En cours au Siège de l'ONU

SC/14366

Au Conseil de sécurité, divergences de vue sur l’impasse du processus constitutionnel et la persistance de la crise humanitaire en Syrie

Ce matin, la séance mensuelle du Conseil de sécurité sur les volets politique et humanitaire de la crise syrienne a été, une nouvelle fois, l’occasion pour ses membres d’afficher leurs divergences de vue sur ces deux dossiers, en particulier s’agissant d’établir les responsabilités de la stagnation du processus constitutionnel en Syrie et de la détérioration des conditions de vie de la population civile, après presque 10 ans de guerre.

Après avoir annoncé la tenue de la quatrième session, du 30 novembre au 4 décembre à Genève, de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle syrienne, l’Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie, Mme Khawla Matar, a reconnu que les progrès espérés n’avaient pas été pleinement réalisés jusqu’à présent. Elle a cependant estimé que l’engagement des parties syriennes vis-à-vis de cette réunion et de la suivante –prévue en janvier–, de même que leur accord sur l’ordre du jour sont des gages de « bonne foi » et de « pragmatisme ».

Plaidant aussi pour un « esprit de compromis », la haut fonctionnaire a rappelé que la voie constitutionnelle ne peut à elle seule résoudre la crise, au moment où le calme « fragile et relatif » sur le terrain est de plus en plus menacé par des échauffourées entre le régime syrien et les groupes armés d’opposition dans le nord-ouest du pays, malgré la coopération turco-russe.  Alarmée par les frappes israéliennes, Mme Matar a ensuite dénoncé la poursuite par Daech de ses opérations, « rappel de la magnitude du défi terroriste » auquel fait face la Syrie.

L’Envoyée spéciale adjointe a fermement appelé les parties à respecter la résolution 2254 (2015), qui prévoit notamment un cessez-le-feu national, un accès à l’aide humanitaire et la remise en liberté des détenus ainsi que la nécessité de garantir le retour des réfugiés syriens dans la sécurité et la dignité.

Pour la France, « le régime refuse de participer de bonne foi au processus politique, car il est clair qu’il cherche à revenir sur les termes de référence qu’il a pourtant endossés ».  Les États-Unis ont blâmé le « régime d’al-Assad » et leurs « alliés » -Fédération de Russie, Chine et République islamique d’Iran– pour l’impasse dans laquelle se trouve le processus politique et constitutionnel.  Pour la délégation américaine, une paix durable ne sera possible que lorsque ces derniers accepteront un accord politique sous les auspices de l’ONU conforme à la résolution  2254 (2015); lorsque les avions russes et du régime syrien cesseront leurs bombardements; lorsque le soutien iranien au terrorisme cessera; et enfin lorsque l’obstruction russe et chinoise à ce Conseil prendra fin.

De son côté, l’Allemagne a jugé «  tout à fait absurde  » de prétendre qu’il n’y a plus de conflit en Syrie et que l’on se dirige vers la paix.  Avec d’autres membres du Conseil, elle a dénoncé la conférence sur les réfugiés, organisée à Damas le mois dernier comme « un pur exercice de propagande ».  Renchérissant, les États-Unis ont par ailleurs fustigé « l’audace du régime syrien qui demande des fonds pour la reconstruction alors qu’il a plongé son pays dans la guerre civile et continue de tuer sa propre population ».

Rappelant que le processus politique et l’avenir de la Syrie doivent être déterminés par son peuple en toute indépendance, la Chine a jugé que « le cessez-le feu ne pouvait tenir lieu de blanc-seing pour les terroristes ».  Un point de vue repris à son compte par la Russie, qui a appelé les Occidentaux « à cesser de soutenir des combattants qui ne sont en réalité que des terroristes téléguidés ».  L’Iran a prêté à certains États des tentatives d’imposer leur propre volonté au peuple syrien, voyant en eux les véritables responsables de la prolongation du conflit, ce qui est « illégal, immoral et voué à l’échec ».

Se félicitant de la tenue de la conférence sur les réfugiés à Damas, la Syrie, quant à elle, a décrié les « machination politiques » de ses détracteurs et réclamant la fin de « l’occupation étrangère et de ses crimes », y compris le pillage des ressources syriennes.

La crise humanitaire dans le pays a également retenu l’attention des membres du Conseil, informés des derniers développements par le Sous-Secrétaire général par intérim.  M. Ramesh Rajasigham leur a dressé un bilan alarmant de la situation, rappelant que la Syrie compte 6,7 millions de personnes déplacées internes, dont un tiers manquent d’abris décents à l’approche de l’hiver, tandis que 3 millions dépendent d’une aide saisonnière.

De plus, si la livre syrienne n’est plus aussi volatile, les prix des denrées de base ont atteint un pic historique, plaçant 9,3 millions de personnes dans l’insécurité alimentaire.  Dénonçant les abus et violations des droits de l’homme dont sont victimes les civils, le haut fonctionnaire a aussi fait état de l’effet dévastateur des engins explosifs improvisés et du sous-financement cruel des opérations de déminage pour lesquels l’ONU a besoin de 18 millions de dollars.

M. Rajasigham a en outre critiqué les obstacles à l’acheminement de l’aide, à l’origine de pénuries d’articles et de matériels médicaux dans les hôpitaux.  Des propos réitérés par la Belgique, qui a jugé « illogique » que certains membres du Conseil aient choisi d’entraver l’accès plutôt que de le garantir, dans un contexte de lutte contre la pandémie de COVID-19.  Pour leur part, la Chine et la Russie ont salué les efforts du Gouvernement syrien dans le redressement économique du pays et l’acheminement de l’aide.

La Belgique et l’Allemagne, toutes les deux délégations porte-plumes des résolutions du Conseil sur la crise humanitaire en Syrie, ont balayé l’argument selon lequel la lutte contre la pandémie justifierait la levée des sanctions imposées à Damas.  La seconde a estimé que l’Union européenne n’en fera rien s’agissant des siennes, tant que le régime syrien ne respectera pas le droit international et le droit international humanitaire.

Mme KHAWLA MATAR, Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie, a annoncé que la quatrième session de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle se tiendrait à Genève du 30 novembre au 4 décembre, grâce à l’accord conclu entre ses deux coprésidents.  Cette commission y poursuivra les discussions entamées lors de la troisième session sur la fondation et les principes nationaux, tandis que la cinquième session, en janvier 2021, portera sur les principes constitutionnels.  Sur le fond, Mme Matar a constaté que les progrès espérés n’ont pas été pleinement réalisés, mais que l’engagement des parties syriennes sur le contenu des deux réunions et leur accord sur l’ordre du jour représentent des raisons d’envisager le processus politique « avec bonne foi et pragmatisme ».  « Si ces sessions se déroulent de manière substantielle et dans un esprit de compromis, nous estimons que cela aidera à établir la confiance et faire des progrès », a déclaré la haut fonctionnaire, en ajoutant qu’elle espérait profiter aussi des contributions et du soutien des membres du Comité consultatif des femmes syriennes sur tous les aspects du processus constitutionnel.

