation du Programme 2030, et exhorté la communauté internationale à multiplier les approches novatrices en vue de mettre en œuvre ledit Programme. La délégation a détaillé les programmes sociaux mis en place au Mexique au bénéfice des personnes de plus de 65 ans et des personnes en situation de handicap. Elle a insisté sur l’importance des transferts de liquidités pour aider les personnes concernées à sortir de la pauvreté. Enfin, elle a dit partager la vision de l’ONU en ce qui concerne l’eau et l’agriculture et la promotion de modes de consommation durable.
M. FREDDY MAMANI, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Bolivie, a appelé à renforcer le rôle des petits agriculteurs autochtones afin d’appuyer la production de nourriture en harmonie avec la Terre nourricière. Se félicitant du retour de la démocratie dans son pays en 2020, il a indiqué que le nouveau Gouvernement veille à la distribution de vaccins contre la COVID-19 et fournit une aide aux populations. S’agissant du relèvement post-COVID-19, M. Mamani a suggéré de relancer les « politiques ancestrales », les estimant plus efficaces pour réduire la pauvreté et atteindre l’objectif de « faim zéro ». Concernant l’éducation, le responsable a annoncé la mise en place de l’Institut sur les langues autochtones dont l’objectif est d’élaborer des politiques culturelles et linguistiques pour les peuples autochtones.
Pour surmonter la crise actuelle, le Japon a souligné l’importance de la couverture sanitaire universelle et de l’accès équitable aux vaccins contre la COVID-19. Il a rappelé à cet égard qu’il a coorganisé en juin dernier le Sommet COVAX, qui a permis la levée de 9,6 milliards de dollars en faveur du Mécanisme. En plus de sa contribution financière, le Japon a fourni plus de 40 millions de doses et des équipements de maintien de la chaîne de froid. Notant que la crise de la sécurité humaine liée à la COVID-19 a également rendu la lutte contre la pauvreté et la faim plus urgente, il a indiqué que l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) s’emploie à garantir un financement du développement qui soit propice à une croissance durable. Enfin, convaincu que l’éradication de la pauvreté ne pourra être atteinte sans s’attaquer aux menaces qui pèsent sur la sécurité alimentaire, le Japon a accueilli à Tokyo, en décembre dernier, le Sommet sur la nutrition pour la croissance, qui s’est traduit par des engagements financiers de 27 milliards de dollars.
La Fédération de Russie a déclaré que son gouvernement soutient avec constance la préservation de moyens de subsistance stables et l’amélioration du bien-être de ses citoyens et de leur dignité. Pour atténuer les conséquences économiques négatives de la pandémie, a poursuivi la délégation, nous avons déployé un éventail de mesures, notamment de soutien financier et de régulation des marchés alimentaires, et approuvé une nouvelle doctrine visant à renforcer l’indépendance alimentaire de la Russie et protéger aussi bien les consommateurs que les producteurs nationaux. Des mesures ont également été prises pour développer les infrastructures et améliorer le niveau d’activité dans les zones rurales du pays.
Israël a indiqué que son agence de coopération internationale pour le développement, Mashav, forme des spécialistes du monde entier aux techniques de l’agriculture durable afin qu’ils transmettent ces méthodes aux agriculteurs de leur pays d’origine. La délégation israélienne a ajouté que les efforts de la « Start-up Nation » en la matière reposent aussi sur la créativité et le savoir-faire de ses entreprises agrotechnologiques, telles que SupPlant, qui fournissent actuellement à un demi-million d’agricultrices rurales en Afrique des informations sur l’irrigation alimentée par l’intelligence artificielle.
Le Luxembourg a déclaré que l’éradication de la pauvreté extrême et la promotion de la durabilité économique, sociale et environnementale sont au cœur de sa politique nationale de coopération au développement. Alors que les populations rurales ne bénéficient souvent pas de filets de sécurité sociale et que nombre d’entreprises rurales sont informelles, les services financiers ont un rôle important à jouer, a-t-il souligné, relevant que l’accès à des crédits responsables permet à ces entreprises de redémarrer leur activité et que l’assurance et l’épargne augmentent la résilience des citoyens ruraux. La délégation a indiqué à cet égard que le Luxembourg soutient le développement de la microfinance et de la finance inclusive comme des outils capables d’éradiquer la pauvreté. Elle a ensuite cédé la parole à une déléguée de la jeunesse, qui a signalé que, même au Luxembourg, 23,6% des enfants et des adolescents sont à risque de tomber dans la pauvreté, avant d’appeler à des solutions structurelles plutôt que des réponses à court terme.
