Sixième Commission: l’heure n’est pas venue d’envisager un projet de convention sur la responsabilité des organisations internationales
La Commission recommande à l’Assemblée générale d’octroyer le statut d’observateur à trois organisations intergouvernementales
La Sixième Commission (chargée des questions juridiques) a examiné, ce matin, la question de la responsabilité des organisations internationales, après avoir adopté sans vote trois projets de résolution sur l’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale à trois organisations intergouvernementales*, et après avoir achevé son débat sur la question de l’expulsion des étrangers.
L’adoption d’une convention sur la responsabilité des organisations internationales continue de poser de multiples problèmes car la pratique est rare concernant l’application de ce principe aux diverses organisations internationales. Si la majorité des délégations ont apprécié la contribution que les articles sur la responsabilité des organisations internationales, adoptés par la Commission du droit international (CDI) en 2011, ont apportée au débat, elles n’ont pas été favorables à l’élaboration, à ce stade, d’une convention sur la base de ces articles.
La Commission était saisie en particulier d’un rapport du Secrétaire général contenant la première compilation de décisions des juridictions internationales et autres organes internationaux renvoyant aux articles de la CDI.
Les pays nordiques et la Malaisie ont trouvé prématuré de négocier un traité compte tenu de l’insuffisance de la pratique en la matière. Singapour et le Royaume-Uni ont ainsi constaté peu de développements significatifs depuis 2014 et une absence de consensus. La délégation britannique s’est dite convaincue que le projet d’articles gagnerait à être laissé en l’état et que « l’heure n’est pas venue d’envisager un projet de convention ».
En revanche, la Fédération de Russie ne s’est pas opposée à l’élaboration d’un traité international sur la responsabilité des organisations internationales. Et l’Iran a considéré qu’un traité bien élaboré sur cette question pourrait assurer une meilleure application du droit international.
Comme d’autres pays hostiles à l’élaboration d’une convention, les États-Unis et l’Uruguay ont souligné que les articles adoptés par la CDI relèvent de la codification et du développement progressif du droit international. Pour la Grèce et l’Australie, ces articles n’ont pas encore acquis la même autorité que les articles portant sur la responsabilité des États. Évoquant les différences inhérentes entre États et organisations internationales, Israël est allé plus loin en se disant préoccupé par la référence au projet d’articles de la CDI sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.
Notant que le nombre d’organisations internationales continuait de croître, Cuba a souligné la difficulté de définir ce qui constitue une organisation internationale d’un point de vue juridique et proposé que la Convention de Vienne sur le droit des traités serve de guide à cet effet.
Même s’il est « déraisonnable » de convoquer une conférence internationale sur cette question sans d’abord approfondir la question de la responsabilité des États, le Portugal a pensé que l’Assemblée générale devra un jour se pencher sur l’adoption d’une convention fondée sur le projet d’articles adopté en 2011.
Par ailleurs, la Commission a entendu ce matin les dernières interventions sur une autre question épineuse: l’expulsion des étrangers.
La Grèce a rappelé que cette question demeure vitale pour de nombreux pays, notamment ceux qui font face à des flux migratoires sans précédent. Pour elle, l’élaboration d’une convention sur l’expulsion des étrangers ne serait pas bénéfique, alors que des lois nationales et internationales traitent déjà de cette question, par exemple les législations de l’Union européenne transposées dans le droit national de ses États membres et la jurisprudence développée par la Cour européenne des droits de l'homme.
À l’inverse, le représentant du Bangladesh a reconnu le potentiel du développement d’un projet de convention sur l’expulsion des étrangers. Il a prié la communauté internationale de rejeter les provocations du Myanmar qui expulse les Rohingya vers le Bangladesh, estimant que « cette campagne de nettoyage ethnique doit prendre fin » et que les Rohingya doivent pouvoir rentrer chez eux.
Soulignant que « la présence inattendue de refoulés collectifs sur le territoire d’un pays d’accueil peut mener à une crise humanitaire », la République démocratique du Congo a également appuyé le projet d’articles de la CDI relatif à l’expulsion des étrangers.
Enfin, la Sixième Commission a recommandé à l’Assemblée générale d’inviter les organisations suivantes à participer à ses sessions et travaux en qualité d’observateur: Réseau international sur le bambou et le rotin; Bureau de recherche macroéconomique de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) +3; Groupe Eurasie de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
La Sixième Commission se réunira lundi 16 octobre, à partir de 10 heures, pour parler du Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.
