En cours au Siège de l'ONU

Soixante-treizième session,
12e séance – matin
AG/J/3572

La Sixième Commission salue l’idée d’un projet pilote offrant aux non-fonctionnaires accès aux services de règlement amiable des différends

Examinant aujourd’hui la question de l’administration de la justice à l’ONU, les membres de la Sixième Commission, chargée des questions juridiques, ont accueilli favorablement la proposition du Secrétaire général de lancer un projet pilote qui offrirait expressément aux non-fonctionnaires accès aux services de règlement amiable des différends survenus sur le lieu de travail. 

Créé en 2009, le système d’administration de la justice de l’ONU s’intéresse aux litiges d’ordre professionnel au sein de l’Organisation, ainsi qu’à leur règlement.  La Commission était saisie de deux rapports* du Secrétaire général sur ces questions, dont celui consacré aux activités du Bureau des services d’ombudsman et de médiation.  

Les délégations avaient également sous les yeux le rapport** du Conseil de justice interne, qui recommande, entre autres, la mise en place de mesures de protection des justiciables et témoins contre les représailles, élément « indissociable » d’un système de justice interne équitable et efficace, selon la Suisse.

Reconnaissant que les non-fonctionnaires constituent une part importante des effectifs de l’Organisation, en particulier sur le terrain, plusieurs délégations ont donc relevé la proposition du Secrétaire général, qui s’inscrirait dans le cadre du mandat du Bureau des services d’ombudsman et de médiation.  Pour l’Union européenne et l’Australie, au nom du Canada et de la Nouvelle-Zélande, cette initiative permettra de mieux connaître les griefs des consultants et autres employés non titulaires des Nations Unies. 

Voyant dans ce projet une « première mesure » destinée à améliorer la situation des non-fonctionnaires en cas de conflits d’ordre professionnel, la Suisse a toutefois jugé cette initiative insuffisante, la majorité des catégories de non-fonctionnaires n’ayant toujours pas accès à un mécanisme judiciaire de règlement de différends.  Toutefois, pour le Mexique, ce sont les disparités d’accès aux mécanismes de défense entre fonctionnaires et non-fonctionnaires qui posent problème.

« Nous savons que notre Organisation n’est pas parfaite et nous ne nous attendons pas à ce qu’elle le soit », a diagnostiqué, au nom du Groupe africain, la Gambie, tout en reconnaissant que le règlement à l’amiable des différends constitue un élément essentiel de l’administration de la justice au sein des Nations Unies.

Se tournant vers une autre source de préoccupation des délégations, les États-Unis ont encouragé le Secrétaire général à améliorer la réponse de l’Organisation aux allégations de harcèlement sexuel.  Notant la politique de tolérance zéro prônée par le Secrétaire général, les délégations de l’Australie, du Canada et de la Nouvelle-Zélande, appuyées par les Pays-Bas, ont aussi souhaité que les procédures en place permettent de démontrer dans la pratique la détermination de l’ONU à éradiquer ce type de comportement. 

Devant ces critiques, plusieurs délégations ont estimé que les réformes mises en avant par le Secrétaire général constituent l’occasion de prendre des mesures concrètes pour renforcer l’administration de la justice à l’ONU.

En début de séance, la Commission a conclu ses travaux sur la portée et l’application du principe de compétence universelle, marqués par des fractures régionales prononcées.  Une majorité de délégations africaines a vu dans la multiplication des affaires de la Cour pénale internationale (CPI) impliquant des dirigeants de ce continent le symptôme d’une application « sélective » de la compétence universelle.

Illustrant l’ambivalence de certains pays sur cette question, le Mali a salué l’arrêt « historique » rendu en mars dernier par la CPI contre un terroriste malien pour la destruction de mausolées à Tombouctou, tout en demandant, comme la Gambie et l’Algérie, le respect de la souveraineté des États et de l’immunité accordée aux chefs d’État et de gouvernement.

