Soixante-seizième session,
Conférence sur les océans, Dialogue de haut niveau #4 – matin
MER/2149

Conférence sur les océans: la meilleure chose à faire pour sauver les océans est de réduire le réchauffement climatique

LISBONNE, 29 juin -- La quatrième table ronde de la Conférence des Nations Unies sur les océans a été l’occasion, ce matin, pour experts et délégations de souligner que la sauvegarde des océans passe par la prise en compte des changements climatiques, et que la réduction du réchauffement de la Terre commence par des actions dans le milieu marin. 

Les participants étaient réunis autour du thème « Minimiser et combattre l’acidification de l’océan, la désoxygénation et le réchauffement de l’océan ».  L’Envoyé spécial du Président des États-Unis pour le climat, M. JOHN KERRY, a ainsi argué que lutter contre les changements climatiques demande à tenir compte des océans, vu que les changements climatiques sont responsables de l’acidification des océans.  Le Coprésident de la table ronde a appelé à rendre le transport maritime encore plus vert, afin de réduire son niveau d’émission de gaz à effet de serre, se félicitant notamment que l’entreprise Maersk, l’un des plus grands constructeurs de navires au monde, ait pris l’engagement de faire dorénavant des navires « verts ».  Pour leur part, les États-Unis, ont lancé un plan Prepare qui prévoit de consacrer 50 milliards de dollars par an, au cours des cinq prochaines années, pour financer les plans d’adaptation dans les pays en développement. 

L’autre Coprésident, Ministre sans portefeuille au Ministère de la croissance économique et de la création d’emplois de la Jamaïque, a souligné que les petits États insulaires en développement (PEID) sont intimement liés aux océans.  Le moindre changement de la qualité des océans a donc un impact sur la vie des populations de ce groupe de pays, a dit M. MATTHEW SAMUDA, rappelant par ailleurs que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, adoptée il y a 40 ans en Jamaïque, contient de nombreuses mesures idoines de protection des océans. 

Pour placer les participants dans le bain, le modérateur du débat, M. STEPHEN WIDDICOMBE, a relevé que près de trois milliards de gens à travers le monde dépendent des océans pour leur subsistance.  Celui qui est Directeur de la science au laboratoire marin de Plymouth et Coprésident du Réseau mondial d’observation de l’acidification des océans, a souligné que les observations et les modèles montrent qu’environ 25% du dioxyde de carbone est libéré dans l’atmosphère chaque année et que plus de 90% de la chaleur supplémentaire piégée sur la planète par les gaz à effet de serre, en raison des activités anthropiques, est absorbée par l’océan.  Cela contribue considérablement à atténuer le réchauffement climatique.  Mais ce service essentiel n’est pas sans conséquence et a donné jour à trois menaces majeures pour la santé des océans: l’acidification, le réchauffement et la désoxygénation. 

Pour comprendre ces phénomènes, il faut pouvoir les mesurer, a noté le Directeur des services à l’Organisation météorologique mondiale (OMM).  M. JOHAN STANDER a donc appelé à plus de données sur les océans.  Et celles déjà disponibles à l’OMM laissent voir que ces 20 dernières années, on a noté une augmentation drastique de la température des océans.  En 2021, la température moyenne des océans a atteint un niveau jamais connu avant, s’est-il inquiété.  Alors que le potentiel d’hydrogène (PH) des océans ne cesse de baisser, cela va réduire considérablement leur capacité d’absorption des gaz à effet de serre, a-t-il averti.  L’OMM entend lancer une collaboration internationale avec d’autres organismes internationaux afin de fédérer les recherches océanographiques.  L’action océanique, c’est l’action en faveur du climat, et l’action climatique, c’est l’action en faveur des océans, a-t-il clamé.  Le Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a également mis l’accent sur la recherche, rappelant que depuis 60 ans, les laboratoires de l’AIEA à Monaco sont au centre des recherches océanographiques, notamment sur la question des plastiques qui polluent les mers.  M. RAFAEL GROSSI a aussi rappelé que la technologie du nucléaire pour produire de l’énergie électrique libère très peu de gaz à effet de serre. 

Il est crucial que la communauté internationale se focalise en premier lieu sur les zones marines les plus affectées par l’acidification, a plaidé Mme JESSIE TURNER, Directrice de l’Alliance internationale pour combattre l’acidification des océans (OA Alliance), une initiative qui regroupe gouvernements et organisations non gouvernementales.  Elle a plaidé pour plus de financements, se désolant que moins de 2% des fonds dédiés à l’adaptation aux changements climatiques concerne les zones côtières.  Ocean Foundation, une ONG des États-Unis, a donc décidé de canaliser les financements en faveur des océans.  Elle a déjà distribué 3 millions de dollars du Gouvernement américain à 16 pays ayant des programmes de recherche sur la question de l’acidification des océans. 

