En cours au Siège de l'ONU

7897e séance – après-midi
CS/12748

Conseil de sécurité: le Yémen, théâtre de la « pire crise humanitaire au monde », selon le Coordonnateur des secours d’urgence de l’ONU

De retour du Yémen, du Soudan du Sud et de Somalie, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Stephen O’Brien, a expliqué, devant le Conseil de sécurité, que l’aggravation de la crise humanitaire dans ces trois pays est la conséquence directe des conflits qui y sévissent.

Le Yémen, a annoncé d’emblée le haut fonctionnaire, est actuellement le théâtre de la « pire crise humanitaire au monde ».  Deux tiers de sa population –18,8 millions de personnes– ont besoin d’assistance et plus de sept millions « ignorent d’où proviendra leur prochain repas », s’est alarmé le haut fonctionnaire, en faisant état de déplacements massifs de populations, déracinées par les combats entre forces gouvernementales et houthistes. 

Pourtant, en dépit de leurs assurances, « toutes » les parties au conflit refusent de ménager un accès humanitaire et instrumentalisent l’aide dont les Yéménites ont cruellement besoin.  « Rien qu’au cours des deux mois écoulés, plus de 48 000 personnes ont quitté la ville de Mokha, fuyant les combats, les mines antipersonnel et les engins explosifs improvisés », a relaté M. O’Brien.

Pour la Suède, il n’est tout simplement pas possible « de détourner le regard » « quand un enfant meurt toutes les 10 minutes et quand ceux qui fuient le conflit et la famine risquent de mourir par manque de simples soins médicaux ».

Parallèlement, l’insuffisance du financement grève considérablement les efforts en cours.  Alors que la communauté humanitaire réclame 2,1 milliards de dollars pour prêter assistance à 12 millions de Yéménites, « à peine 6% de ce montant a été réuni jusqu’à présent », a déploré M. O’Brien, qui a toutefois annoncé la tenue, le 25 avril à Genève, d’une conférence d’annonces de contribution « au niveau ministériel, sous la présidence du Secrétaire général de l’ONU » et à l’initiative de la Suisse et de la Suède.

« Je réitère le même message à tous: seule une solution politique au conflit permettra de mettre fin aux souffrances et de rétablir la stabilité régionale », a martelé le Coordonnateur des secours d’urgence, en plaidant aussi pour la reprise des importations au Yémen, y compris par le port de Hudaydah, un appel repris à son compte par les États-Unis, préoccupés par la fermeture de l’aéroport de Sanaa.

Également présent, le 24 février dernier, à la Conférence d’Oslo sur le Nigéria et le bassin du lac Tchad, le Secrétaire général adjoint a indiqué des annonces de contribution avaient été faites par 14 donateurs pour un total de 672 millions de dollars, un montant toutefois bien en deçà de l’appel, fixé à 1,5 milliard de dollars pour venir en aide aux pays riverains, à savoir le Cameroun, le Niger, le Nigéria et le Tchad.

Face à l’ampleur des besoins financiers, la France a jugé important de créer des synergies, d’améliorer la coordination avec les autres bailleurs et de mobiliser toutes les bonnes volontés, y compris celles des donateurs privés et des entreprises ainsi que les donateurs non traditionnels, notamment les pays émergents.

La question de la liberté de mouvement des personnels humanitaires est par ailleurs revenue avec insistance parmi les membres du Conseil de sécurité au sujet de l’ensemble des pays évoqués, où des populations sont isolées ou piégées par le manque de coopération des autorités ou des groupes armés auquel celles-ci sont en butte.

C’est notamment le cas du Soudan du Sud, dont le Président Salva Kiir a été encouragé aujourd’hui, notamment par le Japon, à garantir un accès humanitaire sans entrave aux gens dans le besoin.  Toutefois, en dépit de la gravité de la situation en Somalie, où 6,2 millions de personnes ont besoin d’assistance, dont 2,9 millions risquent la famine, le Secrétaire général adjoint O’Brien a salué la coopération démontrée par les autorités somaliennes, suivi en cela par la délégation américaine.

Au Soudan du Sud, a-t-il constaté, la situation est « pire que jamais » selon M. O’Brien, qui a fait état de plus de 7,5 millions de gens dans le besoin, soit 1,4 million de plus par rapport à l’an dernier, sans compter les 3,4 millions de personnes déplacées.  « Mais ne nous y trompons pas », a lancé le représentant français: dans ce pays d’Afrique orientale, « la famine est en grande partie le fait de l’action des hommes ». 

