9106e séance - matin & après-midi*
CS/14993

Le Conseil de sécurité débat des solutions à court et à long terme pour pérenniser la paix en Afrique

Le Conseil de sécurité s’est penché, hier et aujourd’hui, sur le renforcement des capacités pour pérenniser la paix en Afrique.  Le thème de ce débat public organisé par la Chine, qui préside les travaux du Conseil au mois d’août, a été exposé dans ses grandes lignes par des représentants de l’Union africaine (UA), du Secrétaire général de l’ONU et de la Commission de consolidation de la paix (CCP).  Les urgences de l’actualité, marquée par le conflit en Ukraine et la donne sécuritaire en Afrique, ont ensuite été au centre des échanges entre pays.  

M. Bankole Adeoye, Commissaire de l’Union africaine aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité, a ouvert la discussion en jugeant essentiel que l’UA et le Conseil de sécurité travaillent main dans la main à la mise en œuvre de deux dispositifs complémentaires de paix et de développement, « Faire taire les armes en Afrique » et l’Agenda 2063 de l’Union africaine.  Rappelant le lien entre bonne gouvernance, développement, paix et sécurité en Afrique, M. Adeoye a recommandé que l’UA et l’ONU s’attachent à renforcer la coordination de leurs capacités « au lieu d’alimenter une concurrence qui les empêche d’être pleinement efficaces sur le terrain ».  « Nos expériences communes en matière de maintien de la paix ont montré que nous sommes plus forts ensemble », a-t-il insisté.  

La question du financement du renforcement des capacités a été au cœur du débat.  Sur ce point, M. Adeoye a jugé vital que le financement des opérations de maintien de la paix en Afrique cesse d’être le parent pauvre de l’effort de paix onusien.  La Secrétaire générale adjointe et Conseillère spéciale du Secrétaire général pour l’Afrique, Mme Cristina Duarte, a, quant à elle, plaidé pour le financement durable de services publics, notamment en luttant contre les flux financiers illicites.  Selon elle, freiner ces flux provoquerait l’accroissement du volume l’aide publique au développement (APD) et des investissements étrangers directs, dont la mobilisation des revenus reste un moyen sûr de s’attaquer aux causes profondes du délitement social et de la violence qui en découle.  Pour les pays, il faut arriver à une position africaine unique sur le Fonds pour la consolidation de la paix, qu’ils se sont engagés à abonder.  À cet égard, l’Union européenne (UE) a rappelé que ses États membres le financent à hauteur de 60%.  

M. Muhammad Abdul Muhith, Président de la CCP, a évoqué les actions de la Commission dans les pays à son ordre du jour.  « En République centrafricaine, la Commission a mobilisé des ressources pour y améliorer le fonctionnement de la Cour pénale spéciale du pays et de la Commission vérité, justice, réconciliation et réparation. »  Au Libéria, a-t-il ajouté, le Président de la formation relative à ce pays s’est récemment rendu sur place, où il a relevé les efforts déployés au sein des partis politiques pour y assurer une représentation accrue des femmes et une participation plus importante de celles-ci aux élections.  Concernant le Burundi, M. Muhith a indiqué que la Banque d’investissement pour la jeunesse finance l’activité de près de 2 000 jeunes entrepreneurs et coopératives.  

L’actualité n’a pas manqué de s’inviter dans les interventions de la quarantaine de pays ayant pris la parole après avoir entendu les exposés.  La Chine et la Fédération de Russie ont ainsi défendu leurs doctrines en matière d’aide à la paix, tandis que la France et les États-Unis ont averti des conséquences néfastes pour l’Afrique tout entière des agissements du groupe Wagner et de la crise en Ukraine.

Attachée aux principes de souveraineté, la Chine a souligné l’importance de respecter les voies de développement choisies par les peuples et les gouvernements africains, ce qui signifie que l’aide au développement doit y parvenir sans conditions et en aidant les gouvernements à jouer un rôle de chef de file « sans ingérences dans les affaires intérieures ».  La Russie n’a pas dit autre chose, son représentant appuyant en outre les propos de son homologue chinois demandant la levée d’embargos sur les armes imposés par le Conseil au Soudan, au Soudan du Sud et à la République démocratique du Congo: ces sanctions, a dit M. Vassily A.  Nebenzia, empêchent les forces de sécurité nationale de ces pays de stabiliser efficacement leur propre État.  

Le représentant russe a par ailleurs répondu à la France, qui, dans sa déclaration, s’était engagée à continuer d’appuyer des forces de sécurité « exemplaires, capables d’assurer la sécurité sur leur territoire, respectueuses de l’ordre constitutionnel et des droits de l’homme », cela « pour éviter que les pays les plus vulnérables soient à la merci de mercenaires, comme le groupe Wagner, qui multiplient les exactions et pillent leurs ressources ».  « La Russie contribue au renforcement des capacités de paix et de sécurité en Afrique sans rien n’imposer ni donner de leçon à personne! » a martelé M. Nebenzia, qui a affirmé que les États africains ont le droit de choisir leurs partenaires.  

De leur côté, les États-Unis ont attiré l’attention sur un péril particulier qui menace la sécurité alimentaire du continent: « l’agression » de la Russie contre l’Ukraine.  Mme Linda Thomas-Greenfield a en effet déclaré que ce conflit « ne fait qu’aggraver une période déjà tumultueuse marquée par les flambées des prix de l’énergie, la crise climatique et les conflits, et qui aboutit à une augmentation spectaculaire de l’insécurité alimentaire menaçant plus 200 millions d’Africains ».  Elle a assuré que son pays, en partenariat avec les gouvernements et les organisations régionales, fait tout pour résoudre cette crise tout en renforçant les capacités à long terme de l’Afrique de répondre aux défis mondiaux.  

Sur cette même question, la Norvège a jugé que si l’Initiative céréalière de la mer Noire pourrait garantir à court terme que céréales, engrais et autres produits alimentaires soient disponibles à des prix raisonnables, la solution à long terme réside dans la hausse de la production alimentaire durable, cela « parce que l’Afrique a le potentiel pour devenir le grenier à blé du monde ».  L’Ukraine est intervenue pour assurer le Conseil qu’elle demeure déterminée à contribuer à la résolution de la crise alimentaire en faisant son possible pour que l’Initiative soit un succès.  À ce stade, et en dépit du bombardement du port d’Odessa le lendemain de la signature de l’Initiative à Istanbul, 10 navires ont déjà quitté les ports ukrainiens, a ainsi indiqué le représentant ukrainien.  Il a ajouté qu’il incombe désormais aux partenaires internationaux de veiller au respect, par la Russie, de ses obligations au titre du maintien et de la sécurisation du « corridor céréalier ».

* La 9106e réunion a été commencée, puis suspendue, le 8 août, avant de reprendre et de se terminer le 9 août.

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE

Renforcer les capacités pour pérenniser la paix (S/2022/592)

Déclarations liminaires

M. BANKOLE ADEOYE, Commissaire de l’Union africaine aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité, a souligné le rôle essentiel du renforcement des capacités de développement dans la construction de sociétés sortant d’un conflit et les relations entre une gouvernance efficace, la paix, la sécurité et le développement.  Il a également assuré que l’Union africaine (UA) s’efforce de tirer les leçons des situations de conflit dans lesquelles certains de ses États membres ont sombré en raison de l’absence d’état de droit et de faibles perspectives socioéconomiques.  Sur ce dernier point, il a relevé que les jeunes désœuvrés en particulier sont tentés par l’extrémisme violent et font le choix du séparatisme, alimentant ainsi la fragilité du tissu social et les conflits.  M. Adeoye a ensuite jugé important, en vue d’améliorer les liens entre l’application de l’architecture africaine de gouvernance et celle de la gouvernance et du maintien de la paix de l’ONU, de renforcer les partenariats entre cette dernière et l’UA.  À cet égard, il a jugé important que les deux organisations travaillent main dans la main à la mise en œuvre de deux dispositifs clefs et complémentaires, le programme « Faire taire les armes en Afrique » et l’Agenda 2063 de l’UA. 

Revenant aux efforts de l’UA en matière de paix et de sécurité, il a indiqué que les États membres de l’Union travaillent à la poursuite de l’opérationnalisation de la Force africaine prépositionnée et tâchent de renforcer l’appui aux capacités de prévention et de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent dans les régions confrontées à ces fléaux, comme la Corne de l’Afrique, le Sahel ou le bassin du lac Tchad.  Le représentant a également indiqué que son organisation améliore ses politiques de reconstruction et de développement après un conflit en veillant à ce qu’elles soient adaptées à l’environnement sécuritaire changeant du continent.  Pour ce qui est du lien entre la gouvernance, le développement, la paix et le déficit de sécurité, M. Adeoye a recommandé que l’UA et l’ONU renforcent la coordination de leurs capacités au lieu d’alimenter une concurrence qui les empêche d’être pleinement efficaces sur le terrain.  Nos expériences communes en matière de maintien de la paix ont montré que nous sommes plus forts ensemble, a-t-il ainsi dit, ajoutant qu’il est vital que le financement des opérations de maintien de la paix en Afrique cesse d’être le parent pauvre de l’effort de paix onusien.  Enfin, aux membres du Conseil, il a demandé que le partenariat conjoint ONU-UA ne soit plus l’objet de tensions politiques qui entravent également son efficacité.  Développer des systèmes structurés pour tirer parti des capacités et renforcer notre complémentarité est essentiel tant en termes de paix et de sécurité que de gouvernance et de développement, a conclu M. Adeoye. 

La Secrétaire générale adjointe et Conseillère spéciale du Secrétaire général pour l’Afrique, Mme CRISTINA DUARTE, a relevé que le renforcement des capacités a un impact direct et fondamental sur la réalisation d’une paix durable.  Selon elle, cette réunion offre l’occasion d’évaluer comment les facteurs internes d’insécurité en Afrique, tels que la gouvernance et la maîtrise des flux économiques, la pauvreté endémique, les inégalités, la marginalisation et le respect des droits humains, interagissent avec des facteurs externes tels que la concurrence pour les ressources naturelles, la criminalité transnationale et la prolifération des armes illicites.  De ce point de vue, même si les facteurs internes ne sont pas au centre de l’attention du Conseil, il est important, a-t-elle argué, de les prendre en compte lors de l’évaluation de la manière de prévenir et d’atténuer les facteurs externes.  Elle a évoqué une étude menée par son bureau, laquelle a permis d’établir le rapport 2021 du Secrétaire général sur la promotion d’une paix durable et du développement durable en Afrique.  Le rapport identifie quatre façons dont la prestation de services publics peut devenir un déclencheur de conflits et d’instabilité.  Dans ce contexte, elle a relevé que l’exclusion peut agir comme déclencheur, même si le service n’est pas directement fourni par l’État.  Un exemple est l’accès à l’éducation en Afrique pendant la pandémie de COVID-19.  La fourniture de ce service public a donné lieu à l’exclusion de millions d’enfants par manque d’accès à l’électricité ou aux outils technologiques.  La Conseillère spéciale pour l’Afrique a expliqué que la COVID-19 a encore réduit un espace budgétaire déjà limité dans les pays africains, ce qui a parfois conduit à déprioriser certains services publics afin d’avoir la capacité budgétaire de répondre à la pandémie.  « Une décision nécessaire, mais qui peut avoir des conséquences imprévues et non souhaitées à moyen terme », a-t-elle estimé.

