Conseil de sécurité: sans mesures fortes au Sahel, le terrorisme va se répandre et la situation se détériorer, préviennent de hauts diplomates
Si des mesures fortes et coordonnées ne sont pas rapidement prises, la situation au Sahel risque de se détériorer davantage; le fléau du terrorisme se répandra « encore plus vite et encore plus loin », forçant le Conseil de sécurité à débattre dans quelques mois d’une réaction face à une crise sécuritaire et humanitaire autrement plus dramatique. C’est la mise en garde lancée au Conseil, ce matin, par M. Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, et M. Maman Sidikou, Secrétaire permanent du Groupe de cinq pays du Sahel (G5 Sahel), à savoir le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad.
Depuis la dernière réunion du Conseil de sécurité sur la Force conjointe du G5 Sahel, il y a six mois, l’insécurité a connu une « recrudescence », marquée notamment par une hausse des attaques contre des civils, des responsables gouvernementaux, des forces de sécurité et de défense au Burkina Faso, au Mali et au Niger, ont observé les deux hommes.
En particulier, indique le Secrétaire général dans son rapport sur la question, l’attentat terroriste meurtrier perpétré le 29 juin contre le quartier général de la Force conjointe à Sévaré, au Mali, a porté « un coup sévère » aux efforts faits pour accélérer la pleine opérationnalisation de la Force conjointe et conduit à suspendre temporairement ses opérations. À la suite de l’attaque, la nouvelle direction de la Force conjointe a mené une série d’évaluations visant à définir l’orientation stratégique et géographique de celle-ci, de manière à déterminer la nature, la localisation et le calendrier de ses opérations, une fois qu’elles auront repris.
Si toutes les délégations ont insisté sur l’importance de réaliser la pleine capacité opérationnelle de la Force, plusieurs d’entre elles ont fait écho à MM Lacroix et Sidikou, en soulignant le manque important de matériel et de formation.
La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) connaît, par exemple, un déficit de 30 millions de dollars, tandis que la Force conjointe du G5 Sahel n’a reçu que 17,9 millions en équipements et services, sur les 414 millions d’euros promis à la Conférence internationale de Bruxelles, le 23 février dernier.
« Nous sommes à un tournant décisif » où la communauté internationale doit montrer son soutien à la région, a affirmé le Haut-Représentant de l’Union africaine (UA) pour le Mali et le Sahel, l’ancien Président burundais, M. Pierre Buyoya. Préoccupé, lui aussi, par les défis multiformes et la propagation de l’insécurité au Sahel, M. Buyoya s’est associé à l’appel lancé lors du dernier Sommet de l’Union africaine par les dirigeants de la région, et réitéré par le Secrétaire général, pour que la Force conjointe du G5 Sahel soit placée sous un mandat du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, et qu’elle bénéficie d’un financement adéquat.
Pour la France, initiatrice de cette Force composée aujourd’hui de 4 000 hommes, il est en effet de la responsabilité de la communauté internationale, et du Conseil de sécurité en particulier, de lui apporter un soutien efficace, à la hauteur des enjeux. « Au regard de l’ampleur de la tâche et des défis correspondants, nous devons bien mesurer et apprécier l’importance du chemin parcouru en à peine plus d’un an. » Le délégué français a fait siennes les recommandations du Secrétaire général en faveur d’un renforcement du soutien multilatéral à la Force conjointe via l’octroi d’un mandat robuste. À l’instar d’autres intervenants, il s’est dit convaincu que cet engagement sécuritaire exceptionnel en faveur de la stabilisation du Sahel doit s’accompagner d’une mobilisation équivalente sur les volets politique et du développement.
Au titre des priorités de sa politique étrangère, l’aide de l’Union européenne aux pays du Sahel s’élève à 8 milliards d’euros entre 2014-2020, auxquels il faut ajouter les 240 millions d’aide humanitaire alloués en 2017, a chiffré le Secrétaire général adjoint pour la politique de sécurité et de défense commune européenne au Service européen pour l’action extérieure, M. Pedro Serrano. L’Union européenne est présente dans la région depuis 2012 avec trois missions et près de 800 experts sur le terrain.
« Mais les ressources ne sont pas les seuls besoins », a nuancé le représentant des Pays-Bas, estimant que la capacité d’absorption de la Force ainsi que la coordination du soutien et des demandes sont aussi des facteurs à prendre en compte. D’autant plus que, de toute évidence, l’option militaire ne suffira pas. Il s’agit ici de régler des problèmes qui remontent à des décennies dans le Sahel, a analysé le Royaume-Uni. Il s’agit de mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Ce n’est en effet que par la combinaison de diverses politiques de bonne gouvernance que l’on pourra résoudre les problèmes dans cette région, a déclaré le représentant des États-Unis. Vantant le soutien bilatéral de son pays, il a précisé que l’aide des États-Unis est passée de 60 à presque 110 millions de dollars, pour le renforcement des institutions et des capacités de combat.