« Voici ce que la communauté internationale et le Conseil de sécurité peuvent faire », a résumé M. O’Brien.  Tout d’abord, contrer le plus rapidement possible les facteurs aggravants de la famine, en veillant notamment à la levée des entraves à l’accès humanitaire.  Ensuite, apporter un soutien financier suffisant et en temps opportun pour prévenir les « scénarios catastrophes ».  Et enfin, mettre fin aux hostilités, a dit le Secrétaire général adjoint rappelant que toutes ces situations de conflit ont en commun des solutions politiques et non militaires.

Au cours de sa mission, M. O’Brien s’est également rendu dans le nord du Kenya, où plus de 2,7 millions de personnes vivent elles aussi dans l’insécurité alimentaire, « un chiffre qui pourrait passer à quatre millions en avril ».

EXPOSÉ DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT AUX AFFAIRES HUMANITAIRES ET COORDONNATEUR DES SECOURS D’URGENCE

M. STEPHEN O’BRIEN, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a fait un compte rendu de sa dernière visite au Yémen, au Soudan du Sud et en Somalie.  Il a également mentionné son passage dans le nord du Kenya, où plus de 2,7 millions de personnes vivent dans l’insécurité alimentaire, un chiffre qui pourrait passer à quatre millions en avril.  S’agissant du Yémen, le haut fonctionnaire a expliqué qu’il s’agissait d’ores et déjà de « la plus grave crise humanitaire au monde », où deux tiers de la population –18,8 millions de personnes– ont besoin d’assistance et plus de sept millions ignorent d’où proviendra leur prochain repas.  Alors que se poursuivent les combats, les déplacements de civils se multiplient, tandis qu’avec la destruction des infrastructures de santé, les maladies se propagent.  Rien qu’au cours des deux mois écoulés, plus de 48 000 personnes ont quitté la localité de Mokha, fuyant les combats, les mines antipersonnel et les engins explosifs improvisés.

Le Secrétaire général adjoint a expliqué qu’il s’était rendu à Aden, où il s’est entretenu avec le Président, le Premier Ministre et le Ministre des affaires étrangères du Yémen, ainsi qu’à Sanaa, où il a discuté avec le leadership des houthistes.  Il a regretté de constater qu’en dépit de leurs assurances, toutes les parties au conflit refusent de ménager un accès humanitaire et font de l’aide un enjeu politique.  Cela n’empêche pas les Nations Unies et leurs partenaires humanitaires de redoubler d’efforts dans le pays, a-t-il dit, soulignant qu’en février seulement, 4,9 millions de personnes ont reçu une aide alimentaire.  Pour 2017, la communauté humanitaire demande 2,1 milliards de dollars pour répondre aux besoins de 12 millions de personnes ayant cruellement besoin d’une assistance et d’une protection vitales.  Jusqu’à présent, à peine 6% de ce montant a été réuni, a déploré M. O’Brien, avant de dire qu’une conférence d’annonces de contribution est prévue le 25 avril à Genève, au niveau ministériel et sous la présidence du Secrétaire général de l’ONU.  « Je réitère le même message à tous: seule une solution politique au conflit permettra de mettre fin aux souffrances et de rétablir la stabilité régionale », a assuré le Coordonnateur des secours d’urgence, avant de dire que la contribution du secteur privé est capitale: les importations commerciales au Yémen doivent reprendre, y compris par le port de Hudaydah, a-t-il dit.

Évoquant ensuite son déplacement au Soudan du Sud les 4 et 5 mars, M. O’Brien a dit que la situation y est « pire que jamais », avec plus de 7,5 millions de gens dans le besoin, soit 1,4 million de plus par rapport à l’an dernier, sans compter les 3,4 millions de personnes déplacées, dont près de 200 000 ont quitté le pays depuis janvier dernier.  Le Secrétaire général adjoint a expliqué qu’il avait parlé à des femmes et à des enfants et souligné que beaucoup de femmes ont subi des violences sexuelles choquantes, souvent utilisées comme arme de guerre.  Il a dénoncé les hostilités incessantes, les restrictions à la liberté de mouvement et les obstacles bureaucratiques qui entravent là aussi les opérations humanitaires. 

