Session de 2019,
5e & 6e séances plénières – matin & après-midi
AG/COL/3337

Le Comité de la décolonisation demande aux États-Unis de laisser les Portoricains exercer leur droit à l’autodétermination et à l’indépendance

Après un débat marqué par l’exaspération des pétitionnaires portoricains, le Comité spécial de la décolonisation a, dans une décision adoptée par consensus, demandé « de nouveau » au Gouvernement américain d’assumer sa responsabilité de prendre davantage de mesures qui permettront au peuple portoricain d’exercer pleinement son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance et d’arrêter des décisions souveraines pour répondre à ses besoins socioéconomiques, aggravés après les ravages causés par les ouragans Irma et Maria.

 Aujourd’hui le peuple portoricain est confronté à deux options possibles: rester sur place et vivre dans la précarité ou quitter l’île, ont prévenu les pétitionnaires.  La fuite des cerveaux et l’exode massif des forces vives ont été dépeints comme une « politique délibérée » pour « vider Porto Rico des Portoricains ».  La population de l’île aurait chuté de 3,5 à 3,1 millions de personnes depuis le passage des deux ouragans.  Comme l’a dit, sous un tonnerre d’applaudissements, l’activiste, militant et ancien prisonnier politique, M. Oscar Rivera, les États-Unis veulent « la cage sans les oiseaux ».

Les pétitionnaires ont réclamé la réinscription de Porto Rico sur la liste des territoires non autonomes de l’Assemblée générale.  Dans sa décision, le Comité spécial prie l’Assemblée d’examiner la question de Porto Rico sous tous ses aspects et de manière approfondie, et de se prononcer sur le sujet dès que possible.

Le statut d’État libre associé aux États-Unis que Porto Rico a depuis 1953, a été dénoncé comme « une supercherie » par les pétitionnaires qui ont parlé de véritable « colonie ».  Le Comité spécial note d’ailleurs « avec inquiétude », dans sa décision, qu’en vertu de la loi PROMESA portant création d’un conseil de supervision et de gestion des affaires financières (La Junta), la marge de manœuvre déjà limitée dont disposait « le régime de subordination politique et économique » en place à Porto Rico a encore été réduite.

La seule promesse de la loi PROMESA, c’est celle de « nous voler notre argent », a commenté la pétitionnaire du « Movimiento de Conciencia » qui, avec d’autres, s’en est pris avec virulence à La Junta.  Le Plan d’austérité qu’il a mis en place a conduit à des compressions budgétaires dans les services publics, les retraites et l’éducation pour rembourser une dette, « non auditée » de plus de 70 milliards de dollars.  Aggravation de la pauvreté et du chômage, fermeture d’écoles et d’établissements de santé, inefficacité du transport public, défaillance du réseau électrique, ce sont là les maux que les pétitionnaires ont énumérés pour illustrer la « situation catastrophique » d’une île qui n’a droit ni à l’aide bilatérale ni à l’aide multilatérale.

L’image du Président Donald Trump jetant des rouleaux de sopalin aux Portoricains, après l’ouragan Maria, illustre à elle seule la nature de la relation entre colonisateurs et colonisés, a fait observer le pétitionnaire de « Jericho National Movement ».  Privatisations et gentrification, c’est la politique américaine aujourd’hui, a dénoncé l’activiste Manuel Rivera, qui s’est ému de l’« augmentation exponentielle » du nombre des résidents étrangers, des investisseurs attirés par des incitations fiscales échappant aux Portoricains.

La seule issue, c’est l’indépendance, ont dit en chœur les pétitionnaires. «C’est du bruit », a rétorqué celui de la « Liga de Ciudadanos Latinoamericanos Unidos (LULAC) ».  L’indépendance n’est pas la seule mesure de décolonisation possible, a-t-il argué, rappelant que le peuple portoricain n’a cessé de rejeter cette option.  Seule l’admission de Porto Rico comme État, au même titre que les 50 autres États américains, permettrait au territoire de prendre son destin en main.

Dans sa décision, le Comité spécial prend acte à nouveau du débat en cours à Porto Rico concernant la mise en œuvre d’un mécanisme qui assurera la pleine participation de représentants de tous les courants d’opinion portoricains, notamment une assemblée constitutionnelle sur la question du statut, en gardant à l’esprit le principe selon lequel toute initiative visant à régler la question du statut politique de Porto Rico doit émaner du peuple portoricain.

Le Comité spécial poursuivra ses travaux demain mardi 25 juin à partir de 10 heures.

COMITÉ SPÉCIAL CHARGÉ D’ÉTUDIER LA SITUATION EN CE QUI CONCERNE L’APPLICATION DE LA DÉCLARATION SUR L’OCTROI DE L’INDÉPENDANCE AUX PAYS ET AUX PEUPLES COLONIAUX

DÉCISION DU COMITÉ SPÉCIAL EN DATE DU 18 JUIN 2018 CONCERNANT PORTO RICO A/AC.109/2019/L.7, A/AC.109/2019/L.13

Audition de pétitionnaires

Sous les applaudissements nourris de la salle, M. OSCAR LOPEZ RIVERA, Activiste, militant et ancien prisonnier politique, s’est attardé sur la « terrible » situation socioéconomique de Porto Rico due à la politique américaine et a estimé que la seule issue à cette crise, c’est la décolonisation de Porto Rico.  Le Gouvernement américain, a-t-il affirmé, veut dépeupler l’île: « ils veulent la cage mais pas les oiseaux ».  Énumérant les faits marquants de ces 130 années d’histoire commune, il a accusé le Président Donald Trump d’un « racisme pathologique ».  Pour les États-Unis, Porto Rico est un territoire américain sans pouvoir plénier ni autodétermination.  L’île n’a plus jamais eu un gouvernement contrôlé par les Portoricains et l’initiative « PROMESA » approuvé en 2016 « n’a fait qu’enfoncer le clou ». 

Le pétitionnaire a espéré que l’Assemblée générale utilisera ces informations pour corriger l’erreur de 1933 et permette au peuple portoricain d’exercer son droit à l’autodétermination.  « Il ne faut pas perdre de vue que Porto Rico est bel et bien une colonie américaine », a-t-il asséné, alertant que l’effondrement économique de ces dernières années a provoqué la fuite des cerveaux et un endettement massif.  Les Portoricains ne savent pas d’où vient cette dette mais ils savent que c’est eux qui vont payer comme en attestent les mesures d’austérité qui leur sont imposées aujourd’hui par les États-Unis et qui font même craindre la fermeture de l’Université de Porto Rico.  Privatisations et gentrification, c’est ce qui caractérise aujourd’hui l’île.  Le pétitionnaire a dénoncé l’« augmentation exponentielle » du nombre des résidents étrangers et revendiqué à nouveau « la décolonisation de l’île ».