Pour la Chine, bien que la communauté internationale doive continuer d’appuyer la Force du G5 Sahel, il faut permettre aux pays africains de régler leurs propres problèmes, en coopération avec les organisations régionales. Un point de vue partagé par la Fédération de Russie, qui, relayée par la Bolivie, a par ailleurs affirmé que l’instabilité au Sahel résulte de « l’ingérence grossière » dans les affaires de la Libye.
La Côte d’Ivoire a invité les États du G5 Sahel à poursuivre le dialogue avec leurs partenaires internationaux, avec pour objectif de « s’approprier leur sécurité collective ». Les réponses sécuritaires portées par la Force conjointe doivent être soutenues par des stratégies visant à éradiquer les facteurs de vulnérabilité régionale et à améliorer la résilience des États et des populations locales aux crises, a conclu le délégué ivoirien.
Avec l’intensification des mesures antiterroristes prises par la Force conjointe, « il sera essentiel de gagner le cœur et l’esprit des populations concernées », fait observer le Secrétaire général dans son rapport.
PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE (S/2018/1006)
Déclarations
M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a déclaré que la situation sécuritaire dans le Sahel reste « extrêmement préoccupante » et les tendances récentes « inquiétantes ». La hausse des attaques terroristes contre des civils, des responsables gouvernementaux, et des forces de sécurité et de défense dans le nord-est du Burkina Faso et au Niger montre que la menace terroriste au Sahel se répand rapidement.
« Comme toujours, la population civile paie le plus lourd tribut. Les écoles sont fermées, les services sociaux de base ne sont plus fournis, les investissements potentiels abandonnés du fait du climat de terreur et de peur qui s’installe », une situation qui prive d’espoir une jeunesse sans perspective d’avenir et d’opportunités concrètes et fait le lit du terrorisme. Si nous ne prenons pas rapidement des mesures fortes et coordonnées pour prévenir le terrorisme, a mis en garde le haut fonctionnaire, « ce fléau se répandra encore plus vite et encore plus loin et il sera encore plus difficile d’y faire face ».
Dans cet environnement hostile, 1’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel n’a pas été facile, a reconnu le Secrétaire général adjoint. Au cours des six derniers mois, elle a dû faire face à de sérieux obstacles, mais a également surmonté d’importants défis. L’attaque contre son quartier général, à Sévaré, le 29 juin dernier rappelle de manière frappante à quel point les groupes terroristes opérant dans la région du Sahel sont bien informés, préparés et déterminés, s’est alarmé M. Lacroix. Cette attaque a détruit des infrastructures vitales et du matériel de communication, ce qui a entraîné un arrêt temporaire des opérations de la Force conjointe. « Cependant, les États membres du G5 Sahel et les dirigeants de la Force conjointe ont persévéré face à ce qui aurait pu porter un coup fatal à cette initiative importante mais naissante », a déclaré le haut fonctionnaire. La décision prise par le Collège de défense et de sécurité du G5 Sahel le 25 octobre dernier, à Niamey, de déplacer le quartier général de la Force conjointe à Bamako devrait contribuer à ce qu’elle reprenne son élan, s’est-il félicité.
Aussi a-t-il exhorté les dirigeants de la Force conjointe à ne ménager aucun effort pour finaliser les efforts de planification et à lancer ses prochaines opérations au plus vite. « Cela enverra un signal fort aux groupes terroristes qui cherchent à saper l’autorité de 1’État et à déstabiliser la région et renforcera la confiance des donateurs et des partenaires internationaux du G5 Sahel ». M. Lacroix a également appelé le G5 Sahel à renforcer ses efforts en vue de la coordination des forces envoyées dans ce cadre et à clarifier davantage le concept des opérations de la force commune. « Les opérations transfrontalières de la force commune dans le cadre de la première phase du CONOPS sont importantes et devront être poursuivies. Mais à terme, seule une opération avec un mandat régional et des rôles et des responsabilités clairement définis entre la Force conjointe, les armées nationales et les forces internationales sera efficace pour lutter contre le terrorisme et le crime organisé transnational au Sahel. J’encourage donc les États membres du G5 Sahel à s’accorder sur une vision commune de l’état final de la Force conjointe », a insisté le Secrétaire général adjoint.
« Plus que jamais, la force commune du G5 et du Sahel dépend du soutien de la communauté internationale », a-t-il prévenu. Malgré des progrès remarquables dans le domaine de la génération de troupes, la Force n’a toujours pas atteint sa pleine capacité opérationnelle, a constaté M. Lacroix. Les pénuries majeures d’équipements, les capacités, l’insuffisance des infrastructures et le manque de bases opérationnelles sécurisées continuent de retarder sa pleine opérationnalisation. À ce jour, près de 50% des contributions annoncées n’ont pas été réservées, et encore moins décaissées. « J’exhorte les donateurs à honorer leurs engagements et à fournir le soutien financier dont la force commune a tant besoin », a-t-il insisté.
