Comité de maintien de la paix: le débat général s’achève sur des dissensions sur la nécessité et le bien-fondé de l’usage de la force pour protéger les civils
Plus d’une cinquantaine d’États Membres sont intervenus au cours de ces deux jours du débat général pour souligner un certain nombre de questions majeures qui devraient être au centre de la session de fond de 2016 du Comité spécial des opérations de maintien de la paix, dit « Comité des 34 » (C34), avec, aujourd’hui, des avis divergents sur la place de la force armée pour la protection des civils et sa contribution à l’avènement d’une paix durable.
« La tâche centrale du maintien de la paix est de sauver des vies », a rappelé le représentant du Rwanda auprès de ses pairs. « Le Rwanda est conscient de ce qui peut arriver quand cette tâche n’est plus prioritaire », a-t-il relevé, en invitant la communauté internationale à œuvrer afin que l’histoire ne se répète plus, référence à peine voilée au génocide de 1994 qui a fait près d’un million de morts dans son pays.
Néanmoins, a tempéré le délégué de l’Équateur, la notion de protection des civils ne doit en aucun cas conduire à une modification des paramètres établis en matière d’usage de la force par les missions de la paix, et ne devrait pas non plus s’ingérer dans les affaires intérieures de pays tiers. Lui emboîtant le pas, son homologue de la Fédération de Russie a souligné que la protection des civils était une tâche relevant en premier des États. C’est une prérogative première du gouvernement hôte, a corroboré le représentant de la République arabe syrienne.
D’autres intervenants ont répliqué qu’il était possible de promouvoir davantage des stratégies qui n’impliquent pas la force armée pour protéger les civils dans le cadre des missions de l’ONU, rappelant ainsi les principes de la Charte des Nations Unies qui promeuvent davantage les moyens pacifiques. En effet, pour nombre de pays, dont l’Argentine, l’usage de la force dans les opérations de maintien de la paix doit rester exceptionnel.
Le principe selon lequel il ne faut utiliser la force qu’en cas d’auto-défense n’est plus viable, a pour sa part réagi le délégué du Malawi, expliquant que ce principe conduirait les Casques bleus à se concentrer davantage sur leur propre sécurité en cas de menace potentielle pour les civils.
Par ailleurs, le représentant du Nigéria a plaidé pour l’harmonisation de la protection des civils, étant donné que les composantes militaires, policières et civiles des missions de la paix ont des approches différentes d’appréhender et de mettre en œuvre cet aspect de leur mandat. La protection des civils doit intégrer toutes les phases de la préparation, de l’installation et du fonctionnement des missions, et des indicateurs clairs doivent y être liés, a estimé le délégué des États-Unis. Il a en outre fait part de son émotion face aux nouveaux rapports, venant de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), sur des cas d’abus sexuels sur des civils datant de 2014 et 2015. « La politique de tolérance zéro ne veut rien dire si nous n’agissons pas », a-t-il affirmé, appelant l’ONU à retirer les contingents qui seraient convaincus de telles pratiques.
Les intervenants sont également revenus sur la question de l’introduction de nouvelles technologies dans les missions de maintien de la paix, notamment les drones. Saluant leur apport pour protéger les troupes et les civils, ils ont néanmoins souhaité que soit menée une consultation élargie à tous les États Membres pour aplanir les incidences éthiques et légales de leur utilisation.
Notant que les femmes ne représentent que 3% des forces militaires et 9% des effectifs de police des missions de la paix, de nombreuses délégations ont plaidé pour qu’elles soient davantage représentées au sein des missions, y compris à des postes de responsabilité.
En outre, la coopération entre l’ONU et les organisations régionales a été maintes fois saluée. L’Observateur de l’Union africaine a ainsi rappelé que plus de 100 000 soldats de la paix de l’Union africaine et de l’ONU sont à pied d’œuvre sur le continent. Il a noté que le problème majeur que son organisation rencontre quand elle déploie des troupes est la sécurisation d’un financement durable pour leur prise en charge. Le représentant de la Chine a pour sa part souhaité que la communauté internationale approfondisse sa coopération avec les organisations régionales africaines, afin de les « aider à résoudre leurs problèmes à leur manière ».
Le Comité spécial des opérations de maintien de la paix, qui se réunit désormais en consultations officieuses, tiendra une séance plénière dans l’après-midi du vendredi 11 mars.
Débat général (A/70/95, A/70/357, A/70/579 et A/70/579/Add.1)
M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a rappelé que son pays faisait partie du groupe informel de coordination de positions appelé « ABUM » et qu’il recherche à ce titre des solutions alternatives aux différentes questions traitées dans le rapport du Groupe indépendant de haut niveau sur le maintien de la paix. Au chapitre de la sécurité, il a souligné l’importance de l’utilisation des nouvelles technologies, mais recommandé que le Secrétaire général continue à consulter les États Membres sur cette question. Sur les questions de « conduite et discipline », il a partagé l’idée qu’il fallait renforcer les mesures de lutte contre l’exploitation et les abus sexuels, conformément à la politique de tolérance zéro adoptée par l’ONU. Il a indiqué que son pays avait fait beaucoup de propositions au chapitre des « stratégies pour les opérations de maintien de la paix complexes », appuyant notamment les appels lancés par le Groupe indépendant et le Secrétaire général pour que soient renforcées les capacités des Nations Unies en matière de prévention et de médiation.