* A/C.6/72/L.8, A/C.6/72/L.9, A/C.6/72/L.4
EXPULSION DES ÉTRANGERS
Suite des déclarations
Rappelant que son pays a participé au projet d’articles sur l’expulsion des étrangers de la Commission du droit international (CDI), Mme MARIA THEOFILI (Grèce) a déclaré que cette question demeure vitale pour de nombreux pays, notamment ceux qui font face à des flux migratoires sans précédent. Elle a souligné l’importance pour les pays hôtes ou de transit, comme la Grèce, de respecter les droits de l’homme et les lois relatives aux réfugiés dans l’exercice de leur droit d’expulser des étrangers. Pour sa part, la Grèce s’efforce d’assurer des conditions humaines aux étrangers qui entrent illégalement sur son territoire, a poursuivi la représentante, soulignant l’importance d’identifier les personnes vulnérables et d’améliorer les conditions de détention.
Mme Theofili a cependant estimé que l’élaboration du projet d’articles ne serait pas bénéfique, alors que des lois nationales et internationales traitent déjà de cette question, citant en exemple les législations de l’Union européenne transposées dans le droit national de ses États Membres et la jurisprudence développée par la Cour européenne des droits de l’homme. La question de l’expulsion des étrangers doit donc être traitée par les mécanismes régionaux et adaptée aux besoins spécifiques des États, selon la représentante, pour qui le projet d’articles de la CDI peut servir de directive afin d’aider les États à mettre en place un cadre juridique approprié.
Il est remarquable que la CDI soit restée saisie de la question de l’expulsion des étrangers depuis 2014, a fait remarquer M. MOHAMMED HUMAYUN KABIR (Bangladesh). Selon lui, l’article 3 du projet d’articles vise à équilibrer les droits souverains des pays avec le respect des droits de l'homme. Les dispositions concernant les motifs d’expulsion nous semblent convaincantes, a-t-il déclaré, mais cela devrait faire l’objet d’autres débats. Il a souligné que l’interdiction d’une expulsion déguisée et d’une expulsion collective font partie des éléments les plus critiques du texte et recommandé la prudence à ce sujet. Enfin, il a reconnu le potentiel du développement d’un projet de convention sur l’expulsion des étrangers.
Par ailleurs, le représentant a prié la communauté internationale de rejeter les provocations du Myanmar qui expulse les Rohingya vers son État voisin et frontalier, le Bangladesh. « Cette campagne de nettoyage ethnique doit prendre fin et les Rohingya doivent pouvoir rentrer chez eux », a-t-il lancé.
Israël a expérimenté ces dernières années, comme de nombreux pays, l’arrivée d’un flot d’individus qui sont entrés illégalement dans le pays en franchissant la frontière sud, a souligné M. AMIT HEUMANN (Israël). Il a partagé le point de vue exprimé par de nombreux pays selon lequel les questions de l’expulsion des étrangers et de l’immigration illégale sont particulièrement sensibles, car elles sont au cœur même du principe de souveraineté de chaque État et des questions majeures de droits de l’homme. Pour cette raison, la codification des pratiques des États est particulièrement délicate. Il s’agit de savoir si un instrument juridique est nécessaire au vu du nombre important de traités multilatéraux, a-t-il conclu, car il faut éviter les doublons.
D’après Mme CRISTINA PUCARINHO (Portugal), la Commission du droit international (CDI) a réussi à trouver un équilibre entre les droits des individus concernés et la souveraineté des États sur leur territoire. Elle a considéré que, pour l’instant, le projet d’articles de la CDI, qui fournit un guide général sur le droit de l’expulsion des étrangers, « doit rester un aperçu d’ensemble des normes juridiques existantes ». Le sujet devrait être inscrit à l’ordre du jour provisoire de la soixante-quatorzième session de la Sixième Commission, en 2019, qui devrait alors pouvoir mieux évaluer l’impact des articles sur la pratique des États.
Rappelant que la Commission du droit international (CDI) a présenté en 2014 un projet de 31 articles sur l’expulsion des étrangers, M. ZENON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a déclaré que l’exercice actuel consiste à négocier un projet de résolution destiné à être approuvé par les États Membres. Devant l’ampleur des migrations actuelles, il a estimé que le développement progressif et la codification du droit international sur cette question représentent un espoir. Pour cette raison, la RDC appuie le projet d’articles relatif à l’expulsion des étrangers, a-t-il déclaré.
