Première Commission: des délégations s’inquiètent de l’impact du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires sur le régime de non-prolifération
Au troisième jour de son débat général, la Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a entendu, ce matin, la Fédération de Russie et la France réaffirmer le sens de leur doctrine de sécurité et expliquer les raisons pour lesquelles elles n’avaient pas participé aux négociations ayant abouti, le 7 juillet 2017, à l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, tout en soulignant leur respect des engagements pris en matière de réduction de leurs arsenaux.
Par ailleurs, des délégations ont souligné l’importance stratégique d’établir des zones exemptes d’armes nucléaires et que soit mis au point un dispositif assurant des garanties négatives de sécurité à tous les États. La prévention d’une course aux armements dans l’espace a également été abordée.
La représentante de la France a justifié la non-reconnaissance par son pays du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires par le fait que, pour de nombreux États, « la dissuasion nucléaire continue de jouer un rôle central dans le maintien de la stabilité et de la sécurité régionales et internationales ». Très critique, la représentante a jugé que le Traité n’était pas seulement une mesure « inefficace » sur la voie du désarmement nucléaire, mais qu’il sapait tout à la fois la crédibilité du régime de non-prolifération en établissant une norme concurrente de celles instaurées par le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE).
Par conséquent, ce traité pourrait compromettre les efforts entrepris pour permettre son entrée en vigueur, s’est ainsi inquiétée la représentante. Mettant en garde contre « la politisation excessive du débat au sein de la communauté du désarmement, qui conduit à l’affaiblissement de plusieurs instruments juridiques », elle a assuré que la France continuera, dans le cadre du TNP, à œuvrer en faveur de l’entrée en vigueur du TICE et au lancement de négociations sur un traité interdisant les matières fissiles à des fins militaires.
Son homologue russe a lui aussi réaffirmé l’attachement de son pays au régime du TNP, invitant instamment la communauté internationale à respecter les approches en vigueur en matière de désarmement nucléaire « qui ont fait l’objet d’un consensus et apporté la preuve de leur efficacité dans le cadre du Traité ». Pour le représentant, la réalisation d’un monde sans armes nucléaires doit se faire de manière graduelle et à long terme, et l’interdiction proprement dite des armes nucléaires devrait intervenir dans les dernières étapes du processus d’élimination, « afin que celle-ci devienne irréversible ».
Le délégué a en outre rappelé qu’au cours des 30 dernières années, « par le biais d’accords bilatéraux conclus avec les États-Unis ou de manière unilatérale », la Russie avait contribué de manière considérable à la réalisation d’un monde sans armes nucléaires. « Nous avons réduit notre potentiel nucléaire de 85%, et nous tâchons, dans le cadre du Traité sur la réduction et la limitation des armements stratégiques offensifs, d’atteindre, d’ici au 5 février 2018, les objectifs fixés en matière de limitation des têtes nucléaires, de leurs vecteurs et de leurs lanceurs », a-t-il encore indiqué.
D’autre part, l’Égypte et le Liban ont plaidé pour la mise en œuvre de la résolution de 1995 du TNP sur la création d’une zone exempte d’arme nucléaire et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. Ces délégations ont, à cet égard, exhorté Israël, seul pays de la région à ne pas encore l’avoir fait, à adhérer au TNP et à placer ses installations nucléaires sous le contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pour qu’il cesse faire peser une menace à la paix et à la sécurité.
L’Indonésie, de son côté, a constaté que l’absence d’un régime juridiquement contraignant de garanties négatives de sécurité, assurant les États non détenteurs contre l’emploi ou la menace d’emploi des armes nucléaires, autorisait les États parties au TNP dotés de l’arme nucléaire à poursuivre la modernisation de leurs arsenaux. « Un tel instrument juridiquement contraignant, établi dans le cadre du Traité, représenterait un gain majeur pour l’ensemble des États non détenteurs et contribuerait tant au désarmement nucléaire qu’à la non-prolifération », a estimé le représentant de ce pays.