À son tour, M. ESPADA, Président du Collège des avocats de Porto Rico, a dénoncé le fait que les États-Unis aient constamment nié l’existence d’un système colonial à Porto Rico lequel s’est pourtant renforcé avec la loi PROMESA qui a dépouillé le Gouvernement portoricain « du peu de pouvoir » qu’il avait.  Le 24 janvier 2018, la Cour d’appel a gelé les procédures entamées pour violation de la liberté d’expression.  Les droits des Portoricains sont suspendus mais la restructuration de la dette, dans le cadre de la loi PROMESA, elle, se poursuit, s’est indigné le pétitionnaire.  Il a exigé du Comité spécial qu’il consacre le statut de Porto Rico comme « territoire non autonome » et qu’il recommande à l’Assemblée générale des mesures pour mettre un terme au régime colonial et la saisine de la Cour internationale de Justice (CIJ).  M. Espada a aussi engagé les États-Unis à présenter un rapport au Comité spécial sur la crise économique et sociopolitique à Porto Rico.  Il a également suggéré la saisine de la Commission interaméricaine des droits de l’homme sur la demande de M. Pedro Gonzalez concernant le droit à l’autodétermination de Porto Rico.

Le terme de « colonie » n’existe pas dans la Constitution américaine, a ironisé Mme ANNA MARIA LOURDES DE SANTIAGO, Parti indépendantiste portoricain.  Pour masquer les faits, on a inventé le concept de « territoire non incorporé sujet des pouvoirs pléniers du Congrès américain ».  Conseil de supervision et de gestion des affaires financières imposé par le Congrès américain gère de facto le budget public, décide des lois et confisque la responsabilité juridique du Gouvernement portoricain.  Malgré cela, le terme « colonie » ne peut pas être utilisé alors même que ce sont les États-Unis et leur Conseil qui prennent les décisions à notre place.  Alors que l’île ne s’est toujours pas relevée de la dévastation du dernier ouragan, les États-Unis l’empêchent de solliciter de l’aide ailleurs. 

Dans l’état actuel des choses, un accord révisé comme l’annexion de Porto Rico n’est pas envisageable.  Les États-Unis ont « l’impératif moral » d’accorder l’autodétermination au peuple portoricain sinon ils doivent apporter une véritable aide économique car on ne saurait se limiter à « une subordination politique ».  Aujourd’hui, les Portoricains n’ont que deux choix: la précarité s’ils restent ou l’exil économique et la transformation de leur île en « paradis fiscal pour Américains ».

Mme WILMA E. REVERON COLLAZO, Coprésidente du Secrétariat des relations extérieures, a dénoncé les faits erronés qui figurent dans les rapports américains sur Porto Rico.  La situation s’est aggravée depuis la loi PROMESA, a-t-elle rectifié.  Porto Rico a été et est toujours privé de son droit à l’autodétermination, a-t-elle poursuivi, en s’appuyant sur une étude de l’Université Harvard et sur un article intitulé « Porto Rico, la colonie oubliée », rédigé par un ancien conseiller juridique du Département du trésor américain.  Le Comité spécial, a-t-elle martelé, doit soutenir la cause du peuple portoricain et veiller à ce que ce dernier ait accès aux informations sur les recours disponibles et leurs droits socioéconomiques.  La crise actuelle exige une réaction urgente à « la situation coloniale ». 

Le Gouvernement colonialisme américain est le premier responsable de la crise économique, a souligné, à son tour, Mme JAN SUSLER, National Lawyers Guild.  Le Conseil de supervision n’a rien de transparent et il fait tout pour que le peuple de Porto Rico paye la facture d’une dette contractée pourtant par la tutelle américaine.  La pétitionnaire a dénoncé la baisse du niveau de vie ou encore la suspension des affaires liées aux droits civils par les tribunaux qui agissent dans le cadre de la loi PROMESA.  L’île, qui est très pauvre, se transforme à vue d’œil « en paradis fiscal », a dit la pétitionnaire, en appelant l’Assemblée générale à tenir compte des véritables conditions de vie du peuple portoricain et à « bouter dehors les États-Unis ».

Mme INES MONGIL, Las Lolitas en su Centenario, a expliqué que son organisation a célébré le centenaire de la militante Lolita Lebrón qui n’a cessé d’appeler à la fin du colonialisme.  La pétitionnaire a dénoncé la destruction du patrimoine linguistique et culturel et de l’environnement de Porto Rico.  Elle a aussi fustigé le Conseil de supervision, le démantèlement de l’Université de Porto Rico, l’indifférence après le passage de l’ouragan Maria, la confiscation des eaux par les grands groupes agroalimentaires comme Nestlé et la multiplication des hôtels « immondes » en bordure de mer.  Le statut colonial de Porto Rico est la cause de sa pauvreté et la loi PROMESA ne fait qu’aggraver la situation. 

M. RAMON NENADICH, Président de l’État souverain de Borinken, a dit avoir engagé, l’année dernière, les démarches nécessaires pour l’admission de son État aux Nations Unies.  Or, à ce jour, nous attendons toujours une réponse et demandons au Comité spécial de faire suivre la requête « pour être sûr que le Secrétaire général des Nations Unies la reçoive bien et la renvoie aux organes compétents ».  Sinon, a prévenu le pétitionnaire, nous n’aurons d’autre choix que de constater « un acte discriminatoire » à l’encontre du peuple portoricain et « un acte délibéré » pour entraver sa décolonisation.

Le système économique à Porto Rico a tout simplement créé un paradigme fiscal qui permet aux multimillionnaires d’échapper aux impôts, a dénoncé M. ELIEZER MOLINA PEREZ, Movimiento de Conciencia.  Les Portoricains n’ont pas le droit de s’autogouverner et après le passage de l’ouragan Maria, ils ont dû assister à la mort des leurs, en attendant que les États-Unis daignent leur venir en aide.  Porto Rico est une colonie comme en attestent la mainmise américaine sur le système fiscal, l’imposition du dollar et l’obligation de consommer exclusivement des produits américains, anéantissant toute perspective d’autosuffisance.  Le système économique a été créé pour enrichir Wall Street.  Ils ont acheté nos terres et nos plages, fermé nos universités et confisqué nos biens, a accusé le pétitionnaire, arguant que la seule chose que promet la loi PROMESA c’est « nous voler notre argent ».  M. Perez a invoqué la résolution 1514 pour demander le lancement d’un véritable processus de décolonisation qui doit commencer par « nous rendre nos ressources ».  Le peuple doit pouvoir réaffirmer son identité portoricaine.  Nous ne sommes pas un territoire car nous avons une culture et une langue différente, a-t-il conclu, en brandissant, debout, le drapeau de Porto Rico.