Une autre question importante pour l’Argentine est l’inclusion d’une « composante droits de l’homme » dans les missions sur le terrain. Le représentant a ensuite relevé les divergences de position dans les débats du C34 sur la protection des civils dans les opérations de maintien de la paix. Il a recommandé de ne pas aborder cette question uniquement sous l’angle militaire, mais aussi sous son aspect politique et humanitaire. L’usage de la force dans les opérations de maintien de la paix doit rester exceptionnel, a-t-il rappelé, en soulignant les efforts concertés nécessaires de la part de toute la mission pour assurer la protection des civils. Il a aussi prôné l’adoption de stratégies non armées de protection des civils dans les zones d’action des missions de paix. Enfin, sur le plan financier, il a rappelé la nécessité d’indemniser toutes les catégories de personnel en cas de décès ou d’incapacité, appuyant en cela la proposition du Groupe indépendant, reprise par le Secrétaire général, de créer un compte spécial pour le financement des missions politiques spéciales.
Mme LOURDES ORTIZ YPARRAGUIRRE (Philippines) a déploré la montée d’attaques meurtrières, d’enlèvements et d’autres actes hostiles menés contre les personnels des missions de maintien de la paix. Elle a noté que le Secrétaire général a entrepris des démarches afin de renforcer la sécurité des personnels onusiens, et que le syndicat du personnel a également appelé à la création d’un groupe de haut niveau chargé de mener une étude sur l’évolution des menaces qu’encoure le personnel de l’Organisation. Elle a pour sa part affirmé qu’au vu de ces nouveaux défis inhérents aux missions de maintien de la paix, il serait opportun d’améliorer la sécurité des soldats de la paix et des personnels des missions.
En ce qui concerne la protection des civils, Mme Yparraguirre a estimé que le recours à la force ne se justifiait qu’en cas de légitime défense ou dans le cadre de la défense du mandat de la mission. Pour protéger les civils, elle a prôné une approche globale qui comprend des ressources adéquates, du soutien logistique nécessaire et un mandat clairement défini et réalisable. Elle a précisé que des stratégies qui n’impliquent pas la force armée devraient être privilégiées pour la protection des civils par l’ONU. Soulignant que son pays soutenait la politique de tolérance zéro en cas d’exploitation et d’abus sexuels menés par des soldats de la paix à l’encontre de civils, elle a affirmé que les Philippines tenaient ses troupes responsables de leurs actes. Elle a aussi souhaité que les pays contributeurs de troupes soient pleinement engagés dans le processus de prise de décisions concernant les missions de maintien de la paix. La représentante a également plaidé pour l’introduction de l’approche genre dans tous les aspects des activités des missions de maintien de la paix, notamment dans le cadre des formations précédant le déploiement des personnels. Elle s’est félicitée du fait que les Philippines ont 10% de femmes au sein de leur contingent déployé en Haïti, soit 16 sur 165 soldats de la paix. Elle a aussi salué que le principal négociateur de l’accord de paix, signé le 27 mars 2015, entre le Gouvernement philippin et les rebelles du Front de libération islamique Moro soit une femme.
M. MEHDI REMAOUN (Algérie) a prédit une session riche en enseignements pour le C34 cette année, ses travaux devant transposer les rapports techniques sur les opérations de maintien de la paix du Groupe indépendant de haut niveau sur le maintien de la paix et du Secrétaire général. Il a rappelé que le contexte dans lequel évoluent ces opérations est marqué par un grand nombre de menaces. Il a estimé que les technologies modernes sont utiles à ces opérations, mais souhaité qu’elles soient utilisées dans le plein respect de la Charte des Nations Unies et des lois nationales et internationales. Le représentant a également insisté sur la transparence et les consultations à mener avec les pays voisins dans l’utilisation de ces technologies. Par ailleurs, il a demandé au Conseil de sécurité de doter les opérations militaires d’un mandat clair lorsqu’elles sont déployées par les États ou les organisations régionales aux côtés des opérations onusiennes. En conclusion, il a rappelé que son pays avait toujours préféré les solutions politiques. Il a aussi signalé le lancement du centre Afripol, dans le cadre de l’Union africaine, dont le siège a été inauguré en décembre dernier en Algérie.
M. DIEGO MOREJON PAZMINO (Équateur) a plaidé pour une collaboration accrue entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat de l’ONU et les pays contributeurs de troupes. Il a rappelé que cette exigence figurait dans le rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix des Nations Unies, intitulé « Unissons nos forces pour la paix: privilégions la politique, les partenariats et l’action en faveur des populations ». Il a aussi rappelé que le C34 était le seul organe des Nations Unies habilité à mener des réflexions sur tous les aspects des opérations de maintien de la paix, soulignant aussi que ses décisions sont prises à l’unanimité.
Le représentant a en outre affirmé qu’une bonne définition des mandats des missions de maintien de la paix permettrait de ne pas faire d’amalgame et de ne pas orienter les activités des missions vers des buts politiques inavoués. M. Pazmino a aussi noté que la notion de protection des civils ne doit en aucun cas conduire à une modification des paramètres établis en matière d’usage de la force par les missions de la paix et ne devrait pas non plus servir de prétexte pour justifier des ingérences dans des affaires internes de pays tiers. Dans ce contexte, il a souligné l’importance pour les missions de maintien de la paix de protéger les enfants. Le représentant a par ailleurs estimé que l’introduction de nouvelles technologies dans les missions de maintien de la paix, y compris les drones, devrait se faire après une consultation élargie à tous les États Membres, car, a-t-il précisé, leur usage revêt un aspect éthique et légal à prendre en considération. Il a aussi souhaité que les décisions prises par le Conseil de sécurité sur la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) se fassent en collaboration avec le pays hôte et les pays contributeurs de troupes.