Concernant la prévention de la militarisation de l’espace, la Fédération de Russie a annoncé que, cette année encore, sa délégation et celle de la Chine présenteraient un projet de résolution sur ce thème. « Ce texte permettra d’examiner la question d’une définition des armes dans l’espace et pourrait stimuler une discussion approfondie à la Conférence du désarmement », a déclaré le représentant russe. Pour rappel, l’adoption par consensus de ce projet de résolution se heurte depuis plusieurs années au constat de l’Union européenne (UE) qu’il n’existe aucune définition juridique claire de ce que signifie le placement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique.
Comme hier, plusieurs délégations ont exercé leur droit de réponse. La République populaire démocratique de Corée (RPDC), notamment, a réagi aux nombreuses condamnations des essais nucléaires et tirs de missiles balistiques qu’elle a effectués depuis 2006. Le représentant de ce pays a justifié ces actes en arguant que la RPDC ne visait qu’à se protéger et à dissuader toute attaque américaine contre elle. Les États-Unis ont répondu qu’il n’existait pas de problème « entre nos deux pays, mais un problème de sécurité internationale posé par les agissements de la RPDC ».
La Première Commission poursuivra son débat général demain matin, jeudi 5 octobre, à partir de 10 heures.
POINTS DE L’ORDRE DU JOUR RELATIFS AU DÉSARMEMENT ET À LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE
Suite du débat général
M. MIKHAIL ULYANOV (Fédération de Russie) a expliqué pour quelles raisons son pays ne pouvait adhérer au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires adopté le 7 juillet dernier. Il a estimé que le contenu même de l’instrument différait radicalement de la vision russe quant aux moyens à mettre en œuvre pour parvenir à un monde sans armes nucléaires. Il a ainsi déclaré que le Traité n’était pas conforme aux dispositions prévues par le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en ce qui concerne, notamment, l’élimination complète des armes nucléaires. Selon lui, l’élimination de ces armes doit s’effectuer dans le cadre du désarmement général et complet tel que défini par le mécanisme de désarmement onusien. La réalisation d’un monde sans armes nucléaires doit se faire de manière graduelle et à long terme, a-t-il souligné, et l’interdiction proprement dite des armes nucléaires devrait intervenir dans les dernières étapes du processus d’élimination, afin que celle-ci devienne irréversible. Le représentant a indiqué que son pays ne comptait pas signer ou ratifier le Traité et il a appelé les membres de la communauté internationale à respecter plutôt les approches en vigueur en matière de désarmement nucléaire, approches « qui ont fait l’objet d’un consensus et ont apporté la preuve de leur efficacité dans le cadre du TNP ». Le représentant a ensuite rappelé qu’au cours des 30 dernières années, par le biais d’accords bilatéraux conclus avec les États-Unis ou de manière unilatérale, la Russie avait contribué de manière considérable à la concrétisation d’un monde sans armes nucléaires. Nous avons réduit notre potentiel nucléaire de 85%, et nous tâchons, dans le cadre du Traité sur la réduction et la limitation des armements stratégiques offensifs, d’atteindre, d’ici au 5 février 2018, les objectifs fixés en matière de limitation des têtes nucléaires, de leurs vecteurs et de leurs lanceurs, a encore assuré le représentant.
M. Ulyanov a par ailleurs indiqué que son pays présenterait, cette année encore, un projet de résolution à la Première Commission sur la prévention de l’armement de l’espace. Nous appelons toutes les délégations qui ne l’ont pas encore fait à se porter coauteur de ce texte, en particulier les États membres de l’Union européenne, qui, « nous l’espérons, ne sont pas indifférents à la question de la prévention d’une course aux armements dans l’espace ». Il a qualifié de non convaincant l’argument invoqué en raison de l’absence de définition de ce que sont des armes placées dans l’espace. Contrairement à ce qu’avance l’Union européenne, a-t-il affirmé, la question ne porte pas sur la nature juridique d’un éventuel instrument contraignant de prévention d’une course aux armements: « ce qui fait la différence, ce sont la volonté et l’engagement politiques, c’est le niveau de confiance entre États », a-t-il souligné. Le représentant a ensuite annoncé que, cette année, son pays et la Chine présenteraient un projet de résolution demandant de nouveau la création d’un groupe d’experts gouvernementaux sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique. Ce texte permettra d’examiner de manière approfondie cette question d’une définition des armes dans l’espace et pourrait stimuler une discussion thématique à la Conférence du désarmement, a-t-il dit.
