Le Conseil de sécurité décide de l’ouverture de quatre postes frontière en Syrie pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire et crée un mécanisme de surveillance
Par la résolution 2165 (2014)), le Conseil de sécurité décide que les organismes humanitaires des Nations Unies et leurs partenaires d’exécution sont donc autorisés à utiliser des routes franchissant les lignes de conflit ainsi que les postes frontière de Bab el-Salam, Bab el-Haoua, Yaroubiyé et Ramtha, en sus de celles déjà utilisées, afin de faire en sorte que l’aide humanitaire parvienne par les voies les plus directes aux personnes qui en ont besoin dans toute la Syrie, en avisant les autorités syriennes.
Aux termes de la résolution, un mécanisme de surveillance, placé sous l’autorité du Secrétaire général, est constitué pour superviser, avec l’assentiment des pays voisins de la Syrie concernés, le chargement dans les installations de l’ONU de tous les envois de secours humanitaires, de même que toute inspection subséquente des envois par les autorités douanières des pays voisins, en vue de leur passage en Syrie aux quatre postes frontière ci-dessus mentionnés. Le mécanisme doit aussi adresser les notifications de l’ONU aux autorités syriennes confirmant le caractère humanitaire de ces envois de secours.
« La résolution a ouvert quatre points de passage sans que le régime syrien n’ait à approuver l’accès humanitaire », s’est réjouie la représentante des États-Unis après l’adoption du texte. Pour sa part, le représentant de la Fédération de Russie a estimé que « l’adoption de cette résolution a montré que des compromis sont possibles au Conseil de sécurité et que le Gouvernement syrien a déjà pris des mesures pour améliorer l’accès humanitaire aux populations qui ont besoin d’assistance ». Le mécanisme de surveillance devra faire la preuve de son efficacité, et la résolution devra être appliquée par toutes les parties, y compris les groupes armés de l’opposition, a souligné le représentant.
Les mesures prises arriveront à expiration 180 jours à compter d’aujourd’hui; et le Conseil devant procéder à leur réexamen. Aux termes du texte adopté, le Conseil de sécurité prévient qu’en cas de non-respect par toute partie syrienne de la présente résolution ou de la résolution 2139 (2014), il prendra des mesures supplémentaires.
Dans leurs interventions, certains membres du Conseil de sécurité ont évoqué l’alinéa 4 du préambule de la résolution qui constate la nette et rapide détérioration de la situation humanitaire, en particulier le fait que le nombre de personnes ayant besoin d’une assistance du fait du conflit en Syrie a dépassé les 10 millions, dont 6,4 millions de déplacés et plus de 4,5 millions vivant dans des zones difficiles d’accès, et que plus de 240 000 personnes sont piégées dans les zones assiégées.
Cette résolution ne complète ni ne remplace la résolution 2139, dont toutes les exigences demeurent d’actualité, a dit le représentant de la France, accusant entre autres le régime syrien de continuer d’utiliser des barils d’explosifs. Son homologue de la Syrie a argué de la collaboration de son gouvernement avec les agences humanitaires, avant d’imputer la détérioration de la situation à la multiplication des actes terroristes, dont ceux commis par des groupes affiliés à Al-Qaida. Mettre un terme au terrorisme est la seule manière de mettre fin aux souffrances du peuple syrien, a-t-il dit, en demandant que des pressions soient exercées sur ceux qui financent, abritent ou entraînent les terroristes, dont l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie. En français, le représentant a attiré l’attention du Conseil sur un article paru en France sur le thème « pourquoi on s’est trompé sur la Syrie ». C’est par ignorance historique, par manichéisme politique et par un « wishful thinking » diplomatique, a-t-il répondu à cette question.
Même si on parvenait à obtenir tous les fonds nécessaires et que l’aide parvenait aux populations dans le besoin, l’impact du conflit en Syrie continuerait de se manifester par la propagation des idéologies extrémistes et du terrorisme dans toute la région et au-delà, comme en témoignent les jeunes qui viennent de tous les coins de la planète pour combattre en Syrie, a quant à elle estimé la représentante de l’Argentine. On ne pourra pas contenir ce phénomène si la crise n’est pas réglée, a-t-elle insisté.