Mme CARLA RIVERA (El Salvador) a rappelé que son pays avait commencé à envoyer des contingents militaires dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU à partir de 1956 et des effectifs de police à partir de 2004. Après avoir dénombré le personnel envoyé dans chaque mission, elle a indiqué que la participation d’El Salvador à ces opérations avait augmenté de 112% en 2015 par rapport à 2014. Nous appuyons la politique du Secrétaire général de tolérance zéro pour les actes d’abus sexuels, a-t-elle affirmé, en reconnaissant la responsabilité partagée des États Membres et des Nations Unies sur cette question. C’est pourquoi, a-t-elle expliqué, son pays a adopté une loi pour que les délits commis par son personnel déployé dans les missions comparaisse devant les tribunaux d’El Salvador.
Le C34 reste le seul organe habilité à revoir les opérations de maintien de la paix sous tous ses aspects, a continué Mme Rivera. Elle a demandé davantage de consultations sur ces questions entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat de l’ONU, les pays hôtes régionaux et les pays fournisseurs de contingents. Il faut établir un cadre permettant de revoir ces opérations et leur assurer une plus grande efficacité, a-t-elle expliqué. La stratégie de sortie, par exemple, suppose une bonne communication avec les acteurs impliqués. Elle a aussi salué l’utilisation des nouvelles technologies dans les missions, souhaitant un examen continu approfondi des recommandations du groupe de haut niveau à cet égard. Elle a aussi condamné les abus sexuels commis en RDC, avant d’appuyer les initiatives qui incluent la participation des femmes dans les contingents. Enfin elle a rappelé l’importance de verser aux pays fournisseurs de contingents les remboursements qu’ils leur sont dus.
M. ANTHONY BOSAH (Nigéria) a fait observer que les missions multidimensionnelles de maintien de la paix ne sont pas capables de faire appliquer leur mandat en raison surtout par manque d’expertise. Pour y remédier, il a recommandé la mise en œuvre rapide du rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix des Nations Unies, proposant en particulier l’Institution d’un module de formation des personnels de maintien de la paix sur la coopération. Le représentant a également estimé que la coopération entre l’ONU et les organisations régionales dans le domaine du maintien de la paix doit aller au-delà de l’approvisionnement de ressources, estimant que les nouveaux défis des missions de maintien de la paix nécessitaient l’usage de technologies modernes capables d’améliorer la protection des personnels des missions et des civils et la communication sur le terrain des opérations. Il a émis l’espoir que le débat sur le bien-fondé de ces technologies ne se limite pas uniquement aux risques qu’elles représentent en matière de violation de certains principes de la Charte des Nations Unies, comme celui du respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté des États.
M. Bosah a par ailleurs plaidé pour l’harmonisation de la protection des civils compte tenu du fait que les composantes militaires, policiers et civils des missions de la paix ont des approches différentes d’appréhender et de mettre en œuvre cet aspect de leur mandat. Il a ainsi proposé qu’il y ait une coordination au sein des missions en ce qui concerne la protection des civils, notamment à travers des formations adaptées. Il a par ailleurs plaidé pour un plus grand engagement des femmes dans les opérations de maintien de la paix, déplorant qu’elles ne représentent que 3% des forces militaires et 9% des effectifs de police. Il a aussi proposé que plus de femmes accèdent à des postes de décision au sein des missions de maintien de la paix.
M. COURTENAY RATTRAY (Jamaïque) a invité à faire le bilan de tout ce que l’ONU a pu réaliser en termes de paix et de sécurité dans le monde, pendant ses 70 années d’existence. Nous pouvons en même temps, a-t-il ajouté, nous demander dans quelle mesure l’Organisation a pu répondre efficacement à des conflits complexes. S’appuyant sur les constatations figurant dans les rapports soumis au Comité spécial, il a remarqué une certaine insatisfaction quant aux réalisations obtenues par rapport aux attentes. C’est une tendance inquiétante, a-t-il dit, notant que l’évolution des conflits peut aller plus vite que la capacité des Nations Unies à y répondre. À ce sujet, il a mis l’accent sur la complexité et l’instabilité croissante des environnements dans lesquels doivent évoluer les opérations de maintien de la paix, s’inquiétant notamment de la multiplication des attaques perpétrées contre les Casques bleus, situation qui exige à son avis une plus grande cohérence dans la planification et la gestion des opérations.
En ce qui concerne la protection des civils, il a rappelé que si les États ont la responsabilité première dans ce domaine, l’ONU doit agir de manière résolue pour formuler et mettre en œuvre les mandats de protection des civils. Il a salué à cet égard le mécanisme mis en place au sein de la Mission de l’ONU pour la stabilisation de la République démocratique du Congo (MONUSCO). Le représentant a pris acte des avantages des stratégies de protection non armées et a souhaité voir se développer des directives en matière de protection des civils, ainsi qu’une plateforme de sensibilisation des communautés locales. Quant aux nouvelles technologies, il a souhaité les explorer davantage et coopérer avec les pays fournisseurs de contingents pour les incorporer à la formation dispensée avant le déploiement des Casques bleus.
M. RIADH BEN SLIMAN (Tunisie) a souhaité que la présente session du Comité spécial des opérations de maintien de la paix (C34) soit l’occasion d’examiner en profondeur les deux rapports récemment publiés sur la question des opérations du maintien de la paix, notamment le rapport du Secrétaire général portant sur les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau, et le Rapport du Groupe indépendant chargé d’étudier les opérations de paix des Nations Unies, intitulé « Unissons nos forces pour la paix: privilégions la politique, les partenariats et l’action en faveur des populations ». Au vu de l’augmentation du nombre des victimes parmi les personnels de maintien de la paix, il a souhaité que les troupes onusiennes engagées dans les missions de maintien de la paix reçoivent des équipements adéquats pour assurer leur protection. Il a aussi souhaité que les auteurs d’abus sexuels commis par les membres des missions de maintien de la paix soient traduits devant les tribunaux de leur pays.