Pareillement, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) continue de faire face à un déficit de financement de près de 30 millions de dollars, a relevé le haut fonctionnaire. Ainsi, la Mission n’a pas les fonds nécessaires pour fournir un appui technique à l’amélioration et à la fortification du camp de la Force, qui reste le principal obstacle à son opérationnalisation. Cette situation met en évidence les faiblesses du modèle actuel de soutien à la Force interarmées, « malgré les meilleures intentions de tous les acteurs impliqués ». Le Secrétaire général de l’ONU a répété à maintes reprises que la force commune avait besoin d’un « bureau d’appui spécialisé », financé par les contributions mises en recouvrement. « Cela permettrait une planification plus prévisible et durable des mesures de soutien, pour pouvoir étendre le soutien à la force commune G5 Sahel au-delà du territoire malien et permettre à la MINUSMA de se concentrer exclusivement sur la mise en œuvre du mandat ».
Le Secrétaire général adjoint s’est dit encouragé par les progrès réalisés par la force commune dans la mise en œuvre de la composante police et la mise en place de son cadre de conformité. « Les enquêtes sur les deux incidents survenus à Boulekessi, ainsi que la transparence et la coopération manifestées à la fois par les autorités maliennes et par les dirigeants de la Force conjointe, sont louables ». Le respect des droits de l’homme fait partie intégrante de la réalisation des objectifs opérationnels de la force commune et constitue une condition préalable au succès général de cette initiative. Pour cela, la population du Sahel doit avoir confiance dans les actions de ses forces de défense et de sécurité », a prévenu M. Lacroix. Il a donc appelé les dirigeants de la Force à tirer parti de l’assistance technique fournie par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) et à consolider ses acquis.
Enfin, toute initiative de sécurité au Sahel ne peut réussir que si elle s’inscrit dans une stratégie plus globale pour la région, qui s’attaque aux causes sous-jacentes de l’instabilité tout en recherchant d’abord des solutions politiques pour un développement socioéconomique inclusif, a analysé le haut fonctionnaire. La Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, associée au Plan d’investissement prioritaire (PIP) du G5 Sahel, fournit selon lui le cadre dans lequel la force commune doit être intégrée. Il s’est félicité à cet égard de la signature d’un accord de partenariat entre le Secrétariat du G5 pour le Sahel et l’Alliance du Sahel à Niamey, au Niger, le 30 octobre, une étape importante pour renforcer la coordination et la coopération au Sahel.
« Je me joins aux appels du Secrétaire général et aux États membres du G5 Sahel pour qu’ils créent de toute urgence le Groupe de soutien de la Force conjointe, qui offrira un forum aux États membres, aux donateurs et aux partenaires de la Force conjointe du G5 Sahel », a ajouté M. Lacroix. Il a appelé en outre les pays du G5 Sahel à continuer de remédier aux lacunes en matière de gouvernance dans la région, qui constituent un terreau fertile pour le terrorisme. « Le processus de paix malien reste essentiel à cet égard, en tant que pierre angulaire des efforts politiques visant à traiter les revendications », a-t-il rappelé.
M. MAMAN SAMBO SIDIKOU, Secrétaire permanent du G5 Sahel, a déclaré que depuis la dernière mise au point sur la situation au Sahel il y a six mois, l’insécurité dans certains pays de la région a connu une « recrudescence », rendant la situation « alarmante ». Le 29 juin dernier par exemple, une attaque terroriste a détruit le quartier général de la Force conjointe à Sévaré, au Mali. Cet évènement a marqué un point d’arrêt à « la montée en gamme » de cette Force, qui par ailleurs rencontre de nouveaux défis, notamment en matière d’équipements, de logistique et de financements.
À ce sujet, on est loin des 414 millions d’euros annoncés et promis lors de la Conférence internationale de haut niveau tenue le 23 février dernier à Bruxelles, a constaté M. Sidikou. À ce jour, seuls 17,9 millions d’euros en équipements et services ont été reçus, en plus de l’assistance technique des partenaires tels l’Union européenne et l’Union africaine. Le Fonds fiduciaire constitué par le G5 Sahel n’a en outre reçu des contributions que de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), du Rwanda et récemment des Émirats arabes unis, qui ont contribué à hauteur de 10 millions de dollars à ce fonds, s’est félicité l’intervenant.
En ce qui concerne les progrès enregistrés, la Force conjointe a avancé vers la mise en œuvre du cadre de conformité. Des mécanismes visant à garantir le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire ont été mis en place, avec l’appui du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).