Évoquant ensuite la situation en Somalie, où il est également allé, M. O’Brien a indiqué que plus de la moitié de la population, soit 6,2 millions de personnes, a besoin d’assistance, dont, 2,9 millions sont menacées par la famine.  En outre, près de 160 000 personnes ont été déplacées en raison de la gravité de la sècheresse.  Des femmes et des enfants cherchent pendant des semaines de l’eau et de la nourriture, a décrit le haut fonctionnaire.  « Ils ont perdu leur bétail, les sources d’eau potable se sont asséchées et ils n’ont plus rien pour vivre », a relaté le haut fonctionnaire.  Il a expliqué que de larges portions du territoire dans le sud et le centre de la Somalie restent sous le contrôle des Chabab, alors que le pays a été en 2016 le théâtre de 165 actes violents, en hausse de 18% par rapport à l’an dernier.  Dans ce pays aussi, les parties au conflit bloquent les voies d’approvisionnement, a regretté M. O’Brien, qui a toutefois fait le portrait d’une communauté humanitaire préparée au pire et d’un Gouvernement coopératif.  Pour ce pays, comme dans le nord-est du Nigéria, une augmentation des financements et un élargissement et de l’accès sont nécessaires pour permettre aux partenaires d’éviter une catastrophe.  

Le Secrétaire général adjoint a indiqué que, lors de la Conférence d’Oslo sur le Nigéria et le bassin du lac Tchad, 14 donateurs ont fait des annonces de contribution d’un montant de 672 millions de dollars, dont 458 millions serviront à financer l’action humanitaire en 2017.  Mais il faut faire plus pour réaliser l’objectif de 1,5 milliard de dollars.  « Voici ce que la communauté internationale et le Conseil de sécurité peuvent faire », a poursuivi le haut fonctionnaire.  Tout d’abord, contrer le plus rapidement possible les facteurs aggravants de la famine, comme, par exemple, en veillant à la levée des entraves à l’accès humanitaire.  En outre, un soutien financier suffisant et en temps opportun est nécessaire pour prévenir le scénario catastrophe et enfin, les hostilités doivent cesser.  « C’est ce qu’ont en commun ces quatre pays: un conflit », a souligné le Secrétaire général adjoint.

Déclarations

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a salué le rapport « objectif et complet » de M. O’Brien et s’agissant de la situation au Yémen, il a retenu qu’une grande partie de la population de ce « pays ami » avait besoin d’une aide humanitaire.  Par le biais de son ambassade à Sanaa, la Fédération de Russie s’efforce de créer un secrétariat pour coordonner l’aide humanitaire, a dit le représentant qui s’est déclaré préoccupé par les discours guerriers qui sapent les perspectives de paix.  Pour sa part, la Fédération de Russie encourage les parties à renoncer aux décisions unilatérales.  La réponse est politique, a-t-il insisté, sinon « les grands gagnants des conflits au Yémen et en Somalie seront les terroristes ».  De même, a poursuivi le représentant, il faut unir les efforts aux niveaux régional et international pour faire face à la situation dans les pays africains.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a livré trois messages principaux et d’abord que l’action des Nations Unies ne peut se substituer aux responsabilités qu’ont les gouvernements de ces quatre pays vis-à-vis de leurs populations.  « C’est en effet à ces gouvernements qu’incombe au premier chef la responsabilité de protéger leurs populations », a insisté M. Delattre.  Ne nous y trompons pas, au Soudan du Sud, la famine est en grande partie le fait de l’action des hommes.  Le représentant a donc appelé le Gouvernement sud-soudanais à prendre en compte les besoins de sa population.  Dans ce pays comme au Yémen, seule une solution politique permettra de remédier aux causes profondes des conflits et de mettre fin aux souffrances des populations.  Il a donc soutenu les efforts de l’Envoyé spécial pour le Yémen et dit attendre des parties sud-soudanaises qu’elles mettent en œuvre rapidement l’accord de paix et qu’elles n’occultent pas le dialogue national.  Le représentant a aussi dit espérer que les engagements pris par le Président « Farmajo » en termes de bonne gouvernance et d’état de droit seront suivis d’actes concrets notamment s’agissant de la réforme du secteur de la sécurité.   