M. Sliman a en outre exprimé l’espoir que les pays contributeurs de troupes soient davantage associés au processus de prise de décisions concernant les missions de maintien de la paix, ce qui devrait permettre de renforcer l’efficacité desdites missions. Il a aussi salué les efforts consentis par l’Organisation en ce qui concerne le remboursement des pays contributeurs de troupes et plaidé pour le renforcement de la collaboration entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales, soulignant à ce sujet que l’Union africaine jouait un grand rôle pour mettre fin aux conflits sur le continent.
M. OLEKSIY ILNYTSKYI (Ukraine) s’est dit favorable aux recommandations du Groupe indépendant de haut niveau sur le maintien de la paix visant à faire des progrès dans ces opérations sur quatre volets. Il a salué la pertinence de l’initiative de l’Ukraine en faveur du renforcement des capacités, notamment en ce qui concerne le transport aérien. Il a par ailleurs souhaité que tout soit fait pour réduire les attaques contre les opérations de maintien de la paix, en consacrant les ressources nécessaires à la sécurité du personnel onusien, conformément à la résolution 59/276 du Conseil de sécurité. Nous partageons l’avis du Secrétaire général lorsqu’il souligne que les mandats confiés aux missions ne correspondent plus à la nature des conflits internes, interétatiques, régionaux et sectaires qu’elles rencontrent. Le représentant a aussi constaté une tendance préoccupante de « guerre hybride », où un agresseur étatique nie ses actions militaires illicites en essayant de faire peser les responsabilités sur une partie au conflit.
Nous partageons la position du Groupe indépendant qu’une paix durable est réalisable par des solutions pacifiques et non militaires, a poursuivi le représentant. Mais les Nations Unies ne réagissent pas assez rapidement pour appuyer une telle solution, a-t-il déploré, citant le cas des accords de Minsk que le Conseil de sécurité a salué, sans que l’ONU réagisse promptement pour assurer leur mise en œuvre. Il faut également, a ajouté le représentant, mieux utiliser le potentiel des missions d’évaluation sur le terrain afin de fournir des observations objectives au Conseil de sécurité. En tant que membre non permanent du Conseil de sécurité, il a souhaité que ces visites sur le terrain soient organisées plus souvent. Il a salué la coopération entre les Nations Unies et l’Union africaine, avant de recommander aussi une coopération plus étroite avec l’OSCE. Il a par ailleurs regretté que la recommandation du Secrétaire général de créer un bureau d’appui en Ukraine pour aider la mission de surveillance de l’OSCE n’ait pas été mise en pratique. Depuis l’indépendance de notre pays, 34 000 Ukrainiens ont participé aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, s’est félicité le représentant, en précisant que son pays était aussi un des principaux fournisseurs d’hélicoptères pour ces opérations.
Mme CRISTINA CARRION (Uruguay) a fait part de l’attachement de son pays aux opérations de maintien de la paix, précisant que l’Uruguay comptait pas moins de 1 536 personnels de maintien de la paix dans diverses opérations de cette nature. Elle s’est félicitée que son pays soit le premier contributeur de contingents féminin d’Amérique latine, et a salué l’engagement croissant des femmes dans les opérations de maintien de la paix. Elle a par ailleurs émis le vœu que le processus de révision de la structure de paix et de sécurité des Nations Unies se fasse dans une perspective globale et cohérente et souhaité que le rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix des Nations Unies serve de document de base aux travaux de la présente session.
Elle a ensuite indiqué que son pays accordait une importance majeure à la protection des civils, et a relevé que ce mandat exige, de la part des effectifs, l’engagement à se tenir prêt à agir quand l’intégrité physique des civils est menacée. La représentante a en outre estimé que la coopération triangulaire entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat de l’ONU et les pays contributeurs de troupes devait être renforcé, afin que les décisions en matière de maintien de la paix soient prises de manière éclairée. Mme Carrion a ensuite noté que l’Uruguay s’inquiétait de voir augmenter le nombre d’attaques contre les personnels des missions de la paix et a invité les pays hôtes à poursuivre systématiquement les auteurs de tels actes en justice.
M. TIGRAN SAMVELIAN (Arménie) a indiqué que l’engagement de son pays dans le domaine des opérations de maintien de la paix s’était élargi tant sur le plan géographique que sur le plan quantitatif et qualitatif. L’Arménie, a-t-il précisé, a commencé à développer ses capacités dans ce domaine en 2001. Ses Casques bleus participent à la Mission de l’ONU au Kosovo depuis 2004, a-t-il précisé, avant de citer les autres opérations où sont déployés les soldats arméniens. Le Président de l’Arménie a également participé au Sommet sur le maintien de la paix organisé à New York le 28 septembre 2015, lui permettant d’évoquer les nouveaux engagements de son pays dans ce domaine. En outre, en tant que Président de l’Organisation du Traité pour la sécurité collective, mon pays a organisé un exercice militaire conjoint avec les forces de maintien de la paix des États parties à ce Traité, a indiqué le représentant, qui a par ailleurs recommandé de prendre davantage de mesures collectives pour consolider le système de maintien de la paix. Il a salué à cet égard le rôle du C34, seul forum des Nations Unies chargé d’examiner la question des opérations de maintien de la paix sous tous ses aspects.
M. IHAB HAMED (République arabe syrienne) a précisé que des principes de la Charte des Nations Unies tels que le respect de la souveraineté des États et la non-ingérence dans les affaires internes d’États doivent guider la création et l’établissement des mandats des opérations de maintien de la paix. Le Comité spécial des opérations de maintien de la paix est le seul organe compétent pour examiner des questions relatives aux opérations de maintien de la paix, a-t-il estimé. Il a aussi affirmé que la responsabilité de protéger est une prérogative première du gouvernement hôte, en précisant toutefois que ce principe de protection ne devait servir de prétexte pour s’ingérer dans les affaires intérieures de pays tiers. Il a ensuite expliqué que l’occupation israélienne des territoires arabes était la raison justifiant la présence de trois missions de la paix au Moyen-Orient et a appelé l’ONU à faire pression sur Israël afin qu’il cesse ses actions illégales, de manière qu’à terme, les personnels des missions de la paix du Moyen-Orient puissent rentrer paisiblement chez eux.