La Constitution de 1952, a souligné, M. MARCO ANTONIO RIGAU, Président du Conseil municipal de San Juan, ne cache pas la vérité: Porto Rico est bien un territoire américain sans droits.  L’île n’est en rien un exemple de réussite économique ou politique.  Il est temps de mettre fin « au mythe » longtemps entretenu par le Congrès américain qui vient d’installer un Conseil de supervision « illégal ».  Le Comité spécial doit agir contre la « Puissance coloniale ».  La « subordination coloniale » doit être réglée dans l’intérêt de toutes les parties concernées, a-t-il insisté, en disant attendre beaucoup de l’Assemblée générale. 

Au nom d’un collectif obligé de s’exprimer dans « la langue de l’oppresseur », Mme ANA M. LOPEZ, Comite Unidos por Borinquen en Hostos, a dénoncé « l’acculturation forcée de la diaspora ».  Cette diaspora, a-t-elle expliquée, est passée d’un statut de « colonie externe » à celui de « colonie interne ».  L’ONU, a-t-elle asséné, a eu tort de rayer Porto Rico de la liste des territoires non autonomes.  La pétitionnaire s’est presque félicitée de l’ouragan Maria pour avoir eu le mérite de braquer les projecteurs sur l’impact d’un colonialisme de plus de 100 ans.  Quelque 120 000 personnes ont dû fuir, sans oublier les milliers de morts à cause de la négligence du Gouvernement américain.  Elle a aussi dénoncé les mesures d’austérité très dures imposées par la loi PROMESA et le silence complice de la communauté internationale.

« Il faut être bien stupide pour obéir à un bout de papier au lieu d’être tout simplement », a lancé M. MICHAEL URAYOAN CONNELLY REYES, Vidas Viequenses Valen.  Il a dénoncé « le processus d’extermination » en cours à Vieques, pointant la réticence des autorités à commanditer des études sur la situation de l’environnement.  Il n’a pas épargné l’ONU et a estimé que l’Assemblée générale « pourrait au moins » examiner la question des explosions.  Il a dénoncé le processus « irresponsable et immoral » du nettoyage de Vieques.

Porto Rico est et a toujours été une colonie, a affirmé, à son tour, Mme MARIANA NOGALES MOLINELLI, Présidente du Parti populaire des travailleurs.  Avec l’adoption de la Loi PROMESSA et la mise en place du Conseil de supervision, cette réalité coloniale n’a fait que se consolider.  Fermeture des écoles et de centres de santé, inefficacité du système de transport et difficultés à se remettre des conséquences de l’ouragan Maria, voilà ce qui caractérise Porto Rico et qui incite les États-Unis à donner la priorité au remboursement de la dette.  Le peuple est donc condamné à la précarité et à un coût de la vie insoutenable pour au moins 40 ans encore, s’est-elle alarmée.  La population a le choix entre vivre dans la précarité ou quitter l’île à cause d’une dette incontrôlée dont on ne sait à qui elle a profité.  Le réseau électrique est lui aussi l’otage du remboursement d’une dette qui repousse, d’au moins 50 ans, le processus de décolonisation. 

« Nous sommes toujours un territoire colonial qui vit dans l’impunité totale de la Puissance coloniale », s’est énervée Mme NATASHA LYCIA ORA BANNAN, Latina Justice PRLDEF.  Elle a appelé l’Assemblée générale à se saisir de cette situation qui ne peut se régler devant les tribunaux, comme on l’a appris avec l’Afrique du Sud.  Il nous faut un processus à l’Assemblée générale, a-t-elle insisté, en s’alarmant de la vague d’émigration massive au lendemain de l’ouragan Maria.

Même si « la bureaucratie » du système onusien rend pratiquement impossible toute action en dehors des sessions ordinaires du Comité spécial, « je vais continuer à faire tout ce qui est possible pour que Porto Rico redevienne une nation libre », a affirmé M. WALTER ALOMAR, Organisation pour la culture d’origine hispanique (OCHO).  Évoquant un voyage à Porto Rico en janvier dernier pour la prise en charge des malades mentaux et des toxicomanes, il a constaté avec désarroi que contrairement aux États fédérés américains, les informations sur les soins aux démunis de Porto Rico sont tout simplement introuvables.  Aujourd’hui, comme pour tous les autres services de base, le prix des prestations médicales est négocié, donnant lieu à l’aggravation de la corruption.

M. Alomar a dit avoir été frappé par le délabrement des écoles fermées qui a aggravé la déscolarisation.  Dans une des écoles abandonnées, s’est-il ému, j’ai vu traîner les informations personnelles des élèves.  Mais, a-t-il dit, « pendant leurs réunions sur les investissements, ils vous montrent des photos de paysages magnifiques et de plages immaculées.  La réalité est tout autre.  « Sortez la tête du sable et transmettez à l’Assemblée générale notre proposition sur l’autodétermination », a-t-il conclu, las du « statut colonial » de l’île. 

M. DANIEL VILA, Consejo Amplio Unitario de Solidaridad y Accion (CAUSA), a affirmé que la dette, qui dépasse les 73 milliards de dollars, ne pourra pas être remboursée.  Le Conseil « dictatorial » de supervision est en train de détruite notre pays et notre université, a-t-il dénoncé.  Il s’est inquiété de l’appauvrissement des retraités à cause d’un conseil qui force le peuple à payer les « vautours de Wall Street ».  Le pétitionnaire a appelé le Comité spécial à utiliser sa « force morale » pour exiger des États-Unis qu’ils respectent la résolution 1514 car l’intégration de Porto Rico à l’union nord-américaine ne permettra pas de décoloniser Porto Rico.  Il a réclamé une résolution sur l’entrée de l’État de Borinken aux Nations Unies.

