8320e séance – matin
CS/13437

Conseil de sécurité: en Syrie, de nouveaux déplacements de population aggravent une crise humanitaire lourde de conséquences pour les enfants

En Syrie, où plus de 13 millions de personnes ont toujours besoin d’aide humanitaire, dont au moins 6 millions d’enfants, les efforts de l’ONU et de ses partenaires sont tributaires du soutien de nombreux États Membres, a plaidé, ce matin, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, Mark Lowcock, au Conseil de sécurité.

« Malheureusement, l’Appel de Fonds des Nations Unies en faveur de la Syrie demeure largement sous-financé.  Soutenir et renforcer la confiance des bailleurs de fonds dépend de notre capacité à évaluer les besoins, hiérarchiser les réponses et convaincre que l’aide fournie parvient bien aux populations en détresse », a reconnu M. Lowcock, qui est aussi le Coordonnateur des secours d’urgence de l’ONU.  Cela suppose, a-t-il rappelé, un accès « sûr, sans entrave et durable ».

Or, la France a dénoncé les obstacles « inacceptables » que le régime syrien continuerait d’imposer à la délivrance de l’aide humanitaire, qui n’est distribuée que dans les zones contrôlées par le régime, contrairement aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et au droit international humanitaire, qui stipulent qu’elle doit parvenir à tous ceux qui ont en besoin.

Au cours du mois écoulé, l’ONU et ses partenaires sont néanmoins parvenus à fournir une aide à des dizaines de milliers de Syriens dans le sud-ouest du pays, notamment grâce à des stocks stationnés à l’intérieur de la Syrie, dans le cadre de l’accord conclu entre le Croissant-Rouge arabe syrien et le Gouvernement syrien.  « Toutefois, près de 110 000 personnes nouvellement déplacées se trouvent toujours dans la province de Qouneïtra, dans des zones largement privées d’assistance humanitaire », a déploré M. Lowcock.

Depuis novembre 2017, a-t-il poursuivi, le nombre total de personnes ayant besoin d’assistance dans les provinces d’Alep et d’Edleb a atteint 4,2 millions, soit 600 000 personnes de plus, principalement en raison de l’arrivée récente de milliers d’évacués en provenance du sud-ouest.

« Oui, le nombre de zones assiégées a été réduit à zéro, mais pas parce que le régime a levé les sièges.  C’est surtout parce qu’il a impitoyablement poursuivi sa campagne « reddition ou famine », a tonné le représentant des États-Unis.  « De même, le nombre de Syriens vivant dans des zones difficiles d’accès est passé d’un peu plus de 2 millions le mois dernier à 1,5 million en juillet, non pas parce que le régime aurait élargi l’accès, mais parce qu’il a saisi davantage de territoires par la force. »

Le représentant de la République arabe syrienne s’est dit surpris de ces accusations, qui imputerait à son gouvernement d’avoir libéré des territoires pour mieux les confisquer.  Damas mène des opérations militaires pour libérer les civils des groupes terroristes qui s’en servaient comme boucliers humains, enrôlant leurs enfants de force, a justifié le représentant syrien.

Des enfants syriens, il a beaucoup été question aujourd’hui, leur sort ayant été longuement évoqué par la Représentante spéciale pour les enfants et les conflits armés, Mme Virginia Gamba, qui s’est appuyée pour ce faire sur le Mécanisme de surveillance et de communication de l’information.  Chaque année depuis la mise en place du Mécanisme en 2013, le nombres de violations graves vérifiées n’a cessé de croître, a-t-elle précisé.

« Depuis le début de l’année 2018, le Mécanisme a vérifié plus de 1 200 violations commises contre des enfants, dont plus de 60 ont été tués ou mutilés.  Plus de 180 ont été recrutés et utilisés, plus de 60 écoles attaquées et plus de 100 attaques menées contre des hôpitaux et des centres médicaux », a-t-elle précisé.  Depuis qu’il a éclaté en mars 2011, le conflit syrien a causé la mort d’au moins 7 000 enfants, peut-être en réalité 20 000 selon des informations non vérifiées.

Tandis que le représentant du Koweït a dit craindre la menace « d’une génération perdue », la Représentante spéciale s’est déclarée « profondément troublée par les histoires des enfants nés et élevés pendant le conflit, des enfants qui n’ont jamais vu la paix en Syrie ».  Des enfants qui ont souffert perpétuellement de tous types de violations et se trouvent dans une situation de grave détresse psychosociale. 

Si les recrutements et l’utilisation d’enfants sont le fait d’acteurs non étatiques, la plupart des meurtres et des mutilations seraient attribuables aux forces gouvernementales syriennes.  Le représentant syrien a catégoriquement balayé ces allégations « infondées », qui se baseraient sur des sources « douteuses », selon lui.  Il a demandé à la Représentante spéciale de diligenter une enquête sur place, notamment dans la zone d’Al Rashidin, regrettant que les informations que son pays a fournies dans une lettre « officielle » aient été tout simplement « ignorées ».

Alors que le Royaume-Uni et la France réclamaient l’utilisation des points de passage par la frontière avec la Jordanie, leur collègue russe a jugé injustifié le maintien du mécanisme transfrontière d’acheminement de l’aide, le qualifiant de « discriminatoire » car, a-t-il affirmé, il ne desservirait que les zones « temporairement » sous le contraire des groupes armés.  Le représentant a salué en revanche l’initiative récente conclue avec la France pour fournir une aide dans la Ghouta orientale, aux abords de Damas, une initiative qui a été saluée par plusieurs autres membres du Conseil.

