Biodiversité en haute mer: à trois jours de la fin de la session, la Présidente de la Conférence BBNJ réclame « des compromis pour parvenir à un consensus »
Alors que la Conférence intergouvernementale « BBNJ » (« Biodiversity beyond national jurisdiction ») destinée à rédiger un accord juridiquement contraignant achève les travaux de sa cinquième session dans trois jours, vendredi 26 août, les participants ont tenu une nouvelle séance plénière en fin de journée afin de faire le point sur les négociations visant l’élaboration d’un texte consacré à la préservation de la biodiversité marine des zones ne relevant pas des juridictions nationales.
« C’est la dernière ligne droite », a rappelé la Présidente de la Conférence, Mme Rena Lee (Singapour), en appelant les délégations à faire des compromis pour parvenir à un consensus. Elle leur a demandé de faire preuve d’une extrême flexibilité au cours de cette seconde semaine pour parvenir à des solutions innovantes. Les participants à la Conférence basent leurs travaux sur un texte publié le week-end dernier, un « texte rafraîchi » faisant apparaître les changements apportés au projet d’accord révisé pendant la première semaine de travaux. Mme Lee a, comme pour les séances précédentes, invité les facilitateurs à faire le point sur les travaux de groupe.
Sur les « questions concernant les ressources génétiques marines, y compris celles liées au partage des avantages », qui constituent la partie II du texte, la représentante du Belize, facilitatrice des négociations sur le sujet, a relevé que les délégations ont salué le projet de texte actualisé de la Présidente, y compris la restructuration des articles 10, 11 et 13. Sur l’article 11 précisément, relatif au « partage juste et équitable des avantages », la facilitatrice a dit avoir fait une proposition de rédaction sur le paragraphe 3 pour une discussion plus approfondie sur les formes de ce partage. Au sujet de l’article 13, relatif à la transparence, elle a noté le souhait des délégations de clarifier davantage les modalités et les rôles des arrangements institutionnels pertinents. Elle a remercié les petits groupes de négociation qui ont terminé leurs devoirs, avant d’inviter le Groupe des États d’Afrique et la Norvège à mener des discussions en petits groupes sur les articles 10 et 11, ainsi que sur certains aspects de l’article 13 qui ont trait à l’article 11, en vue d’en rendre compte mercredi. L’article 10 a trait à l’accès aux connaissances traditionnelles des peuples autochtones et des communautés locales relatives aux ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.
La représentante du Canada, facilitatrice des discussions informelles sur les questions relatives aux « outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées, et autres mesures » (partie III), a indiqué que ce matin, son groupe a repris son examen de cette partie en mettant l’accent sur l’article 19 (Prise de décisions). Selon elle, les délégations considèrent cet article comme important pour la mise en œuvre de cette partie du futur traité, notamment parce qu’il définit le rôle de la Conférence des Parties et sa relation avec les instruments et cadres juridiques applicables et avec les organes mondiaux, régionaux, sous-régionaux et sectoriels pertinents. Elle a fait état d’une convergence générale sur ce que la Conférence des Parties doit faire ou ne pas faire, en particulier sur le pouvoir qu’elle a d’établir des outils de gestion par zone pour conserver et utiliser durablement les zones nécessitant une protection, sans dupliquer ou saper le travail des instruments, cadres et organes pertinents.
La facilitatrice a précisé que certaines délégations ont proposé de modifier le libellé du projet d’accord afin d’énoncer plus clairement le mandat de la Conférence des Parties, éventuellement par le biais d’un chapeau, puis d’énumérer ce mandat dans des alinéas. Par ailleurs, plusieurs délégations ont souhaité que la Conférence des Parties fasse des recommandations directement aux instruments, cadres et organes pertinents, ce qui diffère de l’obligation imposée aux parties en vertu de l’article 20 (4), article relatif à la mise en œuvre.
Prenant la parole à son tour, le facilitateur des travaux sur les « études d’impact sur l’environnement » (partie IV), le représentant des Pays-Bas, a salué le fait que le groupe discutant de l’article 23, dirigé par Singapour, ait conclu ses travaux après avoir bien avancé sur la révision dudit article. Cet article 23 s’intitule « Relation entre le présent Accord et les procédures relatives aux études d’impact sur l’environnement prévues par les instruments et cadres juridiques pertinents et les organes mondiaux, régionaux, sous-régionaux et sectoriels pertinents ». De même, le groupe sur l’article 30 (Procédure relative aux études d’impact sur l’environnement) dirigé par le Canada a terminé ses travaux et rationalisé le texte, tout comme le groupe sur l’article 41 ter (Évaluations stratégiques environnementales) dirigé par le Royaume-Uni qui a conclu et présenté ses résultats.
Ce groupe de travail a aussi examiné la question des définitions de l’article premier qui sont pertinentes pour la partie IV du futur accord, a indiqué le facilitateur en expliquant qu’il a proposé de poursuivre les négociations sans définition du terme « évaluations stratégiques environnementales ». Sur la définition de l’étude d’impact sur l’environnement, les délégations sont divisées et n’ont pu faire un choix parmi les trois options actuellement contenues dans le projet d’accord, a-t-il noté. Enfin, les délégués ont souhaité que la définition d’« activité sous la juridiction ou le contrôle d’un État » soit purement supprimée. Concernant l’article 41 ter, le petit groupe dirigé par le Royaume-Uni a bien avancé sur ce paragraphe, mais la question de savoir si les évaluations environnementales stratégiques devraient être volontaires ou obligatoires doit encore être résolue.
Enfin, la représentante de la Nouvelle-Zélande a parlé des discussions portant sur les « questions transversales ». Sur le règlement des différends et les avis consultatifs, elle a noté une large convergence pour conserver les articles 54 et 54 bis, avec une éventuelle clarification des champs d’application découlant de l’article 54. L’article 54 ter, sur les différends touchant une nature technique, a été fortement soutenu en tant que disposition utile pour les différends de cette nature. En ce qui concerne les procédures de règlement des différends prévues à l’article 55, la plupart des délégations ont soutenu l’option d’une procédure contraignante, même si quelques délégations n’étaient pas favorables à une procédure contraignante obligatoire. L’article 55 bis sur les arrangements provisoires a suscité un soutien important, tandis que d’autres discussions sont nécessaires sur l’article 55 ter relatif aux avis consultatifs.
Après les rapports des facilitateurs, la représentante d’Antigua-et-Barbuda, s’exprimant au nom de l’Alliance des petits États insulaires en développement (AOSIS), s’est inquiétée du fait qu’à trois jours de la fin de la session, certains articles, comme le « 5 » (Approches et principes généraux), n’aient pas encore fait l’objet de négociations. Se voulant rassurante, la Présidente de la Conférence a pronostiqué que cela serait fait ce mercredi 24 août. Pour sa part, la représentante de la Barbade, parlant pour le compte de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a invité la Présidente à modifier la méthodologie suivie pour les travaux en passant à des séances plus larges. Cela permettrait aux États de se parler directement et de parvenir à un accord d’ici à vendredi, a-t-elle argué. Quant à la représentante du Nicaragua, elle a prévenu que du fait de l’absence de l’interprétation dans certaines séances de groupes, sa délégation pourrait revenir sur certains libellés quand la version finale du projet d’accord sera disponible en espagnol.
La prochaine séance plénière de la Conférence aura lieu jeudi 25 août, à 13 heures.