Conseil de sécurité: malgré l’impasse politique, l’Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie veut croire à un « terrain d’entente » pour « sauver le pays »
Entendue ce matin par le Conseil de sécurité, l’Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie a confirmé que le processus politique reste au point mort, la Commission constitutionnelle syrienne n’ayant pas repris ses travaux depuis mai dernier. Mme Najat Rochdi a souligné la nécessité d’un cessez-le-feu national pour créer un environnement propice à des négociations constructives entre le Gouvernement syrien et l’opposition, en se disant convaincue qu’un « terrain d’entente » reste possible pour « sauver le pays ». Un vœu partagé par la plupart des membres du Conseil, tandis que la République arabe syrienne, appuyée par la Russie, la Chine, l’Inde et l’Iran, dénonçait des violations de sa souveraineté et de son intégrité territoriale.
Assurant qu’elle et l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Geir Pedersen, feront en sorte que la Commission constitutionnelle se réunisse à nouveau sans délai, Mme Rochdi n’a pas caché son inquiétude face aux dernières tensions en date, notamment les frappes israéliennes qui, la semaine dernière, ont entraîné la fermeture de l’aéroport d’Alep, dans le nord de la Syrie. Après avoir répété que la situation politique ne pourra progresser tant que perdurera la violence, elle a rappelé que la résolution 2254 (2015), considérée comme une feuille de route pour la transition, établit un lien entre le cessez-le-feu et le processus politique parallèle. Malgré tous les défis qu’implique une désescalade, notamment en raison de la présence en Syrie de groupes terroristes inscrits sur les listes de l’ONU, le cessez-le-feu doit demeurer l’objectif essentiel, a-t-elle plaidé.
Soucieuse du rétablissement de la confiance entre les parties, Mme Rochdi a réaffirmé l’importance d’apporter des réponses sur le sort des personnes détenues et disparues en Syrie. Préoccupée par les informations faisant état de détentions arbitraires et de libérations contre rançon, elle s’est félicitée que la voix de ces personnes soit prise en compte dans le rapport du Secrétaire général demandant le soutien du Conseil de sécurité à la création d’un mécanisme international chargé de cette question. La recommandation du Chef de l’ONU a été saluée par le Directeur général du Centre des médias de Syrie, M. Mazen Darwish, qui a invité le Conseil à faciliter sa mise en œuvre sans délai.
De son côté, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a lui aussi déploré les pertes civiles provoquées par les frappes aériennes et les pilonnages des dernières semaines. M. Martin Griffiths s’est par ailleurs inquiété de l’annonce d’une épidémie de choléra dans le nord du pays, alors que le système de santé syrien est dévasté par 11 années de conflit. Le Coordonnateur des secours d’urgence a informé le Conseil que le Plan de réponse humanitaire pour la Syrie, d’un montant de 4,4 milliards de dollars, n’est pour l’heure financé qu’à 25%. Il a donc appelé les donateurs à honorer leurs promesses, tout en précisant que le total de l’aide nécessaire s’élève à 10,5 milliards de dollars.
M. Griffiths a également fait état de perturbations dans les acheminements d’aide par pont aérien à la suite des frappes de la semaine dernière. Assurant que l’ONU fait tout son possible pour étendre les opérations transfrontières dans toute la Syrie, il a préconisé l’envoi de convois à travers les lignes de front pour atteindre les populations du nord-ouest. Il s’est d’autre part déclaré déterminé à poursuivre une mission transfrontière à Ras el-Aïn, dans le nord-est, dès que les conditions de sécurité le permettront.
Moins positive quant au déploiement de l’aide, la République arabe syrienne a affirmé que les efforts de son gouvernement, de l’ONU et des organisations humanitaires se heurtent à la « politisation » des donateurs occidentaux et aux mesures coercitives unilatérales « illégitimes » imposées à son pays par les États-Unis et l’Union européenne. Ces mêmes puissances fournissent un « parapluie de protection » à Israël, dont les « forces d’occupation » ciblent des infrastructures civiles, telles que l’aéroport d’Alep, a-t-elle accusé, reprochant en outre aux États-Unis d’utiliser l’Article 51 de la Charte sur la légitime défense pour justifier les frappes de la « soi-disant coalition internationale ».
Pour le délégué, les activités liées à la présence illégale des forces américaines sur le sol syrien relèvent du « crime d’agression ». En tant que « puissance occupante », les États-Unis doivent également fermer le camp de Roukban, à la frontière avec la Jordanie, où des ruptures d’alimentation en eau ont été causées par des tirs de missiles par des groupes terroristes soutenus par la Türkiye, a-t-il poursuivi, avant de fustiger la « campagne » orchestrée selon lui par des pays occidentaux dans le but de lancer un mécanisme international « biaisé » sur le sort des personnes disparues en Syrie.
En écho, la Fédération de Russie a estimé que la menace d’une autre opération militaire dans le nord du pays, le nombre croissant d’attaques israéliennes, ainsi que la présence militaire illégale des États-Unis et de leurs alliés à l’est de l’Euphrate « aggravent une situation déjà explosive ». L’ONU, a-t-elle renchéri, ignore les avertissements de Damas quant aux violations de la Charte des Nations Unies et du droit international humanitaire, s’agissant notamment de l’occupation étrangère de la Syrie et du pillage de ses ressources naturelles. Rejointe par l’Iran, la délégation russe a cependant souhaité une reprise des travaux de la Commission constitutionnelle pour un dialogue intrasyrien direct, sans référence à un lieu précis.