Le délégué syrien a profité du débat pour rejeter les critiques contre la loi numéro 10, qui constituerait, selon la France, un pan de la stratégie « d’ingénierie démographique » du régime, et, à ce titre, une entrave majeure au retour des réfugiés et des déplacés dans les logements qu’ils occupaient avant de fuir.  Nous avons, a-t-il révélé, adressé une réponse au Secrétaire général et au Conseil de sécurité après les « allégations mensongères » sur la nature de la loi et ses objectifs.  Son homologue de la Fédération de Russie a dénoncé une « campagne de désinformation » sur une loi qui ne vise qu’à assainir le secteur de l’immobilier. La Syrie n’est même pas pressée de la mettre en œuvre et est prête à en discuter avec l’ONU, a-t-il fait savoir.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (S/2018/724)

Déclarations

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a annoncé que les Nations Unies et leurs partenaires ont, au cours du mois écoulé, apporté de l’aide à des dizaines de milliers de personnes dans le sud-ouest de la Syrie.  Ceci est le résultat des efforts soutenus de la communauté humanitaire pour prépositionner des produits de première nécessité près de la frontière, mais aussi des stocks à l’intérieur de la Syrie, dans le cadre de l’accord conclu entre le Croissant-Rouge arabe syrien et le Gouvernement. 

Ainsi, le Programme alimentaire mondial (PAM) a livré des vivres à 200 000 personnes dans la province de Dar’a.  Le personnel de l’ONU s’est en outre rendu à Sahwa et Kahil pour évaluer les besoins et distribuer de la nourriture le 12 juillet.  Le 15 juillet, le personnel de l’ONU a participé à une mission de haut-niveau à Nassib, à Um Al Mahata et Dar’a.  Toutefois, près de 110 000 personnes nouvellement déplacées sont toujours dans la province de Qouneitra, dans des zones largement privées d’assistance humanitaire.  Les stocks disponibles sur place pour construire des abris et les kits ménagers sont désormais épuisés dans ces secteurs, livrant les déplacés à la canicule et au vent, a prévenu le haut fonctionnaire.  L’accès à l’eau et à l’assainissement est aussi une source de préoccupation croissante, des personnes ayant succombé à la déshydratation et à la consommation d’eau non potable.  La réponse humanitaire doit maintenant être renforcée à travers tout le sud-ouest, et à Qouneitra en particulier, a estimé M. Lowcock.

Depuis novembre 2017, le nombre total de personnes ayant besoin d’assistance humanitaire dans les provinces d’Alep et d’Edleb a atteint 4,2 millions, soit 600 000 personnes de plus.  L’arrivée récente de milliers d’évacués en provenance du sud-ouest reproduit la situation observée plus tôt cette année dans le nord-ouest du pays entre mars et mai, a relevé le Secrétaire général adjoint.  À Fouaa et Kefraya, assiégées depuis des années par des groupes armés, un accord, auquel l’ONU n’est pas partie, aurait été conclu le 16 juillet pour évacuer ces deux localités avec 120 bus jusqu’au campement de Mahalej, à Alep.  Par ailleurs, l’ONU et ses partenaires continuent de répondre aux besoins des déplacés en provenance du district d’Afrin, où la protection continue d’être une préoccupation majeure.  Le mois dernier, a précisé le haut fonctionnaire, des engins explosifs improvisés ont causé la mort de 15 civils et blessés 23 autres. 

Les besoins humanitaires dans la Goutha orientale demeurent élevés, a-t-il poursuivi, même si des informations font état de la réouverture de marchés et d’une normalisation des activités.  Près de 10 000 personnes en provenance de la Ghouta, principalement des hommes âgés de 15 à 65 ans, seraient toujours des déplacés, dans des sites du Rif-Damas.  Dans le nord-est, les retours à Raqqa se sont poursuivis, en dépit des risques élevés posés par des mines non explosées, a précisé M. Lowcock, tandis que dans la province de Deïr-el-Zor, des civils restent piégés dans des zones contrôlées par Daech.  Le déminage de Raqqa et Deïr-el-Zor est une priorité, de même que les efforts en cours pour renforcer l’assistance humanitaire, a-t-il souligné.  La situation humanitaire à Rukba, près de la frontière syro-jordanienne, demeure également fragile, avec des cas de diarrhée et de déshydratation observés dans le camp. 

« Nos efforts pour continuer de fournir l’aide nécessaire dans une situation en perpétuelle évolution dépend du soutien de nombreux États Membres », a souligné le Coordonnateur des secours d’urgence.  Il a cité les contributions financières aux projets du Plan de réponse humanitaire, l’aide fournie par les pays voisins et les dons de vivres, comme ceux, la semaine dernière, de la France, facilitée par la Fédération de Russie et distribuée à Douma hier.  Malheureusement, a-t-il dit, l’Appel de fonds des Nations Unies en faveur de la Syrie demeure largement sous-financée.  Soutenir et renforcer la confiance des bailleurs de fonds dépend de la capacité de l’ONU et des organisations humanitaires avec lesquelles elle travaille d’évaluer les besoins, hiérarchiser les réponses et convaincre que l’aide fournie parvient bien aux populations en détresse, a prévenu le Secrétaire général adjoint.  Cela suppose, a-t-il rappelé, un accès sûr, sans entrave et durable.

Mme VIRGINIA GAMBA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, a rappelé que le Mécanisme de surveillance et de communication de l’information relative aux enfants en situation de conflit armé en Syrie a été créé en 2013.  Chaque année depuis lors, il y a eu une augmentation considérable de toutes les violations graves imputables à toutes les parties au conflit.  Le Mécanisme a collecté des informations en Syrie mais aussi dans les pays voisins et ces informations ne représentent qu’une petite fraction des violations. 

