Conseil de sécurité: la « fenêtre d’opportunité » pour la fin de la transition se referme, prévient le Représentant spécial pour le Soudan du Sud
Alors que la mise en œuvre de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud, signé en 2018, accuse du retard, la « fenêtre d’opportunité » pour la fin de la période de transition, censée s’achever en février 2023, est en train de se refermer, a averti, ce matin, le Représentant spécial pour ce pays devant le Conseil de sécurité, appelant les parties à s’entendre de toute urgence sur une « feuille de route », comme le demandent conjointement l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et l’ONU.
Cette feuille de route, a précisé M. Nicholas Haysom, qui est aussi Chef de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), devrait servir à réengager les parties à l’Accord revitalisé et à accélérer l’achèvement des tâches en suspens, notamment le déploiement des forces unifiées nécessaires, l’approbation des législations en souffrance sur le processus d’élaboration de la Constitution et sur les élections nationales, en plus des réformes attendues en matière de sécurité, de justice et de finances. S’agissant des élections, le Représentant spécial a plaidé pour un environnement politique propice qui permette d’organiser un scrutin libre, équitable et transparent. Il a également souhaité que la communauté internationale s’implique davantage en apportant un soutien ciblé aux tâches transitoires prioritaires.
Tout en saluant quelques avancées, telles que l’Accord du 3 avril sur la structure de commandement conjoint des forces unifiées nécessaires et la formation de la législature de transition au niveau national et des États, M. Haysom s’est alarmé de l’ampleur des conflits infranationaux, qui s’étendent dans tout le pays, accompagnés de violences, notamment sexuelles, contre des civils. Il s’est félicité des mesures prises par le Gouvernement pour établir des commissions d’enquête et a indiqué que la MINUSS menait ses propres investigations indépendantes. Si l’on assiste à une baisse notable du nombre de victimes civiles par rapport à l’an dernier, les données montrent que 80% d’entre elles sont attribuées à la violence intercommunautaire, a-t-il indiqué, non sans rappeler que la responsabilité première de protéger les civils incombe au Gouvernement.
S’agissant de la crise humanitaire que connaît le pays, M. Haysom a mis en garde contre la baisse des ressources nécessaires pour venir en aide aux millions de personnes dans le besoin. Actuellement, seulement 26% du plan de réponse humanitaire de 1,7 milliard de dollars ont été reçus, a-t-il déploré, avant d’exhorter la communauté des donateurs à ne pas perdre de vue le Soudan du Sud. Un appel repris par la Directrice par intérim de la Division des opérations et de la sensibilisation du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), qui a averti que 8,3 millions de personnes feront face à une grave insécurité alimentaire pendant la période de mai à juillet, dont 2,9 millions à des niveaux d’urgence et 87 000 à des niveaux catastrophiques.
Notant en outre qu’au moins un demi-million de personnes seront probablement touchées par des inondations cette année, Mme Ghada Mudawi a relevé que plus de deux millions de personnes restent déplacées à l’intérieur du pays, tandis que plus de 2,3 millions de Sud-Soudanais sont des réfugiés. Pour permettre à ces personnes de rentrer chez elles, elle a appelé les autorités sud-soudanaises à régler les problèmes de sécurité, de gestion du foncier et de manque de services de base, tout en suggérant de transformer progressivement des sites de déplacés internes en lieux d’installation permanents.
De son côté Mme Merekaje Lorna, défenseuse des droits de l’homme et militante des droits civils, s’est inquiétée du manque d’engagement des parties à mettre pleinement en œuvre l’Accord de paix de 2015, qui vient à échéance dans quelques mois, estimant que certains de ses « éléments essentiels » ne sont pas appliqués. Elle a appelé à cet effet à accroître la pression sur les parties et exhorté les garants de l’Accord de paix à soutenir le peuple du Soudan du Sud dans l’élaboration d’une feuille de route concrète pour le pays. De surcroît, elle a exhorté le Conseil de sécurité à envisager l’implication de l’ONU dans l’organisation et la conduite des élections.
Dans ce contexte, le Soudan du Sud a rappelé à son tour que, dans huit mois, la période intérimaire et l’Accord revitalisé prendront fin. Dans l’intervalle, aucune partie ne doit prendre de décision unilatérale qui risquerait d’entraîner des conséquences négatives sur la stabilité du pays, et cela concerne également la communauté internationale, a-t-il plaidé en appelant de ses vœux des consultations étroites entre toutes les parties à l’Accord. Au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), le Ghana a invité les parties à mener un dialogue inclusif pour s’entendre, entre autres priorités, sur la tenue d’élections, tout en réitérant son appel à un soutien financier international en faveur du Soudan du Sud.