Toutefois, se référant à une décision de la Cour internationale de Justice (CIJ) défavorable à son pays sur l’expulsion d’un étranger, dans une affaire contre la République de Guinée, le représentant a estimé que « la présence inattendue de refoulés collectifs sur le territoire d’un pays d’accueil peut mener à une crise humanitaire ».
Droit de réponse
Le représentant du Myanmar a regretté les déclarations du représentant du Bangladesh qui ne sont pas constructives et ne vont pas dans le sens de la coopération souhaitée. Il a indiqué qu’un ministre s’était déplacé dans la zone concernée et que tout allait être fait pour faire revenir dans la dignité les personnes déplacées à la frontière du Bangladesh. Il a invité le Ministre des affaires étrangères du Bangladesh à se rendre au Myanmar pour promouvoir cette coopération. « Ceci étant, nous nous efforcerons de travailler en toute bonne foi pour résoudre la question des personnes déplacées », a-t-il assuré.
Responsabilité des organisations internationales (A/72/80 et A/72/81)
S’exprimant au nom du Groupe des pays nordiques, M. JONAS BRUUN (Danemark) a déclaré que ces pays ne sont pas favorables à l’élaboration d’une convention sur la responsabilité des organisations internationales sur la base des articles adoptés par la Commission du droit international (CDI). Il a noté que les États et organisations internationales ont présenté des informations très limitées sur la pratique en vigueur sur ces articles.
L’insuffisance d’une pratique générale et cohérente est l’une des raisons pour lesquelles le Groupe trouve prématuré de négocier un traité basé sur les articles. S’il s’est félicité de la compilation des décisions des juridictions internationales et autres organes internationaux renvoyant aux articles présentés par le Secrétaire général dans son rapport, le représentant a répété que la pratique des gouvernements et des organisations internationales à cet égard ne se développait pas assez vite.
M. MARK SIMONOFF (États-Unis) a estimé que plusieurs règles présentées dans le projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales portent sur le développement progressif du droit plutôt que sur la codification, ce que reconnaît le commentaire général présenté en introduction. Il s’est dit d’accord avec la Commission du droit international (CDI), qui précise que le projet d’articles ne reflète pas le droit actuel dans ce domaine de la même façon que les dispositions relatives à la responsabilité de l’État. Selon lui, les principes contenus dans certains articles, notamment ceux portant sur la légitime défense, ne s’appliquent pas aux organisations internationales de la même façon qu’ils s’appliquent aux États. M. Simonoff a donc estimé que le projet d’articles ne devrait pas être adopté en tant que convention internationale.
Soulignant le rôle important joué par les organisations internationales, M. PABLO ADRÍAN ARROCHA OLABUENAGA (Mexique), a déclaré qu’il était urgent d’élaborer des règles claires concernant leur responsabilité. L’adoption d’une résolution sur la responsabilité des organisations internationales par l’Assemblée générale aurait pour effet de conférer au projet d’articles la même autorité que celle portant sur la responsabilité des États. En outre, l’adoption d’une résolution en ce sens renforcerait le développement progressif et la codification du droit international, objectif ultime de la Commission du droit international, a estimé le représentant. Il a plaidé en conclusion pour que le projet d’articles demeure inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée générale si aucune entente ne peut être conclue quant à leur adoption.
M. ELSADIG ALI SAYED AHMED (Soudan) a dit qu’il fallait étudier de près le rôle et les fonctions des organisations internationales en vertu du droit international. Il a réitéré la nécessité de connaître les règles qui sont imposées aux organisations internationales de façon générale et celles qui le sont pour des organisations spécifiques. Il a noté qu’il n’existe aucun motif de distinction entre les règles portant sur les organisations internationales et celles portant sur les États. Selon lui, les règles et les pratiques appliquées aux privilèges et immunités des organisations internationales doivent définir la nature de leurs actes, ce qui n’est pas le cas actuellement. Comme la pratique à ce sujet est limitée et que les articles ne portent pas sur la codification mais bien sur le développement progressif, il a estimé que le projet d’articles requiert une étude plus approfondie.
M. LUKE TANG (Singapour) a déclaré qu’il n’était pas favorable à l’élaboration d’une convention sur la responsabilité des organisations internationales sur la base des articles adoptés par la Commission du droit international (CDI). D’une part, parce qu’il n’y a pas de changement sur l’ensemble de la question depuis son dernier examen en 2014, d’autre part, parce qu’il n’est pas approprié de mettre en place une convention tant qu’il n’y a pas de consensus général, a-t-il expliqué. Il a toutefois appuyé le travail de la CDI et le développement progressif du droit international en la matière.