M. JULIO ORTIZ-LUQUIS, Boricuas Unidos en la Diaspora, a averti que la qualité de vie se détériore à Porto Rico, pointant notamment la nouvelle forme de colonialisme que représente le Conseil de supervision qui, a-t-il indiqué, décide de l’avenir de Porto Rico en imposant des mesures d’austérité.  Des milliers de Portoricains sont contraints de partir, facilitant malgré eux la vente des terres aux étrangers.  Face à un Conseil de supervision truffé de conflits d’intérêt, Porto Rico est privé de sa place dans l’économie mondiale.  Le pétitionnaire a appelé à la suppression de toutes les mesures qui empêchent l’autosuffisance de l’île et son accès aux fonds de la Banque mondiale pour financer son développement.

C’est une situation « intenable », a prévenu Mme MARIA DE LOURDES GUZMAN, Movimiento Union Soberanista (MUS).  Les États-Unis, a-t-elle accusé, continuent de fouler notre dignité au pied, profitant de l’inaction de la communauté internationale qui reste sourde à nos appels à la justice.  Elle a aussi accusé le Conseil de supervision de prendre des mesures sur la dette sans l’avoir auditée au préalable.  En conséquence, le coût de la vie augmente et les services de base baissent en qualité.  L’indice de pauvreté a augmenté de plus de 53% depuis l’ouragan Maria et les crimes écologiques se poursuivent à Vieques et Culebra.  Il est temps, s’est-elle impatientée, que l’Assemblée générale se saisisse de la question de Porto Rico pour mettre fin à cette « infamie ».

Mme TRILCE TORRES LOPEZ, Gran Oriente Nacional de Puerto Rico, a reproché au Comité spécial de barrer l’accès de Porto Rico aux services et programmes des Nations Unies chargés des territoires non autonomes.  C’est tout simplement « une forme de discrimination », a-t-elle affirmé, appelant le Comité à entamer un dialogue avec la Puissance administrante et à saisir l’Assemblée générale de la question de Porto Rico.

Mme MABEL LOPEZ ORTIZ, Présidente du Colegio de Profesionales del Trabajo Social de Puerto Rico (CPTSPR), a expliqué que dans la colonie qu’est Porto Rico, le travail est devenu une exploitation et plus un droit humain.  La culture autochtone est foulée au pied et les lois unilatéralement imposées depuis le XIXe siècle ont fini par compromettre l’existence même portoricaine.  Elle a appelé le Comité spécial à dénoncer la « farce » des clauses coloniales, dont la loi PROMESA, la diminution des pensions et l’affaiblissement de l’Université pour rembourser une dette qui, a-t-elle signalé, n’a toujours pas été auditée.  Cessons, s’est-elle emportée, d’utiliser les terres de Porto Rico à des fins belliqueuses.  Notre problème, c’est l’absence de représentation politique d’où nos appels à la décolonisation.  Elle a appelé le Comité spécial à recommander à l’Assemblée générale de réévaluer le dossier de Porto Rico et d’enclencher un véritable processus de décolonisation.

Nous faisons front contre la loi PROMESA, a indiqué Mme JOCELYN VELAZQUEZ, JORNADA SE ACABARON LAS PROMESAS.  Elle a dénoncé les conditions de vie à Porto Rico en raison du colonialisme.  Le statut de colonie de Porto Rico est tout simplement « inacceptable » tout comme le contrôle « absolu » des États-Unis sur le destin politique et économique de l’île.  Qu’est-ce qu’il faut, s’est-elle impatientée, pour que l’ONU réinscrive Porto Rico dans la liste des territoires non autonomes?  Combien d’années faudra-t-il attendre?  Par son silence, l’ONU est complice, a-t-elle dit.  Il faut appeler Porto Rico par son nom: une colonie.

M. BENJAMIN RAMOS ROSADO, The ProLibertad Freedom Campaign, a attiré l’attention sur l’emprisonnement et les mauvais traitements infligés à Mme Nina Droz Franco, politicienne, et sur le cas de Mme Ana Belen Montes, prisonnière de conscience.  Arrêtée le 1er mai 2017 pour avoir protesté contre le Conseil de supervision et de gestion des affaires financières, Mme Franco est accusée, sans preuve, de tentative d’incendie du bâtiment de la Banco Popular.  Après une année en prison sans traitement médical et placée en isolement, on lui a refusé de communiquer avec sa famille et son avocat.  Elle a été transférée à Tallahassee en Floride et a été condamnée à 37 mois de prison et à une peine de trois ans avec sursis.  Les États-Unis se servent de « Nina » pour nous intimider, en nous montrant avec quelle cruauté toute dissidence populaire sera réprimée.  C’est une violation des droits civils, a martelé le pétitionnaire.

Mme Ana Belen Montes, a-t-il poursuivi, est emprisonnée depuis 16 ans pour avoir passé au Gouvernement cubain les informations qu’elle a réunies auprès du Gouvernement américain.  Son cas n’a rien à voir avec Porto Rico mais elle s’est levée contre l’impérialisme américain et a été sévèrement punie.  « Je demande au Comité de se joindre à nous et d’adopter une résolution demandant la fin du colonialisme américain au Porto Rico et d’aider à libérer « Nina Crow Franco » et« Ana Belen Montes », a dit M. Rosado, qui a également recommandé que l’Assemblée générale se saisisse du cas du colonialisme américain à Porto Rico. 

M. JOSE LOPEZ SIERRA, Companeros Unidos para la Decolonizacion de Puerto Rico, a dénoncé le fait que Porto Rico ne figure pas sur la liste des territoires non autonomes des Nations Unies alors même que c’est le territoire qui connaît l’occupation la plus longue.  Pour sensibiliser les New-Yorkais à cette situation, les Portoricains marchent tous les ans.  Le pétitionnaire a remercié la Présidente du Comité spécial qui a accepté la retransmission en direct de cette séance pour sensibiliser les Américains.  Il a même suggéré que les Nations Unies déménagent et installent leur siège dans un pays plus respectueux du droit international.

M. SETH GALINSKY, Parti socialiste des travailleurs, a demandé le départ des États-Unis car la lutte pour l’indépendance est dans l’intérêt non seulement du peuple portoricain mais de tous les travailleurs du monde, y compris les travailleurs américains.  Les capitalistes américains engrangent les milliards à Porto Rico en payant des bas salaires, en raflant les ressources, et en vendant leurs marchandises à des prix prohibitifs, sans oublier de laisser une dette immorale et impossible à rembourser.  « Nous soutenons l’annulation de toutes les dettes », a martelé M. Galinsky, accusant le Gouvernement américain et celui de Porto Rico de refuser de financer des programmes de travaux publics qui créeraient pourtant de l’emploi, assureraient des salaires aux normes syndicales, permettraient de construire des logements décents et abordables et d’améliorer les secteurs du transport et de la santé. 