Si la France a fait valoir que les arrangements sécuritaires sous-tendent l’application du processus de paix, notamment la tenue d’élections, et font partie des critères de révision de l’embargo sur les armes, la Chine a, elle, souhaité que cet embargo soit levé au plus vite et que les sanctions ne soient plus utilisées comme des moyens de pression politique. En appui de cette position, soutenue également par l’Inde, la Fédération de Russie a dénoncé les sanctions unilatérales « illégales » que lui imposent des pays occidentaux et qui, selon elle, causent d’énormes dommages au commerce alimentaire mondial. À ce propos, elle a rejeté catégoriquement les accusations selon lesquelles l’ « opération militaire spéciale » de la Russie en Ukraine serait la cause principale de la crise alimentaire au Soudan du Sud.
S’adressant aux deux membres permanents du Conseil qui « s’opposent aux sanctions de façon habituelle » et « minent nos capacités à utiliser l’arme des sanctions », les États-Unis ont souhaité que Russes et Chinois gardent à l’esprit le « coût humain » de cette attitude. À l’instar d’une majorité de délégations, ils ont également salué le déploiement rapide des forces de la MINUSS pour restaurer le calme dans l’État de l’Unité, où des crimes atroces ont été commis. Ceux qui sont impliqués dans la planification et la commission de tels actes peuvent être soumis à des sanctions de l’ONU, ont averti les États-Unis.
RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD (S/2022/468)
Déclarations
M. NICHOLAS HAYSOM, Représentant spécial et Chef de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), a tout d’abord estimé que la « fenêtre d’opportunité » pour la fin de la période de transition au Soudan du Sud, qu’il avait évoquée lors de son précédent exposé devant le Conseil de sécurité, est en train de se refermer. Il s’est toutefois félicité qu’après le retrait de l’opposition des mécanismes de sécurité transitoire fin mars, les parties aient réussi à sortir de cette impasse pour parvenir à un accord décisif, le 3 avril, sur la structure de commandement conjoint des forces unifiées nécessaires. Il a également salué la formation de la législature de transition reconstituée, au niveau national et des États, jugeant préférable que les différences politiques soient combattues au Parlement plutôt qu’à l’extérieur. Il a d’autre part souhaité que la prorogation du Comité chargé des mandats de la Commission constitutionnelle nationale permettra l’examen de la loi sur les élections nationales et s’est réjoui qu’après neuf mois de retard, le budget national pour 2021-2022 ait été voté. Il a encouragé le Gouvernement à présenter sans tarder le budget 2022-2023 pour son approbation rapide.
Dans les mois à venir, a poursuivi M. Haysom, les dirigeants du Soudan du Sud doivent s’engager de manière visible à honorer leurs responsabilités en vertu de l’Accord de paix et à prendre les étapes nécessaires pour que le pays sorte de la période de transition. Il a donc dit attendre des parties qu’elles se mettent d’accord sur une feuille de route, comme demandé conjointement par l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et l’ONU. Cette feuille de route, a-t-il précisé, devrait servir à réengager les parties à l’Accord de paix revitalisé et aborder l’achèvement des tâches en suspens, notamment le déploiement des forces unifiées nécessaires, l’approbation des législations en attente sur le processus d’élaboration de la Constitution et sur les élections nationales, en plus des réformes en matière de sécurité, de justice et de finance. S’agissant des élections, le Représentant spécial a plaidé pour un environnement politique propice, qui permette d’organiser un scrutin transparent. Selon lui, la feuille de route offre également un point d’entrée à la communauté internationale pour apporter un soutien ciblé aux tâches transitoires prioritaires.
Le Chef de la MINUSS s’est ensuite alarmé de l’ampleur des conflits infranationaux, qui s’étendent désormais du nord au sud et d’est en ouest. Dans l’est et dans les États de l’Équatoria-Central, d’Unité, de Ouarrap et de Jongleï, ainsi que les zone administratives d’Abyei, des violences, y compris sexuelles, ont été perpétrées contre des civils, alimentant un cycle de vengeance, a-t-il indiqué, avant de saluer les mesures prises par le Gouvernement pour établir des commissions d’enquête.
