En cours au Siège de l'ONU

Session de 2025,
17e et 18e séances plénières – matin & après-midi
ECOSOC/7205

L’ECOSOC évalue le système de coordonnateurs résidents et discute des moyens d’aider les pays à atteindre le développement durable dans le contexte actuel

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies et des contraintes horaires qui en résultent, l’intégralité du communiqué sera publiée ultérieurement)

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a poursuivi, aujourd’hui, son débat annuel sur les activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies.  Des activités menées dans une conjoncture complexe marquée par une crise de liquidité doublée par le retrait du multilatéralisme.  La journée s’est articulée autour de trois tables rondes, la première étant un dialogue entre les États Membres et la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina Mohammed, qui a souligné les gains d’efficacité du système des coordonnateurs résidents.

En effet, six ans après le repositionnement du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents, 2024 a été marquée par les résultats d’une enquête menée par l’ONU.  Celle-ci a dévoilé que les gouvernements des pays hôtes et les pays contributeurs ont constamment exprimé leur forte approbation du rôle que joue ce mécanisme dans la coordination des efforts du système des Nations Unies pour le développement et dans l’accélération de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).

Comme les fonds manquent cruellement, l’Assemblée générale a décidé en 2024 d’allouer 53 millions de dollars supplémentaires, prélevés sur le budget ordinaire de 2025, au renforcement du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents, cheville ouvrière du système des Nations Unies pour le développement réformé, et véritable rampe de lancement pour des initiatives de réforme plus approfondies.

Malgré cela, les délégations ont soulevé le problème du manque de prévisibilité des financements, qui continue de nuire à la capacité du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents de remplir pleinement ses fonctions et de répondre aux attentes des États Membres. La Vice-Secrétaire générale a promis que les réformes entamées allaient améliorer la situation, assurant que l’Initiative ONU80 allait apporter des solutions idoines, notamment en élaguant les milliers de mandats confiés au 42 agences, fonds et programmes.

En plus de cette conversation avec la Vice-Secrétaire générale, les États Membres ont également tenu un dialogue, dans l’après-midi, avec les Directeurs exécutifs du système des Nations Unies pour le développement pour envisager comment aider les pays à atteindre le développement durable dans le contexte actuel.  Enfin, la journée s’est terminée avec une table ronde sur le financement des ODD au niveau national.

Dialogue entre les États Membres et la Vice-Secrétaire générale 

Pour démarrer la deuxième journée du débat de l’ECOSOC sur les activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies, les États Membres ont discuté avec la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina Mohammed, en se basant sur le rapport (E/2025/61) de la Présidente du Groupe des Nations Unies pour le développement durable. 

Mme Mohammed a relevé que six ans après le repositionnement du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents, nous avons un système qui sert les populations à travers le monde.  Dans un contexte de crises multiples et de retrait du multilatéralisme, elle a souligné que le système réajuste ses efforts pour répondre aux attentes des États Membres.  Pour confirmer cette embellie, elle a signalé que le mécanisme de coordination des activités de développement du système des Nations Unies avait reçu des évaluations de plus en plus favorables.  Ainsi, une moyenne de 88% des pays hôtes estimaient en 2024 que les coordonnatrices et coordonnateurs résidents jouent un rôle moteur de plus en plus fort.  De même, 87% des gouvernements des pays hôtes ont indiqué que les entités des Nations Unies travaillent davantage en collaboration, contre 83% en 2023. 

Toutefois, a reconnu Mme Mohammed, le volume insuffisant et le manque de prévisibilité des financements continuent de nuire à la capacité du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents à remplir pleinement ses fonctions et à répondre aux attentes des États Membres. C’est d’ailleurs pourquoi en 2024 l’Assemblée générale a décidé d’allouer 53 millions de dollars supplémentaires, prélevés sur le budget ordinaire de 2025, au renforcement dudit système.

Elle a aussi relevé que, toujours en 2024, seulement 33% des bureaux des coordonnateurs résidents avaient le personnel requis pour fonctionner.  Au vu de ces défis et obstacles, elle a estimé qu’il n’y avait pas de temps à perdre. « Investissons dans le système des Nations Unies pour le développement.  C’est une responsabilité commune et une nécessité stratégique pour un avenir meilleur et durable, afin de ne laisser personne de côté », a-t-elle conclu. 

Après l’exposé de la Vice-Secrétaire générale, plusieurs délégations ont fait part de leur propre bilan, alternant entre suggestions et franches critiques.  L’Iraq, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), a par exemple souhaité que le système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents soit renforcé afin de poursuivre le soutien aux pays en développement. 