Même l’aide alimentaire est utilisée pour enrichir l’industrie agricole américaine aux dépens des producteurs portoricains.  Les 700 000 Portoricains de New York et les 5 millions de Portoricains disséminés ailleurs aux États-Unis font partie de la classe des travailleurs.  L’indépendance de Porto Rico donnerait du poids aux travailleurs américains dans la lutte contre « nos exploiteurs communs ».  Les Portoricains ne vous demandent pas de les libérer Porto Rico.  Ils le feront eux-mêmes avec la solidarité de leurs frères et sœurs des États-Unis et de partout ailleurs dans le monde.

Mme ADRIANA ESTHER MARTINEZ SANCHEZ, Députée de Veracruz au Mexique, a plaidé pour que les Nations Unies reconnaissent la souveraineté de Borinken et lui accordé le statut d’État Membre. 

Mme LORRAINE LIRIANO, A call to action on Puerto Rico, a présenté l’objectif de son collectif, à savoir la constitution d’un réseau de la diaspora portoricaine basée à New York et dans d’autres villes des États-Unis, pour mener des actions politiques et éducatives sur « la crise fiscale et la situation coloniale » de Porto Rico.  Mme Liriano a dénoncé les 120 ans de colonialisme américain, fondé sur la doctrine de Monroe, puis sur son corollaire Roosevelt, et caractérisé par une « politique impérialiste et capitaliste ». 

En 2015, le Parlement des États-Unis a voté la loi PROMESA, en vertu de laquelle Washington a créé le Conseil de supervision et de gestion des affaires financières pour recouvrer une dette de 73 milliards de dollars.  Cette dette ne saurait être remboursée par la colonie.  C’est « l’empire » qui doit rembourser puisque, c’est lui qui a créé les conditions préjudiciables actuelles.  Mme Liriano a fustigé un Conseil de supervision qui a conduit à la baisse du niveau de vie de la classe ouvrière, à la fermeture d’écoles et à la baisse des retraites.

Mme Liriano a, en outre, dénoncé le « terrorisme environnemental » auquel se livrent les entreprises américaines implantées à Porto Rico.  Elle a cité l’entreprise A.E.S. qui n’hésite pas à déverser des cendres toxiques et cancéreuses pleines d’arsenic.  Les cas de cancer et le nombre de morts continuent d’augmenter, atteignant un tel niveau que l’on peut se demander si l’on n’a pas affaire à « un génocide prémédité ».  Mme Liriano a, en outre, déploré les nombreux cas d’arrestations de personnes qui dénoncent les « mesures d’austérité imposées au peuple portoricain par le Conseil de supervision ».  Elle a ainsi appelé le Comité spécial à agir pour mettre fin à la précarisation du peuple de Porto Rico.

M. EDUARDO VILLANUEVA-MUNOZ, Comité prodroits de l’homme de Puerto Rico, a déploré la décision du Conseil de supervision de détruire ce qui, jusqu’à présent, était l’Université de Puerto Rico (UPR), pour la convertir en collège technique, l’éloignant ainsi des sciences sociales et de la pensée critique.  Il a accusé le gouvernement de vouloir ainsi éliminer un foyer de résistance et de remise en question des politiques d’assimilation.  Il a dénoncé, dans ce cadre, ce que subissent certains étudiants, comme la persécution et l’incarcération, dénonçant l’« injustice » et qualifiant même la situation de « génocide culturel ».  Le pétitionnaire a également accusé le Conseil de supervision de vouloir appauvrir encore plus Puerto Rico.  Il a donc appelé le Gouvernement des États-Unis à convoquer les représentants des organisations et partis politiques engagés pour arriver à un véritable processus de décolonisation et mener un dialogue civil entre les forces anticoloniales du pays.

M. JOSE L. NIEVES, Brigada Guarionex, est revenu sur l’histoire de Borinken, envahi par l’Espagne puis par les États-Unis et dénoncé le système colonial qui y est à l’œuvre, pointant notamment l’imposition d’un président « qu’on ne peut même pas élire ».  Tout, à Porto Rico, est sous le contrôle des États-Unis, et si l’île pouvait garder tout l’argent qu’elle verse en impôts, elle serait prospère.  Il s’est alarmé du niveau actuel de la dette et a fustigé les États-Unis qui ont trompé le monde dans la résolution 748.  Il a appelé à l’abolition du système d’État libre associé et à la restitution des fonds prélevés illégalement à Porto Rico.

Mme OLGA SANABRIA, Comité de Puerto Rico en Naciones Unidas (COPRONU) a aussi dénoncé l’adoption, en 1953, de la résolution 748.  Elle est revenue sur la publication de deux études publiées depuis le passage de l’ouragan Maria qui mettent l’accent sur la nécessité de résoudre le statut colonial de Porto Rico.  Le Comité spécial doit continuer à demander à l’Assemblée générale de se pencher sur la question de Porto Rico.  Nous sommes déjà à la fin de la Troisième Décennie pour l’élimination du colonialisme et rien n’a pas été fait pour la décolonisation de Porto Rico, s’est impatientée la pétitionnaire.

Mme VANESSA RAMOS, Asociacion Americana de Juristas, a exigé le respect du droit inaliénable du peuple portoricain à l’indépendance et à l’autodétermination. Porto Rico fait partie des Caraïbes et son dossier relève bien de la résolution 1514.  Aujourd’hui, s’est alarmée la pétitionnaire, six enfants portoricains sur 10 vivent sous le seuil de pauvreté, ce qui prouve bien que les États-Unis ne s’acquittent pas de leurs obligations.  Elle a dénoncé l’impact « inacceptable » des fonds vautours américains et de la dette qui en a découlé, sans oublier l’affaiblissement de la législation sur l’environnement dont l’application dépend de la loi PROMESA.  Porto Rico, et en particulier Vieques et Colebra, sont victimes de la pollution toxique des activités militaires américaines.  Il est temps que l’Assemblée générale se saisisse de ce dossier, a-t-elle tranché.

M. ALFREDO ROJAS DIAZ DURAN, Conferencia International por la Paz y La Justicia, a soutenu la demande de l’État national de Borinken et a sommé le Secrétaire général de l’ONU de déposer immédiatement la requête de cet État au Conseil de sécurité lequel doit se prononcer sur le colonialisme à Porto Rico et permettre à Borinken de se constituer en État souverain.  L’Assemblée générale devrait voter en faveur de l’État national de Borinken, une revendication légitime que le Mexique soutient.