La Chine et l’Inde ont, pour leur part, exhorté les parties à travailler de concert avec l’ONU afin de régler les divergences relatives à l’organe restreint de la Commission constitutionnelle, tout en enjoignant la communauté internationale à lutter contre toutes les forces terroristes présentes en Syrie et à garantir la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT
Déclarations liminaires
Mme NAJAT ROCHDI, Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie, a tout d’abord mis l’accent sur les défis importants que doit relever la Commission constitutionnelle et assuré qu’elle et l’Envoyé spécial feront tout pour que ladite Commission se réunisse à nouveau au plus vite. Plaidant pour un rétablissement urgent de la confiance entre les différentes parties prenantes, elle a estimé que les principales questions au cœur du processus politique sont la sécurité des civils, la consolidation du cessez-le-feu, l’effondrement économique du pays, le sort des personnes détenues et disparues, et la participation des femmes au règlement du conflit. Il y a deux semaines, a-t-elle rappelé, l’Envoyé spécial a réclamé de la retenue aux parties au conflit. Or, des civils continuent d’être tués, blessés, mutilés et déplacés en Syrie, tandis que des moyens de subsistance sont détruits, a-t-elle dénoncé, faisant état de tirs de roquettes et d’artillerie lourde dans plusieurs régions, mais aussi d’attaques de drones dans le Nord, de frappes aériennes israéliennes ayant entraîné l’arrêt des activités à l’aéroport d’Alep et d’opérations terroristes à Hol. Répétant que la situation politique ne pourra progresser de manière décisive tant que perdurera la violence, Mme Rochdi a rappelé que la résolution 2254 (2015) établit un lien entre le cessez-le-feu et le processus politique parallèle. Elle s’est dite consciente de la kyrielle de défis liés à la désescalade et la présence de groupes terroristes inscrits sur les listes de l’ONU. Mais, à ses yeux, le cessez-le-feu doit demeurer l’objectif essentiel, dans le respect du droit international humanitaire et des droits humains.
Évoquant ensuite la situation humanitaire, l’Envoyée spéciale adjointe a noté que les accès à l’aide restent limités. Appelant à l’application de la résolution 2642 (2022) par tous les moyens possibles, à travers les lignes de front ou de manière transfrontalière, elle a souhaité que tout soit fait pour que les besoins diminuent, ce qui dépend en premier lieu d’une désescalade de la violence. Elle s’est également prononcée pour le retour digne, sûr et volontaire des personnes déplacées, qui lui aussi sera tributaire d’un environnement neutre et apaisé. Pour Mme Rochdi, stabiliser le conflit et avancer sur la voie d’un règlement politique durable est le seul moyen qu’a le pays de se relever. Mais, entre-temps, les populations doivent se nourrir et se chauffer, a-t-elle relevé, avant d’énumérer les facteurs qui ont contribué à maintenir l’économie syrienne dans une situation inextricable.
L’Envoyée spéciale adjointe a ensuite insisté sur la nécessité d’apporter des réponses quant au sort des personnes détenues et disparues. En tentant de trouver de telles réponses, leurs proches sont souvent victimes d’actes d’extorsion et de pots de vin, s’est-elle indignée, avant de se dire préoccupée par les informations faisant état de détentions arbitraires et de libérations contre rançon. Elle a assuré s’y consacrer, aux côtés d’organisations de la société civile et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, et s’est félicitée que la voix des personnes détenues et disparues soit prise en compte dans le rapport du Secrétaire général demandant le soutien du Conseil de sécurité à la création d’un nouvel organe international chargé de ces questions. Elle a, d’autre part, réaffirmé l’importance de la participation effective des femmes au processus politique, précisant avoir rencontré avec l’Envoyé spécial, les membres du Conseil consultatif des femmes il y a deux semaines à Genève. Ces discussions, a-t-elle indiqué, nous ont permis de mieux comprendre la situation des femmes et des filles dans ce conflit, mais aussi le danger lié à l’exode des jeunes, les exactions dont sont victimes les réfugiés et les personnes déplacées internes, et le peu d’accès des enfants à l’éducation et à la santé. Ce dialogue avec la société civile, qui a lieu dans le cadre des efforts de facilitation du Bureau de l’Envoyé spécial, nous aide à faire avancer le processus politique, s’est félicitée la haute fonctionnaire, selon laquelle, en dépit des divergences observées, un terrain d’entente reste possible entre Syriens. Ils peuvent se réunir pour sauver leur pays, a-t-elle conclu.
M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a relevé qu’au cours des dernières semaines, des frappes aériennes et des bombardements le long des lignes de front ont provoqué des pertes civiles, fait de nombreux blessés et interrompu les moyens de subsistance. Il a parlé de l’attentat du 12 septembre au cours duquel trois enfants auraient été tués et quatre personnes blessées lorsqu’un engin explosif improvisé, attaché à une moto, a explosé à proximité du camp de Tweineh près de la ville de Hassaké. Il a dit être particulièrement préoccupé par l’annonce d’une épidémie de choléra dans le nord de la Syrie. L’épidémie est un rappel brutal de l’importance de notre soutien continu au peuple syrien, d’autant plus que le système de santé est déjà dévasté par des années de conflit, a-t-il relevé. Dans le nord-est, en plus de l’épidémie de choléra, des pénuries d’eau critiques sont signalées dans la province de Hassaké.
