Ouverture de la session 2017 du Comité spécial de la Charte: énumération des priorités et des méthodes à employer
Le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, organe subsidiaire de l’Assemblée générale qui formule des recommandations pour encourager le développement progressif du droit international, a entamé, ce matin, sa session de 2017 qui durera jusqu’au 1er mars. Une quinzaine de membres ont fait connaître leurs priorités sur les points à l’ordre du jour et les propositions à l’examen, qui ont trait aux méthodes de travail du Comité, à la réforme des Nations Unies, ainsi qu’au règlement pacifique des différends.
Les délégués ont insisté sur l’importance de la Charte des Nations Unies comme pierre angulaire des relations internationales contemporaines, démontrant ainsi l’utilité du Comité spécial pour renforcer l’adhésion à cet instrument. Pour souligner la nécessité des travaux du Comité, plusieurs membres ont rappelé le rôle de cet organe dans l’adoption de la Déclaration de Manille de 1982 sur le règlement pacifique des différends entre États. La représentante de Cuba a expliqué que sa mission était d’autant plus importante que, à son avis, certains pays tentent de réinterpréter les principes de la Charte pour soutenir leurs politiques interventionnistes.
Au nom du Mouvement des non-alignés, le représentant de la République islamique d’Iran a souligné le « fort potentiel » du Comité pour éclairer l’application du droit international et de la Charte des Nations Unies. Du même avis, celui de l’Algérie, parlant au nom du Groupe des États d’Afrique, a cependant regretté que ce potentiel n’ait pas été exploité pleinement ces dernières années, « à cause de batailles idéologiques » qui l’ont empêché d’exercer sa fonction principale d’analyse juridique.
Cela n’a pas empêché les délégations de saluer l’esprit « constructif » et « dynamique » qui a prévalu lors de la session de 2016 et au cours d’une récente réunion intersessions organisée le 2 février 2017, en espérant que ce climat se maintienne.
Pour rationaliser les travaux du Comité, le représentant de l’Union européenne a recommandé d’éviter les doublons et proposé de retirer de l’ordre du jour « certaines questions devenues obsolètes » et qui ne font pas l’objet d’un consensus parmi les États Membres. Partisan lui aussi d’une rationalisation des travaux, la déléguée des États-Unis a rappelé qu’il avait été décidé de n’examiner que tous les deux ans le point relatif aux effets des sanctions sur les pays tiers. Les sessions du Comité ne doivent cependant pas se tenir de façon biennale, a plaidé le délégué du Nicaragua en notant la lourde charge de travail du Comité.
En ce qui concerne la réforme de l’ONU, dont le Comité examine les implications juridiques, le représentant du Mouvement des non-alignés a insisté pour qu’elle soit menée conformément aux principes et procédures en vigueur aux Nations Unies. Il a souligné en particulier la nécessité de poursuivre l’étude juridique de la mise en œuvre du Chapitre IV de la Charte, consacré à l’Assemblée générale, et en particulier des Articles 10, 11, 12, 13 et 14 se rapportant aux pouvoirs de cet organe principal.
Les délégations se sont aussi prononcées sur l’utilité d’examiner plusieurs propositions soumises au Comité au cours de la session 2017 sous le chapitre « règlement pacifique des différends ». La proposition du Ghana, qui porte sur le renforcement de la coopération entre l’ONU et les agences régionales en matière de règlement pacifique des différends, a été saluée par le Mouvement des non-alignés, ainsi que par le Groupe des États d’Afrique qui y a vu « l’occasion de se débarrasser de nos chaînes idéologiques ». Le délégué du Soudan a souhaité pour sa part que l’ONU encourage les mécanismes régionaux à jouer leur rôle dans le domaine de la paix et de la sécurité, conformément au Chapitre VIII de la Charte relatif aux accords régionaux.
La proposition du Mouvement des non-alignés, qui veut encourager les discussions sur le règlement pacifique des différends pour que les États Membres mettent en commun leurs meilleures pratiques, a été soutenue par Cuba.
Les avis ont été divisés sur la question de l’imposition de sanctions qui occupe habituellement le Comité spécial. Les sanctions ne devraient être utilisées qu’en dernier recours, uniquement lorsqu’il existe une menace à la sécurité internationale, a rappelé le représentant iranien en soulignant, en outre, la nécessité de définir clairement les sanctions, de les cibler précisément et d’en assurer le suivi, sans oublier qu’elles ne doivent pas entraver l’aide humanitaire.
Le représentant de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), par la voix du délégué d’El Salvador, a expliqué l’importance d’épuiser les mesures non coercitives avant de recourir aux mesures prévues au Chapitre VII de la Charte. Il a souhaité que les discussions se poursuivent sur la question de l’application des dispositions de la Charte pour l’assistance aux États tiers touchés par l’application des sanctions, même si aucun État Membre n’a contacté récemment le Comité à cet égard, car il est important que le Secrétariat rassemble les informations utiles sur cette question.
Pour le représentant de l’Union européenne, les sanctions sont un instrument important et il faut les utiliser de façon à minimiser leurs effets sur les civils et les parties tierces. Il a dit attendre avec intérêt l’exposé que fera prochainement le Secrétaire général, en espérant que cela encouragerait un dialogue positif et une meilleure compréhension de l’utilité de ces instruments.
À ce propos, le représentant de la République populaire démocratique de Corée s’est plaint de l’adoption par le Conseil de sécurité de « sanctions illicites à l’encontre de son pays ».
Son homologue du Bélarus a plaidé en faveur de la proposition conjointe de son pays et de la Fédération de Russie, qui tend à demander à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur les conséquences juridiques de l’imposition de sanctions sans l’autorisation du Conseil de sécurité. Il a expliqué que cela pourrait aboutir à un document de consensus présenté à l’Assemblée générale.
Autre proposition toujours sur la table, celle de Cuba sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales, qui, selon le délégué de Nicaragua, est toujours d’actualité.
Par ailleurs, les délégués se sont félicités des efforts entrepris pour mettre à jour le Répertoire de la pratique des organes des Nations Unies et le Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité. Le délégué du Maroc a salué le travail méticuleux ainsi réalisé qui profitera aux générations futures. Quelques inquiétudes ont toutefois été exprimées quant au retard pris dans la rédaction du volume 3 du Répertoire de la pratique des organes de l’ONU.
En début de séance, le Comité spécial a élu M. Ruslan Varankov (Bélarus), Président du Comité spécial, tandis que MM. Elsadig Ali Sayed Ahmed (Soudan), Christian Ejby Stroem Karstensen (Danemark) et Shaharuddin Onn (Malaisie) ont été élus Vice-Présidents. M. Isaías Arturo Medina Mejías (Venezuela) a été élu Rapporteur. Le Comité a aussi adopté l’ordre du jour provisoire*.
Des représentants de la République populaire démocratique de Corée, du Pérou, du Soudan, de la Fédération de Russie, de la République de Corée, du Venezuela et de la Chine ont également pris la parole.
Le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation poursuivra ses travaux, demain, mercredi 22 février, à 10 heures.