Soixante-seizième session,
24e & 25e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3650

La Sixième Commission boucle l’examen du rapport de la Commission du droit international 

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a terminé aujourd’hui son examen du rapport de la Commission du droit international (CDI), entamé le 25 octobre, avec les interventions d’une trentaine de délégations sur les dernières thématiques de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État et des principes généraux du droit.  Elle a ensuite entamé l’examen du rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, qui a été présenté par son Président, M. Edgar Daniel Leal Matta.

Sri Lanka a entamé la séance en rappelant que la Convention de Vienne sur la succession d’États en matière de traités, entrée en vigueur en 1996, fixe des règles sur la succession d’États.  Or, cet instrument s’est avéré controversé en grande partie parce qu’il fait la distinction entre les « États nouvellement indépendants » (les anciennes colonies) et les « cas de séparation de parties d’un État » (tous les autres nouveaux États), a dit le délégué.  L’Algérie a ainsi souligné que beaucoup de pays n’ont pas ratifié la Convention.  

Bon nombre de délégations, dont l’Inde, la Slovénie, la Roumanie, le Royaume-Uni, la République de Corée, les Pays-Bas, la Pologne, le Cameroun, la Turquie ou encore le Brésil, ont souhaité que la priorité soit donnée aux accords conclus entre les États concernés.  Contrairement à la Slovaquie, la déléguée néerlandaise a exprimé des doutes sur la forme finale du travail de la CDI sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, n’étant pas convaincue qu’il faille adopter des projets d’article assortis de commentaires.   Compte tenu de la manière dont ce sujet évolue, cette délégation a averti qu’elle ne soutiendra un texte que sous la forme d’une étude, d’un rapport ou d’une analyse.  

Pour leur part, le Royaume-Uni et la Fédération de Russie ont proposé des clauses types.   Pour l’Italie, qui a noté l’insuffisance et la rareté de la pratique des États en la matière, le travail réalisé jusqu’à présent pourrait constituer la base de directives sur le sujet.  Plusieurs délégations ont aussi, à l’instar de l’Espagne ou de la Lettonie, attiré l’attention sur la nécessité de maintenir une cohérence avec le projet d’articles de la CDI sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.

Les débats ont également porté sur la distinction, peu claire selon la Turquie, entre les faits ayant un caractère continu et les faits composites, et notamment sur le projet d’article 7, qui stipule: « Lorsqu’un fait internationalement illicite d’un État successeur a un caractère continu par rapport à un fait internationalement illicite d’un État prédécesseur, la responsabilité internationale de l’État successeur s’étend uniquement aux conséquences de son propre fait après la date de la succession d’États.  Si et dans la mesure où l’État successeur reconnaît et adopte comme étant sien le fait de l’État prédécesseur, la responsabilité internationale de l’État successeur s’étend également aux conséquences de ce fait. »  La République tchèque, par exemple, a appuyé l’essentiel de cette deuxième phrase.  Pour cette délégation, « la souffrance causée par des actes de torture antérieurs, ou les effets économiques de l’expropriation d’un bien, se poursuivent même si la torture a cessé, ou si le titre de propriété a été transféré ».  La Slovaquie a plutôt exprimé des doutes sur la valeur ajoutée de l’article précité.  

Par ailleurs, toujours sur la question de la succession d’États, l’Inde a demandé que la pratique des États soit prise en compte dans toute sa diversité géographique.  Allant dans le même sens, la Malaisie a invité la CDI à engager davantage les États sur ce sujet et à prendre en compte d’autres sources de la pratique des États, notamment en Asie et en Afrique.  « La CDI ne doit pas s’appuyer sur les seules sources européennes pour le développement progressif du droit international sur cette question », a-t-elle tranché.  Le Niger, quant à lui, a suggéré de vérifier les pratiques des cours régionales comme la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.   

Cet appel à une meilleure représentativité a été également reflété dans le débat sur la détermination des principes généraux du droit provenant des systèmes juridiques nationaux.  Le Brésil a ainsi regretté le peu de références dans les travaux de la CDI aux supports provenant des pays lusophones et, de ce fait, à leur tradition juridique.  « Dans certains cas, des systèmes juridiques émergent des environnements et des cultures auxquels il faut s’intéresser, comme en Afrique où foisonne un droit coutumier riche et séculaire, qui permet de résoudre des conflits là où les règles et procédures du droit dit moderne peinent et piétinent », a fait remarquer le Cameroun.  

Concluant l’examen du rapport de la CDI, son Président, M. Mahmoud Daifallah Hmoud, a pressé les États de bien vouloir fournir les informations que leur demande la Commission, et, notamment, de lui présenter leurs pratiques.  Les produits de la CDI ne doivent pas rester sans réponse de la part de la Sixième Commission, a-t-il insisté.

La Commission a entendu, en fin d’après-midi, les représentants du Mouvement des pays non alignés, de l’Union européenne, du groupe des Amis de la Charte, et de la Géorgie au nom de trois autres pays, s’exprimer sur le rapport du Comité spécial de la Charte.  Elle poursuivra l’examen de ce point demain, jeudi 4 novembre, à 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DOUZIÈME SESSION - A/76/10

Examen des chapitres VII (Succession d’États en matière de responsabilité de l’État) et VIII (Principes généraux du droit)

Déclarations (Suite)

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a rappelé que la Convention de Vienne sur la succession d’États en matière de traités, entrée en vigueur en 1996, fixe des règles sur la succession d’États.  Le traité s’est avéré controversé en grande partie parce qu’il fait la distinction entre les « États nouvellement indépendants » (les anciennes colonies) et les « cas de séparation de parties d’un État » (tous les autres nouveaux États), a-t-il ajouté.  L’article 16 stipule que les États nouvellement indépendants bénéficient d’une « table rase », de sorte que le nouvel État n’hérite pas des obligations conventionnelles de la puissance coloniale, tandis que l’article 34 (1) stipule que tous les autres nouveaux États restent liés par les obligations conventionnelles de l’État dont ils se sont séparés.  Poursuivant, le délégué a indiqué que l’article 1 du projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite a conclu que la responsabilité incombe à l’État qui a commis le fait internationalement illicite; pour cette raison, la succession concernant cette responsabilité exigerait que le nouvel État poursuive la même personnalité juridique de l’État prédécesseur responsable du fait internationalement illicite.  Le représentant a donc souligné que la question pour la CDI est de concevoir une formule qui offre une réponse à la question de savoir si l’État successeur jouit de la même personnalité juridique que celle de l’État prédécesseur internationalement responsable qui n’existe plus ou au contraire si cette personnalité s’est de ce fait éteinte.  Par ailleurs, il a reconnu qu’il existait une certaine confusion entre faits composites et faits ayant un caractère continu. 

M. Pieris a ensuite rappelé le contenu du rapport de la CDI sur les principes généraux du droit.  Il a souligné que des points de vue ont été exprimés concernant l’utilisation imprécise d’une terminologie souvent utilisée de manière interchangeable, et a souhaité plein succès au Rapporteur et à la Commission pour codifier les principes du droit international qui seraient facilement assimilables par les peuples du monde. 

M. GEORG CHRISTIAN KLUSSMANN (Allemagne) a noté avec satisfaction l’analyse approfondie présentée dans le rapport de la Commission du droit international (CDI) qui, a-t-il estimé, constitue une excellente base pour corroborer les règles et la méthodologie d’identification des principes généraux du droit.  Il s’est également félicité de l’adoption provisoire des projets de conclusion 1, 2 et 4 accompagnés des commentaires et a approuvé dans l’ensemble la méthodologie proposée pour l’identification des principes généraux du droit dérivés des systèmes juridiques nationaux.  Le représentant a convenu que l’analyse comparative doit couvrir différentes « familles juridiques » mais doit également tenir compte de la diversité géographique.  Cet aspect, a-t-il souligné, est d’une importance cruciale pour la légalité et la légitimité de toute conclusion sur les principes généraux du droit. 

