Cinquième Commission: passes d’armes entre le G77, Cuba et les États-Unis sur les raisons de la précarité financière de l’ONU
La « précarité » de la situation financière de l’ONU, marquée par le creusement du déficit budgétaire, l’assèchement des liquidités disponibles et la flambée des contributions non acquittées, est principalement imputable au « refus volontaire et unilatéral » d’un seul État de verser à temps ses contributions, ont affirmé le Groupe des 77 et la Chine devant la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires qui examinait les moyens dont dispose l’ONU pour s’acquitter de ses mandats. Accusés, les États-Unis ont rejeté une lecture « déformée » de la situation.
Au 30 septembre 2018, il manquait au budget ordinaire et à celui des opérations de maintien de la paix la somme totale de 3,6 milliards de dollars. Pour ne prendre que l’exemple du budget ordinaire, le déficit de 365 millions de dollars a été résorbé par une ponction de 353 millions dans les fonds de réserves et pour les 12 millions restants, par des emprunts aux comptes des opérations de maintien de la paix achevées. La Chine a souligné le caractère rarissime de cette situation. « Cela n’est ni une bonne pratique budgétaire, ni une pratique viable », a renchéri le Groupe des 77, pour qui cette « instabilité » financière grandissante est avant tout imputable au non-paiement par les États Membres de leurs contributions, et notamment au « refus volontaire et unilatéral » d’un seul État de payer près de la moitié du total des arriérés. Il est « inacceptable » qu’année après année cet État s’accroche à ses privilèges et réclame des plafonds maximums de contribution, sans pour autant s’acquitter de ses obligations financières, s’est indigné le Groupe des 77.
Les États-Unis s’enorgueillissent sans cesse d’être le « principal contributeur » de l’Organisation, alors qu’ils lui doivent plus de 1,6 milliard de dollars, soit 58% du total des contributions, a ajouté Cuba. Les 800 millions dus aux opérations de maintien de la paix entravent l’exécution des mandats du Conseil de sécurité, dont les États-Unis sont pourtant un membre permanent. Cuba a vu dans la propension américaine à retenir les contributions jusqu’à la fin de l’année, un moyen de « faire chanter » l’ONU, alors même qu’ils profitent de la principale distorsion du barème des quotes-parts, après avoir imposé au fil des ans une baisse du plafond de 39,89% en 1946 à 22% actuellement. À l’inverse, Cuba a affirmé que sa volonté de s’acquitter en temps voulu de ses contributions auprès de l’Organisation se heurtait à la réalité du blocus américain qui dure depuis 1956. Ce qui entrave la capacité de Cuba de s’acquitter de ses obligations financières, ont rétorqué les États-Unis, se sont surtout les agissements de son régime. La répression exercée contre le peuple cubain est la raison même de l’embargo.
Suggérer que nous ne nous acquittons pas de nos obligations est « complètement faux », ont poursuivi les États-Unis, affirmant que les sommes prétendument dues à l’Organisation étaient « déformées », compte tenu des écarts entre l’année fiscale onusienne et américaine. Nous avons déjà versé en 2018, 1,4 milliard de dollars au titre des opérations de maintien de la paix et 151 millions au titre du budget ordinaire, auxquels s’ajouteront 250 millions supplémentaires pour le budget ordinaire à la fin du mois, ont affirmé les États-Unis.
Nous comprenons que pour certains États Membres, les calendriers budgétaires compliquent la situation, a reconnu la Nouvelle-Zélande qui a conseillé à ces pays de recourir aux mécanismes mis en place par les Nations Unies pour faciliter les paiements. L’Organisation ne peut fonctionner correctement avec de tels problèmes de trésorerie, a-t-elle prévenu. La Zambie, un des pays les moins avancés (PMA) qui ne peut honorer à temps et en totalité ses obligations financières à cause des faibles perspectives de la croissance mondiale, a rejeté toute idée d’augmenter les quotes-parts.