Si la question de la compétence universelle montre combien les crimes choquent la conscience du monde, le Lesotho a jugé utile de rappeler que la Commission n’est pas saisie de la définition de ce principe, mais bien de sa portée et de son application.  Pourtant, seule la réalisation d’un consensus sur une définition « précise » de la compétence universelle permettra de parvenir à une compréhension et une mise en application commune de la part des États Membres, a fait valoir le Panama.

Face aux malentendus qui caractérisent les débats sur le principe de compétence universelle, plusieurs délégations, dont l’Autriche, le Brésil et le Viet Nam, ont salué l’inscription de cette question au programme de la Commission du droit international (CDI), tandis que d’autres, telles l’Indonésie, Israël ou l’Algérie, ont trouvé cette décision « prématurée » et considéré que le sujet devrait continuer d’être traité au sein de la Sixième Commission.  

Demain, vendredi 12 octobre, à partir 10 heures, la Sixième Commission se penchera sur le rapport du Comité spécial de la Charte.

*A/73/217, A/73/167

**A/73/218

PORTÉE ET APPLICATION DU PRINCIPE DE COMPÉTENCE UNIVERSELLE

Suite des déclarations

M. GERARDO IRIMIA AROSEMENA (Panama) a jugé important de parvenir à un consensus sur une définition « précise » de la compétence universelle, à même de faciliter une compréhension et une mise en application commune de la part des États Membres.  Il s’est dit intéressé par les rapports sur l’existence de normes coutumières relatives à l’exercice de la compétence universelle pour les crimes les plus graves.  Ainsi, une interprétation précise de la portée et des limites de la compétence universelle permettrait son application adéquate sans porter atteinte aux droits des États ou des accusés.  Estimant que les discussions sur la compétence universelle doivent être « libres de toute ingérence politique », il a appuyé l’examen de cette question par la Commission du droit international (CDI). 

Mme SARAH WEISS MA’UDI (Israël) a jugé « contreproductive » et « prématurée » la récente décision de la Commission du droit international (CDI) d’inclure le sujet à l’étude dans son programme de travail à long terme.  Ce sujet devrait continuer d’être traité au sein de cette Commission, a-t-elle dit. 

La déléguée a déploré que bien trop souvent le principe de compétence universelle soit utilisé au service d’objectifs politiques, plutôt que pour promouvoir l’état de droit.  Elle a ensuite insisté sur la complexité de cette notion et la difficulté d’identifier la pratique des États dans ce domaine.  « Il est important pour nous que le principe de subsidiarité soit honoré et que les mécanismes de la juridiction universelle ne soient utilisés qu’en dernier recours », a conclu Mme Weiss Ma’udi. 

Selon M. NGUYEN NAM DUONG (Viet Nam), la compétence universelle doit être définie et appliquée conformément aux principes du droit international et de la Charte des Nations Unies, sans violer les principes de souveraineté des États et de non-ingérence.  Elle ne doit être exercée qu’en dernier recours, pour les crimes les plus graves au regard du droit international, en consultation avec l’État de la personne concernée.  Reconnaissant les divergences existantes entre les États, il a considéré que cette question bénéficierait de l’apport de la Cour internationale de Justice (CIJ) et de la Commission du droit international (CDI).  Le représentant a souhaité, en terminant, que la compétence universelle soit appliquée « de bonne foi » par les États. 

M. MUKI MUKAFYA BENAS PHIRI (Zambie) a égrené les efforts de son gouvernement pour ratifier, adopter et nationaliser les traités internationaux sur l’application du principe de compétence universelle, notamment la loi sur la lutte contre le terrorisme de 2018 qui confère au procureur général un pouvoir discrétionnaire en matière de droit international, même s’il n’y a pas d’accord d’extradition en vigueur entre le gouvernement et un autre État concerné.  Puis il a dit que sa délégation était préoccupée par la manière « souvent imprévisible et incohérente » d’appliquer la compétence universelle, provoquant des frictions entre les États Membres, en particulier lorsqu’elle est politiquement motivée ou qu’il y a une interprétation subjective du droit international coutumier. 