M. ABDERRAZZAK LAASSEL (Maroc) a rappelé l’urgence qu’il y avait à mettre fin à « cette frénétique course à l’armement dans laquelle le monde s’est embourbé ». Qualifiant le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, qui a été ouvert à la signature le 20 septembre dernier, de « grand pas en avant dans les efforts multilatéraux », il a estimé que cet instrument démontrait l’urgence, pour les pays dotés de l’arme atomique, de se désarmer. Il a souligné que le préalable indispensable à l’efficacité de ce traité est son universalisation.
Le représentant s’est inquiété du contexte mondial marqué par la détérioration de la sécurité internationale, la multiplication des menaces terroristes et surtout « le développement par certains États de programmes nucléaires jugés dangereux par la communauté internationale ». Selon lui, une approche multilatérale est plus que jamais de rigueur pour pousser l’ensemble des États Membres à ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE). Il a aussi souligné que le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) est l’instrument clef pour garantir la paix, « même si les obligations qui en découlent n’ont pas toujours été respectées par les États parties ». Pour lutter contre la prolifération de ces armes, il a appelé à faire de la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient un objectif majeur au niveau régional.
Le délégué s’est ensuite préoccupé de la menace que posent les armes classiques pour la stabilité de la région sahélo-saharienne, et a exhorté la communauté internationale à multiplier les efforts de coopération régionale. Si le Maroc dénonce « l’impasse » et la « léthargie » dans lesquelles se trouve la Conférence du désarmement, il se félicite en revanche des 14 recommandations formulées par le Groupe de travail de la Commission sur les mesures de confiance concrètes dans le domaine des armes classiques, espérant qu’elles contribueront à atténuer les tensions, à prévenir et à résoudre les conflits et à favoriser le développement durable. C’est aussi dans cet esprit, a conclu le représentant, que le Maroc considère que le Traité sur le commerce des armes contribuera à la consolidation de la paix.
Mme ALICE GUITTON (France) a appelé les États Membres à condamner sans ambiguïté la « stratégie irresponsable » et les provocations de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) qui, a-t-elle relevé, a conduit trois essais nucléaires depuis 2016, intensifié ses tirs de missiles balistiques et diversifié ses vecteurs, le tout en violation totale de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité. Elle a insisté sur la nécessité de réaffirmer l’inviolabilité de la règle de non-prolifération et de ramener le régime de Pyongyang à la table des négociations. C’est en ce sens qu’elle a indiqué que la France appuyait pleinement les sanctions prises récemment par le Conseil de sécurité et l’Union européenne.
Concernant le conflit syrien, Mme Guitton a indiqué qu’un projet de résolution qui sera présenté cette année à la Première Commission rappellera que l’usage des armes chimiques est interdit, en accord avec le principe fondamental établi par la Convention sur les armes chimiques (CIAC). Au sujet du dossier nucléaire iranien, la représentante française a déploré les tirs répétés, par la République islamique d’Iran, de missiles capables de porter des armes nucléaires, ces activités constituant une violation de la résolution 2231 du Conseil de sécurité ainsi qu’une source de déstabilisation dans la région.
Mme Guitton a ensuite expliqué pourquoi la France n’avait pas pris part aux négociations ayant abouti à l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Ce traité n’est pas contraignant et ne crée pas de nouvelles obligations, a-t-elle dit. Pour la France, comme pour de nombreux autres États d’Europe et d’Asie, la dissuasion nucléaire continue de jouer un rôle central dans le maintien de la stabilité et de la sécurité régionales et internationales. La représentante a même jugé que le Traité n’était pas seulement une mesure inefficace sur la voie du désarmement nucléaire, mais qu’il sapait la crédibilité du régime de non-prolifération en établissant une norme concurrente de celles instaurées par le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et les accords de garanties généralisées de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Le Traité sape enfin la crédibilité du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et pourrait par conséquent compromettre les efforts entrepris pour permettre son entrée en vigueur, s’est inquiétée la représentante.