Parmi ces progrès, a précisé M. Sidikou, il y a le déploiement de la composante police de la Force conjointe et la tenue d’une conférence régionale sur la lutte contre l’impunité, l’accès à la justice et les droits de l’homme, à Niamey, au Niger, le 10 septembre dernier. Par ailleurs, les statuts du comité de soutien à la Force conjointe, structure devant faciliter les décaissements du Fonds fiduciaire et qui sera basée à Nouakchott, ont été adoptés. Les généraux Oumar Bikimo, du Tchad, et Hanena Ould Sidi, de Mauritanie, forment désormais le tandem du Commandement de cette Force, dont le quartier général se trouve maintenant à Bamako. Elle a par ailleurs déjà mené six opérations, en 18 mois, a-t-il indiqué.
M. Sidikou a également déclaré que le Sahel connaît une crise multidimensionnelle qui illustre la pertinence d’une approche multilatérale. Certains États du G5 Sahel sont confrontés à de vives tensions, aboutissant à la fermeture d’écoles, des hôpitaux et commissariats. « Une bonne partie de sa jeunesse est totalement désemparée, sans avenir, et choisit de fuir, soit vers l’immigration, soit vers les pseudo-causes défendues par les groupes terroristes. » Devant un tel constat, il faut reconnaître que l’évolution de la situation laisse présager une détérioration plus importante si nous n’appliquons pas, dès à présent, les mesures adéquates avec les moyens conséquents, a-t-il prévenu. « Il est à craindre que le Conseil de sécurité ne se retrouve, dans quelques mois, à débattre d’une réaction face à une crise sécuritaire et humanitaire autrement plus dramatique », a-t-il ajouté.
Pour éviter d’en arriver là, le Secrétaire permanent du G5 Sahel a ajouté sa voix à celle du Secrétaire général des Nations Unies, des chefs d’État et représentants des peuples de cette région, pour demander que la question de la Force conjointe du G5 Sahel soit placée sous le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Ces cinq pays s’évertuent à tenir bon, malgré tout, et à œuvrer dans la mesure de leurs possibilités réduites afin de relever tous ces défis immenses de sécurité et de développement. Ils ont besoin d’une solidarité concrète de la communauté internationale face à des épreuves dont l’issue heureuse ou malheureuse, aura des répercussions bien au-delà des frontières africaines, a conclu M. Sidikou.
M. PIERRE BUYOYA, Haut-Représentant de l’Union africaine (UA) pour le Mali et le Sahel, a reconnu les sacrifices consentis par les États membres du G5 Sahel afin d’assurer l’opérationnalisation de la Force conjointe dans toutes ses composantes, ce qui démontre leur engagement à faire face à la crise multiforme qui sévit dans la région. Il s’est félicité de la contribution des organisations régionales et internationales en termes de formation, de renforcement des capacités et d’appui logistique afin de permettre au G5 Sahel de réaliser ses objectifs.
La situation sécuritaire au Sahel continue de se détériorer, avec la multiplication des attaques asymétriques contre les forces de défense et de sécurité et les populations civiles dans la zone d’action de la Force conjointe du G5 Sahel, qui doit être opérationnalisée « dans les plus brefs délais ».
M. Buyoya a plaidé pour une approche globale comprenant la sécurité, le développement et une meilleure gouvernance, notamment le déploiement de l’État sur l’ensemble du territoire malien. De son côté, la Commission de l’Union africaine poursuit ses efforts pour appuyer le G5 Sahel et compte adapter son action aux réalités sur le terrain. Il a appuyé l’idée du Secrétaire général de l’ONU de mettre en place un groupe de soutien au G5 Sahel, estimant que la Force conjointe devrait faire partie intégrante de l’architecture de paix et de sécurité en Afrique.
« Nous sommes à un tournant décisif », a souligné M. Buyoya, en reprenant l’appel lancé par les chefs d’État du G5 Sahel, lors du dernier Sommet de l’Union africaine, à Nouakchott, en Mauritanie, pour doter la Force conjointe d’un mandat en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies et lui octroyer un financement direct de l’ONU.
M. PEDRO SERRANO, Secrétaire général adjoint pour la politique de sécurité et de défense commune européenne au Service européen pour l’action extérieure de l'Union européenne, a rappelé que le G5 Sahel constitue une des priorités de la politique étrangère de l’Union européenne et a présenté quelques éléments sur l’appui concret que l’Union européenne (UE) fournit à ces pays dans le cadre d’une approche intégrée. S’agissant du dialogue politique et diplomatique, le partenariat UE-G5 Sahel est une réalité presque quotidienne, a assuré l’intervenant, mentionnant également des réunions ministérielles régulières et la Conférence internationale sur le Sahel qui s’est tenue au plus haut niveau à Bruxelles en février. En outre, l’UE participe activement à la médiation internationale qui accompagne le processus de paix malien et demeure le bailleur de fonds le plus important du pays. Quant à l’aide de l’UE et de ses États membres au développement de la région, elle s’élève à 8 milliards d’euros pour la période 2014-2020, auxquels il faut ajouter les 240 millions d’aide humanitaire alloués par la Commission européenne en 2017.