Ces conséquences potentielles, ces risques, a-t-elle poursuivi, sont liés au deuxième facteur: des processus de planification et de budgétisation non transparents ou non inclusifs.  Le manque de capacité des pays africains à mener des processus de planification risque de créer une exclusion indésirable ou même de fausses perceptions d’exclusion, a-t-elle affirmé.  Le troisième facteur évoqué par Mme Duarte est la corruption.  Elle a indiqué que la corruption ne se contente pas de détourner des fonds qui devraient être utilisés pour la prestation de services, c’est également un facteur de délégitimation de l’État.  Et la corruption n’est pas seulement une question éthique ou juridique, c’est globalement le résultat de l’absence de l’État et du manque de capacités, a-t-elle pointé.  À ces trois facteurs s’ajoute un quatrième qui est l’absence de l’État auquel se substituent des acteurs non étatiques, y compris des groupes criminels et terroristes, comme l’illustre le cas des Chabab en Somalie.

Pour renforcer les capacités en Afrique, la Secrétaire générale adjointe a demandé de bâtir des institutions et développer des capacités pour la prestation de services publics, en veillant à mettre à disposition un financement durable.  Et ce dernier ne peut être atteint que grâce à la mobilisation des ressources nationales solides, y compris en luttant contre les flux financiers illicites.  Elle a expliqué que les freiner générerait le même montant de revenus que l’aide publique au développement (APD) et les investissements étrangers directs réunis.  Comme solutions, Mme Duarte a dit qu’il est essentiel d’investir dans l’infrastructure institutionnelle afin de renforcer les capacités pour faire face aux causes internes de la violence.  De même, la coopération technique visant à créer des capacités politiques et institutionnelles doit être une priorité dans tous les domaines.  Elle a constaté que dans de nombreux pays, les missions de maintien de la paix atteignent des zones où l’État est absent.  Dans ce contexte, une coopération renforcée avec les autorités nationales et locales, non seulement du point de vue sécuritaire mais aussi des perspectives de renforcement des institutions, pourrait créer des opportunités pour accroître la présence de l’État et améliorer la prestation de services.  Dans ce contexte, les programmes d’alimentation scolaire sont un exemple de service public doté d’un grand potentiel pour maintenir la paix et promouvoir la stabilité à long terme.  À cet égard, le Bureau de la Conseillère spéciale pour l’Afrique a lancé l’initiative « Un stylo pour un fusil ».  Celle-ci encourage le rôle des repas scolaires dans la promotion de la cohésion sociale et de la paix sur le continent et cherche à renforcer les capacités des pays africains à assurer la paix et la sécurité par le développement.

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh), Président de la Commission de consolidation de la paix des Nations Unies, a constaté que des pays africains sont de plus en plus intéressés à collaborer avec la Commission pour élargir et renforcer leurs capacités de consolidation de la paix et de maintien de la paix.  Il a fait part des engagements pris par la Commission de consolidation de la paix en Afrique dans le domaine du renforcement des capacités, notamment en République centrafricaine où, lors d’une réunion sur l’État de droit et les mécanismes de justice transitionnelle en avril de cette année avec le Ministre de la justice, la Commission a mobilisé des ressources et abordé l’impact des contraintes budgétaires pour la Cour pénale spéciale du pays et la Commission vérité, justice, réconciliation et réparation.  Au Libéria, le Président de la formation relative à ce pays s’est récemment rendu sur place, y notant les efforts déployés au sein des partis politiques pour assurer une représentation accrue des femmes à la tête des partis et une participation plus importante de leur part aux élections, ainsi que le rôle joué par les réfugiées dans le renforcement de la cohésion sociale au niveau communautaire. 

Au Burundi, a poursuivi M. Muhith, le Directeur général de la Banque d’investissement pour la jeunesse, créée en 2020, a informé la Commission des efforts déployés par la Banque pour financer les jeunes entrepreneurs et les coopératives appartenant à plus de 1 800 jeunes membres.  La Commission a également entendu plusieurs jeunes entrepreneurs qui ont souligné à quel point le soutien au renforcement des capacités avait été transformateur dans leur vie.  Quant au Secrétaire exécutif de la Commission du bassin du lac Tchad, il a informé la Commission de consolidation de la paix en avril des structures de coordination et de gestion nouvellement créées et de la mise en place de partenariats verticaux et horizontaux, y compris avec une plateforme de la société civile et un groupe de travail composé de partenaires chargés de la mise en œuvre. 

Sur la base de ces engagements pris par la Commission de consolidation de la paix en Afrique, M. Muhith a observé qu’il est essentiel de soutenir les efforts menés et dirigés par le pays pour mettre en place des institutions efficaces, responsables, inclusives et réactives aux niveaux national et local pour réduire la vulnérabilité, protéger et autonomiser les citoyens.  À cet égard, la Commission continuera d’encourager les partenariats avec les institutions financières internationales qui ont mobilisé des ressources, de l’expertise et des capacités pour aider à mettre en place des institutions nationales et locales dans les pays touchés par un conflit.  Deuxièmement, il importe de veiller à ce que les femmes, les jeunes et les personnes en situation de vulnérabilité soient associés aux efforts visant à renforcer les capacités aux niveaux local, national et régional.  Troisièmement, la Commission de consolidation de la paix promeut le rôle des coopérations Sud-Sud et triangulaire pour relever les défis communs à la consolidation de la paix et faire progresser les objectifs à long terme de relèvement économique et de développement durable en Afrique, a poursuivi le Président.  Et quatrièmement, le Président de la Commission a appelé à un financement adéquat, prévisible et durable de la consolidation de la paix, se disant favorable à la confluence de diverses sources de financement vers des objectifs communs. 

Déclarations

M. ZHANG JUN (Chine) a évoqué les « magnifiques civilisations africaines », les « souffrances de la traite des esclaves et du colonialisme » et les « ingérences étrangères » que ce continent a endurées.  Face à un « ordre économique mondial injuste et de nombreuses crises », les pays du continent ont toujours été victimes de dommages culturels et même de conflits en dehors de leur région alors que les acquis de développement ont été balayés et les processus de paix interrompus dans certains pays africains.  Il a donc appelé le Conseil de sécurité à se poser des questions pour aider l’Afrique à parvenir à une paix durable.  Pour aider l’Afrique à parvenir à une stabilité à long terme, il est impératif de bâtir un socle solide sur le continent pour renforcer ses capacités de développement et sa résilience aux chocs externes, a argué le représentant, et pour cela, les gouvernements et les peuples africains sont les acteurs les plus importants.  Il faut notamment aider les pays africains à renforcer leurs capacités de gouvernance.  Le succès de nombreux pays africains démontre clairement ce point, a-t-il estimé, en citant notamment le Kenya, le Burundi, l’Ouganda, le Sénégal, le Cameroun, le Rwanda et d’autres qui se sont rapidement remis de la pandémie en faisant preuve de leadership.  Il faut en outre respecter les voies de développement choisies par les peuples et les gouvernements africains, ce qui signifie que l’aide au développement doit y parvenir sans conditions et en aidant les gouvernements à jouer un rôle de chef de file sans ingérences dans les affaires intérieures.  Pour les pays en situation de postconflit, il faut aider les nouveaux gouvernements à s’imposer le plus vite possible et à progresser ensuite au lieu de formuler des critiques sans fin et faire pression par le moyen de sanctions et autres, a argué le représentant.  

Il faut en outre permettre aux pays africains de réformer leurs secteurs de la sécurité pour faire face aux menaces du terrorisme et des conflits intercommunautaires, a indiqué le représentant, tout en indiquant que les forces de sécurité externes ne peuvent se substituer à ces efforts.  La Chine est d’avis qu’il faut écouter attentivement les voix africaines, mener des examens complets des opérations de maintien de la paix, réformer leurs pratiques inadaptées à la situation sur le terrain, développer des mandats sensés axés sur l’évaluation des performances, mais aussi lever en temps voulu les embargos sur les armes imposés à certains pays comme le Soudan, le Soudan du Sud et la RDC, qui entraînent des conséquences négatives sur leurs secteurs de sécurité respectifs.  En outre, le représentant a appelé à trouver une réponse au financement des efforts de paix de l’UA.

Il faut également aider les nations africaines à améliorer leurs capacités de développement durable parce que le développement est la pierre angulaire de la paix et de la sécurité, a estimé le représentant.  Dans cet esprit, la Chine a proposé un appui financier à l’expansion des lignes de chemins de fer reliant Mombasa à Nairobi et l’Éthiopie à Djibouti, en se fondant sur l’idée selon laquelle le développement promeut la paix.  La cause sous-jacente des problèmes africains est un ordre économique mondial injuste, a tranché le représentant.  L’Afrique manque notamment de denrées alimentaires et d’énergie, a-t-il noté, et pour y faire face, il faut l’aider à s’industrialiser, à renforcer son indépendance financière et à accélérer la modernisation de ses infrastructures.  Dans ce contexte, les pays développés doivent respecter leurs engagements pour financer l’action climatique et payer leur dette historique vis-à-vis du continent.  En outre, il faut aider les pays africains à constituer davantage de talents parce que cela représente l’avenir surtout que plus de la moitié de la population africaine sont des jeunes.  Il faut donc renforcer l’aide au développement des enfants et des jeunes à travers l’éducation, la formation professionnelle et l’aide à l’entrepreneuriat des jeunes.  Il faut également soutenir les efforts de déradicalisation en Afrique, a encore souhaité le représentant.

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a déclaré que pour que l’Afrique soit en mesure de relever les défis sécuritaires, climatiques et sanitaires auxquels elle fait face, tous les secteurs de ses États membres ont besoin de capacités renforcées.  Il a notamment considéré que sans services publics forts, ces pays ne pourraient pas réaliser l’Afrique que nous voulons à l’horizon 2063.  Parce que le Kenya est convaincu que le renforcement des capacités est la priorité, il multiplie les initiatives à ce niveau, a-t-il ajouté, mentionnant des programmes de formation à l’administration publique et d’aide à la reconstruction des institutions dans les pays sortant d’un conflit comme le Soudan du Sud, le Burundi ou la Somalie.  Sur un plan général, il a estimé important que l’implication des pays africains dans le maintien de la paix soit guidée par le principe clef de l’appropriation nationale.  Il a en outre indiqué au Conseil que ses sanctions et embargos ont pu entraver la capacité de certains États à assurer une sécurité adéquate à leurs citoyens.  Concernant le financement du maintien de la paix, M. Kiboino a souhaité que la résolution en cours d’élaboration sur ce point crucial soit adoptée par le consensus le plus large possible au cours de la prochaine session de l’Assemblée générale.  Nous continuons de penser que la Banque mondiale et l’ONU doivent œuvrer ensemble de façon plus efficace à l’amélioration et à la pérennisation de ce financement, a-t-il conclu.