La résolution réaffirme en effet que la seule solution durable à la crise actuelle en Syrie passe par un processus politique sans exclusive, dirigé par les Syriens eux-mêmes, et devant aboutir à la pleine mise en œuvre du Communiqué de Genève du 30 juin 2012. Toutes les délégations ont exprimé leur appui au nouvel Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, M. Staffan de Mistura.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT
Texte du projet de résolution (S/2014/490)
Le Conseil de sécurité,
Rappelant ses résolutions 2042 (2012), 2043 (2012), 2118 (2013) et 2139 (2014) et les déclarations de son président des 3 août 2011, 21 mars 2012, 5 avril 2012 et 2 octobre 2013,
Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la Syrie ainsi qu’au buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies,
Consterné par le niveau inacceptable de la violence qui s’intensifie en Syrie et par les plus de 150 000 morts, y compris bien plus de 10 000 enfants, dont ont fait état le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies et son Représentant spécial pour le sort des enfants en temps de conflit armé,
Se déclarant vivement alarmé par la nette et rapide détérioration de la situation humanitaire en Syrie, en particulier par le fait que le nombre de personnes ayant besoin d’une assistance a dépassé les 10 millions, dont 6,4 millions de déplacés et plus de 4,5 millions vivant dans des zones difficiles d’accès, et que plus de 240 000 personnes sont piégées dans les zones assiégées, comme l’a indiqué le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies,
Déplorant que les parties syriennes au conflit n’aient pas fait droit aux demandes formulées dans sa résolution 2139 (2014) et aux dispositions énoncées dans la déclaration de son président en date du 2 octobre 2013 (S/PRST/2013/15), comme l’a indiqué le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies dans ses rapports du 22 mai 2014 (S/2014/365) et du 20 juin 2014 (S/2014/427), et considérant que, même si elles ont pris quelques mesures, ces mesures n’ont pas eu l’effet voulu sur l’acheminement de l’aide humanitaire destinée à tous ceux qui en avaient besoin sur l’ensemble du territoire syrien,
Saluant l’action indispensable que continuent de mener l’Organisation des Nations Unies, ses institutions spécialisées et l’ensemble du personnel humanitaire et médical en Syrie et dans les pays voisins pour atténuer les répercussions du conflit sur la population syrienne,
Réaffirmant qu’il apprécie les efforts remarquables et admirables que font les pays de la région, notamment le Liban, la Jordanie, la Turquie, l’Iraq et l’Égypte pour accueillir plus de 2,8 millions de réfugiés ayant fui la Syrie sous l’effet du déchaînement de violence, y compris environ 300 000 réfugiés depuis l’adoption de la résolution 2139 (2014), et engageant de nouveau vivement tous les ÉtatsMembres à épauler les pays d’accueil voisins, compte tenu du principe de solidarité, pour leur permettre de faire face aux besoins humanitaires croissants, y compris en leur apportant un appui direct,
Condamnant fermement les violations généralisées des droits de l’homme et du droit international humanitaire que continuent de commettre les autorités syriennes, ainsi que les atteintes aux droits de l’homme et les violations du droit international humanitaire perpétrées par des groupes armés,
Soulignant qu’il faut mettre fin à l’impunité des auteurs de violations du droit international humanitaire et des violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits, et réaffirmant que ceux qui ont commis de telles violations ou atteintes en Syrie ou en sont responsables de quelque manière que ce soit doivent être traduits en justice,
Se déclarant vivement alarmé en particulier par la poursuite des attaques lancées sans discernement dans des zones habitées, notamment par l’intensification des bombardements aériens et l’emploi de barils d’explosifs à Alep et dans d’autres régions, les tirs d’artillerie et d’obus et les frappes aériennes, et le recours généralisé à la torture, aux mauvais traitements, à la violence sexuelle et sexiste, ainsi que par toutes les violations et exactions graves commises contre des enfants, et réaffirmant que certaines de ces violations pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité,
Exigeant de nouveau de toutes les parties qu’elles démilitarisent les installations médicales, les écoles et les autres établissements civils, évitent d’établir des positions militaires dans des zones habitées et s’abstiennent de lancer des attaques dirigées contre des installations civiles,
Réaffirmant également que c’est aux autorités syriennes qu’il incombe au premier chef de protéger la population en Syrie et déclarant une fois encore que les parties au conflit armé ont la responsabilité principale de prendre toutes les mesures possibles pour assurer la protection des civils, et exigeant de nouveau à cet égard que toutes les parties au conflit armé s’acquittent intégralement des obligations que leur impose le droit international pour ce qui est de la protection des civils en temps de conflit armé, y compris les journalistes, les professionnels des médias et le personnel associé,