Les poursuites sélectives continues contre des personnes pour des infractions présumées, relevant de la compétence universelle, peuvent s'avérer contre-productives et risquent de saper la lutte contre l'impunité, a poursuivi M. Phiri.  La question de savoir si les chefs d'État ou de gouvernement en place ou de hauts fonctionnaires peuvent faire l’objet de poursuites devant la Cour pénale internationale (CPI), devant des tribunaux spéciaux ou devant les tribunaux d’autres pays ou territoires reste non résolue, surtout dans les pays qui ne sont pas partie au Statut de Rome.  Ainsi le représentant a-t-il jugé « très opportune » la décision de l’Union africaine de demander, en janvier dernier, un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur la relation entre les articles 27 et 98 du Statut de Rome.

Mme COUMBA GAYE (Sénégal) a indiqué que son pays a intégré le principe de compétence universelle dans son dispositif juridique interne.  Elle a pris note des inquiétudes s’agissant de la portée incertaine de ce principe et de son utilisation abusive.  À cette aune, elle a plaidé pour une utilisation « de bonne foi » et « non-sélective » de ce principe.  Son application doit toujours reposer sur des principes du droit international, dont la non-ingérence dans les affaires intérieures et l’égalité souveraine des États. 

La représentante a noté que la légitimité et la crédibilité de ce principe dépendra de son application conforme aux principes fondamentaux de la complémentarité.  Il ne doit être invoqué que lorsque les États qui devraient assurer leur juridiction ne sont pas en mesure de le faire ou ne veulent pas enquêter sur les auteurs présumés des crimes.  Enfin, elle a espéré que la Commission poursuivra ses discussions sur cette question.  « Nous devons rester encore plus déterminés à agir pour que l’exigence de justice pour tous, raison d’être de la juridiction universelle, soit respectée partout dans le monde », a conclu Mme Gaye. 

Mme NADIA KALB (Autriche) a reconnu qu’il existe beaucoup de confusion et de malentendus sur le principe de compétence universelle.  Une analyse académique profonde pourrait aider à éviter ces incompréhensions qui continuent de surgir sur la question et éclairer ainsi les débats de la Sixième Commission.  L’Autriche, a ajouté la représentante, salue la décision de la Commission du droit international (CDI) d’inclure un thème sur la compétence universelle dans son programme de travail à long terme.  L’Autriche partage aussi l’avis de la Commission qui estime qu’il est nécessaire d’élaborer une définition du principe de compétence universelle. 

Mme Kalb a soutenu l’idée que la Commission examine toutes les formes de compétence y compris la compétence de légiférer, de juger et de faire respecter. Dans ce contexte, les limites à ces formes de compétences devraient être étudiées.  L'Autriche croit comprendre que la compétence universelle des États peut être fondée sur un traité ou sur le droit international coutumier.  Le principe de la compétence universelle devrait être clairement séparé de la compétence des cours et tribunaux internationaux.  Les poursuites contre des individus particuliers devant un organe judiciaire international ne sont pas liées à l'exercice de la compétence universelle par les États.  La compétence universelle doit également être différenciée de la question de l’immunité, laquelle doit être examinée séparément, a conclu la représentante. 

M. NASSIR AL-SUGAIR (Arabie saoudite) a réaffirmé que la question de la compétence universelle mérite l’attention de tous les experts.  Après avoir souligné l’objectif « noble » de ce principe, il a jugé prématuré son adoption devant l’insuffisance des bases juridiques dans les mécanismes existants, ainsi que les obstacles de forme.  Il faut éviter tout empiètement sur la Charte des Nations Unies et la souveraineté des États, a expliqué le représentant, en appelant au respect de ces principes dans les discussions sur cette question. 

Le représentant a pris note de l’introduction du principe de compétence universelle à l’ordre du jour de la Commission du droit international (CDI), en invitant les États Membres à en poursuivre l’examen à la Sixième Commission. 