Abordant la question des efforts de relèvement rapide, M. Griffiths a indiqué qu’avec le soutien des donateurs, et conformément à l’approche humanitaire globale de relèvement précoce, plus de 4 millions de Syriens ont bénéficié de projets pour contribuer au relèvement rapide et à la résilience depuis le début de cette année. Nous avons besoin de l’engagement et du soutien des donateurs, a-t-il souligné, en précisant que le plan de réponse humanitaire pour la Syrie fait partie des appels les plus importants au monde en 2022, d’un montant de 4,4 milliards de dollars. En outre, dans la région, le plan de résilience a besoin d’environ 6,1 milliards de dollars pour répondre aux besoins des réfugiés syriens, portant le total de l’aide nécessaire à 10,5 milliards. Un montant qui reflète la gravité des besoins humanitaires en Syrie et dans la région après plus de 11 années de crise, a-t-il justifié. Lors de la sixième conférence de Bruxelles en mai 2022, les donateurs ont promis 4,3 milliards de dollars pour la Syrie et la région, a-t-il rappelé. À ce jour, seulement environ un quart de la réponse humanitaire est financée, ce qui est très faible par rapport à d’autres crises majeures, s’est-il désolé.
Le Coordonnateur des secours d’urgence a indiqué que 14,6 millions de personnes en Syrie, dont plus de la moitié sont des enfants, ont besoin d’assistance humanitaire. De même, 12 millions de personnes font face à une insécurité alimentaire aiguë à un moment où les familles se préparent à faire face à un autre hiver rigoureux. Je remercie les donateurs ayant honoré leurs promesses, mais nous avons besoin que toutes soient tenues, a plaidé M. Griffiths. Le financement des programmes de relèvement rapide et de moyens de subsistance doit également être accru, parallèlement à une assistance vitale, a-t-il ajouté.
En ce qui concerne l’accès humanitaire, le Secrétaire général adjoint a relevé que les frappes aériennes depuis la dernière réunion du Conseil ont perturbé les opérations d’assistance humanitaire par voie aérienne à l’aéroport d’Alep. Toutes les activités humanitaires doivent reprendre dès que possible dans le camp de Hol, a-t-il dit, assurant que l’ONU continue de faire tout son possible pour étendre les opérations transfrontières dans toutes les parties de la Syrie. Dans le nord-ouest, l’Organisation a finalisé un plan révisé pour assurer un meilleur accès aux personnes ayant besoin d’assistance. Pour que cela se produise, nous devons effectuer plusieurs convois à travers les lignes de front sans entrave, avec un nombre accru de camions dans chaque convoi, a-t-il expliqué. Pour mettre en œuvre le plan complet, nous aurons besoin de l’entière coopération des parties concernées, a souligné le Coordonnateur des secours d’urgence. Nous restons déterminés à poursuivre une mission transfrontière à Ras al-Aïn dès que les conditions de sécurité le permettront, a-t-il ajouté.
Le haut fonctionnaire a terminé en évoquant l’histoire de Rasha, mère de quatre enfants et leader communautaire à Edleb. Rasha vit dans un camp de personnes déplacées avec 1 200 autres familles, dont beaucoup ont des besoins spéciaux, sont atteintes de handicaps et affligées par des blessures de guerre. Rasha a elle-même a eu la colonne vertébrale gravement endommagée en 2019, après avoir été pratiquement enterrée vivante sous les décombres lors d’un attentat à la bombe. Cette dame qui vit désormais en fauteuil roulant a reçu un soutien financier pour créer un jardin d’enfants et un centre de physiothérapie dans le camp. Rasha, qui a dit que le centre avait maintenant besoin d’un soutien supplémentaire, est restée optimiste et déclaré que « rien n’est impossible quand il y a de la volonté et de l’action ». C’est justement ce dont nous avons besoin de la part des parties au conflit, de ce Conseil et de tous les États Membres, a résumé en conclusion le Secrétaire général adjoint.
M. MAZEN DARWISH, Directeur général du Centre des médias de Syrie, a demandé aux responsables syriens et aux membres du Conseil de cesser de faire de la Syrie un champ de bataille pour régler leurs comptes par procuration et de forger des partenariats concrets avec le peuple syrien. Il a souligné l’importance de respecter la souveraineté et l’indépendance de son pays ainsi que son intégrité territoriale. Tant que la Syrie ne retrouvera pas la démocratie et sa souveraineté, elle ne pourra pas régler les problèmes, notamment celui posé par les mercenaires. Après avoir rappelé le nombre de victimes civiles et la catastrophe humanitaire dans le pays, M. Darwish a dénoncé le racisme dont sont victimes les réfugiés syriens dans certains pays d’accueil. Évoquant le droit au retour de ces mêmes réfugiés, l’intervenant a demandé que cela se fasse conformément au droit international en offrant de la protection aux déplacés qui souhaitent rentrer en Syrie.
L’intervenant a salué la création d’un mécanisme international indépendant chargé de faire la lumière sur le sort des disparus. Il a ensuite appelé tous les membres du Conseil à entériner les recommandations du Secrétaire général et à faciliter immédiatement leur mise en œuvre. Il n’y a plus lieu de discuter, a insisté l’intervenant, qui a rejeté tout délai supplémentaire dans l’activation de ce mécanisme. Selon lui, la majorité des Syriens rêvent du jour où un règlement pacifique se concrétisera sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité et du Communiqué de Genève. Pour qu’un règlement du conflit soit pérenne, celui-ci devrait aussi se fonder sur la justice transitionnelle, a-t-il ajouté, en rappelant l’initiative du Mexique et de la France et le code de conduite qui avait été proposé par la Suisse appelant à abroger le droit de veto dans le cas où seraient perpétrées des atrocités de masse. Le seul objectif en Syrie doit être la paix, a conclu M. Darwish.