M. DURGA BHATTARAI (Népal) a rappelé le nombre important de personnel envoyé par son pays dans les opérations de maintien de la paix, indiquant que 5 300 Népalais étaient aujourd’hui déployés dans 15 missions. Cela fait du Népal l’un des plus grands pays fournisseurs de forces militaires et de police aux opérations de paix de l’ONU, a-t-il dit. Il a aussi fait remarquer que le C34 est le seul organe des Nations Unies habilité à l’ONU à revoir les opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects et à élaborer des politiques dans ce domaine. Il a demandé d’étudier attentivement les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau sur le maintien de la paix et celles du Secrétaire général pour en tirer le plus grand parti.
Le nombre de zones de tension ne fait qu’augmenter et les forces de l’ONU sont insuffisantes, a-t-il noté, en appelant les États Membres à faire front de manière unie pour affronter les défis en matière de maintien de la paix. Il a souhaité une coopération triangulaire entre les pays fournisseurs de contingents, le Secrétariat et le Conseil de sécurité pour garantir le succès des opérations de maintien de la paix. Le représentant a enfin plaidé en faveur du renforcement de la sécurité du personnel civil et du personnel en tenue des missions, avant de soutenir la politique de tolérance zéro sur les abus sexuels. Il faut également faire davantage d’efforts pour rembourser les sommes dues aux pays fournisseurs de contingents et celles prévues pour indemniser le personnel en cas de décès ou d’incapacité, a-t-il conclu.
M. PIETR ILLICHEV (Fédération de Russie) a remarqué que les conflits sont maintenant davantage internes, tout en relevant que les menaces transfrontières se sont exacerbées. Ces changements nous obligent à adapter le maintien de la paix, a-t-il prévenu, en soulignant le rôle central que doit jouer à cet égard le Comité spécial. Abordant la question des exploitations sexuelles par les soldats de la paix, il a souhaité que ce soient les États fournisseurs de contingents qui poursuivent en justice les auteurs de ces crimes. Il a partagé l’idée que les instruments politiques sont importants pour régler les crises, notamment la médiation. Par ailleurs, le représentant russe a rappelé que l’aide apportée aux pays hôtes devait tenir compte des priorités définies par ceux-ci.
Les forces des opérations de maintien de la paix de l’ONU ne doivent pas être utilisées pour lutter contre le terrorisme et l’extrémisme violent, a-t-il par ailleurs affirmé, partageant les recommandations du Groupe indépendant sur ce sujet. M. Illichev s’est également préoccupé de la sécurité du personnel des missions et de la protection des civils. Il faut veiller, a-t-il demandé, à ce que les pays hôtes aient la capacité suffisante pour protéger les civils, car cette tâche relève en premier des États. Il a aussi recommandé de ne pas alourdir les opérations de maintien de la paix en leur confiant des tâches sociales et humanitaires pour lesquelles d’autres agences de l’ONU seraient plus adaptées. Enfin, il a plaidé en faveur de la coopération de l’ONU avec les organisations régionales et sous-régionales, notamment par des échanges d’information et un soutien en termes de ressources.
M. DAVID PRESSMAN (États-Unis) a fait part de son émotion face aux nouveaux rapports, venant de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), sur des cas d’abus sexuels sur des civils. « La politique de tolérance zéro ne veut rien dire si nous n’agissons pas », a-t-il affirmé, appelant l’ONU à retirer les contingents qui seraient convaincus de telles pratiques. Il a rappelé, dans ce contexte, que la protection des civils doit rester la tâche centrale des missions de maintien de la paix aujourd’hui. Pour améliorer l’efficacité du mandat des missions, il faut, a-t-il suggéré, que la protection des civils soit intégrée à toutes les phases de la préparation à l’installation et au fonctionnement des missions, et que des indicateurs clairs soient définis à ce propos.
Il a en outre demandé que les mandats des missions de maintien de la paix tiennent compte des ressources disponibles et des réalités du terrain. Il a aussi proposé que davantage de responsabilités soient accordées aux responsables des missions, notamment en rapport aux questions de sécurité et de prise en charge des soins de santé. Expliquant que le temps est crucial pour sauver la vie de blessés, alors que les autorisations nécessaires venant du Siège prennent souvent un temps conséquent pour être accordée, il a plaidé pour des procédures administratives plus souples dans le cadre de la gestion des opérations de maintien de la paix.
M. MILAN MILANOVIĆ (Serbie) a affirmé que face à la nature changeante des conflits, à l’intensification des menaces asymétriques, des attaques des groupes criminels organisés et terroristes, et à la multiplication du nombre d’acteurs non étatiques, les missions de paix devraient être équipées et structurées en conséquence pour faire face à ces défis complexes et à leurs tâches. L’importance de renforcer leurs capacités opérationnelles et leurs structures organisationnelles ne peut jamais être assez soulignée, a-t-il dit, estimant qu’il était essentiel de donner des capacités et des ressources adéquates et prévisibles, de définir des mandats réalisables et d’assurer une mise en œuvre effective de manière mesurable. L’amélioration de la formation du personnel, la définition de normes de performances et de capacité, la gestion pratique, la mobilisation et le maintien d’actifs durables, y compris l’optimisation des ressources disponibles, sont à son avis des conditions essentielles pour atteindre les objectifs de missions.