La santé financière de l’ONU ne dépend pas seulement de la fiabilité des fonds versés, mais également des normes appliquées dans la façon dont ces fonds sont utilisés, a tout de même rappelé l’Union européenne. Le Secrétariat, a embrayé le Japon, doit rechercher « davantage de gains d’efficacité » et prendre des mesures pour réaliser plus d’économies, y compris via une utilisation « parcimonieuse » des dépenses liées aux voyages. Des approches novatrices dans la gestion budgétaire, une concentration plus nette sur la budgétisation axée sur les résultats, une plus grande insistance sur le rapport coût-efficacité, le renforcement de la discipline budgétaire et l’intégration de la gestion budgétaire et de celle des performances sont des exigences « inévitables », a martelé la Chine, soucieuse que « chaque centime de nos contribuables » soit bien dépensé et bien justifié.
L’Inde a tenu à soulever la question « récurrente » des retards dans le remboursement des pays contributeurs de contingents, de personnel de police et d’équipements. Le Pakistan a précisé que l’ONU leur devait encore 221 millions de dollars, au 30 septembre 2018. La Fédération de Russie a demandé au Secrétariat de présenter, dans ses prochains rapports, des informations sur l’évolution des sommes dues par l’ONU à ses prestataires de services.
La Cinquième Commission tiendra sa prochaine séance publique vendredi 26 octobre, à partir de 10 heures, sur les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens.
AMÉLIORATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE L’ONU
Rapport du Secrétaire général sur la situation financière de l’Organisation des Nations Unies (A/73/443)
Dans ce rapport, le Secrétaire général examine la situation financière à l’aune des quatre grands indicateurs habituellement utilisés, à savoir le montant des contributions mises en recouvrement, le montant des contributions non acquittées, la situation de trésorerie et le total des montants dus aux États Membres.
S’agissant du budget ordinaire, le Secrétaire général parle d’une situation précaire, avec un déficit de 365 millions de dollars au 30 septembre 2018, après épuisement des réserves de 353 millions de dollars. Le déficit final est donc de 12 millions de dollars, couvert par des emprunts sur les comptes d’opérations de maintien de la paix achevées. Sur les 2,5 milliards mis en recouvrement en 2018, 1,1 milliard restaient impayés au 30 septembre 2018.
Pour ce qui est des opérations de maintien de la paix dont l’exercice budgétaire court du 1er juillet au 30 juin, au 30 septembre 2018, le montant total mis en recouvrement était de 4,9 milliards de dollars, celui des contributions reçues, de 4,3 milliards et celui des arriérés, d’un peu plus de 2,5 milliards. Les sommes à rembourser aux États Membres s’élevaient au total à 221 millions de dollars, dont 92 millions au titre des contingents et des unités de police constituées, 43 millions au titre du matériel appartenant aux contingents pour les missions en cours et 86 millions au titre du matériel appartenant aux contingents pour les missions terminées.
Concernant les tribunaux pénaux internationaux, au 30 septembre 2018, le montant des contributions non acquittées s’élevait à 68 millions de dollars: 7,7 millions de dollars pour le Tribunal pénal international pour le Rwanda, 30,1 millions de dollars pour le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et 30,4 millions de dollars pour le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux.
Déclarations
Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. MOHAMED FOUAD AHMED (Égypte) s’est dit fortement préoccupé par la « précarité » de la situation de trésorerie de l’Organisation. Il a noté, comme le Secrétaire général, que les déficits sont de plus en plus importants et apparaissent plus tôt dans l’année. Il a également pris note du fait que ces déficits ont été couverts par des emprunts sur les comptes d’opérations de maintien de la paix achevées. « Cela n’est ni une bonne pratique budgétaire, ni une pratique viable », a-t-il prévenu.