M. EDWIN PAGAN BONILLA, Generacion 51, a dénoncé la résistance « obstinée » de ceux qui ne veulent pas reconnaître l’autodétermination de Porto Rico et qui imposent à la place la loi PROMESA.  Expliquez-moi, a-t-il dit: quelle est la différence entre le système de l’Apartheid qui sévissait en Afrique du Sud et le système d’inégalité à Porto Rico?  Les Portoricains n’ont ni représentation ni droit de vote.  Qui pourra soulever cette question à l’Assemblée générale alors que la Représentante permanente des États-Unis, Mme Niki Halley, avait elle-même affirmé qu’elle s’y opposerait de toutes ses forces.  Il est temps que la résolution sur Porto Rico présente clairement des options de décolonisation, s’est impatienté le pétitionnaire.

« Vieques, c’est la colonie de la colonie » a déclaré Mme MYRNA VEDA PAGAN GOMEZ, Centro Culturel Bieke.  Après avoir entonné un chant typique de Vieques, elle est revenue sur l’état de ce territoire après l’ouragan Maria.  Les cancers y sont 30% plus élevés que dans le reste de Porto Rico.  Je suis moi-même une survivante du cancer, mais mon mari et mon fils n’ont pas échappé une mort due à la pollution par métaux lourds.  Cet enfer toxique créé par les expériences de la marine de guerre à coût d’uranium appauvri et d’agent orange est à l’origine de tous nos problèmes de santé, a expliqué la pétitionnaire, avant d’appeler, à son tour, l’Assemblée générale à se saisir de la question de Porto Rico.  « Arrêtons les discours et passons à l’action », a-t-elle lancé sous les applaudissements.

Déclarations

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. SAMUEL MONCADA (Venezuela) a réaffirmé la validité et la pertinence de la position de principe du Mouvement: le droit du peuple portoricain à l’autodétermination et l’indépendance, sur la base de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale.  Il faut examiner cette question sous tous ses aspects, a dit le représentant en espérant l’adoption d’une résolution par consensus.  Il a rappelé qu’à la dix-huitième Conférence ministérielle du Mouvement, en avril 2018, les ministres ont exprimé leur préoccupation face à la situation actuelle de « subordination politique » du peuple portoricain qui empêche ce dernier de prendre des décisions souveraines sur ses graves problèmes économiques et sociaux, dont la crise financière en cours et la crise humanitaire résultant des ouragans Irma et Maria. 

Ces problèmes, a noté le représentant, ont causé une augmentation du taux de pauvreté de 45% à 60% environ, donnant ainsi lieu à une migration massive et portant préjudice aux efforts de développement durable.  Les Ministres ont également exprimé leur inquiétude quant à la loi adoptée par le Congrès des États-Unis pour imposer à Porto Rico un Conseil de supervision qui ne peut que porter atteinte au pouvoir déjà limité du Gouvernement de San Juan. 

Le représentant a exhorté le Gouvernement des États-Unis à rendre au peuple portoricain son territoire occupé, y compris les installations dans l’île de Vieques et la station navale de Roosevelt Road, « parties de la nation latinoaméricaine et caribéenne ».  Il a aussi demandé au Gouvernement américain d’assumer sa responsabilité et d’accélérer le processus pour que le peuple portoricain puisse exercer pleinement son droit à l’autodétermination et à l’indépendance.

Au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a, à son tour, réitéré le caractère latino-américain et caraïbéen de Porto Rico.  Les États membres de la CELAC, a-t-il insisté, s’engagent à poursuivre le travail dans le cadre de la résolution 1514 de l’Assemblée générale pour parvenir à une région libérée du colonialisme et des colonies.  En sa capacité nationale, le représentant a réaffirmé l’engagement de la Bolivie en faveur de l’autodétermination de Porto Rico et a demandé à la Puissance administrante, les États-Unis, de prendre les mesures qui s’imposent pour que Porto Rico puisse jouir dans les meilleurs délais de tous ses droits.

Mme ANA SILVIA RODRÍGUEZ ABASCAL (Cuba) a rendu hommage à M. Oscar López Rivera qui a passé 35 ans de sa vie dans les geôles américaines.  Elle a dénoncé le statut d’État libre associé imposé à Porto Rico, voyant un affront au peuple portoricain.  La réalité coloniale mise en place il y a plus d’un demi-siècle n’a pas changé et en 2016, il a même été réaffirmé que Porto Rico doit se soumettre au pouvoir américain en tant que possession des États-Unis.  En novembre 2012, le peuple portoricain avait pourtant rejeté cette option, puis le 11 juin 2017, une autre « mascarade » a vu le jour, avant d’être largement boudée.  Seuls 23% des électeurs ont participé à cette consultation qui n’avait qu’un but: assoir la colonisation.

La représentante s’est inquiétée de l’aggravation de la situation socioéconomique de Porto Rico qui croule sous une dette de plus de 72 milliards de dollars.  Le Conseil de supervision entrave les possibilités de développement, enclenchant une émigration de masse, sans compter l’impact des ouragans Irma et Maria.  La Puissance coloniale n’a presque rien fait pour aider à Porto Rico, préférant imposer une réforme fiscale qui rend la reprise économique impossible. Porto Rico ne relève pas d’une question de politique intérieure.  La communauté internationale doit se saisir de la question.  Cuba, pour sa part, s’engage de manière claire en faveur de l’indépendance de Porto Rico, a conclu la représentante en se réclamant des liens historiques et culturels qui unissent son pays à l’île.  Même nos drapeaux sont similaires, a-t-elle ajouté sous un tonnerre d’applaudissements.

M. MOUNZER MOUNZER (République arabe syrienne) a estimé que la lutte du peuple portoricain pour obtenir son droit à l’autodétermination dure depuis trop longtemps alors que ce droit est garanti par la résolution 1514 de l’Assemblée générale.  Le 15 juillet 2019 marquera le cent vingt et unième anniversaire de l’intervention américaine à Porto Rico, a-t-il rappelé en insistant sur le droit inaliénable des Portoricains à l’autodétermination et à l’indépendance, comme l’on stipulé toutes les résolutions du Comité spécial.  Le représentant a espéré que comme les autres années, la résolution sur Porto Rico sera adoptée par consensus.

M. MANUEL ANTONIO MADRIZ FORNOS (Nicaragua) s’est dit solidaire du peuple de Porto Rico et a souligné que l’île est une partie intégrante de la sphère d’Amérique latine et des Caraïbes.  Porto Rico doit donc pouvoir exercer librement son droit à l’indépendance. 