Le représentant a partagé les inquiétudes exprimées lors des discussions au sein de la CDI sur le fait de savoir si la méthodologie proposée pour déterminer la « reconnaissance » des principes généraux du droit formés au sein du système juridique international atteint réellement cet objectif.  En ce qui concerne la catégorie proposée de principes largement reconnus dans les traités et « autres instruments internationaux » dans le projet de conclusion 7 a), il faudrait préciser davantage selon quels critères tel élément ou telle notion dans un traité ou instrument peut être considéré comme s’étant émancipé de son origine pour acquérir un statut juridique distinct en tant que principe général du droit.  Par ailleurs, le représentant de l’Allemagne a exprimé des doutes sur le fait que des principes juridiques contraignants formés au sein du système juridique international puissent être dérivés d’un résumé d’instruments non juridiquement contraignants. 

M. KAWASE TARO (Japon) a noté la nature « hautement théorique » du sujet relatif aux principes généraux du droit.  S’il a souligné l’importance de la discussion sur l’identification des principes découlant des systèmes juridiques du monde et des principes formés dans le cadre du système juridique international, il a surtout souhaité une clarification de ces derniers principes par rapport au droit international coutumier.  Enfin, le délégué a invité la Commission du droit international (CDI) à développer les définitions des termes utilisés dans le texte des projets de conclusion, y compris la définition de « principes généraux du droit ».

Sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. MAREK ZUKAL (République tchèque) a appuyé l’essentiel de la deuxième phrase du projet d’article 7 sur les faits ayant un caractère continu, à savoir que, dans certaines circonstances, l’État successeur devait assumer les obligations secondaires résultant du comportement illicite de son prédécesseur avant la date de la succession.  Pour le délégué, la douleur et la souffrance causées par des actes de torture antérieurs, ou les effets économiques de l’expropriation d’un bien, se poursuivent même si la torture a cessé, ou si le titre de propriété a été transféré.  Ces conséquences font l’objet d’obligations secondaires de réparation, y compris la restitution.  D’après le délégué, il semble que la question en jeu ne soit pas le « caractère continu » du fait illicite de l’État prédécesseur, mais plutôt les « conséquences durables » d’un tel fait et la capacité de l’État successeur de contribuer à l’élimination de ces conséquences, par exemple, par la restitution du statu quo ante.  Ceci serait particulièrement évident dans le scénario où le fait internationalement illicite a été commis par un État contre l’État prédécesseur, a précisé M. Marek.  L’État successeur devrait avoir droit à la réparation du préjudice accumulé à la fois pendant la période postérieure à la date de la succession d’États, mais aussi pendant la période antérieure à cette date.  Cela serait conforme à ce que la Commission du droit international (CDI) propose dans ledit projet d’articles.  D’après le délégué, il importe donc peu que le fait illicite consiste en un acte unique ou ait un caractère continu.  L’accent devrait être mis sur les conséquences d’un fait internationalement illicite commis par l’État prédécesseur, conformément aux exigences de l’équité et de la justice.  

Mme KAJAL BHAT (Inde) a discuté de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État et du projet d’article 7 bis sur les faits composites.  Elle a pris note de l’explication apportée par le Rapporteur spécial en ce qui concerne la distinction de ces faits composites et des faits à caractère continu.  Elle a aussi demandé une simplification des projets d’articles 16 à 19.  La déléguée a souligné la nature subsidiaire de ces projets et rappelé que la priorité doit être donnée aux accords entre États concernés.  La déléguée a aussi demandé que la pratique des États soit prise en compte dans toute sa diversité géographique.  Il convient de distinguer entre les projets d’article qui sont étayés par la pratique des États et ceux qui constituent un développement progressif du droit international.  La déléguée a souhaité que ce travail de la Commission du droit international (CDI), une fois achevé, prenne la forme de projets de directive ou de principe. 

En ce qui concerne les « principes généraux du droit », Mme Bhat a estimé que la base du travail de la CDI est l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ) mais aussi la pratique des États et la jurisprudence.  « Il n’y a pas de hiérarchie entre les sources du droit international visées à l’Article 38 du Statut de la CIJ. »  En conséquence, la déléguée a estimé que ces principes ne doivent pas être considérés comme une source subsidiaire ou secondaire.  Elle a proposé de qualifier de « source supplémentaire » les sources des principes généraux du droit.  Le terme de « nations civilisées » visé par l’Article 38 précité est anachronique et inadéquat, a conclu la déléguée, en proposant son remplacement par le terme de « communauté des nations. » 

Mme PETRA LANGERHOLC (Slovénie), dont le pays, la Slovénie, est un état successeur, a souligné que les projets d’article sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État ont un caractère subsidiaire par rapport aux accords conclus entre les États concernés, comme c’est également le cas dans d’autres domaines de la succession d’États.  En outre, la déléguée a convenu avec le Rapporteur spécial que la pratique diversifiée et spécifique au contexte des États ne va pas dans le sens d’une règle « de la table rase ».  Elle a également indiqué être d’accord avec lui sur les projets d’article distincts sur les différentes formes de réparations, car, a-t-elle expliqué, il existe des exigences différentes pour chacun des États qui peuvent avoir des conséquences importantes pour la succession. 

Au sujet des principes généraux du droit, Mme Langerholc a abordé deux aspects du rapport: la terminologie et la question des principes généraux du droit formés au sein du système juridique international.  Comme le Rapporteur spécial l’a observé à juste titre, la terminologie du droit international faisant référence à différents principes est imprécise, car des termes tels que principes du droit international, droit international général, principes généraux du droit international ou principes fondamentaux du droit international sont utilisés de manière « interchangeable ».  La représentante a donc espéré que les efforts de la Commission du droit international (CDI) contribueront à une clarification et à un bon usage de la terminologie.  Enfin, elle a préconisé une approche très prudente dans l’identification des principes généraux du droit et de leurs sources, en raison de leur applicabilité erga omnes

Mme MERJE MÄGI (Estonie) a salué le travail accompli sur le sujet « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État. »  Elle a notamment apprécié les explications apportées en ce qui concerne les faits composites et la prise en compte par le Rapporteur spécial du projet d’articles sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite, assurant ainsi une cohérence du travail de la Commission du droit international (CDI).  Elle a appuyé l’inclusion d’articles prévoyant une réparation pour l’État lésé.  Si la pleine réparation demeure la règle générale selon le droit international coutumier, les États concernés peuvent conclure un accord prévoyant un dédommagement qui ne soit pas intégral, a précisé la déléguée. 

S’agissant des principes généraux du droit, la déléguée de l’Estonie a noté les deux catégories de principes généraux du droit, ceux découlant des systèmes juridiques nationaux et ceux formés dans le cadre du système juridique international.  Si elle a salué l’analyse comparative faite de la pratique des États, de la jurisprudence et de la doctrine, elle a appelé à prendre dûment en compte la position des États sur ces principes telle qu’exprimée devant les tribunaux.  Elle s’est aussi demandé dans quelle mesure les règles d’une organisation internationale peuvent être prises en compte dans ladite analyse comparative.  S’agissant des principes formés dans le cadre du système juridique international, la déléguée a appelé à des discussions plus approfondies pour distinguer ces principes du droit international coutumier. 

Mme ALIS LUNGU (Roumanie) a relevé que le sujet de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État reste très controversé et ouvert à l’étude, étant donné qu’il existe peu de pratique pertinente en la matière.  En outre, elle n’a pas constaté de caractère normatif dans les projets d’article, y voyant plutôt une application des règles de droit coutumier sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite dans le cas particulier de la succession d’États.  La déléguée a fait part de ses doutes sur la nécessité de réguler ce domaine particulier, d’autant plus que les aspects découlant de la succession d’États, y compris en termes de partage des droits et obligations, font déjà l’objet d’accords spécifiques entre les États concernés. 

Au chapitre des principes généraux du droit, Mme Lungu a fait part de son désaccord au sujet de l’inclusion d’une étude relative aux principes potentiels formés au sein du système juridique international car ils appartiennent au droit international conventionnel ou coutumier; il est important de ne pas créer de confusion.  En revanche, elle a exprimé son accord avec la méthode d’identification des principes généraux du droit découlant des systèmes juridiques nationaux, ainsi qu’avec la référence à la « communauté des nations » pour remplacer « nations civilisées » dans l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  L’étude devrait également inclure des références à la jurisprudence nationale pour identifier les principes généraux du droit, a-t-elle conclu. 