Le représentant s’est également dit préoccupé par les montants dus aux pays fournisseurs de contingents ou d’effectifs de police, en dépit des efforts de l’Organisation pour les réduire. Il est « inacceptable », a-t-il estimé, que l’ONU n’ait toujours pas remboursé 76 États Membres, dont la majorité sont des pays en développement. Le représentant a jugé « ironique » que les deux pays auxquels l’Organisation doit la plus grande somme d’argent soient aussi des pays qui se sont acquittés de l’intégralité de leurs contributions.
M. Ahmed s’est dit encouragé par l’augmentation du nombre d’États Membres qui se sont acquittés de l’intégralité de leurs contributions par rapport à l’an dernier à la même période. Malgré cette évolution positive, s’est-il alarmé, l’ONU traverse une instabilité plus importante cette année que les années précédentes. Nous sommes fermement convaincus que le non-paiement des contributions et le « refus volontaire et unilatéral » de les payer sont les premiers facteurs de cette situation, a-t-il affirmé, estimant qu’environ la moitié des montants sont dus par un seul État.
« Il est inacceptable qu’année après année, des États Membres s’accrochent à leurs privilèges et réclament des plafonds sans pour autant s’acquitter de leur contribution financière envers l’Organisation », a dénoncé le représentant. « Ceux qui demandent des responsabilités spéciales doivent se montrer à la hauteur de ces responsabilités, intégralement, en temps voulu et sans conditions », a martelé M. Ahmed.
Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), Mme DIANA MINYI LEE (Singapour) s’est dite ravie que, par rapport à l’année dernière, davantage d’États Membres aient payé toutes leurs contributions au budget ordinaire et au budget du maintien de la paix. Il est essentiel, a-t-elle souligné, que l’ONU reçoive suffisamment de ressources pour s’acquitter des mandats que lui ont confiés les États Membres. L’ASEAN, a prévenu la représentante, est déçue que l’ONU continue à subir une situation financière « précaire » avec des déficits plus importants et apparaissant plus tôt dans l’année. Cette année, a souligné la représentante, nous sommes devant une situation où le Fonds de roulement et le Compte spécial ont été épuisés, obligeant le Secrétariat à emprunter aux opérations de maintien de la paix achevées. Non seulement, ce n’est pas une bonne pratique budgétaire mais elle n’est pas non plus viable, a prévenu la représentante.
L’incertitude financière est le résultat des contributions non payées et, dans certains cas, retenues « volontairement, délibérément et unilatéralement ». Au 30 septembre 2018, trois membres permanents du Conseil de sécurité devaient toujours payer leurs contributions au budget des opérations de maintien de la paix et voire pour des missions dont ils ont élaboré eux-mêmes les mandats. L’ASEAN rappelle que les responsabilités spéciales dans les domaines de la paix et de la sécurité internationales sont assorties de responsabilités financières réelles. Il est de notre responsabilité à tous de respecter nos engagements financiers intégralement, en temps voulu et sans conditions, a martelé, à son tour, la représentante.
M. JAN DE PRETER, délégué de l’Union européenne, a rappelé la responsabilité qui incombe à chaque État Membre de verser sa quote-part à l’ONU dans son intégralité et dans les délais convenus. En dépit du nombre stable des États qui se sont acquittés dans l’intégralité de leur contribution au budget ordinaire, le représentant s’est dit préoccupé par l’augmentation du niveau de contributions non acquittées. La Secrétaire générale adjointe à la gestion a été très claire dans son évaluation de la situation, a-t-il rappelé, citant les « graves problèmes de trésorerie » auxquels fera face l’Organisation durant ces derniers mois de 2018, si des contributions suffisantes ne sont pas versées. Il a ainsi appelé les États Membres qui n’ont pas encore versé l’intégralité de leur contribution en 2018 à régler la question en priorité.