Mme Guitton a par ailleurs mis en garde contre la politisation excessive du débat au sein de la communauté du désarmement, qui conduit à l’affaiblissement de plusieurs instruments juridiques. Elle a appelé à relancer le dialogue constructif et la coopération dans le domaine du désarmement multilatéral. C’est dans cet esprit, a-t-elle dit, que la France, dans le cadre du TNP, continuera à œuvrer activement en faveur de l’entrée en vigueur du TICE, au lancement de négociations sur un traité interdisant les matières fissiles à des fins militaires, et au renforcement des mécanismes de vérification du désarmement nucléaire, entres autres.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a constaté que l’absence d’un régime juridiquement contraignant de garanties négatives de sécurité, assurant aux États non détenteurs contre l’emploi ou la menace d’emploi des armes nucléaires, autorisait de fait les États parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) dotés de l’arme nucléaire à poursuivre la modernisation de leurs arsenaux. Un tel instrument juridiquement contraignant, établi dans le cadre du Traité, représenterait un gain majeur pour l’ensemble des États non dotés et contribuerait ainsi tant au désarmement qu’à la non-prolifération, a-t-il estimé. Le représentant a ajouté que son pays, signataire du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, ne pouvait qu’appeler tous les États Membres à adhérer à cet instrument, cela pour réaffirmer leur engagement en faveur de la paix mondiale et de la stabilité. Nous soulignons l’importance de la constitution de zones exemptes d’armes nucléaires en tant que mesure de choix efficace pour parvenir à terme à un monde sans armes nucléaires, a également noté le représentant indonésien. Il a demandé aux États Membres de signer et ratifier le Protocole de Bangkok afin de créer une zone exempte d’armes nucléaires en Asie du Sud. L’Indonésie soumettra un projet de résolution à la Première Commission réitérant cet appel, et nous espérons que ce texte sera appuyé par le consensus le plus large possible, a-t-il ajouté.
M. NONTAWAT CHANDRTRI (Thaïlande) a souligné que le désarmement et le contrôle des armes est essentiel pour renforcer le progrès socioéconomique et le bien-être des peuples. Il a indiqué que son pays est toujours confronté aux défis que posent les vestiges explosifs de la guerre et a été un des premiers à signer et ratifier la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction. Depuis lors, la Thaïlande a détruit toutes les mines terrestres qu’elle avait en réserve et nettoyé plus de 84% des zones contaminées. Des « circonstances inattendues » ont cependant retardé ces efforts et la Thaïlande a soumis cette année une requête pour bénéficier d’un délai supplémentaire, a-t-il indiqué.
M. Chandrtri s’est aussi inquiété des tensions dans la péninsule coréenne et a exhorté toutes les parties concernées à travailler ensemble pour la reprise des pourparlers à six. Il a par ailleurs salué le rôle actif du Bureau des affaires de désarmement de l’ONU, ainsi que les efforts du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique pour promouvoir la coopération des États et des acteurs de la région dans ce dossier.
M. OSAMA ESMAIL ABOHEGAZY HASSAN (Égypte) a appelé à rendre universel le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et le Traité d’interdiction des armes nucléaires. Il s’est aussi inquiété de l’échec à créer une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient et a exhorté la Commission à prendre des décisions importantes en la matière. Le représentant s’et aussi soucié du fait qu’en 2015, la Conférence des Parties chargée de l’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires n’ait pas abouti à l’adoption d’un document final « à cause de trois États parties ».
Appelant à retrouver l’équilibre entre les trois piliers du TNP, il a regretté que les États dotés de l’arme atomique, bien que conscients de leur dangerosité, n’arrivent pas à respecter les termes de l’article 6 dudit traité. À ce titre, le représentant s’est félicite de la décision historique d’adopter le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et a assuré que cet instrument n’entre pas en contradiction avec le TNP. M. Hassan a eu aussi un mot sur le nucléaire civil, expliquant qu’il était du droit de tous les pays de développer un programme de ce type, à condition de le faire dans le cadre des conventions internationales.
Exprimant par ailleurs des réserves en ce qui concerne la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques, il a estimé que ce traité utilise des « définitions trop politiques ». Le représentant a également appelé à prévenir une course à l’armement dans l’espace, pour ensuite engager la communauté internationale à trouver un consensus sur des normes à adopter pour assurer la sécurité du cyberespace.