Mme CÁIT MORAN (Irlande) a remarqué que les populations locales dans de nombreuses sous-régions en Afrique sont celles qui endurent le poids des crises, et que c’est au niveau local que les solutions peuvent être trouvées.  Il est donc essentiel que nous écoutions et prêtions attention aux femmes dirigeantes, aux jeunes, aux défenseurs des droits humains et à la société civile, a-t-elle estimé.  En renforçant les capacités de ces agents de la paix locaux et en facilitant leur travail, on promeut l’inclusion, une meilleure gouvernance et une paix durable, a fait valoir Mme Moran.  Elle a également insisté sur l’impératif pour tous les États de respecter leurs obligations en droit international, y compris le droit international humanitaire et celui relatif aux droits de l’homme, alors que la communauté internationale est engagée sur la voie de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).  Elle peut aider ses partenaires africains à construire une paix durable en s’attaquant aux causes profondes et aux facteurs de conflit, a estimé la représentante en expliquant le besoin notamment d’investir dans l’éducation, en particulier celle des femmes et des filles, ainsi que dans les soins de santé et les systèmes alimentaires, pour renforcer la résilience à long terme du continent.  Cela comprend également le développement et le renforcement des cadres des droits de l’homme, le respect du droit international, le soutien à la démocratie, à la bonne gouvernance et au dialogue national, ce pour quoi la Commission de consolidation de la paix est particulièrement bien placée pour guider ces efforts collectifs, a estimé la déléguée.  Elle a aussi souligné le rôle essentiel de l’UA et des organisations sous-régionales lorsqu’elles promeuvent la bonne gouvernance et répondent au nombre alarmant de coups d’État de ces dernières années.  L’Irlande salue aussi le leadership de la CEDEAO sur cette question, a ajouté la représentante en citant notamment sa diplomatie préventive et ses efforts pour promouvoir le dialogue, la démocratie, la bonne gouvernance et la stabilité.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a relevé que malgré des perspectives positives, la paix reste insaisissable dans certaines régions d’Afrique, notamment au Sahel, dans la Corne de l’Afrique et en Afrique centrale.  Il a regretté que des pays d’Afrique, tout comme la majorité des pays du Sud, souffrent d’un indéniable passé colonial qui les désavantage en termes de capacité institutionnelle, plaidant alors pour que le développement des ressources humaines et le renforcement des capacités soient au cœur des efforts de la communauté internationale en Afrique.  Cette même communauté doit accorder une attention particulière aux voix et à la sagesse africaines, a-t-il ajouté, arguant que personne ne peut mieux connaître l’Afrique que les Africains eux-mêmes.  Soulignant qu’un cadre démocratique fondé sur l’état de droit et des institutions crédibles sont des ingrédients essentiels pour le succès après un conflit en Afrique, le représentant a recommandé que le renforcement des capacités vise à renforcer les institutions de la base comme celles du niveau national.  Il a noté que la croissance du terrorisme en Afrique a de plus en plus exposé les lacunes dans les mandats entre le maintien de la paix et la consolidation de la paix.  Les terroristes profitent ainsi de ce fossé et déchaînent la terreur que les États déchirés par les conflits sont incapables de combattre faute de moyens, a-t-il mis en garde, comme cela est de plus en plus apparent au Sahel et dans d’autres parties de l’Afrique.  Le délégué a donc appelé à renforcer la capacité des État à lutter contre le terrorisme.  

Le représentant a ensuite expliqué que le partenariat de l’Inde avec l’Afrique repose sur la construction d’instruments d’autonomisation devant permettre à l’Afrique de trouver des solutions africaines à ses problèmes.  Les ressources humaines et le renforcement des capacités sont au cœur de cette relation, a-t-il précisé.  Pour le représentant, « toute discussion sur le renforcement des capacités pour l’Afrique n’a aucun sens si nous continuons à fermer les yeux sur la question centrale du manque de représentation africaine permanente dans ce même Conseil ».  Alors que cet organe concentre plus de la moitié de son travail exclusivement sur le continent africain, l’exclusion systématique de nos « frères et sœurs » africains dans la catégorie permanente des membres du Conseil de sécurité est une tache sur notre crédibilité collective, a-t-il lancé en conclusion.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a souligné que dans les différents crises et foyers de tensions qui persistent dans la région des Grands Lacs, dans plusieurs pays d’Afrique centrale, dans la région du Sahel et dans la Corne de l’Afrique, « il apparait fondamental de conduire une approche holistique qui apporte des réponses concrètes et multidimensionnelles à toutes les étapes du processus de paix, de la fin du conflit à la consolidation de la paix en passant par la reconstruction après un conflit, afin de pouvoir capitaliser les acquis des efforts de paix en Afrique ».  À cet égard, il a indiqué qu’à travers l’Agenda 2063, l’Union africaine s’est assignée un cadre d’action a la dimension des enjeux d’une Afrique vivant dans la paix et la sécurité, « un continent où les valeurs de bonne gouvernance, de démocratie, de respect des droits de l’homme, de justice et d’état de droit figurent au centre des stratégies de paix et de sécurité ».  Pour le représentant, la stabilité institutionnelle est une condition pour le développement et la consolidation de la paix, le rôle des institutions financières internationales étant important, notamment dans le financement des programmes de formation, de création d’emplois et dans la mise en place de projets à impact rapide, ainsi que des programmes de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).  Il a également plaidé pour que les femmes et les jeunes soient systématiquement inclus à tous les niveaux des processus de consolidation de la paix.  Enfin, M. Biang a plaidé pour le soutien de la communauté internationale à un financement prévisible et adéquat de l’architecture africaine de paix ainsi que des opérations de maintien de la paix conduites par l’Union africaine. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a été d’avis que les efforts de consolidation de la paix doivent viser à répondre aux besoins de la population.  Dans les efforts de renforcement des capacités et des institutions, il a conseillé d’envisager des actions de prévention et de traiter les causes de la pauvreté et des inégalités, insistant aussi sur l’état de droit.  Pour le représentant, la consolidation du lien entre sécurité et développement est la base pour progresser vers une bonne gouvernance et une paix durable.  Rappelant que l’un des défis du continent africain est posé par les changements climatiques, il a souligné l’importance de renforcer d’urgence les capacités d’atténuation, d’adaptation, de production d’électricité et du secteur agricole.  La COP27, en Égypte, sera l’occasion combler les manques d’investissement dans ces secteurs, a-t-il espéré.  

Le représentant a aussi mis l’accent sur le renforcement des capacités des femmes dans les domaines de la médiation, de la prévention et du règlement des conflits, insistant sur l’importance du leadership des femmes.  S’agissant des trafics illicites d’armes, il a appelé à développer les capacités des autorités douanières et frontalières, ainsi que des mécanismes juridiques et des engagements internationaux pour contenir ce grave phénomène.  Le renforcement de l’état de droit et d’institutions responsables et transparentes est essentiel à la promotion d’un développement durable et inclusif, a-t-il rappelé, soulignant que cela va de pair avec des réformes du secteur de la sécurité, la mise en œuvre de programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, ainsi que le renforcement des institutions pour l’administration de la justice.  Le représentant a pris note du fait que les pays africains ont revitalisé leurs initiatives d’intégration économique régionale afin d’assurer une prospérité partagée.  Il a recommandé de tirer parti de ces synergies de collaboration régionale pour promouvoir une meilleure lutte contre l’exclusion, l’injustice, les inégalités entre les sexes et la corruption.  

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a exprimé sa profonde inquiétude quant à l’ampleur des défis auxquels de nombreux pays d’Afrique sont confrontés aujourd’hui, la COVID-19 ayant mis à rude épreuve les capacités des gouvernements à consolider les acquis du développement.  En outre, les conséquences économiques mondiales de l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie ont durement touché le continent, a poursuivi le représentant.  Le Gouvernement britannique, a assuré le délégué, reste déterminé à faire sa part pour aider l’Afrique dans le cadre de sa nouvelle stratégie de développement international, qui inclut le renforcement des institutions qui œuvrent au bien-être de leurs citoyens.  Nous travaillons aussi en partenariat étroit avec l’UA, par exemple pour reconfigurer sa mission de transition en Somalie, en formant par exemple plus de 3 000 soldats de la paix africains au cours du dernier exercice financier par le biais de l’équipe britannique de soutien à la paix en Afrique, a encore fait valoir le représentant.  Et en juillet, le Royaume-Uni a accueilli le deuxième dialogue sur la sécurité avec le Ghana, au cours duquel il a été convenu de soutenir les approches régionales pour faire face aux risques croissants d’instabilité dans les États côtiers d’Afrique de l’Ouest.  Enfin, a précisé le représentant, Londres est le deuxième plus grand donateur au Fonds de l’Initiative Elsie, ayant fourni plus de six millions de dollars depuis 2019, afin d’accroître la participation des femmes en uniforme aux opérations de paix de l’ONU.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a relevé que dans l’Agenda 2063 de l’UA, les Africains « reconnaissent qu’une société prospère, une Afrique intégrée et unie, fondée sur la bonne gouvernance, la démocratie, l’inclusion sociale et le respect des droits de l’homme, la justice et l’état de droit sont des conditions préalables nécessaires pour un continent pacifique et sans conflit ».  Or, a-t-il noté, les moyens d’atteindre ces aspirations et les conditions de développement économique et social ont été refusés aux sociétés d’Afrique, comme d’ailleurs à celles de la majorité des pays en développement.  S’il a jugé importante l’aide publique au développement, qu’elle soit multilatérale ou bilatérale, qu’elle soit humanitaire ou axée sur le développement, il a rappelé qu’elle est essentiellement une solution palliative.  Il a donc appelé à une architecture mondiale qui permette aux pays aidés de réaliser leur potentiel.  Dans ce contexte, il a estimé que la Commission de consolidation de la paix occupe une position unique en tant que facilitateur pour mobiliser la communauté internationale en faveur des priorités de la consolidation de la paix, tant en termes de financement que de compétence.  Le délégué a ensuite souligné qu’une approche globale du maintien de la paix englobe tous les efforts visant à prévenir la reprise du conflit.  Par conséquent, il a conseillé de mettre fortement l’accent sur la prévention des conflits en en faisant une ligne directrice clef pour le renforcement des capacités en matière de paix et de sécurité en Afrique.  Aux fins de cette prévention des conflits, il a encouragé la poursuite de la collaboration entre l’ONU, l’UA et les organismes sous-régionaux.

M. ODD INGE KVALHEIM (Norvège) a appelé à prendre en compte la vision 2063 de l’UA, en estimant que le principal défi est de savoir comment ses partenaires peuvent plus efficacement mettre en commun leurs ressources et coordonner leurs efforts, à l’appui des aspirations de l’Afrique, dans un contexte de crises.  Alors que l’Initiative céréalière de la mer Noire, si elle est mise en œuvre, peut garantir que céréales, engrais et autres produits alimentaires soient disponibles à des prix raisonnables, la solution à long terme réside selon lui dans la hausse de la production alimentaire durable, parce que « l’Afrique a son propre potentiel pour devenir le grenier à blé du monde ».

Notant que l’ONU et l’UA ont fait de grands progrès dans la promotion d’une coopération plus structurée et stratégique, la Norvège a toutefois estimé nécessaire un plus grand soutien politique de la part des États Membres et un financement prévisible, durable et flexible, y compris pour les missions dirigées par l’UA et régionales.  À cet égard, la Norvège a soutenu l’appel du Secrétaire général en faveur d’un bureau d’appui des Nations Unies pour la Force conjointe du G5 Sahel et reste ouverte à l’utilisation des contributions statutaires pour les missions dirigées par l’UA et les organisations régionales lorsque les conditions s’y prêtent.  Le représentant a plaidé pour une interaction plus fréquente entre le Conseil de sécurité de l’ONU, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA et la Commission de consolidation de la paix.  