Son pays reconnaît le principe de responsabilité dans le droit international, qui s’applique aux organisations internationales comme aux États, a indiqué M. CARLOS ALBERTO GARCÍA REYES (Guatemala). La Commission du droit international (CDI) a établi que la principale difficulté à laquelle elle a fait face dans l’élaboration du projet d’articles a été l’absence de pratique sur cette question, ce qui reflète « des droits changeants et non sédimentaires". Il a noté que de nombreuses difficultés demeurent avant que puisse être adoptée une convention sur la question de la responsabilité des organisations internationales. Le représentant a appelé la Sixième Commission à continuer de compiler les décisions sur cette question et à mettre à jour le répertoire pertinent.
Mme ELENA MELIKBEKYAN (Fédération de Russie) a estimé que la responsabilité des organisations internationales est un sujet important compte tenu du lien qui existe entre les organisations et les États. « Nous appuyons le projet d’articles proposé par la CDI. Bien que certains articles méritent d’être affinés, notamment sur le droit à la légitime défense des organisations, nous ne sommes pas contre l’élaboration d’un traité international sur cette question », a-t-elle déclaré.
M. HECTOR ENRIQUE CELARIE LANDAVERDE (El Salvador), a reconnu l’importance du principe de responsabilité en droit international. Bien que les articles rendent compte comme il se doit de ce principe, l’adoption d’un texte contraignant à cet effet continue de poser de multiples difficultés car la pratique est rare concernant son application aux diverses organisations internationales.
D’après le représentant, les articles sur la responsabilité des organisations internationales n’ont pas encore atteint la même autorité que les articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite. Compte tenu du large éventail d’organisations internationales auxquelles ces articles seraient applicables, il a estimé qu’il existe encore beaucoup d’écueils pour approuver un instrument en la matière. Il ne s’est pas opposé au maintien de cette question à l’ordre du jour de la Sixième Commission afin de décider, ultérieurement, si les articles sont suffisamment développés pour garantir leur application uniforme.
Notant que le nombre d’organisations internationales continue de croître, M. RAFAEL P. PINO BECQUER (Cuba) a souligné la difficulté de définir ce qui constitue une organisation internationale d’un point de vue juridique. Il a jugé que le projet d’articles élaboré par la Commission du droit international traite de la question de la responsabilité des organisations internationales de façon globale. En outre, il a estimé que le projet d’articles recueille de façon satisfaisante les principes du droit international relatifs à la responsabilité des États.
Le représentant a considéré que la Convention de Vienne sur le droit des traités devrait servir de guide pour toute définition juridique en la matière. Il a toutefois émis des réserves sur la définition de l’état de nécessité et sur la question des contremesures collectives, qui devrait faire référence à la Charte des Nations Unies. Par ailleurs, il a déclaré que la proposition de mécanisme pour régler les litiges autour de l’interprétation de la responsabilité constitue une garantie de solution pacifique, principalement pour les pays en développement victimes de la résolution des conflits par l’usage de la force.
M. AMIT HEUMANN (Israël) a estimé que les décisions des juridictions internationales citées par le Secrétaire général dans son rapport, qui font référence aux articles sur la responsabilité des organisations internationales, ne reflètent pas le droit international coutumier ni ne semblent pouvoir être codifiées comme traité. Selon lui, le rapport aurait gagné à présenter des cas concrets dans lesquels la responsabilité des organisations internationales aurait été engagée.
Le représentant a estimé que le fait de s’appuyer sur le projet d'articles de la Commission du droit international (CDI) sur la responsabilité de l'État pour fait internationalement illicite soulève des préoccupations, dans la mesure où elle ne prend pas suffisamment en compte les différences inhérentes entre Etats et organisations internationales. En outre, pour Israël, ce projet d’articles pourrait s’appliquer uniformément à différents types d’organisations internationales, alors que celles-ci diffèrent les unes des autres de manière significative.
Mme AHILA SORNARAJAH (Royaume-Uni) s’est dite convaincue que le projet d’articles gagnerait à être laissé en l’état et que l’heure n’est pas venue d’envisager un projet de convention. Selon elle, il y a peu de développements significatifs depuis 2014 en ce qui concerne la pratique existante. « Il est donc improbable qu’un processus de négociation long et complexe aboutisse à un consensus suffisant en vue de l’adoption d’une convention », a-t-elle estimé.