Le représentant a indiqué qu’un leadership efficace, une formation améliorée, des capacités renforcées, la technologie et l’innovation sont des domaines déjà identifiés permettant l’amélioration de l’efficacité de la protection des civils. En outre, l’intégration du genre dans tous les éléments du programme politique de maintien de la paix et des efforts continus dans la promotion de la participation des femmes dans les opérations de maintien de la paix et des processus de décisions aideront, selon lui, à améliorer la performance des missions de paix. Le représentant a par ailleurs estimé que la continuation des allégations d’abus et d’exploitation sexuels n’était pas acceptable. Nous devrions tous soutenir la mise en œuvre de la politique de tolérance zéro du Secrétaire général, a-t-il exhorté. En conclusion, il a rappelé que quelque 350 Serbes, hommes et femmes, avaient rejoint les rangs des 120 000 Casques bleus des Nations Unies.
M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a estimé que les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau et du Secrétaire général auraient un impact considérable à condition qu’elles soient appliquées. Il nous appartient maintenant de délibérer soigneusement sur cette question et de trouver les décisions adaptées aux objectifs fixés des missions de maintien de paix des Nations Unies, a-t-il dit. L’Afrique, a continué le représentant, attache une grande importance à ce processus d’examen. À son avis, compte tenu de la nature et la complexité du maintien de la paix aujourd’hui, il ne s’agit plus d’un choix, mais d’un impératif absolu d’aborder les défis de la paix et de la sécurité. Il a ajouté que l’institutionnalisation du partenariat entre les Nations Unies et l’Afrique à travers la prise de décisions consultatives, la division du travail sur la base de l’avantage comparatif, l’analyse conjointe, la planification, le contrôle et l’évaluation, la réponse intégrée au cycle de conflit, y compris la prévention, constituaient des éléments clefs pour faire une réelle différence dans la manière de choisir.
Le représentant a rappelé que plus de 8 000 Casques bleus éthiopiens étaient déployés aujourd’hui dans les situations de conflit les plus explosives dans la Corne de l’Afrique, sans parler des 4 000 Casques bleus éthiopiens regroupés sous les auspices de l’Union africaine en Somalie. Le pays a aussi commencé à contribuer aux unités de police des opérations de maintien de la paix des Nations Unies et renforcera sa participation dans ce domaine dans les années à venir, a conclu le représentant.
M. HAHN CHOONG-HEE (République de Corée) a évoqué notamment la nécessité de maintenir l’élan pour la mise en œuvre des recommandations du Secrétaire général et du Groupe indépendant de haut niveau. La République de Corée était pleinement engagée à développer une compréhension pratique et partagée du programme de réforme pour les opérations de paix, a déclaré le représentant. Il a par ailleurs rappelé que son pays s’était engagé l’année dernière au Sommet du maintien de la paix de fournir une unité de génie supplémentaire aux opérations de maintien de la paix de l’ONU. Le représentant a par ailleurs affirmé qu’il soutenait la politique de la tolérance zéro du Secrétaire général en matière d’abus et d’exploitations sexuels. Il s’est également prononcé pour le renforcement des partenariats de l’ONU avec les organisations et les acteurs régionaux, notamment en Afrique, où leur rôle doit être renforcé parce qu’elles ont les avantages comparatifs uniques dans la connaissance du terrain, du déploiement rapide et la volonté d’agir vigoureusement.
M. ANTONIO DE AGUIAR PATRIOTA (Brésil) a salué un certain nombre de recommandations contenues dans le rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de la paix de l’ONU. Il a estimé qu’il n’était pas du ressort des missions de maintien de la paix de mener des activités de lutte contre le terrorisme, ajoutant que la militarisation des opérations de maintien de la paix pourrait affaiblir l’objectif onusien de promotion de la paix par des moyens pacifiques. Il a indiqué que l’ONU ne doit pas dévier de son objectif central qui est la promotion de la paix et du développement à travers la diplomatie et la coopération. Il a de ce fait relevé que les innovations apportées au sein des missions de maintien de la paix ne doivent pas se décliner seulement sous forme de renforcement de la militarisation.
M. Patriota a ensuite fait mention de l’engagement de son pays dans les missions de maintien de la paix, notamment en Haïti où le Brésil compte le plus important contingent de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH). Il a souligné que le maintien de la paix n’est pas une fin en soi, et qu’il devrait pouvoir s’intégrer dans une démarche globale visant à promouvoir la stabilité, le dialogue, la réconciliation et le développement. Il a par ailleurs plaidé pour que les troupes sur le terrain soient davantage efficaces. Pour ce faire, il a recommandé des programmes de formation adaptés, ainsi que des équipements de qualité et la participation d’unités spécialisées. Il a également estimé que, pour que ces missions soient efficaces, il serait opportun que les pays qui contribuent par l’envoi de leurs troupes puissent participer aux discussions relatives à ces missions.
M. DIANGUINA DIT YAYA DOUCOURE (Mali) a estimé que les mandats et les missions des opérations de maintien de la paix de l’ONU sont souvent élaborés sur la base de modèles standards et ne sont pas souvent adaptés aux réalités du terrain. Il a pris pour exemple le cas de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), indiquant qu’elle n’évolue pas dans un environnement de maintien de la paix classique, et qu’elle est la cible régulière d’attaques asymétriques perpétrées par des groupes terroristes. Il a ainsi rappelé que depuis son déploiement, la MINUSMA a essuyé des dizaines d’attaques asymétriques avec un bilan qui fait d’elle l’une des missions les plus meurtrières des 17 déployées par les Nations Unies dans le monde. Il a invité l’ONU à œuvrer de concert avec les organisations régionales concernées et les pays contributeurs de troupes afin d’établir des mandats mieux ciblés et plus réalistes. Il a également relevé que le personnel de l’ONU déployé doit faire preuve de professionnalisme et incarner les valeurs de probité morale afin d’éviter toute atteinte aux droits de l’homme. Il a également formé l’espoir que les opérations de maintien de la paix aident davantage à poser les fondements solides d’un nouveau développement économique et social durable.