La MINUSS, qui fournira un soutien logistique dans plusieurs cas, a déjà mené ses propres enquêtes indépendantes sur le conflit de Leer, qui a révélé d’horribles violations des droits de l’homme par des jeunes armés venant des comtés de Koch et Mayendit, a précisé M. Haysom, relevant que, cette année, plus de 80% des victimes civiles avaient été attribuées à la violence intercommunautaire et aux exactions de milices, ce qui entrave la réconciliation. Il s’est toutefois félicité de la baisse du nombre de victimes civiles par rapport à l’an dernier. Dans ce contexte, la MINUSS doit maintenir ses efforts de prévention et d’intervention. C’est pourquoi, a-t-il expliqué, elle s’emploie à être de plus en plus mobile, même dans des conditions de terrain et météorologiques difficiles. Alors que le déploiement des bases opérationnelles temporaires offre à court terme des « sanctuaires de paix », il importe que la Mission puisse se déployer rapidement là où les besoins sont le plus grand. Toutefois, nous ne pouvons pas être partout, a concédé M. Haysom, qui a rappelé que la responsabilité première de protéger les civils incombe au Gouvernement.
M. Haysom a confirmé que la vision stratégique triennale demandée par le Conseil de sécurité reste le cadre des efforts intégrés de la MINUSS. En plus des travaux liés à la protection des civils, la Mission a soutenu le renforcement de la chaîne judiciaire et la promotion de la responsabilité, a-t-il précisé. La Mission contribue par ailleurs au renforcement de l’état de droit en soutenant la police de proximité et les tribunaux spéciaux mis en place dans plusieurs États. De plus, dans quatre « points chauds », à savoir l’État d’Unité, l’Équatoria-Central, Jongleï -Zone administrative de Pibor, et Bahr el-Ghazal occidental- Ouarrap, la MINUSS participe à un effort de programmation conjointe destiné à opérationnaliser les liens entre l’humanitaire, le développement, la paix et la sécurité et ainsi s’attaquer aux causes profondes du conflit.
Évoquant la grave crise humanitaire que connaît le pays, M. Haysom a noté qu’alors que les besoins concernent environ 8,9 millions de personnes, les ressources diminuent. Actuellement, seulement 26% du 1,7 milliard de dollars requis pour le plan de réponse humanitaire ont été reçus, a-t-il déploré, avant d’exhorter la communauté des donateurs à ne pas perdre de vue le Soudan du Sud. Il a aussi alerté le Conseil sur les inondations incessantes, qui frappent pour une quatrième année consécutive les États d’Unité et Jongleï, ainsi que sur les effets liés aux changements climatiques, notamment les déplacements, l’insécurité alimentaire et le manque d’opportunités de subsistance pour les jeunes.
Le Représentant spécial a par ailleurs appelé le Gouvernement à garantir la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire, tout en dénonçant la décision du Ministère des affaires humanitaires et de la gestion des catastrophes, qui réclame aux partenaires humanitaires des documents non prévus par les accords. Enfin, il a tenu à réaffirmer que, malgré les retards d’application, la seule ligne de conduite viable reste la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé, qui prévoit aussi la participation pleine et entière des femmes à tous les mécanismes prévus.
Mme GHADA MUDAWI, Directrice par intérim de la Division des opérations et de la sensibilisation du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a déclaré que la plupart des indicateurs humanitaires se sont détériorés au Soudan du Sud depuis fin 2021. « Dans un contexte de défis macroéconomiques profonds, les moteurs des conflits et des chocs climatiques ont entraîné une situation humanitaire désastreuse », a précisé Mme Mudawi avant de s’inquiéter du spectre de la famine et d’avertir que 8,3 millions de personnes feront face à une grave insécurité alimentaire pendant la période de mai à juillet. D’après elle, « 2,9 millions de personnes seront probablement confrontées à des niveaux d’urgence, tandis que 87 000 personnes seront probablement confrontées à des niveaux catastrophiques d’insécurité alimentaire/famine ».
La Directrice par intérim a rappelé qu’au moins un demi-million de personnes seront probablement touchées par des inondations cette année; 200 000 personnes sont déjà déplacées dans l’État de l’Unité, et de nouvelles inondations se produisent dans des zones gorgées d’eau depuis les inondations de l’année dernière.
Par ailleurs, Mme Mudawi a noté que plus de 2 millions de personnes restent déplacées à l’intérieur du pays, tandis que plus de 2,3 millions de Sud-Soudanais sont des réfugiés. Pour que les personnes puissent revenir, elle a appelé le Soudan du Sud à résoudre les problèmes qui les maintiennent dans « un schéma de déplacement en attente »: insécurité, risques d’explosion, problèmes fonciers et immobiliers non résolus, et manque de services de base. Elle a aussi suggéré une planification pour que les sites de déplacés internes deviennent éventuellement des lieux d’installation permanents.