En venant à la coopération européenne en matière de sécurité et de défense au Sahel, M. Serrano a indiqué que l’UE est présente dans la région depuis 2012 avec trois missions et près de 800 experts sur le terrain. EUCAP Sahel Niger et EUCAP Sahel Mali sont des missions civiles qui visent à soutenir les forces de sécurité intérieures afin de renforcer leurs capacités de lutte contre le terrorisme et le crime organisé ainsi qu’à soutenir la réforme du secteur de la sécurité par le biais de conseil, de formation et de fourniture de matériel. EUTM Mali est une mission de formation militaire qui conseille les autorités pour la restructuration des forces armées par le biais de la formation de bataillons. Comme les deux précédentes, EUTM Mali est un partenaire essentiel de la Force conjointe. L’UE s’est par ailleurs engagée dans un processus d’adaptation de ces missions pour soutenir notamment le Collège de défense G5 et le Collège sahélien de sécurité. Avec l’accord des membres du G5 Sahel, la zone d’opération des missions serait ainsi étendue aux cinq pays et une cellule de coordination serait déplacée à Nouakchott.
L’UE soutient fermement le développement et la mise en œuvre opérationnelle de la force commune du G5 avec un montant total de 100 millions d’euros, a précisé M. Serrano. Les trois quarts de cette somme sont destinés aux équipements, aux services et infrastructures, mais le soutien s’adresse également à la MINUSMA, au Haut-Commissariat aux droits de l’homme et à la gouvernance du G5 Sahel, et notamment à l’opérationnalisation de son fonds fiduciaire.
Enfin, l’UE a créé le « coordination hub », qui est mis à la disposition du G5 Sahel et des bailleurs internationaux pour faciliter l’identification des besoins ainsi que pour coordonner l’appui financier des bailleurs au profit de la Force conjointe.
« La fragilité de la situation sécuritaire dans le Sahel et l’extension récente de la menace terroriste à l’est du Burkina Faso doivent tous nous alarmer », a déclaré M. FRANÇOIS DELATTRE (France). La mise en place de la Force conjointe du G5 Sahel constitue, selon lui, une initiative « de portée historique », sans réel précédent ni équivalent. « Au regard de l’ampleur de la tâche et des défis correspondants, nous devons bien mesurer et apprécier l’importance du chemin parcouru en à peine plus d’un an. » Cette Force est désormais une réalité opérationnelle, avec 4 000 hommes déployés, des structures de commandement fonctionnelles et plusieurs opérations conduites sur l’ensemble des fuseaux, a-t-il précisé. Ce à quoi il a ajouté la mise en place d’un cadre de conformité en matière de droits de l’homme « sans équivalent sur le continent » et les progrès réalisés dans la mise en place d’une composante police, qui en font « un modèle vertueux d’opération africaine ». Pour toutes ces raisons, M. Delattre a jugé prioritaire que les États du G5 Sahel poursuivent leur mobilisation en faveur d’une opérationnalisation aussi rapide que possible de la Force conjointe et que des opérations soient conduites dans les prochaines semaines.
Il est aussi de la responsabilité de la communauté internationale, et du Conseil de sécurité, de leur apporter un soutien efficace et à la hauteur des enjeux, ce qui passe par la matérialisation sans délai des contributions annoncées. M. Delattre a indiqué soutenir pleinement les recommandations du Secrétaire général en faveur d’un renforcement du soutien multilatéral à la Force conjointe via l’octroi d’un mandat robuste et la mise en œuvre d’un paquet logistique. La France est convaincue que cet engagement sécuritaire exceptionnel en faveur de la stabilisation du Sahel doit s’accompagner d’une mobilisation équivalente sur les volets politique et du développement. Sur le volet politique, la priorité est la pleine mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Sur le volet du développement, la priorité est de créer des perspectives durables pour les populations du Sahel, et notamment sa jeunesse, a-t-il conclu.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a dit partager l’avis de M. Buyoya, à savoir qu’il faut accorder une attention et une priorité aux points de vue africains pour la résolution des conflits sur le continent. Il a également déclaré que les causes de la situation dans le Sahel sont connues de tous. Elles ont pour origine « l’ingérence grossière » dans les affaires de la Libye. Tant que la situation ne sera pas stabilisée et normalisée en Libye, on ne pourra s’attendre à la stabilité au Sahel, a estimé le représentant.
Le délégué a également déclaré que la destruction, par une attaque terroriste du quartier général de la Force dans la ville de Sévaré, au Mali, montre la fragilité de cette Force. Or il a constaté que les moyens arrivent faiblement dans la région. « Ceux qui avaient fait des promesses ne se pressent pas beaucoup », a encore déclaré le représentant. La Fédération de Russie, partenaire technique et financier des pays de la région a, pour sa part, déployé des programmes de formation et du matériel. Elle estime également que l’option militaire à elle seule ne parviendra pas à normaliser la situation au Sahel.