Depuis le début de la crise en Syrie en mars 2011, l’ONU a vérifié que plus de 7 000 morts ou mutilés parmi les enfants.  Les informations non vérifiées font état de plus 20 000 victimes parmi les enfants.  Le Mécanisme de surveillance porte sur les six violations graves: le recrutement et l’utilisation, les meurtres et les mutilations, les viols et autres formes de violence sexuelle, les attaques contre les hôpitaux et les écoles, les enlèvements et le déni de l’accès humanitaire.  Depuis le début de l’année 2018, le Mécanisme a vérifié plus 1 200 violations commises contre les enfants dont plus de 60 ont été tués ou mutilés.  Plus de 180 ont été recrutés et utilisés, plus de 60 écoles ont été attaquées et plus de 100 attaques ont été menées contre des hôpitaux et des centres médicaux.

En 2018 déjà, plus de 1 300 enfants auraient été détenus par les parties dans le nord-est de la Syrie dont 7 cas seulement ont pu être vérifiés par le Mécanisme en raison de l’inaccessibilité de la zone.  Dans d’autres régions de la Syrie, des cas de détention d’enfants ont aussi été signalés.  Depuis 2014, le Mécanisme en a vérifiés plus de 350 cas.

Les chiffres des six premiers mois de 2018 reflètent une grande augmentation par rapport aux années précédentes.  Au premier trimestre de 2018, on a vu une augmentation de 25% des recrutements et de l’utilisation des enfants, et de 348%, des meurtres et de mutilations par rapport au trimestre précédent.  Le nombre total des violations graves pour le premier trimestre marque une augmentation de 109% par rapport au dernier trimestre de 2017.  Les recrutements et l’utilisation sont le fait d’acteurs non étatiques tandis que la plupart des meurtres et des mutilations sont attribuables au Gouvernement syrien et à ses forces.

Même si les chiffres de 2018 comprennent peu de cas de violence sexuelle et d’enlèvement vérifiés, ces violations sont signalées dans toute la Syrie depuis la création du Mécanisme de surveillance.  Les attaques contre les écoles et les centres médicaux ont été l’une des caractéristiques persistantes du conflit en Syrie.  Une école sur trois serait hors service ou endommagée, détruite ou utilisée comme abri ou pour des objectifs militaires.  On estime que 2,1 millions d’enfants sont déscolarisés. 

Dans les mois prochains, le rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés en Syrie sera publié.  Il couvrira presque cinq ans de conflit.  Les informations du Mécanisme de surveillance pendant cette période sont troublantes.  « Je suis profondément troublée par les histoires des enfants nés et élevés pendant le conflit, des enfants qui n’ont jamais vu la paix en Syrie.  Des enfants qui ont souffert perpétuellement de tous types de violations de leurs foyers, leurs communautés, leurs écoles, leurs centres de détention et dans les centres des réfugiés et des déplacés.  Nous pouvons imaginer que ces enfants se trouvent dans une situation de grave détresse psychosociale.  Ils ne connaissent pas le sens du mot « paix », a déclaré Mme Gamba. 

La Représentante spéciale a ajouté que les enfants privés de liberté pour s’être associés à parties au conflit doivent être traités comme des victimes des violations du droit international.  Elle a appelé les parties au respect de la Convention relative aux droits de l’enfant et à son Protocole additionnel relatif à l’implication des enfants dans un conflit.  Elle les a aussi appelées à veiller à ce que les opérations militaires soient menées conformément au droit international et plaidé pour un accès humanitaire à tous les enfants, grâce notamment à des couloirs et pauses humanitaires pour pouvoir leur donner une aide indispensable à leur survie et à leur développement. 

Il est important, a indiqué Mme Gamba, que le Conseil veille à ce que les enfants ne soient plus l’objet de violations graves de leurs droits.  Les parties au conflit doivent prendre des mesures immédiates, concrètes et effectives pour prévenir les pertes parmi les enfants, y compris cesser immédiatement d’utiliser des moyens et des méthodes de guerre disproportionnés et indiscriminés. 

En Syrie plus qu’ailleurs, a conclu la Représentante spéciale, il est particulièrement important de considérer les enfants comme un élément indispensable des processus de paix.  Des centaines de milliers d’enfants auront besoin d’aide.  La communauté internationale doit donner la priorité au financement et à la fourniture d’une éducation de qualité pour tous les enfants à tous les niveaux.  Personne ne doit pas être laissée de côté, et surtout pas ceux qui ont été privés des années les plus importantes de leur croissance. 

M.  MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) s’est alarmé de la gravité de la situation humanitaire en Syrie et de l’arrêt de l’aide dans le sud-ouest de la Syrie.  Au total, a-t-il souligné, 11 millions de Syriens ont fui et ce sont les enfants qui paient le prix le plus lourd de cette « tragédie ».  On leur a volé leur innocence et leur dignité et ce sont eux qui ont le plus besoin de notre protection et de notre aide humanitaire.  Le représentant a dit craindre la menace « d’une génération perdue » et regretté les violations répétées du cessez-le-feu prévu par la résolution 2401 (2018) et les entraves à l’accès humanitaire.  « Nous devons mettre fin à ce conflit, parvenir à un règlement global et consensuel et répondre aux aspirations légitimes des Syriens », a pressé le représentant.

M. JONATHAN COHEN (États-Unis) a condamné l’attaque « barbare » perpétrée en début de semaine dans la province de Soueïda, dont Daech a revendiqué la responsabilité.  Dans cette guerre, a-t-il relevé, les civils et les enfants syriens ont enduré un niveau de souffrance et de traumatisme presque inimaginable qui les marquera à vie.