Après avoir relevé que quatre travailleurs humanitaires ont été tués en 2022 dans l’exercice de leurs fonctions et qu’un groupe armé aurait attaqué une clinique dans la Zone administrative du Grand Pibor et pillé des fournitures alimentaires prépositionnées, la haute responsable a appelé à lutter contre l’impunité. Notant que le plan de réponse humanitaire (HRP) 2022 vise à aider 6,8 millions de personnes, elle a regretté que seulement 3,1 millions de personnes aient pu être aidées jusqu’à présent par manque de ressources, le plan de réponse estimé à 1,7 milliard de dollars n’étant financé qu’à hauteur de 26%.
Concluant son intervention par trois messages, Mme Mudawi a rappelé que la réponse internationale nécessite que les efforts humanitaires, de développement et de consolidation de la paix aillent de pair pour s’attaquer aux causes profondes de la crise. Elle a souligné l’importance de l’appropriation nationale des services de base et la promotion d’un leadership et de solutions localisées quand et où cela est possible. « Tout en garantissant la protection des civils et la responsabilisation pour les violations des droits humains », a insisté Mme Mudawi. Par ailleurs, elle a redit la nécessité d’assurer la sécurité des travailleurs et des biens humanitaires avant d’appeler à une action du Gouvernement et de toutes les parties au conflit afin de faire cesser les attaques contre les travailleurs et les biens humanitaires. Enfin, elle a demandé un financement flexible à grande échelle de toute urgence pour répondre aux besoins humanitaires croissants, notamment pour prévenir une détérioration dangereuse de la situation en termes de sécurité alimentaire.
Mme LORNA MEREKAJE, défenseure des droits de l’homme du Soudan du Sud, militant des droits civils et défenseure de la paix, a déclaré que son pays se préparait à la tenue des élections prévues par l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud malgré une détérioration de la situation économique, caractérisée par une augmentation du prix des denrées alimentaires de base, une escalade de la violence et des violations des droits de l’homme. Elle s’est inquiétée du manque d’engagement des parties à mettre pleinement en œuvre l’Accord de paix de 2015, qui vient à échéance dans quelques mois, estimant que certains de ses « éléments essentiels » ne sont pas appliqués. Elle a appelé à cet effet à accroître la pression sur les parties et exhorté les garants de l’Accord de paix à soutenir le peuple du Soudan du Sud dans l’élaboration d’une feuille de route concrète pour le pays après l’expiration de l’Accord.
Alors que se poursuivent les actes violence et les violations des droits de l’homme, le conflit reprend à Kajo-Keji, Nimule et dans d’autres régions du pays, a rappelé Mme Merekaje. Les femmes et les filles continuent notamment d’être confrontées à la menace de violences sexuelles liées au conflit, y compris dans la capitale Djouba, a-t-elle poursuivi, déplorant l’augmentation des cas de viols et de meurtres. Malgré les progrès réalisés dans la mise en place de la Commission vérité, réconciliation et apaisement, guérison et réconciliation, d’autres processus, tels que l’élaboration d’une Constitution et la réforme des finances publiques, accusent des retards importants, s’est alarmée la défenseure des droits de l’homme.
Afin d’aller de l’avant, Mme Merekaje a plaidé pour un renforcement des capacités des institutions nécessaires à la tenue d’une élection crédible, de la liberté de la presse et de l’engagement civique, ainsi que du cadre juridique. Elle a exhorté le Conseil de sécurité à envisager l’implication de l’ONU dans l’organisation et la conduite des élections. Elle a recommandé la tenue de forums périodiques entre la société civile et la MINUSS et demandé au Conseil de sécurité d’autoriser la MINUSS à faciliter un engagement avec le Gouvernement, la société civile et les groupes de citoyens afin d’instaurer un climat de confiance dans le pays.
M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a fait part de sa profonde préoccupation face aux violences, notamment sexuelles et sexistes, perpétrées au Soudan du Sud, qui frappent les femmes et les enfants. Il s’est dit « atterré » par les crimes atroces commis dans l’État de l’Unité. La délégation des États-Unis sera claire, a martelé le délégué. Ceux qui sont impliqués dans la planification et la commission de tels actes peuvent être soumis à des sanctions de l’ONU, a-t-il averti. Se tournant ensuite vers la Chine et la Fédération de Russie, les deux États permanents du Conseil qui « s’opposent aux sanctions de façon habituelle » et « minent nos capacités à utiliser l’arme des sanctions », le délégué les a pressés de garder à l’esprit le coût humain de cette attitude. Poursuivant, il a demandé au Gouvernement et aux responsables du Soudan du Sud de traduire en justice tous les responsables. À cet égard, il a salué l’action de la MINUSS qui a permis le déploiement rapide des forces de maintien de la paix pour restaurer le calme dans l’État de l’Unité et sauver des vies. Le délégué a toutefois reconnu qu’aucune paix pérenne ne sera possible s’il n’y a pas de progrès sur le plan politique. Dans cet esprit, il a partagé les préoccupations du Secrétaire général concernant la lenteur de la mise en œuvre de certains éléments essentiels de l’Accord de paix revitalisé. Il s’est, enfin, inquiété de la grave crise humanitaire que traverse le pays, la pire de son histoire, rappelant que les États-Unis fournissent tous les ans une aide alimentaire à hauteur d’un milliard de dollars environ.