M. JOSÉ ALBERTO ANTONIO SANDOVAL COJULÚN (Guatemala) a souligné les grands efforts déployés par les pays fournisseurs de contingents pour garantir les meilleures conditions de travail et l’équipement nécessaire au personnel des opérations de maintien de la paix. Il a ainsi demandé de procéder dûment aux remboursements des sommes dues à ces pays. Le représentant a par ailleurs condamné fermement les récentes attaques perpétrées contre des Casques bleus, avant de rappeler aux pays hôtes leur responsabilité de garantir la sécurité du personnel civil et militaire des missions de l’ONU. Cette sécurité doit être une priorité, a-t-il insisté. Enfin, il a souligné l’importance de la prévention des conflits, souhaitant éviter en priorité que des situations ne dégénèrent et contraignent à utiliser la force. Il a salué les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau sur le maintien de la paix à cet égard. Le Guatemala, a-t-il assuré, continuera à contribuer aux contingents militaires en maintenant un niveau élevé d’efficacité, de professionnalisme, de discipline et d’intégrité.
Mme MWABA KASESE-BOTA (Zambie) a rappelé que son pays participait aux opérations de maintien de la paix de l’ONU en déployant des observateurs militaires, des officiers et des soldats dans diverses missions. Tout en reconnaissant les réalisations des 70 dernières années dans ce domaine, elle a souligné la nécessité d’adapter les mécanismes pour mieux prévenir les conflits ou les résoudre lorsqu’ils surviennent. Il faut pour cela, a-t-elle expliqué, une plus grande volonté politique, ainsi que davantage d’investissement dans la paix à toutes les étapes: prévention, médiation, règlement des conflits, établissement de la paix, maintien et consolidation de la paix, et plans stratégiques à long terme pour le renforcement des capacités et la reconstruction des États.
Dans ces entreprises, la protection des civils devrait prendre le dessus, a-t-elle estimé, en exprimant son soutien aux initiatives des Nations Unies dans ce domaine, en particulier pour les femmes et les enfants. Mme Kases-Bota a également soutenu la politique de tolérance zéro du Secrétaire général pour lutter contre les abus sexuels commis par des Casques bleus sur le terrain. En outre, a-t-elle rappelé, son pays avait entrepris de renforcer la participation des femmes dans les missions de maintien de la paix. Enfin, consciente que la majorité des missions sont menées en Afrique, elle a invité à soutenir la médiation de l’Union africaine dans la région, ainsi que la coopération entre les pays fournisseurs de contingents, le Secrétariat et le Conseil de sécurité dans la conduite des opérations de maintien de la paix.
M. RAOUL BAZATOHA (Rwanda) a appelé la communauté internationale à s’adapter au nouveau contexte du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a estimé, à cet effet, que le rapport du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix des Nations Unies, contient des recommandations idoines pour refléter cette évolution. Il a prôné l’amélioration de la protection des civils, en droite ligne des Principes de Kigali portant sur la question. Il a souligné que si la communauté internationale réagissait rapidement face aux menaces, elle pourrait mieux protéger les civils, rappelant que la tâche centrale du maintien de la paix était de sauver des vies. « Le Rwanda est conscient de ce qui peut arriver quand cette tâche n’est plus prioritaire », a-t-il relevé, tout en invitant la communauté internationale à œuvrer afin que l’histoire ne se répète plus.
M. XU ZHONG-SHENG (Chine) a demandé de s’en tenir aux principes de base régissant les opérations de maintien de la paix, à savoir le consentement du pays hôte, la neutralité, et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense, et uniquement dans le cadre des mandats autorisés. Il faut respecter la souveraineté des pays concernés, a-t-il expliqué. Nous devons aussi renforcer nos activités d’appui aux missions, a-t-il recommandé. Il a en outre souhaité le renforcement des règles disciplinaires applicables au personnel déployé, ainsi que de meilleures conditions de sécurité pour ceux-ci. Les missions de maintien de la paix, les pays fournisseurs de contingents et les pays concernés doivent concerter leurs efforts pour former les Casques bleus et les informer sur les situations de sécurité sur le terrain, a-t-il indiqué.
Le représentant a par ailleurs souhaité que la communauté internationale approfondisse sa coopération avec les organisations régionales africaines, pour les soutenir en termes de capacité, dans l’objectif « d’aider les Africains à résoudre leurs problèmes à leur manière ». Enfin, le représentant chinois a indiqué que plus de 3 000 ressortissants de son pays étaient déployés sur le terrain dans les opérations de maintien de la paix. La Chine est en outre l’un des plus grands contributeurs au budget du maintien de la paix de l’ONU, a-t-il souligné.
M. GUVEN BEGEC (Turquie) a fait remarquer que le maintien de la paix était devenu l’activité phare des Nations Unies, notant aussi qu’il jouait un rôle crucial en soutien aux solutions politiques en cas de crise et de conflit, et dans la réduction de la violence et la protection des civils. Il a partagé l’avis du Groupe indépendant de haut niveau sur le maintien de la paix et celui du Secrétaire général sur l’importance de la prévention des conflits et de la médiation, qui sont les moyens les plus efficaces et les moins coûteux pour rétablir la paix. Il a insisté pour que la médiation soit privilégiée tant dans les opérations de maintien de la paix que dans les missions politiques spéciales. Le deuxième message important, selon lui, est la nécessité d’améliorer les « rouages du maintien de la paix » en adoptant une approche centrée sur les personnes. Il a également souligné l’importance des partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales.