Déclarations
Intervenant au nom des porte-plumes du dossier humanitaire sur la Syrie (Irlande et Norvège), Mme MONA JUUL (Norvège) s’est préoccupée de l’impact sexospécifique du conflit, notamment du risque de mariage précoce pour les filles et du recrutement de garçons par des groupes armés. Elle a appelé à une réponse humanitaire holistique et élargie et suffisamment financée, y compris pour protéger contre la violence sexuelle et sexiste. La représentante s’est également inquiétée du fait que 2,4 millions d’enfants sont déscolarisés en Syrie où une école sur trois n’est plus utilisée à des fins éducatives, exhortant notamment les parties à s’abstenir d’utiliser les écoles à des fins militaires.
Après avoir insisté sur l’importance d’identifier les personnes disparues, la déléguée a attiré l’attention sur la flambée de choléra en Syrie qui souligne, à ses yeux, l’importance d’assurer l’accès sûr, rapide et sans entraves des fournitures médicales. En tant que porte-plumes, nous n’avons eu de cesse d’appuyer toutes les modalités de livraison de l’aide humanitaire, à la fois transfrontalière et par-delà les lignes de front, a-t-elle indiqué. Elle a estimé que l’ONU et ses partenaires doivent être autorisés à utiliser ces deux modalités, tout en appelant à progresser davantage pour ce qui est des livraisons humanitaires par-delà les lignes de front. Mais il va également sans dire que le mécanisme transfrontalier est une ligne de vie essentielle pour des millions de personnes dans le nord-ouest du pays. À l’approche de l’hiver, le Conseil doit assumer ses responsabilités et veiller à son maintien, a-t-elle insisté.
Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a dit que la nouvelle flambée de choléra en Syrie représente une grave menace, une crise supplémentaire pour la population déjà accablée par 11 ans de conflit. Elle a rappelé qu’en raison de son soutien fervent à la population syrienne, sa délégation s’était prononcée en faveur d’une prorogation d’un an du mécanisme d’aide transfrontalière, plaidant pour que ce soit le cas en janvier. La représentante a rappelé que les États-Unis avaient promis 800 millions de dollars d’assistance humanitaire pour la Syrie lors de la Conférence de Bruxelles, annonçant une contribution supplémentaire d’un montant de 756 millions, pour notamment lutter contre l’insécurité alimentaire et financer les programmes de relèvement précoce dans les 14 provinces du pays. Mais nous ne pouvons pas être seuls à répondre à ces besoins et invitons les autres pays à faire davantage, a-t-elle plaidé.
En outre, la représentante a rappelé que seule une solution politique pourrait permettre au peuple syrien de connaître la paix. Le retard dans le processus de la Commission constitutionnelle a un coût humanitaire, a-t-elle noté, avant d’appeler le régime d’Assad à œuvrer pour que les 30 000 disparus et détenus soient retrouvés. Il est frustrant de tenir les mêmes réunions mois après mois et de constater que rien ne bouge, a-t-elle dit. Il est plus que temps que le régime d’Assad et la Fédération de Russie prennent leurs responsabilités et répondent aux appels du peuple syrien, a-t-elle conclu.
M. FERIT HOXHA (Albanie) a constaté que la situation ne s’est pas améliorée en Syrie, comme en atteste le « sombre festival d’horreurs » décrit par les intervenants. Sur le terrain, a-t-il relevé, les hostilités se poursuivent, avec des frappes et des pilonnages qui font des victimes parmi les civils. Le conflit demeure donc intense et fait courir de graves risques d’escalade, a averti le représentant, avant d’évoquer la grave situation humanitaire qui en découle. Plaidant pour que l’aide soit acheminée à tous, où que ce soit en Syrie, il a demandé la pleine application de la résolution 2642 (2022) afin que les livraisons aient lieu par tous les moyens possibles, y compris via le mécanisme transfrontalier qui demeure un instrument vital pour la population. À cet égard, le représentant a appelé à une prorogation de 12 mois dudit mécanisme. Sur le plan politique, il s’est dit déçu par le peu de résultat des travaux de la Commission constitutionnelle quand celle-ci parvient à se réunir. Se disant favorable à l’approche progressive défendue par l’ONU, il a toutefois estimé que l’Envoyé spécial ne peut agir seul. Dans ce contexte d’« agonie » de la Syrie, le délégué a salué l’implication de la société civile dans la recherche de solution. Il a par ailleurs rappelé qu’après 11 années de conflit et de souffrances, la Syrie est aujourd’hui le pays qui compte le plus grand nombre de détenus et de disparus. Appelant à la création d’un organisme indépendant sur le sort des disparus, il a qualifié cette question de prioritaire pour appuyer les familles à récréer la confiance. Il s’est enfin alarmé de la situation sécuritaire et humaine dans le camp de Hol, où des violences, notamment sexuelles, sont rapportées. À ses yeux, la reddition de comptes est essentielle pour assurer une paix pérenne, conformément à la résolution 2254 (2015).
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a rappelé que l’avenue la plus viable pour une paix et une stabilité durables est un processus politique dirigé par les Syriens eux-mêmes, avec le soutien de la communauté internationale, en particulier l’ONU. Le représentant a exhorté les parties et les acteurs concernés à insuffler un nouveau souffle au fragile processus politique, notamment par le biais des trois éléments suivants. Tout d’abord, un retour à la neuvième session de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle. Ensuite, un accord entre les parties sur les modalités de la reprise des pourparlers dès que possible, afin de contribuer à jeter les bases de la reprise du processus politique tant attendu. Enfin, un engagement en faveur de mesures de confiance, notamment le règlement de la situation des détenus, la facilitation de la libération des personnes vulnérables détenues, telles que les personnes âgées, les femmes et les enfants, et la clarification du statut des personnes disparues. Des progrès dans ces domaines contribueraient également de manière positive à l’approche graduelle de l’Envoyé spécial, conformément au droit international humanitaire, a précisé le représentant.