Rappelant que toutes les parties doivent respecter les dispositions pertinentes du droit international humanitaire et les principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence,
Se déclarant vivement alarmé par la propagation de l’extrémisme et la multiplication des groupes extrémistes et par le fait que des civils sont pris pour cible en raison de leur appartenance ethnique, religieuse ou confessionnelle, et se déclarant en outre vivement alarmé par la multiplication des attaques qui font de nombreuses victimes et causent de graves dégâts, par les bombardements aveugles au mortier, les attentats à la voiture piégée, les attentats-suicides, la pose de bombes dans des tunnels ainsi que les prises d’otages, les enlèvements et les attaques contre des infrastructures civiles, notamment les interruptions délibérées de l’approvisionnement en eau, condamnant le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations et rappelant à cet égard ses résolutions 1373 (2001), 1624 (2005), 2129 (2013) et 2133 (2014),
Profondément troublé par le refus persistant, arbitraire et injustifié d’autoriser les opérations de secours et par le maintien de conditions qui entravent l’acheminement des secours humanitaires en Syrie, en particulier dans les zones assiégées et difficiles d’accès, et prenant note de l’avis du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies selon lequel le refus arbitraire d’autoriser l’ouverture de tous les postes frontière concernés constitue une violation du droit international humanitaire et un acte de non-respect des dispositions de la résolution 2139 (2014),
Soulignant que la situation humanitaire continuera de se détériorer en l’absence de règlement politique, réaffirmant qu’il souscrit aux dispositions du Communiqué de Genève en date du 30 juin 2012 [annexe II de la résolution 2118 (2013)] et exigeant que toutes les parties s’emploient à appliquer immédiatement et intégralement ce communiqué, qui vise à mettre fin sans tarder à tous les actes de violence et à toutes les violations des droits de l’homme et du droit international et atteintes à ces droits, et à faciliter le processus amorcé à Montreux le 22 janvier 2014 sous la conduite des Syriens en vue d’une transition qui réponde aux aspirations légitimes du peuple syrien et lui permette de décider en toute indépendance et de manière démocratique de son propre avenir,
Rappelant l’intention qu’il a exprimée dans sa résolution 2139 (2014) de prendre des mesures supplémentaires en cas de non-respect de ladite résolution,
Considérant que la détérioration continue de la situation humanitaire en Syrie constitue une menace pour la paix et la sécurité dans la région,
Soulignant que l’Article 25 de la Charte des Nations Unies fait obligation aux États Membres d’accepter et d’appliquer ses décisions,
Réaffirme que toutes les parties au conflit, en particulier les autorités syriennes, doivent s’acquitter des obligations que leur imposent le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, et appliquer intégralement et immédiatement les dispositions de sa résolution 2139 (2014) et de la déclaration de son président en date du 2 octobre 2013 (S/PRST/2013/15);
Décide que les organismes humanitaires des Nations Unies et leurs partenaires d’exécution sont autorisés à utiliser des routes franchissant les lignes de conflit ainsi que les postes frontière de Bab el-Salam, Bab el-Haoua, Yaroubiyé et Ramtha, en sus de celles déjà utilisées, afin de faire en sorte que l’aide humanitaire, y compris les fournitures médicales et chirurgicales, parvienne par les voies les plus directes aux personnes qui en ont besoin dans toute la Syrie, en avisant les autorités syriennes, et à cette fin souligne qu’il est nécessaire que tous les postes frontière soient utilisés de manière efficace pour les opérations humanitaires des Nations Unies;
Décide également de constituer un mécanisme de surveillance, placé sous l’autorité du Secrétaire général, pour superviser, avec l’assentiment des pays voisins de la Syrie concernés, le chargement dans les installations de l’ONU concernées de tous les envois de secours humanitaires des organismes humanitaires des Nations Unies et de leurs partenaires d’exécution, de même que toute inspection subséquente des envois par les autorités douanières des pays voisins concernés, en vue de leur passage en Syrie aux postes frontière de Bab el-Salam, Bab el-Haoua, Yaroubiyé et Ramtha, et pour adresser les notifications de l’ONU aux autorités syriennes confirmant le caractère humanitaire de ces envois de secours;
Décide que le mécanisme de surveillance des Nations Unies sera déployé dans les plus brefs délais;
Décide également que les mesures prises aux paragraphes 2 et 3 ci-dessus arriveront à expiration 180 jours à compter de la date d’adoption de la présente résolution et qu’il procédera à leur réexamen;
Décide en outre que toutes les parties syriennes au conflit doivent immédiatement permettre l’acheminement sans entrave aux destinataires prévus dans toute la Syrie de l’aide humanitaire que les organismes humanitaires des Nations Unies et leurs partenaires d’exécution fournissent sur la base des évaluations des besoins effectuées par l’ONU, cette aide étant dénuée de tous préjugés ou motivations politiques, et doivent notamment lever immédiatement tous les obstacles à la fourniture de l’aide humanitaire;