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a cité « un de ses héros personnels » en disant que la paix ne peut pas attendre en Afrique et qu’elle doit être apportée par les institutions et les dirigeants africains pour les peuples de l’Afrique.  Elle a mis en exergue l’engagement de son pays en faveur du développement, de la paix, de la sécurité, des droits humains et de l’égalité.  Rappelant la stratégie de Nations Unies visant à prévenir les conflits et à promouvoir la stabilité pour les 10 prochaines années, la représentante a insisté sur le fait que le développement et la réalisation des ODD reposent sur les principes et normes en matière de droits humains.  Le développement axé sur les droits humains et la sécurité seront d’ailleurs la priorité du sommet des dirigeants africains qui aura lieu à Washington en décembre, a-t-elle annoncé.  

La représentante a assuré que les États-Unis veulent aussi renforcer les relations commerciales, le développement économique et la prospérité en Afrique.  Elle a cité le Secrétaire d’État, M. Antony Blinken, qui a lancé aujourd’hui à Pretoria la stratégie américaine pour l’Afrique subsaharienne.  C’est l’Afrique qui définira l’avenir, pas seulement l’avenir des peuples africains mais l’avenir du monde, a-t-elle prédit.  Elle a reconnu que les pays africains ont les ressources et la volonté nécessaires, rappelant les efforts africains de règlement des crises dans la région des Grands Lacs, au Mozambique et en Somalie.  Les États-Unis ont recours à la diplomatie pour appuyer ces efforts, a-t-elle ajouté en mentionnant leur soutien à la médiation africaine dans le conflit en République démocratique du Congo (RDC).  À cet égard, la déléguée a exhorté les groupes armés non étatiques à mettre un terme à leurs activités et appelé à la désescalade de la violence.  Elle a par ailleurs encouragé l’UA à financer les opérations de paix de l’Union africaine conformément à la résolution 2378 (2017) du Conseil de sécurité.  

S’agissant de l’embargo sur les armes, la représentante a expliqué que grâce aux dérogations, les gouvernements doivent pouvoir acheter ce dont ils ont besoin.  Elle a argué que l’embargo promeut la transparence dans les flux d’armes vers les zones de conflit et limite la capacité des belligérants à reprendre les hostilités.  L’embargo, qui sauve des vies, est essentiel pour l’initiative Faire taire les armes en Afrique d’ici 2030, a-t-elle ajouté.  Avant de terminer, la représentante a dénoncé l’agression de la Russie contre l’Ukraine qui a fait empirer une période déjà tumultueuse marquée par les flambées des prix de l’énergie, la crise climatique et les conflits, et qui aboutit à une augmentation spectaculaire de l’insécurité alimentaire touchant plus 200 millions de personnes.  Les États-Unis travaillent en partenariat avec les gouvernements et les dirigeants africains pour faire face à cette crise tout en liant les efforts à court terme à l’impératif à plus long terme de renforcer la capacité de l’Afrique de régler les problèmes mondiaux. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré que si les États africains ont besoin de l’aide internationale pour renforcer leurs capacités nationales de réponse aux conflits, au terrorisme, à la pauvreté et aux épidémies, « il faut éviter que, comme cela a été le cas en Libye, les ingérences extérieures aggravent encore la situation ».  Il s’est réjoui de ce que, dans ce contexte, le renforcement des institutions africaines ait permis, ces dernières années, des avancées réelles dans le domaine de la paix et de la sécurité.  La Russie est convaincue que l’aide, pour être efficace, ne peut qu’être apportée sur la base d’un dialogue mutuel et dans le strict respect de la souveraineté des pays bénéficiaires, a poursuivi le représentant.  Il a ensuite accusé certains membres du Conseil de sécurité de traiter de problèmes qui ne relèvent pas de sa compétence directe.  Réformer la gouvernance politique dans des contextes politiques tribaux complexes s’accorde mal avec l’imposition des concepts occidentaux, a-t-il par exemple estimé.  À ses yeux, certains veulent assurer « ce faisant » une domination politique par le chantage économique et en « pillant les cerveaux africains ».  

Le représentant a ensuite affirmé que la consolidation de la paix et la stabilité en Afrique nécessitent de « faire taire les armes par des efforts régionaux », lesquels sont selon lui irremplaçables car les pays concernés sont les seuls à maîtriser les spécificités sécuritaires et culturelles locales.  Il s’en est en outre pris aux embargos sur les armes qui empêchent dans plusieurs pays africains les forces de sécurité nationale de stabiliser efficacement leur propre État.  Par ailleurs, il a plaidé pour un renforcement de la souplesse du financement des opérations de paix déployées en Afrique, se disant prêt à participer à un dialogue sincère, un dialogue « qui ne soit pas détourné par l’inclusion de questions de droits de l’homme ».  Il a aussi considéré nécessaire d’arriver à une position africaine unique sur le Fonds pour la consolidation de la paix.

Enfin, le représentant russe a déclaré que son pays continue de contribuer au renforcement des capacités de paix et de sécurité en Afrique « sans rien n’imposer ni donner de leçon à personne », les États africains ayant le droit de choisir leurs partenaires, « qui plus est dans un contexte postcolonial ».  On nous accuse régulièrement ici d’exporter la faim, a-t-il encore renchéri, rejetant ces accusations infondées « du camps occidental ».  Il a déclaré que les pays occidentaux pointent du doigt la Russie pour augmenter les prix à la suite de l’épidémie de COVID-19.  Ils taisent leur rôle négatif sur le marché des denrées alimentaires, prennent des sanctions unilatérales dangereuses contre Moscou et menacent les pays africains qui collaborent avec elle, a-t-il conclu.  

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a rappelé que c’est le contexte local qui doit guider les solutions en vue de résoudre les conflits, notamment dans le cadre africain et au Moyen-Orient.  Et si l’accent est mis sur les solutions africaines, il ne faut pas oublier que les causes des conflits sur le continent viennent parfois de l’extérieur, a fait observer le représentant.  Renforcer les capacités pour la paix en Afrique est donc un impératif moral aux retombées positives pour le monde entier, a-t-il dit.  De même, les crises multiples sur le continent pourraient exacerber les vulnérabilités existantes, a indiqué le délégué en conclusion.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a souhaité que le récit international et la compréhension de la complexité des problèmes de l’Afrique soient alignés sur les aspirations et les efforts du continent, pour plus d’efficacité des partenariats mondiaux et du soutien à des solutions africaines durables.  Il a observé que, malgré les nombreux accomplissements de l’Afrique, les défis sont toujours bien réels et ont pour causes profondes non seulement les défis structurels tels que le déséquilibre du développement mondial et de la gouvernance nationale et les déficits institutionnels, mais également les crises mondiales majeures telles que la situation en Libye depuis 2011, la pandémie de COVID-19 et les effets d’entraînement de l’agression actuelle contre l’Ukraine.  La meilleure manière de soutenir la capacité de l’Afrique à construire une paix et une sécurité durables ne réside donc pas, selon lui, dans des objectifs impulsés de l’extérieur.  Il a estimé que ce soutien doit rester axé sur les efforts d’opérationnalisation effective de l’Architecture africaine de paix et de sécurité et sur l’Architecture africaine de gouvernance.

Pour accroître la capacité de l’UA et des pays africains à assurer une paix et une sécurité durables sur le continent, M. Ageyeman a encouragé le renforcement des mécanismes de coordination entre l’UA et l’ONU, tels que le Cadre commun ONU-UA pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité et les réunions consultatives conjointes annuelles entre le Conseil de sécurité des Nations Unies et le Conseil de paix et de sécurité de l’UA.  Il a ainsi suggéré un échange d’informations plus régulier, des briefings communs par des représentants et envoyés spéciaux des deux organisations et des visites communes sur le terrain par des hauts fonctionnaires.  De telles mesures permettraient selon lui d’éviter la duplication des efforts, d’améliorer les complémentarités et de renforcer la mise en œuvre cohérente des actions pour la paix et la sécurité sur la base des priorités et des actions continentales.  Il a aussi demandé plus de soutien mondial à une architecture africaine de paix et de sécurité efficace, y compris aux mécanismes d’alerte précoce, de prévention des conflits, de médiation, d’opérations de soutien à la paix et de reconstruction postconflit.

Le représentant a ensuite appelé le Conseil de sécurité à clarifier les conditions dans lesquelles les forces régionales africaines, agissant en vertu du Chapitre VIII de la Charte, peuvent satisfaire à l’exigence d’un financement prévisible, adéquat et durable, en particulier à partir des contributions mises en recouvrement.  Il a mis en avant la responsabilité des gouvernements africains d’instaurer la confiance avec leurs populations et de mettre en place les institutions et structures nécessaires au renforcement du contrat social et à la réduction des frustrations, de l’exclusion et de l’inégalité, en demandant en particulier que les jeunes, les femmes et les filles soient pleinement intégrés dans tous les aspects de la prise de décisions et de la mise en œuvre des politiques publiques.  En dernier lieu, le délégué a demandé un véritable engagement international et un soutien pour la mise en œuvre des programmes de développement 2030 et 2063 en Afrique.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déclaré que la prestation de services de base est essentielle à la paix et à la sécurité.  Il a dit être « préoccupé » par le fait que les biens et services publics, y compris les écoles et les établissements de santé, sont toujours la cible de conflits armés à travers le continent.  L’ampleur des violations commises contre les enfants est scandaleuse en République démocratique du Congo (RDC), en Somalie ou en République centrafricaine.  Le représentant a souligné qu’il respectait le rôle central des organisations de la société civile et des jeunes dans la consolidation de la paix, la réconciliation postconflit et les efforts de relèvement post-COVID-19 et dans la lutte contre les changements climatiques.  Un véritable engagement en faveur de l’égalité entre les sexes et de l’autonomisation des femmes contribuera à la réussite des pourparlers de paix et à la réalisation d’une paix durable.

Selon le représentant, afin de s’attaquer aux causes des conflits et d’intensifier les efforts en vue de la mise en œuvre des objectifs de l’Agenda 2063 de l’UA, le meilleur moyen est d’investir dans la bonne gouvernance, en organisant des élections libres et équitables, en mettant en place des institutions responsables devant la loi et avec des sociétés ouvertes et participatives.  Dans les pays en conflit et sortant d’un conflit, il est nécessaire d’œuvrer à des processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion plus inclusifs et plus efficaces, y compris pour la réinsertion des enfants anciennement associés aux forces armées ou aux groupes armés.  Il faut également renforcer et diversifier les relations commerciales avec l’Afrique, promouvoir les investissements publics et privés en mettant l’accent sur les économies vertes et bleues, a encore plaidé le représentant.  S’agissant du lien entre le climat, la sécurité et l’insécurité alimentaire croissante, l’absence de réponse rapide, robuste et appropriée signera notre échec collectif, a mis en garde M. Hoxha.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a jugé que seule la montée en puissance des capacités nationales, appuyée par de solides actions de formation sur le long terme, peut permettre un résultat durable et créer les conditions d’un retrait des opérations de paix.  La France continuera à apporter son appui aux pays du Sahel qui en font la demande, avec nos partenaires européens et africains, a-t-elle indiqué.  « Nous continuerons d’appuyer la montée en puissance de forces de sécurité exemplaires, capables d’assurer la sécurité sur leur territoire, respectueuses de l’ordre constitutionnel et des droits de l’homme », a insisté la représentante, qui a jugé cela impératif « pour éviter que les pays les plus vulnérables soient à la merci de mercenaires, comme le groupe Wagner, qui multiplient les exactions et qui pillent leurs ressources ».  Elle a ensuite plaidé pour que le renforcement des capacités s’appuie sur un partenariat de confiance et une bonne gouvernance.  Parlant d’un investissement long, coûteux et qui nécessite de déployer une expertise rare, elle a ajouté qu’un tel investissement ne peut être consenti sans un engagement politique et une redevabilité de l’État qui en bénéficie.  La mise en place de forces de sécurité professionnelles et la lutte contre la corruption sont donc indispensables, a-t-elle poursuivi avant d’insister sur l’octroi de ressources suffisantes à l’ensemble des services de l’État.

