En cours au Siège de l'ONU

AG/EF/3385

Une réunion de l'ECOSOC et de la Deuxième Commission exhorte les États à former les jeunes et les femmes aux technologies des emplois du futur

8/11/2013
Assemblée généraleAG/EF/3385
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Deuxième Commission                                        

33e séance – matin


UNE RÉUNION DE L’ECOSOC ET DE LA DEUXIÈME COMMISSION EXHORTE LES ÉTATS À FORMER

LES JEUNES ET LES FEMMES AUX TECHNOLOGIES DES EMPLOIS DU FUTUR


La Commission économique et financière (Deuxième Commission) et le Conseil économique et social (ECOSOC) ont tenu ce matin une réunion de travail conjointe sur le thème « L’avenir de l’emploi: le monde du travail en 2030 ». 


Face aux mutations en cours sur le marché du travail, des intervenants à ce débat ont suggéré que des mesures soient prises, notamment en termes d’éducation et de formation, afin de former les futurs demandeurs d’emplois, notamment les jeunes et les femmes aux nouvelles technologies dont la maîtrise sera indispensable pour occuper un emploi dans un environnement de travail changeant.  Le secteur de l’emploi est aujourd’hui miné par des taux de chômage qui dans certains pays atteignent de 25 à 50% de la population en âge de travailler, ont relevé des panélistes, précisant que 197 millions de personnes étaient sans emploi à travers le monde en 2012, dont 73,8 millions de jeunes.


Invité de cette table ronde, le Directeur de l’Institut international d’études sociales de l’Organisation internationale du Travail (OIT), M. Raymond Torres, a noté que des progrès tangibles ont été accomplis dans le cadre de la protection sociale des travailleurs, même s’il reste de nombreuses inégalités en la matière entre les régions du monde.  Il a aussi relevé que la propagation des nouvelles technologies, notamment numériques, allait se poursuivre, offrant de nombreuses opportunités d’affaires et permettant une meilleure interaction entre les travailleurs et les entrepreneurs. 


Le Président de la Deuxième Commission, M. Abdou Salam Diallo, du Sénégal, a souligné que chaque pays fera l’expérience de cette révolution de manière différente de celle de ses voisins, tout dépendant de l’état de l’économie de chacun d’entre eux.  Le monde ne peut se permettre une nouvelle fracture numérique entre ceux dont les citoyens auront la chance d’être formés aux technologies et ceux dont les populations n’en auront pas la maîtrise, a-t-il prévenu.


En plus de l’exclusion et de la discrimination au niveau technologique, M. Adam Greene, du Conseil des États-Unis pour les affaires internationales, a pour sa part appelé les pays et les sociétés à prendre en compte l’approche genre, la parité entre les sexes, et à promouvoir l’inclusion des femmes dans la vie publique et dans le monde du travail.  « Aucun pays ne peut se développer en mettant de côté la moitié de sa population et de ses cerveaux », a-t-il déclaré.


Il faudrait veiller à ce que les filles terminent leur cycle d’éducation primaire, et mettre fin aux préjugés qui font qu’elles ne bénéficient pas des mêmes chances que les garçons, a renchéri Mme Barbara Birungi, Fondatrice et Directrice de « Women in Technology », une organisation de l’Ouganda.  Elle a également averti que l’impact des technologies faisant appel à l’intelligence artificielle et numérique serait différé en Afrique par rapport aux autres régions du monde, « car l’évolution des choses est plus lente sur le continent ».  Elle a prévenu, en outre, que les emplois traditionnels vont peu à peu disparaître, alors que le système d’éducation africain actuel reste encore orienté vers la préparation à ce type d’emplois.  Il faut que les Africains se forment aux nouvelles technologies afin de bénéficier des opportunités qui existent dans ce secteur, et les entreprises étrangères qui s’installent sur le continent africain devraient les aider, au lieu d’amener avec elles des cadres et des travailleurs provenant de leurs pays d’origine, a-t-elle préconisé, dénonçant que des emplois soient occupés en Afrique par des étrangers alors que de jeunes Africains y sont au chômage.