Note à cet égard le rôle que des accords de cessez-le-feu compatibles avec les principes de l’action humanitaire et avec le droit international humanitaire pourraient jouer pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire afin d’aider à sauver la vie de civils, souligne que les parties doivent se mettre d’accord sur des pauses humanitaires, des jours de tranquillité, des cessez-le-feu localisés et des trêves afin que les organismes humanitaires puissent avoir un accès sûr et sans entrave à toutes les zones touchées en Syrie, et rappelle que le droit international humanitaire interdit d’affamer des civils comme méthode de combat;
Décide que toutes les parties au conflit syrien doivent prendre toutes les dispositions nécessaires pour assurer la sûreté et la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé, ainsi que du personnel des institutions spécialisées des Nations Unies et de tous les autres acteurs humanitaires, comme l’exige le droit international humanitaire, sans préjudice de leur liberté de circulation et d’accès, insiste sur la nécessité de ne pas bloquer ou entraver les efforts humanitaires, et rappelle que les attaques contre les travailleurs humanitaires peuvent constituer des crimes de guerre;
Réaffirme que la seule solution durable à la crise actuelle en Syrie passe par un processus politique sans exclusive, dirigé par les Syriens, devant aboutir à la pleine mise en œuvre du Communiqué de Genève du 30 juin 2012, qu’il a entériné en tant qu’annexe II à sa résolution 2118 (2013), rend hommage aux efforts déployés par M. Lakhdar Brahimi, et se félicite de la nomination de M. Staffan de Mistura, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie;
Prie le Secrétaire général de lui rendre compte de l’application de la présente résolution, et de son respect par toutes les parties au conflit syrien, dans le cadre des rapports qu’il lui soumet concernant l’application de la résolution 2139 (2014);
Décide qu’en cas de non-respect par toute partie syrienne de la présente résolution ou de la résolution 2139 (2014) il prendra des mesures supplémentaires;
Décide également de rester activement saisi de la question.
Déclarations
M. ZEID RA’AD ZEID AL-HUSSEIN (Jordanie) s’est félicité de l’adoption de la résolution 2165 (2014) et s’est dit fier que la Jordanie l’ait parrainé aux cotés de l’Australie et du Luxembourg. Cette résolution reflète le plus haut degré de consensus au Conseil, a-t-il estimé. Le représentant a remercié les autres membres du Conseil qui ont fait preuve d’une profonde compréhension du texte. Cette résolution est aussi en soi une réponse contre le non-respect, par les autorités syriennes, de la résolution 2139 (2014), qui a fait l’objet de quatre rapports du Secrétaire général, a dit le représentant. Depuis l’adoption de la résolution 2139, la situation humanitaire s’est détériorée et le niveau de l’aide humanitaire parvenant aux populations dans le besoin a continuellement baissé. La résolution adoptée aujourd’hui vise à garantir l’acheminement et la fourniture de l’aide à tous ceux qui en ont besoin sans obstacle et distinction et directement là où ils se trouvent en Syrie, a précisé le représentant. Il a averti que tous ceux qui tenteraient d’entraver la mise en œuvre de la résolution devraient s’attendre à une forte réaction de la communauté internationale.
Mme SYLVIE LUCAS (Luxembourg) a accusé les autorités syriennes d’avoir, mois après mois, confisqué aussi bien les médicaments que les équipements chirurgicaux destinés aux populations les plus vulnérables vivant « dans les zones contrôlées par l’opposition au régime d’Assad ». Mois après mois, les autorités syriennes ont continué de refuser le passage des convois humanitaires aux postes frontière identifiés comme prioritaires par l’ONU, a dit Mme Lucas. Le résultat de ces actions est que mois après mois, la population syrienne privée d’aide humanitaire n’a fait que croître, a-t-elle indiqué. Devant ce constat, l’Australie, la Jordanie et le Luxembourg se sont vus contraints de chercher d’autres moyens et d’autres voies pour permettre que l’aide humanitaire soit acheminée au bénéficice des Syriens. C’est l’objectif premier de la nouvelle résolution adoptée aujourd’hui par le Conseil de sécurité, a dit la représentante. Le consentement des autorités syriennes à la livraison de l’assistance humanitaire ne sera plus nécessaire, a-t-elle ajouté. Le mécanisme de surveillance placé sous l’autorité du Secrétaire général, qui sera mis en place, prévoit un simple système de notification, a précisé Mme Lucas. La résolution se veut un texte opérationnel et concret, un texte innovateur. Nous espérons, a dit la représentante, qu’elle permettra une véritable percée sur le terrain. Cependant, si la résolution n’était pas respectée, le Conseil de sécurité affirme clairement qu’il prendra des mesures supplémentaires. L’unanimité retrouvée du Conseil et la nomination, le 10 juillet dernier, de M. Staffan de Mistura en tant qu’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie pourront donner un nouvel élan à la recherche d’une solution politique à la crise en Syrie, a espéré la représentante.