M. AMADOU JAITEH (Gambie) s’est dit préoccupé par la référence à ce principe de compétence universelle dans des cas qui ne sont pas nécessaires.  Il a mis en garde contre un emploi détourné de ce principe, de nature à saper la souveraineté des États et, ce faisant, la paix internationale.  Il a rappelé l’importance de respecter d’autres normes relatives au droit international dans l’application du principe de compétence universelle, dont la souveraineté égale des États, la juridiction territoriale et l’immunité des dignitaires en vertu du droit international coutumier.

Enfin, M. Jaiteh a souhaité que la Commission continue de traiter de ce sujet, eu égard à son importance pour les États africains depuis de longues années.

M. KANISSON COULIBALY (Mali) a déclaré que la question de la compétence universelle revêt une importance particulière pour son pays qui se remet « doucement mais sûrement » d’une crise multidimensionnelle.  Il a estimé que ce principe constitue un outil fondamental pour combattre l’impunité et réprimer les violations graves du droit international par les groupes terroristes et criminels. 

Le Mali a mis en place un cadre juridique national lui permettant de remplir ses obligations internationales, notamment la lutte contre le terrorisme et la protection des victimes.  Il a salué l’arrêt « historique » rendu en mars dernier par la Cour pénale internationale (CPI) contre un terroriste malien pour la destruction de mausolées à Tombouctou lors de l’occupation de la ville par des terroristes, en 2012.  Enfin, il a souhaité que l’application de la compétence universelle respecte la souveraineté des États et l’immunité accordée aux chefs d’État et de gouvernement.

M. ANTÓNIO GUMENDE (Mozambique) a dit que sa délégation ne soutiendra aucune tentative visant à l’application par certains États du principe de compétence universelle alors qu’il n’y a pas de consensus sur la question.  Toute tentative d’application unilatérale de ce principe ne peut pas être encouragée parce qu’elle peut mettre en danger et perturber tout le système juridique reconnu et accepté par le monde entier, a-t-il insisté. 

L’application du principe de compétence universelle devrait se faire avec précaution et être règlementée, a poursuivi le représentant.  Il s’agit en premier lieu d’établir les critères d’application et la compatibilité du principe avec les instruments du droit international pertinents, ainsi qu’avec la Charte des Nations Unies.  Il faut également que la communauté internationale identifie les crimes qui seraient soumis à la compétence universelle et dans quelles circonstances ils pourraient être invoqués par les États ou ses tribunaux.  Le représentant a condamné l’application « politiquement motivée » de la compétence universelle ou du droit international.

M. ALI NASIMFAR (Iran) a indiqué que les États n’ont pas une acception commune du principe de juridiction universelle et de son application, en particulier lorsque l’immunité de certains dignitaires est en cause.  Il a rappelé que si la Cour internationale de justice (CIJ), dans l’affaire du 11 avril 2000 « République démocratique du Congo contre Belgique », n’a pas statué sur cette question, certains juges dans des opinions séparées ont fait part de leurs préoccupations devant le « chaos judiciaire » qu’entraînerait l’application de ce principe par les tribunaux de tous les pays.

Le représentant a mis en garde contre une application sélective de ce principe, avant d’indiquer que l’implication de la Commission du droit international (CDI) n’est pas souhaitable à ce stade.  Il a considéré que l’application de la compétence universelle doit être complémentaire de l’action et de la compétence nationale de chaque État, celle-ci devant, en tout état de cause, primer.  L’application de la compétence universelle doit être limitée aux violations les plus graves, a-t-il conclu.

Face aux crises humanitaires actuelles, M. AHMAD SHALEH BAWAZIR (Indonésie) a jugé fondamental de combler les lacunes juridiques existantes sur la portée de la compétence universelle.  L’absence de clarté quant à la portée de ce principe pourrait entrainer une application abusive de ce principe et mener à des conséquences négatives telles que des conflits entre les États de territorialité et les États qui appliquent la compétence universelle, a-t-il prévenu.  Il est donc fondamental de pouvoir compter sur une orientation solide de ce principe. 