Au sujet de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme QUYEN THI HONG NGUYEN (Viet Nam) a estimé que la règle de non-succession reste généralement applicable, avec certaines exceptions dans des circonstances particulières, notamment lorsque l’État successeur accepte de partager la responsabilité encourue par l’État prédécesseur.  Ainsi, les projets d’article devraient conserver un caractère subsidiaire et la priorité devrait être donnée aux accords entre les États concernés, a poursuivi le délégué, soulignant que la succession d’États en matière de responsabilité des États doit se faire sur la base de négociations engagées et de manière libre.  Par ailleurs, la délégation a appuyé l’inclusion des différentes formes de réparation (restitution, indemnisation et satisfaction). 

Évoquant ensuite le sujet « Principes généraux du droit », et en particulier le projet de conclusion 6 (Constat de la transposition dans le système juridique international) le Viet Nam a souligné que les principes généraux du droit que l’on trouve dans les systèmes juridiques nationaux doivent être compatibles avec les principes fondamentaux du droit international tels que consacrés par la Charte des Nations Unies.  Passant au projet de conclusion 7 (Détermination des principes généraux du droit formés dans le cadre du système juridique international), la délégation a rappelé que le fait qu’un principe soit identifié comme étant largement reconnu dans les traités et autres instruments internationaux ne le rend pas automatiquement contraignant pour les États qui n’ont pas accepté d’être liés par des règles conventionnelles.  Enfin, la délégation a appelé le Rapporteur spécial à étudier davantage la terminologie « principes de droits universellement reconnus » et la cohérence entre le concept d’universalité des principes généraux et la généralité de ces principes.  

Mme SIOBHÁN MILEY (Irlande), qui a consacré l’intégralité de son intervention au chapitre des principes généraux du droit, a déclaré approuver l’approche générale du Rapporteur spécial selon laquelle les critères d’identification desdits principes devaient être suffisamment stricts, pour éviter qu’ils ne soient utilisés comme un « raccourci » pour identifier les normes de droit international, et, en même temps, suffisamment souples pour que l’identification ne devienne pas une « tâche impossible ».  Saluant la suppression de l’expression « nations civilisées », qu’elle a jugé inappropriée et dépassée, elle a soutenu l’utilisation par la Commission du droit international (CDI) de l’expression « communauté des nations » dans le projet de conclusion 2.  Ayant précédemment souligné l’importance de distinguer les principes généraux du droit international coutumier, et de veiller à ce que cette distinction soit « clairement reflétée » dans les projets de conclusion et de commentaires, la déléguée a apprécié que le Rapporteur spécial ait cherché à opérer cette distinction, en fournissant quelques exemples qui plus est.  Elle a suggéré d’examiner cette question plus en détail dans les futurs rapports. 

M. HOWE (Royaume-Uni) a salué le travail accompli sur le sujet « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État ».  La pratique des États ne supporte pas le principe de succession automatique ou de la table rase, a-t-il dit, en souhaitant que la priorité soit donnée aux accords entre États concernés.  Il a proposé des « clauses types » comme format à donner à ce travail de la Commission du droit international (CDI). 

S’agissant des principes généraux du droit, le délégué britannique a salué l’approche prudente adoptée par le Rapporteur spécial sur cette troisième source du droit, telle qu’identifiée par l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Il a salué les commentaires clairs et précis qui reflètent le consensus entre États, notamment en ce qui concerne la reconnaissance comme condition essentielle de l’existence d’un principe général du droit.  Le délégué a noté les divergences qui entourent les principes formés dans le cadre du système juridique international, en notant la difficulté de les distinguer du droit coutumier.  Il a également mis en garde contre des critères d’identification insuffisamment restrictifs qui pourraient aboutir à une invocation trop aisée desdits principes. 

Mme JANE J. CHIGIYAL (États fédérés de Micronésie) s’est félicitée de la décision de remplacer le terme « nations civilisées » par « communauté des nations » dans les débats sur les sources des principes généraux du droit, le terme original étant archaïque et n’ayant pas sa place aujourd’hui.  En outre, le terme de « nations » est suffisamment large pour inclure non seulement les États mais aussi les nations autochtones.  De l’avis de la Micronésie, les règles et pratiques coutumières des nations autochtones et leurs systèmes juridiques traditionnels peuvent être considérés comme des principes généraux du droit s’ils sont communs à plusieurs nations autochtones dans le monde et, en fin de compte, reflétés d’une façon ou d’une autre dans le système juridique international.  Mme Chigiyal a également salué les efforts du Rapporteur spécial pour faire la distinction entre les principes généraux du droit découlant des systèmes juridiques nationaux et ceux formés au sein du système juridique international.  Elle a appelé à la plus grande vigilance sur cette seconde catégorie, qui reste obscure, notamment quand il s’agit de les distinguer du droit des traités ou du droit coutumier international.  

Mme HANIZAH BINTI MOHD IZZUDDIN (Malaisie) a salué le travail accompli sur le sujet « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État ».  Elle a souligné l’importance que ce travail soit cohérent avec le projet d’articles sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite, qui reflète le droit international coutumier.  La déléguée a souhaité que le projet d’article 7 soit complété afin que les faits ayant caractère continu soient distingués des faits composites.  Elle a souhaité une clarification des paragraphes 1 et 2 dudit article, en particulier sur la responsabilité de l’État prédécesseur lorsqu’il continue à exister.  La déléguée a invité la Commission du droit international (CDI) à engager davantage encore les États sur ce sujet et à prendre en compte d’autres sources de la pratique des États, notamment en Asie et en Afrique.  « La CDI ne doit pas s’appuyer sur les seules sources européennes pour le développement progressif du droit international sur cette question », a-t-elle tranché. 

S’agissant des principes généraux du droit, Mme Mohd Izzudin a rappelé qu’ils constituent une source du droit international.  Elle a souhaité que l’expression « nations civilisées » soit remplacée par « communauté des nations ».  Pour qu’un principe général du droit existe, il doit être reconnu par les membres de la communauté des nations, a-t-elle dit.  La déléguée a fait part de ses réserves sur les commentaires relatifs au rôle des organisations internationales dans la formation desdits principes.  Ces organisations n’ont pas le même statut, obligations et responsabilités que les États, a-t-elle souligné, en rappelant les fonctions spécifiques qui sont celles des organisations.  En conclusion, la déléguée a souligné l’importance et la complexité de ce sujet. 

Mme THARARUT HANLUMYUANG (Thaïlande) a consacré toute son intervention aux principes généraux du droit.  Elle a reconnu leur importance dans la structure juridique internationale comme l’une des sources du droit international, comme le stipule l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Ces principes, a-t-elle ajouté, sont utilisés pour combler les lacunes du droit international afin d’éviter les situations manquant de clarté (non liquet).  Concernant l’identification des principes généraux du droit, si la déléguée apprécie les progrès réalisés par la Commission du droit international (CDI), elle a aussi estimé que les critères permettant de déterminer l’existence des principes ne devraient pas être « trop larges ».  Ils devraient aussi être « explicitement différenciés » des règles existantes du droit international coutumier, afin d’éviter que les principes généraux du droit ne deviennent un « raccourci » pour établir des normes coutumières, dans des domaines où, a rappelé Mme Hanlumyuang, la pratique générale fait encore défaut.  

Au sujet de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. MATÚŠ KOŠUTH (Slovaquie) a estimé que l’examen du sujet par la Commission du droit international (CDI) peut contribuer à clarifier les règles, en particulier celles relatives à la réparation.  Un ensemble de projets d’article est la forme la plus appropriée, a-t-il réaffirmé, ajoutant que ceci était sans préjudice sur la question d’une future convention.  

M. Košuth a ensuite exprimé des doutes quant à la pertinence et la valeur ajoutée des projets d’articles 7 et 8.  En effet, le libellé du projet d’article 7 porte principalement sur la situation d’un fait internationalement illicite après la date de la succession, qui, a rappelé la Slovaquie, est entièrement régie par les articles sur la responsabilité de l’État.  Selon lui, cet article pourrait plutôt contenir une règle claire sur la question de savoir si un État successeur hérite de la responsabilité de l’État prédécesseur responsable d’un fait internationalement illicite à caractère continu -qui a commencé avant la date de succession- ou bien s’il existe des spécificités du régime de succession applicables en la matière.  Il faut également explorer les aspects relatifs aux réparations, a estimé la délégation. 