Après avoir souligné que la Commission de consolidation de la paix, avec l’appui du Fonds de consolidation de la paix, peut s’engager davantage pour créer les conditions d’une paix durable, Mme Broadhurst Estival a attiré l’attention sur l’importance de la recherche de solutions innovantes.  Elle a souligné à cet égard que la COVID-19 a fait émerger des coopérations inédites entre l’Union européenne, l’UA et leurs États membres, en particulier l’Afrique du Sud et le Rwanda pour la production de vaccins à ARN messager.  Enfin, elle a réaffirmé que la France reste prête à reprendre la discussion relative au financement des opérations africaines de paix sur contributions obligatoires des Nations Unies dès que les conditions seront réunies.  Elle a invité à reconnaître plus clairement le lien entre changements climatiques et insécurité sur le continent africain, et en tirer toutes les conséquences, ajoutant qu’accroître le financement de l’adaptation aux changements climatiques contribue à prévenir les conflits et s’inscrit dans une perspective de développement durable.

M. CHEIKH NIANG (Sénégal) a rappelé que l’UA a mis en place l’Architecture africaine de paix et de sécurité et également démontré ses capacités à apporter les premières réponses aux conflits, comme ce fut le cas au Mali, en République centrafricaine et en Somalie.  De même, les résultats tangibles des opérations menées par la CEDEAO dans la résolution de plusieurs crises, avec notamment le déploiement de sa brigade de surveillance du cessez-le-feu dans de nombreux théâtres d’opérations (Libéria, Guinée-Bissau et Gambie), attestent du rôle crucial que les organisations sous-régionales africaines peuvent jouer dans la promotion de la paix sur le continent.  À cela, il faut ajouter les contributions non négligeables d’autres initiatives telles que la Force conjointe du G5 Sahel, la Force opérationnelle multinationale conjointe contre Boko Haram et l’Initiative d’Accra.  Devant les difficultés auxquelles font face ces différentes initiatives, le représentant a jugé impératif de renforcer les capacités de riposte des forces de défense et de sécurité nationales, sous-régionales et régionales qui opèrent dans un environnement de plus en plus volatile.  Et la même exigence s’impose aussi s’agissant des opérations de maintien de la paix des Nations Unies dans lesquelles les pays africains jouent un rôle majeur en tant que contributeurs de troupes et de personnels de police.  

La problématique du renforcement des capacités africaines doit également être appréhendée à travers le Cadre commun ONU-UA pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité qui a été adopté en 2017.  Il a, dans ce contexte, rappelé l’appel de l’Afrique en faveur de mécanismes de financement prévisibles, durables et flexibles des opérations de soutien à la paix de l’Union africaine autorisées par le Conseil de sécurité au titre du Chapitre VII de la Charte.  Dans cet ordre d’idées, le délégué a appelé tous les membres du Conseil à soutenir la proposition de création d’un bureau d’appui spécialisé des Nations Unies, financé au moyen de contributions onusiennes obligatoires, afin de permettre à la Force conjointe du G5 Sahel de disposer d’un financement pérenne, prévisible et fiable à la hauteur de la gravité des défis sécuritaires auxquels elle fait face.  Parallèlement, le renforcement de capacités doit contribuer à la pleine autonomisation de l’Afrique dans la gestion des conflits armés sur le continent, conformément au principe des « solutions africaines aux problèmes africains ».  

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a prôné une approche holistique avec des partenariats variés, condition selon lui indispensable pour s’attaquer aux causes profondes des conflits et construire une paix durable.  La Suisse partage son expertise en matière de paix, d’aide humanitaire et de développement, a-t-il ajouté, notant qu’elle collabore en ce sens étroitement avec les acteurs multilatéraux, régionaux et locaux en Afrique, cela en ligne avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Agenda 2063 de l’Union africaine.  Le représentant a expliqué qu’au Mozambique par exemple, la Suisse soutient un meilleur accès à la terre en renforçant le dialogue entre le gouvernement local, la société civile et le secteur privé.  Nous avons également intensifié la coopération entre la justice suisse et celle de certains États africains, notamment en République centrafricaine, a-t-il aussi indiqué avant de souligner le rôle de la société civile dans la consolidation de la paix.  Pour le représentant, le Conseil de sécurité et l’ONU se doivent de soutenir les capacités des organisations régionales et sous-régionales en matière de consolidation de la paix, le Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité étant, selon lui, une bonne pratique qui favorise une coopération étroite.  Concernant le financement de la consolidation de la paix, il a rappelé que la Suisse compte parmi les 10 principaux donateurs du Fonds du même nom. 

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a rappelé la contribution de son pays au renforcement des capacités nationales notamment à travers le Forum d’Assouan pour la paix et le développement et le Centre africain pour la promotion de la consolidation de la paix en Afrique, qui est basé au Caire.  Au niveau international et dans le cadre de l’ONU, l’Égypte accorde une grande importance au renforcement des capacités et des institutions nationales, a assuré le représentant. Il a appelé le Conseil de sécurité à accorder la priorité aux questions africaines et s’efforcer de régler les conflits en Afrique « sans polarisation et sans prise en compte d’intérêts étroits ».  Cela nuit à la capacité du Conseil d’être à la hauteur de ses responsabilités, a-t-il mis en garde.  Il a recommandé que le Conseil de sécurité appuie les institutions des États et prenne en compte la dimension régionale de la consolidation de la paix ainsi que les dimensions transfrontières, en vue d’avoir une démarche globale et holistique notamment dans la lutte contre le terrorisme. L’Égypte encourage la communauté internationale à fournir un financement durable à la consolidation de la paix, notamment à travers les quotes-parts au budget de l’ONU, a-t-il ajouté.  Le représentant a également souligné l’importance de la coordination des efforts nationaux et régionaux et de la coopération entre l’ONU et l’UA pour apporter le soutien nécessaire aux outils de paix africains.

M. OSUGA TAKESHI (Japon) a attiré l’attention sur les travaux de la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique, qui regroupe la Commission de l’Union africaine, l’ONU, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et la Banque mondiale.  Il a ainsi noté que, depuis 2003, la Conférence se penche sur la consolidation de la paix et les causes profondes des conflits en vue d’empêcher leur récurrence et de réaliser le développement durable.  Le représentant a appelé à soutenir les efforts menés par l’Afrique pour la prévention des conflits et la consolidation de la paix, estimant que le renforcement des institutions doit être une priorité pour apporter la stabilité dans les pays touchés par un conflit.  Renforcer les capacités est également nécessaire au niveau des individus, a-t-il ajouté.  Sur ce dernier point, il a expliqué qu’en 2013 le Premier Ministre de l’époque, Shinzo Abe, avait lancé, dans le cadre de la Conférence, l’Initiative africaine d’éducation commerciale pour les jeunes.  Celle-ci, grâce à des bourses et des stages, autonomise les jeunes Africains, qui, demain, contribueront au développement industriel en Afrique, a-t-il dit, précisant qu’en 2021, environ 1 500 jeunes Africains ont participé à ce programme.  Enfin, le représentant a estimé qu’en matière de financement du développement, « la transparence est la clef » ainsi que le respect des règles et normes internationales.  Pour promouvoir des partenariats efficaces, a-t-il encore déclaré, nous devons tirer pleinement parti de la Commission de consolidation de la paix.

Pour Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud), la pandémie de COVID-19, les tensions géopolitiques et les conflits ont aggravé les problèmes de capacités et dès lors les chances de lutter efficacement contre la pauvreté, les inégalités et le sous-développement des pays du continent africain.  À cela se sont ajoutés les problèmes en ressources humaines, en financements et dans les institutions publiques.  La représentante a estimé que la question du renforcement des capacités doit être envisagée de manière assez générale, au-delà des capacités nationales, prônant l’exploration de mesures plus pratiques pour promouvoir et avancer sur la voie du développement économique durable dans les pays touchés par les conflits, qui sortent de conflits ou qui sont en transition.  Elle a aussi souligné le rôle des partenariats pour garantir la réalisation des ODD.  

Concernant la consolidation de la paix, elle a estimé que le secteur privé devrait jouer un rôle accru, notamment sur le plan de la résilience économique.  Elle a ajouté que le renforcement des capacités va de pair avec l’appropriation nationale et l’inclusion des femmes et des jeunes.  Elle a aussi plaidé pour que soit reconnu et soutenu le rôle de l’UA et d’autres organisations régionales dans le domaine du renforcement des capacités au service de la paix.  L’UA est importante pour la promotion de la bonne gouvernance, la transformation démocratique et économique ainsi que pour l’édification d’une paix durable, de la justice, de la réconciliation et de la cohésion sociale, a estimé la représentante.  Elle a en outre conseillé de créer des synergies entre l’UA et l’ONU en matière de renforcement des capacités grâce à l’harmonisation des activités menées sur le continent.  Enfin, la représentante a demandé des financements adéquats, prévisibles et durables pour les activités de consolidation de la paix en Afrique en puisant dans le budget ordinaire de l’ONU. 

M. MOHAMED ENNADIR LARBAOUI (Algérie) a souligné les grandes avancées des pays membres de l’UA en termes de renforcement des capacités nationales, tout en notant que les défis nécessitent davantage d’appuis adéquats pour traiter les causes profondes et multidimensionnelles des conflits.  Dans ce contexte, il a appelé à mettre l’accent sur les structures économiques et celles garantissant une bonne gouvernance.  L’accompagnement de l’ONU, a-t-il recommandé, devrait se baser sur des projets et des programmes de formation, assortis de ressources nécessaires pour la réalisation du Programme 2030 et de l’Agenda 2063 de l’UA.  Le représentant a appelé à prendre en compte les défis sécuritaires en Afrique avant d’encourager un renforcement de la coopération UA-ONU tout en associant les organisations sous-régionales aux efforts de règlement des conflits.  L’Algérie, qui est convaincue de l’importance primordiale des programmes de renforcement des capacités de l’Afrique, œuvre sans relâche pour partager son expérience nationale, a indiqué le représentant, notamment dans les domaines de la médiation et de la lutte contre le terrorisme.  Par ailleurs, dans le domaine du développement économique, il a indiqué que l’Algérie n’a épargné aucun effort pour une « vision prospective continentale », notamment l’autoroute transsaharienne.  En conclusion, le représentant s’est dit convaincu que l’Afrique est en mesure de renforcer ses propres capacités et de mettre en œuvre des objectifs de développement durable, « avec le soutien requis ».