Dans le cadre des discussions sur la réforme de l’Initiative ONU80, l’Union européenne a dit continuer de croire qu’une présence multilatérale plus unifiée est nécessaire aux niveaux national et régional pour atteindre les ODD.  Pour sa part, le Népal, parlant au nom des pays les moins avancés (PMA), a salué le rôle essentiel joué par le coordonnateur résident dans l’accompagnement des PMA en cours de reclassement pour préparer une transition en douceur.  La délégation a appelé à un soutien explicite et personnalisé aux PMA pour l’intégration, la mise en œuvre et le suivi du Plan d’action de Doha dans ces pays. 

Pour ce qui concerne les pays à revenu intermédiaire, le Maroc a réclamé un point focal dans le système de développement, en droite ligne des exigences de l’examen quadriennal complet de 2024.  Un avis partagé par le Brésil qui a parlé du besoin d’un soutien technique spécialisé à ces pays. 

Pour les pays en développement sans littoral (PDSL) également, il est important que le système continue de les appuyer, a déclaré le Kirghizistan en souhaitant notamment un appui pour les politiques fondées sur des données et en mettant l’accent sur l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle.  Les PDSL sont inquiets de toute réduction possible des bureaux de pays et de leurs mandats alors que ces pays enclavés ont plus que jamais besoin de soutien.  Le système onusien devrait donc établir une assistance plus ciblée à ces pays, a souhaité le groupe.  Dans la même veine, le Zimbabwe a recommandé que l’aide des Nations Unies s’adapte aux besoins et défis nationaux de développement.

Cuba a tenu à rappeler que « les pays développés devraient honorer leur promesse historique en matière de financement du développement », rappelant le principe de responsabilité commune mais différentiée.  Au nom du Groupe des États d’Afrique, l’Éthiopie a souhaité des fonds prévisibles en faveur du système de coordonnatrices et coordonnateurs résidents qui dépend grandement de financements volontaires en ce moment.  Le Canada a demandé des fonds prévisibles et durables, rejointe par la Norvège qui a également appelé à des bureaux « allégés mais solides ». Même son de cloche du côté de la Suisse, qui a appelé à financer de manière appropriée ce système, alors que l’Allemagne a constaté un abyme entre les mandats et ce que les États déboursent pour les mettre en œuvre. 

Des délégations ont d’ailleurs insisté sur le besoin de plus de rapports à faire aux États Membres, « qui doivent comprendre pourquoi ils paient », comme l’a relevé notamment la Fédération de Russie.  La délégation russe a décrié à cet égard la duplication des fonctions, non seulement entre différentes agences du système, mais aussi entre ces agences et le système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents.  Les États-Unis ont, eux, fait observer que le système pourrait gagner en efficacité en recrutant du personnel local au lieu de s’appuyer uniquement sur un personnel international. 

« Les fonds et programmes agissent en fonction des financements reçus », a retorqué la Vice-Secrétaire générale qui a repris la parole afin de répondre aux sollicitations et observations des États Membres.  Selon elle, les conflits et crises à travers le monde n’aident pas à la mobilisation des fonds dédiés au système des Nations Unies pour le développement.  Aux PMA et pays à revenu intermédiaire qui réclament un traitement spécifique, elle a fait observer que les équipes de pays et les coordonnateurs résidents n’ont pas les capacités de remplir ces fonctions sans les moyens requis.  Il faut donc améliorer le Pacte de financement, surtout en veillant à un financement de base solide et durable, a-t-elle préconisé.

Mme Mohammed a fait remarquer que la quatrième Conférence des Nations Unies sur le financement du développement allait justement plancher sur la mobilisation des fonds pour le développement.  Elle a aussi assuré que l’Initiative ONU80 allait aussi servir d’« accélérateur pour aller vers plus d’efficacité ». Elle va notamment permettre d’évaluer les multiples mandats des 42 agences, fonds et programmes des Nations Unies. 

Pour remettre le système sur les rails, il faut mettre à profit l’intelligence artificielle qui peut aider dans les analyses pour parvenir à l’ONU 2.0, a-t-elle avancé.  Sur la question du personnel local qui pourrait pallier le manque de fonctionnaires dans les bureaux des coordonnateurs résidents, elle a rappelé que la première exigence est d’avoir un personnel qualifié.  « On veut bien recruter davantage mais vous, les États Membres, devrez donner plus d’argent. »

Dialogue avec les chefs du secrétariat du système des Nations Unies pour le développement: aider les pays à atteindre le développement durable dans le contexte actuel 

Ce dialogue a permis d’entendre les témoignages d’agences spécialisées quant aux appuis qu’elles fournissent, soit aux pays directement soit au système des Nations Unies, pour accompagner le développement durable.  Premier orateur de ce segment, M. Achim Steiner, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), s’est focalisé sur l’avenir en insistant sur l’urgence de respecter les engagements pris dans le cadre du Pacte de financement.  Des ressources souples et prévisibles sont essentielles pour fournir un soutien pragmatique parce que le développement se déroule de plus en plus dans des environnements fragiles et à haut risque, a-t-il observé.  D’ailleurs en 2024, a-t-il informé, 50% des dépenses mondiales du PNUD ont été consacrées aux environnements fragiles.  Il a ajouté que les cadres financiers nationaux intégrés sont au cœur de cette mission afin d’aider les gouvernements à mobiliser des milliards de dollars pour réaliser les ODD et instaurer la paix et la stabilité.  M. Steiner a toutefois mis en garde contre le cloisonnement des flux de financement. 