Passant ensuite au sujet des « Principes généraux du droit », M. Košuth a salué l’exclusion par la CDI de la référence aux sources formelles du droit international.  D’après lui, les principes généraux ne sont pas formés par un processus juridique normatif aboutissant à la création d’une norme juridique.  « Nous pensons donc que la catégorisation des principes généraux de droit en tant que source matérielle du droit international, et même plus généralement en tant que source du droit international, devrait être étudiée davantage. »  Par ailleurs, le délégué a indiqué que la transposition des principes généraux dans le système juridique international n’était pas une condition nécessaire à leur existence.  En outre, nous n’envisageons pas la possibilité qu’un principe général de droit ne soit pas conforme aux principes fondamentaux du droit international, a souligné M. Košuth.  Il a par ailleurs jugé que le projet de conclusion 7 n’entrait pas dans le cadre du sujet à l’examen. 

M. DOH KWANGHEON (République de Corée) a réaffirmé qu’un accord entre les parties devrait être considéré comme une priorité lorsqu’il s’agit de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État.  S’agissant du texte des projets d’article provisoirement adopté par la Commission du droit international (CDI) à sa dernière session, il a noté que la CDI décrit le paragraphe 2 de l’article 9 comme se référant aux situations dans lesquelles l’État successeur est « pertinent pour traiter le préjudice », et non les situations dans lesquelles l’État successeur est « responsable » du préjudice.  Il faut élaborer davantage sur les circonstances particulières dans lesquelles l’État successeur devient pertinent pour traiter le préjudice, a estimé le délégué.  Passant aux projets d’articles 16, 17 et 18, il a exprimé ses doutes quant à la nécessité de dédier des textes spécifiques aux formes individuelles de réparation.  Il serait plus efficace pour la CDI de se concentrer sur la relation entre les différentes catégories de succession d’États et les réparations dans leur ensemble.  

Par ailleurs, évoquant le sujet des principes généraux du droit, le délégué a mentionné les deux types de principes généraux de droit abordés dans le deuxième rapport du Rapporteur spécial, à savoir ceux qui sont issus des systèmes juridiques nationaux et ceux qui sont formés dans le cadre du système juridique international.  Nous sommes d’avis que la signification et le contenu de ces derniers sont assez peu clairs, a-t-il conclu, suggérant à la Commission d’examiner cette question plus en profondeur.

Mme LISELOT FRANCESCA EGMOND (Pays-Bas) a exprimé des doutes sur la forme du travail de la Commission du droit international (CDI) sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, n’étant pas convaincue qu’il doive prendre la forme de projets d’article assortis de commentaires, de principes ou de directives.  Compte tenu de la manière dont ce sujet évolue, la délégation ne soutiendra un texte que sous la forme d’une étude, d’un rapport ou d’une analyse des sujets pertinents.  On pourrait y ajouter une liste de questions à prendre en considération en cas de succession d’États, comme une liste « de contrôle » ou « d’éléments constitutifs d’accords de succession ».  Quoi qu’il en soit, le thème ne se prête pas à un résultat sous forme d’articles, de lignes directrices ou de principes, a-t-elle bien insisté.  Mme Egmond a aussi réitéré sa préoccupation quant aux fréquentes « reformulations » du droit de la responsabilité de l’État, qui peuvent conduire à des « déclarations erronées du droit », ainsi que l’a noté la CDI.  Elle a donc instamment demandé à la CDI, et en particulier au Rapporteur spécial, de « s’abstenir de cet exercice », recommandant plutôt au Rapporteur spécial de « recueillir la pratique pertinente des États », y compris une comparaison et une réflexion sur les divers accords conclus par les États dans des situations de succession.  

Ensuite, concernant la règle générale de non-succession et celle de la succession « automatique », la déléguée a estimé que le point de départ devrait être le principe selon lequel aucun vide juridique, en termes de responsabilité de l’État, ne devrait apparaître.  « Cela s’applique aussi bien aux situations de dissolution ou d’unification où l’État d’origine a disparu, qu’aux situations de sécession où l’État prédécesseur demeure. »  La question de savoir si des droits ou des obligations doivent être transférés dans des situations spécifiques doit être évaluée au cas par cas et être traitée dans un accord de succession.  Si un tel accord ne peut être conclu, il convient d’éviter le vide juridique en transférant les droits et obligations à l’État ou aux États successeurs.  Enfin, Mme Egmond a exprimé sa préoccupation quant au traitement par le Rapporteur spécial de la réparation en cas de succession d’États et de ses différentes formes.  Le droit de la responsabilité de l’État, tel que reflété dans les articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite, régit adéquatement ce sujet.  La forme de réparation appropriée et juste doit être déterminée « au cas par cas ».  À cet égard, la déléguée a demandé au Rapporteur spécial de « s’abstenir de définir, et de redéfinir, les formes de réparation », et d’« aligner son travail sur celui de la CDI sur le droit général de la responsabilité des États ». 

M. MATEUSZ SAKOWICZ (Pologne) a souligné l’importance que le travail de la Commission du droit international (CDI) sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État soit cohérent avec le projet d’articles sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite.  Il a souligné la nature subsidiaire du texte des projets d’article provisoirement adoptés et rappelé que la priorité doit être donnée aux accords entre les États concernés. « Ce format de projets d’article ne nous paraît pas être le plus indiqué », a-t-il dit, en donnant sa préférence à des clauses-types. 

S’agissant des principes généraux du droit, le délégué a souhaité que le terme de « familles juridiques » visé au projet de conclusion 5 soit modifié.  Il a rappelé que la question de la transposition de principes dans le système juridique international, visée par le projet de conclusion 6, n’est pas expressément mentionnée à l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Il a souhaité que cette question fasse l’objet d’une attention accrue afin de savoir si elle peut être un préalable à la reconnaissance d’un principe général du droit.  Enfin, le délégué de la Pologne a souhaité que la notion abstraite de « principes fondamentaux du droit international » soit complétée par cette formule « tels que mentionnés par la Charte des Nations Unies. »  Sans une telle clarification, le projet de conclusions irait en effet en direction d’une subordination des principes généraux du droit aux autres sources du droit international, a-t-il conclu. 

M. ALAA NAYEF ZAID AL-EDWAN (Jordanie)a estimé que le texte préparé par la Commission du droit international (CDI) sur les principes généraux du droit complète ses travaux antérieurs sur les sources du droit international et devrait fournir les clarifications nécessaires sur la valeur, le contenu et l’identification des principes généraux du droit.  Il est important, a-t-il dit, que le sujet soit basé sur l’Article 38 (1) (c) du statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  À cet égard, il s’est exprimé en faveur de la première catégorie de principes généraux du droit, c’est-à-dire les principes découlant des systèmes juridiques nationaux.  Cette catégorie est bien établie en tant que source du droit international, mais sa portée, son rôle en tant que source, sa nature juridique et ses méthodes d’identification restent à définir, a expliqué le délégué.  Par ailleurs, le délégué a dit son accord avec la formulation utilisée dans la conclusion 2, à savoir la reconnaissance par la « communauté des nations ».  Selon lui, le terme « nations » n’est pas vague et va au-delà du terme « États », tout en étant fidèle à l’objet et au but de l’article précité.  En outre, une règle de droit national doit pouvoir être transposée, et le délégué a considéré la question de la compatibilité avec les principes fondamentaux du droit international comme non pertinente et problématique.  Enfin, il a exprimé ses doutes quant à la catégorie des principes généraux du droit constituée au sein du système juridique international et a appelé la CDI à faire preuve de prudence à cet égard. 

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a salué le travail accompli par la Commission du droit international (CDI) sur le sujet « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État.  Il a souligné l’importance que ce travail soit cohérent avec le projet d’articles sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite.  Sur un sujet aussi important que la responsabilité de l’État, le travail de la CDI doit être, sur le plan terminologique et méthodologique, aussi rigoureux que possible, a déclaré le délégué. 