L’Envoyée spéciale adjointe a rappelé que la voie constitutionnelle ne peut à elle seule résoudre la crise, et que le travail de la Commission doit s’accompagner d’une action de la part des Syriens eux-mêmes et des acteurs internationaux sur la mise en œuvre de la résolution 2254.  En dépit de violations du cessez-le-feu national, un calme « fragile et relatif » s’est largement maintenu à travers le pays au cours du mois écoulé, a constaté Mme Matar.  Mais il est de plus en plus menacé, comme ce mois-ci dans le nord-ouest de la Syrie, qui a été le théâtre de frappes aériennes, d’échanges de tirs et d’affrontements entre le Gouvernement et les groupes armés d’opposition.  Si nous voyons une coopération entre Russes et Turcs visant à préserver le calme et confronter le terrorisme, a observé Mme Matar, reste que les violences ont repris dans le nord-est et le sud-ouest de la Syrie, ainsi que les frappes israéliennes et la poursuite des opérations de Daech, rappel de la magnitude du défi terroriste auquel fait face la Syrie.

Dans le contexte de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, Mme Matar s’est félicitée des consultations du Comité consultatif des femmes syriennes qui ont déclaré que paix et sécurité impliquent la fin de toutes formes de violence à leur encontre.  Or, les Syriennes souffrent de violences sexuelles et sexistes, aggravées par les mesures de confinement contre la COVID-19, de même que les mariages précoces et le harcèlement sexuel, alors que les femmes sont à l’avant-garde des initiatives pour répondre à la crise, a rappelé l’Envoyée spéciale adjointe.

Au même moment, tous les Syriens souffrent de difficultés économiques, avec la dépréciation de la devise nationale, source d’inflation et de baisse du pouvoir d’achat, a poursuivi la haut fonctionnaire.  Ces derniers mois, les pénuries de pain et de carburant ont affecté les conditions de vie des Syriens d’une façon sans précédent.  Mme Matar a ensuite évoqué le sort des détenus, des personnes enlevées ou disparues, regrettant le manque de progrès dans la libération de prisonniers.  « Nous continuerons en toutes circonstances à insister sur ce point en tant qu’impératif humanitaire et comme étape indispensable au retour de la confiance », a-t-elle insisté.  La priorité est la remise en liberté massive des femmes, des enfants, des malades et des personnes âgées, ainsi qu’à la fourniture d’un accès humanitaire aux lieux de détention.

L’Envoyée spéciale adjointe a confirmé que la situation de millions de Syriens réfugiés ou déplacés continue à se détériorer, l’ONU demandant à nouveau aux parties de permettre leur retour sûr, volontaire et dans la dignité.  Or, ces retours seront compromis si la sécurité personnelle de ces populations déracinées n’est pas garantie, ni leurs moyens de subsistance, l’accès aux services base, ainsi que la réhabilitation de leurs foyers, de leurs propriétés et de leurs terres.

La résolution 2254 contient tous les éléments considérés comme nécessaires à une solution politique, a résumé Mme Matar: le respect de la souveraineté, de l’unité, de l’indépendance et de l’intégrité territoriales syriennes et un processus politique dirigé par les Syriens eux-mêmes.  Cela implique un processus constitutionnel débouchant sur des élections libres, justes et inclusives, un cessez-le-feu national, une réponse aux organisations terroristes conforme au droit international, la protection des civils, l’accès à l’aide humanitaire, la libération des détenus, les mesures de rétablissement de la confiance, le retour des réfugiés et déplacés et la reconstruction, a-t-elle précisé.  Cinq ans après l’adoption de ladite résolution, a noté Mme Matar, l’Envoyé spécial cherche activement à identifier de nouvelles manières de promouvoir le processus en cours, en multipliant les entrevues avec des dizaines de représentants de pays concernés par la question syrienne.  Elle a ajouté qu’il se concentre actuellement sur la réunion de la Commission constitutionnelle à Genève, la semaine prochaine, en espérant que les débats seront abordés dans un esprit de compromis et d’engagement sérieux.

M. RAMESH RAJASIGHAM, Sous-Secrétaire général par intérim aux affaires humanitaires, Coordonnateur adjoint des secours d’urgence, rendant compte de la situation humanitaire en Syrie, a déclaré qu’à ce jour, la Syrie compte 6,7 millions de personnes déplacées internes.  L’évaluation du Bureau de la coordination des affaires humanitaire (OCHA) montre qu’un tiers d’entre elles manquent d’abris décents.  Ce qui signifie en termes clairs qu’elles vivent dans des espaces publics, tels des écoles, des immeubles encore en construction ou des tentes qui ne fournissent pas assez de protection face aux éléments naturels.  L’hiver qui approche est particulièrement rude pour les personnes qui n’ont pas de d’abris adéquat, sans compter les besoins en chauffage, couverture, habits chauds et chaussures, a expliqué M. Rajasigham.  L’OCHA chiffre à plus de trois millions le nombre de personnes à travers la Syrie qui ont besoin d’une assistance dans ces domaines.  De plus, les pluies torrentielles qui s’abattent sur certaines régions ont déjà causé la destruction de centaines de tentes, notamment à Edleb et à l’ouest d’Alep.  Les inondations résultant de ces pluies rendent également difficile l’accès à ces zones et la délivrance de l’aide.  À cause du froid, les déplacés internes brûlent tout ce qu’ils peuvent, y compris leurs affaires personnelles, les forçant ainsi à vivre dans un environnement pollué par les fumées toxiques, s’est-il désolé.

Concernant la crise économique, a poursuivi le Sous-Secrétaire général par intérim, la livre syrienne (LS) n’est plus aussi volatile qu’elle l’était l’été dernier, même si elle a décru ces derniers mois.  Il faut aujourd’hui 2 900 LS pour un dollar américain contre 2 300 LS en octobre dernier.  Le prix des denrées de première nécessité a atteint un pic historique.  Le prix du pain subventionné, soit la denrée de base sur laquelle les plus pauvres peuvent compter, a doublé le mois dernier, alors que son poids a été réduit de 15%.  Le prix du pain a augmenté de 26% entre septembre et octobre, le diesel de 21% et certains produis frais de 44%.  Le panier national moyen a vu sa valeur croître de 247% depuis octobre 2019, atteignant son plus haut niveau depuis 2013, date à laquelle le Programme alimentaire mondial (PAM) a commencé à documenter cette donnée.  Cela signifie que 9,3 millions de personnes sont aujourd’hui dans une situation d’insécurité alimentaire en Syrie, soit 1,4 million de plus que l’an dernier, dont un million en insécurité sévère, a chiffré M. Rajasigham.