S’agissant des opérations de maintien de la paix, le représentant s’est dit préoccupé par l’augmentation importante des contributions non acquittées et la diminution des liquidités disponibles. Il a exhorté les États Membres à s’acquitter de leurs obligations financières, notamment pour permettre à l’Organisation de verser les sommes dues aux pays fournisseurs de contingents et d’effectifs de police.
Concernant les tribunaux pénaux internationaux, le représentant a indiqué que, si la situation de trésorerie était pour l’instant positive, le résultat final de l’année dépendra en grande partie de la capacité des États Membres à s’acquitter de leurs contributions restantes.
La santé financière ne dépend pas seulement de la fiabilité des fonds versés, a toutefois nuancé le représentant. « Elle dépend aussi des normes appliquées dans la façon dont ces fonds sont utilisés », a-t-il affirmé, appelant l’ONU à utiliser « plus judicieusement et de manière plus responsable » son budget.
Également au nom de l’Australie et du Canada, Mme FINNIAN CHESHIRE (Nouvelle-Zélande) s’est dite préoccupée par les conséquences des impayés d’un milliard au budget ordinaire et de 1,7 milliard à celui des opérations maintien de la paix. Cette situation est une « injustice » pour les États Membres qui se sont acquittés de leurs contributions. Elle oblige en effet les pays contributeurs de contingents, de personnel de police et d’équipements à porter un fardeau financier, en attendant que les contributions soient payées. L’Organisation ne peut fonctionner correctement avec de graves problèmes de trésorerie, s’est impatientée la représentante qui a exhorté les États concernés à payer leur dû le plus tôt possible. Elle a dit comprendre que pour certains d’entre eux, les structures et calendriers budgétaires compliquent la situation mais elle les a encouragés à recourir aux mécanismes mis en place aux Nations Unies pour faciliter les paiements. Un financement fiable, a-t-elle souligné, participe de la vision qu’a le Secrétaire général de la réforme de l’ONU. Si tous les États Membres s’engagent à appuyer en totalité, en temps voulu et sans conditions leurs contributions, alors ils continueront à édifier l’ONU la plus forte possible, a-t-elle conclu
M. WATARU OTSUKA (Japon) a rappelé que tous les États Membres avaient la responsabilité de verser « intégralement et ponctuellement » leurs contributions auprès de l’Organisation, à l’instar du Japon qui, en dépit de ses nombreuses « priorités nationales », s’est acquitté de l’intégralité de ses contributions. Toutefois, aux yeux de M. Otsuka, la situation financière des Nations Unies « peut et doit également » être améliorée par des efforts du Secrétariat. Le représentant a appelé ce dernier à rechercher « davantage de gains d’efficacité » et à prendre les « mesures adéquates pour réaliser plus d’économies », y compris via une utilisation « parcimonieuse » des dépenses liées aux voyages.
Pour toute nouvelle demande de dépenses supplémentaires, M. Otsuka a insisté sur l’importance de déterminer « un niveau réaliste » de ressources « à la fois nécessaires et suffisantes ». C’est selon lui le rôle le plus important de la Cinquième Commission: « passer au peigne fin les éventuels besoins supplémentaires du budget actuel, en respectant scrupuleusement la discipline budgétaire ». Le représentant a également appelé à une utilisation « efficace, efficiente et responsable » du budget approuvé.
Mme ANAYANSI RODRÍGUEZ CAMEJO (Cuba) a déclaré que l’ONU fait face à l’un des moments les plus complexes de ses 73 ans d’existence. Pendant deux années consécutives, la tendance à réduire les budgets s’est renforcée tout comme la norme consistant à « faire plus avec moins ». Chaque année et plus d’une fois, le Secrétaire général doit revenir devant nous pour nous demander de payer nos contributions et chaque année, a fait observer la représentante, nous constatons que la vaste majorité des États font de plus en plus d’efforts pour payer leur dû en totalité, en temps voulu et sans conditions. Dans ce contexte, a estimé la représentante, la situation particulière des pays en développement, qui ont des difficultés à remplir leurs engagements financiers, pour des raisons échappant à leur contrôle, doit être prise en compte.