S’agissant des principes généraux du droit, M. Pildegovičs a pleinement approuvé la décision de la CDI d’écarter le terme anachronique de « nations civilisées » visé à l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ) et de le remplacer par l’expression « communauté des nations ».  Il a souligné l’importance de la clarification apportée à ce sujet, selon laquelle cette dernière expression ne modifie en rien la substance et le champ d’application dudit article.  Il a souhaité que l’analyse des différents systèmes juridiques dans le monde ne soit pas limitée à un nombre restreint d’exemples issus exclusivement du « Nord global ».  Enfin, le délégué a dit son appréciation de la place laissée au multilinguisme dans le travail de la CDI sur ce sujet. 

M. EVGENY A. SKACHKOV (Fédération de Russie) a salué l’approche « prudente » et « équilibrée » du Rapporteur spécial sur le sujet des principes généraux du droit.  Selon lui, l’absence d’homogénéité dans la terminologie reste une question pertinente.  Rappelant que la Sixième Commission s’est demandé si les principes généraux du droit étaient une source distincte du droit international, le délégué a indiqué qu’une position différente prévaut dans la doctrine russe à cet égard: de tels principes sont reconnus par les États soit à travers des accords juridiques, soit par le droit interne.  D’après le projet de conclusion 2, pour qu’un principe général du droit existe, il doit être reconnu par l’ensemble des nations, mais la nature des preuves d’une telle reconnaissance n’est pas précisée, a poursuivi le délégué.  Pour lui, « c’est la volonté des États qui permet la reconnaissance ».  Il s’est également inquiété du terme « transposabilité », soulignant qu’il minimise le rôle des États.  Le délégué a ensuite demandé à la CDI de s’abstenir de postuler explicitement l’égalité des principes généraux du droit avec les autres sources du droit international.  Selon lui, avec le développement du droit international, le rôle « subsidiaire » des principes généraux du droit devient de plus en plus évident.  Enfin, M. Skachkov a invité la Commission à ne pas se précipiter dans l’examen de ce sujet.

Sur le sujet « difficile » et « controversé » de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, le délégué a estimé que le format des projets d’article n’est pas approprié, la pratique des États dans ce domaine n’étant pas homogène.  Il a proposé, par exemple, le format des clauses-types.  Le délégué a appuyé les conclusions du Rapporteur spécial selon lesquelles ni le principe de la « table rase » ni celui de la succession automatique ne semblent acceptables en règle générale, et que les accords entre États devraient prévaloir.  Sur les différentes formes de réparation, il a partagé les doutes de plusieurs membres de la Commission.  Enfin, il a jugé inutile de détailler davantage les dispositions relatives à la responsabilité dans le cadre d’une succession d’État.

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a partagé l’avis du Rapporteur spécial quant au caractère subsidiaire des projets d’article et à la priorité qu’il convient d’accorder aux accords conclus entre les États concernés.  Il a proposé d’inclure dans les commentaires y relatifs des exemples d’accords de succession conclus entre États et d’élaborer des clauses types qui serviraient de base de négociation.  Quant à la règle générale de non-succession, particulièrement la règle de la « table rase » et celle de la succession « automatique », il a estimé que la pratique des États, hétérogène et dépendante du contexte, ne permet d’étayer ni la primauté de la première règle ni celle de la seconde.  En ce qui concerne les projets d’articles 16 à 19, M. Nyanid a relevé que l’obligation de cessation, les assurances et les garanties de non-répétition, comme d’autres formes de réparation, ne sont pas des formes de responsabilité mais plutôt des conséquences juridiques de la responsabilité des États en vertu des articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.  S’agissant du transfert du droit et des obligations à l’État successeur, il a jugé important de protéger les droits des ressortissants des États, même après la succession, par le mécanisme de protection diplomatique et a souhaité l’ajout d’un projet d’articles en ce sens.  Par ailleurs, il s’est inquiété au sujet de la question du transfert d’obligations à l’État successeur pour que celui-ci répare des faits commis par l’État prédécesseur avant la date de succession, car non seulement cette notion semble incompatible avec la condition d’imputabilité posée à l’article 2 des articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite mais la jurisprudence ne semble pas non plus favorable à cette posture.

En venant au chapitre relatif aux principes généraux du droit, M. Nyanid a rappelé qu’ils constituent l’une des trois sources du droit international.  Selon lui, tels qu’ils ont été conçus, leur rôle est de combler les lacunes du droit international, afin d’éviter tout non liquet.  S’agissant du projet de conclusion 4 relatif à la détermination des principes généraux du droit provenant des systèmes juridiques nationaux, il a jugé inapproprié d’établir une hiérarchie entre systèmes juridiques.  « Dans certains cas, des systèmes juridiques émergent des environnements et des cultures auxquels il faut s’intéresser, comme en Afrique où foisonne un droit coutumier riche et séculaire, qui permet de résoudre des conflits là où les règles et procédures du droit dit moderne peinent et piétinent. »  Dans le même ordre d’idées, il s’est interrogé sur les critères permettant de déterminer les « principaux systèmes juridiques du monde » évoqués dans les projets de conclusions 5 et 4.  S’il s’est dit favorable à l’abandon de l’expression « nations civilisées » employée dans l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ), M. Nyanid n’a pas partagé la proposition de la remplacer par « l’ensemble des nations », lui préférant « l’ensemble des États ». 

Mme ARIANNA CARRAL CASTELO (Cuba) a voulu souligner que les principes généraux du droit doivent répondre à certains critères.  Ils doivent être des normes ou des règles de base applicables aux relations juridiques internationales.  Ces principes doivent refléter les principes de l’Article 2 de la Charte des Nations Unies et être reconnus par les États.  Enfin, a dit la déléguée, ils doivent être suffisamment généraux pour devenir une source du droit international et émaner de la nature même du droit international, sans avoir à démontrer l’existence de précédents. 

Pour M. MANUEL BAENA PEDROSA (Espagne), les principes généraux du droit sont une véritable source du droit international, distincte des traités et de la coutume.  Sa fonction est de combler les lacunes de l’ordre juridique international par le biais d’une procédure que la Commission est en train d’examiner.  M. Baena Pedrosa a salué la décision d’abandonner l’expression « nations civilisées » qui figure à l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ), la jugeant en effet anachronique et peu compatible avec le principe d’égalité souveraine des États.  Il s’est également félicité que le Rapporteur spécial ait pris en considération les suggestions de l’Espagne pour définir la portée du sujet: « nature, origine, fonctions et détermination des principes généraux comme source de l’ordre international ». 

En venant au chapitre relatif à la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, le délégué espagnol a attiré l’attention sur la nécessité de maintenir une cohérence avec le projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite. 

Évoquant le sujet de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. ENRICO MILANO (Italie) a estimé, qu’en raison de l’insuffisance et de la rareté de la pratique des États en la matière, le sujet n’est peut-être pas encore prêt à une codification du droit international coutumier existant.  Néanmoins, a-t-il poursuivi, le travail fait jusqu’à présent pourrait constituer la base de directives sur le sujet.  

Par ailleurs, le délégué a souligné qu’il fallait clairement signaler la distinction entre ce qui constitue le droit international général existant et les dispositions qui visent à développer progressivement le droit international.  Il a salué la référence faite par le Rapporteur spécial à la pratique des États dans différentes catégories de succession, afin d’identifier les règles émergentes régissant cette question.  Il a été d’avis qu’il vaut mieux éviter toute règle ou principe général, que ce soit dans le sens du principe de la tabula rasa ou dans le sens opposé de la succession automatique.  

Passant ensuite au sujet des principes généraux du droit, M. Milano a jugé essentiel d’identifier les caractéristiques des principes généraux du droit international, en tenant compte des facteurs qui les distinguent du droit international coutumier et des règles qui régissent la formation de ce dernier.  L’expression « nations civilisées » devait être évitée, a ajouté le délégué, partageant l’avis de la Commission du droit international (CDI) et des États Membres, et lui préférant l’expression « communauté des nations ». 

