Comité spécial: la France explique les différents scénarios selon le résultat du référendum d’autodétermination prévu le 12 décembre 2021 en Nouvelle-Calédonie
La France a confirmé ce matin au Comité spécial de la décolonisation, la tenue le 12 décembre 2021 d’une troisième consultation référendaire sur l’accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté et à l’indépendance. À l’issue de ce scrutin, a-t-elle annoncé, elle s’engage à ne pas demander « de manière unilatérale » le retrait de la Nouvelle-Calédonie de la liste des territoires non autonomes avant le 30 juin 2023. Pour sa part, Guam a demandé l’appui de l’Administration du Président Joe Biden à l’organisation d’un référendum d’autodétermination.
Le Comité spécial, qui a entamé aujourd’hui la deuxième journée de sa session de fond 2021, a examiné outre les questions de la Nouvelle-Calédonie et de Guam, celles de Montserrat, de Pitcairn, de Sainte-Hélène, des Îles Turques et Caïques et des Îles Vierges américaines, mais sans débat. Il a en outre décidé de tenir son Séminaire régional des Caraïbes à la Dominique, du 25 au 27 août 2021.
M. Nicolas de Rivière, Représentant permanent de la France auprès des Nations Unies, a indiqué qu’après avoir décidé d’organiser une troisième consultation référendaire le 12 décembre prochain sur l’accession du territoire de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté et à l’indépendance demandée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, le Premier Ministre français a réuni les principales formations politiques calédoniennes à Paris du 26 mai au 1er juin 2021, sur la base d’un document de travail préparé par l’État, sur les implications pratiques du « oui » ou du « non » pour la population de Nouvelle-Calédonie, notamment en termes juridique, économique, financier et matériel.
À travers ce document, a indiqué M. de Rivière, la France propose de mettre en place une période de convergence, de discussion et de stabilité ou « de transition » afin de sécuriser la fin de l’Accord de Nouméa qui devra permettre de définir, dans un cadre conforme au résultat du scrutin, les nouvelles institutions de la Nouvelle-Calédonie. Les discussions sur ce projet donneront lieu à un nouveau référendum d’ici au 30 juin 2023.
M. de Rivière a annoncé que la France ne demandera pas de manière unilatérale le retrait de la Nouvelle-Calédonie de la liste des territoires non autonomes avant que le droit à l’autodétermination, qui est garanti par la Constitution française, ait pu être pleinement exercé, c’est-à-dire avant la fin de cette période de transition.
La réunion de Paris, a-t-il poursuivi, a permis d’apporter des clarifications sur ce qui se passera à l’issue du troisième scrutin. La première consultation référendaire de 2018 avait donné un résultat de 56,67% en faveur du « non » à l’indépendance et la deuxième de 2020, un résultat de 53,36% également en faveur du « non », avec une très large participation de plus de 80% dans les deux cas.
À Paris, les participants ont discuté, en cas de victoire du « oui », de la durée de la transition, courte pour certains sujets comme les transferts financiers depuis la métropole, longue pour d’autres comme la formation des cadres nécessaires à la souveraineté. Ils ont aussi parlé de l’accès à la double nationalité sous certaines conditions mais pas pour tous les citoyens du nouvel État, de la recherche sincère d’un partenariat avec la France, sans garantie de réussite, du refus de la partition du territoire.
En cas de victoire du « non », les parties ont débattu de la garantie sur l’absence d’une demande unilatérale de retrait de la liste des territoires non autonomes à l’ONU, de l’irréversibilité des compétences déjà transférées par l’État aux institutions de la Nouvelle-Calédonie, de l’ouverture partielle du corps électoral pour les élections provinciales, du soutien de la France à la conduite des principales réformes, s’il est demandé, et une nouvelle fois, du refus de la partition du territoire.