M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) s’est inquiété de la détérioration des conditions de sécurité dans la zone de la triple frontière et de l’expansion des activités des groupes terroristes et extrémistes, qui sont en outre fréquemment associés à la criminalité transfrontalière organisée. Il a salué la détermination des pays du G5 Sahel à opérationnaliser la Force conjointe, même si le processus doit être accéléré. De plus, a-t-il souligné en appuyant les recommandations du Secrétaire général, la communauté des donateurs doit s’engager à un financement à long terme, tandis que les États Membres doivent fournir l’assistance technique nécessaire. Le délégué a salué l’ouverture du Collège de défense et de sécurité du G5 Sahel.
Une autre mesure importante, selon le représentant, est de garantir la complémentarité et la coordination entre la Force conjointe et les autres forces de sécurité de la région, dont la MINUSMA, la force Barkhane et les cadres régionaux. Il a dit soutenir la décision prise en juillet à Nouakchott, en Mauritanie, au Sommet du G5 Sahel, d’harmoniser le Programme d’investissements prioritaires du G5 Sahel et le Plan de soutien pour le Sahel. Outre les mesures de lutte anti-terroriste, le représentant a plaidé pour des efforts de développement et des mesures d’atténuation des effets des changements climatiques. Il a conclu en proposant d’œuvrer selon trois axes: renforcement du lien sécurité-développement; approche régionale; et rationalisation du système « Unis dans l’action ».
M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a déclaré qu’il n’y aura pas une seule manière de normaliser la situation dans le Sahel. L’option militaire ne suffira pas. Ce qu’il faut c’est mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030, car il s’agit ici de régler des problèmes qui remontent à des décennies dans le Sahel. Les forces du G5 Sahel doivent lutter contre le terrorisme et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) remplir son mandat, a dit le représentant, ajoutant que toutes ces activités sont utiles individuellement et collectivement.
S’agissant des questions financières et logistiques, le Royaume-Uni qui a déployé des hélicoptères et contribué à hauteur de 15,5% au financement d’appui de l’Union européenne, demande au Secrétaire général de finaliser le concept d’opération. Le représentant a également prié le G5 Sahel d’accélérer le plan de déploiement des troupes, afin de rassurer les bailleurs de fonds et d’éviter les doublons.
M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a exhorté les États du G5 Sahel à poursuivre le dialogue avec les partenaires internationaux afin de renforcer et de mieux coordonner les soutiens multiformes à l’opérationnalisation de la Force conjointe, dont les progrès sont en deçà des attentes. « Ils se doivent de s’approprier leur sécurité collective au regard de l’acuité des menaces à la paix et à la sécurité dans la région. » La Côte d’Ivoire est persuadée que les capacités de déploiement rapide et la bonne connaissance de l’environnement socioculturel constituent des avantages comparatifs pour la Force conjointe dans la lutte contre l’expansion du terrorisme et la criminalité transfrontalière dans le Sahel, a ajouté le représentant.
Convaincu de la nécessité de mutualiser les moyens de lutte contre les groupes terroristes, M. Adom s’est réjoui de l’appui logistique et opérationnel de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) à la Force conjointe, de même que de la signature de l’Accord technique entre l’ONU, l’Union européenne et les pays du G5 Sahel. La délégation a également appelé, dans le cadre de la recherche d’une solution politique à la crise malienne, à la mise en œuvre sans délai de l’Accord pour la paix et la réconciliation, dont « le succès constituerait une première étape pour le rétablissement de la paix et de la stabilité durables dans le Sahel ». En outre, les réponses sécuritaires portées par la Force conjointe doivent être soutenues par des stratégies visant à éradiquer les facteurs de vulnérabilité régionale et à améliorer la résilience des États et des populations locales aux crises, a conclu le représentant.
M. TAYE ATSKE SELASSIE (Éthiopie) a relevé qu’en l’absence de structures étatiques viables, la promotion de la paix et de la réconciliation dans la région du Sahel est très difficile. Il s’est aussi inquiété des attaques fréquentes contre les forces de sécurité et autres fonctionnaires, ainsi que des destructions de locaux publics. Les récentes attaques terroristes témoignent, a-t-il souligné, de la présence croissante des groupes terroristes dans la région, ce qui exige une coordination entre la Force conjointe du G5 Sahel et les militaires et agents de sécurité des États de la région. À cet égard, le représentant a plaidé pour la pleine opérationnalisation de la Force conjointe et salué les intentions de la soutenir exprimées lors de la Réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le Mali et le Sahel.