M. MOHAMED FAIZ BOUCHEDOUB (Algérie) a salué le travail accompli par la Commission du droit international (CDI) sur le sujet « principes généraux du droit ».  Il a noté le consensus sur la portée de ce sujet, à savoir son identification et ses relations avec les autres sources du droit international.  Le point de départ du travail sur cette question doit être l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ), a-t-il dit, en rappelant que ces principes sont une source du droit international.  « Il n’y a pas de hiérarchie entre les sources du droit. »  Indiquant que l’expression « nations civilisées » contenue dans ledit article est anachronique, il a proposé, pour la remplacer, les termes suivants, « communauté des États », « communauté internationale des États » ou simplement « les États ».  Il a noté les divergences qui entourent les principes formés dans le cadre du système juridique international, en notant la difficulté de les distinguer du droit coutumier.  Le délégué a aussi fait état d’une pratique des États insuffisante dans ce domaine. 

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, le délégué a soutenu l’approche globale adoptée par la CDI.  Il a néanmoins rappelé que nombre de pays n’ont pas ratifié la Convention de Vienne sur la succession d’États en matière de traités.  En conclusion, il a invité la CDI à revoir son choix s’agissant du format à donner à son travail sur ce sujet. 

Évoquant le sujet de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. MOUSSA PARAISO SOULEYMANE (Niger) a suggéré de vérifier les pratiques des cours régionales telles que celle de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, dans le cadre du projet d’article 17 relatif à une analyse de la pratique, dont les décisions de la Cour européenne des droits de l’hommes et la Commission d’indemnisation des Nations Unies.  Par ailleurs, le délégué a estimé que les dispositions du projet d’article 19 demeurent « subsidiaires » et pourraient continuer à faire l’objet de négociations futures dans le cadre d’accords bilatéraux et plurilatéraux entre États.  Constatant les avis contradictoires sur la règle générale de non-succession, relativement aux règles de la « table rase » et de la succession automatique, le Niger appelle à la poursuite des discussions sur ce point, en vue de parvenir à des dispositions consensuelles.  Cela permettrait de clarifier la distinction opérée entre le « transfert de la responsabilité » des États et le transfert des droits et obligations découlant de la responsabilité des États, a jugé M. Paraiso Souleymane.  En outre, il a appelé à compléter les articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite, afin de combler les lacunes de la codification des règles.  

Passant ensuite au sujet des principes généraux du droit, le délégué s’est dit convaincu de l’importance de toutes les sources du droit international dont les principes généraux du droit, afin de permettre et faciliter une bonne administration de la justice.  Ainsi, les principes généraux formés dans le cadre du système juridique national, ainsi que ceux découlant du système juridique international et régional, peuvent servir de base à la détermination de ces principes.  En outre, M. Paraiso Souleymane a appelé à dissiper les divergences des membres de la Commission du droit international (CDI), au sujet de la reconnaissance d’un principe par les grandes familles juridiques ou la reconnaissance du principe par les législations nationales appartenant à ces familles.  Enfin, il a salué l’approbation de deux critères définis aux fins de la transposition des principes généraux du droit dans le système juridique international, notamment la compatibilité avec les principes fondamentaux du droit international. 

M. NASER ASIABI POURIMANI (République islamique d’Iran) a consacré son intervention aux principes généraux du droit, en attirant l’attention sur la question des « systèmes juridiques ».  S’il a partagé l’opinion du Rapporteur spécial selon laquelle l’Article »38 (1) (c) du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ) se réfère bien à des principes généraux du droit, il a en revanche estimé qu’un « processus inclusif » pour l’identification et la reconnaissance des principes généraux du droit est crucial afin que tous les systèmes juridiques contribuent de manière équilibrée.  En conséquence, l’Iran ne saurait souscrire au raisonnement du Rapporteur spécial concernant la non-pertinence de l’opinio juris dans l’émergence d’un principe général du droit qui pourrait réduire l’universalité des principes généraux du droit. 

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) s’est concentrée sur la question des principes généraux du droit.  Elle a expliqué qu’aux Philippines, ce sont les « principes généralement acceptés du droit international » qui sont adoptés dans le cadre de la loi du pays, comme le prévoit la Constitution.  La Cour suprême des Philippines a en outre précisé que l’expression « principes généralement acceptés du droit international » inclut les « principes généraux du droit » au sens de l’Article 38 (1) (c) du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Aussi, a poursuivi la déléguée, la jurisprudence de son pays prévoit que les principes généraux du droit sont des principes établis par un processus de raisonnement fondé sur l’identité commune de tous les systèmes juridiques.  Bien qu’elle puisse appuyer l’utilisation de sources juridiques nationales pour cette analyse comparative, la délégation aimerait approfondir l’argument selon lequel les règles des organisations internationales pourraient également être prises en compte.  La déléguée a aussi convenu que la transposition d’un principe commun aux principaux systèmes juridiques du monde dans le système juridique international n’est pas automatique, et que des défis peuvent se poser.  Enfin, sur l’identification des principes généraux du droit formés dans le système juridique international, elle a réitéré le point de vue selon lequel la Commission du droit international (CDI) devrait d’abord déterminer s’il existe une pratique étatique suffisante pour considérer comme principes généraux du droit les principes qui sont formés dans le système juridique international, comme le prévoit le projet de conclusion 3 b). 

Au sujet de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme MAITÊ DE SOUZA SCHMITZ (Brésil) a estimé que la responsabilité de l’État pour des faits internationalement illicites est essentielle pour garantir l’efficacité du droit international.  Cette responsabilité ne devrait donc pas disparaître dès lors que la personnalité juridique d’un État cesse d’exister.  Pour la délégation brésilienne, la règle de la « table rase » n’est pas une réponse appropriée mais, dans le même temps, elle est d’avis que la succession automatique ne devrait pas constituer une règle générale car elle ne reflète pas la pratique des États.  Partant, elle s’est prononcée pour une analyse au cas par cas.  La déléguée a par ailleurs exprimé son accord avec la nature subsidiaire des projets d’articles, qui ne peuvent se substituer aux accords entre les États concernés.  Elle a estimé que les résultats des travaux sur cette question ne devraient pas nécessairement prendre la forme de projets d’articles, leur préférant des projets de directive ou des projets de principe. 

En venant au chapitre relatif aux principes généraux du droit, la déléguée s’est félicitée que les travaux comblent des lacunes sur les sources du droit international et aident à préciser l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Pour qu’un principe général du droit existe, a-t-elle fait observer, il doit être reconnu par la communauté internationale, et en particulier par les États.  À cet égard, elle a salué la décision d’abandonner l’expression obsolète « nations civilisées » figurant dans le Statut de la CIJ mais a dit préférer une terminologie plus précise que celle de « communauté des nations », afin de refléter le rôle premier des États dans la formation du droit international.  S’agissant de l’analyse comparative des systèmes juridiques pour déterminer les principes généraux du droit, la déléguée a regretté le peu de références aux supports provenant des pays lusophones et, de ce fait, à leur tradition juridique.  Elle a donc suggéré d’élargir la portée géographique et linguistique de l’analyse pour veiller à une couverture représentative des divers systèmes juridiques nationaux.  

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme MINE OZGUL BILMAN (Turquie) a dit que la distinction entre faits composites et faits à caractère continu n’est pas claire.  Elle a donc demandé des discussions plus poussées sur l’article 7 bis en appelant à la prudence.  La déléguée a souligné la nature subsidiaire des projets d’articles en soulignant la primauté des accords conclus entre États concernés.  Elle a rappelé que la théorie de la continuité dans ce domaine est controversée avant de noter les divergences sur une affaire incluse dans le rapport ayant trait à l’ancien Empire ottoman. 

Sur les principes généraux du droit, la déléguée a dit son accord avec l’approche globale, en demandant des critères d’identification restrictifs. Elle a salué la décision d’écarter l’expression « nations civilisées » contenue dans l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  La déléguée a enfin noté les difficultés d’identifier les principes formés dans le cadre du système juridique international, la pratique étant insuffisante dans ce domaine. 

Pour ce qui est de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme ALESSANDRA FALCONI (Pérou) a souligné le caractère subsidiaire des projets d’article.  Elle a espéré que le débat sur cette question se poursuivra au sein de la Commission et sera fructueux, indiquant que le rôle des concepts d’équité et de répartition des droits et obligations, ainsi que la nécessité de conjuguer la codification avec le développement progressif du droit international, revêtent une importance particulière. 