Mme Doreen Bogdan-Martin, Secrétaire générale de l’Union internationale des télécommunications (UIT), a rappelé que son organisme travaille avec environ 60 équipes de pays des Nations Unies et coordinateurs résidents contribuant aux analyses par pays et produisant des tableaux de bord numériques afin de fournir des données fiables pour des interventions ciblées et un suivi axé sur les résultats.  L’UIT aide également les États Membres à mener à bien leur transformation numérique sur le terrain, a-t-elle ajouté en donnant l’exemple de l’expertise technique qu’elle fournit au niveau régional par le biais de coalitions thématiques sur le numérique en Asie-Pacifique, en Europe et en Afrique.

À ce propos, l’UIT codirige le volet « transformation numérique » du Fonds commun pour les ODD avec le PNUD, dont la première tranche, de 40 millions de dollars, soutient 13 programmes nationaux, tandis que 10 autres sont en cours d’élaboration.  L’intervenante a également parlé des financements innovants qui sont rentables et transforment des vies, comme l’initiative « Smart Islands » lancée pour améliorer la résilience et l’accès à l’éducation, aux soins de santé et aux services financiers dans le Pacifique Nord.  Enfin, en collaboration avec 50 partenaires des Nations Unies, l’UIT organise le Sommet mondial sur l’IA au service du bien commun, en juillet.

Abordant la question sous un autre angle, Mme Sima Bahous, Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a dit que l’égalité des sexes est à la base de la réalisation des ODD, elle est une condition préalable à la paix et au développement.  C’est ainsi qu’ONU-Femmes travaille avec 116 équipes de pays pour l’intégration de l’égalité et l’autonomisation des femmes dans leurs programmes.  Mme Bahous, qui a mis en garde contre un financement imprévisible de ces programmes, a applaudi le soutien de l’Union européenne et d’autres partenaires à cet égard.  Elle a plaidé pour une coordination qui assure des effets tangibles.  Le plan stratégique d’ONU-Femmes, élaboré dans cet esprit, sera adopté dans les mois à venir, a-t-elle annoncé en assurant que le droit des femmes est un pilier du système multilatéral. 

Citant Charles Darwin, M. Andrés Efren Montalvo Sosa (Équateur), a dit que « ce n’est pas l’espèce la plus forte qui survit mais celle qui s’adapte le mieux », afin de souligner l’importance d’accroître l’ambition et la capacité de réponse systémique, et ce dans le cadre d’une plus grande appropriation nationale.  Le moment est venu d’aller au-delà des approches technocratiques ou des changements cosmétiques, a-t-il lancé.  Il a appelé à soutenir la réforme structurelle du système des Nations Unies pour le développement, lancée en 2018, à surmonter la concurrence institutionnelle et à remédier à la fragmentation des financements, sans oublier la nécessité de respecter les engagements financiers.

Mme Tara Soomro, Ambassadrice auprès de l’ECOSOC du Royaume-Uni, a pour sa part encouragé le système des coordinateurs résidents à s’aligner sur le Plan-cadre de coopération des Nations Unies pour le développement durable au niveau national, qui doit servir de plan directeur unique pour toutes les équipes de pays.  Il doit aussi favoriser la collaboration et éviter les doubles emplois.  La présence d’une équipe doit refléter les besoins des pays conformément aux résultats et aux priorités convenus dans le Plan-cadre de coopération.  La configuration par pays devrait être déterminée par le coordonnateur résident, en accord avec les gouvernements hôtes, et complétée par un système régional plus solide, a plaidé Mme Soomro. 

Dans les échanges qui ont suivi, des délégations ont émis des critiques déjà entendues contre la dispersion des entités du système des Nations Unies pour le développement, paralysées par les doublons des mandats et des tâches, et qui seraient donc en concurrence pour obtenir des financements.  Appelant à éliminer ces doublons et à plus d’efficacité, elles ont suggéré notamment l’élimination ou la fusion de certains programmes, fonds et organismes. 

« Comment pouvons-nous venir en aide aux 100 millions de personnes dans le monde qui ont faim en éliminant ou fusionnant ces entités », a demandé l’Administrateur du PNUD, selon lequel l’ONU a permis aux gens de ne pas fermer les yeux sur ces problèmes et d’autres.  Il a souligné que les entités de l’ONU travaillent déjà ensemble pour faire face à ces défis.  La discussion a également tourné autour des « rumeurs et des fuites » concernant les travaux en cours sur l’Initiative ONU80.  Les hauts responsables se sont étonné de cette situation tout en insistant sur le fait que les décisions finales concernant la réforme à venir reviendront aux États Membres. 

À suivre...

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