M. Agyeman a par ailleurs cité le renforcement du rôle des acteurs régionaux et de la communauté internationale dans le soutien au processus politique, conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité. Les A3 se sont ensuite dits alarmés de la poursuite des frappes aériennes aveugles, des bombardements mutuels et des attaques à la roquette ainsi que par l’utilisation d’engins explosifs sur les lignes de front. Il est impératif que les parties s’engagent à protéger les civils, les travailleurs humanitaires et les infrastructures civiles conformément au droit international humanitaire et aux résolutions pertinentes des Nations Unies, car il est de plus en plus clair, comme l’a déclaré à plusieurs reprises l’Envoyé spécial, que les options militaires ne mettront pas fin à la guerre, a ajouté le délégué. En outre, les A3 soulignent la nécessité d’actions collectives décisives pour combattre les groupes figurant sur la liste du Conseil de sécurité, tels que Daech et Hay’at Tahrir el-Cham (HTS).
Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a jugé décevant que la Fédération de Russie continue de bloquer le travail de la Commission constitutionnelle. Pour elle, Genève est le lieu convenu des pourparlers de la Commission, dont les travaux doivent être menés et dirigés par les Syriens. Elle a invité les parties à laisser de côté le débat relatif au lieu des pourparlers pour se focaliser sur les questions de fond. La représentante a salué la publication aujourd’hui du rapport de la Commission d’enquête qui met en lumière l’impact disproportionné du conflit sur les femmes et les filles. L’aide doit parvenir aux 14,6 millions de Syriens qui en ont le plus besoin, a-t-elle dit, avant de souligner que rien ne remplace la portée et l’ampleur de l’opération transfrontière mandatée par le Conseil de sécurité. Nous espérons que le Conseil s’unira pour sauver des vies et éviter toute interruption de l’opération transfrontalière dont dépendent des millions de civils, a conclu la déléguée.
Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a dit être préoccupée par la poursuite des affrontements en Syrie, condamnant les attaques lancées contre l’aéroport d’Alep au début du mois et les mouvements de troupes dans la frontière nord. Elle a appelé au respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de la Syrie. La représentante a souligné l’importance de redoubler d’efforts en faveur d’un cessez-le-feu national. Elle a regretté qu’à ce jour, il n’ait pas été possible de convoquer la neuvième session de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle. La déléguée a encouragé à travailler sur des mesures de confiance, telles que la question des personnes détenues et disparues et l’obligation de rendre des comptes. Prenant note du rapport du Secrétaire général, la représentante a insisté sur l’importance de clarifier le statut des personnes disparues, d’identifier les restes et d’offrir un appui complet aux victimes et aux familles des personnes disparues et détenues arbitrairement.
Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a estimé que la Commission constitutionnelle demeure un volet essentiel du processus de règlement politique en Syrie et doit reprendre ses travaux. Elle a ensuite réitéré son opposition à toute ingérence étrangère, avant d’exprimer sa préoccupation face à la multiplication des attaques terroristes dans le pays. Cette tendance reflète selon elle la menace qui pèse sur la Syrie sur le plan sécuritaire et rappelle l’importance cruciale de la lutte contre Daech. La représentante s’est par ailleurs inquiétée de la situation humanitaire, constatant qu’un nombre croissant de Syriens n’ont plus accès aux services essentiels. Elle s’est particulièrement alarmée de la situation dans le camp de Hol, qui exige l’appui continu de la communauté internationale. Avertissant que Daech y diffuse son idéologie terroriste, elle a également attiré l’attention du Conseil sur le fait que 75% des assassinats dans le camp ont visé des femmes, lesquelles sont aussi victimes de violences sexuelles. La déléguée a aussi évoqué le danger des mines et des engins non explosés, qui menacent un Syrien sur deux, saluant les efforts engagés pour les éliminer, notamment ceux du Service de la lutte antimines de l’ONU. Pour finir, elle a souhaité que tout soit mis en œuvre pour améliorer les conditions de vie des Syriens, à commencer par l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire.
M. FERGAL TOMAS MYTHEN (Irlande) s’est concentré sur le volet politique de la crise syrienne. Il a déclaré appuyer les efforts de l’Envoyé spécial visant à donner un nouvel élan au processus politique. Après avoir renouvelé son appel à la pleine mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, il a demandé à Damas de s’engager pleinement et de manière significative en faveur de la Commission constitutionnelle. Le représentant a par ailleurs salué les échanges en cours avec le Conseil consultatif des femmes et la société civile. À ses yeux, la nouvelle Constitution et le processus politique connexe doivent être inclusifs et doivent bénéficier de la pleine participation des femmes. Le délégué s’est d’autre part félicité de l’étude du Secrétaire général sur les personnes portées disparues en Syrie. Il a dit croire que le mécanisme proposé et le soutien aux familles des disparus pourra apporter des éléments de réponse sur le sort de leurs proches. Dans l’immédiat, il a appelé les autorités syriennes à plus de transparence sur la libération de personnes détenues arbitrairement et sur la mise en œuvre du décret d’amnistie annoncé en avril dernier.