Au nom du Groupe des États d’Afrique, la représentante du Gabon a souhaité que le programme de développement pour l’après-2015 appuie la création d’emplois décents et bien rémunérés sur le continent, notamment en faveur des femmes et des jeunes.  Le représentant du Venezuela a, pour sa part, estimé que le Consensus de Washington, imposé aux pays du monde au début des années 90, et dont les préceptes et politiques favorisent l’économie de marché, avait entraîné le démantèlement de l’État-providence qui faisait le lien entre le revenu des travailleurs, la production et l’emploi, et permettait ainsi une redistribution équilibrée de la richesse nationale.  Cette réalité a fait dire au Professeur Marcio Pochmann, économiste à l’Institut d’économie et au Centre d’études sur les syndicats et l’économie du travail de l’Université d’État de Campinas, au Brésil, que les entreprises « possèdent » aujourd’hui les pays, remettant ainsi en cause la capacité des autorités publiques à définir ou imposer des politiques nationales.


Pour la plupart des intervenants, le monde de l’emploi de l’an 2030 sera résolument technologique et numérique.  Pour M. Peter Padbury, Directeur, Veille et prospective à l’entité gouvernementale « Horizons de politiques Canada », cette mutation est déjà en branle.  Il a ainsi évoqué les nouvelles techniques d’impression en trois dimensions (3D printing) grâce auxquelles on peut concevoir des objets en créant les pièces avec une précision d’orfèvre avant de les assembler pour obtenir le produit final.  Il a prévenu que ces technologies vont peut-être améliorer la productivité mais réduiront dans le même temps l’importance de la main-d’œuvre humaine, créant ainsi plus de chômeurs.  Les gouvernements qui combattront ces technologies, ou les ignoreront, perdront des opportunités économiques, et auront un retard sur ceux qui les auront adoptées, a-t-il prévenu.


Pour éviter que ce scénario catastrophique ne se réalise, M. Martin Sajdik, Vice-Président de l’ECOSOC, a souhaité que la formation soit au cœur des nouvelles politiques d’emploi, afin que les jeunes, et en particulier les jeunes femmes, soient pourvus des capacités requises pour s’adapter aux mutations technologiques qui s’imposent dans le monde de l’emploi.


La Deuxième Commission se réunira de nouveau lundi 11 novembre 2013, à 10 heures, dans le cadre de la réunion des annonces de contributions aux activités de développement.


SÉANCE CONJOINTE DE LA DEUXIÈME COMMISSION ET DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL SUR LE THÈME « L’AVENIR DE L’EMPLOI: LE MONDE DU TRAVAIL EN 2030 »


Déclaration liminaire


M. ABDOU SALAM DIALLO (Sénégal), Président de la Deuxième Commission, a relevé qu’à l’heure de la mondialisation, l’économie mondiale évolue vite, et que certaines de ses avancées changent les rapports de force entre nations et les perspectives de développement sans que, souvent, on ait eu le temps de prendre la mesure des nouveaux enjeux.  Il a dit que cette réalité s’applique au monde du travail qui connaît des mutations guidées par des facteurs technologiques, démographiques ou financiers qui se conjuguent et influent sur la définition qu’on donnera au travail dans les années à venir.  Il a noté que les changements sociaux qui en résulteront sont porteurs à la fois d’espoirs, de risques et de dangers, et que la « révolution numérique », et notamment l’impression en trois dimensions (3D printing), va offrir de nouvelles opportunités économiques et faciliter l’entreprenariat individuel dans les 20 prochaines années. 


M. Diallo a précisé que les conséquences de ces nouvelles technologies se feront sentir sur le marché du travail aussi bien dans les pays développés que dans ceux en développement.  Il a ensuite souligné que chaque pays fera l’expérience de cette révolution différemment selon l’état de son économie.  Il a par ailleurs rappelé que ces mutations interviennent alors que plus de 470 millions d’emplois doivent être créés entre les années 2015 et 2030 pour apporter une réponse aux effets de la crise financière dans le monde, et pour absorber la croissance de la population active mondiale.  M. Diallo a enfin relevé que de nouvelles compétences devront être enseignées à grande échelle pour tirer profit de ces évolutions, notamment aux jeunes, et il a estimé que le monde ne peut se permettre une nouvelle fracture numérique entre ceux qui seraient formés à ces technologies et ceux qui ne les maîtriseraient pas.