Le représentant de la Chine a appuyé le projet de résolution présenté par Cuba et a souhaité son adoption par consensus.

M. MOHAMMAD REZA SAHRAEI (République islamique d’Iran) a défendu, à son tour, le droit des Portoricains à l’indépendance.  Il a engagé l’ONU à accélérer les procédures pour le plein exercice de ce droit.  La résolution devant être probablement adoptée par consensus, le représentant a vu le signe de l’appui dont bénéficie le peuple portoricain.

De nationalité mexicaine, M. AGUSTIN VILLA CORDOVA, Enlace Cultural Villa Zapata, s’est fait le porte-parole des familles des généraux qui ont organisé la révolution au Mexique.  Je suis venu défendre, s’est-il expliqué, les droits d’une « nation usurpée » par les États-Unis.  Je suis venu défendre la lutte des indépendantistes portoricains et exiger que l’Assemblée générale intervienne auprès du Secrétaire général des Nations Unies pour que Porto Rico puisse obtenir un siège en son sein.  « La situation serait bien différente si Poncho Villa était encore vivant », a-t-il conclu sous les applaudissements.

M. JIHAD ABDULMUMIT, « Jericho National Movement », a expliqué que son mouvement milite pour la libération des prisonniers politiques détenus aux États-Unis, notamment les indépendantistes portoricains.  Je suis également un ancien membre des Black Panthers et j’ai purgé une peine de 23 ans pour ma lutte pour l’indépendance des personnes de couleur aux États-Unis.  Les progressistes et les épris de liberté aux États-Unis appuient tous l’indépendance de Porto Rico, a-t-il affirmé.  L’île n’est pas « un territoire » c’est une « colonie », a-t-il martelé.  Il est temps de demander aux Portoricains s’ils veulent devenir citoyens américains ou indépendants.  Les Portoricains, a-t-il rappelé, n’ont pas le droit de voter à l’élection présidentielle et leur représentant au Congrès ne peut pas non plus se prononcer sur les projets de loi.  C’est là un statut inique, a souligné le pétitionnaire, avant de s’arrêter sur l’image du Président Trump jetant des rouleaux de sopalin », une image, a-t-il fait observer, qu’illustre à elle seule la nature de la relation entre colonisateurs et colonisés.  Le représentant a appelé à la pleine mise en œuvre de la résolution 1514.

M. RAMON ESTRELLA, Fuerza de la Revolución - República Dominicana, a rappelé que la première résolution condamnant la colonisation de Puerto Rico date d’il y a 50 ans.  Elle a aussi rappelé « les journées de résistance et de sacrifices », qui avaient conduit à la fin du XIXe siècle à libérer l’île du joug espagnol.  Dans le monde, la position majoritaire penchée pour la décolonisation de Puerto Rico mais « le fondamentalisme impérialiste et colonisateur » reste sourd.  Porto Rico n’est pas un échec.  C’est un pays doté d’une forte identité qui est connu pour sa culture, son art culinaire, ses athlètes, ses travailleurs et ses intellectuels. L’autodétermination et la diversité sont des valeurs montantes dans le monde entier.  Il faut donc les droits et la justice sur toute la planète, a conclu la pétitionnaire.

M. NELSON TORRES, Professeur à Hostos Community College, a fait une étude sur les cas insulaires sous occupation américaine.  La Constitution suit-elle le drapeau? a été l’une des questions posées et à l’origine de la décision juridique d’accorder un statut d’État incorporé à ces territoires auxquels seules certaines parties seulement de la Constitution s’appliquent par décision du Congrès, comme c’est le cas de Porto Rico.  La Cour suprême américaine a décidé de perpétuer le colonialisme en refusant de changer le statut de 1953.

Mme EVELYN MICHELLE ROMAN MONTALVO, Coalition portoricaine contre la peine de mort, a demandé l’incorporation dans la résolution de cette année d’une mention claire du fait que la peine de mort est une autre manifestation de la relation coloniale.  La résolution doit appeler au maintien de son abolition à Porto Rico car cette abolition est « menacée » par la Puissance américaine.

Au nom de la Liga de Ciudadanos Latinoamericanos Unidos (LULAC), M. José E. Meléndez-Ortiz, membre de la Chambre des représentants de Porto Rico, est revenu sur la crise économique et fiscale « grave » que traverse Porto Rico depuis une décennie, une crise aggravée par le passage des ouragans Irma et Maria.  Les ravages causés par ces catastrophes ont poussé de nombreux Portoricains à quitter leur terre, notamment pour la Floride, le Texas, New York et la Pennsylvanie, a-t-il précisé, soulignant que la population portoricaine a chuté de 3,5 à 3,1 millions de personnes depuis le passage des deux ouragans.

Parallèlement, au lieu de travailler main dans la main avec le Gouvernement portoricain à la restructuration de sa dette et au développement économique du territoire, le Conseil de supervision créé par le Congrès des États-Unis a « agi dans les faits comme un second gouvernement ».  Les limites de l’autorité du Conseil de supervision n’ont pas été définies avec suffisamment de clarté, de sorte que ce dernier en a profité pour s’arroger un pouvoir législatif et exécutif, quand son rôle initial était de fixer les budgets.  Du fait de sa faculté à opposer son véto au financement des politiques publiques définies par le Gouvernement élu de Porto Rico, le Conseil de supervision a contribué à semer le « chaos » et « l’instabilité » sur le territoire, avec pour effet de décourager les investisseurs privés.

Dénonçant l’incapacité actuelle de Porto Rico à être l’acteur de son propre développement économique, en raison des mesures d’austérité imposées par le Conseil de supervision, le pétitionnaire a estimé que la seule option viable est une solution finale sur le statut politique de Porto Rico.  Une énième résolution du Comité spécial ne changera rien à la question, a estimé M. Meléndez-Ortiz.  « L’indépendance n’est pas la seule mesure de décolonisation possible », a-t-il ajouté, rappelant que le peuple portoricain n’a cessé de rejeter cette option.  Seule l’admission de Porto Rico comme État, au même titre que les 50 autres États américains, permettrait au territoire de prendre son destin en main.  « Le reste, mes amis, ça n’est que du bruit », a-t-il conclu.

M. JOSE HERNANDEZ, Puerto Rico Me Llama, a indiqué qu’en juin 2016, les États-Unis ont eux-mêmes confirmé que la source du pouvoir à Porto Rico, c’est le Congrès américain.  Il a dénoncé les « sanctions économiques » imposées par le Gouvernement colonial et a exhorté l’Assemblée générale à se saisir de la question de Porto Rico.