La compétence universelle n’est pas la compétence première pour traiter des crimes les plus graves et doit être complémentaire des juridictions nationales, a poursuivi le représentant, dans le respect du principe d’égalité souveraine des États et de la Charte des Nations Unies.  À cet égard, il est tout aussi important d’améliorer les capacités des États Membres, d’assurer la coopération, a-t-il ajouté.  Afin de prévenir l’application abusive de ce principe et d’en conserver la légitimité, la compétence universelle ne doit porter que sur les crimes les plus atroces.  Toutefois, les divergences dans les législations nationales sur cette question montrent que le chemin est encore long, a-t-il relevé.  En conséquence, M. Bawazir a jugé « prématuré » de saisir la Commission du droit international (CDI) de cette question. 

M. NYAN LIN AUNG (Myanmar) a souligné la nécessité d’un consensus international sur la portée et l’application du principe de juridiction universelle, sous peine d’ouvrir la voie à un emploi abusif dudit principe.  Il a tenu à rappeler que l’application de la compétence universelle doit être complémentaire de l’action et de la compétence nationale de chaque État, celle-ci étant prééminente.  Enfin, le délégué du Myanmar a mis en garde contre les risques de sélectivité et de manipulation dans l’application de ce principe.

Selon Mme NTHABISENG MŌNŌKO (Lesotho), la question de la compétence universelle montre que les crimes choquent la conscience du monde et préoccupent l’humanité entière.  Toutefois, la Sixième Commission n’est pas saisie de la définition de ce principe, mais bien sa portée et son application, a-t-elle relevé.  Elle a rejeté les abus découlant de l’application du principe de compétence universelle, qui contreviennent aux principes d’égalité et d’indépendance des États et à l’immunité accordée aux chefs d’État et de gouvernement.  Elle a mis en garde contre son application sélective, notamment en Afrique.

« Le jour où le Statut de Rome sera universel, les discussions sur le principe de compétence universelle perdront probablement de leur intérêt », a déclaré M. PATRICK LUNA (Brésil).  Selon lui, l’application de ce principe constitue une façon de lutter contre l’impunité et de traduire en justice les auteurs de crimes graves.  Le délégué a plaidé pour une application de ce principe dans le respect des principes du droit international et pour une liste limitée de crimes. 

Jugeant fondamental de parvenir à un consensus sur la portée et l’application de ce principe en vue de trouver une définition acceptable, le délégué brésilien a salué l’inscription de ce point dans le programme de travail à long terme de la Commission du droit international (CDI), qui donne une « occasion à saisir » pour donner un nouveau souffle aux relations entre cet organe et la Commission.  L’Assemblée pourra aussi demander à la Commission son avis sur certaines questions, comme par exemple la nécessité ou non que l’État sur le territoire duquel le crime a été commis donne son accord à l’application du principe de compétence universelle.  Le Brésil applique ce principe pour les crimes de génocide et de torture, a-t-il précisé.

Mme ZAKIA IGHIL (Algérie) a déclaré que la communauté internationale a la responsabilité commune de parvenir à la justice et de lutter contre les crimes les plus atroces.  Toutefois, l’application sélective ou arbitraire du principe de compétence universelle sape ces efforts, une source de vive préoccupation.  Elle a rappelé en particulier que les chefs d’État et de gouvernement africains ont condamné les abus découlant de son application par la Cour pénale internationale (CPI), « qui s’intéresse quasi exclusivement aux affaires africaines ». 

Pour la représentante, la compétence universelle ne peut s’appliquer que dans le respect des principes du droit international, y compris l’égalité souveraine des États, la non-ingérence et l’immunité des chefs d’État et de gouvernement, en complément des législations nationales, comme le stipule la Cour internationale de justice (CIJ).  Notant la décision de la Commission du droit international (CDI) d’inscrire cette question à son ordre du jour, elle a affirmé que la Sixième Commission devrait continuer à se pencher sur cette question.