« Le deuxième message est que les Nations Unies et les acteurs humanitaires doivent pouvoir avoir accès à toutes les populations dans le besoin sans restrictions, sans entraves bureaucratiques et sans menaces à leur sécurité », a ajouté le représentant de la France.  Il s’est dit particulièrement préoccupé par la situation au Soudan du Sud où les acteurs humanitaires et la Mission de l’ONU sont beaucoup trop souvent la cible d’attaques, de harcèlements ou de restrictions d’accès.  Ces problématiques se posent également avec une acuité particulière au Yémen, où la poursuite des combats menace de dégrader encore davantage la situation humanitaire, a poursuivi le représentant.  Les parties au conflit doivent cesser sans délai les attaques indiscriminées contre les civils et les infrastructures civiles, susceptibles d’être qualifiées de crimes de guerre, a-t-il prévenu. 

« Le troisième message est que pour faire face à l’ampleur des besoins financiers il est important de favoriser une approche globale afin de créer des synergies et d’améliorer la coordination avec les autres bailleurs et de mobiliser toutes les bonnes volontés, y compris les donateurs privés et les entreprises ainsi que les bailleurs non traditionnels, notamment les pays émergents. »  C’est grâce à la mobilisation de tous que nous pourrons venir en aide aux populations dans le besoin, a conclu le représentant.  

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a jugé impératif de rechercher des solutions politiques à la crise au Yémen, afin d’atténuer les souffrances de millions d’êtres humains.  Il a appelé les États qui peuvent influencer les parties à collaborer à cette fin.  Il faut aussi, a-t-il recommandé, donner la priorité à l’accès immédiat et sans entrave de l’aide humanitaire, pour qu’elle atteigne la population du pays, en particulier les 70% d’entre elle qui ont un besoin urgent d’aide humanitaire.  Il a également parlé des 500 000 enfants souffrant de malnutrition aiguë, sachant qu’un enfant meurt toutes les 10 minutes de causes que l’on pourrait prévenir, ainsi que des autres populations vulnérables comme les femmes et les personnes déplacées.  Le représentant s’est aussi élevé contre les attaques visant les hôpitaux et contre les violations du droit international humanitaire.

Passant au Soudan du Sud, il a rejeté le discours de haine des parties qui a conduit le pays au bord du génocide.  Il s’est inquiété pour les personnes déplacées se trouvant dans les camps de protection des civils qui sont arrivés à un point critique à cause des attaques fréquentes.  Là aussi, il a plaidé pour un accès sans entrave pour la fourniture de l’aide humanitaire.  Pour ce qui est de la Somalie, où la moitié de la population a besoin d’assistance et souffre de la faim, il a noté que près de 200 000 enfants malnutris risquent de mourir s’ils ne reçoivent pas immédiatement une aide.  Au Kenya, la population est également décimée par la faim et le manque d’accès à l’eau, a-t-il déploré.  Il a dit attendre de la communauté internationale qu’elle agisse de toute urgence pour aider près de trois millions de personnes au bord de la famine.

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a évoqué à son tour une crise qui va devenir la plus grande crise humanitaire et alimentaire des Nations Unies.  « Tous les membres du Conseil de sécurité et des Nations Unies devraient être scandalisés de devoir faire face à la famine en 2017 », a-t-elle martelé.  La famine peut être évitée, mais, pour cela, les parties belligérantes doivent établir des priorités et réduire l’incidence des hostilités sur les civils.  Elles doivent permettre l’accès sans entrave de l’aide humanitaire.  En même temps, a-t-elle ajouté, « nous devons tous contribuer davantage à cet effort d’urgence ».

D’après le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), un enfant meurt toutes les 10 minutes au Yémen, s’est indignée la représentante.  La fin du conflit yéménite étant la meilleure solution pour atténuer la crise humanitaire, les États-Unis appuient les efforts entrepris pour retourner à la table des négociations, car il n’y a pas de solution militaire.  Les parties doivent autoriser les importations de combustibles et de produits de première nécessité et la fermeture de l’aéroport de Sanaa ne fait qu’entraver ces efforts, a-t-elle insisté.  Il faut aussi aider les Yéménites à acheter de la nourriture.

Au Soudan du Sud, la responsabilité de la famine incombe aux dirigeants qui mènent un conflit « insensé », a poursuivi la représentante.  Elle leur a demandé de faciliter l’accès des travailleurs humanitaires.  En Somalie, a-t-elle insisté, 50% de la population a besoin d’aide, mais ici, s’est-elle réjouie, le Gouvernement est prêt à coordonner l’action humanitaire.  Le financement reste pourtant un problème.