Selon lui, les statistiques citées ici et dans les rapports mensuels du Secrétaire général sur la Syrie ne doivent pas être mal interprétées. Oui, le nombre de zones assiégées a été réduit à zéro, mais pas parce que le régime a levé les sièges. C’est surtout parce qu’il a impitoyablement poursuivi sa campagne « reddition ou famine ».  De même, le nombre de Syriens vivant dans des zones difficiles d’accès est passé d’un peu plus de 2 millions le mois dernier à 1,5 million en juillet, non pas parce que le régime a élargi l’accès, mais parce qu’il a saisi davantage de territoires par la force.  Malheureusement, plus de 13 millions de Syriens ont toujours besoin d’une aide humanitaire, dont au moins 6 millions d’enfants, a souligné le représentant. 

Dans le sud-ouest de la Syrie, les offensives militaires du régime depuis le 17 juin ont provoqué le déplacement de plus de 325 000 civils, dont environ la moitié sont des enfants. Pourtant, les humanitaires sont en grande partie incapables d’atteindre ces populations vulnérables et les stocks de vivres diminuent.  Ce qui est encore plus préoccupant, a ajouté le représentant, c’est que cette perte d’accès humanitaire inclut l’interruption des livraisons d’aide transfrontalière de l’ONU, réclamée récemment par ce Conseil dans sa résolution 2393.

S’agissant de l’échec du régime à faciliter l’accès humanitaire, rien n’a changé depuis la réunion du Conseil du mois dernier, a tranché le représentant. Au lieu de prioriser les besoins de sa propre population, le régime continue de militariser l’aide humanitaire et de refuser l’accès pour forcer la réconciliation dans les zones anciennement détenues par l’opposition armée.

Aussi, le représentant a-t-il demandé au régime syrien et à « ses alliés russes » de permettre à l’ONU de reprendre les convois transfrontaliers depuis la Jordanie et de faciliter l’acheminement de l’aide à partir de Damas.  En ce qui concerne Edleb, il a estimé que le régime syrien et ses partisans se préparent à lancer une offensive majeure.  « Une campagne militaire semblable à ce que nous avons vu dans la Ghouta orientale et à Alep entraînerait une crise humanitaire désastreuse.  Ce Conseil doit de toute urgence mettre en place des mesures pour protéger les civils et assurer l’accès humanitaire à Edleb », a martelé M. Cohen.

À Raqqa, la suppression des munitions non explosées est l’une de nos principales priorités, a-t-il poursuivi, en notant qu’à ce jour, les équipes de déminage financées par la Coalition ont retiré plus de 20 000 explosifs sur 15,5 millions de mètres carrés de territoire dans les villes de Manbij, Tabqa et Raqqa et ont formé plus de 300 Syriens.  Le représentant a conclu en reprochant à la Fédération de Russie de n’avoir pas respecté son engagement de maintenir une zone de désescalade dans le sud-ouest de la Syrie.  « Si la Russie prend au sérieux ses préoccupations concernant les réfugiés et les déplacés, elle devrait œuvrer avec le régime syrien à mettre fin à la violence et à permettre un accès humanitaire sans entraves aux civils ».

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a dénoncé le fait que les civils continuent d’être victimes et cibles de la stratégie militaire du régime syrien.  « Que reste-t-il de la zone de désescalade et des engagements des garants du cessez-le-feu à réduire la violence et à faire respecter le droit international humanitaire? » s’est demandé le représentant qui a souligné trois priorités essentielles: la protection des populations vulnérables, la garantie des accès humanitaires et une solution politique durable en Syrie, avec l’appui des Nations Unies.

Le représentant a mis l’accent sur la situation des enfants et les conséquences en termes d’insertion sociale et professionnelle et de radicalisation potentielle.  La France, a-t-il dit, souligne les mesures concrètes et immédiatement opérationnelles que l’ensemble des parties au conflit peuvent prendre comme s’abstenir de cibler des écoles et préserver les zones civiles et les lieux habités.  Le représentant a également abordé la question de la sécurité du personnel humanitaire « qui doit être garantie », en particulier dans les zones qui ont été reprises par le régime.  Il s’est dit « soulagé » par l’opération réussie de sauvetage d’une partie des Casques blancs, mais ceux qui sont toujours en Syrie sont désormais gravement menacés.  « Nous devons obtenir des garanties de sécurité pour ces individus et leurs familles et s’assurer qu’ils ne soient pas la cible de représailles du régime », a-t-il exigé.

S’agissant des réfugiés, le représentant a estimé que les conditions d’un retour sûr, digne et volontaire ne sont pas remplies, en partie parce que le régime continue de violer tous les cessez-le-feu et que certains des réfugiés sont enrôlés de force dans l’armée à leur retour.  La France, a souligné le représentant, demande, tout comme l’Union européenne, l’abrogation de la loi n 10, qui rend irréversibles les déplacements de population et constitue un pan de la stratégie « d’ingénierie démographique » du régime, et, à ce titre, une entrave majeure au retour des réfugiés et des déplacés.  Le retour des réfugiés suppose également des dédommagements et un travail de fond sur les restitutions de propriété et la conscription, a insisté le représentant.

Il a dénoncé les obstacles « inacceptables » que le régime syrien continue d’imposer à la délivrance de l’aide humanitaire et le fait que cette aide ne soit distribuée que dans les zones contrôlées par le régime.  L’ensemble des convois doivent pouvoir circuler de manière sûre et sans entrave dans l’ensemble du pays, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et au droit international humanitaire, a exigé le représentant qui a évoqué la récente initiative franco-russe pour acheminer de l’aide humanitaire à Douma, dans la Ghouta orientale.