M. GENG SHUANG (Chine) a dit qu’un processus politique dirigé et contrôlé par les Syriens eux-mêmes est le seul à même de régler la crise syrienne. Il a donc exhorté les parties à travailler de manière constructive avec l’ONU afin de régler les divergences relatives à l’organe restreint de la Commission constitutionnelle afin de lui permettre de se réunir le plus tôt possible. S’agissant des problèmes sécuritaires en Syrie, la communauté internationale devra adopter une position unique sur la base du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité pour lutter contre toutes les forces terroristes présentes sur le terrain, a déclaré le représentant, en souhaitant la mise en œuvre du principe de tolérance zéro contre tous les soutiens des forces terroristes. La souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie doivent être respectées, a insisté le représentant, pour qui la création, sans le consentement du Gouvernement syrien, de bases militaires dans le pays constitue une grave violation de sa souveraineté et de son intégrité territoriale. Le représentant a enfin demandé d’améliorer et d’accélérer l’acheminement de l’aide humanitaire en Syrie avec un calendrier fixe.
Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a jugé que l’impasse du processus politique est « intenable », l’organe restreint de la Commission constitutionnelle ne s’étant plus réuni depuis mai dernier. Bien que l’Envoyé spécial s’efforce de poursuivre le dialogue avec les parties, nous ne voyons aucun résultat positif, a-t-elle déploré, regrettant que les participants aux pourparlers ne fassent pas montre de compromis. La représentante a toutefois réitéré son appui à la résolution 2254 (2015), avant d’appeler le Conseil à soutenir les efforts de l’Envoyé spécial, en particulier son approche progressive. Elle s’est par ailleurs déclarée rassurée par la poursuite de la normalisation des relations entre la Syrie et ses voisins, tout en s’inquiétant des agissements d’acteurs externes qui compromettent sa souveraineté et son intégrité territoriale. Selon elle, l’urgence est de s’efforcer de parvenir à un cessez-le-feu national mais aussi d’obtenir le retrait des troupes étrangères. Il convient aussi de répondre à la menace des groupes terroristes qui se renforcent dans le pays, a-t-elle ajouté, considérant que la lutte collective contre ce fléau ne pourra être renforcée qu’en assurant la reddition des comptes. S’agissant de l’aide humanitaire, la déléguée a reconnu que les opérations d’acheminement transfrontières sont « importantes » sans pour autant être « éternelles ». Il importe par conséquent de lever les obstacles aux livraisons à travers les lignes de front, a-t-elle préconisé, plaidant pour que le processus d’aide ne soit pas « politisé ». Enfin, face aux graves pénuries de carburants et d’électricité que connaît le pays, elle a souhaité que la communauté internationale offre des débouchés économiques au peuple syrien.
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a appelé toutes les parties à respecter le droit international humanitaire, y compris l’interdiction de commettre des attaques sans discrimination et l’obligation de prendre toutes les précautions possibles pour éviter de nuire aux civils et aux infrastructures civiles. Il a jugé très préoccupante la situation dans le camp de Hol. Il a félicité le Gouvernement iraquien de ses efforts de rapatriement de ses ressortissants et appelé les autres gouvernements à faire pareil. Le délégué a dit espérer que la Commission constitutionnelle sera bientôt en mesure de se réunir à nouveau, peut-être avec de nouvelles idées et une volonté politique renouvelée.
Le Brésil appuie la mise en œuvre de la résolution 2642 (2022) dans tous ses aspects, a-t-il indiqué, ajoutant que l’aide humanitaire doit continuer à parvenir à tous ceux qui en ont besoin via toutes les modalités, transfrontalières et au travers les lignes de front. Il a jugé inquiétant que le financement global de la réponse humanitaire en Syrie ne représente actuellement qu’environ 25% du montant demandé. Les progrès en matière de relèvement rapide doivent se poursuivre, mais sans financement adéquat, nous aurons bientôt un nouvel afflux de mauvaises nouvelles sur le terrain, d’autant plus que les mois d’hiver sont déjà proches, a-t-il mis en garde. Nous rappelons également que les effets humanitaires des sanctions ne doivent pas être négligés, a déclaré le délégué.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit qu’il n’y a pas d’autres solutions que le règlement politique de la crise en Syrie, un processus mené et dirigé par les Syriens avec l’aide de l’ONU. Il a souligné l’importance de la reprise des travaux de la Commission constitutionnelle comme format pour un dialogue intra-syrien direct, sans référence à un lieu précis. Dans le cadre du processus d’Astana, la Fédération de Russie contribue à la réalisation de la normalisation à long terme de la situation en Syrie, a affirmé le représentant, en notant les tensions sur le terrain. La menace persistante d’une autre opération militaire dans le nord du pays, le nombre croissant d’attaques arbitraires lancées par l’armée de l’air israélienne, ainsi que la présence militaire étrangère illégale continue des États-Unis et de leurs alliés à l’est de l’Euphrate aggravent une situation déjà explosive, a-t-il accusé. L’ONU, a-t-il dénoncé, ignore les nombreux appels de Damas quant aux violations de la Charte des Nations Unies et du droit international humanitaire, en particulier l’occupation américaine des régions de la Syrie et le pillage américain des ressources naturelles syriennes. Selon le Ministère syrien du pétrole et des ressources naturelles, les pertes du secteur énergétique depuis 2011 à cause des actions des États-Unis et de l’administration kurde se sont élevées à plus de 107 milliards de dollars.