M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a estimé que les dernières évolutions positives au Soudan du Sud, notamment les avancées dans les processus d’élaboration d’une constitution et d’organisation d’élections, sont le reflet de la détermination des dirigeants sud-soudanais de mettre en œuvre l’Accord de paix revitalisé. Il s’est félicité à cet égard que l’accent soit mis sur la réconciliation et a souhaité que des progrès soient réalisés pour opérationnaliser le commandement conjoint des forces unifiées nécessaires et pour achever le calendrier électoral. Avec l’appui de la communauté internationale, en particulier de l’Union africaine, et de l’IGAD, ces tâches peuvent être menées à bien dans les prochains mois, a-t-il assuré.
Le représentant a ensuite salué la stabilisation économique du pays, avant de l’alarmer de la situation humanitaire. Selon lui, la communauté internationale, à commencer par l’ONU, doit redoubler d’efforts pour appuyer le Gouvernement et donner à la MINUSS les moyens d’agir. M. Raguttahalli a également applaudi les actions de médiation menées par la Mission pour faire cesser les différends communautaires. Le représentant a d’autre part rappelé que l’Inde est l’un des principaux contributeurs de personnel en tenue au sein de la MINUSS, avec un contingent de quelque 2 300 soldats de la paix, ce qui lui a valu d’être distingué par l’ONU en avril dernier. Enfin, il a appelé la communauté internationale à tout mettre en œuvre, en cette période de transition, pour répondre aux préoccupations des Sud-Soudanais, notamment en ce qui concerne les sanctions, les mesures ciblées et l’embargo sur les armes.
Mme CAÍT MORAN (Irlande) a particulièrement regretté les retards de mise en place des Forces unifiées nécessaires. Elle a appuyé l’action urgente demandée par le Secrétaire général pour mettre pleinement en œuvre les dispositions de sécurité transitoires, alors que la sécurité reste une préoccupation majeure compte tenu de la poursuite des violences à travers le pays entre le Gouvernement et les forces d’opposition. Elle a aussi appelé à une action urgente pour la protection des travailleurs et biens humanitaires, en rappelant que leur action est essentielle pour aider les populations à faire face à une insécurité alimentaire extrême.
Par ailleurs, la représentante s’est dite profondément préoccupée par l’étouffement continu de l’espace civil avant d’exhorter le gouvernement du Soudan du Sud à protéger la liberté de parole, de réunion et d’expression pour insuffler l’espoir nécessaire à sa jeune population. Elle a ajouté que l’avenir de ce jeune État pouvait être mesuré au statut de la participation des femmes à la vie publique, au bien-être de ses enfants et de ses jeunes, et non par une augmentation des armes entrant dans le pays. Enfin, elle a estimé que beaucoup de progrès peuvent être réalisés au cours des huit derniers mois de la période de transition, notamment en matière de mise en œuvre des dispositions transitoires de sécurité. Elle a conclu en affirmant que les forces de sécurité avaient besoin de leadership, de direction et d’unité, avant de prévenir que la levée de l’embargo sur les armes ne remédierait pas à l’absence de ces principes.
M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a noté que, malgré les progrès réalisés dans l’application de l’Accord de paix et la mise en place de la Commission vérité, réconciliation et apaisement, ces processus continuent d’accuser d’importants retards. Afin d’achever le processus de transition, il a invité les parties à l’Accord de paix à élaborer une feuille de route comprenant notamment des garanties en matière de sécurité. « Il est temps de mettre le peuple sud-soudanais au centre et de sortir de la logique de la confrontation politique permanente », a poursuivi le représentant, en renouvelant son appel en faveur d’un quota de 35% de participation des femmes aux institutions établies par l’Accord.
M. Gómez Robledo s’est dit préoccupé par les tensions infranationales persistantes qui entraînent de nouveaux déplacements et aggravent la situation humanitaire. Face à l’augmentation significative de la violence sexiste à l’égard des femmes et des filles, il a rappelé la responsabilité première des autorités nationales dans la protection de la population civile. Par ailleurs, alors que les changements climatiques continuent d’aggraver l’insécurité alimentaire et les tensions communautaires, il a exhorté les parties à respecter le droit international humanitaire et à assurer la sécurité des travailleurs humanitaires et du personnel de MINUSS.
Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a formé le vœu de voir les parties au Soudan du Sud bientôt en mesure de s’entendre sur un calendrier d’élections et une feuille de route claire pour mettre fin à la période de transition. La représentante s’est, cependant, inquiétée de la flambée des violences dans les États du Nil supérieur et de l’Unité. Elle a fermement condamné toutes les violations de l’Accord de paix global et les actes de violence contre les civils, y compris les travailleurs humanitaires au Soudan du Sud.
Mme Evstigneeva a par ailleurs catégoriquement rejeté les accusations selon lesquelles « l’opération militaire spéciale » de la Russie en Ukraine serait la cause principale de la crise alimentaire au Soudan du Sud. « Nous rejetons catégoriquement une telle approche et la considérons comme politisée », a-t-elle insisté, rappelant avoir donné à plusieurs reprises des explications détaillées sur les véritables causes de la crise alimentaire mondiale, causes qu’elle a qualifiées de complexes, citant en particulier les problèmes de développement socioéconomique et de défis mondiaux tels que la pandémie de coronavirus.
Dénonçant les politiques « irresponsables » de nos « amis occidentaux » -guerres commerciales, protectionnisme et autres pratiques douteuses– elle a pointé du doigt les sanctions unilatérales jugées illégales imposées par un certain nombre de pays occidentaux à l’encontre de la Russie et du Bélarus qui causent, selon lui, d’énormes dommages au commerce mondial, y compris au commerce alimentaire.
Enfin, la représentante a suggéré à ceux qui siègent au Conseil de s’employer à rectifier la situation de l’économie mondiale et à lever leurs mesures unilatérales illégales, plutôt que de s’engager dans une démagogie inutile.
Mme ALICE JACOBS (Royaume-Uni), jugeant la situation humanitaire alarmante, a exhorté le Gouvernement du Soudan du Sud à réduire les obstacles physiques et bureaucratiques et à respecter ses obligations en vertu de l’Accord de paix pour permettre un accès humanitaire sans entrave. La situation des droits humains continue également d’être préoccupante, comme en témoignent les informations faisant état de violences, de meurtres et de violences sexuelles généralisées, a poursuivi la représentante qui a appelé le Gouvernement à tenir les auteurs pour responsables. Par ailleurs, le Royaume-Uni salue les récents progrès réalisés sur l’Accord de paix, y compris la structure de commandement unifiée. S’il se dit également encouragé par l’intégration de l’Accord de paix dans la Constitution de transition et par le fait que la législation a été présentée au Parlement, le Royaume-Uni regrette toutefois que « les progrès globaux restent trop lents et trop limités » et que des repères critiques n’aient pas été atteints. À moins d’un an de la période de transition, la représentante a encouragé le Gouvernement du Soudan du Sud à définir en détail les mesures concrètes qu’il doit prendre pour mettre en œuvre l’Accord de paix, en particulier sur l’élaboration de la Constitution et les élections, et comment la MINUSS et la communauté internationale dans son ensemble peuvent apporter leur soutien.
Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a jugé urgent que les forces unifiées nécessaires soient mises en place et déployées avec des ressources suffisantes pour garantir la stabilisation du pays et briser le cycle des violences intercommunautaires. Alors que des groupes armés s’affrontent depuis des années, la représentante a estimé que la présence de telles forces pourrait réduire les tensions en comblant le vide actuel des forces nationales. Par ailleurs, elle a appelé le Gouvernement à s’engager en faveur d’un processus inclusif d’élaboration de la Constitution et d’élections libres et équitables avant la fin de la période de transition. À cette fin, la représentante a exhorté le Gouvernement à fournir sans délai les fonds nécessaires à la mise en œuvre de l’Accord de paix. Alors que les revenus pétroliers augmentent, elle a souligné la nécessité de prévenir la corruption en promouvant la transparence et la responsabilité. Notant ensuite que la situation humanitaire ne cesse de se détériorer en raison de la lenteur de la mise en œuvre de l’Accord de paix, la représentante a dit qu’il n’était pas viable pour le pays de dépendre uniquement de l’aide humanitaire pour ses services de base. Onze ans après l’indépendance, la Norvège juge indispensable un engagement et des investissements accrus de la part du Gouvernement du Soudan du Sud pour s’attaquer aux causes profondes de la crise humanitaire.