Le responsable a continué son intervention en évoquant la protection des civils.  Il a indiqué sur ce point que depuis la signature du cessez-le-feu en mars dernier, 240 000 déplacés internes ont pu regagner leurs régions au sud d’Edleb et à l’ouest d’Alep.  Mais certaines de ces zones sont maintenant de nouveau visées pas des attaques.  Dans le nord-ouest du pays, au moins 8 civils auraient été tués, dont des enfants, et 15 autres blessés suite à des bombardements et des attaques aériennes ce mois-ci.  Au cours des deux derniers mois, au moins six travailleurs humanitaires ont été tués et six autres blessés, toujours dans cette région, a déploré M. Rajasigham.  Partout dans le pays, les civils continuent d’être victimes de toutes sortes d’abus et de violations des droits de l’homme, y compris la détention arbitraire, l’enlèvement ou l’exécution extrajudiciaire.  On assiste aussi à une augmentation de l’utilisation d’engins explosifs improvisés, qui ont un impact dévastateur, comme hier à el-Bab et Afrin.  Deux bombes y ont tué 8 personnes et blessé 30 autres, selon des rapports provisoires.  Une campagne de déminage portant sur 68 hectares à l’ouest de Ghouta a pu identifier que 63% de cette superficie était contaminée.  Pas moins de 272 explosifs ont été marqués, a-t-il indiqué, notant que les activités de déminage sont sous-financées.  Le Service de la lutte antimine de l’ONU a besoin de 18 millions de dollars, dont 5 pour lancer les opérations de déminage à l’ouest de la Ghouta.

En matière d’accès humanitaire, le Coordonnateur adjoint des secours d’urgence a signalé que toute l’aide humanitaire des Nations Unies destinée à Alep et passant par le point de passage de Bab el-Salam est maintenant détournée pour emprunter le passage de Bab el-Haoua en raison du mauvais état des routes.  De plus, les travaux de réfection prévues ont dû être reportés en raison du mauvais temps.  Cependant 2 000 camions des Nations Unies ont pu traverser Bab el-Haoua depuis l’entrée en vigueur de la résolution 2533 (2020) du Conseil de sécurité, a-t-il dit, indiquant aussi que 17 hôpitaux et 106 centres de santé dans le nord-est ont reçu du matériel médical.  Mais cela reste insuffisant en raison des difficultés d’accès, a-t-il aussi reconnu, soulignant que d’autres pistes d’acheminement sont actuellement en cours d’étude.

Concluant sa présentation, le Sous-Secrétaire général par intérim aux affaires humanitaires a souligné que les agences humanitaires avaient délivré une assistance alimentaire à 5,4 millions de personnes à travers tout le pays.  Les secours d’urgence ont atteint 1,5 million de femmes enceintes ou allaitantes et enfants de moins de 5 ans.  Environ trois millions de personnes ont reçu des produits non alimentaires comme des couvertures, des bâches en plastique ou des conteneurs d’eau.  De plus, 68 millions de dollars américains ont été transférés à un million de personnes, dont 430 000 réfugiés palestiniens.  Neuf laboratoires de test PCR pour la COVID-19 ont été ouverts dans sept provinces, de même que 32 centres de traitement de la maladie, avec 1 433 lits pour les cas modérés et 300 pour les cas les plus graves, a-t-il précisé.

Prenant la parole également au nom de l’Allemagne, l’autre délégation porteplume des résolutions du Conseil sur le volet humanitaire de la crise syrienne, la Belgique a estimé que la situation en Syrie s’est stabilisée par rapport à 2019 et début 2020 quand des attaques visaient délibérément des écoles et des hôpitaux et provoquaient le déplacement de plus d’un million de civils.  Toutefois, 22 personnes ont été tuées, dont six enfants au nord-ouest à la suite de pilonnages depuis la dernière réunion du Conseil de sécurité et au cours des deux derniers mois, six travailleurs humanitaires ont été tués pour les mêmes raisons.  La Belgique et l’Allemagne ont insisté sur la nécessité de respecter le cessez-le-feu conclu en mars 2020, demandant la mise en œuvre d’un cessez-le-feu national supervisé par les Nations Unies.

En outre, la Belgique a souligné que 11 millions de Syriens ont besoin d’être protégés, alors qu’une crise économique et sanitaire est venue alourdir leur fardeau quotidien: 9,3 millions d’entre eux font face à une crise alimentaire, qui touche aussi les enfants, les femmes, les filles et les personnes handicapées, dépassant un système de santé insuffisant.  Dans ce contexte, a plaidé la délégation, toutes les parties devraient considérer que le rétablissement de l’accès à l’eau est prioritaire pendant le conflit.  Or, l’acheminement de l’aide humanitaire a été compliqué ces deux dernières années pour des raisons militaires et politiques, avec notamment la fermeture du point de passage de Yaroubiya.  En ce qui concerne la fermeture de celui de Bab Al-Salamah, les promesses d’assistance et de compensation n’ont pas été tenues, a regretté la Belgique.  Elle a jugé illogique que certains membres du Conseil aient choisi de limiter l’accès à l’aide humanitaire plutôt que de la garantir.  « Seul un processus politique conforme à la résolution 2254 peut permettre la fin de la violence », a souligné la Belgique.  Elle s’est opposée au point de vue de certains membres du Conseil, qui donneraient une interprétation erronée des sanctions en affirmant que c’est la cause de la crise médicale actuelle, et demandent dès lors la levée de ces mesures en raison de la pandémie.

Tout le travail de l’Envoyé spécial et d’autres efforts se sont avérés « largement futiles » jusqu’à présent, a regretté l’Allemagne, qui a relevé que la Commission constitutionnelle n’avait « fait aucun progrès réel » compte tenu de l’obstruction « systématique et persistante du régime » syrien.  Elle a ajouté que l’objectif est on ne peut plus clair: retarder et obstruer la Commission constitutionnelle jusqu’aux élections présidentielles de 2021, et nous ne devons pas les laisser faire, a-t-elle exhorté, ajoutant que la communauté internationale « n’est pas dupe » et ne reconnaîtra pas les résultats du scrutin s’il n’est pas fiable, libre et juste, et s’il n’est pas conduit conformément à la nouvelle constitution sous les auspices de l’ONU, avec la participation de tous les Syriens, y compris la diaspora.  Après avoir pris note des dates des prochaines réunions de la Commission constitutionnelle, l’Allemagne a indiqué que ses réunions devront enfin traiter de questions de fond pour progresser dans la future rédaction du projet de constitution.  La délégation a demandé au Gouvernement syrien de participer en toute bonne foi à ce processus, et en a aussi appelé à la Russie pour qu’elle exerce son influence sur ce dernier.

