Alerté du risque d’une « pandémie de la faim », le Conseil de sécurité condamne fermement l’utilisation de la famine comme méthode de guerre
Après sa réunion publique du 21 avril où il avait été alerté du risque d’une « pandémie de la faim », deux ans après l’adoption de la résolution 2417 (2018) sur les conflits et l’insécurité alimentaire, le Conseil de sécurité a publié aujourd’hui une déclaration présidentielle dans laquelle il condamne fermement l’utilisation de la famine comme méthode de guerre et le refus de l’accès de l’aide humanitaire.
Au cours des deux dernières années, constate le Conseil, les conflits armés ont encore compté parmi les principales causes et grands facteurs d’aggravation de l’insécurité alimentaire et de la dénutrition dans différentes régions du monde. Il demande donc à toutes les parties à un conflit armé de s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du droit international humanitaire, de prendre toutes les mesures possibles pour assurer la protection des personnes et biens civils et de mettre fin à l’impunité des violations et des atteintes.
Déclaration du Président du Conseil de sécurité
Le Conseil de sécurité rappelle sa résolution 2417 (2018) et la déclaration de son président en date du 9 août 2017 (S/PRST/2017/14).
Le Conseil réaffirme qu’il a la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales et, à cet égard, rappelle qu’il est résolu à s’attaquer à la question de l’insécurité alimentaire, y compris de la famine, engendrée par les conflits armés.
Le Conseil réaffirme son plein respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de tous les États conformément à la Charte des Nations Unies.
Le Conseil rappelle le lien entre les conflits armés et la violence et l’insécurité alimentaire provoquée par les conflits et le risque de famine, demande à toutes les parties à des conflits armés de s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du droit international humanitaire pour ce qui est de respecter et de protéger les civils et les biens de caractère civil, notamment les biens nécessaires à la production et à la distribution de denrées comme les exploitations agricoles, les marchés, les systèmes d’eau, les usines, les sites de traitement et de stockage des produits alimentaires, les pôles et les moyens de transport pour la nourriture, et de s’abstenir d’attaquer, de détruire, d’enlever ou de mettre hors d’usage des biens indispensables à la survie des populations civiles tels que les denrées alimentaires, les récoltes, le bétail, les biens agricoles, les installations et réserves d’eau potable et les ouvrages d’irrigation, et de respecter et de protéger le personnel humanitaire ainsi que les articles destinés aux opérations de secours humanitaire et souligne qu’il importe que le personnel humanitaire ait accès librement et en toute sécurité aux civils en période de conflit armé.
Le Conseil constate avec une vive préoccupation qu’au cours des deux dernières années, les conflits armés ont encore compté parmi les principales causes et grands facteurs d’aggravation de l’insécurité alimentaire et de la dénutrition dans différentes régions du monde et que le nombre de personnes ayant besoin d’urgence d’une aide alimentaire et nutritionnelle et d’une aide à la subsistance a augmenté.
Le Conseil réaffirme que toutes les parties à un conflit armé doivent respecter les principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance dans la fourniture de l’aide humanitaire, notamment médicale, et réaffirme également que tous ceux qui contribuent à fournir cette aide doivent promouvoir et respecter pleinement ces principes.
Le Conseil réaffirme que c’est aux États qu’il incombe au premier chef de protéger la population sur l’ensemble de leur territoire.
Le Conseil met l’accent sur les effets particuliers que les conflits armés ont sur les civils, en particulier sur les femmes, les enfants, les personnes handicapées, les personnes âgées, les réfugiés et les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et souligne que toutes les populations civiles ont besoin de protection et d’assistance.
Le Conseil note que, partout dans le monde, de nombreuses crises alimentaires causées par des conflits risquent également d’être aggravées sous l’effet d’autres facteurs tels que les crises économiques, les phénomènes météorologiques extrêmes, qui sont de plus en plus fréquents et violents, et les catastrophes naturelles.
Le Conseil condamne fermement l’utilisation de la famine comme méthode de guerre et le refus illicite de l’acheminement de l’aide humanitaire et de l’accès du personnel humanitaire aux populations civiles en période de conflit armé. À cet égard, il demande à toutes les parties à un conflit armé de s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du droit international humanitaire et de prendre toutes les mesures possibles pour assurer la protection des civils et des biens de caractère civil. Il rappelle qu’il importe de respecter le droit international des droits de l’homme, selon qu’il convient, et le droit international humanitaire, de mettre fin à l’impunité des violations et des atteintes et de veiller à ce que les responsables de tels actes aient à en répondre.
Le Conseil souligne à cet égard que les conflits armés, les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme et l’insécurité alimentaire peuvent être des facteurs de déplacements forcés et que, dans les pays en situation de conflit armé, les déplacements forcés peuvent eux-mêmes en retour avoir des effets dévastateurs sur la production agricole, la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des populations déplacées et des communautés qui les accueillent, rappelle que les déplacements de civils en temps de conflit armé sont prohibés, et souligne qu’il importe de respecter pleinement le droit international humanitaire et les autres dispositions du droit international applicables.
Le Conseil réaffirme son intention d’œuvrer de concert avec le Secrétaire général en vue de prévenir et faire cesser par tous les moyens les conflits armés, y compris en s’attaquant à leurs causes profondes d’une manière inclusive, intégrée et durable, et en favorisant le dialogue, la médiation, les consultations, les négociations politiques et autres moyens pacifiques tout en intensifiant l’action menée dans les domaines de l’aide humanitaire, du développement et de la consolidation de la paix.
Le Conseil souligne qu’il faut faire en sorte que l’aide humanitaire soit adaptée aux besoins liés l’âge et au genre des bénéficiaires et rester attentif aux différents besoins des populations, en veillant à prendre en compte ces besoins dans les interventions humanitaires, notamment l’assistance vitale, qui doit être prompte, adaptée et fiable, et les plans de réponse humanitaire de l’ONU et les appels humanitaires connexes conçus pour aider les personnes qui en ont le plus besoin dans les pays qui font face à des situations d’urgence complexe en période de conflit armé.
Le Conseil encourage l’Organisation des Nations Unies et toutes les parties concernées à s’attacher, y compris par la participation pleine, effective et véritable des femmes, à œuvrer ensemble pour aider les pays touchés par des conflits armés à résorber leurs besoins, à mieux préparer leur relèvement sur le long terme et à préserver les moyens de subsistance des populations touchées, en particulier des personnes en situation de vulnérabilité, à améliorer leur accès aux services de base et à en renforcer la résilience, et à contribuer ainsi à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, notamment à l’élimination de la pauvreté et la réduction du risque d’insécurité alimentaire dans les situations de conflit armé.
Le Conseil encourage les États Membres à appuyer les dispositifs d’alerte rapide pertinents afin que les gouvernements et les intervenants humanitaires puissent disposer d’informations à jour, fiables, précises, vérifiables et ventilées concernant la sécurité alimentaire et qu’il soit possible d’agir en amont et de réagir plus tôt pour prévenir et atténuer les conséquences des crises alimentaires en période de conflit armé.
Le Conseil encourage le Secrétaire général à faire figurer, dans ses rapports sur les situations propres à certains pays, des éléments d’analyse étayés par des données ventilées par sexe et par âge concernant tout risque naissant de famine causée par des conflits ou d’insécurité alimentaire en période de conflit armé et entend continuer à accorder toute l’attention voulue à ces informations et en particulier aux recommandations pertinentes devant permettre d’éviter que ces risques se concrétisent.