M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est alarmé de l’accroissement de la violence liée au bétail dans les États de l’Équatoria-Oriental, de l’Unité et le secteur de Jongleï. Il s’est dit particulièrement préoccupé par le niveau élevé d’insécurité alimentaire et les déplacements, estimant crucial d’assurer le financement du plan de réponse humanitaire 2022 et un accès humanitaire plus large afin de subvenir aux besoins les plus urgents de la population civile. S’agissant du processus de paix, le représentant s’est félicité de l’accord sur la structure de commandement des forces unifiées nécessaires et de la formation de l’Assemblée législative nationale de transition. À ses yeux la mise en œuvre de l’Accord revitalisé demeure le meilleur instrument dont dispose le Soudan du Sud pour atténuer la violence intercommunautaire.
Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a salué les dernières évolutions enregistrées dans la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé, en particulier les efforts pour la mise en place d’une commission pour la vérité, la réconciliation et l’apaisement. Elle également estimé que les accords conclus dans le domaine de la sécurité vont dans le bon sens. Il faut se fonder sur ces acquis pour avancer sur voie d’un avenir prospère, a-t-elle plaidé, insistant sur l’importance d’une coopération entre les autorités sud-soudanaises et les organisations internationales, notamment l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et l’ONU. La déléguée s’est par ailleurs félicitée des efforts de médiation déployés par la Communauté des États d’Afrique centrale, avant d’exprimer sa préoccupation face à la situation humanitaire que connaît le Soudan du Sud, laquelle exige un soutien de la communauté internationale. Elle a d’autre part jugé urgent de s’atteler à la question de la violence sexuelle et sexiste, appelant à ce sujet à la mise en application effective du plan d’action conjoint. Enfin, évoquant les impacts négatifs des changements climatiques sur la population, elle a salué efforts déployés par la MINUSS pour atténuer les effets des inondations et ceux de l’équipe de pays de l’ONU pour évaluer les risques environnementaux.
M. HAROLD A. AGYEMAN (Ghana), au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), s’est félicité des efforts consentis par le Gouvernement du Soudan du Sud et des progrès obtenus dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé, notamment la première phase de la formation des formations des forces unifiées nécessaires, un accord sur la structure de commandement et l’ouverture de couloirs humanitaires, qui a facilité le retour volontaire progressif d’un demi-million de réfugiés et déplacés. Il s’est également félicité de la récente visite dans le pays du Comité de haut niveau de l’Union africaine sur le Soudan du Sud, qui a posé les bases de la consolidation de la paix et de la démocratie dans le pays, en mettant en évidence tant les succès de l’Accord revitalisé que les défis auxquels reste confrontée sa mise en œuvre. Les A3 exhortent toutes les parties à rester attachées à l’Accord revitalisé et félicitent le Président Salva Kir et le Premier Vice-Président Rick Machar pour avoir réitéré leur attachement à l’Accord. Ils appellent les parties non signataires à faire la preuve de leur engagement en faveur de la paix et réitèrent leur appel pour qu’elles reprennent au plus vite les discussion de paix sous la facilitation de la Communauté de San Egidio.
Le représentant a également attiré l’attention sur les défis dans la mise en œuvre des derniers critères de référence de l’Accord de paix, en particulier le nombre limité de mois restants pour la période de transition. Il a appelé les différentes parties à mener un dialogue inclusif et à forger un consensus sur une feuille de route pour le reste de cette période, y compris pour la tenue d’élections, et a souligné que pays aurait besoin d’un soutien financier international.
M. Agyeman s’est inquiété de la recrudescence de la violence communautaire et a demandé à toutes les parties à ces conflits de mettre en place des mesures pour les résoudre par le dialogue. Les A3 félicitent la MINUSS pour son rôle dans la protection des civils et pour ses engagements locaux, qui aident à établir la confiance entre les communautés à la base, facteur vital pour le processus de paix.
Les A3 s’inquiètent de la décision du Programme alimentaire mondial de suspendre une partie de son aide alimentaire du fait du manque de financement. Elle aura pour conséquence de priver d’aide alimentaire un tiers des 6,2 millions de personnes qui devaient recevoir une assistance cette année, « la plus difficile depuis l’indépendance du pays ». Au-delà de la fourniture immédiate d’aide alimentaire, il est important que la communauté internationale augmente son aide au développement au Soudan du Sud, a encore déclaré le représentant, qui a rappelé qu’un soutien international sera nécessaire pour assurer les réformes indispensables à l’économie du pays.
Enfin, les A3 demandent que la communauté internationale fournisse l’assistance technique et financière indispensable à la formation des forces unifiées nécessaires et que le Chef de la MINUSS continue d’offrir ses bons offices, y compris pour faire face à la recrudescence des violences intercommunautaires.