L’Allemagne a réaffirmé que le processus politique sous les auspices de l’ONU, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil et le Communiqué de Genève de 2012, sont les « seules voies possibles » pour sortir la Syrie de cette tragédie.  Elle a trouvé « tout à fait absurde » de prétendre qu’il n’y a plus de conflit et que la situation va vers la paix et la normalisation.  Elle a également jugé « outrancier » d’alléguer d’une intimidation de la part des pays occidentaux, et de dire que les sanctions contre le régime ou l’absence d’aide à la reconstruction entraveraient le retour des réfugiés.  Dans ce contexte, la conférence unique sur le retour des réfugiés était « un pur exercice de propagande », a encore critiqué l’Allemagne qui, s’appuyant sur les faits sur le terrain, a déclaré qu’il était manifeste que le Gouvernement syrien est le premier responsable des souffrances de la population, raison pour laquelle des millions de Syriens ont fui le pays.  En conséquence, il s’agit d’utiliser les paramètres du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), a-t-elle conseillé, affirmant également que l’Union européenne ne lèvera pas ses sanctions sauf si le régime syrien modifie ses agissements et respecte le droit international et le droit international humanitaire.

Tous les éléments de la résolution 2254 (2015) doivent être entièrement respectés et il faut une libération immédiate de toutes les personnes arbitrairement détenues, y compris les femmes et les enfants, et connaître le sort des personnes disparues, dont le nombre s’accroît, a poursuivi la délégation.  Selon elle, le Conseil doit lancer un appel à toutes les parties, notamment au régime syrien, pour un accès immédiat sans condition et sans entrave pour que l’on puisse se rendre dans les centres de détention.  Le Conseil doit assumer sa responsabilité et participer au combat contre l’impunité.  La délégation a cité les éléments de preuves accablantes, comme les photos prises par César, ancien photographe légiste de la police militaire syrienne.  Les auteurs de ces crimes doivent rendre des comptes, a-t-elle voulu.  Enfin, l’Allemagne, où vivent plus de 700 000 réfugiés syriens, versera 24 millions de dollars au Fonds humanitaire transfrontalier pour la Syrie.

La Russie a souhaité que la Commission constitutionnelle poursuive ses travaux l’an prochain, en dépit du cortège de restrictions dues au coronavirus.  Nous soutiendrons les efforts de médiation de l’Envoyé spécial, en lui demandant de veiller à éviter toute ingérence dans les affaires intérieures politiques syriennes, a-t-elle ajouté.  Sur le volet sécuritaire, la Russie a assuré que l’armée syrienne répond aux attaques terroristes, le foyer principal du conflit demeurant Edleb, « où l’on tue des civils et des travailleurs humanitaires ».  Pour la Russie, les Occidentaux doivent cesser d’aider des combattants qui sont en réalité des terroristes téléguidés pour renverser le régime syrien par la force.  « Les États-Unis doivent lever leur présence militaire illégale dans certains territoires du nord-ouest, présence qui empêche la restauration de l’unité territoriale et de la souveraineté de la Syrie », a-t-elle ajouté.  Il faut que cessent les plans sournois visant à plonger la Syrie dans l’instabilité et le chaos, s’est en outre exclamée la Russie.  Concernant la situation humanitaire, elle a affirmé qu’alors que Damas facilite chaque jour un peu plus l’acheminement régulier de l’aide, y compris le long de la ligne de confrontation, le camp occidental ne parle jamais des éléments d’opposition qui entravent par la violence ces efforts.  En outre, la Russie a évoqué la tenue conjointe avec la Syrie d’une conférence humanitaire à Damas le mois dernier, conférence à laquelle « l’ONU n’était représentée qu’à titre d’observateur ».  Nous appelons instamment l’Organisation à participer activement à ce nouveau processus humanitaire, faute de quoi la politique des deux poids, deux mesures concernant la Syrie perdurera, a-t-elle conclu.

La République dominicaine a indiqué que l’espoir renaît avec l’accord conclu entre les présidents conjoints de la Commission constitutionnelle en vue de la tenue des quatrième et cinquième réunions à partir de la semaine prochaine, puis en janvier 2021.  Elle a félicité l’Envoyé spécial du Secrétaire général et tous ceux qui ont rendu cet accord possible, avant d’appeler toutes les parties à participer aux réunions avec un engagement et un esprit de compromis les plus larges possibles.  La délégation s’est toutefois inquiétée de la montée de la violence et de l’insécurité dans le nord-ouest de la Syrie qui ont fait des centaines de victimes civiles, notamment des enfants, ce qu’elle a jugé « inacceptable ».  Cette persistance de la violence présente de graves menaces pour la protection de la population civile qui, à l’approche de l’hiver, se trouve déplacée dans des conditions de grande vulnérabilité.  Tout cela est rendu d’autant plus difficile que la préparation du pays face à la pandémie est minimale, a-t-elle encore constaté, en présentant ses condoléances aux familles des milliers de travailleurs de la santé décédés des suites du coronavirus faute de protection.  La République dominicaine a également pointé l’insécurité alimentaire galopante dans le pays qui fait qu’avec la situation économique critique, les ménages syriens ne sont pas en mesure d’avoir les produits de base.  La crise du carburant vient rendre ce tableau « insoutenable », a-t-elle commenté, exhortant à un accès sans entrave de l’assistance humanitaire sur la base de la neutralité, l’impartialité et l’indépendance.  Elle a plaidé pour une révision des modalités actuelles de cette assistance, en se demandant si celle-ci était réellement suffisante, surtout l’aide médicale dans le nord-ouest de la Syrie.

La Tunisie a salué les efforts politiques en Syrie et les travaux de la Commission constitutionnelle qui se réunit actuellement à Genève.  La délégation tunisienne engage les parties syriennes à mettre en avant les intérêts du peuple syrien, car il n’y a pas de solution autre que politique pour résoudre la crise que traverse le pays.  La communauté internationale doit pour sa part aider à l’élimination des groupes terroristes qui agissent en Syrie.  La délégation a déclaré qu’il faut garantir un cessez-le-feu total en Syrie, puisque la situation y reste vulnérable même si le nombre d’hostilités a baissé.  Il faut aussi éliminer les groupes terroristes qui continuent de représenter une menace pour la Syrie en dépit des victoires acquises contre ces groupes et leurs dirigeants.  La Tunisie a salué en outre les efforts de l’OCHA pour apporter une aide humanitaire aux Syriens dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Elle a appelé à un accès de l’aide humanitaire d’urgence et à une facilitation de l’acheminement de celle-ci.  Pour la Tunisie, la Croissant-Rouge arabe syrien doit être inclus dans ce processus, et ce, pour respecter la diversité des prestataires et la souveraineté de la Syrie.