M. NAWAF SALAM (Liban) a salué l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, qu’il a qualifié d’historique car il rend illégales ces armes « abominables » de destruction massive. Ce nouveau traité renforce les normes de non-prolifération en vigueur, a-t-il noté avec satisfaction, soulignant qu’en dépit de l’échec, en 2015, de la Conférence des Parties chargée de l’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, le TNP demeure la pierre angulaire du désarmement nucléaire.
Le représentant a ensuite appelé à l’entrée en vigueur immédiate de la résolution de 1995 du TNP sur l’établissement d’une zone exempte d’arme nucléaire et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. À cet égard, il a rappelé qu’Israël était le seul pays de sa région à n’avoir pas adhéré au TNP et à continuer de faire peser une menace à la paix et à la sécurité dans la région en accumulant des armes nucléaires et en refusant de placer ses installations nucléaires sous le contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). D’autre part, M. Salam a indiqué que son gouvernement appelait à l’universalisation de la Convention sur les armes à sous-munitions, le Liban ayant, en 2006, subit de plein fouet les conséquences désastreuses de l’emploi de ces armes contre sa population. Enfin, il a souhaité la tenue d’un débat constructif sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, d’autant plus que 2017 marque le cinquantième anniversaire du Traité sur l’espace extra-atmosphérique.
M. SERHIY SHUTENKO (Ukraine) a rappelé que la décision historique prise par son pays de renoncer à ses armes nucléaires était basée sur des garanties claires remontant à 1994, en particulier le Mémorandum de Budapest signé par l’Ukraine, les États-Unis, le Royaume-Uni et la Russie. Il a insisté sur la pertinence de ce document à une époque marquée à la fois par les menaces de prolifération et par les efforts d’apaisement envers les États en recherche de capacités de dissuasion nucléaire. M. Shutenko a ensuite condamné l’agression militaire russe contre son pays qui a affaibli, selon lui, le système de contrôle existant sur les armes classiques. Il a également dénoncé le transfert de matériel militaire vers la Crimée et l’est de l’Ukraine, « ce qui ne déstabilise pas seulement la région, mais toute la sécurité européenne ». Les outils les plus importants pour combattre cette menace restent, selon lui, le Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre, ainsi que l’instrument international de traçage de ces armes.
M. Shutenko est ensuite revenu sur les conséquences humanitaires de l’agression militaire étrangère que subit son pays depuis quelques années. Il a déploré un nombre élevé de blessés parmi les civils, et en particulier les enfants. Des engins de guerre explosifs et des mines antipersonnel sont plantés par des groupes armés illégaux proches de la Russie, dans des zones résidentielles et sur les routes qui les relient, en totale violation des conventions internationales, a-t-il dénoncé.
M. VINICIO MATI (Italie) a affirmé que le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) est le seul cadre légal réaliste pour parvenir à un monde sans armes nucléaires. Cet objectif doit être poursuivi étape par étape, sur la base de mesures effectives, comme l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), qui est « cruciale ». En attendant, M. Mati a appelé tous les États, y compris la République populaire démocratique de Corée, à respecter le moratoire sur les essais nucléaires. Le représentant a également appelé à démarrer au plus vite, sous l’égide de la Conférence du désarmement, les négociations autour du traité relatif aux matières fissiles, pour ensuite faire part de son impatience de voir des résultats concrets déboucher des travaux du Groupe préparatoire d’experts de haut niveau.
Après avoir réitéré son soutien à la tenue d’une conférence pour faire du Moyen-Orient une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive, M. Mati a condamné l’usage des armes chimiques. La condamnation n’est cependant pas suffisante si l’on veut rester crédible et les responsables doivent rendre des comptes, a-t-il toutefois souligné, avant d’apporter son appui aux activités du Mécanisme d’enquête conjoint de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et de l’ONU. Il s’est par ailleurs félicité que la Conférence du désarmement ait adopté des mesures de confiance, saluant « un résultat significatif ».
M. SARHAD FATAH (Iraq) a vu dans la ratification de tous les instruments internationaux de désarmement et d’élimination des armes nucléaires un moyen efficace, pour la communauté internationale, d’arriver à cet objectif. En la matière, il a préconisé une approche multilatérale, estimant qu’elle favorise le consensus et l’efficacité. C’est aussi pourquoi, a expliqué le représentant, l’Iraq a voté en faveur de la résolution de l’Assemblée générale destinée à donner un élan aux efforts de désarmement multilatéral. Il a aussi souligné le rôle central de la Conférence du désarmement en tant qu’organe unique de négociation des instruments de désarmement, regrettant toutefois qu’aucune décision sur un ordre du jour « équilibré et exhaustif » n’ait été adoptée.