M. GARY QUINLAN (Australie) a salué l’adoption unanime, par le Conseil de sécurité, de la résolution 2165 (2014). Il a noté que le Conseil est uni aujourd’hui en reconnaissant que la situation humanitaire en Syrie, « la plus grave crise humanitaire de ce siècle », appelle une action urgente en faveur du peuple syrien. Si la résolution 2139 (2014) avait été respectée et appliquée de manière satisfaisante, cette nouvelle résolution n’aurait pas été nécessaire. Mais le Conseil de sécurité a été forcé d’agir à cause de l’échec des parties syriennes, et en particulier du Gouvernement syrien, à mettre en œuvre la résolution 2139, a estimé M. Quinlan. « Le Conseil a aussi été forcé d’agir à cause de la manipulation inhumaine et cynique de l’aide par le régime syrien en tant que stratégie militaire. »
La résolution adoptée aujourd’hui réaffirme la détermination du Conseil de faire en sorte que le Gouvernement syrien et les autres parties syriennes changent leurs approches envers l’accès humanitaire et l’acheminement de l’aide. Il est temps que les parties prennent en compte l’intérêt des citoyens syriens. L’aide doit être délivrée par la route la plus directe, y compris à travers les frontières et les lignes de front pour atteindre la population nécessiteuse, a dit le représentant. Les Nations Unies ont prévu que grâce aux quatre points d’accès identifiés, elles pourront atteindre 1,3 million de Syriens en plus et peut-être plus de deux millions.
Le représentant a indiqué que les parties au conflit sont obligées d’assurer que l’aide parviendra aux populations nécessiteuses, en permettant qu’elle traverse les zones de combat. Elles doivent coopérer avec les institutions humanitaires des Nations Unies et leurs partenaires de mise en œuvre. Le représentant a ensuite dit que la solution durable au conflit passe par un processus politique, et que la nomination de M. Staffan de Mistura en tant qu’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie constitue une étape positive pour la reprise des négociations en vue de la recherche d’une solution pacifique au conflit.
M. MARK LYALL GRANT (Royaume-Uni) a déclaré que le Conseil de sécurité vient d’adopter une résolution en faveur de l’acheminement de l’aide humanitaire en Syrie, ce qui était déjà le but de la résolution 2139, qui a été confrontée aux blocages de la Syrie, blocages qui ont contribué « à plonger des milliers de personnes dans une souffrance indicible ». La résolution autorise l’ONU à utiliser quatre points de passage frontaliers pour pouvoir toucher environ 1,3 million de personnes dans le besoin « et les protéger contre la négligence du Gouvernement syrien », a estimé le représentant. Le nombre de personnes affectées par le conflit est tout simplement effrayant, a-t-il dit, avant de se féliciter que le Conseil ait montré qu’il est possible pour ses membres de travailler ensemble. Mais l’adoption de la résolution n’est qu’une étape, car la solution au conflit est politique, a-t-il prévenu. Il a donc à son tour appelé toutes les parties à travailler avec le nouvel Envoyé spécial du Secrétaire général.
M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a dit que la résolution que vient d’adopter le Conseil de sécurité appelle les parties syriennes à mettre un terme au conflit. Il s’est dit préoccupé par les activités terroristes qui sont devenues une épée de Damoclès sur l’avenir de la Syrie. Pour expliquer le vote de sa délégation, M. Churkin a dit que le Conseil a estimé nécessaire d’examiner la requête du Bureau de la coordination des affaires humanitaires pour assainir et améliorer la situation humanitaire en Syrie, et apporter une amélioration aux conditions de travail des organisations humanitaires. Il a souligné que la résolution a tenu compte des points de vue et des priorités essentielles de la Fédération de Russie concernant le conflit en Syrie en ce qu’elle s’appuie sur les principes fondamentaux des Nations Unies en matière d’aide humanitaire et d’assistance, dont le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie, et celui du caractère de l’aide, qui ne doit pas être politisée. Le représentant a également souligné que le texte n’a pas prévu de recours automatique à la force pour sa mise en œuvre.