La France ne prendra pas part à la reconstruction de la Syrie, a prévenu le représentant, sans une transition politique effectivement mise en œuvre, et un processus constitutionnel et électoral clair.  « C’est la condition sine qua none de la stabilité du pays et de notre contribution au financement de la construction », a ajouté le représentant.  À défaut, aucune raison ne pourra justifier que la France et l’Union européenne s’engagent dans le financement de la reconstruction, a martelé M. Delattre, affirmant, par conséquent, que le France ne ménagera aucun effort pour permettre la stabilité de la Syrie sur le long terme à travers une solution politique négociée.

Nous sommes choqués par les dernières séries d’attaques qui ont tué plus de 200 personnes, a avoué M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas).  Nous appelons le régime syrien à respecter le droit international humanitaire, à faciliter un accès durable aux acteurs humanitaires et à protéger toutes les populations dans le besoin, y compris les déplacés près de la frontière du Golan.  Le représentant a aussi appelé toutes les parties, y compris les garants de la zone de désescalade, à fournir aux convois humanitaires transfrontaliers les garanties de sécurité nécessaires.  La livraison de l’aide transfrontalière est d’une importance capitale et doit être facilitée partout où elle est la plus efficace ou c’est le seul moyen d’atteindre ceux qui en ont besoin.  Les Pays-Bas étudient une contribution aux plans de réinstallation, a confié le représentant qui a insisté sur le fait que toutes les parties au conflit devraient accepter et protéger les travailleurs humanitaires.  Il est profondément troublant, a-t-il avoué, qu'au lieu de cela beaucoup aient à craindre pour leur vie à cause de l’avance des troupes syriennes et de leurs alliés. 

S’agissant d’Edleb, le représentant s’est dit préoccupé pour les 2,3 millions de civils qui y vivent dont 1,3 million de déplacés, constamment menacés par les hostilités entre groupes armées et les frappes aériennes.  Les civils à Edleb ne sont ni des terroristes ni des combattants.  Ils doivent être protégés.  Les garants du processus d’Astana ont la responsabilité de trouver des arrangements pour prévenir les souffrances, protéger les civils et faciliter une sortie non violente de cette tragédie.  Les violations du droit international et des principes humanitaires sont « inacceptables ».  Le régime syrien, la Fédération de Russie et l’Iran doivent assurer un accès sans entrave et durable à tous les acteurs humanitaires, a encore insisté le représentant qui a aussi exigé la fin de l’impunité pour les crimes commis par toutes les parties.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) s’est désolé de la situation décrite, marquée par la détresse des populations, et les risques d’escalade, en particulier dans le sud-ouest du pays.  Les autorités syriennes ont une obligation éthique et juridique de faciliter l’accès de l’aide humanitaire, a insisté le représentant, avant de craindre les conséquences négatives que la loi n°10, si elle venait à être adoptée, pourrait avoir sur les déplacés et des réfugiés incapables de présenter à temps leurs titres de propriété.  Il a tout particulièrement attiré l’attention sur le sort des enfants et insisté sur la responsabilité de protéger ces garçons et ces filles, et de faciliter leur réintégration.

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a condamné la série d’attentats-suicides commis par Daech le 25 juillet, et a estimé que ces attaques ne doivent pas saper les efforts en cours pour stabiliser le pays.  Le représentant s’est dit préoccupé par la situation d’insécurité dans le sud-ouest de la Syrie.  « Les affrontements dans cette zone répondent à la logique implacable des opérations militaires qui font beaucoup de victimes et empêchent l’acheminement de l’aide humanitaire », a-t-il commenté.  Face à cette situation humanitaire précaire, il est impératif, a-t-il estimé, que les convois humanitaires interinstitutions puissent librement et en toute sécurité accéder aux populations.  C’est d’autant plus important pour des enfants qui risquent de souffrir du stress traumatique et toxique.  Il a salué l’initiative humanitaire conjointe de la France et de la Fédération de Russie dans la Ghouta orientale.  « Cela prouve qu’avec un peu plus de volonté politique, les membres de ce Conseil, qui ont la capacité d’influencer les belligérants pour obtenir la fin de ce conflit, peuvent parvenir à des solutions pacifiques lorsqu’ils le veulent ».

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) a salué la relance du processus politique syrien facilité par l’ONU.  Il a condamné l’intensification des opérations militaires et appelé à la fin de la violence dans le sud-ouest du pays.  Il a déploré le fait que l’accès humanitaire reste peu probable même après la reprise du contrôle de plusieurs zones par le Gouvernement syrien.  Pour la Pologne, l’impératif humanitaire doit être la priorité première de la communauté internationale.  Ainsi, la protection des civils et des infrastructures civiles, par toutes les parties au conflit, doit être de la plus grande importance. 

Le délégué a fait part de la préoccupation de la Pologne au sujet de la loi n 10 sur les droits de propriété, présageant que cela aura des répercussions sur le retour futur de millions de déplacés et réfugiés.  Il faut donc que le Conseil de sécurité reste saisi de cette question, a-t-il suggéré.  Il a aussi appelé à la protection des groupes vulnérables, notamment les enfants, les femmes et les minorités religieuses qui sont les plus affectés par le conflit syrien.  Il a aussi prôné l’accélération du programme d’action contre les mines, notamment en priorisant les zones où les civils retournent, afin d’infléchir la tendance à la hausse du nombre d’enfants victimes. 