Nous savons tous qui est responsable de la précarité financière actuelle, a poursuivi la représentante qui a jugé « alarmant » que les sommes attendues par l’ONU soient dues par les États-Unis qui pourtant n’hésitent jamais à mettre en avant leur statut de « principal contributeur », alors qu’ils doivent plus de 1,6 milliard de dollars à l’Organisation soit 58% du total des contributions. Les plus de 800 millions de dollars qu’ils doivent actuellement au budget des opérations de maintien de la paix empêchent l’exécution des mandats que le Conseil de sécurité, dont les États-Unis sont un membre permanent, a approuvés. L’ONU se voit donc condamnée, a fait remarquer la représentante, à accumuler les dettes vis-à-vis des pays fournisseurs de contingents, dont beaucoup sont des pays en développement qui ne peuvent toucher aux soldes excédentaires des opérations achevées.
Ce n’est un secret pour personne que la principale raison pour laquelle les États-Unis retiennent leurs contributions jusqu’à la fin de l’année est de « faire chanter » l’ONU, alors qu’ils tirent profit de la principale distorsion du barème des quotes-parts, imposant au fil des ans une baisse du plafond de 39,89% en 1946 à 22% actuellement.
Il est « choquant et scandaleux », s’est emportée la représentante, de voir les États-Unis parler de la « rentabilité » de leurs investissements aux Nations Unies, montrant par là qu’ils considèrent la paix et la sécurité internationales, le développement et les droits de l’homme, comme une entreprise. Il est « honteux », a-t-elle ajouté, de les voir pleurer sur l’argent qu’ils doivent à l’ONU alors que ce sont leurs entreprises qui réalisent le plus de profits de la présence de l’ONU sur le territoire américain, laquelle présence représentait en 2016 près de 1,6 milliard de dollars au trésor américain. Malgré cela, les États-Unis tentent une fois de plus d’imposer leur volonté aux autres États Membres et de réduire encore une contribution au budget ordinaire, qui est déjà inférieure à ce qu’elle devrait être, en vertu du principe de la capacité de payer. En revanche, pour honorer ses obligations, Cuba n’hésite pas à surmonter les obstacles et à consentir aux sacrifices découlant du blocus économique, commercial et financier que lui impose les États-Unis depuis 56 ans. Ce blocus affecte, entrave et parfois empêche le paiement de nos contributions à l’Organisation et à d’autres organisations internationales, a rappelé la représentante.
M. HASEEB GOHAR (Pakistan) a déploré le déficit du budget ordinaire de 365 millions de dollars au 30 septembre 2018, ainsi que les contributions non acquittées au budget ordinaire et aux opérations de maintien de la paix pour un montant total de 3,6 milliards de dollars, principalement en raison des retards dans le versement des contributions. Le représentant a rappelé que son pays était l’un des plus importants fournisseurs de contingents et d’effectifs de police des opérations de maintien de la paix et que 156 Casques bleus pakistanais avaient trouvé la mort sur le terrain. Malgré ces sacrifices, a-t-il déploré, l’ONU devait encore 221 millions de dollars aux pays fournisseurs de contingents et d’effectifs de police au 30 septembre 2018. De manière générale, le représentant a souligné que la situation financière de l’ONU avait un impact sur les liquidités disponibles. « Les incidences négatives du non-paiement doivent être prises au sérieux », a-t-il insisté, appelant l’ONU à tout faire pour verser intégralement et ponctuellement les sommes dues aux pays fournisseurs de contingents et d’effectifs de police.