M. TAREQ MD ARIFUL ISLAM (Bangladesh) a rappelé que le principe de compétence universelle ne doit pas se substituer à la compétence sur la base de la nationalité ou du territoire afin d’éviter les abus, ces derniers étant bien réels.  Le délégué a également demandé la création d’un mécanisme de suivi de l’application de ce principe.

M. ABDULLAHI TUKUR ABDULLAHI (Nigéria) a reconnu la compétence universelle en tant que principe cardinal du droit international afin de combattre les violations du droit international humanitaire et l’impunité.  Cependant, ce principe continue de déchirer les États Membres alors que tout État est libre d’invoquer de façon unilatérale le principe de compétence universelle, a noté le représentant, pour qui son application doit se faire « de bonne foi ». 

Pour le représentant, la responsabilité première d’intenter des poursuites revient à l’État territorial, et la compétence universelle ne devrait être employée qu’en dernier recours.  Il a appelé la Commission du droit international (CDI) à contribuer à clarifier la définition, la portée et l’application du principe afin d’en renforcer la légitimité et la crédibilité.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a reconnu la tension entre l’égalité souveraine des États et le devoir de demander des comptes à ceux qui sont responsables de crimes graves.  L’ensemble de normes que cet organe peut élaborer sur la compétence universelle doit non seulement être conforme aux principes fondamentaux de la justice pénale mais il doit aussi être enraciné dans le principe de subsidiarité.  La compétence universelle devrait en effet être subsidiaire de la compétence de l’État dans lequel le crime a été commis et de l’État de nationalité de l’auteur présumé. 

La compétence universelle ne devrait pas justifier les poursuites par contumace, la recherche du tribunal le plus favorable ou l’ingérence injustifiée dans les affaires internes d’autres États, a averti l’Observateur.  À la lumière du principe de l’égalité souveraine des États, une attention particulière doit être accordée aux conditions de procédure à respecter pour lever les immunités juridictionnelles des autorités publiques.  Il est indispensable d’élaborer des mécanismes pour faire en sorte que l’exercice de la compétence ne dégénère pas en conflit entre les États. 

M. CHRISTOPHER B. HARLAND, délégué du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a estimé que la compétence universelle constitue un outil clef pour assurer la prévention et la répression des violations graves du droit international humanitaire.  Les Conventions de Genève et les protocoles s’y rapportant, de même que de nombreux autres traités internationaux dont le Statut de Rome établissant la Cour pénale internationale (CPI), prévoient l’obligation pour les États parties de participer aux recherches des responsables de telles violations, sans égard à leur nationalité, a-t-il rappelé. 

Il incombe donc aux États de mener des enquêtes et d’intenter des poursuites ou d’appliquer le principe de compétence universelle s’ils ne sont pas en mesure de le faire, a expliqué le délégué du CICR.  Alors que 117 États ont adopté des législations relatives à la compétence universelle, le représentant a noté que « les pays ont recours à ce principe afin de combler les lacunes juridiques existantes qui permettent l’impunité ».  Le CICR continue pour sa part de fournir un appui aux États qui le souhaitent afin de renforcer leur cadre juridique et de prévenir les violations du droit international humanitaire.

ADMINISTRATION DE LA JUSTICE À L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES

Déclarations

M. HÉCTOR ENRIQUE JAIME CALDERÓN (El Salvador), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine (CELAC), s’est félicité des progrès réalisés par le système d’administration de la justice à l’ONU afin d’améliorer la transparence et l’indépendance, conformément aux dispositions du droit international et de l’état de droit, tout en assurant la redevabilité des fonctionnaires et administrateurs des Nations Unies.  La CELAC reconnaît que la Commission a beaucoup fait pour assurer l’opérativité du système par les amendements apportés à ses tribunaux et mécanismes.  Il s’est félicité des recommandations contenues dans le rapport du Secrétaire général sur l’administration de la justice.  Le représentant a réaffirmé son appui au Bureau de l’aide juridique au personnel, et noté avec satisfaction les visites réalisées dans les cinq bureaux sous-régionaux de l’ONU. 