La Pologne, a-t-il dit, est préoccupée par l’impact de ce conflit sur l’éducation.  Plus de deux millions d’enfants syriens sont déscolarisés.  Le manque d’accès à l’éducation et le traumatisme que les enfants vivent, y compris la violence sexuelle, conduisent à « des générations perdues » et cette situation va affecter l’avenir du pays et de toute la région, a prédit le représentant.  Pour la Pologne, il est donc important d’assurer le financement des programmes de soutien aux enfants affectés par le conflit, notamment en leur assurant une éducation de qualité, y compris pour les filles.

M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a rappelé qu’une des étincelles qui a allumé le conflit syrien avait été l’arrestation et la détention d’écoliers qui avaient peint des graffitis contre le régime syrien.  N’oublions pas le nombre élevé d’enfants tués et mutilés par les frappes à Alep et dans la Ghouta orientale, ni les enfants recrutés par Daech.  Mais ne perdons surtout pas de vue le fait que c’est le régime syrien qui a commis le plus d’exactions contre les plus jeunes, a insisté le représentant, appelant le représentant syrien à s’engager à souscrire aux trois objectifs énoncés par le Coordonnateur des secours d’urgence.

Il a dénoncé le fait que les autorités syriennes n’aient déployé aucune mesure pour s’acquitter de l’Accord de désescalade conclu avec les États-Unis et la Fédération de Russie l’an dernier.  Il s’est alarmé de l’impact des tensions sur les civils, notant que la moitié des personnes affectées sont des enfants.  Il a appelé à la protection des civils contre les représailles des autorités syriennes et insisté pour que ces dernières, de même que les autorités russes, garantissent la sécurité de tous ceux qui se trouvent dans le sud du pays.  Il a aussi exhorté la Fédération de Russie et les forces prorégime à garantir le régime de désescalade et l’accès humanitaire, pointant notamment le manque d’accès aux zones reprises par le Gouvernement syrien, Edleb.  L’accès doit être constant et un mécanisme transparent d’établissement des responsabilités doit être mis en place, a –t-il voulu.

Le représentant s’est ensuite rallié à l’appel de la France réclamant l’utilisation des points de passage par la Jordanie.  La Syrie et la Fédération de Russie doivent garantir un accès sûr et sans entrave à l’assistance humanitaire et à l’ONU dans les zones prioritaires qui viennent de changer de mains, comme la Ghouta orientale, le sud de Damas et Homs.  Ces deux pays doivent aussi fournir des garanties au Conseil de sécurité pour la protection des agents humanitaires.

« Nous devons éviter à tout prix une hausse de ces chiffres », s’est alarmé M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie), en parlant des projections du Coordonnateur de secours d’urgence.  Le représentant a lancé un appel à la fin des hostilités, conformément à la résolution 2401 (2018), craignant, à défaut, une déstabilisation majeure de la région.  Il est indispensable, a-t-il dit, d’éviter de nouvelles tensions ou violences dans cette région, notamment à Edleb, pour prévenir une autre tragédie.  Le représentant a donc salué les initiatives qui ont permis les accords locaux et facilité l’accès humanitaire et l’évacuation des personnes.  Après avoir condamné les attentats-suicides de Soueïda, il a estimé qu’il faut se doter des moyens nécessaires pour lutter contre la résurgence des groupes terroristes.  Il a fermement condamné toute attaque contre des installations civiles comme les écoles et les hôpitaux et plaidé pour une aide psychologique aux enfants déscolarisés.  Il a demandé au Gouvernement syrien de coopérer avec les agences onusiennes pour que l’aide soit révisée à la hausse et encouragé le retour des réfugiés dans des conditions volontaires et sûres.  « La seule façon de résoudre ce conflit passe par une solution politique inclusive. »

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a indiqué qu’il ne peut y avoir d’amélioration de la situation humanitaire dans le sud-ouest de la Syrie sans un accord politique en vertu de la résolution 2254 (2015), du Communiqué de Genève et d’autres plateformes pertinentes.  Il a appelé toutes les parties à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire afin de stopper l’augmentation du nombre des victimes parmi les enfants.  Il est tout aussi crucial d’agir dans le domaine du déminage et pour des programmes de réintégration et de réhabilitation des enfants qui ont été associés à des groupes armés.  À son tour, le représentant a plaidé pour un accès humanitaire sûr et sans entrave, y compris par des opérations transfrontières.  Il a mis en garde contre toute impunité, avant de souligner que la crise humanitaire requiert une approche globale qui aille au-delà de l’aide.  Il a invité l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura, à relancer les négociations politiques et l’a assuré que le Kazakhstan soutiendra ses efforts par le biais du processus d’Astana et des pays garants.  Cette approche politique peut conduire à l’atténuation de la crise humanitaire.  Le Kazakhstan sait qu’une solution durable ne peut venir que d’un dialogue ouvert à toutes les parties, y compris les femmes et les jeunes, qui doivent jouer un rôle clef, y compris sur les questions humanitaires.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a affirmé que les faits démontrent l’amélioration de la situation humanitaire en Syrie.  Il n’y a plus de régions inaccessibles et il est désormais possible d’élargir l’accès humanitaire. Le représentant a toutefois constaté que des problèmes de fonds persistent, dénonçant notamment le manque de progrès dans l’aide au camp de Rukban près d’une base américaine dont il a douté de la véritable contribution à l’élimination de la menace terroriste.  Le représentant a jugé tout aussi injustifié de maintenir le mécanisme transfrontière d’acheminement de l’aide, « un mécanisme discriminatoire » qui ne sert que les zones gérées temporairement par des groupes armés.