M. JOONKOK HWANG (République de Corée) a rappelé les défis auxquels est confronté le continent africain, en particulier les conséquences de la COVID-19 et l’insécurité alimentaire.  Pour les relever, le représentant a souligné l’importance du renforcement de capacités institutionnelles, le rôle de la Commission de consolidation de la paix (CCP) et du Fonds pour la consolidation de la paix, les partenariats entre les pays africains, les organismes des Nations Unies, l’Union africaine et les organisations régionales chargées du maintien de la paix.  Il a aussi mis l’accent sur la nécessité d’une approche inclusive, plaidant pour que soient entendues les voix des femmes, des jeunes et des populations marginalisées.  Le délégué a annoncé qu’en 2016, son pays avait donné 16 millions de dollars à des projets de renforcement de capacités médicales, notamment au Mali, et des articles médicaux pour l’AMISOM.  Le Gouvernement coréen qui a également fourni 16 hélicoptères, s’engage à honorer ses promesses, a insisté le délégué, qui a rappelé la tenue du sommet Corée-Afrique, en mars 2022, à Séoul, qui avait abouti à la Déclaration de Séoul et à l’adoption du Cadre d’intervention 2022-2026, lequel met l’accent sur le renforcement des capacités médicales en Afrique, la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, et à aider l’Organisation africaine de coopération policière (AFRIPOL).

M. MATEUSZ SAKOWICZ (Pologne) a d’abord tenu à appuyer le travail du Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix, lequel s’est avéré être un outil efficace pour aborder la consolidation de la paix et répondre aux défis afférents de façon holistique.  La Pologne reste pleinement attachée à soutenir politiquement et financièrement le Fonds, a insisté le représentant.  Il a par ailleurs souligné, en évoquant le contexte postcolonial persistant en Afrique, que son pays est « particulièrement sensible à toutes les forme d’assujettissement violent et d’agression militaire illégale ».  C’est pourquoi il a appelé la Russie à abandonner son programme néocolonial et de mettre fin à « sa guerre insensée en Ukraine ».  Il a également fustigé la présence de mercenaires privés sur le continent africain, présence souvent liée à des violences brutales contre des civils.  Ces actions entravent les efforts de stabilisation entrepris par l’UE et ses États membres, y compris la Pologne, dont le personnel militaire participe aux missions de formation en République centrafricaine, a expliqué le représentant polonais. 

Pour M. THOMAS PETER ZAHNEISEN (Allemagne), il n’y a pas de solution unique pour la paix et la sécurité en Afrique et il faut prendre en compte la richesse du tissu social en Afrique et l’hétérogénéité du continent, en veillant à ce que les pays africains s’approprient.  Même s’il soutient l’approche des solutions africaines aux problèmes africains, le représentant a fait valoir que la communauté internationale devrait néanmoins soutenir le continent en termes de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix et en les finançant.  Il faut être ciblé et concret dans l’approche visant à soutenir l’Afrique, a estimé le représentant, en rappelant que l’Allemagne a alloué une enveloppe de 500 millions d’euros, faisant d’elle l’un des plus grands bailleurs de fonds bilatéraux de l’UA.  Elle a également mis en place de nombreux programmes de coopération dans le cadre de l’architecture pour la paix et la sécurité de l’UA qui portent, entre autres, sur l’intégration des femmes à ces efforts.  Dans la région du lac Tchad, l’Allemagne a établi un partenariat avec le PNUD pour soutenir les efforts des acteurs locaux pour la paix, a rappelé le représentant en soulignant le rôle des communautés locales à cet égard.  Puis il a encouragé la gestion intégrée des frontières.  Pour ce qui est de l’insécurité alimentaire en Afrique, aggravée par la crise en Ukraine, il a estimé qu’il fallait venir en aide aux pays africains les plus touchés.  Partageant le point de vue du Ghana selon lequel les initiatives pour la paix en Afrique ne sont pas assez accompagnées, le représentant a encouragé l’UA à veiller à ce que les opérations de maintien de la paix des Nations Unies en Afrique soient dotées de ressources et de moyens suffisants.

M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne, a rappelé que l’UE et ses États membres comptent parmi les principaux contributeurs au Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix, fournissant plus de 60% du financement de ce mécanisme.  Il a néanmoins souligné la nécessité d’améliorer les résultats en matière de consolidation de la paix « avec des ressources qui restent encore limitées », l’accent devant être mis sur le renforcement de la coopération et des synergies entre les acteurs clefs de la consolidation de la paix tels que l’ONU, l’UE, les institutions financières internationales et les mécanismes régionaux de développement.  Il a dit attendre avec intérêt les prochaines négociations sur le financement de la consolidation de la paix, facilitées à l’ONU par le Kenya et la Suède et qui représentent selon lui une opportunité d’améliorer la durabilité et prévisibilité du financement de la consolidation de la paix, notamment par l’apport de mises en recouvrement.  Par ailleurs, le représentant a réitéré la position de l’UE en matière de sécurité et de développement, à savoir qu’atteindre une paix durable exige de s’attaquer aux freins à l’essor économique et social et de combattre de façon coordonnée la pauvreté, les inégalités et les effets des changements climatiques.  Pour lui, la Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Agenda 2063 de l’Union africaine sont les cadres de choix dans lesquels renforcer les capacités des États pour pérenniser la paix en Afrique.  Abordant les conséquences dramatiques sur la sécurité alimentaire de l’« agression russe contre l’Ukraine », M. Gonzato a indiqué que l’UE, par le biais de son plan d’aide au développement, l’initiative Global Gateway, soutient plus activement que jamais un développement durable et des systèmes alimentaires résilients en Afrique, cela en investissant dans les énergies renouvelables, l’éducation et la formation.

M. ADAM KUYMIZAKIS (Malte) a dit attacher une grande importance à la participation pleine, égale et significative des femmes, ainsi que l’implication cruciale des jeunes, dans le rétablissement de la paix.  À cet égard, il a reconnu l’importance des organisations régionales et sous-régionales, qui font partie intégrante du système multilatéral et qui offrent une contribution significative, en raison de leur connaissance unique de leur région et de son histoire.  Pour le représentant, on ne peut parler de paix et de sécurité sans parler de développement.  Selon lui, les priorités de développement durable devraient viser à mettre en place des cadres politiques et des institutions fiables, solidifiés par des investissements dans la connectivité, la technologie numérique et les infrastructures.  Il a dit que Malte est fière de soutenir l’initiative Global Gateway de l’UE, qui vise à mobiliser jusqu’à 300 milliards d’euros d’investissements entre 2021 et 2027, ainsi que les engagements pris au niveau de l’UE au cours du dernier sommet UE-UA de février.  Ces efforts sont pleinement alignés sur le Programme 2030, a-t-il fait valoir.  Enfin, le délégué a estimé que tout renforcement des capacités en matière de paix et sécurité doit intégrer la nécessité d’avoir des mécanismes pour l’alerte, la réponse précoce et la prévention.

Mme ANA PAULA BAPTISTA GRADE ZACARIAS (Portugal) a dit que pour aider l’Afrique à surmonter ses défis multiples, il faut donner la priorité à la prévention des conflits, la protection des droits humains et la réalisation du Programme 2030.  Le Portugal reste un partenaire de l’Afrique en participant à trois missions de maintien de la paix et à huit missions dans le cadre de l’Union européenne, a dit la déléguée qui a aussi parlé de la coopération bilatérale de son pays par des programmes de renforcement des capacités des forces de défense et de sécurité, en particulier la sécurité maritime dans le golfe de Guinée.  Cette coopération appuie le renforcement des capacités institutionnelles conformément aux priorités nationales dans des domaines tels que la bonne gouvernance et les droits humains, a-t-elle ajouté avant de faire valoir la contribution du Portugal au Fonds pour la consolidation de la paix qui doit être financé de manière prévisible et durable. 

La représentante a également mis l’accent sur l’importance de la coopération avec l’UA et les organisations régionales qui apportent des connaissances des causes des conflits et permettent de garantir la participation des populations locales en promouvant la confiance, le dialogue et le partenariat.  Elle a encouragé le Conseil à poursuivre le débat sur les financements prévisibles, durables et souples pour les missions de maintien de la paix.  Selon elle, la clef de la pérennisation de la paix se trouve dans une approche inclusive des femmes, des jeunes et de la société civile dans tous les domaines des droits humains, de la démocratie, de l’état de droit et de la bonne gouvernance, et l’appui aux systèmes judiciaires.  Elle a demandé de lutter contre l’extrémisme violent en Afrique et de renforcer le respect des droits humains, la résilience climatique et la création d’emplois. 

M. CRISTIAN ESPINOSA CAÑIZARES (Équateur) a regretté que les contributions volontaires au Fonds pour la consolidation de la paix restent insuffisantes, ce qui rend d’autant plus louables les efforts du Secrétaire général des Nations Unies pour promouvoir la mobilisation de ressources répondant aux besoins sur le terrain.  Il a ajouté que la discussion tenue pendant ces deux jours devra compléter le dialogue spécial de haut niveau organisé le 20 juillet par les présidents de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social sur « L’Afrique que nous voulons ».  Les résultats de nos discussions doivent s’agréger et êtres mis au service de synergies intégrées, a-t-il dit.  Au Conseil, il a demandé qu’il s’exprime sur la mise en œuvre de l’Initiative céréalière de la mer Noire.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a déclaré que le renforcement des capacités africaines est fondamental pour la formation des États en Afrique et nécessaire pour édifier des États efficaces, capables de créer l’unité, la cohésion, la démocratie, la paix et le développement.  Il a notamment recommandé plus de coopération dans la lutte contre le terrorisme, un fléau qui érode les structures de nombreux pays africains, y compris le Mozambique.  Pour cela, il faut des approches intégrées et inclusives, un financement durable, un engagement robuste et une coordination efficace à tous les niveaux entre les acteurs nationaux, régionaux et internationaux, a estimé le représentant.  Le renforcement des capacités pour une paix durable doit viser à affirmer ou rétablir les capacités des États et leur permettre d’accomplir leurs tâches fondamentales pour la population, a ajouté M. Comissário Afonso. 

Le délégué a énuméré les priorités identifiées par le Mozambique pour réaliser la consolidation de la paix en Afrique: la promotion des investissements et du développement social et économique, l’investissement dans les ressources humaines et dans les infrastructures, la recherche de solutions africaines aux problèmes africains, le renforcement des flux d’aide publique au développement et la réponse aux besoins immédiats des États en phase postconflit pour éviter tout retour en arrière.  Le représentant a souhaité voir plus de cohérence et de coordination dans les efforts de consolidation de la paix, en particulier dans la mise en œuvre du cadre de partenariat UA-ONU de 2017, et de cadres de développement à l’horizon 2063 et 2030.  

M. RICHARD ARBEITER (Canada) a souligné que la transition pacifique du Libéria, les efforts de l’Union africaine pour améliorer l’alerte précoce et le travail inlassable des réseaux de la société civile dans tout le Sahel ne sont pas seulement des « solutions africaines aux problèmes africains ».  Ce sont des exemples qui inspirent pour mieux prévenir les conflits et maintenir la paix.  Une paix durable se construit lorsque nous reconnaissons et traitons les liens inhérents entre les droits de la personne, le développement durable, la paix et la sécurité, a-t-il expliqué.  Citant le Président de la CCP, le représentant a dit qu’il faut mettre en place des institutions efficaces, responsables et inclusives qui rendent la justice, protègent et promeuvent les droits de la personne et s’attaquent à toutes les formes de discrimination, d’exclusion et d’inégalité susceptibles de donner lieu à un conflit.  Le renforcement des capacités, a-t-il ajouté, signifie investir dans les efforts locaux et les appuyer, plutôt que d’importer puis d’exporter un savoir-faire extérieur.  Le représentant a estimé que les équipes exclusivement étrangères qui conçoivent des infrastructures ou servent de médiateurs dans des conflits prolongés en Afrique ou ailleurs sont des signes avant-coureurs de problèmes à venir. 