S’exprimant ensuite sur les principes généraux du droit, la déléguée a jugé pertinent qu’un futur rapport traite des rapports des principes généraux du droit avec d’autres sources du droit international.  Elle a également estimé opportun d’aborder les rapports entre les principes généraux du droit et les normes du jus cogens.  Par ailleurs, l’expression « nations civilisées » ne devrait plus être utilisée.  D’après elle, le terme « communauté des nations » est ambivalent, le concept de nation n’étant pas assimilé à celui d’État.  L’expression « reconnue par les États » ou « reconnue par la pratique des États » serait, de l’avis du Pérou, la plus adéquate.  Enfin, la déléguée a pensé que l’élément central dans l’identification des principes généraux du droit est la reconnaissance de ces principes par les États.  La pratique des organisations internationales, dans la mesure où toutes leurs décisions ne sont pas contraignantes, ne pourrait pas être assimilée à celle des organismes supranationaux, a-t-elle conclu. 

Rappelant que le sujet de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État s’est avéré compliqué, Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a salué l’approche prudente de la Commission du droit international (CDI).  Mais, bien que la prudence soit de mise, la pertinence continue des règles sur la succession d’États et la répartition de la responsabilité entre l’État successeur et l’État ou les États prédécesseurs soulignent l’importance de poursuivre les discussions, a estimé Mgr Caccia.  Les pratiques des États sur le sujet sont rares, a-t-il noté, appelant à poursuivre la collecte d’informations sur les pratiques existantes.  Il a ensuite souligné l’importance de fournir des efforts plus spécifiques, afin de clarifier les obligations de cessation des actes intentionnellement illicites qui ont un caractère continu, ainsi que la garantie de non-répétition de tels actes à l’avenir. 

Passant ensuite à la question des principes généraux de droit, l’observateur a rappelé que l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ) reste la présentation la plus solide des sources du droit international.  Le Saint-Siège soutient l’approche adoptée par la CDI dans l’examen des principes généraux du droit, y compris pour l’identification précoce des paramètres clefs comme le fait que la reconnaissance est la condition essentielle de l’existence d’un principe général de droit.  Par ailleurs, la délégation a réaffirmé la centralité des traités pour le droit international et l’ordre juridique international.  La Commission et la CDI ne doivent pas contribuer à la confusion croissante entre la nature juridique et juridiquement contraignante des instruments internationaux et la nature non juridique et non contraignante des propositions, avis, rapports ou documents privés. 

Rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation - A/76/33A/76/186A/76/233

M. EDGAR DANIEL LEAL MATTA, Président du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, a présenté le Rapport du Comité (A/76/33), qui s’est réuni du 16 au 24 février 2021 au Siège de l’Organisation des Nations Unies.  Ce Rapport, a-t-il décliné, se compose de cinq chapitres et d’une annexe.  Le premier de ces chapitres est entièrement procédural. 

Le chapitre II du Rapport porte sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Il se compose de cinq sections: adoption et l’application des sanctions imposées par l’ONU; Examen de la version révisée de la proposition faite par la Libye aux fins de renforcement du rôle de l’Organisation des Nations Unies dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales; Examen de la version révisée du document de travail présenté par le Bélarus et la Fédération de Russie; Examen de la version révisée du document de travail présenté par Cuba sur le thème « Renforcer le rôle de l’Organisation et la rendre plus efficace: adoption de recommandations »; Examen de la nouvelle version révisée du document de travail présenté par le Ghana sur le renforcement des relations et de la coopération entre l’Organisation des Nations Unies et les mécanismes ou organismes régionaux dans le domaine du règlement pacifique des différends. 

Le chapitre III, a précisé le Président, traite de la question du règlement pacifique des différends et se décline en trois sections, qui portent sur le débat thématique annuel du Comité spécial sur les moyens de règlement des différends; sur la proposition de la Fédération de Russie concernant la mise en ligne d’un site Web sur le règlement pacifique des différends et la mise à jour du Manuel sur le règlement pacifique des différends entre États par le Secrétariat; et sur la célébration du quarantième anniversaire de la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux. 

Le chapitre IV du Rapport résume les débats du Comité spécial sur le Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies et le Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité.

Quant au chapitre V, il concerne l’examen des points restants à l’ordre du jour du Comité spécial, et est composé d’une section contenant un résumé de la discussion sur les méthodes de travail du Comité spécial et d’une section sur la définition de nouveaux sujets. 

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran), au nom du Mouvement des pays non alignés, a réitéré son inquiétude face à « l’empiètement continu » du Conseil de sécurité sur les fonctions et les pouvoirs de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social en abordant des questions qui relèvent de la compétence de ces derniers.  Les sanctions imposées par le Conseil préoccupent les pays membres du Mouvement, qui est d’avis que l’imposition de sanctions doit être considérée comme un dernier recours.  « Les sanctions sont des instruments brutaux, dont l’utilisation soulève des questions éthiques fondamentales », a poursuivi la déléguée.  L’objectif des sanctions n’est pas de punir ou d’infliger un châtiment à la population, a-t-elle argué.  À cet égard, le Mouvement estime que les objectifs des régimes de sanctions devraient être clairement définis sur la base de fondements juridiques défendables, et que leur imposition devrait être limitée dans le temps.  Enfin, ces sanctions devraient être levées dès que les objectifs sont atteints.  Les conditions exigées de l’État ou de la partie à laquelle les sanctions sont imposées devraient également être clairement définies et faire l’objet d’un suivi de leurs effets et d’un examen périodique.  

Mme Ershadi a aussi exprimé sa profonde préoccupation concernant l’imposition de lois et d’autres formes de mesures économiques coercitives contre les pays en développement, y compris les sanctions unilatérales, qui « violent » la Charte des Nations Unies et « sapent le droit international » ainsi que les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Concernant les propositions au titre des points de l’ordre du jour relatifs au maintien de la paix et de la sécurité ainsi qu’au règlement pacifique des différends, elle s’est inquiétée de la « réticence » de certains États Membres à engager une discussion sérieuse. 

Mme DANIELA GAUCI, déléguée de l’Union européenne, évoquant les sanctions imposées par l’ONU, a rappelé que ces sanctions font parties de l’arsenal du Conseil de sécurité pour assurer la paix et la sécurité internationales.  L’Union européenne (UE) met en œuvre ces sanctions de manière intégrale et opportune, a assuré la déléguée, ajoutant soutenir les travaux menés au niveau des Nations Unies pour soutenir la mise en œuvre, l’orientation et le renforcement des capacités, afin que les sanctions aient un impact maximal au niveau mondial.  L’UE s’est également employée à soulever la question de la régularité de la procédure en ce qui concerne les désignations faites par l’ONU, à la lumière des prescriptions définies par la Cour de justice de l’UE lorsqu’elle se prononce sur des désignations contestées au sein de l’Union.  

Passant ensuite au sujet du « Règlement pacifique des différends », Mme Gauci s’est réjouie de pouvoir discuter lors de la session 2022 du Comité spécial du sous-thème « Échange d’informations sur les pratiques des États concernant le recours au règlement judiciaire ».  Concernant le Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies et le Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité, Mme Gauci a remercié ceux qui ont versé des contributions volontaires au fonds d’affectation spéciale permettant des progrès. 

Enfin, la délégation a encouragé le Comité spécial à réfléchir à son ordre du jour et à ses méthodes de travail.  Nous constatons en effet qu’un certain nombre de propositions inscrites à son ordre du jour depuis des années, voire des décennies, restent en souffrance, a regretté Mme Gauci.  « Le temps et les ressources doivent donc être alloués là où ils sont le plus nécessaires pour éviter les doublons et l’inertie. »  Elle a appelé le Comité spécial à évaluer les points à l’ordre du jour en fonction de leur pertinence et de la probabilité de parvenir à un consensus.  « Nous devons insuffler un nouveau souffle aux travaux du Comité », a conclu la déléguée. 

Au nom du Groupe des amis de la Charte des Nations Unies, M. SAMUEL MONCADA (République bolivarienne du Venezuela) a rappelé que la Charte des Nations Unies est un code de conduite qui régit les relations internationales sur la base de principes intemporels tels que l’égalité souveraine des États, la non-intervention dans les affaires intérieures des États, le non-recours à la menace ou à l’usage de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique des États.  Aussi le Groupe estime que veiller au respect tant de la lettre que de l’esprit de la Charte est essentiel pour garantir le respect des trois piliers de l’Organisation, ainsi que pour avancer vers un monde plus pacifique et prospère et vers un ordre mondial véritablement juste et équitable.  