Exposés


M. RAYMOND TORRES, Directeur de l’Institut international d’études sociales de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a présenté trois grandes tendances positives qui se dégagent dans le domaine de l’emploi au niveau mondial.  Tout d’abord, a-t-il expliqué, le monde du travail va profiter d’une meilleure éducation des masses et des changements démographiques, sachant que la population des pays en développement sera beaucoup plus instruite en 2030 qu’actuellement.  Cela permettra de faire grossir la classe moyenne, phénomène que l’on constate déjà dans les pays émergents, a indiqué M. Torres.  Il a aussi indiqué que la propagation des nouvelles technologies, notamment numériques, allait se poursuivre, fournissant ainsi de nombreuses opportunités d’affaires et permettant une meilleure interaction entre les travailleurs et les entrepreneurs.  M. Torres a ensuite noté les progrès tangibles accomplis sur le plan social, même s’il reste de grandes inégalités entre les régions du monde.  Les pays du Sud ont adopté des lois visant à améliorer le droit du travail, s’est-il félicité, ce qui montre l’engagement croissant des gouvernements en faveur des progrès sociaux.


L’expert a cependant évoqué d’autres tendances qui, au contraire, aggravent la situation de l’emploi.  Il a ainsi relevé que l’écart se creusait entre les pays en matière de technologie.  En outre, les circonstances d’emploi changent à un rythme rapide, a-t-il noté, soulignant l’augmentation du nombre de contrats de courte durée et d’emplois informels, observable à travers le monde.  L’expert a aussi mentionné l’augmentation du chômage et le problème du sous-emploi.  En dépit des bénéfices faits par les entreprises, qui ont augmenté, les prévisions concernant la création de meilleurs emplois ne se sont pas concrétisées, a-t-il regretté.  Le chômage des jeunes est en hausse partout dans le monde, et affecte notamment les jeunes diplômés, a-t-il relevé.  M. Torres a également craint que les disparités sociales s’accentuent et deviennent de plus en plus profondes.  Le processus qui permettait la mobilité et l’ascension sociale est en jeu, a-t-il averti.  Il a par ailleurs invité à remettre en question le système de prise de décisions politiques, et plus particulièrement le processus inhérent au fonctionnement des économies capitalistes.


Enfin, M. Torres a jugé essentiel pour tous les pays de travailler dans le cadre de la coopération internationale.  Dans certains domaines, il vaut mieux agir au niveau régional, mais d’autres domaines comme celui de la réglementation financière doivent être traités au plan international, a-t-il recommandé.  En conclusion, il a averti que le décalage croissant entre les technologies disponibles d’un pays à un autre, ainsi que les situations inégales observées dans les marchés du travail, créent de plus en plus de frustration chez les personnes et groupes les plus éduqués et aggravent les écarts de revenus.  Cette situation sera gérable dans certains pays en développement dont la classe moyenne grandit, mais cela ne sera pas facile à gérer dans les pays développés, a-t-il prévenu.  Il a donc conseillé d’adopter des mesures concertées et des normes de travail consensuelles, tout en améliorant la coordination de ces normes comme le fait l’OIT.


M. PAUL DE CIVITA, Vice-Ministre adjoint par intérim à Horizons de politiques Canada, intervenant par visioconférence depuis le Canada, a expliqué qu’Horizons de politiques Canada est un service du Gouvernement fédéral canadien.  Sa mission est de mener des analyses prospectives sur les grandes questions de politique mondiale, afin de renforcer les capacités d’adaptation des agences et services canadiens, et de guider les processus de planification des instances gouvernementales canadiennes.  Avant de passer la parole à l’un de ses collègues, M. De Civita a indiqué que quatre technologies vont probablement orienter et guider les mutations du secteur de l’emploi, à savoir la technologie numérique, la nanotechnologie, la biotechnologie et la neurotechnologie.


M. PETER PADBURY, Directeur, Veille et prospective à Horizons de politiques Canada, qui intervenait également par visioconférence, a dit que le travail des experts d’Horizons politiques Canada n’est pas de l’art divinatoire visant à prévoir l’avenir.  Il a déploré le fait que les populations ne soient pas conscientes des mutations technologiques en cours, et il a souhaité qu’elles en soient informées.