M. MAHESH KUMAR (Inde) a constaté qu’au fil des ans, les mandats de l’Organisation ont augmenté mais les budgets ont diminué en termes réels et nominaux. Pour compliquer encore les choses, les arriérés ont également augmenté. Cette situation, a prévenu le représentant, met « dans une situation inconfortable » les États qui auraient pu bénéficier d’une mise en œuvre efficace des mandats et ceux qui ont payé leurs contributions en temps voulu. C’est un problème récurrent pour de nombreux États, dont l’Inde, qui ont participé à des opérations de maintien de la paix achevées et qui attendent les remboursements. Toutefois, a rassuré le représentant, l’Inde continue de soutenir les Nations Unies, comme en témoigne son rang de plus grande contributrice de contingents. L’Inde fait partie des 43 États Membres qui ont entièrement payé leurs contributions. Elle a même payé à l’avance et en totalité son dû au budget ordinaire pour 2019. Mais le représentant a rappelé qu’en dehors des 221 millions de dollars d’impayés aux États Membres, des remboursements plus importants relatifs aux lettres d’attribution, soit 164 millions de dollars, et aux indemnisations en cas de décès ou d’invalidité, soit 8 millions, sont toujours en suspens. Nous devrions pour le moins avoir une date butoir pour les remboursements, y compris ceux pour les opérations achevées, a conclu le représentant.
Mme CHRISTINE KALAMWINA (Zambie) a rappelé que, d’après les estimations du Fonds monétaire international (FMI), la croissance économique mondiale en 2018 serait de 3,7%, soit la même qu’en 2017, une stagnation attribuée à une situation moins favorable dans les marchés émergents et les pays en développement. Les facteurs, a-t-elle poursuivi, sont liés à des conditions financières défavorables, aux tensions géopolitiques et au prix élevé du pétrole. De fait, a poursuivi Mme Kalamwina, les pays les moins avancés (PMA), dont la Zambie, font face à des défis économiques et politiques qui les empêchent d’honorer à temps et en totalité leurs obligations financières vis-à-vis de l’Organisation.
Au regard de ces défis, la représentant a donc rejeté toute idée d’augmenter les quotes-parts. Étant donné la faible croissance économique mondiale, Mme Kalamwina a estimé que tout changement de nature à augmenter ces contributions ne ferait que freiner encore davantage la faculté des États à verser leurs contributions. La représentante a salué l’augmentation de 137 en 2017 à 141 cette année du nombre d’États qui se sont acquittés dans l’intégralité de leurs contributions au 30 septembre. Elle a toutefois noté que le montant des arriérés et des contributions non payées risquait de « paralyser » l’exécution des mandats et a donc encouragé les États qui ont des problèmes de paiement à soumettre à l’ONU un échéancier pluriannuel.
M. FU DAOPENG (Chine) s’est dit préoccupé par des impayés de 1 milliard de dollars au budget ordinaire et de 2,5 milliards à celui des opérations de maintien de la paix. C’est la première fois depuis des années, a-t-il déploré, que les réserves sont épuisées et que le déficit final, 12 millions de dollars, ait dû être absorbé par des emprunts aux missions de maintien de la paix achevées. Les ressources financières sont le « pilier » et un appui important de la gouvernance de l’ONU, a souligné le représentant. Une situation financière saine n’est pas seulement la base de l’exécution des mandats mais elle est aussi la garantie de la réforme de l’ensemble du système de l’ONU. La Chine, pays en développement qui a payé la totalité de ses contributions en 2018, appelle les autres à faire de même et à démontrer ainsi leur appui à la cause des Nations Unies, au multilatéralisme et aux efforts de réforme du Secrétaire général.
Les efforts pour améliorer la gestion budgétaire et imposer une stricte discipline financière ne doivent jamais cesser, a prévenu le représentant. Des approches novatrices dans la gestion budgétaire, une concentration plus nette sur la budgétisation axée sur les résultats, une plus grande insistance sur le rapport coût-efficacité, le renforcement de la discipline budgétaire et l’intégration de la gestion budgétaire et de celle des performances sont des exigences « inévitables » de la gestion budgétaire de l’ONU, a martelé le représentant qui a demandé au Secrétariat de prendre des mesures efficaces pour améliorer la gestion globale des performances, mettre en œuvre la discipline financière et utiliser les ressources financières de manière plus efficace, de sorte que la responsabilité financière soit garantie et que « chaque centime de nos contribuables » soit bien dépensé et justifié.