Les membres de ce Conseil, a conclu la représentante, ont constaté de visu les souffrances au Nigéria et le défi redoutable posé par Boko Haram.  D’après elle, il faut pouvoir trouver des canaux sécurisés d’acheminement de l’aide et les Nations Unies et les gouvernements de la région doivent faire davantage à cet égard.  Tous les membres du Conseil qui ont une influence doivent exhorter les parties à garantir un accès à l’aide humanitaire, s’est-elle résumée.  

M. KORO BESSHO (Japon) s’est dit très préoccupé par la poursuite des combats et des bombardements au Yémen, rappelant que le Conseil de sécurité est uni dans son appel à une solution politique.  Il a appelé les parties à entendre la voix de la communauté internationale et du peuple yéménite et à rechercher un cessez-le-feu et une paix durables.  Le délégué a appuyé l’approche prônée par l’ONU s’agissant de la crise yéménite, notamment la tenue de consultations directes entre les parties avec la médiation de l’ONU.  Il n’y a pas d’autre alternative, a-t-il déclaré, ajoutant qu’il ne voyait pas à cet égard de divergence parmi les membres du « G-18 ».  « Nous devons également prendre très au sérieux les conclusions du Groupe d’experts du Comité 1540 selon lesquelles les terroristes exploiteraient l’environnement politique changeant et le vide du pouvoir pour enrôler de nouvelles recrues et préparer de nouvelles attaques. »  S’il s’est dit « frustré » par la lenteur des progrès, M. Bessho a souligné la nécessité de soutenir les efforts de l’Envoyé spécial.  S’agissant de la situation préoccupante au Soudan du Sud, le Japon, a rappelé le représentant, a annoncé une contribution de 22,4 millions de dollars en janvier dernier au profit des agences onusiennes et des projets humanitaires.  Il a exhorté le Président Salva Kiir à prendre des mesures concrètes et à garantir un accès humanitaire sans entrave.  Enfin, M. Bessho a indiqué qu’une partie des 22 millions de dollars promis par le Japon pour l’aide humanitaire et le développement en Somalie serait consacrée à l’aide nutritionnelle.

M. CARL SKAU (Suède) a appelé à l’augmentation des fonds pour que le système de l’ONU et ses partenaires puissent fournir une assistance vitale.  La Suède, qui a augmenté sa contribution, encourage les autres pays à faire de même.  L’accès humanitaire doit être garanti partout et en toute circonstance, a poursuivi le représentant, réclamant aux parties le respect des principes humanitaires et de leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Seules des solutions politiques permettront de mettre fin aux souffrances et de réaliser une paix et un développement durables, a-t-il averti.  Nous devons combler le fossé entre assistance humanitaire et aide au développement et pour ce faire, trouver une nouvelle façon de faire les choses.  « Nous pouvons tous faire mieux.  Nous devons faire mieux. » 

S’agissant de la situation au Yémen, qu’il a qualifiée « de choquante et d’hautement intolérable », le représentant a prévenu qu’on ne peut détourner le regard quand on nous dit que 19 millions de personnes ont besoin d’une protection humanitaire, quand nous entendons que sept millions de personnes ne savent pas où elles vont trouver leur prochain repas, quand un enfant meurt toutes les 10 minutes en raison du conflit et quand ceux qui fuient le conflit et la famine risquent de mourir par manque de simples soins médicaux.  Il faut de toute urgence reconstituer les stocks de médicaments, de nourriture et de carburants et toutes les parties doivent faciliter l’accès humanitaire, s’abstenir des contraintes bureaucratiques, favoriser les importations par les ports et reprendre les vols commerciaux, a plaidé le représentant.  Il faut empêcher la famine mais les Nations Unies manquent de fonds, s’est-t-il alarmé, avant d’indiquer que face à ce constat, la Suisse, la Suède, le Secrétaire général et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) ont décidé d’organiser le 25 avril à Genève une manifestation de haut niveau pour réunir des donateurs.  Comme l’aide humanitaire ne résoudra jamais la crise au Yémen, il faut renouveler la cessation des hostilités et intensifier les efforts pour parvenir à un accord politique négocié et offrir une solution durable à cette catastrophe en cours.