Le représentant de l’Iraq a ensuite rappelé l’importance de la création de zones exemptes d’armes nucléaires, notamment au Moyen-Orient. Préoccupé par l’échec des efforts pour créer cette zone, le représentant a réaffirmé que cet objectif passerait forcément par la dénucléarisation d’Israël. Il a appelé toutes les parties citées dans l’annexe 2 du Traité sur l’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) à ratifier ledit traité pour aboutir à la création de cette zone.
Le représentant de l’Iraq a par ailleurs signalé que les armes classiques et les mines antipersonnel continuent à faire de nombreuses victimes, notamment dans son pays où « la stratégie criminelle de l’EIIL » l’a conduit à planter des mines et des engins explosifs afin de ralentir l’avancée de l’armée iraquienne mais aussi de nuire aux civils. Il a ensuite remercié la communauté internationale pour l’aide qu’elle a apportée à l’Iraq pour faire face à cette situation.
M. JULIO CÉSAR ARRIOLA RAMÍREZ (Paraguay) a indiqué que son pays avait renforcé la transparence en matière de dépenses militaires, et qu’il détruit périodiquement du matériel de guerre excédentaire ou obsolète, conformément aux engagements pris au titre de plusieurs conventions de l’ONU sur les armes classiques. Le Paraguay s’efforce également de s’ajuster aux normes internationales pour participer plus activement à la lutte antiterroriste et contre le crime organisé transfrontalier. Le représentant a aussi indiqué que son pays avait ratifié, cette année, le Traité sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, et adopté un plan national de cyber sécurité pour parvenir à un cyberespace sûr et résilient.
Soulignant ensuite que le processus de désarmement nucléaire doit être transparent et irréversible, il a condamné les essais conduits par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) « qui violent le droit international ». Pour le représentant, la Première Commission doit réaffirmer l’efficacité des zones exemptes d’armes nucléaires, et, dans ce contexte, les États dotés d’armes nucléaires doivent retirer leurs « déclarations interprétatives » au sujet du Traité de Tlatelolco visant à créer une telle zone en Amérique latine et dans les Caraïbes.
Pleinement consciente de l’ampleur de la menace liée à la prolifération des armes légères et de petit calibre (ALPC), Mme CHRISTINE KALAMWINA (Zambie) a fait part de la détermination de son pays à adhérer aux principaux instruments internationaux existants dont l’objectif est d’endiguer ce fléau, notamment le Programme d’action des Nations Unies en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects et l’Instrument international visant à permettre aux États de procéder à l’identification et au traçage rapides et fiables des ALPC illicites. À ses yeux, ces différents instruments internationaux, continentaux et régionaux doivent permettre de donner corps à l’engagement de la communauté internationale en faveur de la lutte contre les individus et groupes impliqués dans le commerce illicite et la prolifération des ALPC.
M. TALAL ALFASSAM (Koweït) a exhorté la communauté internationale à trouver un consensus sur la question des armes nucléaires en respectant les trois piliers du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). « Nous avons connu ces 10 dernières années des phases irrégulières de volonté politique sur la question du désarmement, notamment de la part les États dotés de l’arme nucléaire », a-t-il notamment commenté. Préoccupé par la situation que connaît la péninsule coréenne, le représentant a par ailleurs appelé toutes les parties à faire preuve de retenue « pour le bien de la paix mondiale ».
Exprimant ensuite l’attachement de son pays à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen Orient, il a regretté qu’Israël refuse toujours d’adhérer au TNP, de signer les accords de garantie de l’AIEA et de soumettre ses installations nucléaires à l’examen de cette agence.
M. GORGUI CISS (Sénégal) a constaté, en ce qui concerne la prolifération des armes légères et de petit calibre, que la sixième réunion biennale d’examen de la mise en œuvre du Programme d’action, tenue en juin 2016, avait permis aux États Membres de faire le bilan des efforts accomplis, et d’identifier les mesures innovantes permettant de rendre efficiente la lutte contre le commerce illicite et la prolifération des armes légères et de petit calibre. Toutefois, a ajouté le représentant, l’absence de consensus quant à l’éventuelle intégration de la question des munitions et de leur gestion dans le Programme d’action fut déplorée par plusieurs délégations dont le Sénégal.