En plus des zones côtières, il serait de bon ton de faire revivre les récifs coraliens, a souligné à son tour Mme INTI KEITH, biologiste marine et spécialiste des espèces envahissantes à la Fondation Charles Darwin des Galapagos en Équateur.  Elle a annoncé qu’avec le Gouvernement de l’Équateur, la Fondation Charles Darwin entend restaurer les récifs coralliens de la région.  Si nous n’agissons pas maintenant, nous n’aurons plus de récifs coralliens dans les Galapagos, a-t-elle averti.  Il est évident qu’il y a une perte d’habitats marins viables du fait des changements climatiques, a confirmé le Coprésident du Groupe de travail II du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et Chef de la section de l’écophysiologie à l’Institut Alfred Wegener.  M. HANS OTTO-PÖRTNER a expliqué que les espèces marines se déplacent en fonction des conditions chimiques de leur habitat.  Et lorsque certaines espèces se rencontrent, il s’ensuit également une modification de leur biotope.  Selon le professeur, les capacités d’adaptation des écosystèmes sont limitées, d’où l’urgence de renforcer les mesures d’adaptation et d’atténuation aux changements climatiques. 

Notant que la meilleure chose à faire pour les océans est de réduire le réchauffement climatique, Mme LORELY PICOURT, Directrice exécutive de la Plateforme océan et climat, a appelé à poursuivre le dialogue annuel sur les liens entre changements climatiques et les océans qui a débuté à Bonn il y a deux semaines. 

Pour plusieurs intervenants, il apparaît urgent de surfer sur cette mobilisation autour des océans pour renforcer les partenariats.  C’est en substance la suggestion de la Türkiye qui entend renforcer sa coopération avec les organisations régionales et internationales de recherche océanographique.  L’Espagne a également un programme national de surveillance des données marines et a souhaité une plus grande implication des sciences sociales dans la recherche océanographique, afin de « favoriser un engagement des populations sur les questions océaniques ».  Pour la Commission océanographique du Programme des Nations Unies pour la science, l’éducation et la culture (UNESCO), il est question, à travers ces recherches, de fournir à la société des preuves scientifiques de l’acidification des océans. 

L’Angola a appelé à renforcer les partenariats, y compris avec les instituts de recherche en Afrique.  La République-Unie de Tanzanie n’a pas ramé à contre-courant quand elle a demandé le partage des connaissances scientifiques sur les océans, suivie par le Viet Nam.  Il en va de même des petits États insulaires en développement du Pacifique, qui ont, par le canal des Îles Marshall, appelé à des partenariats pour booster les actions à tous les niveaux et assurer la mise en œuvre de l’ODD 14 sur la vie marine. 

Pour l’Islande, il faut réduire la pollution marine et changer les modes de gestion des mers.  La Finlande a, pour sa part, insisté sur la mer Baltique qui est cruciale pour l’économie du pays.  La représentante du Secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques a invité les parties prenantes à renforcer les financements en faveur des océans et à soutenir les engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris.  À ce propos, le Timor-Leste a souligné que les pays développés, qui sont les plus grands pollueurs, doivent faire mieux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les exhortant à fournir les fonds promis aux pays en développement pour leurs plans d’adaptation.  La Suède a dit parier sur la transition vers une économie décarbonisée, ce qui aidera à régler les problèmes de réchauffement climatique et d’acidification des océans.  C’est pourquoi la Suède entend augmenter la construction d’éoliennes marines afin produire une électricité « propre ». 

La représentante de Save the Wave, une ONG ayant son siège en Californie, a déploré le fait que les régions côtières risquent de subir d’énormes destructions.  Pour les protéger, il faut s’occuper des vagues qui s’y jettent, ce qui contribuera également à préserver les activités des surfeurs.  C’est dans cette optique que l’ONG a ciblé 1 000 écosystèmes côtiers fragiles à restaurer en priorité dans une demi-dizaine de pays.  L’organisation OCEANERIUM, basée au Royaume-Uni, entend quant à elle vulgariser la culture d’algues marines à grande échelle comme source alternative d’énergie.  Pour Ocean Vision, un centre de recherche, on peut à la fois réduire les émissions de gaz à effet de serre et les retirer de l’atmosphère.  Pour l’organisation, des solutions technologiques existent à cette fin.  Plus généralement, la grande majorité des intervenants ont appelé à l’action, maintenant, avant qu’il ne soit trop tard pour les océans. 

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