Pour ce qui est du Soudan du Sud, le représentant a souligné que la situation en matière de sécurité contribue directement à la crise humanitaire.  Seule la fin du conflit peut améliorer les conditions de vie des Sud-Soudanais.  Une cessation immédiate des hostilités et un processus politique revitalisé, véritable et inclusif, appuyé par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), l’Union africaine et l’ONU, sont attendus de toute urgence.  Il est « tout à fait inacceptable », a-t-il prévenu, que des agents humanitaires soient attaqués et tués quand ils ne font pas face aux restrictions imposées à leur mouvement et aux obstacles bureaucratiques.  Ici encore, le représentant a appelé les parties, y compris le Gouvernement, à honorer leurs engagements à offrir un accès humanitaire sans entrave dans tout le pays.

Venant enfin à la Somalie, le représentant a salué le leadership fort du Gouvernement et son engagement à prévenir la famine.  Il est important, a-t-il prévenu, que nous gardions à l’esprit les leçons tirées de la sécheresse de 2010-2011.  Une meilleure coordination est impérative pour une bonne réponse et le lancement la semaine dernière du « Centre de coordination des opérations contre la sécheresse », en plus de l’installation de bureaux sur le terrain, rendra, faut-il espérer, la réponse plus efficace, a conclu le représentant.

M. BARLYBAY SADYKOV (Kazakhstan) a déclaré que la détérioration de la situation au Yémen ne pourra être arrêtée qu’en mettant fin aux hostilités et en assurant l’acheminement de l’aide humanitaire.  Il a ensuite plaidé pour le renforcement du secteur de la sécurité en Somalie pour favoriser la mise en place d’un environnement propice aux réformes dont le pays a besoin sur les plans économique et social.  Au Soudan du Sud, a ajouté le représentant, il est évident que la crise actuelle est une conséquence du conflit.  Il a donc demandé aux autorités de Djouba de ménager, là aussi, un accès sûr pour les personnels humanitaires.  

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a reconnu qu’il fallait faire tous les efforts possibles pour atténuer les souffrances des populations affectées.  Au Soudan du Sud et en Somalie, la solution est politique, a-t-il réitéré.  Concernant le Yémen, il a reproché au Conseil de sécurité de garder « un silence suspect », alors qu’il est indispensable d’examiner de plus près la situation sous ses différentes facettes.  Là encore, la seule option est un processus politique.

Alarmé par les chiffres cités par le Coordonnateur des secours d’urgence, le représentant a souligné que la situation au Yémen avait déjà causé la mort de dizaines de milliers de personnes.  Condamnant le blocus unilatéral du port qui entrave l’importation de médicaments et de produits alimentaires, il a estimé que le Conseil avait l’obligation de lancer un message clair pour la levée de toutes ces entraves.

Préoccupé également par la détérioration de la situation humanitaire au Yémen, M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a constaté que les houthistes continuaient d’entraver l’accès des travailleurs humanitaires.  Il faut envisager, a-t-il estimé, le déploiement d’observateurs de l’ONU dans le port bloqué pour mettre fin aux pratiques de procrastination qui freinent les importations.  Le cercle vicieux des combats a eu pour conséquence le déplacement de milliers de civils, a-t-il insisté.

Quant à la population du Soudan du Sud, elle a plus que jamais besoin de l’aide de la communauté internationale, a poursuivi le représentant.  La crise en Somalie et la sécheresse méritent aussi une action urgente, d’autant plus qu’elles risquent d’avoir un impact sur l’évolution de la situation politique du pays.  Il faut veiller à ce que le Gouvernement et les acteurs régionaux participent à toutes les phases de la réaction humanitaire, et promouvoir l’efficacité des institutions somaliennes.  Les crises politiques continues et l’absence de solution sont un dénominateur commun dans les pays mentionnés, a-t-il relevé. 

M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a plaidé pour une assistance humanitaire immédiate aux pays d’où le Coordonnateur des secours d’urgence revient, en particulier pour les femmes, les enfants et les groupes vulnérables.  Après avoir demandé aux bailleurs de fonds de faire des contributions généreuses à la conférence du 25 avril, il a également plaidé pour la levée des obstacles bureaucratiques et des entraves à l’aide humanitaire.  L’Italie continuera pour sa part, a assuré le représentant, d’appuyer les efforts en cours, en mettant l’accent sur l’autonomie des femmes et des jeunes, sur l’accès à la nutrition, la résilience et la protection sociale. 

