Biodiversité en haute mer: la Conférence intergouvernementale « BBNJ » entame sa cinquième session en vue d’amener le projet d’accord révisé « à bon port »
« La lumière est en vue », mais des efforts supplémentaires devront être consentis ces deux prochaines semaines pour amener « à bon port » le projet d’accord révisé relatif à un instrument juridiquement contraignant sur la préservation de la biodiversité marine des zones ne relevant pas des juridictions nationales. En ouvrant, ce matin, la cinquième -et a priori dernière- session de la Conférence intergouvernementale, dite « BBNJ » pour « Biodiversity beyond national jurisdiction », la Présidente, Mme Rena Lee, n’a pas caché son souhait de voir ces négociations au long cours se conclure « dans les temps ».
« Pour y parvenir, nous devons être prêts à nous engager véritablement dans ce processus et à trouver des solutions qui recevraient le consensus général », a plaidé l’Ambassadrice pour les océans et le droit de la mer et Envoyée spéciale du Ministre des affaires étrangères de Singapour, invitant les délégations à faire preuve de la plus grande souplesse dans les négociations afin d’atteindre un accord à la fois « juste, équilibré et réalisable ».
Avant de détailler le programme de travail des deux semaines à venir, Mme Lee a indiqué que l’Assemblée générale a autorisé la tenue de cette cinquième session, en plus des quatre sessions initialement mandatées dans la résolution 72/249 du 24 décembre 2017, dans le but de finaliser l’accord dès que possible. Il s’agit, a-t-elle souligné, d’ajouter cet important cadre juridique aux efforts mondiaux destinés à garantir que nos océans soient sains, résilients et productifs pour les générations à venir.
La Présidente a rappelé que les négociations portent sur les quatre principaux volets retenus en 2011 pour le périmètre du futur instrument: les questions concernant les ressources génétiques marines, y compris celles liées au partage des avantages; des mesures telles que les outils de gestion par zone, dont les aires marines protégées; les études d’impact sur l’environnement; et le renforcement des capacités ainsi que le transfert de techniques marines. Les discussions, a-t-elle ajouté, ont également trait à des « questions transversales », telles que les institutions nécessaires ou encore le mode de règlement des différends, le tout étant réuni dans un nouveau projet de texte d’accord révisé, préparé par ses soins avec le concours de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer du Bureau des affaires juridiques.
Saluant les progrès accomplis lors de la quatrième session tenue en mars sur les quatre groupes thématiques et sur des questions transversales, Mme Lee s’est aussi déclarée encouragée par le « formidable élan » qui s’est fait jour cette année pour remédier à « l’état désastreux de nos océans ». En écho, le Secrétaire général de la Conférence, M. Miguel de Serpa Soares, a fait valoir les nombreux appels lancés à Lisbonne, à l’occasion de la récente Conférence des Nations Unies sur les océans de 2022, en faveur d’une conclusion rapide des travaux sur l’instrument « BBNJ ». « L’état désastreux des océans signifie qu’il est temps d’agir », a-t-il martelé, appelant de ses vœux la finalisation d’un accord solide qui assure la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine dans les grands espaces océaniques.
À ce stade des négociations, a poursuivi M. de Serpa Soares, qui est le Conseiller juridique des Nations Unies avec le titre de Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, l’accent doit être mis sur la recherche d’un compromis qui permette un accord mutuellement bénéfique. J’espère, a-t-il dit en conclusion, que, plus tard cette année, lors du quarantième anniversaire de l’adoption et de l’ouverture à la signature de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, nous pourrons également célébrer le fait qu’un pas de plus a été fait en vue de la conclusion d’un nouvel accord sur le droit de la mer.
L’adoption du programme de travail provisoire a ensuite donné lieu à une série d’interventions d’États Membres, la plupart visant à condamner la guerre d’agression menée en Ukraine par la Fédération de Russie. À l’instar de l’Union européenne, le Royaume-Uni, les États-Unis et le Japon ont dénoncé une violation du droit international et de la Charte des Nations Unies, rejoints par l’Islande, la Suisse et la Nouvelle-Zélande, laquelle s’est exprimée au nom du Groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande). La délégation russe s’est, pour sa part, indignée de cette « politique russophobe » de certains États et de la « politisation » du travail des Nations Unies, relevant que cette question n’a aucun lien avec la cinquième session de la Conférence « BBNJ ». Un avis partagé par la République islamique d’Iran, qui a fait observer que le dossier ukrainien est traité par des organes spécialisés de l’ONU. « Il n’est donc pas question d’en discuter au cours d’une session spéciale comme celle de la BBNJ », a martelé le représentant iranien.
La suite de cette séance s’est tenue de manière informelle afin d’examiner les questions visées aux paragraphes 1 et 2 de la résolution 72/249, à savoir la convocation de cette nouvelle conférence intergouvernementale aux fins de parvenir à l’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant « dans les plus brefs délais » et l’organisation de négociations sur l’ensemble des questions retenues par la Conférence en 2011. Également informelles, les discussions de l’après-midi devaient porter sur les ressources génétiques marines, y compris celles liées au partage des avantages, et sur les questions transversales.
La prochaine séance plénière de la Conférence aura lieu mercredi 17 août, de 10 heures à 10 h 30.