« Le régime Assad et ses alliés préféraient que le monde ignore les exposés sur la Syrie, prétendre que la résolution 2254 est obsolète, ou croire que la situation politique et humanitaire se stabilise en Syrie et que le conflit est fini », ont ironisé les États-Unis.  « Hélas, ce n’est pas le cas.  Et les réalités ne peuvent être ignorées. »  Les États-Unis ont déclaré qu’une paix durable sera possible quand le régime Assad et ses alliés -la Russie, la Chine et l’Iran- accepteront un accord politique sous les auspices de l’ONU conforme à la résolution 2254 (2015); quand les avions des Russes et du régime syrien cesseront de bombarder les communautés et les familles; quand le soutien iranien au terrorisme s’achèvera; et quand l’obstruction russe et chinoise à ce conseil s’achèvera et que l’aide humanitaire atteindra les onze millions de civils syriens dans le besoin.

« L’absurde conférence sur les réfugiés organisée à Damas ce mois-ci est un nouvel exemple de tentative de perpétuer un faux narratif sur la situation en Syrie », a dénoncé la délégation, ajoutant que cela a échoué à convaincre la communauté internationale que la Syrie est prête au retour d’un grand nombre de réfugiés et souhaite vraiment ce retour.  Les États-Unis ont affirmé que la Russie et le régime syrien utilisent les réfugiés comme un « outil de relations publiques ».  Qui plus est, la Syrie a l’audace de demander à la communauté internationale des fonds de reconstruction après avoir plongé son pays dans la guerre civile et alors qu’elle continue à tuer sa propre population.  La délégation a ajouté qu’elle ne s’opposerait pas à une conférence légitime sur le retour des réfugiés coordonnée par l’ONU, le HCR, les États-Unis et d’autres pays, dans un lieu « neutre » et non à Damas.

Les États-Unis ont loué le plan de l’Envoyé spécial pour une quatrième session de la Commission constitutionnelle et exhorté le régime syrien et l’opposition syrienne à faire des progrès.  Ils ont demandé à l’Envoyé spécial d’identifier les participants au Conseil qui entravent les progrès.  En outre, la délégation a demandé, au titre des mesures de rétablissement de la confiance, la libération des détenus et des informations sur les quelque 100 000 Syriens disparus, dont des femmes et des enfants.  Condamnant comme une « aberration » les menaces subies par les travailleurs humanitaires, les États-Unis ont regretté aussi la perte de trois points d’accès transfrontaliers en 10 mois, qui ont ajouté aux souffrances des civils syriens et provoqué des pénuries dans les hôpitaux.  Préoccupée par le regain de violence dans le nord-ouest de la Syrie, la délégation a appelé au respect du cessez-le-feu demandé par le Secrétaire général et l’Envoyé spécial par la Russie, le régime syrien et l’Iran, ainsi qu’une aide urgente aux 4,2 millions de civils de la région d’Edleb.  Enfin, elle a pointé le danger de la COVID-19 et son effet sur le fragile système sanitaire syrien avec une augmentation de 250% du nombre de cas.

Rappelant que la crise syrienne dure depuis 10 ans, la Chine a appelé la communauté internationale à coordonner ses efforts et à prendre des mesures propres à contribuer à la paix et à la stabilité en Syrie.  Elle a aussi rappelé que le processus politique doit être respecté et que l’avenir de la Syrie doit être déterminé par son peuple en toute indépendance.  La délégation a encouragé les parties à recourir au dialogue, tandis que la Commission constitutionnelle doit avancer dans ses travaux et les pourparlers se poursuivre « quand les conditions le permettront ».  Pour la Chine, la Commission constitutionnelle doit être indépendante et libre de toute ingérence, et la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie doivent être préservées.  Elle a félicité l’Envoyé spécial pour son travail de bons offices dans la région et encouragé, avec la poursuite du processus d’Astana, un rôle actif des pays concernés.

Le terrorisme doit être éliminé, a affirmé la délégation chinoise. Citant les récentes violences contre des civils, journalistes et personnels humanitaires à Edleb, son représentant a assuré que « l’accord de cessez-le-feu ne peut être un blanc-seing pour les terroristes », et que les membres du Conseil et de la communauté internationale doivent unifier leurs mesures pour mettre fin au terrorisme et créer des conditions propices au processus politique en Syrie.  Par ailleurs, la Chine a constaté que l’économie syrienne doit s’améliorer et que les efforts consentis par le Gouvernement syrien pour créer des emplois et engager la reconstruction doivent être reconnus.  Elle a appelé la communauté internationale à augmenter son aide à la Syrie, notamment pour lutter contre la COVID-19.  Déclarant son soutien au mécanisme de l’aide transfrontalière, la délégation a rappelé que la Chine a déjà fourni 130 millions de dollars d’aide à la Syrie.  Elle a demandé que les mesures coercitives multilatérales soient levées, car le pays n’a pas les moyens de lutter contre la pandémie alors que le nombre d’infections augmentant de manière significative.  Faisant remarquer que le Secrétaire général et l’Envoyé spécial ont tous deux demandé la levée des sanctions contre la Syrie, la Chine a exhorté les États-Unis et les pays concernés à lever ces mesures immédiatement.

L’Afrique du Sud a salué les accords sur le programme de travail et le cycle de réunion de la Commission constitutionnelle et demandé aux parties de faire fond sur cet élan.  Elle a ensuite rejeté toute ingérence extérieure, appelant au strict respect de la souveraineté de la Syrie.  La délégation a appuyé l’appel du Secrétaire général pour un cessez-le-feu mondial dans le contexte de la pandémie et salué la coopération entre la Russie et la Turquie qui a permis d’instaurer un calme relatif dans le nord-est syrien.  L’Afrique du Sud a rappelé que des millions de Syriens ont un besoin urgent d’une aide humanitaire, alors que l’hiver approche et que les cas de COVID-19 sont en augmentation dans le pays.  « Nous devons utiliser tous les moyens à disposition pour augmenter l’aide humanitaire, que ce soit l’aide transfrontalière ou l’aide au travers des lignes de front », a-t-elle insisté.  La délégation a souhaité que les incidences humanitaires des sanctions soient dûment prises en compte, les civils payant le plus lourd tribut.  Les sanctions ne doivent pas aggraver la situation en Syrie, a-t-elle dit, se prononçant en faveur du rapatriement des combattants terroristes, avant de saluer le format de la réunion qui permet de discuter de manière approfondie des situations politique et humanitaire en Syrie.  Enfin, le représentant a exhorté les parties syriennes à se rendre à Genève dans un esprit d’ouverture.