M. YURIY VITRENKO (Ukraine) s’est dit très préoccupé par l’augmentation des tirs de roquette des houthistes contre certains points du territoire de l’Arabie saoudite et les navires saoudiens.  La sophistication croissante des attaques de ces houthistes et des partisans de l’ancien Président Saleh menacent la sécurité de l’approvisionnement énergétique et la liberté de navigation dans la région, a-t-il estimé.  Le délégué a précisé que ces forces avaient également augmenté leurs tirs de missiles balistiques.  Treize et quatorze tirs ont été recensés, respectivement, en janvier et en février, alors qu’il n’y en avait que trois par mois en moyenne en 2016, a-t-il noté.  Le délégué a déclaré que la fourniture d’armes sophistiquées aux houthistes et aux partisans de l’ancien Président Saleh n’était pas de nature à favoriser l’amélioration de la situation.  Il a dit placer beaucoup d’espoirs dans les efforts actuels de l’Envoyé spécial pour faciliter la reprise des pourparlers de paix sous l’égide de l’ONU.  En conclusion, le délégué ukrainien a jugé « déconcertante » la capacité d’Al-Qaida d’accroître sa base opérationnelle dans la péninsule arabique et d’exploiter les profondes fractures de la société yéménite.

M. SHEN BO (Chine) a principalement évoqué la situation au Yémen, où les attaques répétées contre les populations et infrastructures civiles aggravent la crise humanitaire.  Il a également demandé que cessent les entraves à l’aide humanitaire, alors que son propre pays s’apprête à envoyer des produits médicaux dans le pays.  Le représentant a donc appelé toutes les parties à déposer les armes et à s’engager de bonne foi dans des pourparlers sous les auspices de l’Envoyé spécial de l’ONU.

« L’exposé de M. O’Brien fait froid dans le dos compte tenu de la multitude et de l’ampleur des défis humanitaires », a déclaré M. DAWIT YIRGA WOLDEGERIMA (Éthiopie).  La population yéménite risque de sombrer dans la famine si rien n’est fait maintenant, a-t-il averti.  Il a donc appelé la communauté internationale à réagir immédiatement et à combler l’écart financier.  Garantir un accès sans entrave est un impératif, a-t-il ajouté.  Enfin, les défis économiques, sécuritaires et humanitaires ne sauront être relevés sans une solution politique à la crise.

M. GORGUI CISS (Sénégal) a déclaré que les « sombres prévisions » du Coordonnateur des secours d’urgence « font froid dans le dos ».  En ce qui concerne le Yémen, il a souhaité rappeler aux parties au conflit les obligations qui sont les leurs en vertu du droit international, s’agissant de l’assistance à toutes les populations en détresse sur leur territoire.  Plus que jamais, a-t-il poursuivi, la Somalie a besoin de la communauté internationale pour renforcer ses capacités.  En ce qui concerne la situation dans la région du lac Tchad, il a estimé que la famine n’est pas une « fatalité ».  Si elle a reconnu les efforts déployés jusqu’à présent, la communauté internationale doit faire « plus, vite et mieux », a pressé le représentant, pour empêcher la prolifération des groupes terroristes qui sont les premiers à tirer parti de la détérioration de la situation humanitaire dans la sous-région.

M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) a rappelé que plus de 20 millions de personnes risquent de mourir de faim au cours des six prochains mois.  « C’est absolument inimaginable en 2017 », a-t-il lancé.  Au Soudan du Sud, le Gouvernement doit mettre un terme aux combats et améliorer l’accès humanitaire.  « Il faut également mettre la main à la poche », a-t-il ajouté, en soulignant que le Royaume-Uni était le deuxième bailleur de fonds au Soudan du Sud, mais qu’il ne pouvait pas agir seul.  En Somalie, il faut agir maintenant avant que la sécheresse ne s’aggrave et pour éviter une réédition de la famine de 2011, a poursuivi le représentant.  Si nous ne redoublons pas d’efforts, les Chabab s’accapareront du vide laissé, a-t-il averti.

Au Yémen, les civils paient un lourd tribut, a déploré le représentant.  Il faut exhorter les parties à faciliter un accès sans entrave à l’aide humanitaire de l’ONU et des ONG dans ce pays où 85% des besoins alimentaires étaient couverts par les importations.  Il faut aussi trouver une façon de stabiliser le secteur bancaire pour que les produits de première nécessité puissent être payés.  Appelant les pays à faire preuve de générosité pour s’attaquer à la crise, il a indiqué que le Royaume-Uni avait revu à la hausse ses contributions, portées désormais à 125 millions de dollars.  Enfin, il a appelé toutes les parties au Yémen à œuvrer à la paix.    

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