Au contraire, l’adoption de cette résolution a montré que des compromis sont possibles, et que le Gouvernement syrien a déjà pris des mesures pour améliorer l’accès humanitaire aux populations qui ont besoin d’assistance, a souligné M. Churkin. Le représentant a estimé que le mécanisme de suivi que va mettre en place l’ONU devra faire la preuve de son efficacité, et que la résolution devra être appliquée par toutes les parties, y compris les groupes armés de l’opposition. Il a souligné que si l’on n’essaie pas de dicter leurs comportements aux parties, elles sauront prendre les mesures qui conviennent. Il a rappelé aux parties au conflit en Syrie l’importance d’entrer dans un dialogue sur la base du Communiqué de Genève de 2012. Après avoir souligné la nécessité de parvenir à une solution pacifique au conflit, M. Churkin a également salué l’approche adoptée sur le dossier des armes chimiques syriennes.
Mme SAMANTHA POWER (États-Unis) a donné des exemples de la manière dont l’aide humanitaire est refusée aux populations syriennes qui sont pourtant dans le besoin. La résolution adoptée par le Conseil, s’est-elle réjouie, vient d’ouvrir quatre points de passage pour l’aide humanitaire dont les agences de secours feront usage sans que le régime syrien n’ait à les approuver. L’aide humanitaire pourra passer la frontière et sauver la vie de quelque 2 millions de Syriens, s’est félicitée Mme Power. La résolution autorise l’ONU à traverser les lignes de conflit, et elle établit un mécanisme de surveillance pour vérifier le bon acheminement de l’aide humanitaire en Syrie, a indiqué la représentante. Elle a remercié les voisins de la Syrie pour les efforts qu’ils déploient et de leur générosité. La résolution vise à ce que l’aide parvienne à davantage de personnes dans le besoin mais, s’est scandalisée la représentante, on ne devrait jamais avoir besoin d’une résolution pour qu’un Gouvernement permette à l’aide humanitaire de parvenir à des gens dont la vie est en danger. Le Gouvernement syrien a cherché à compliquer l’accès de l’aide au lieu de le faciliter, a accusé Mme Power. Il a abandonné ses populations aux maladies et les a laissées souffrir de la faim.
Maintenant, a dit la représentante, il appartient au Conseil de veiller à l’application de la résolution qui vient d’être adoptée et d’être prêt à agir si les parties en présence ne la respectent pas. L’article 25 de la Charte des Nations Unies est clair, a estimé Mme Power: la Syrie a l’obligation de respecter les résolutions de Conseil de sécurité et de les appliquer. Beaucoup de tâches restent à accomplir dans la mise en œuvre de la résolution 2139 dont arrêter de prendre les écoles et les hôpitaux pour cibles, a-t-elle néanmoins reconnu.
M. LIU JIEYI (Chine) a estimé que la résolution 2165 (2014) avait montré que tous les membres du Conseil de sécurité ont à l’esprit l’intérêt du peuple syrien. Il a ensuite appelé toutes les parties au conflit en Syrie à coopérer et à se conformer aux termes de la résolution adoptée ce jour. M. Liu a ajouté que l’aide humanitaire doit respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie. Il faut également éviter de politiser la situation, a exhorté le représentant. Concernant le conflit, il a indiqué que seule une solution politique permettra à la Syrie de sortir de la crise, et que la communauté internationale doit redoubler d’efforts pour atteindre cet objectif. Elle doit mettre en œuvre le Communiqué de Genève, et elle devra trouver un juste milieu et une voie adaptée aux conditions spécifiques de la Syrie. Le représentant a déclaré que la nomination de M. Staffan de Mistura comme Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie devrait apporter un nouvel élan au processus.
M. CRISTIÁN BARROS MELET (Chili) a rappelé que l’adoption de cette résolution n’aurait pas été nécessaire si toutes les parties avaient respecté les résolutions précédentes, dont notamment la résolution 2139. Il a plaidé pour la démilitarisation du conflit syrien, et s’est opposé à l’afflux d’armes en Syrie. Il a prévenu que les résolutions du Conseil sur l’aide humanitaire ne suffiront pas tant qu’on ne trouve pas une solution politique au conflit, qui doit être une solution qui inclue toutes les parties, qui soit dirigée par les Syriens eux-mêmes, et qui se fonde sur le Communiqué de Genève. Le représentant a exprimé tout son soutien au nouvel Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour la Syrie, M. Staffan de Mistura.