Ce sont les relations avec les États-Unis qui empêchent Porto Rico de se relever de la pire crise économique de son histoire, a dit, à son tour, Mme NINA VALEDON, Alianza Patria.  Il faut veiller à ce que le peuple portoricain ait les outils pour se redresser.  La pétitionnaire a vivement dénoncé la réaction des États-Unis après les cyclones Maria et Irma.  Le rythme de la reconstruction a ralenti alors que plus de 30 000 habitants n’ont toujours pas de logements et que la nouvelle saison des ouragans approche, sans compter que le Gouvernement américain n’a toujours pas décaissé la totalité des fonds promis.  La pétitionnaire s’en est prise au plan d’austérité et a fustigé la « désinformation » pour cacher les conséquences des politiques imposées.  Le Comité spécial, a-t-elle estimé, doit changer de stratégie.  Pouvons-nous compter sur vous? a-t-elle lancé, estimant que contraindre les États-Unis à présenter des rapports ne suffit pas.

M.JAMES MENDIETA, Casa de Las Americas à New York, a rappelé les histoires parallèles de Cuba et de Porto Rico, avant de souligner que le 20 septembre 2017, l’ouragan Maria a causé des pertes économiques dépassant 95 milliards de dollars à Porto Rico.  Or, la réaction des États-Unis a été « minimale et insultante ».  Les Portoricains ont en effet appris une bien triste leçon: les États-Unis considèrent leur territoire comme une colonie de seconde zone.  La « JUNTA », ce Conseil de supervision dirigée par une banque et imposée à l’île, a réduit le secteur public et privatisé des entreprises publiques.  Le représentant a rappelé d’autres aspects des relations entre l’île et les États-Unis dont le programme de surveillance du FBI au milieu du XXe siècle.  Il a aussi rappelé que lorsque Cuba a tenté d’envoyer médecins et équipes de secours après l’ouragan Maria, il a reçu une fin de non-recevoir.  Malgré tout, les dirigeants politiques et intellectuels d’Amérique latine ne cesseront jamais de soutenir l’indépendance de Porto Rico, a-t-il conclu.

M. HECTOR BERMUDEZ-ZENON, Grupo por la Igualdad y la Justicia de Puerto Rico, a réaffirmé le caractère colonial de Porto Rico et s’est dit choqué qu’au milieu du XXIe siècle, les Portoricains soient encore là à « mendier » leurs droits aux Nations Unies, une organisation que les États-Unis ne respectent pas non plus.  Nous ne pouvons laisser les États-Unis nous traiter comme « des esclaves », s’est-il emporté, en rappelant que les enfants de Porto Rico peuvent se battre pour les États-Unis mais sans droit de vote.  À Porto Rico il n’y a ni démocratie ni liberté et le peuple est « un esclave économique et politique ».  Le pétitionnaire s’est particulièrement énervé quand il a brandi des articles de journaux faisant appel aux Portoricains pour qu’ils financent une statue de Donald Trump.

GERARDO LUGO SEGARRA, du Partido Nacionalista de Puerto Rico, a estimé que la situation coloniale de Porto Rico est restée inchangée depuis 121 ans et que le statut d’État libre associé n’y a rien changé.  Le Conseil de supervision nommé par le Congrès américain a des pouvoirs infinis, alors même que la dette que les Portoricains sont supposés rembourser n’est pas la leur mais bien celle de « l’envahisseur ».  Le plan « d’élimination de la population de souche est en train de culminer », s’est-il indigné, en faisant référence à l’exode massif de ces dernières années.  Les Etats-Unis ne reconnaitront jamais l’existence et les droits des autres nations, a-t-il affirmé, en estimant que nous sommes tous victimes de la « dictature américaine » et précisant que la question de Porto Rico ne saurait en aucun cas être perçue comme une question de politique intérieure.

M. MANUEL RIVERA, Puertorriqueños Unidos en Acción (PUA), a demandé au Comité spécial d’obliger les États-Unis à s’engager dans un processus de décolonisation de Puerto Rico.  Il a rappelé que le peuple de Puerto Rico s’était clairement exprimé le 6 novembre 2012: 55% des votants ont souhaité changer la relation coloniale, un résultat que « la métropole a ignoré ».  Il a cité un membre du Congrès américain qui, lors d’une récente visite sur le terrain, a expliqué qu’il ne pouvait aborder le sujet au Congrès à cause du manque de volonté politique.  Des projets de loi sont régulièrement présentés devant le Congrès pour lancer des consultations sur le statut du territoire, mais il n’y est jamais donné suite parce que l’on ne veut pas décoloniser.  La création de l’État libre associé en 1952 était un « mensonge », a-t-il accusé, arguant que « c’est toujours le Gouvernement de la métropole qui a le dernier mot à Puerto Rico ».  Que les États-Unis cessent de mentir et rendent des comptes à la communauté internationale, a-t-il conclu.

Après 37 résolutions et décisions du Comité spécial, l’Assemblée générale n’a toujours pas réagi à la situation de Porto Rico », a dénoncé Mme LINDSAY T. LOPEZ MURILLO, Instituto Puertorriqueño de relaciones internacionales.  Porto Rico, a-t-elle dit, n’est jamais sorti du « cachot colonial ».  Elle s’est insurgée devant la « farce » de 1953 et des conséquences de cette tragédie politique.  Elle a dénoncé la loi PROMESA qui usurpe les droits des représentants du peuple et impose des mesures d’austérité dont le démembrement de l’Université. Le Rapporteur spécial des Nations Unies a, lui aussi, conclu que Porto Rico n’est pas un territoire autonome.  Il est temps que l’Assemblée générale se saisisse de la question et qu’elle exige des États-Unis qu’ils remettent dans les 12 mois, tous les rapports attendus depuis 1953. 

M. JOHN MENENDEZ RIVERA a affirmé que la situation de Porto Rico est « catastrophique » avec des salaires à peine supérieurs au niveau de subsistance, un chômage galopant et une dette « illégale » qui a abouti à la banqueroute.  Pour le pétitionnaire, il ne faut pas s’attendre à ce que le Gouvernement américain change de comportement dans cette « relation coloniale » alors qu’il attend l’installation d’une majorité anglosaxonne sur l’île.  Il a revendiqué l’indépendance de Porto Rico et appelé les Nations Unies à la soutenir.

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