Dans ce contexte, le Groupe a exprimé sa vive préoccupation face aux menaces actuelles et croissantes contre la Charte, a indiqué M. Moncada.  Il a notamment fait référence au recours de plus en plus fréquent à l’unilatéralisme, aux attaques contre le multilatéralisme, aux prétendues exceptions, aux tentatives d’ignorer les buts et principes énoncés dans la Charte et même de leur substituer un nouvel ensemble de soi-disant « règles » qui n’ont jamais été discutées de manière inclusive ou transparente, et aux approches sélectives ou aux interprétations biaisées des dispositions de la Charte.  Plutôt que de contribuer à régler les défis complexes auxquels l’humanité fait face, ces pratiques ne font qu’alimenter l’incertitude, l’instabilité, la défiance et les tensions dans le monde, a asséné M. Moncada. 

Le Groupe des amis attache une grande importance au travail du Comité spécial, conscient qu’il peut jouer un rôle actif et constructif dans l’amélioration des capacités de l’ONU pour lui permettre d’atteindre ses buts, y compris en renforçant le rôle de l’Organisation, a fait valoir M. Moncada.  À cet égard, il en a profité pour exprimer sa préoccupation face au manque de volonté de certains États Membres à l’heure d’entamer un débat de fond pour examiner les intéressantes propositions du Comité.  Il a appelé ces États à faire montre de volonté politique d’exécuter le mandat du Comité spécial afin de parvenir à un résultat aussi fructueux qu’en 1982, lors de l’adoption de la Déclaration de Manille.

M. SANDRO INASHVILI (Géorgie), au nom de l’Ukraine, de la Géorgie et de la République de Moldova, a appelé la Fédération de Russie à « respecter ses obligations en Crimée », et la communauté internationale à redoubler d’efforts pour que la Fédération de Russie mette un terme à « toutes les violations des droits humains en Crimée ».  Il a dénoncé toute tentative unilatérale de s’opposer à la primauté du droit, ajoutant que l’Ukraine était attachée au règlement pacifique du droit et du règlement des différends.  La République de Moldova n’a cessé d’avoir recours à la Charte pour s’opposer à l’occupation de son sol, a poursuivi le délégué, énumérant de multiples résolutions de l’Assemblée générale consacrées au « retrait des forces militaires étrangères et de l’armement étranger de la République de Moldova ».  

Le délégué a aussi déclaré que la Géorgie a toujours respecté le règlement pacifique des différends, c’est pourquoi elle s’oppose à « l’occupation » de la région d’Abkhazie.  Nous poursuivons toutes les politiques de règlement des conflits, pour venir en aide aux communautés divisées par l’occupation, a-t-il assuré.  Dans le même temps, la Géorgie a recours aux moyens judiciaires, comme la Cour européenne des droits de l’homme, qui a récemment reconnu les violations massives commises contre la population géorgienne et du personnel militaire géorgien, ainsi que des privations de droit au retour. 

M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (Iran) a déclaré que les relations internationales sont gravement menacées par l’interprétation arbitraire des principes et règles du droit international, y compris la Charte.  Le délégué a ainsi fustigé les interprétations erronées faites de l’article 51 sur la légitime défense.  Il a appuyé la proposition de la Fédération de Russie et du Bélarus de demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les conséquences juridiques d’un recours à la force sans l’autorisation du Conseil de sécurité, si ce n’est pour l’exercice du droit à la légitime défense.  Il a déploré que les sanctions imposées par l’ONU dépendent de la « volonté politique d’un petit nombre de pays » et plaidé pour des critères dans l’imposition de sanctions.  Parmi eux, M. Ghorbanpour Najafabadi a mentionné des critères liés à l’égale souveraineté des États et le respect des droits les plus élémentaires des pays touchés.  Il a ensuite appelé à l’élaboration d’un cadre sur les mesures coercitives unilatérales, eu égard à leurs graves conséquences, et mentionné la proposition que son pays a faite à cette fin.  Il est temps que le Comité spécial se penche sur cette proposition, a dit le délégué.  Enfin, il a rappelé qu’accueillir les Nations Unies est un grand privilège qui s’accompagne de responsabilités spécifiques.  En conclusion, le délégué a invité le pays hôte à s’acquitter de ses obligations de manière responsable et sans discrimination. 

Mme ARIANNA CARRAL CASTELO (Cuba) a souligné l’importance du mandat du Comité spécial de la Charte dans les circonstances internationales actuelles, quand quelques pays essaient de réinterpréter les principes de la Charte pour mener des politiques axées sur l’interventionnisme et l’ingérence dans les affaires internes des États, aux dépens de leur intégrité et de leur souveraineté, en particulier dans les pays en développement.  C’est le cas des États-Unis, qui imposent des mesures coercitives unilatérales, notamment le blocus économique, financier et commercial imposé au peuple de Cuba, au seul motif qu’il a exercé librement son droit à l’autodétermination, a dénoncé la déléguée.  « Et comme si cela ne suffisait pas, ils s’arrogent également le droit d’affecter les relations économiques entre Cuba et des pays tiers. »  

Pour Cuba, le respect et la promotion des normes de la Charte des Nations Unies sont essentiels.  Le rôle de l’Assemblée générale doit être préservé et renforcé en sa qualité d’organe principal normatif et de représentation de l’ONU.  Quant au Comité spécial, il s’agit du cadre idoine pour négocier tout amendement à la Charte et veiller à ce que tous les États Membres et organes de l’ONU agissent conformément à ses buts et ses principes.  Malgré les tentatives d’entraver les travaux du Comité dues au manque de volonté politique de certains États, qui ne souhaitent pas avancer dans l’analyse des propositions, des résultats concrets sont à souligner, a reconnu la déléguée.  Par exemple, le débat sur les moyens pacifiques de trouver une solution aux différends, tenu ces trois dernières années et le nombre d’initiatives présentées cette année, attestent de l’importance du Comité. 

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a attaché une grande importance au travail du Comité spécial de la Charte, en raison du rôle du diplomate philippin M. Carlos P. Romulo.  Ce dernier avait fait remarquer que la plupart des États Membres n’avaient pas eu l’occasion d’exprimer leurs opinions sur la Charte, n’ayant pas été présents lors de la fondation de l’ONU.  Il avait donc plaidé en faveur d’un comité qui faciliterait une « nouvelle étude sur la Charte », a rappelé la déléguée, ajoutant que l’une des réalisations les plus importantes de ce Comité était la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux (1982).  Son approbation par consensus a clarifié le droit international existant et engendré une compréhension commune des principes et règles applicables au règlement pacifique des différends internationaux.  La déléguée a salué la prise en compte par le chapitre III du Rapport du Comité spécial de la discussion sur la commémoration du quarantième anniversaire de la Déclaration de Manille.  Évoquant le projet de résolution sur cet évènement, recommandé par le Comité spécial, elle a espéré l’appui des États.  

S’agissant du maintien de la paix et la sécurité internationales, la déléguée a dit que les sanctions ne doivent être imposées qu’en dernier recours, et toujours en accord avec la Charte.  « Nous ne souscrivons pas à l’imposition de sanctions unilatérales en violation du droit international. »  Les sanctions doivent prendre la forme de mesures précisément ciblées.  Les objectifs des régimes de sanctions doivent être clairement définis, fondés sur des bases juridiques défendables, imposés dans un délai précis, soumis à un contrôle et à un examen périodique et levés dès que les objectifs ont été atteints, a-t-elle poursuivi.  Par ailleurs, la déléguée a apporté son soutien à la proposition de Cuba sur le renforcement du rôle de l’ONU et de son efficacité, ainsi qu’à celle du Ghana.  

Droit de réponse

Le délégué de la Fédération de Russie a réagi à la déclaration de la Géorgie et dénoncé le fait de discuter de questions qui n’ont rien à voir avec le sujet de ce jour.  « C’est un manque de respect à l’endroit de la Commission. »

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