M. JOON OH (République de Corée) a expliqué que sa délégation a voté en faveur de la résolution 2165 (2014) dans l’espoir que les mesures déjà prévues dans la résolution 2139 (2014) du Conseil de sécurité soient pleinement appliquées. Ces deux résolutions devront faire évoluer positivement la situation humanitaire sur le terrain, a espéré le représentant qui a appelé toutes les parties au conflit en Syrie à procéder à la mise en œuvre intégrale des termes des deux textes. Il a aussi demandé la mise en œuvre de la déclaration présidentielle du 2 octobre 2013, qui porte elle aussi sur la situation en Syrie.
Mme MARÍA CRISTINA PERCEVAL (Argentine) a cité Nelson Mandela, qui disait que les Conventions de Genève nous rappellent l’obligation de prendre soin les uns des autres. Elle a accusé les parties au conflit en Syrie de continuer de bafouer le droit international, et elle a souligné que l’accès humanitaire s’est compliqué du fait d’actes provenant aussi bien du côté du Gouvernement que de celui de l’opposition. L’Argentine est convaincue qu’avec l’adoption de cette résolution, le Conseil assume les responsabilités qui lui incombent, dont celle de protéger les civils. Elle a espéré que la mise en œuvre de la résolution pourra alléger le fardeau que fait peser la crise en Syrie sur les pays voisins. Mais, a-t-elle prévenu, il ne faut pas se leurrer. Même si on parvenait à obtenir tous les fonds nécessaires à la satisfaction de la demande humanitaire et que l’aide parvenait aux populations dans le besoin, l’impact du conflit continuerait de se traduire par les effets déstabilisateurs des tensions sectaires qui traversent tout le Moyen-Orient. La crise en Syrie continuerait de se manifester par la propagation des idéologies extrémistes et du terrorisme dans toute la région et au-delà, comme en témoignent les arrivés de jeunes gens, qui viennent de tous les coins de la planète pour combattre en Syrie. On ne pourra pas contenir ce phénomène si la crise n’est pas réglée, a prévenu la représentante. La résolution adoptée par le Conseil de sécurité le dit: en Syrie, il faut une solution politique incluant toutes les parties et dirigée par les Syriens eux-mêmes.
La représentante de l’Argentine a ensuite lancé un appel aux parties et aux acteurs régionaux et internationaux pour qu’ils continuent à mettre en place les conditions nécessaires aux négociations. L’aide humanitaire doit parvenir en Syrie, mais il faut aussi trouver la façon dont on pourrait empêcher les armes et les combattants étrangers d’entrer dans le pays. Le Conseil doit devenir un outil contribuant à la recherche d’une solution à la crise. Ce n’est pas une solution militaire qui règlera cette crise, a insisté la représentante.
M. DAINIUS BAUBLYS (Lituanie) a dit que lorsqu’un gouvernement ne parvient pas à garantir la sureté et la satisfaction des besoins de base de ses citoyens, il ne doit pas chercher à entraver l’action des organisations internationales qui essaient d’apporter leurs secours à cette population. Ces trois dernières années, les principes humanitaires ont été constamment violés par toutes les parties au conflit en Syrie, y compris par le Gouvernement syrien, a accusé le représentant. Les Syriens ont donc attendu l’aide qui pouvait leur parvenir de l’extérieur. Nous saluons les États voisins de la Syrie, dont le Liban et la Jordanie, qui ont ouvert leurs frontières aux réfugiés syriens et palestiniens. La résolution de ce jour est une mesure partielle et temporaire, a cependant estimé le représentant. L’objectif ultime reste la résolution pacifique du conflit à travers un processus politique. Il a salué la nomination de l’Envoyé spécial du Secrétaire général M. Staffan de Mistura. Il a espéré que la paix sera restaurée en Syrie. La paix répondrait aux espoirs du peuple syrien, a-t-il dit. Le conflit en Syrie n’est pas un problème régional. Il est devenu une menace à la paix et à la sécurité internationales, a-t-il ensuite estimé. De ce fait, le Conseil de sécurité devra prendre des mesures en cas de non-application des résolutions 2139 et 2165 par les parties syriennes, et le Conseil pourrait envisager de référer la situation en Syrie à la Cour pénale internationale, a dit le représentant.
M. GÉRARD ARAUD (France) a estimé que cette résolution était nécessaire parce que les résolutions précédentes n’ont pas été mises en œuvre; parce que la tragédie se poursuit en Syrie; et parce que les agences humanitaires pourraient faire plus et mieux si « le régime syrien » ne fermait pas ses frontières, ne multipliait pas les obstacles administratifs et ne compliquait pas les choses pour que l’aide ne parvienne pas dans les bastions de l’opposition. Décrivant la résolution, et notamment ses termes relatifs à l’ouverture de quatre points frontière qui étaient jusqu’ici fermés, le représentant a estimé qu’elle innove en ce sens qu’elle met en place un mécanisme pour que « le régime syrien » n’ait pas de raison d’objecter à l’aide. La résolution, a-t-il mis en garde, ne complète ni ne remplace la résolution 2139, dont toutes les exigences demeurent d’actualité. La résolution adoptée aujourd’hui souligne que la solution politique n’est toujours pas là, a indiqué le représentant. La France, a-t-il promis, accompagnera M. de Mistura dans ses efforts pour parvenir à une solution fondée sur le Communiqué de Genève.