La Fédération de Russie, a-t-il affirmé, a acheminé 2 800 tonnes d’aide.  Des médecins russes sont portés au secours de plus de 86 000 patients et les spécialistes ont permis, au fil des ans, l’envoi de 300 convois humanitaires « dans des conditions extrêmement difficiles ».  Il a mentionné, à son tour, l’initiative franco-russe dans la Ghouta orientale.

Le délégué a dénoncé les derniers attentats terroristes qui ont fait des centaines de victimes à Soueïda et a appelé à des sanctions « extrêmement sévères » contre leurs auteurs.  Il a engagé les acteurs internationaux à agir de manière décisive pour combattre le terrorisme.  Parlant des agents humanitaires, il a affirmé que les seules personnes qui craignent pour leur sécurité sont celles qui diffusent une propagande mensongère sous couvert de l’aide.  Le représentant a en effet accusé les Casques blancs de se livrer à des provocations odieuses, n’hésitant pas à manipuler de très jeunes enfants pour des mises en scène dignes d’un film.

Des milliers de Syriens, a-t-il encore affirmé, sont en train de regagner leur pays et le Gouvernement syrien est prêt à créer des conditions propices à leur retour.  Les insinuations au sujet de la loi n 10 sont sans fondement, a estimé le représentant qui a dénoncé une campagne de désinformation.  L’objectif de la loi n’est pas de permettre au Gouvernement de s’approprier les biens mais d’assainir le secteur de l’immobilier.  La partie syrienne n’est même pas pressée de mettre en œuvre la loi et est prête à en discuter avec l’ONU, a-t-il fait savoir.

Le représentant a plutôt voulu que l’on mette l’accent sur le redressement de l’économie syrienne et la remise sur pied des systèmes éducatif et médical, le dernier ayant été la fierté des Syriens avant la guerre.  Il a mis en garde contre toute politisation, réclamant dans la foulée la levée des sanctions.

S’agissant du déminage, il a rappelé le travail « considérable » des démineurs russes et espéré que la signature du Mémorandum d’accord entre la Syrie et Service de la lutte antimines de l’ONU permettra de mettre en œuvre des mesures « dépolitisées ».  Il a en profité pour dénoncer le manque d’efforts de la Coalition pour déminer la ville de Raqqa.  En revanche, grâce au travail des spécialistes et archéologues russes, la restauration du patrimoine de l’humanité détruit à Palmyre est assurée.

Réfléchissons d’ores et déjà à la réintégration de la Syrie dans le système commercial international et à la normalisation des relations entre les gouvernements du Moyen-Orient, a conseillé le représentant.

M. YAO SHAOJUN (Chine) a encouragé toutes les parties syriennes à coordonner leur travail avec les agences de l’ONU sur place.  Tous les acteurs syriens doivent garder à l’esprit l’avenir de leur pays et le bien-être de la population, pour améliorer la situation humanitaire, a estimé le représentant qui a toutefois souligné que les activités humanitaires doivent respecter le principe de la neutralité et d’impartialité.  Il a appelé les Nations Unies à améliorer la communication avec le régime syrien.  Constatant des progrès dans le plan de retour des réfugiés, il a appelé la communauté internationale à appuyer la reconstruction de la Syrie.  La Chine a déjà décidé d’allouer 6 millions de dollars supplémentaires pour la reconstruction.  Elle appelle la communauté internationale à joindre ses forces pour appuyer les efforts de l’ONU en faveur d’une solution politique au conflit syrien, ce qui doit commencer par l’unité du Conseil. 

M. DESIRE WULFRAN G. IPO (Côte d’Ivoire) a salué les accords de cessation des hostilités auxquels sont parvenus les forces gouvernementales et les groupes armés rebelles, sous l’impulsion de la Fédération de Russie.  Cette trêve devrait permettre un acheminement dans les meilleures conditions de sécurité de l’aide humanitaire vers les populations dans le besoin.  Aussi, s’est-il particulièrement félicité de l’opération humanitaire conjointe entre la Fédération de Russie et la France, qui a permis, avec le concours de l’ONU, la livraison de 3 840 couvertures et de 572 kits de cuisine et tentes aux populations de la Ghouta orientale.  Parallèlement à cette opération, il s’est également dit heureux de constater que près de 40 camions du Croissant-Rouge arabe syrien ont pu accéder aux anciennes zones assiégées de la province méridionale de Deraa.  En outre, le représentant s’est félicité de l’amélioration progressive de la situation sécuritaire et sanitaire à Raqqa, qui a permis à près de 138 000 civils de regagner leurs habitations depuis la libération de la ville de l’emprise de Daech, en octobre 2017.  Le représentant s’est enfin félicité des différentes initiatives visant à relancer le processus de dialogue intersyrien, et a encouragé l’Envoyé spécial à entreprendre les démarches nécessaires à la mise en place du Comité chargé de rédiger le projet de constitution.

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) s’est inquiétée de la situation alarmante qui prévaut dans le sud de la Syrie et a appelé à la cessation des hostilités qui exacerbent la crise humanitaire.  Elle a jugé essentiel de garantir l’accès de l’aide aux zones qui ont récemment changé de mains.  En outre la protection des civils et des infrastructures est essentielle pour atténuer les souffrances.  Elle s’est préoccupée du sort des enfants et des multiples souffrances qu’ils ont endurées.  Elle a salué l’assistance ciblée dont ils bénéficient, tout en soulignant que seul le rétablissement de la paix leur permettra de faire éclore leur plein potentiel.

