Conseil de sécurité: le Président du Comité 1591 sur le Soudan annonce le réexamen fin août de la résolution 2620 pour adopter des « mesures justes »
Le Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1591 (2005) concernant le Soudan a annoncé, cet après-midi, le réexamen fin août de la résolution 2620 (2022) avec pour objectif d’envisager des mesures justes et pertinentes en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain. De son côté, la délégation soudanaise a plaidé pour la levée des sanctions afin « d’aider le Soudan à avancer ».
Il ne s’agit pas de punir le Soudan mais d’appuyer la réalisation d’une paix pérenne conformément à la résolution 2620 (2022), avec pour objectif d’envisager des mesures justes et pertinentes pour riposter correctement à la situation au Darfour, a expliqué M. Harold Adlai Agyeman (Ghana), dans son exposé trimestriel au Conseil de sécurité. Le Président du Comité faisait le point sur le travail de celui-ci depuis le 29 mars.
Alors que le Comité a reçu le premier rapport trimestriel du Groupe d’experts et entendu son exposé sur son programme de travail pour la période 2022/2023, le coordonnateur lui a envoyé une vision d’ensemble de son travail d’enquêtes conformément à la résolution 2620. Dans son rapport, le Groupe d’experts a évoqué la mise en œuvre de l’accord de paix, les dynamiques régionales, le statut des groupes armés dans la région ainsi que les violences intercommunautaires et les signalements de violation des droits de la personne et du droit international humanitaire. M. Agyeman a attiré l’attention sur les différentes conclusions du rapport, notamment sur la poursuite de la mise en œuvre de l’accord de paix avec la formation d’environ 2 000 recrues pour les forces unifiées nécessaires.
De plus, le Groupe d’experts a fait connaître les derniers éléments concernant la situation sécuritaire au Darfour, notamment les faits de violence intercommunautaires et la situation dans l’ouest du Darfour, théâtre d’échauffourées en mars et en avril. Pour ce qui est du contexte régional, selon le Groupe d’experts, il est assez favorable au processus de paix au Darfour et tous les États voisins continuent d’appuyer la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba.
M. Agyeman a conclu son exposé en faisant part de la détermination du Comité de travailler avec le Soudan et tous les acteurs concernés. Cela n’a pas empêché la délégation du Soudan de critiquer les sanctions qui ne sont pas, à ses yeux, en cohérence avec la situation sur le terrain au Darfour. Selon le Soudan en effet, les affrontements communautaires n’enlèvent rien au fait qu’il existe une stabilité nouvelle. Il convient d’en tenir compte, a plaidé le délégué en faisant valoir que la réalité a changé depuis 2005, date à laquelle le régime de sanctions a été mis en place. « Aujourd’hui, cela n’est plus une source de préoccupation. » Il s’agit plutôt d’une situation à inclure, selon lui, dans la gestion des conflits et la consolidation et pérennisation de la paix.
La fin du mandat de la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUAD) est bien la preuve qu’il n’y a plus besoin d’une mission de protection des civils après la « révolution glorieuse » de 2018, a argué le représentant en se plaignant des conséquences négatives sur la sécurité nationale de l'embargo sur les armes.
Une position appuyée par la déléguée de la Fédération de Russie, pour qui les sanctions du Conseil de sécurité ont perdu de leur utilité et ne contribuent plus au processus politique. De plus, elles nuisent aux efforts entrepris par la région et le Gouvernement du Soudan, a relevé la déléguée. Ce n’est pas un hasard, selon elle, si le Gouvernement soudanais a appelé à plusieurs reprises, mais en vain, à la levée de l’embargo sur les armes. Elle y a vu surtout une pression politique et a dénoncé les conséquences malheureuses sur les Soudanais ordinaires. Pour finir, la déléguée a espéré que lors du processus de réexamen des mesures contre le Soudan, le 31 août prochain, le Conseil de sécurité arrivera à réaliser son objectif grâce à un dialogue constructif.
Abondant dans le même sens, le représentant la Chine a rappelé que la résolution 2620 appelle justement à la création d’indicateurs clairs et réalistes pour ajuster le régime de sanctions. Pour lui, après le retrait de la MINUAD, c’est désormais au Gouvernement du Soudan qu’il revient de garantir la protection des civils.
La délégation du Gabon a voulu reconnaître, en dépit des affrontements communautaires, une paix réelle et manifeste dans la plus grande partie du pays, où il n’y a plus d’affrontements entre les Forces armées soudanaises et les groupes armés qui sont hors du processus de paix. Le régime de sanctions ne « peut pas et ne dois pas se transformer en un remède plus nocif que le mal lui-même », a-t-il plaidé en pressant le Conseil d’examiner et d’ajuster les mesures applicables en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain.
De son côté, tout appuyant pleinement le processus de paix mené par les Soudanais pour résoudre la crise récente ainsi que la facilitation de ce processus par la MINUAD sous la houlette de l’Union africaine (UA)) et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), la déléguée des États-Unis a estimé que la situation au Darfour reste « volatile et dangereuse ». Elle met en péril, selon elle, le processus de paix.
Elle a donc appelé à mener rapidement des enquêtes pour traduire en justice les responsables de ces violences qui auraient causé le déplacement de 125 000 personnes. Elle a aussi plaidé pour la protection des civils et la réforme inclusive du secteur de la sécurité, avec en outre la création de mécanismes robustes de transmission de l’information et de suivi. Estimant que les forces soudanaises sont responsables au premier chef de la sécurité des civils, elle s’est désolée des grands retards dans la mise en œuvre de l’Accord de Djouba. Pour finir, elle a appelé les autorités soudanaises et les mouvements armés signataires à redoubler d’efforts et s’engager dans un processus de démobilisation.