La France a estimé qu’il était grand temps que la Commission constitutionnelle donne sa pleine mesure et permette enfin de produire une réforme constitutionnelle.  « Mais nous constatons que le régime refuse de participer de bonne foi au processus politique, car il est clair qu’il cherche à revenir sur les termes de référence qu’il a lui-même endossés », a-t-il ajouté.  La France a ainsi appelé l’ONU à tenir le Conseil de sécurité informé d’éventuels blocages et à identifier les responsables.  Poursuivant, elle a jugé l’absence de progrès au plan politique consternant « face à la détérioration continue de la situation humanitaire et sécuritaire en Syrie ».  La France est préoccupée par la poursuite d’hostilités dans le nord-ouest, l’instabilité croissante dans le Sud et le renforcement de Daech dans la « Badiya ».

Pour la délégation, il y a urgence à répondre à l’appel du Secrétaire général et de son Envoyé spécial pour mettre en œuvre une cessation des hostilités durable et vérifiable conformément aux résolutions 2532 (2020) et 2254 (2015).  Elle a également appelé toutes les parties, « en particulier le régime syrien », à respecter leurs obligations issues du droit international humanitaire, insistant sur le fait que la protection des civils, y compris du personnel humanitaire et médical, doit rester la première priorité.  Par ailleurs, la France a souligné « l’importance absolue de la relance d’un processus politique crédible qui apporte des résultats tangibles à toute la population syrienne ».  Sur ce point, elle a salué l’intention de l’Envoyé spécial de dresser un bilan de la mise en œuvre de la résolution 2254, la France étant disposée à y contribuer. « Nous le répétons chaque mois: en l’absence de solutions pacifiques crédibles, la France et ses partenaires ne dévierons pas de leur ligne sur les sanctions et la reconstruction », a dit la délégation, avant d’asséner qu’il ne peut y avoir de stabilisation de la situation en Syrie sans solution politique.

L’Indonésie a mis l’accent sur l’urgente nécessité d’intensifier les réponses humanitaires en raison de l’accroissement des cas de coronavirus et de l’approche de la saison hivernale, d’autant plus que des millions de Syriens sont déplacés et s’entassent dans des abris inadéquats.  Elle a signalé que plusieurs sites hébergeant des déplacés dans le nord-ouest de la Syrie ont été abîmés par les pluies.  Partant, il est indispensable d’acheminer l’assistance humanitaire nécessaire aux civils dans le besoin.  La délégation a recommandé à cet égard de conjuguer l’accès humanitaire aux lignes de front et transfrontalier pour garantir que l’aide atteigne les nécessiteux sur l’ensemble du territoire syrien.  Elle a ensuite salué l’accord conclu entre les présidents conjoints de la Commission constitutionnelle pour les prochaines réunions de cet organe, la quatrième session étant désormais prévue lundi prochain à Genève, et la cinquième, en janvier 2021.

La délégation a formé l’espoir que les parties participeront à ces échéances de façon constructive pour poser des jalons substantiels et concrets, sous les auspices de l’ONU, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, laquelle constituera un pas en avant dans un processus politique dirigé par les Syriens eux-mêmes.  Elle a jugé essentiel que les parties au conflit, et les pays ayant une influence sur elles, parviennent à un accord inclusif pour résoudre pacifiquement le conflit et épargner de nouvelles souffrances à la population syrienne.  L’Indonésie a aussi dit qu’il était impératif de protéger les civils et de cesser les hostilités, appelant toutes les parties à honorer leurs obligations au regard du droit international.

Sur le front politique, le Viet Nam a salué l’accord des parties prenantes en Syrie en ce qui concerne le programme à venir de la Commission constitutionnelle.  Il a encouragé les membres de la Commission à s’engager dans un discours constructif.  Le processus politique est le seul moyen d’établir la paix et la stabilité durables.  Il doit, a rappelé la délégation, être mené par les Syriens eux-mêmes, être facilité par l’ONU, en accord avec la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, et adhérer pleinement au droit international et à la Charte, y compris au plein respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie.  Le Viet Nam a salué les efforts de l’équipe de l’Envoyé spécial et la série de rencontres avec les interlocuteurs régionaux et internationaux dans le but de trouver une solution politique en Syrie.

Cependant, la délégation a regretté que la situation sécuritaire et humanitaire sur le terrain et la souffrance de millions de syriens restent une source de préoccupation.  L’instabilité perdure dans le nord-ouest, alors que le cessez-le-feu est généralement respecté, a-t-elle remarqué.  Elle a condamné les attaques terroristes contre les civils et les humanitaires et a demandé instamment aux parties de refréner leurs actions.  Par ailleurs, la pandémie de COVID-19 et son impact sur l’économie rend la situation humanitaire très précaire, notamment chez les agents de santé, a déploré le Viet Nam.  La sécurité alimentaire avant l’hiver doit être une priorité et les sanctions ne doivent pas empêcher la lutte contre la pandémie.  En conséquence, le Viet Nam a appelé toutes les parties en Syrie à créer les conditions favorables pour faciliter les opérations humanitaires dans l’ensemble du pays.

L’Estonie a appelé les parties aux prochains chapitres de négociations du Comité constitutionnel à faire preuve de l’engagement nécessaire à l’atteinte de véritables progrès politiques.  Ces réunions doivent être plus fréquentes afin de donner le temps aux parties à la crise syrienne, notamment le régime syrien et ses opposants légitimes, de retrouver confiance et sérénité, a-t-elle ajouté.  En outre, la délégation a réaffirmé sa conviction que le règlement de la question des détenus et des disparus est essentiel pour réaliser la réconciliation nationale et, partant, ouvrir la voie à une issue politique et durable au conflit.  À cet égard, l’Estonie a rappelé que la libération des personnes en détention arbitraire et l’identification de celles ayant perdu la vie en prison est au cœur des résolutions 2254 et 2474 du Conseil de sécurité.  Elle a d’autre part averti que la poursuite des agissements odieux de Daech en Syrie, qui tente d’infiltrer les camps surpeuplés de réfugiés, risque d’intensifier l’instabilité déjà préoccupante dans tout le pays.  Enfin, la délégation a estimé que, dans ce contexte difficile, les efforts du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), alors que l’hiver approche, sont plus vitaux que jamais pour sauver des vies et maintenir tous les accès humanitaires.