La Turquie, en tant que coprésident du Groupe des Amis de la médiation, souscrit aux recommandations de l’étude mondiale sur la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, a indiqué le représentant. Il a souligné l’importance de la protection des civils, qui est une « obligation morale » des Nations Unies, mais relève en priorité de la responsabilité des États. Il a souhaité que l’ONU prévoie des directives claires pour régir les cas où les opérations de maintien de la paix doivent ajouter à leur mandat celui de la protection des civils. Enfin, M. Begec a évoqué la contribution des soldats de la paix turcs dans des missions de l’ONU, de l’OTAN et de l’Union européenne partout dans le monde. En outre, mon pays veut organiser des cours de formation pour le personnel en tenu de l’ONU, a-t-il ajouté. Il a également exprimé son soutien à la « coopération triangulaire » entre le Conseil de sécurité, les pays fournisseurs de contingents et le Secrétariat pour mieux définir, planifier et mener les opérations de maintien de la paix. Il a également soutenu la politique de tolérance zéro pour les abus sexuels dans les missions.
M. GEORGE JAFFN MILAD (Malawi) a rappelé l’engagement de son pays dans les opérations de maintien de la paix, en particulier dans les opérations de soutien à la paix lancées dans les années 1960. Le Malawi a ainsi participé à des missions tant avec les Nations Unies qu’avec l’Union africaine et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC). Il a notamment indiqué que son pays avait fourni un bataillon pour participer à la Brigade d’intervention spéciale de la Mission de l’ONU en République Démocratique du Congo (MONUSCO), conformément à la résolution 2098 (2013). Il a salué à ce sujet la décision du Conseil de sécurité de proroger d’un an le mandat de cette brigade, tout en prévenant que la décision éventuelle de redéployer les troupes malawites dans d’autres zones d’opérations en dehors de la RDC devrait être entérinée par la SADC, car celle-ci est à l’origine du déploiement de ces troupes.
Le représentant a ensuite demandé de prévoir des mandats simples et clairs pour les opérations de maintien de la paix, afin qu’ils soient bien compris par les troupes. À l’appui de cette remarque, il a fait remarquer que le mandat de la Brigade en RDC n’avait pas été interprété de la même manière par tous, ce qui avait entraîné une confusion sur les responsabilités de chacun. Le représentant a aussi souhaité une révision des principes applicables au maintien de la paix, car, à son avis, le principe selon lequel il ne faut utiliser la force qu’en cas d’auto-défense n’est plus tenable. Ce principe conduit les Casques bleus à se concentrer davantage sur leur propre sécurité en cas de menace potentielle pour les civils, a-t-il remarqué. Enfin, M. Milad a abordé la question des abus sexuels commis par des Casques bleus en assurant que son pays avait pris des mesures tant pour mener des enquêtes et des poursuites judiciaires, que pour former le personnel avant leur déploiement sur le terrain.
M. PAUL ROBERT TIENDREBEOGO, Représentant permanent de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) auprès des Nations Unies, a affirmé que la prise en compte effective du français dans le recrutement des personnels du maintien de la paix, en particulier dans les opérations se déroulant dans des pays francophones, constituait une question déterminante pour l’efficacité de l’action de la communauté internationale en général, et la performance des opérations de paix en particulier. La Francophonie met en œuvre différents programmes consacrés à la formation et au renforcement des capacités des pays francophones dans le domaine du maintien de la paix. L’OIF apporte un appui aux Centres dispensant des formations en français dans les domaines relatifs au maintien de la paix et favorise le développement de synergies entre un certain nombre d’institutions, telles que l’École de maintien de la paix Alioune Blondin Beye de Bamako, le Centre national des forces de maintien de la paix, de déminage et de gestion des déchets de guerre du Cambodge, l’École internationale des forces de sécurité d’Awae, au Cameroun, et l’Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche ou l’Institut de formation aux opérations de paix. L’OIF a également mis en place une plateforme fédératrice - le Réseau d’expertise et de formation francophone pour les opérations de paix -, a-t-il précisé. L’Organisation a en outre développé une action en direction des pays contributeurs non francophones, en favorisant l’apprentissage du français sur les objectifs militaires, a conclu le représentant.
L’Observateur de l’Union africaine (UA), M. SALEM MATUG, a affirmé que les opérations de maintien de la paix étaient vitales pour la sécurité en Afrique, rappelant que plus de 100 000 soldats de la paix de l’Union africaine et de l’ONU sont à pied d’œuvre sur le continent. Il a souhaité que la collaboration entre l’ONU et l’UA soit fondée sur le partage des responsabilités, le travail en synergie et la division des tâches, notamment en ce qui concerne le maintien de la paix et de la sécurité sur le continent. Il a noté que le problème majeur que l’UA rencontre quand elle déploie des troupes est la sécurisation d’un financement durable pour leur prise en charge. Pour trouver une réponse à ce défi, il a rappelé que le Sommet des Chefs d’États de l’UA avait décidé de mettre sur pied un fonds qui recevrait 25% des ressources nécessaires, sachant que les 75% restant viendraient des fonds onusiens alloués aux missions autorisées par le Conseil de sécurité. Il a expliqué que cette mesure a été arrêtée en sachant que l’effort de l’UA apparaît comme une contribution louable au maintien de la paix et de la sécurité internationales.
M. Matug a ensuite relevé que la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) n’était pas encore prête à passer le relais à l’ONU en raison de l’environnement sécuritaire qui prévaut dans le pays. Il a par ailleurs souligné que 2016 marquait le dixième anniversaire du Programme décennal de renforcement des capacités de l’Union africaine, qui sert de cadre stratégique global en matière de coopération entre l’ONU et l’UA. Il a invité les États Membres à voter une nouvelle résolution pour établir un nouveau cadre de cette collaboration.