Par la voix de la France, l’Union européenne (UE) a déclaré que contenir la COVID-19 requiert la collaboration des gouvernements, du secteur privé et des citoyens, jugeant également crucial de renforcer le multilatéralisme pour s’attaquer aux causes des inégalités et mettre en place des systèmes résilients. Elle a indiqué que l’UE s’est engagée à sortir de l’exclusion 15 millions d’individus, dont cinq millions d’enfants. La gratuité des services pour l’enfance et la fourniture de repas scolaires guide l’action des États membres de l’Union, qui entend réduire les effets de la crise pour ses citoyens les plus vulnérables. L’UE s’engage par ailleurs à tout faire pour que la reprise post-COVID-19 soit équitable pour les agriculteurs et accorde aussi une attention particulière aux jeunes, en favorisant les possibilités d’emploi, d’apprentissage et d’éducation. Elle s’emploie également à promouvoir l’égalité des chances pour tous, notamment par le biais du travail égal à salaire égal entre les sexes, et à respecter les droits des séniors et des personnes handicapées dans toutes ses politiques, estimant que leur participation effective est essentielle pour une reprise inclusive.
La Slovénie a détaillé la réponse coordonnée et efficace qu’elle a apportée à la pandémie, avec notamment une aide aux personnes âgées ou en situation de handicap. En 2021, une loi a été adoptée afin de permettre aux personnes âgées dépendantes de pouvoir rester chez elles avec l’aide nécessaire. La déléguée de la jeunesse a ensuite pris la parole pour rappeler l’augmentation du taux de pauvreté chez les jeunes en raison de la pandémie. Le logement doit être au cœur des stratégies d’aide, a-t-elle estimé, en indiquant que le marché du logement est inaccessible pour les jeunes. Enfin, elle a appelé à lutter énergiquement contre les disparités sociales.
L’Afrique du Sud a jugé nécessaire de renforcer les systèmes alimentaires et de créer des systèmes de gestion des risques intégrés dans le cadre des efforts de redressement. Elle a toutefois relevé que les politiques nationales ne seront pas suffisantes si elles ne sont pas complétées par des dispositifs de protection sociale exhaustive. C’est pourquoi, a-t-elle indiqué, le Gouvernement sud-africain a lancé un plan de développement socioéconomique qui définit des objectifs pour toutes les strates de la société. Dans ce cadre, il recourt à des instruments de protection sociale tels que l’octroi de bourses, l’éducation gratuite, la restauration scolaire, l’accès à l’eau propre et à l’électricité et la fourniture de logements. Le but est d’aider les populations les plus fragiles à s’extraire de la pauvreté tout en réduisant la charge des services sociaux, qui représentent 60% de la dépense publique. Au total, a-t-elle précisé, le programme national de protection social vient en aide à plus de 18 millions de citoyens, dont 11,3 millions d’enfants.
Fidji a déclaré que, si nous continuons de faire preuve de complaisance face à notre « nouvelle normalité », nous mettrons en péril les vies de deux milliards de personnes d’ici à 2050. Aussi, a-t-il plaidé pour une réforme du financement du développement, mais aussi pour un renforcement des capacités des femmes et des filles qui sont des agents de changement au sein de leurs foyers et leurs communautés.
La Pologne a expliqué s’être dotée d’un « bouclier de protection » pour faire face à la crise sanitaire, lequel favorise notamment le versement de subventions salariales et l’appui aux micro-entreprises et petites entreprises. Il autorise aussi un large recours au travail en ligne et accorde des allocations aux parents contraints de fournir des soins suite à la fermeture des établissements de soins et des écoles. La valeur des soutiens accordés à ce jour s’élève à 78 milliards de dollars, soit près de la moitié du budget annuel de la Pologne, a précisé la délégation. Ce « bouclier social » a en outre permis d’éviter une forte augmentation du chômage, a-t-elle ajouté, précisant qu’au troisième trimestre 2021, la Pologne avait un taux de chômage de 3,2%, l’un des plus faibles parmi les pays de l’Union européenne et de l’OCDE.
Le Chili a déclaré que mettre fin à la pauvreté et à la faim est d’abord une question de volonté politique. Il a également souligné que lutter contre la pauvreté sous toutes ses formes implique de réduire les inégalités et d’inclure dans les plans de relance les groupes vulnérables, tels que les LGBTI, les femmes et les personnes âgées. Être pauvre ne signifie pas seulement avoir un faible revenu, a fait valoir la délégation. Cela signifie aussi ne pas pouvoir vivre avec des normes acceptables. Elle a ajouté que, dans la perspective d’une reprise inclusive et résiliente, le Chili considère l’agriculture comme une infrastructure essentielle et s’engage à promouvoir des dispositifs innovants et durables de production alimentaire impliquant les peuples autochtones, les jeunes et les femmes. Pour parvenir à une « meilleure réalité » d’ici à 2025, a-t-elle conclu, il importe de renforcer les milieux agroalimentaires et de mettre les ressources à disposition dans le cadre d’un système intégré.
Le Bangladesh a déclaré que, dans le souci de lutter contre l’insécurité alimentaire dans son pays, des actions avaient été lancées pour distribuer du riz et d’autres aliments de base aux populations les plus pauvres et accorder des prêts sans intérêt aux agriculteurs désireux de financer leurs projets.