Alors que s’ouvre cette nouvelle phase importante du processus en Nouvelle-Calédonie, M. de Rivière a dit vouloir maintenir avec le Comité spécial et avec les Nations Unies en général une étroite coopération. Mon pays est prêt, a-t-il promis, à accueillir une nouvelle mission de visite en amont du troisième référendum, si le Comité en fait la demande, de manière physique ou virtuelle en fonction des contraintes liées à la situation pandémique. La France continuera également de solliciter l’assistance électorale des Nations Unies, pour la révision complémentaire des listes électorales et lors du scrutin du 12 décembre 2021.
Pour Mme Sonia Backès, pétitionnaire favorable au maintien de la Nouvelle-Calédonie au sein de la France, ce troisième référendum devra marquer la fin d’un processus de décolonisation engagé il y a plus de 30 ans. Le choix de l’indépendance, a-t-elle averti, c’est le choix de perdre la nationalité française pour certains Calédoniens ou pour leurs enfants, c’est le choix de ne plus bénéficier de la protection militaire ou sanitaire de la France, c’est le choix, enfin, d’une indépendance qui se transformerait rapidement en dépendance de l’aide internationale.
Il n’y a plus en Nouvelle-Calédonie, a-t-elle affirmé, une puissance administrante et un peuple colonisé. Aujourd’hui, aucun Calédonien, quelle que soit son origine, ne se trouve sujet « à une subjugation », « à une domination » ou à « une exploitation » étrangères. Aujourd’hui encore, a-t-elle dénoncé, ce sont plus de 20% des résidents calédoniens parfois installés depuis plus de 20 ans qui ne pourront pas voter au prochain référendum.
Pour la pétitionnaire, l’avenir c’est la fin de l’Accord de Nouméa et la délicate problématique de la désinscription de la Nouvelle-Calédonie de la liste des territoires non autonomes. En décidant par trois fois, de manière libre et volontaire de rester intégrée à la France, la population calédonienne intéressée aura exercé son droit à l’autodétermination. « Ma conviction c’est que ce sera à nous Calédoniens, de prendre en main notre destin en décidant nous-mêmes quand et comment doit continuer de s’exercer le droit à l’autodétermination », a lancé Mme Backès.
Au nom du Gouverneur de Guam, M. Anthony M. Babauta a dénoncé l’opposition des États-Unis à l’exercice du droit à l’autodétermination du peuple chamorro et la poursuite de la militarisation de son territoire, laquelle a engendré la violation des droits à un environnement propre, à la culture, à la santé et à la vie, a martelé le représentant qui a souhaité voir ses revendications reprises dans la résolution de cette année. M. Babauta a affirmé que la présence militaire américaine est une entrave à la pleine réalisation du potentiel social, économique et politique de Guam.
Le Gouvernement de Guam poursuit ses efforts pour éduquer la population sur ses droits politiques car il est déterminé à organiser un référendum d’autodétermination. Le représentant du Gouverneur a demandé à la Puissance administrante de repenser le statut colonial de Guam. Alors que l’Administration du Président Joe Biden a reconnu les inégalités qui existent dans sa relation avec ses territoires, notamment en termes de droit de vote, le Gouverneur l’a appelé à corriger son passé colonial et le statut politique de Guam.
Le Gouverneur a aussi prévenu que rien ne peut se substituer à l’exercice du droit à l’autodétermination et d’un référendum à Guam. Il a personnellement demandé l’appui de l’administration américaine à une législation en ce sens. Le peuple chamorro mérite la même chance de déterminer son avenir politique que les pères fondateurs de la Puissance administrante de Guam, a insisté le Gouverneur.
Aujourd’hui, son représentant a demandé au Comité spécial d’organiser une mission de visite à Guam. Il a espéré être en mesure d’annoncer une date pour un référendum d’autodétermination à Guam, l’année prochaine au Comité. Soulignant que la sécurité de la région est en large partie assurée par les États-Unis, M. Max Hufanen, représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, a estimé que l’autonomie de Guam pourrait parfaitement coexister avec la présence américaine dans la région.
La prochaine séance plénière du Comité spécial sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.