De même, a poursuivi le délégué sénégalais, la plupart des États parties ont regretté la non-référence explicite au Traité sur le commerce des armes. En outre, il a appelé tous les pays qui n’ont pas encore signé ce traité à le faire le plus rapidement possible. « Il nous faudra également œuvrer à la réduction du transfert illicite, de la circulation et de la fabrication des armes légères et de petit calibre dont la dissémination incontrôlée reste préoccupante dans plusieurs régions du monde », a estimé le représentant.
M. JORGE SKINNER-KLÉE (Guatemala) a qualifié le Traité d’interdiction des armes nucléaires d’étape fondamentale sur la voie de l’établissement d’un monde sans armes nucléaires. Il complète, a-t-il considéré, les objectifs du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) en renforçant les piliers fondamentaux: non-prolifération nucléaire, désarmement et usages pacifiques de l’énergie nucléaire. Le représentant a également assuré que son pays cherchait à promouvoir l’universalité et le plein respect du TNP, qui reste, selon lui, la pierre angulaire de la non-prolifération et le meilleur moyen de rendre le monde plus sûr. Il a en outre rappelé l’engagement de son pays en faveur du désarmement sous tous ses aspects, en témoigne, a-t-il précisé, la ratification du Traité sur le commerce des armes par son pays. Le Guatemala est aujourd’hui une nation pacifique, attachée tout particulièrement au renforcement de la régulation internationale de la circulation et de l’usage illégal des armes, qui est un moyen efficace de réduire le niveau des violences armées au sein des populations civiles, a-t-il encore déclaré.
M. TALAL AL-KHALIFA (Qatar) a déclaré qu’il n’a jamais été aussi urgent de débarrasser le monde des armes nucléaires et de destruction massive et a appelé tous les États parties à respecter le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), pierre angulaire de la non-prolifération et du désarmement nucléaire. Il s’est inquiété du peu de progrès réalisés par le Moyen Orient en la matière, regrettant par ailleurs l’échec, en 2015, de la Conférence des Parties chargée de l’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.
Rebondissant sur la question de la cybersécurité, il a affirmé que « la guerre numérique est devenue une réalité que nous ne pouvons ignorer ». Selon lui, l’absence de juridiction internationale pour réguler ce domaine et l’absence de criminalisation posent des problèmes pour lutter efficacement contre les actes de piraterie informatique. Sur le plan national, il a par ailleurs indiqué que le
Comité national du Qatar avait interdit certains types d’armes, et que des campagnes de sensibilisation sur les dangers des armes de destruction massive ont été adressées aux jeunes générations. Il a ensuite appelé la Conférence du désarmement à adopter un programme de travail équilibré qui réponde aux besoins de tous les pays.
M. TIJJANI MUHAMMAD BANDE (Nigéria) a souligné l’importance de disposer d’un front diplomatique commun pour répondre de manière unie à la menace croissante que fait peser à la paix et à la sécurité internationales la non-régulation des armes classiques. À cet égard, a-t-il dit, le Nigéria se réjouit des résultats obtenus lors de la Troisième Conférence des États parties au Traité sur le commerce des armes, organisée le mois dernier à Genève. Les Parties au Traité doivent prendre la mesure de l’intensification des risques terroristes et de la prolifération de groupes d’insurgés dans de nombreuses régions du monde, y compris au Nigéria, a-t-il ajouté. Concernant le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, le représentant a expliqué que son pays avait participé activement aux négociations sur cet instrument, convaincu que les conséquences humanitaires d’une détonation nucléaire, délibérée ou accidentelle, empêcheraient l’humanité de se relever d’une telle catastrophe. Par ailleurs, il a salué l’efficacité des zones exemptes d’armes nucléaires, plaidant pour la création d’une zone de ce type au Moyen-Orient.