Le représentant a demandé aux pays occidentaux de renoncer à leur politique d’isolement international de la Syrie et de cesser d’entraver le processus de son retour dans la famille arabe. Cela contribuerait à accroître l’efficacité de la lutte contre le terrorisme et à accélérer le processus de retour des réfugiés syriens dans leur pays d’origine, a-t-il estimé. Il a regretté en outre que l’aide humanitaire soit selon lui utilisée pour consolider les divisions territoriales de la Syrie et saper la souveraineté de Damas. Selon lui, les États-Unis et leurs alliés étranglent les Syriens à l’aide de sanctions unilatérales illégales, tout en faisant preuve d’indulgence dans les zones non contrôlées par Damas. La volonté de maintenir à tout prix les réfugiés syriens dans les pays d’accueil est également révélatrice, ainsi que la présence des camps de Hol et de Roukban. Le représentant a réitéré que la responsabilité de ce qui se passe dans l’Euphrate, ainsi que dans la zone de Tanf, incombe entièrement aux États-Unis. Selon lui, la résolution 2642 (2022) du Conseil de sécurité doit être mise en œuvre de manière urgente pour dépolitiser et étendre l’aide humanitaire internationale à la Syrie, a rappelé le délégué.
Intervenant en sa capacité nationale, Mme MONA JUUL (Norvège) a déclaré que la question des détentions arbitraires et des personnes disparues revêt de la plus grande importance, notant que tout progrès à ce propos est essentiel pour le processus politique et la réconciliation. Elle a salué l’amnistie annoncée par les autorités syriennes en avril, regrettant toutefois le peu de progrès réalisé pour assurer sa mise en œuvre. De même, elle a déploré l’impasse dans laquelle se trouve la Commission constitutionnelle, exhortant les parties à y contribuer de manière constructive et de bonne foi. La représentante a par ailleurs souligné que l’escalade de la violence dans le nord de la Syrie appelle à l’établissement d’un cessez-le-feu national.
M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a souligné qu’il n’y aura pas de paix durable en Syrie sans processus politique, déplorant que celui-ci soit au point mort. Il a relevé que la Commission constitutionnelle ne se réunit plus, et que le « régime » n’a consenti à partager aucune information s’agissant de la mise en œuvre du dernier décret d’amnistie. Alors que le nombre de personnes disparues en Syrie est estimé à plus de 100 000, le régime refuse toujours de publier des listes de prisonniers ou de délivrer des certificats de décès, a également décrié le représentant qui a souligné qu’en l’absence de tout progrès du processus politique, les positions françaises, comme européennes, sur la levée des sanctions, la normalisation et la reconstruction demeurent inchangées.
Le délégué a ensuite indiqué que le renouvellement pour six mois seulement du mécanisme humanitaire transfrontalier a créé des difficultés opérationnelles sur le terrain, évoquant notamment une augmentation des coûts liée tant à l’inflation qu’à la durée réduite du renouvellement du mécanisme. Les progrès en matière d’accès « crossline » doivent bien sûr se poursuivre mais ne pourraient se substituer aux opérations transfrontalières qui représentent en moyenne 800 camions d’aide qui franchissent chaque mois la frontière turque. Il a jugé impératif que le mécanisme transfrontalier d’aide humanitaire soit renouvelé en janvier prochain, pour au moins un an.
M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a commencé par dénoncer la multiplication des « agressions » israéliennes contre son pays, alors que le Gouvernement syrien s’efforce de rétablir la sécurité et la stabilité. Il a accusé les « forces d’occupation israéliennes » de cibler systématiquement des installations civiles, comme cela a été le cas la semaine dernière avec des attaques aux missiles contre l’aéroport d’Alep, qui a dû être fermé. Le représentant a donc renouvelé son appel au Conseil de sécurité pour qu’il condamne ces attaques qui menacent la paix et la sécurité régionales et internationales. Il a ensuite déploré que les États-Unis et leurs alliés occidentaux fournissent un « parapluie de protection » à Israël au sein du Conseil. Selon lui, ces pays doivent cesser de pratiquer une politique du « deux poids, deux mesures » et réaliser que, faute d’une réaction de l’ONU, ces attaques risquent de créer des risques qu’il sera difficile de contenir à l’avenir. De surcroît, s’est-il indigné, des forces militaires américaines continuent d’être illégalement présentes en Syrie et, par leur soutien continu aux milices séparatistes et aux groupes terroristes, procèdent au pillage du pétrole et d’autres ressources naturelles du peuple syrien, en plus d’imposer au pays des mesures coercitives « inhumaines ». Le délégué a également condamné l’utilisation « sans fondement » de l’Article 51 de la Charte par les membres de la « soi-disant coalition internationale ». Il a rappelé à cet égard qu’il a adressé un courrier au Conseil, le 6 septembre, en réponse à la justification par les États-Unis du recours à la légitime défense dans le cadre de leur intervention. À cette occasion, a-t-il dit, j’ai souligné que les activités liées à la présence illégale des forces américaines constituent un « crime d’agression ».
Le représentant a d’autre part noté que les efforts de son gouvernement, de l’ONU et des organisations humanitaires destinés à améliorer les conditions de vie des Syriens se heurtent à de grandes difficultés, en partie dues à la « politisation » du travail humanitaire par les donateurs occidentaux et aux mesures coercitives unilatérales illégitimes imposées par les États-Unis et l’Union européenne. À ses yeux, seule la pleine mise en œuvre de la résolution 2642 (2022), y compris l’avancement des projets de relèvement rapide, permettra d’avancer dans la bonne direction. Mais les entraves à l’accès de l’aide et la réticence des pays donateurs à remplir leurs obligations de financement du plan de réponse humanitaire en Syrie « n’augurent rien de bon ». Il a dit attendre avec intérêt le dialogue interactif informel prévu à la fin du mois qui permettra de vérifier les progrès accomplis dans l’application de cette résolution, d’identifier les lacunes et d’évaluer les moyens de les surmonter.