M. DAI BING (Chine) a salué l’Accord du 3 avril 2022 sur le commandement unifié des forces armées et la création d’une Commission vérité, réconciliation et apaisement. Alors que la période de transition va prendre fin dans huit mois, il a exhorté toutes les parties à se concentrer sur les objectifs fixés en matière de sécurité et la réforme constitutionnelle. S’agissant des défis du développement économique et social, le représentant a invité la communauté internationale à aider le Soudan du Sud à se relever plutôt que d’appuyer des sanctions.
Le représentant de la Chine a déclaré que des élections ne règleront pas tous les problèmes. Par ailleurs, il a noté une stabilité de la situation sécuritaire tout en regrettant des conflits sporadiques qui méritent des approches ciblées. Il a appelé la communauté internationale à lever au plus vite l’embargo sur les armes qui frappent le Soudan du Sud, en souhaitant que les sanctions ne soient plus utilisées comme des moyens de pression politique. Il a appelé la communauté internationale à appuyer les capacités de développement du Soudan du Sud en respectant les spécificités locales. Il a enfin rappelé que son pays menait plusieurs projets d’envergure au Soudan du Sud et travaillait avec la MINUSS pour encourager la participation des femmes et des jeunes.
Mme SHERAZ GASRI (France) a salué l’Accord du 3 avril 2022 sur le commandement unifié des forces armées, soulignant au passage le rôle positif joué par le Soudan. Elle a appelé les autorités sud-soudanaises à allouer les ressources nécessaires à la mise en place des forces unifiées nécessaires, estimant que les arrangements sécuritaires sous-tendent l’application du processus de paix, notamment la tenue des élections, et qu’ils font partie des critères de révision de l’embargo sur les armes.
Mme Gasri a appelé les parties à s’entendre sur la date des élections et à débuter sans tarder leur préparation, tout en déplorant l’absence de progrès dans l’adoption du cadre constitutionnel et juridique permettant la tenue de ce scrutin. Devant la poursuite des violences à un niveau alarmant, notamment sous l’impulsion de dynamiques politiques nationales, la représentante a appelé les autorités à assurer la protection des civils et des travailleurs humanitaires, ainsi que la liberté de mouvement de la MINUSS. Face à l’augmentation des besoins humanitaires, l’Union européenne a augmenté, en 2022, son assistance humanitaire au Soudan du Sud de 41,7 à 71,7 millions d’euros, a-t-elle en outre rappelé.
Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) s’est dite profondément préoccupée par la gravité de la situation des droits de l’homme et de la sécurité au Soudan du Sud, déplorant en particulier la souffrance des victimes et des survivants des violences sexuelles. La représentante s’est en outre inquiétée que près de 9 millions de personnes -dont 2 millions de femmes–, soit plus des deux tiers de la population, aient des besoins humanitaires importants. La situation humanitaire est aggravée par la violence et la crise alimentaire mondiale, a rappelé la représentante, qui a exprimé sa préoccupation face à la « tendance », illustrée notamment par la mort de quatre travailleurs humanitaires cette année et le pillage de centaines de tonnes de nourriture et de fournitures vitales.
Mme Dautllari a, de même, regretté que le Gouvernement sud-soudanais crée des obstacles bureaucratiques et ajoute des conditions préalables pour que les acteurs humanitaires puissent mener à bien leur travail. Cela doit cesser immédiatement, a-t-elle martelé.
Enfin, la représentante a pressé les acteurs de faire preuve de davantage de volonté politique, de faire passer l’intérêt du peuple du Soudan du Sud avant le leur et de convenir d’une date pour les élections.
M. MALWAL (Soudan du Sud) a rappelé que, dans huit mois, la période intérimaire et l’Accord revitalisé prendront fin. Dans l’intervalle, a-t-il plaidé, aucune partie ne doit prendre de décision unilatérale qui risquerait d’entraîner des conséquences négatives sur la stabilité du pays. Cela concerne également la communauté internationale, a souligné le représentant, qui a formé le vœu qu’au fil des huit prochains mois, un désir de consultations étroites se fasse jour chez toutes les parties à l’Accord, y compris au sein de la communauté internationale. « Vous serez les bienvenus à Djouba », a-t-il assuré. Le représentant a ensuite regretté qu’une liste de noms de hauts responsables et individus sud-soudanais ait circulé sur les réseaux sociaux il y a deux semaines. Certains affirmaient alors que cette liste avait été dressée par le comité des sanctions du Conseil de sécurité, ce qui avait suscité de graves préoccupations au Soudan du Sud. Nous avons donc été heureux d’apprendre qu’il s’agissait d’un faux, a-t-il déclaré à l’issue de sa courte intervention.