M. JAIME CALDERÓN a exhorté le Conseil de justice interne à continuer de contribuer à la bonne application du système de justice de l’ONU.  Il a appelé à mettre en œuvre dans les plus brefs délais les recommandations du Conseil de justice, et souligné à cet effet l’importance d’améliorer la distribution géographique et la répartition hommes-femmes dans l’administration onusienne. 

Se tournant vers les activités du Bureau des services d’ombudsman et de médiation des Nations Unies, le représentant a insisté sur l’importance de résoudre les litiges à l’amiable et estimé qu’il faut promouvoir une culture de confiance et de prévention des conflits.  Ce bureau devrait selon lui disposer des moyens nécessaires pour renforcer l’application du principe de responsabilité.  Enfin il a souhaité que la Sixième Commission et la Cinquième Commission continuent d’œuvrer ensemble pour éviter les chevauchements entre les mandats.

« Nous savons que notre Organisation n’est pas parfaite et nous ne nous attendons pas à ce qu’elle le soit », a déclaré M. AMADOU JAITEH (Gambie), au nom du Groupe africain.  Il a plaidé pour l’indépendance et la transparence de l’administration de la justice au sein de l’ONU et l’apport de ressources financières suffisantes.  Il a apporté son soutien au Bureau de l’aide juridique au personnel et noté le travail accompli par le Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies et par le Tribunal d’appel des Nations Unies.  S’agissant du travail abattu par le Bureau des services d’ombudsman et de médiation des Nations Unies, le délégué a indiqué, en conclusion, que le règlement à l’amiable des différends est un élément essentiel de l’administration de la justice.

M. ERIC CHABOUREAU, délégué de l’Union européenne, a estimé que le règlement à l’amiable des différends est un élément crucial du système d’administration de la justice à l’ONU afin d’éviter des procédures inutiles et coûteuses.  Le délégué, après avoir salué le Bureau des services d’ombudsman et de médiation des Nations Unies, a pris note des préoccupations de l’Ombudsman à la suite de la première enquête sur la satisfaction des clients en 2017. 

M. Chaboureau a par la suite demandé, concernant la création de trois nouveaux postes judiciaires au Tribunal du contentieux administratif, si la transformation de postes temporaires en postes permanents serait nécessaire dans l’hypothèse où le nombre de doléances reçues continuerait de diminuer dans les années à venir.  Sur la question de la protection juridique des non-fonctionnaires, le délégué a pris note de l’initiative du Secrétaire général de créer un projet pilote qui leur offrirait explicitement un accès aux services de règlement à l’amiable des litiges.  

S’exprimant également au nom des délégations du Canada et de la Nouvelle-Zélande, M. CARY SCOTT-KEMMIS (Australie) a estimé qu’une administration de la justice impartiale et efficace est essentielle au bon fonctionnement de l’Organisation.  Alors que la justice et l’état de droit sont au cœur de l’action de l’ONU, il est essentiel que ces principes soient reflétés dans son système d’administration de la justice, a relevé le représentant. 

M. Scott-Kemmis a appuyé les recommandations du Conseil de justice interne portant sur le renforcement des capacités de l’ONU en matière d’enquête sur les allégations de harcèlement sexuel et de traitement des plaintes.  Notant la politique de tolérance zéro du Secrétaire général, il a souhaité que les procédures permettent de démontrer dans la pratique la détermination de l’ONU à éradiquer ce type de comportement. 

Le représentant a salué ensuite la recommandation du Conseil de justice interne sur l’adoption d’une approche plus active de gestion des cas, ainsi que le projet pilote permettant aux membres du personnel n’ayant pas la qualité de fonctionnaire de recourir aux mécanismes de résolution informels des différends du Bureau des services d’ombudsman et de médiation des Nations Unies.  En outre, il a considéré important que les réformes mises en avant par le Secrétaire général tiennent compte des efforts visant à renforcer le système d’administration de la justice, notamment pour les cas de corruption et de protection des requérants contre les mesures de représailles.  