M. OLOF SKOOG (Suède) a dit qu’il faut continuer les efforts pour une solution politique au conflit et pour alléger les souffrances du peuple syrien.  Les effets de la crise sur les enfants et la réponse à y apporter, est un domaine dans lequel nous sommes capables de nous rassembler, a estimé le représentant.  Une action urgente est nécessaire.  Comme nous l’avons entendu aujourd'hui du Secrétaire général adjoint et de la Représentante spéciale, le temps presse pour une génération d’enfants syriens.  Le représentant a appelé toutes les parties et tous les États Membres à agir pour améliorer la situation des enfants pris au piège de la guerre en Syrie.  Pour ce faire, il a souligné quatre domaines de réponse humanitaire.

Le premier est l’accès.  Plus de cinq millions d’enfants ont besoin d’aide en Syrie.  Le délégué a appelé toutes les parties à accorder immédiatement l’accès à tous ceux qui en ont besoin, en laissant toutes les options possibles pour que l’ONU puisse atteindre le plus de gens possible, y compris l’accès transfrontalier aux Nations Unies, dans les zones qui ont récemment changé de mains et pour protéger les travailleurs humanitaires.  S’agissant de l’éducation, comme une école sur trois est fermée en Syrie, le représentant a rappelé la résolution 2427 (2018) et a appelé les donateurs à augmenter leur financement.  Il a invité M. Lowcock à préciser où se trouvent la plupart des 2,1 millions d’enfants déscolarisés en Syrie?

Concernant la santé mentale, le stress de la guerre est souvent trop énorme pour les adultes.  Les effets sur les enfants peuvent être beaucoup plus profonds et plus durables.  Moins de 5% du financement humanitaire en Syrie est destiné à la protection, la santé mentale, les services psychosociaux ou l’éducation en cas d’urgence.  Nous encourageons les donateurs et la communauté humanitaire à changer cette situation.  Pour ce qui est de la protection, 2017 a vu le nombre le plus élevé de graves violations commises contre les enfants.  Le représentant a réitéré l’appel à toutes les parties pour qu’elles mettent immédiatement en œuvre la résolution 2401 (2018) du Conseil de sécurité et les accords de désescalade à Edleb et dans le sud.  Il a insisté sur le respect des obligations découlant du droit international y compris le droit international humanitaire.  Il a appelé le Gouvernement syrien à mettre en œuvre le Protocole additionnel relatif à l’implication des enfants dans un conflit, et à cesser immédiatement de commettre les six violations graves.  La situation en Syrie devrait être renvoyée à la Cour pénale internationale, a insisté le représentant. 

M. ABDULLAH HALLAK (République arabe syrienne) s’est dit « surpris » par la logique de certains représentants qui ont accusé le Gouvernement syrien de se servir de la libération des territoires pour confisquer des terres.  L’armée syrienne libère les zones qui étaient sous l’emprise de groupes terroristes et un jour viendra où toutes les forces militaires « qui nous agressent aujourd’hui » seront chassées de notre territoire, a pronostiqué le représentant qui a avoué avoir espéré « une réaction collective » du Conseil de sécurité face aux attentats-suicides de Daech à Soueïda, il y a deux jours.

Le représentant a réitéré l’engagement de son gouvernement à apporter une assistance humanitaire à tous les citoyens syriens et sur l’ensemble de son territoire.  Le Gouvernement travaille d’ailleurs actuellement avec l’ONU mais insiste sur les principes de neutralité et de probité auxquels l’aide humanitaire doit répondre.   

Le Gouvernement syrien, a poursuivi le représentant, mène des opérations militaires pour libérer les civils des groupes terroristes qui les utilisaient comme boucliers humains, enrôlant leurs enfants de force.  Il s’est enorgueilli des « exploits réalisés jour après jour » par l’État syrien, grâce à ses « amis respectueux du droit international ».  Il s’est donc dit « surpris » des critiques dans la mesure où la libération des zones facilite l’acheminement de l’aide humanitaire de l’ONU.  Les Nations Unies, a-t-il d’ailleurs estimé, devraient renforcer l’appui qu’elles fournissent aux Syriens, en traitant avec les autorités syriennes et non avec des conseils locaux « qui sont des autorités montées de toute pièce ».  « Contrairement à ce que certains prétendent, les opérations militaires syriennes ont permis d’alléger les souffrances des civils. ».

Le représentant a dénoncé les mesures coercitives unilatérales qui font obstacle à la capacité de la Syrie de répondre aux besoins de sa population. S’agissant du sud du pays, le représentant a affirmé que les opérations militaires ont permis de révéler « les vraies intentions des groupes terroristes armés, comme les Casques blancs qui sont le bras droit logistique du Front el-Nosra et al-Qaïda.  Il les a accusés de falsifier les preuves pour manipuler l’opinion publique mondiale, et notamment la prétendue utilisation par le régime syrien d’armes chimiques.  Nous plaidons, a dit le représentant, pour une nouvelle approche fondée sur l’objectivité, la transparence et la neutralité entre le Gouvernement syrien et les Nations Unies. 

Le représentant a d’ailleurs accusé la Représentante spéciale d’avoir proféré des accusations non fondées contre le Gouvernement syrien et d’avoir ignoré les informations que ce dernier lui a fournies dans une lettre officielle.  Ces accusations se basent sur des sources douteuses et nous demandons une enquête sur place, notamment dans la zone d’Al Rashidin.  Pour ce qui est de la loi n 10, le représentant a rappelé avoir adressé une réponse au Secrétaire général et au Conseil de sécurité après les « allégations mensongères » sur la nature de la loi et de ses objectifs.  Cette lettre éclaircit la nature juridique de la loi et le Gouvernement syrien réfute toute allégation selon lesquelles elle vise à confisquer les terres et les propriétés des Syriens.

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