M. NOBUSHIGE TAKAMIZAWA (Japon) a déclaré qu’étant le seul pays à avoir vécu l’expérience traumatisante d’une dévastation nucléaire, le Japon demeurait un promoteur actif du désarmement nucléaire et de la non-prolifération. Après avoir jugé essentiel de revitaliser les mesures pratiques et concrètes de désarmement nucléaire et de non-prolifération, il s’est attardé sur les récents essais nucléaires et les tirs de missiles balistiques effectués par la République populaire démocratique de Corée (RPDC). Nous condamnons dans les termes les plus fermes ces actes qui constituent des violations flagrantes des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, a-t-il dit, exhortant les autorités de Pyongyang à cesser immédiatement ses activités nucléaires et balistiques, à s’abstenir de toute nouvelle provocation et à abandonner tous ses programmes d’armes nucléaires. Il a aussi appelé la communauté internationale à renforcer les mesures robustes prises collectivement contre cette menace à la sécurité régionale et internationale.
Le représentant a par ailleurs indiqué que son pays présenterait à la Première Commission des projets de résolution sur le renouvellement de l’engagement des États vers l’élimination totale des essais nucléaires, sur le Traité sur le commerce des armes et sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC).
Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a dénoncé les déclarations faites à l’encontre de sa légitime défense. Il a estimé que la communauté internationale ne prend pas en compte la situation en péninsule coréenne, soulignant que le programme nucléaire de son pays vise seulement à dissuader toute attaque américaine. « Tant que les États-Unis persisteront dans leur agressivité, nous ne bougerons pas d’un iota », a-t-il lâché, regrettant qu’aucun intervenant n’ait parlé des menaces américaines qui pèsent sur la RPDC. Quant à la France, a-t-il ajouté, si elle pense que les armes nucléaires sont si dangereuses, elle devrait donner l’exemple en éliminant les siennes. Le représentant a aussi affirmé que le Japon n’était pas qualifié pour critiquer la politique de dissuasion de la RPDC, ce pays étant, selon lui, « sous le parapluie nucléaire américain » ainsi qu’« une base avancée des États-Unis ». Il a aussi accusé le Japon de disposer de l’uranium et du plutonium « qui lui permettraient de disposer d’un arsenal nucléaire s’il le décidait ».
Le représentant de la Syrie a condamné la « campagne d’allégations trompeuses » que fait circuler la France à propos de la dernière attaque chimique qui a eu lieu dans la ville syrienne de Khan Cheikhoun, y voyant la preuve de l’implication de la France dans ce crime. Il a aussi affirmé que la France entretient des liens avec l’EIIL et le Front el-Nosra, et qu’elle approvisionne les groupes terroristes en armes classiques et autres.
À son tour, le représentant des États Unis a expliqué qu’aucun système de défense américain ne menace des forces stratégiques russes ou chinoises. Des exercices militaires de routine ne sont pas équivalents à des agressions qui violent le droit international, a-t-il souligné. Il a ensuite conseillé au délégué de la RPDC de trouver de nouveaux arguments, affirmant que les États-Unis ne menacent pas son pays. Ce n’est pas un problème entre nos deux pays, mais un problème de sécurité internationale posé par les agissements de la RPDC, a-t-il dit.
Le représentant du Japon a lui aussi rejeté les propos de la RPDC, notant que ce sont les essais nucléaires effectués par ce pays qui ont poussé le Japon à prendre des mesures de sécurité spéciales. La RPDC doit entendre les condamnations de la communauté internationale et respecter les résolutions du Conseil de sécurité, a-t-il exhorté. Il a par ailleurs assuré que son pays utilisait à des fins pacifiques ses réserves de plutonium.
Reprenant la parole, le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a rejeté les allégations des États-Unis, « un pays qui nous menace avec l’arme nucléaire depuis 70 ans ». Si nous cherchons à développer une force nucléaire nationale, ce n’est qu’à des fins de dissuasion afin d’éviter notamment une invasion militaire, a-t-il insisté. Enfin, il a répondu à son homologue japonais que son pays n’avait aucune leçon à donner au sien en matière de transparence.
Rétorquant, le représentant des États-Unis a assuré que plus personne de croyait « aux mensonges de la Corée du Nord ». Il a affirmé que le régime de Pyongyang déstabilise non seulement la région coréenne, mais aussi les États-Unis et les autre pays qui sont à portée de tir de ses missiles. « Nous n’acceptons pas les provocations de ce régime », a-t-il martelé.