Saluant les exemples d’appropriation, comme au Libéria, en Sierra Leone et en Gambie, le représentant a toutefois constaté que plusieurs de ces partenariats auparavant positifs sont mis à rude épreuve, car certains gouvernements entreprennent des actions qui risquent de saper la capacité de l’ONU à soutenir leurs efforts pour maintenir la paix.  Parmi les actions urgentes à mener, il a demandé d’améliorer l’accès à un financement adéquat pour les femmes bâtisseuses de la paix, de faire entendre la voix de celles-ci et de faire face aux niveaux croissants de violence à leur encontre.  Le Canada travaille en étroite collaboration avec la Commission de l’UA à cet égard, notamment par le biais d’une subvention de 10 millions de dollars sur cinq ans qui aidera à renforcer la capacité institutionnelle de l’UA en matière d’égalité des sexes, ainsi qu’à accroître la participation des femmes aux efforts de consolidation de la paix, d’alerte rapide et de médiation.  Enfin, le représentant a souligné la nécessité de partenariats durables dans la lutte contre les changements climatiques, la COVID-19 et l’insécurité alimentaire croissante. 

M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark), au nom des pays nordiques, a assuré que la Finlande, l’Islande, la Norvège, la Suède et son pays continueront de renforcer leur coopération avec les organisations régionales, notamment l’Union africaine (UA).  Notre soutien se concentre sur une formation adéquate, le renforcement des capacités et des équipements et l’appui logistique et financier aux opérations de paix de l’UA, a-t-il expliqué.  Il a également invité les États Membres à honorer leurs engagements au titre du « Fonds pour la paix de l’Union africaine » afin de rendre son financement prévisible et durable.  La lutte contre les violences sexuelles et basées sur le genre doit être au centre de notre travail pour assurer la paix et la sécurité internationales, a poursuivi M. Hermann.  Il a ajouté qu’il est en ce sens important d’impliquer plus activement la société civile aux efforts de paix en soutenant davantage les organisations locales de femmes. 

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a affirmé que « c’est l’Afrique qui sait le mieux » s’agissant des questions relatives à sa propre sécurité.  Ainsi, les pays du continent, en particulier ceux qui sont touchés par ces défis, sont les mieux placés pour identifier les solutions et aider à créer des voies durables de résolution des conflits.  Nous devrions donc accorder une plus grande attention aux priorités et processus pilotés par les Africains, a prôné le délégué.  Il a également relevé que les partenariats régionaux-mondiaux sont pertinents et permettent de surmonter les défis de la paix et de la sécurité.  Pour le représentant, les contributions et la coopération peuvent provenir de loin, y compris de petits pays.  En tant que membre de la CCP, la Thaïlande continuera à jouer son rôle en soutenant les efforts mondiaux et régionaux en faveur de l’Afrique, notamment en encourageant de plus grandes consultations et coordination entre le Conseil de sécurité, la CCP et le Conseil économique et social (ECOSOC), afin de mieux mobiliser les initiatives de renforcement des capacités et les ressources.  Enfin, son délégué a affirmé que le maintien de la paix ne sera viable qu’accompagnés de progrès dans le domaine du développement durable.  

M. MARCO ROMITI (Italie) est d’avis qu’investir davantage dans un dialogue stratégique entre le Conseil de sécurité et les organisations régionales et sous-régionales peut renforcer les dynamiques positives en Afrique.  Son pays, a-t-il dit, est prêt à soutenir et à investir dans les programmes et initiatives considérés comme essentiels par le Conseil de sécurité de l’ONU et l’UA pour maintenir la paix et la stabilité sur le continent.  L’Italie est favorable à l’utilisation des contributions fixées par l’ONU pour les opérations de paix sous conduite africaine, à condition que les normes appropriées soient respectées.  Le représentant a également mis l’accent sur le potentiel de la CCP pour surmonter certaines dynamiques difficiles au sein du Conseil de sécurité, dans l’intérêt de la paix et de la sécurité en Afrique.  L’Italie, a-t-il relevé, soutient les pays africains par le biais de programmes d’assistance directe et de renforcement des capacités, avec un accent sur l’égalité des sexes, la jeunesse et la création d’emplois à tous les niveaux.  Le représentant a assuré que les initiatives italiennes sont lancées en coordination avec les autorités locales, et en accordant une attention particulière à l’appropriation nationale et aux priorités identifiées par ses partenaires.

M. PHILIPPE KRIDELKA (Belgique) a constaté que l’appropriation par les pays africains et par leurs organisations régionales des efforts en matière de maintien de la paix n’a cessé de croître dernièrement.  Il est essentiel que la collaboration en matière de renforcement des capacités soit pilotée par et pour les Africains.  La Belgique, a dit le représentant, apporte son soutien à la formation de l’armée nigérienne, tout en s’efforçant de contribuer à la paix durable dans l’est de la RDC.  Il a également mis l’accent sur l’appropriation nationale des processus de réforme du secteur de la sécurité et le respect des droits humains dans le cadre des efforts de renforcement des capacités et de la lutte contre l’impunité dans le domaine de la justice transitionnelle en particulier.  Le délégué a vu dans la nomination d’une juge belge pour siéger à la Cour pénale spéciale en République centrafricaine depuis mai 2021 une illustration des priorités de son gouvernement.  Enfin, pour que la paix soit durable, elle doit inévitablement passer par l’établissement des responsabilités pour les violations des droits humains et les crimes les plus graves, un aspect crucial pour restaurer la confiance de la population dans les institutions, a précisé le représentant en conclusion.  

M. MARK ZELLENRATH (Pays-Bas) a déclaré, concernant le financement de la consolidation de la paix, que son pays soutient les négociations, facilitées par la Suède et le Kenya à la Cinquième Commission, sur une résolution à ce sujet et qui devrait être adoptée cet automne par l’Assemblée générale.  Il a également appelé les États à appuyer le Fonds pour la consolidation de la paix, un des instruments propices à la mise en œuvre d’un financement durable des activités onusiennes de consolidation de la paix et de prévention des conflits.  Le représentant a en outre estimé que renforcer les capacités pour pérenniser la paix exige l’inclusion de toutes les composantes des populations africaines concernées, en particulier celle des femmes et des jeunes aux processus de paix.  Après avoir souligné l’importance d’améliorer la coordination des efforts de l’ONU et de l’Union africaine en matière de dialogue politique et de réconciliation, le représentant a jugé essentiel d’accompagner les sociétés africaines sur la voie de la résilience, cela pour leur permettre de résister aux défis auxquels le continent est confronté, notamment la crise alimentaire provoquée par l’agression « injustifiée et brutale » de la Russie contre l’Ukraine. 

M. OMAR KADIRI (Maroc) a invité la communauté internationale à soutenir le leadership des pays africains dans le cadre du maintien de la paix en Afrique.  Il est nécessaire d’aborder une approche holistique, incluant tous les acteurs, afin de renforcer les capacités des pays africains dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité, a-t-il recommandé.  Il a insisté sur le besoin d’un financement pérenne pour renforcer le développement et la sécurité.  Il a rappelé l’appel du Secrétaire général pour une contribution de 100 millions de dollars par an au Fonds de consolidation de la paix.  Le représentant a aussi souligné l’importance de financer, avec des fonds statutaires, les opérations de maintien de la paix qui ont lieu en Afrique et qui ont reçu l’aval du Conseil de sécurité.

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a salué les contributions des organisations régionales africaines à une « Afrique pacifique et sûre » et souligné la nécessité de solutions africaines aux problèmes africains.  Alors que l’UA et d’autres organisations sous-régionales sont les mieux placées pour répondre aux besoins des États africains, une coopération renforcée entre l’UA et l’ONU ainsi que l’UA et l’UE pourrait permettre aux États africains de renforcer leurs capacités de prévention des conflits en mettant l’accent sur une forte composante genre, a fait valoir le représentant.  La communauté internationale doit assurer un financement prévisible et flexible qui permettra l’utilisation et le renforcement des capacités formelles et informelles de consolidation de la paix qui existent déjà sur le continent, et, a-t-il souligné, les approches sur mesure jouent ici un rôle essentiel.  

Indiquant que près de 30% de l’aide humanitaire slovène est consacrée à des activités postconflit, et que la majorité de cette somme se concentre sur la consolidation de la paix, le soutien aux femmes et aux enfants et la réhabilitation postconflit, le représentant a précisé que ces activités sont en outre complétées par le renforcement de la résilience et l’action préventive.  La Slovénie serait heureuse d’apprendre et de partager ses connaissances et expériences avec ses partenaires africains, a-t-il déclaré.  Avant de conclure, il a espéré que des débats comme celui-ci pourront renforcer la confiance entre États Membres, ainsi qu’entre les États Membres et le système des Nations Unies.  Préoccupé par l’impact des fausses nouvelles sur ces relations, il a appelé à faire davantage pour relever les défis de la désinformation.  La communauté internationale doit aussi intensifier sa lutte contre le terrorisme en Afrique, a-t-il conclu.

M. TAYE ATSKESELASSIE AMDE (Éthiopie) a déclaré que la réalisation du potentiel économique de l’Afrique est la meilleure politique sécuritaire pour le continent.  La réduction de la pauvreté et l’élargissement des possibilités pour la population du continent sont une stratégie efficace pour prévenir les conflits et maintenir la paix.  À cette fin, une coopération réelle à l’appui des priorités nationales est primordiale, a estimé le représentant, citant aussi l’importance de la coopération interafricaine dans les domaines du renforcement des institutions, de la formation des personnels et du partage du renseignement.  Les États africains doivent déterminer librement, en toute souveraineté et en toute liberté, leurs institutions politiques. 

Le représentant a récusé les efforts obligeant les pays africains à choisir un bloc pour développer leurs propres capacités.  Il a aussi demandé au Conseil de s’opposer aux mesures coercitives unilatérales qui compromettent la capacité des États à assurer la paix et la sécurité.  Il a attiré l’attention sur l’Architecture africaine de paix et de sécurité de l’UA, qui a besoin de ressources nécessaires à la mise en œuvre des décisions prises dans les domaines de la prévention des conflits, du rétablissement de la paix, des opérations d’appui à la paix, de la consolidation de la paix et de la reconstruction après les conflits.  Le Conseil doit combler le déficit de capacité de l’architecture, a plaidé le représentant éthiopien.

M. CLAVER GATETE (Rwanda) a déclaré que son pays, fort de l’expérience du relèvement post-génocide, est convaincu que la réforme du secteur de la sécurité, soutenu par la communauté internationale, est essentielle pour garantir rapidement que les institutions nationales de sécurité mais aussi de développement sont prêtes à la reconstruction.  L’inclusion de la population aux efforts de paix et de développement n’est possible que si celle-ci a confiance dans ces institutions, a-t-il ajouté.  Le représentant a également souligné l’importance d’associer la société civile et les partenaires régionaux et internationaux à la conduite des programmes de désarmement, démobilisation, réintégration et réintégration (DDRR).  Après avoir souligné à son tour la nécessité de s’attaquer aux causes profondes des conflits, y compris socioéconomiques, M. Gatete a attiré l’attention sur la pertinence et l’efficacité des solutions propres aux États eux-mêmes et adaptées aux défis et besoins qu’ils sont les seuls à pouvoir identifier.  Le Rwanda doit sa renaissance à de telles solutions, a-t-il conclu. 