M. DMITRY S. ALYAKIN (Fédération de Russie) a demandé au Secrétariat de présenter, dans ses prochains rapports, des informations sur l’évolution des sommes dues par l’ONU à ses prestataires de services. Selon le représentant, les arriérés de contributions dus à un « manque de ponctualité » de la part des États Membres ont un impact négatif sur le fonctionnement de l’Organisation. Il a toutefois noté l’augmentation du nombre d’États qui se sont acquittés de leurs contributions dans leur intégralité au 30 septembre par rapport à l’an dernier. « Nous souhaitons que chacun suive leur exemple », a-t-il dit. Le représentant a rappelé que son pays a été un des premiers États Membres à verser l’intégralité de sa contribution au budget ordinaire cette année et qu’il s’acquittera en temps voulu de ses contributions au titre des opérations de maintien de la paix. Il a appelé tous les États Membres à faire de même et à verser « ponctuellement et sans condition aucune » leurs contributions à l’ONU.
Le Gouvernement des États-Unis « prend très au sérieux » ses obligations internationales, a affirmé Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis). Souhaitant clarifier les informations présentées aujourd’hui et citées par plusieurs délégations, la représentante a affirmé que les sommes prétendument dues par son pays à l’Organisation étaient « déformées » en raison, selon elle, des écarts entre les années fiscales de l’ONU et des États-Unis, ainsi que d’autres facteurs. « Suggérer que nous ne nous acquittons pas de nos obligations est complètement faux », a-t-elle insisté, rappelant que les États-Unis ont déjà versé cette année 1,4 milliard de dollars au titre des opérations de maintien de la paix et 151 millions au titre du budget ordinaire. Plus tard, ce mois-ci, a-t-elle ajouté, mon pays versera 250 millions supplémentaires au budget ordinaire. De manière générale, a affirmé Mme Norman-Chalet, les États-Unis, « en tant que principal contributeur de l’Organisation », versent chaque année 10 milliards de dollars à l’ensemble du système onusien, en contributions obligatoires et volontaires.
À ceux qui souhaiteraient « instrumentaliser » cette séance pour marquer des points politiques, la représentante a rappelé que ce qui entrave la capacité de Cuba à s’acquitter de ses obligations financières auprès de l’ONU, sont surtout les agissements de son régime actuel. Les dernières actions de Cuba dans ce bâtiment, a-t-elle accusé, ne sont pas celles d’un « contributeur responsable » qui prend au sérieux les services offerts à tous les États Membres et qui respecte l’utilisation de cet espace pour un dialogue constructif. Cela révèle en outre les efforts du régime cubain pour « détourner l’attention de la communauté internationale de la façon dont il traite son peuple ». C’est la raison même de l’embargo actuel: la répression perpétuelle qu’exerce le Gouvernement cubain contre son peuple et son échec à répondre aux exigences d’une société libre et juste.
Droit de réponse
La représentante de Cuba a souligné que son pays s’acquitte toujours à temps et sans conditions de ses obligations à l’égard l’ONU même si les montants sont modestes. Elle a condamné le chantage dont est victime l’ONU de la part des États-Unis qui retiennent délibérément leurs contributions. Les divergences d’opinions font partie des Nations Unies et du multipartisme, a-t-elle rappelé à son homologue, sans oublier d’ajouter que chaque année, l’Assemblée générale condamne le blocus économique, financier et commercial américain imposé à Cuba depuis 56 ans. Les États-Unis ne cessent de fouler au pied le droit international et la Charte des Nations Unies, non seulement en ne s’acquittant pas de leurs contributions mais aussi en n’honorant pas leurs obligations morales.