Poursuivant, le délégué a évoqué les souffrances dues aux ruptures d’alimentation en eau dans le nord-est du pays. Ces coupures sont la conséquence de tirs de missile sur une station par des groupes terroristes soutenus par la Türkiye, laquelle a déjà réduit le débit d’eau vers l’Euphrate et le Tigre, a accusé le délégué, regrettant là encore l’absence de condamnation de ces faits.
Il s’est également alarmé de la souffrance humaine dans le camp de Roukban, estimant que la Puissance occupante, à savoir les États-Unis, en porte la responsabilité. Pour le représentant, ce camp doit être fermé, tout comme doit l’être aussi celui de Hol, situé dans le « nord-est séparatiste ». Selon lui, les États-Unis doivent procéder à ces fermetures après avoir facilité le retour des ressortissants de pays tiers détenus vers leurs pays d’origine. La Syrie, a-t-il assuré, facilitera la poursuite de cet objectif.
Enfin, il s’est élevé contre la « campagne » organisée par des pays occidentaux dans le but de lancer un mécanisme international sur le sort des personnes disparues en Syrie. Le véritable objet de cette initiative n’est pas de connaître le sort des personnes aux mains des groupes terroristes comme Hay’at Tahrir el-Cham, ni de révéler la brutalité barbare des actions de la coalition internationale, a-t-il relevé. Il s’agit de lancer un nouveau mécanisme « biaisé » pour accentuer les pressions sur la Syrie et son peuple. Dans ce contexte, a-t-il conclu, le rétablissement de la paix et de la stabilité en Syrie dépend de la volonté des pays occidentaux de mettre fin à leur embargo économique, de cesser de soutenir le terrorisme et de retirer les forces étrangères du territoire syrien.
Pour M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (République islamique d’Iran), il n’y a pas de solution militaire en Syrie. La lutte contre le terrorisme ne doit pas être exploitée pour saper la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, a-t-il demandé, en exigeant la fin à la présence illégale de forces étrangères dans certaines parties de la Syrie. Il a fustigé les frappes aériennes militaires menées dans le nord-est de la Syrie par des forces étrangères illégales. La libre circulation des groupes terroristes sur le territoire syrien, où des forces étrangères sont illégalement présentes, met en danger la paix et la sécurité régionales et internationales, a martelé le représentant. Il a également condamné le « régime israélien » pour son attaque contre l’aéroport international d’Alep le 31 août, demandant au Conseil de sécurité de le tenir responsable de ces actes.
En ce qui concerne le processus politique, le délégué a dit appuyer la convocation de la prochaine réunion de la Commission constitutionnelle pour parvenir à une solution politique. Elle doit travailler dans le strict respect de son mandat et de son règlement, sans influence ou pression extérieure, et sans imposer de délais artificiels, a-t-il prévenu. Et le processus doit être dirigé et contrôlé par les Syriens, le rôle de l’ONU se limitant à la facilitation, a-t-il ajouté. S’agissant de la crise humanitaire désastreuse, le représentant a déclaré que la fourniture d’une aide humanitaire est essentielle et les circonstances politiques ne doivent pas empêcher celle-ci d’atteindre les nécessiteux. Selon lui, les sanctions unilatérales illégales contre le peuple syrien entraînent des conséquences désastreuses pour le peuple syrien, demandant qu’il y soit mis fin. Le Conseil de sécurité doit veiller à ce que la résolution 2642 (2022) soit appliquée de manière équilibrée et efficace, en particulier en ce qui concerne les projets de relèvement rapide et l’amélioration de l’acheminement transfrontière de l’aide humanitaire. Il a enfin condamné le vol des ressources naturelles du peuple syrien, en particulier des produits pétroliers, dans les zones occupées par des forces étrangères.
M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Türkiye) a dit que le mécanisme d’aide transfrontalière reste important pour les besoins du peuple syrien, souhaitant qu’il soit prorogé pour une période de 12 mois en janvier prochain. Il a indiqué que l’acheminement à travers les lignes de front doit se poursuivre, mais que cela ne peut pas être la seule approche. De même, a estimé le représentant, il ne faut pas se focaliser sur le nord-ouest de la Syrie et regarder ce qui se passe ailleurs. Il a dit que les violations du cessez-le-feu à Edleb, de la part du régime syrien, reste une grande préoccupation. Il a appelé à la prudence par rapport à des « plans irréalistes qui seraient élaborés sans la contribution des parties présentes sur le terrain ».
Le délégué a ensuite accusé les Unités de protection du peuple, branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan de perturber sciemment l’approvisionnement en eau. Il a dit de ne pas s’attaquer aux problèmes syriens sans aborder la question des causes du conflit qui est la répression de la population par le régime. Il a rappelé que la résolution 2254 (2015) prévoyait des élections libres dans le pays, rappelant que la Türkiye soutient toute solution politique au conflit. Par ailleurs, le sort de milliers de disparus et détenus touche presque toutes les familles syriennes, a rappelé le représentant, avant de dire que les forces démocratiques syriennes ne sont rien d’autres que des membres du groupe terroriste des Unités de protection du peuple, présent dans le nord-ouest de la Syrie. Il a accusé ce groupe de réprimer la population, estimant que la Türkiye ne peut rester les bras croisés alors qu’il attaque les forces armées de son pays et les populations des deux côtés de la frontière. Le délégué a enfin rappelé que son pays abrite plus de 4 millions de réfugiés syriens.