Pour M. LUKÁŠ PETER PRVÝ (Slovaquie), le maintien de la paix en Afrique est un défi qui doit être relevé de manière holistique.  Depuis de nombreuses années déjà, la Slovaquie considère la réforme du secteur de la sécurité comme l’un des éléments clefs d’une prévention efficace des conflits et de la reconstruction et stabilisation après un conflit réussies.  Il a noté que l’expérience directe de nombreuses missions et opérations de paix de l’ONU et de l’UA montre clairement qu’un processus de réforme du secteur de la sécurité inclusif et mené au niveau national peut progressivement traiter les causes profondes de l’insécurité et de la fragilité et créer un environnement propice au développement durable et à la paix.  En sa qualité de Coprésidente du Groupe d’Amis pour la réforme du secteur de la sécurité, la Slovaquie est fière de rappeler la réalisation réussie de deux manifestations, en 2014 et 2018 respectivement, qui étaient axées sur le cadre politique de l’UA pour la réforme du secteur de la sécurité dans le contexte de l’ONU, a rappelé le représentant.  Sous les auspices de l’ONU, de l’UA, de l’UE et de la Slovaquie, ces manifestations ont fourni une plateforme indispensable pour encadrer la discussion sur les différents aspects des cadres politiques pour les processus de réforme du secteur de la sécurité.  En outre, la réforme du secteur de la sécurité est directement liée à la protection des civils et à l’état de droit, a relevé M. Prvý, avant de rappeler qu’il s’agit de deux tâches essentielles qui font désormais partie intégrante de presque toutes les opérations de paix.

Mme FIONA WEBSTER (Australie) a dit que les efforts internationaux de renforcement des capacités devraient contribuer à soutenir les institutions africaines, afin de produire des résultats en matière de paix et de sécurité, et pour renforcer la démocratie et l’état de droit sur le continent.  L’Australie soutient fortement les processus inclusifs de consolidation de la paix, notamment avec l’implication des jeunes et des femmes, a-t-elle assuré.  La représentante a exhorté tous les États Membres à soutenir les travaux du Fonds pour la consolidation de la paix, notamment en versant des contributions volontaires.  Selon la déléguée, il est nécessaire de fournir des services plus flexibles, transparents, durables, ainsi que des ressources prévisibles, pour faciliter le passage à la prévention des conflits, au lieu d’une réponse aux crises.

M. TAREK LADEB (Tunisie) a constaté que malgré les efforts de l’ONU, les efforts nationaux et les initiatives de l’UA, plusieurs pays africains connaissent toujours des conflits et de l’instabilité.  Plusieurs facteurs et défis structurels vont à l’encontre de la pérennisation de la paix en Afrique, a-t-regretté en appelant à réfléchir à une démarche globale qui tienne compte de ces facteurs et des causes fondamentales des conflits sur le continent, y compris l’absence d’institutions de l’État dans certaines zones et l’impact de l’ingérence extérieure.  Pour le représentant, consolider la paix passe par le renforcement des institutions de l’État et par la résilience du continent.  Il a encouragé à développer des stratégie adéquates dans les domaines du développement et des droits humains, entre autres.  Il a aussi recommandé l’implication des populations locales, en particulier des femmes et des jeunes, dans les efforts de pérennisation de la paix.  En parallèle, il faut renforcer la coopération et les partenariats entre l’ONU et l’UA, y compris à travers des nouveaux mécanismes de financement des processus de paix, a-t-il ajouté.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a déclaré que puisque les États de la région ont la responsabilité souveraine d’assurer la sécurité et les besoins sociaux de leurs peuples, ils doivent avoir la capacité nécessaire pour répondre aux multiples préoccupations de ceux-ci.  Par conséquent, il est impératif qu’ils travaillent à des solutions efficaces en matière de sécurité et de défense, d’alerte précoce et de gestion des violences intercommunautaires, ainsi que de lutte contre la pauvreté et le chômage, entre autres, arguant que ces facteurs alimentent l’extrémisme violent et l’instabilité accrue sur tout le continent africain.  L’Union africaine et les organisations sous-régionales peuvent jouer un rôle fondamental à cet égard, a estimé le représentant, parce qu’elles sont mieux placées pour soutenir et conduire la prévention et le règlement des conflits en Afrique, dans le cadre d’une coopération avec l’ONU et les organisations internationales. 

Le représentant a souligné que l’escalade des conflits existants dans plusieurs pays africains a des conséquences meurtrières causées, entre autres, par la criminalité transnationale, le terrorisme et la prolifération des armes légères et de petit calibre.  Il a expliqué que les effets de ces problèmes ont été exacerbés davantage par l’existence d’espaces anarchiques propices aux activités illégales, à la corruption et aux flux financiers illicites.  Cela facilite le financement des insurrections et des rébellions et l’acquisition libre et facile d’armes par des groupes armés ou des agents non étatiques sur des marchés parallèles, a-t-il constaté.  M. Ndong Mba a également fait part de ses réserves par rapport aux régimes de sanctions qui visent certains pays africains, dont la République centrafricaine, et qui contribuent, selon lui, à l’instabilité, étant donné l’impossibilité ou la limitation du Gouvernement démocratiquement élu, en raison des sanctions imposées, d’acquérir des armes adéquates pour combattre les groupes armés qui déstabilisent le pays, alors que ces groupes armés peuvent le faire librement sur des marchés parallèles, les plaçant en position de force par rapport aux armées nationales des États visés par les sanctions.

M. SERHII DVORNYK (Ukraine) a dit que jusqu’au 24 février 2022, l’Ukraine avait contribué à cinq missions de maintien de la paix en Afrique.  Mais l’agression de la Russie a altéré la capacité du pays à tenir son engagement, a-t-il regretté.  L’invasion russe, a-t-il poursuivi, a conduit à une crise alimentaire dans les autres parties du monde y compris en Afrique qui est ainsi prise en otage par la guerre russe contre l’Ukraine.  Il s’est désolé que cela mette en danger la vie et la santé d’environ 400 millions de personnes dépendantes des exportations céréalières ukrainiennes.  « Tant que la Russie continue de faire revivre ses pratiques coloniales contre l’Ukraine, tant que les forces russes brûlent nos champs, bombardent nos fermes et nos entrepôts de céréales, tant qu’elles volent nos matériels agricoles, la menace de famine planera et les prix des denrées alimentaires augmenteront », a prévenu le représentant. 

Il a toutefois assuré que l’Ukraine reste déterminée à résoudre la crise alimentaire mondiale, voulant poursuivre ses efforts pour assurer la mise en œuvre de l’Initiative céréalière de la mer Noire.  Il a indiqué qu’à ce jour, 10 navires ont déjà quitté les ports ukrainiens.  Il est maintenant de la responsabilité des partenaires internationaux de veiller au respect par la Russie de ses obligations en matière de fonctionnement sûr du corridor céréalier, a-t-il commenté.  Le délégué a fait remarquer que la menace de la faim serait finalement éliminée si la guerre d’agression russe s’arrêtait et si le respect des principes de la Charte des Nations Unies était pleinement rétabli.  Selon lui, c’est la guerre menée par la Russie qui est la cause de l’insécurité alimentaire et non les sanctions qui ne sont qu’une réponse à l’agresseur pour le dissuader d’attaquer l’Ukraine.  Avant de conclure, le délégué a annoncé le lancement de la première Stratégie pour le développement des relations de l’Ukraine avec les États africains et la nomination d’un envoyé spécial pour l’Afrique.  Le Ministre ukrainien des affaires étrangères a prévu de se rendre dans les États d’Afrique subsaharienne, a-t-il ajouté.  Il a terminé en citant le Président Volodymyr Zelenskyy: « Notre tâche numéro un est maintenant de nous débarrasser de la menace de famine.  C’est pourquoi les efforts de la Russie pour revenir à la politique agressive du colonialisme doivent cesser. »

Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) a recommandé, pour atteindre et maintenir la paix et un cercle vertueux de développement, de faire des changements structurels au sein des pays afin de résoudre les problèmes tels que la pauvreté, l’exclusion et la marginalisation, de renforcer les services de santé et d’éducation, de réduire les inégalités et le manque d’opportunités, et de résoudre les problèmes de la faim, de la dégradation de l’environnement et du manque d’eau.  Une alliance entre l’Union africaine et les Nations Unies pour la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et du Programme 2030 contribuera à l’accélération du développement et la réduction des conflits en Afrique, a-t-elle assuré.  La représentante a aussi plaidé pour que les gouvernements prennent les mesures nécessaires en vue de mettre fin aux conflits internes, et pour que la communauté internationale mette l’accent sur la coopération et la coordination, des éléments indispensables pour faire de la paix une réalité.  Elle a enfin affirmé que les opérations de maintien de la paix de l’ONU sont des instruments essentiels pour atteindre l’objectif de maintien de la paix et de la sécurité internationales.  La présence active de l’Argentine dans ces missions est une manifestation claire de son engagement envers cette approche, a-t-elle fait remarquer.

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a souligné le rôle déterminant des missions de maintien de la paix pour le renforcement des capacités en Afrique.  Le continent africain a accueilli jusqu’à présent la plupart des opérations de maintien de la paix, soit plus de 30 missions depuis 1960, a-t-il rappelé, ajoutant qu’à l’heure actuelle, plus de 6 500 soldats de la paix du Bangladesh sont déployés dans six missions de maintien de la paix en Afrique.  Ces Casques bleus ont notamment protégé les civils, créé des conditions propices à l’acheminement de l’aide humanitaire, construit des institutions nationales, en particulier dans le secteur de la sécurité, et soutenu les processus de paix en Afrique dans le cadre du mandat des opérations de maintien de la paix, a précisé le représentant.  En outre, l’Institut bangladais de formation aux opérations de soutien à la paix (BIPSOT) propose des cours de formation tels que le cours de commandant de contingent, le cours d’observateur militaire, le cours d’officiers d’état-major, le cours d’officiers de logistique, le cours sur les femmes et la paix et la sécurité, le cours sur la réforme du secteur de la sécurité, entre autres.  

Le délégué a en outre appelé à augmenter le financement programmatique des missions de maintien de la paix pour intensifier leurs activités de consolidation de la paix.  Il a encouragé le Conseil à prendre cela en considération lors de l’établissement des mandats des missions, non seulement pendant la transition mais aussi dès le départ.  Il a également mis en avant le rôle et la contribution des ONG et d’autres acteurs de la société civile dans le renforcement des capacités des autorités nationales et locales, ainsi que pour complémenter les priorités nationales dans le domaine du maintien de la paix, en citant le cas de BRAC, une grande ONG du Bangladesh qui œuvre en Afrique.  Le délégué a ensuite mis en exergue le rôle de la CCP dans le soutien aux priorités nationales de consolidation de la paix des pays et des régions.  Le rôle de rassembleur de la Commission devrait, selon lui, être mis à profit pour amener tous les acteurs à adopter une approche coordonnée pour le maintien de la paix en Afrique.

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