Selon la délégation britannique, les parallèles avec le projet d’articles sur la responsabilité de l’État devraient être approchés avec prudence, alors qu’il existe peu d’exemples concrets d’entrée en vigueur du projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales. De l’ONU au Conseil de l’Europe, en passant par l’Union européenne, ces organisations sont fort différentes les unes des autres et leur pratique repose souvent plus sur leurs propres instruments constitutionnels que sur l’acceptation de principes généraux tels qu’ils figurent dans le projet d’articles, a relevé la représentante. D’autant, a-t-elle ajouté, que nombreuses sont les organisations à exhorter à la prudence, dans la mesure où les articles sont considérés comme « controversés » et « insuffisamment appliqués ».
Mme ELAHE MOUSAVINEJAD (République islamique d’Iran) a estimé qu’il y a eu un nombre croissant de faits internationalement illicites commis par les organisations internationales. En conséquence, elle a jugé impératif de mettre en place un ensemble de règles. Un traité contraignant et bien élaboré sur la responsabilité des organisations internationales pourrait contribuer à la sécurité juridique, faire grandement avancer la question et assurer une meilleure application du droit international. Elle a donc approuvé les négociations sur un instrument juridiquement contraignant sur la base des articles adoptés par la Commission du droit international (CDI).
Prenant note du projet d’articles présenté dans le rapport de la Commission du droit international en 2011, Mme LIYANA MUHAMMAD FUAD (Malaisie) a considéré qu’il fallait procéder à un examen approfondi des articles avant de se prononcer sur la pertinence d’une convention. Pour le moment, ces articles, qui manquent de clarté et de précision, ne peuvent être considérés que comme des directives non contraignantes, a-t-elle estimé. Elle a donc considéré prématurée la tenue de négociations sur l’adoption d’une convention sur la responsabilité des organisations internationales, ajoutant que toute discussion future devrait porter sur une meilleure compréhension du rapport.
Si les normes et institutions qui garantissent la responsabilité des États sont bien établies, elles ne peuvent toutefois pas être associées par analogie aux organisations internationales, car leur responsabilité est par définition différente, a déclaré Mme CHRISTIANA MURATIDI (Australie). Elle a noté que les États ne sont pas d’accord aujourd’hui sur la question de la responsabilité des organisations internationales. C’est pourquoi nous n’appuyons pas l’établissement d’une convention sur cette question, a-t-elle conclu.
Mme ZINOVIA STAVRIDI (Grèce) a estimé que le projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales fournira des directives utiles aux tribunaux nationaux et internationaux qui doivent juger des actes illégaux commis par ces organisations. Cependant, elle a estimé que ces articles relèvent du développement progressif plutôt que de la codification du droit international, en raison du manque de pratique pertinente.
Selon la représentante, ce projet d’articles n’a pas encore acquis la même autorité que les articles portant sur la responsabilité des États, qui sont le reflet du droit coutumier international existant. Elle a donc estimé que l’Assemblée générale devrait prendre note du projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales, sans toutefois élaborer une convention à cet effet.
Mme MARINA SANDE (Uruguay) a pris note du rapport du Secrétaire général et de la compilation des décisions des juridictions internationales, « ce qui nous permet de savoir clairement où nous en sommes ». À la lecture du rapport, il apparaît clairement que les articles relatifs à la responsabilité de l’État sont pris en considération dans les juridictions nationales. Ces normes s’appuient sur des caractéristiques précises. En revanche, a-t-elle dit, « nous croyons que le développement du droit et sa codification en ce qui concerne la responsabilité des organisations internationales méritent plus ample considération avant de donner matière à une convention ».
Alors que l’Assemblée générale est appelée une nouvelle fois à se prononcer sur le projet d’articles portant sur la responsabilité des organisations internationales, Mme CRISTINA MARIA CERQUEIRA PUCARINHO (Portugal) a dit que son pays considère à nouveau que l’Assemblée devrait prendre note du projet dans une résolution. Elle a réitéré sa position voulant que le projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales représente l’équivalent du projet d’articles sur la responsabilité des États.
Il serait donc déraisonnable de convoquer une conférence internationale sur cette question sans d’abord approfondir la question de la responsabilité des États, a expliqué la représentante. Cependant, elle a réaffirmé sa conviction que l’Assemblée générale devra un jour se pencher sur l’adoption d’une convention fondée sur le projet d’articles adopté en 2011, ajoutant que cette question doit demeurer à l’ordre du jour de l’Assemblée.