Le Niger a indiqué que la situation en Syrie reste toujours « enlisée ».  « Le dénouement de cette crise, on ne cessera jamais de le dire, doit se faire sur une base politique et non militaire, selon un processus conduit par les Syriens eux-mêmes et à travers les différentes composantes de la société syrienne. »  C’est pourquoi il est urgent de remettre le processus politique sur la bonne voie, conformément à la résolution 2254 (2015), a dit la délégation.  Son représentant a appelé à un cessez-le-feu national immédiat en Syrie, afin de créer les conditions du succès du processus politique et d’atténuer les effets de la pandémie.  Le Niger a salué la tenue des quatrième et cinquième rounds de négociation de la Commission constitutionnelle et invité les parties à faire preuve de flexibilité.  Les parties devraient faire des gestes pour renforcer la confiance mutuelle, notamment en procédant à des libérations massives unilatérales de détenus et en donnant des éclaircissements aux familles des personnes disparues.  Enfin, le Niger a demandé une amélioration « substantielle » du mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire sur tout le territoire et « un allègement ou la suspension des sanctions économiques unilatérales qui peuvent saper les capacités de la Syrie face à la pandémie ».

Le Royaume-Uni a souligné que ce n’est que lorsqu’un accord aura été trouvé sur une nouvelle constitution que pourront se tenir des élections libres et équitables, conformément au processus politique envisagé par la résolution 2254.  Ainsi a-t-il insisté sur le fait que des élections ne reposant pas sur la nouvelle constitution, des élections qui ne seraient pas organisées sous la supervision de l’ONU selon les normes de transparence et de responsabilité les plus strictes, et auxquelles tous les Syriens, y compris ceux de la diaspora, ne pourraient pas participer auraient pour seule conséquence de délégitimer le processus politique élaboré par ce conseil et approuvé par la communauté internationale.  Concernant la situation humanitaire, tandis que l’hiver approche et que la COVID-19 fait rage dans les camps, il a jugé primordial que, compte tenu des informations transmises par M. Rajasingham, l’ensemble des travailleurs humanitaires impliqués sur le terrain aient un droit d’accès immédiat, sans entrave, inconditionnel et sans restriction aux populations dans le besoin.  Il a par ailleurs considéré que la récente conférence humanitaire russo-syrienne de Damas évoquée par la Russie n’était qu’une tentative honteuse de présenter le régime syrien sous un jour « normal », au détriment des intérêts urgents et vitaux des réfugiés syriens.

Saint-Vincent-et-les Grenadines a estimé qu’il existe un lien complexe et inextricable entre les situations humanitaire et politique en Syrie.  Le manque de progrès en matière politique conduit à ce que la situation humanitaire déjà désastreuse soit encore plus détériorée.  Cela entrave les efforts faits pour résoudre politiquement ce conflit qui se prolonge.  Il faut donc avoir une approche pragmatique et holistique, a déclaré la délégation.  Saint-Vincent-et-les Grenadines a réaffirmé son soutien à l’Envoyé Spécial et au travail du Commission constitutionnel.  Elle a également encouragé toutes les parties prenantes à la Conférence internationale sur le retour des réfugiés syriens, qui s’est tenue à Damas, à coopérer pour avancer sur cette question critique.  Préoccupée par les rapports faisant état de violences sporadiques dans le nord-ouest, en violation des accords de cessez-le-feu du mois de mars, la délégation a demandé à toutes les parties de faire preuve de retenue et d’adhérer à l’accord de protection des civils, des infrastructures civiles et des humanitaires.  La situation socioéconomique en Syrie s’aggrave avec la pandémie, a poursuivi Saint-Vincent-et-les Grenadines, s’inquiétant du sort de millions de Syriens dans les camps qui manquent de moyens pour lutter contre la pandémie.  La délégation a fait siens les appels à lever toutes les mesures coercitives unilatérales imposées sur la Syrie afin de répondre aux besoins humanitaires, particulièrement alors que l’hiver approche.  À cet égard, elle a réitéré son soutien au mécanisme transfrontalier.

La République arabe syrienne a dénoncé les violations accrues du droit international de la part des États-Unis et d’autres gouvernements hostiles depuis le 27 octobre dernier.  Pour elle, la Conférence internationale sur le retour des déplacés et des réfugiés syriens qui s’est tenue à Damas le 11 et le 12 novembre est une étape significative des efforts de la Syrie et de ses alliés en vue de garantir un retour dans la dignité et la sécurité des déplacés et réfugiés dans leurs foyers.  Il a indiqué que la déclaration finale de la Conférence rejette toute sanction coercitive contre le peuple syrien, réclame la fin de l’occupation étrangère et de ses crimes, y compris le pillage des ressources, et appelle à la poursuite de la lutte contre le terrorisme et les organisations terroristes Daech et Jabhat el-Nosra.  Les participants à cette conférence ont également souligné la nécessité pour la Commission constitutionnelle de poursuivre ses activités de manière consensuelle et constructive, sans ingérence extérieure et sans imposition d’échéances artificielles, afin de garantir un appui large du peuple syrien à son travail.

La délégation a tenu à « remercier » les pays qui ont décidé de boycotter la Conférence.  Ces pays préfèrent voir la crise se prolonger et poursuivre leurs machinations politiques au détriment du peuple syrien.  À cette aune, M. Ja’afari a regretté que l’ONU, principal partenaire humanitaire de la Syrie, ait cédé aux injonctions de l’ancien membre du Département d’État américain, M. James Jeffrey, et fait fi des exigences de sa coopération avec le Gouvernement syrien.  Le coordonnateur résident, qui représentait le système onusien, était présent comme simple observateur aux travaux au lieu de participer aux discussions en tant que partenaire actif.  Il a ensuite déploré qu’une délégation onusienne, comprenant le Coordonnateur régional adjoint aux affaires humanitaires, M. Mark Keats, ait franchi la frontière avec la Turquie pour se rendre dans la province d’Edleb, sans le consentement de la Syrie.  « Keats était accompagné d’un certain nombre de soi-disant agents de sécurité affiliés à l’organisation terroriste Hay’at Tahrir el-Cham/Jabhat el-Nosra, qui est visée sur la liste du Conseil de sécurité comme le bras syrien d’Al-Qaida. »  « S’agit-il là de l’application concrète du rôle de l’ONU en tant que partenaire humanitaire efficace de la Syrie? » a ironisé la délégation.

Elle a également dénoncé dans les termes les plus forts la visite du Secrétaire d’État américain, M. Mike Pompeo, dans les colonies israéliennes le 19 novembre dernier.  Cette visite illustre, selon la Syrie, la loyauté absolue et biaisée de l’Administration américaine, y compris dans les derniers jours de son mandat, envers Israël en violation du droit international.  M. Ja’afari a affirmé que cette visite ne changera en rien le statut du Golan en tant que territoire occupé et partie intégrante de la Syrie.  La délégation a ensuite accusé le « régime turc » et ses organisations terroristes et mercenaires d’user de l’eau potable comme d’une arme contre les civils.  La Turquie commet de manière persistante des crimes contre l’humanité tout en bénéficiant de l’immunité fournie par ses alliés de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), a-t-elle accusé.