M. MAHAMAT ZENE CHERIF (Tchad) a, après avoir remercié les auteurs de la résolution, espéré que l’adoption de ce texte contribuera à améliorer la situation humanitaire en Syrie et à y alléger la souffrance des populations civiles. Il a appelé au respect du droit humanitaire et à assurer l’accès sans entrave de l’aide aux populations civiles. Le représentant a espéré que la résolution adoptée ce jour ne deviendra pas juste une résolution de plus sur la crise en Syrie, mais qu’elle mettra un terme aux obstacles dressés contre les activités des organisations humanitaires qui peinent à venir en aide aux populations qui sont dans le besoin. Le Conseil de sécurité doit veiller à la mise en œuvre de cette résolution, et la communauté internationale doit redoubler d’efforts pour encourager les parties syriennes à la reprise des négociations en vue d’une solution durable à la crise, a recommandé le représentant.
Mme JOY UGWU (Nigéria) a estimé que la résolution que venait d’adopter le Conseil de sécurité est la preuve de l’engagement sans relâche du Conseil en faveur des intérêts du peuple syrien. À son tour, elle a dit que le Nigéria apportait son appui au Communiqué de Genève et soutenait M. de Mistura, le nouvel Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU dans l’accomplissement de sa mission.
M. EUGÈNE-RICHARD GASANA (Rwanda) a dit que la résolution adoptée aujourd’hui par le Conseil de sécurité contient des mesures importantes pour la fourniture de l’aide en Syrie à travers l’ouverture de quatre points frontière du pays. Il a demandé aux parties au conflit de mettre en œuvre la résolution. Il a dit que seule une solution politique pourra mettre en terme à la crise en Syrie et a salué la nomination de M. Staffan de Mistura comme Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie tout en demandant à tous les acteurs de la scène syrienne de lui apporter leur appui. Il a invité tous ceux qui ont une influence sur les parties syriennes à les aider à revenir à la table des négociations.
M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne)) a accusé certains États membres du Conseil de sécurité d’invoquer l’aide humanitaire pour mettre en œuvre leurs visées expansionnistes en Syrie et au Moyen-Orient. Il a défendu le Gouvernement syrien, dont la coopération avec le monde humanitaire, dont les agences de l’ONU, est avérée. Il a tout tenu à rappeler que l’aggravation de la situation humanitaire en Syrie est imputable à la multiplication des actes terroristes, dont ceux commis par des groupes affiliés à Al-Qaida. « Mettre un terme au terrorisme est la seule manière de mettre fin aux souffrances du peuple syrien », a-t-il dit. Il a demandé que des pressions soient exercées par le Conseil de sécurité sur les Gouvernements qui financent, abritent ou entraînent les terroristes. Le moment est venu pour l’ONU « de se montrer ferme à l’égard de l’Arabie saoudite, du Qatar ou de la Turquie, qui financent, soutiennent et servent de base aux groupes terroristes dont ISIS et le Front Al-Nusra», a souligné le représentant. Il faut mettre un terme aux diverses formes d’appui aux terroristes et imposer des mesures punitives aux pays ou individus et entités qui violent les résolutions antiterroristes du Conseil de sécurité, a préconisé M. Ja’afari. Le représentant s’est donc dit déçu d’entendre, au Conseil de sécurité, des interventions qui considèrent les terroristes comme des représentants ou des membres de l’opposition syrienne. Il a accusé les États qui prennent des mesures unilatérales et coercitives contre la Syrie de participer à l’aggravation de la crise humanitaire. Le représentant n’a pas manqué d’attiré l’attention sur un article paru en France, qui dénonce l’attitude de gouvernementaux en Syrie et les erreurs qu’ils y commettent, et qui pose la question de savoir pourquoi on s’est trompé sur la Syrie. M. Ja’afari a, en français, donné la réponse à cette question: les puissances étrangères responsables de la crise en Syrie le sont par ignorance historique, par manichéisme politique, et par « wishful thinking » (attitude qui consiste à prendre ses désirs pour des réalités) diplomatique.