En même temps, il est important que la communauté internationale, y compris le Conseil de sécurité, prenne des mesures concrètes pour garantir à cette Force un soutien et des fonds suffisants, a poursuivi M. Selassie. Il s’est inquiété des difficultés qui se posent sur le plan des opérations militaires, à cause de l’étendue de la région et de son caractère désertique, ce qui nécessite d’autant plus de capacités pour la Force conjointe. Le représentant a par ailleurs appuyé les efforts du G5 Sahel pour restructurer son Secrétariat, dans le but de répondre au mieux aux exigences opérationnelles. Il a également appelé à développer des partenariats en faveur du développement social et économique, avec la coopération les agences des Nations Unies. Enfin, le délégué s’est préoccupé de la situation humanitaire qui empire à cause du conflit et des changements climatiques, appelant à financer le plan d’urgence.
M. OLOF SKOOG (Suède) a exprimé sa vive préoccupation face à la détérioration de la situation sécuritaire au Sahel, notamment le débordement du conflit malien au Burkina Faso et au Niger. Afin d’appuyer l’opérationnalisation du G5 Sahel, il a appelé à la mise en œuvre rapide de la résolution 2391 (2017) et à l’adoption d’un calendrier précis. Selon lui, le respect du droit international humanitaire et du principe de responsabilité sera un facteur déterminant du succès de la Force conjointe.
Le représentant a souligné l’importance du soutien opérationnel et logistique fourni par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) aux efforts du G5 Sahel. Afin d’assurer une planification efficace des opérations menées par le G5 Sahel, il a appelé à un financement prévisible. Enfin, il s’est félicité de de la mise en place d’un Plan d’appui de soutien et de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, tout en souhaitant un renforcement de la direction stratégique.
M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a dit partager le point de vue de certaines délégations, à savoir que l’option militaire à elle seule n’est pas suffisante. « Ce n’est que par la combinaison de diverses politiques de bonne gouvernance que l’on pourra résoudre les problèmes dans cette région », a affirmé le représentant. Son pays soutient, certes, le G5 Sahel, mais il reste convaincu que la meilleure manière est de le faire sur le plan bilatéral. Ainsi, les États-Unis ont presque doublé leur aide vers les pays du Sahel, la faisant passer de 60 à presque 110 millions de dollars, destinés notamment à renforcer les institutions et les capacités de combat. Ils ont aussi pourvu 460 millions de dollars pour le développement de ces pays.
Le délégué a estimé aussi qu’au centre de la situation au Sahel, il y a la situation du Mali. Dans ce contexte, il a salué le rôle joué par la France, et son opération Barkhane tout en étant d’avis que la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) a encore un rôle à jouer. Cependant, il a jugé « inacceptable » que les accords signés ne soient pas mis en œuvre ni respectés. Pour cette raison, le représentant a estimé que, dans l’optique de la pleine mise en œuvre de la résolution 2423 (2018), le Conseil de sécurité devrait recourir à tous les outils à sa disposition, « y compris envisager des sanctions contre les saboteurs ».
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est dit préoccupé par la situation humanitaire « délicate » et la détérioration de la situation sécuritaire au Sahel, malgré la mise en place du G5 Sahel. Afin d’assurer la stabilité de la région et de parvenir à une paix durable, il faut renforcer les capacités opérationnelles, politiques et militaires du G5 Sahel. Le représentant a estimé que la tenue récente d’élections au Mali et en Mauritanie, de même que l’adoption du Pacte pour la paix au Mali, auront pour effet de renforcer les institutions et la gouvernance dans la région. Nous devons adopter une approche multidimensionnelle afin d’être en mesure de nous attaquer aux causes profondes des conflits, a-t-il déclaré, en soulignant l’importance de mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et d’assurer l’autonomisation des femmes.
M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) s’est inquiété de rapports faisant état de l’élargissement de la coopération entre réseaux terroristes au Sahel, et de la montée de la violence intercomunautaire, notamment dans le centre du Mali. Selon lui, le temps est venu d’intensifier les efforts pour poursuivre la mise en œuvre de la Force conjointe du G5 Sahel, en particulier l’opérationnalisation de sa composante policière et sa coopération avec le système pénal national. Le représentant a réaffirmé que « les ressources ne sont pas les seuls besoins ». La capacité d’absorption de la force ainsi que la coordination du soutien et des demandes sont aussi des facteurs à prendre en compte, a-t-il dit, insistant sur le renforcement des forces armées nationales.
Il faut aussi s’investir davantage dans la prévention des conflits, a poursuivi M. van Oosterom. Nous devons agir contre leurs causes profondes, comme les changements climatiques qui entraînent pénurie d’eau et désertification, ou la persistance des inégalités et de la discrimination à l’égard d’une région ou d’une communauté. Le représentant a également pointé l’usage disproportionné de la violence par l’État, cité comme « élément déclencheur » par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) dans son rapport « Vers l’extrémisme en Afrique ». Les Pays-Bas, a-t-il assuré, comptent encore accroître leur présence diplomatique et soutien à la région.