M. SIDNEY GREGORY KEMBLE (Pays-Bas) s’est dit satisfait par la manière dont fonctionne l’administration de la justice à l’ONU.  Il a salué le travail accompli par le Bureau des services d’ombudsman et de médiation des Nations Unies, avant de se dire préoccupé par le fait que le fonctionnaire portant plainte pour harcèlement sexuel soit celui ou celle qui puisse être placé/e sur un autre poste ou placé/e en congés rémunérés.  « Cette logique nous échappe, dans la mesure où c’est le fonctionnaire qui fait l’objet d’une plainte qui devrait être ainsi reclassé. »  Enfin, s’étonnant que le Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies n’ait été capable de rendre qu’un seul verdict pour cent affaires, le délégué a souhaité des explications. 

M. VINCENT OLIVIER RITTENER (Suisse) a salué les efforts du Secrétaire général visant à rationnaliser et simplifier le cadre réglementaire de l’ONU en matière de ressources humaines afin d’assurer le déploiement du personnel en temps voulu.  Estimant qu’« un système de protection efficace contre les représailles est indissociable d’un système de justice interne équitable et efficace », il a souligné la mise à disposition de recours appropriés pour les non-fonctionnaires dans les différends d’ordre professionnel. 

Le représentant a salué en particulier la proposition du Secrétaire général de mettre en place un projet-pilote offrant aux non-fonctionnaires un accès à des services de règlement à l’amiable des différends par le Bureau des services d’ombudsman et de médiation, déplorant toutefois que « le système de règlement à l’amiable ne suffit pas à assurer à toutes les catégories de personnel un système de justice interne équitable et efficace ».  Ces questions demeurent prioritaires pour la Suisse, a continué M. Rittener, voyant dans les réformes en cours dans l’Organisation « une occasion unique de résoudre ces problèmes ».

Mme SITI NUR BAYA JABAR (Malaisie) a appuyé les mesures que le Secrétaire général invite l’Assemblée générale à prendre pour renforcer l’efficacité de l’administration de la justice à l’ONU.  D’après elle, toutes les recommandations ayant des implications financières sur les États Membres doivent impérativement respecter les procédures applicables afin d’assurer l’utilisation optimale des ressources et d’éviter des contributions inutiles. 

Mme EMILY PIERCE (États-Unis) a encouragé le Secrétaire général à améliorer la réponse de l’ONU aux allégations de harcèlement sexuel sur le lieu de travail et plaidé pour la promotion d’une culture au sein de laquelle le personnel est traité avec dignité.  Elle a souligné « la faible productivité » du Tribunal du contentieux des Nations Unies, avant, s’agissant de son indépendance, de se dire peu convaincue par la recommandation du Secrétariat sur son emplacement.  Enfin, la déléguée a déclaré ne pas avoir d’objections sur les deux propositions d’amendements au Statut du Tribunal d’appel des Nations Unies.

Mme ANA FIERRO (Mexique) a décrit les progrès réalisés par son pays afin de moderniser ses pratiques de justice dans le domaine des relations de travail.  L’administration de la justice à l’ONU doit se faire dans le respect des principes de transparence, d’indépendance et professionnalisme, a-t-elle déclaré.  Elle a déploré les différences existant entre fonctionnaires et non-fonctionnaires dans l’accès aux mécanismes de défense, qui sont mis en lumière dans le rapport du Bureau des services d’ombudsman et de médiation, et plaidé pour « un accès à toutes les catégories de personnel ». 

La représentant a appelé à améliorer les connaissances des employés de l’ONU en matière de justice interne et à redoubler d’efforts afin de diffuser les mécanismes existants.  Elle a également fait état des obstacles rencontrés par les juridictions nationales devant l’immunité accordée aux bureaux des Nations Unies. 

 

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