Enfin, mentionnant la tenue de la prochaine session de la Commission constitutionnelle, la délégation syrienne a indiqué que le succès des travaux dépendra du respect par cet organe des règles de procédure agréées et du rejet de toute ingérence extérieure et des tentatives de certains gouvernements d’imposer des échéances artificielles.  « La Commission est son propre maître et seul le peuple syrien a le droit exclusif de décider de son propre avenir. »

La République islamique d’Iran n’a pu que constater que, 10 ans après le début du conflit, le peuple syrien continue de pâtir de l’agression, de l’occupation étrangère et du terrorisme.  Elle a souligné qu’avec une occupation illégale, des sanctions inhumaines, la politisation du retour des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur du pays, et les entraves à l’appui international à la reconstruction du pays, certains États, qui tentent, selon elle, d’imposer leur propre volonté au peuple syrien, sont responsables de la prolongation du conflit, ce qui est « illégal, immoral et voué à l’échec ».

L’Iran a réitéré que la crise syrienne ne sera résolue que par la voie politique et le respect du droit exclusif des Syriens à décider de leur destin, avec l’appui de la communauté internationale.  Cela veut dire « le plein respect par tous » de la souveraineté, l’indépendance politique, l’unité et l’intégrité territoriale de la Syrie, a-t-il affirmé.  Tout ordre du jour séparatiste, ainsi que les initiatives illégitimes d’autonomie doivent être rejetés et toutes les forces étrangères dont la présence n’est pas consentie par le Gouvernement syrien doivent quitter le pays, a tranché la délégation.  L’Iran a ensuite jugé essentiel le « retrait immédiat et inconditionnel » des forces américaines car au lieu de combattre le terrorisme, elles continuent, selon lui, d’appuyer des groupes terroristes comme le Front el-Nosra (Hay’at Tahrir el-Cham) et de piller le pétrole ainsi que les richesses du peuple syrien.  La délégation a ensuite encouragé à combattre le terrorisme « jusqu’à l’élimination de toute menace » tout en veillant à épargner les vies des civils.  Il ne faut plus permettre aux terroristes de continuer à prendre un grand nombre d’otages civils et de convertir des villes comme Edleb en sanctuaire pour eux, a insisté l’Iran.

La Belgique, qui s’est exprimée cette fois à titre national, a demandé un cessez-le-feu en Syrie qui soit permanent, vérifiable, sur tout le pays sous la supervision des Nations Unies.  Elle a estimé que seule une transition politique permettrait une sortie de crise dans le pays, comme le prévoit la résolution 2254 du Conseil de sécurité.  Elle a rappelé que la Commission constitutionnelle est une porte ouverte vers le processus politique, tout en regrettant l’absence de progrès jusqu’à présent.  Elle s’est félicitée de l’accord des deux parties pour la quatrième session et la préparation de la cinquième session de la Commission.  Les autorités doivent saisir cette occasion pour participer de façon constructive aux questions de réforme.  On ne peut plus accepter de procédures de report, a-t-elle noté.  La Belgique a souligné que la Commission constitutionnelle doit pouvoir siéger de façon régulière, le but étant d’éviter les délais artificiels, fabriqués par les autorités syriennes.  Elle a rappelé que cet organe est conduit par les Syriens eux-mêmes et facilité par l’ONU.  Notant qu’il ne peut organiser actuellement des élections, la Belgique a souhaité qu’il progresse rapidement à cet égard.  Par ailleurs, des progrès tangibles doivent être faits pour rétablir la confiance, en particulier s’agissant de la remise en liberté urgente des prisonniers politiques et des personnes portées disparues.

La Turquie a déclaré que l’on se trouvait « face à des crimes contre l’humanité commis par le régime Assad », en plus de la situation difficile causée par la COVID-19 qui met le système de santé à rude épreuve.  Avec des opérations transfrontières « limitées », la Turquie essaie d’aider les personnes à Alep.  Mais si le Conseil de sécurité n’ouvre pas de nouveaux points de passage, il sera « complice » de la détérioration de la situation, a prévenu la délégation.  Elle a également déclaré qu’il fallait mettre un terme à toutes les violations du cessez-le-feu, au risque de laisser les organisations terroristes faire perdurer leurs actions.  Les garants du processus d’Astana ont un rôle à jouer en la matière, a dit le représentant, avant de se réjouir des travaux de la Commission constitutionnelle.  Mais, selon lui, le prochain cycle de négociations devra se concentrer sur les attentes du peuple syrien.

Abordant la question du retour des réfugiés, la Turquie a dit partager les objectifs des Nations Unies.  Mais, a-t-elle prévenu, elle continuera de s’opposer à toute initiative tendant à légitimer les actions du Gouvernement en la matière.  La délégation a également affirmé que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) continue de mener des actes terroristes.  Le PKK continue en outre de libérer des combattants de Daech, plus de mille d’entre eux d’après les médias.  Dans ce contexte, la Turquie s’est demandé comment certains membres de la communauté internationale peuvent continuer de considérer le PKK comme un partenaire.  En conclusion, le représentant a dit ne pas pouvoir considérer le représentant de la Syrie comme son « homologue » tant les crimes du « régime syrien » sont innombrables.

Droit de réponse

La République arabe syrienne a repris la parole pour dénoncer les mots utilisés par son homologue turc qui sont de nature à induire en erreur.  Depuis le début de la crise, la frontière turque a été ouverte à des milliers de terroristes venus du monde entier.  Selon son représentant, « le régime turc a du sang syrien sur les mains » et a encouragé les terroristes à utiliser des armes chimiques.  Il a mentionné le transport de litres de sarin depuis Istanbul jusqu’au territoire syrien pour être utilisés contre un village syrien en 2013, causant la mort de 23 soldats et civils.  Le régime turc ne peut nier ce fait.  La délégation a ensuite affirmé que les États-Unis ont donné mandat au Qatar afin de mener des activités terroristes en Syrie.  Ces activités ont été menées en coordination avec la Turquie, a déclaré le représentant, ajoutant que le Qatar a dépensé 137 milliards de dollars pour saper la stabilité de la Syrie.  « Qui sera tenu responsable du sang versé de centaines de milliers de Syriens? »  Enfin, il a déclaré que « nous savons ce que fait le régime turc », qui ne cesse de clamer son innocence, en précisant que la Turquie reçoit l’appui de pays européens.

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