« Nous vivons un moment critique dans notre lutte contre le terrorisme et la criminalité », a estimé M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale), pour qui la « sophistication croissante » des groupes armés représente une véritable menace à la paix et la sécurité internationales. Selon lui, il est essentiel d’assurer un financement et un appui conséquents à la Force conjointe du G5 Sahel. Il s’est félicité, à cet effet, de la création d’un fonds d’affectation spéciale, conformément aux décisions de la Chambre extraordinaire des chefs d’État du G5 Sahel.
Le représentant s’est félicité de la coopération du G5 Sahel avec Interpol et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). Il a dénoncé la facilité avec laquelle les groupes armés non étatiques parviennent à pénétrer de nouveaux territoires, comme en 2017 quand des « mercenaires » ont tenté de déstabiliser la Guinée équatoriale. Enfin, il a espéré que la prochaine conférence de coordination des partenaires du G5 Sahel permettra d’adopter des mécanismes concrets de financement.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a déclaré qu’il faut régler au plus vite la question de l’augmentation des attaques contre les installations militaires et les civils au Mali, tant elles contribuent à aggraver l’insécurité dans ce pays et dans la région. Le représentant a ensuite fait observer que le Gouvernement malien avait pris des mesures pour mettre en œuvre l’accord de paix, afin de ramener la stabilité dans le pays. Il doit être soutenu, a-t-il plaidé. Alors que le Sahel dispose d’un vaste potentiel, cette région manque de ressources économiques, financières et humaines. C’est pour cette raison que le Koweït appuie la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. À titre national, le Koweït a versé aux pays de la région 150 millions de dollars ces trois dernières années, par le truchement du Fonds koweïtien pour le développement.
Face aux menaces transnationales auxquelles sont confrontés les pays du Sahel, Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) s’est félicitée de l’adoption d’une stratégie régionale. Elle a encouragé les pays du G5 à accélérer le déploiement des troupes sur le terrain et à mettre en place une force de police dans les plus brefs délais. En outre, ces mesures doivent s’accompagner de mesures de réhabilitation et de réintégration des combattants au niveau national. Malgré ces progrès, la représentante s’est dite préoccupée par l’extension du terrorisme au-delà des frontières du Mali, notamment au Burkina Faso. Afin de contenir ces débordements, elle a exprimé son appui au Plan de soutien des Nations Unies au Sahel et appelé au respect du droit international humanitaire. Seul le renforcement du nexus entre la sécurité et le développement permettra d’assurer la stabilité à long terme de la région du Sahel, a-t-elle conclu.
Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a noté l’environnement sécuritaire complexe dans le Sahel et les menaces asymétriques posées par les groupes armés et terroristes, ainsi que le crime transfrontalier, le trafic de drogues ou d’armes et la traite d’êtres humains qui mettent en danger non seulement la stabilité des pays de la région mais aussi les processus de paix. Dans ce contexte, la représentante a souligné l’impérieuse nécessité que les fonds promis par les bailleurs soient versés afin d’accélérer l’opérationnalisation complète et effective de la Force conjointe. Elle a aussi réitéré qu’il est indispensable d’identifier et d’analyser les causes structurelles des conflits. Pour la Bolivie, l’interventionnisme et les politiques de changement de régime après le conflit de 2011 en Libye ont eu pour effet collatéral de déstabiliser le Sahel.
Outre la situation sécuritaire précaire, le Sahel est face à d’autres défis, a fait valoir la délégation, mentionnant le risque de crise humanitaire à grande échelle, l’insécurité alimentaire affectant près de cinq millions de personnes parmi les réfugiés et les déplacés de force, et les changements climatiques. Pour autant, elle a salué les efforts de l’Union africaine et des pays du G5 Sahel, qu’elle a encouragés à prendre les mesures nécessaires pour la consolidation de nouvelles opérations. À cet égard, elle a jugé essentiel de mettre pleinement en œuvre la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel afin de renforcer la gouvernance, la sécurité et le développement dans la région.
M. ZHAOXU MA (Chine) a déclaré que nous devons continuer à appuyer la Force conjointe du G5 Sahel afin de lui permettre de faire face aux problèmes de capacités opérationnels et de financement. Cette Force représente une contribution importante à la paix et la sécurité internationales. Il faut trouver une solution politique aux questions « brûlantes » qui affectent les pays de la région, a fait valoir le représentant, tout en en prenant des mesures à même de favoriser la mise en œuvre du processus de paix et des accords pertinents. La communauté internationale devrait également appuyer la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et le Plan de soutien afin de s’attaquer aux causes profondes des conflits qui affectent la région. Enfin, M. Ma a plaidé en faveur d’un appui accru aux mécanismes régionaux afin de « permettre aux pays africains de régler les problèmes africains », en coopération avec les organisations régionales.