M. Padbury a par exemple relevé que l’intelligence artificielle permet aujourd’hui d’appliquer à travers des machines des modes de raisonnement s’inspirant de la logique humaine, ceci étant démontré par les technologies qui, par exemple permettent à une automobile de se conduire sans intervention directe humaine.  Il a parlé également de l’analyse des données qui permet de comprendre des comportements individuels, par exemple sur Internet où les habitudes des usagers sont traquées et tracées, afin de prévoir ainsi leurs futures actions, et d’en déduire des actions commerciales et de marketing.  Les capteurs analytiques permettent aujourd’hui aux firmes de marketing commercial de suivre en ligne les goûts et habitudes des consommateurs et des clients potentiels.  Il a relevé qu’en les fusionnant avec des programmes d’intelligence artificielle, on peut utiliser ces capteurs analytiques pour mener des campagnes de médecine préventive.  Il est désormais possible de procéder, au bénéfice d’un individu, à des tests d’analyse et de dépistage d’une centaine de maladies à partir d’une seule goutte de sang prélevée sur cette personne.


M. Padbury a ensuite évoqué les robots.qui sont utilisés par exemple dans des restaurants ou dans les services d’accueil hôteliers et autres, avec des coûts inférieurs à ceux d’un employé humain rendant le même service.  Ces robots augmentent à la fois la productivité du restaurant et ses bénéfices.  Il a en outre parlé des nouvelles techniques d’impression en trois dimensions (3D printing) avec lesquelles ont peut produire des objets en créant des pièces avec une précision d’orfèvre avant de les assembler pour obtenir le produit final.  À terme, a-t-il prévenu, ces technologies vont changer la nature de la chaîne d’approvisionnement et permettront, par exemple, de ramener en Amérique du Nord les emplois du secteur manufacturier qui avaient été délocalisés en Asie.  


Quant aux techniques de la biologie synthétique, elles vont permettre, par exemple, de récupérer les chromosomes d’un organisme vivant, les assembler et utiliser le résultat obtenu pour créer de nouveaux types de composants jamais vus dans la nature.  Il a prévenu que d’ici une dizaine d’années, ces technologies vont peut-être améliorer la productivité en réduisant la main-d’œuvre humaine, créant ainsi plus de chômeurs.  Les gouvernements qui combattront ces technologies, ou les ignoreront, perdront des opportunités économiques, et prendront un retard sur ceux qui les auront eux adoptées.  Il y aura probablement moins d’emplois conventionnels dans l’avenir, a prévenu l’expert.  De même, a-t-il ajouté, de nouvelles qualifications seront nécessaires aux gens pour se faire une place sur le marché du travail, et de plus en plus de tâches économiques se feront de manière virtuelle. 


Participant à cette séance par téléconférence, M. MARCIO POCHMANN, Économiste et Professeur à l’Institut d’économie et au Centre d’études sur les syndicats et de l’économie du travail de l’Université d’État de Campinas, Brésil, a observé que les pays doivent choisir les fonctions économiques qu’ils souhaitent accomplir dans le cadre des chaînes mondiales d’approvisionnement.  Les entreprises « possèdent » aujourd’hui les pays, a-t-il ajouté, estimant que cela remettait en cause la capacité des autorités publiques à définir ou imposer des politiques nationales mêmes, ainsi que leur aptitude à avoir une influence sur la qualité de l’emploi.  Il a aussi noté que la transition vers des économies de service aboutit à une ouverture de la réglementation du travail.  La journée de travail s’allonge et s’intensifie, tandis que le foyer familial devient lui-même un nouveau lieu de travail, mais sans réglementation appropriée, a-t-il aussi observé.


M. Pochmann a ensuite souligné que l’espérance de vie de la population mondiale augmentait, ainsi que le niveau d’éducation et de formation professionnelle.  Les femmes sont de plus en plus éduquées et elles participent davantage au marché du travail.  Néanmoins, leurs revenus demeurent inférieurs à ceux des hommes, a-t-il noté.  Le panéliste a aussi abordé la question de la discrimination raciale qui a un impact et une influence sur les conditions de travail.  Les travailleurs « non blancs » perçoivent les salaires et les revenus les plus bas, a-t-il noté.  Il a aussi déploré la précarisation du travail au fur et à mesure que le temps avance, ce qui se manifeste par un taux de chômage élevé.  M. Pochmann a donc recommandé d’adopter de nouvelles politiques de gouvernance mondiale en matière d’emploi.  La transition vers l’économie de service est compatible avec l’emploi des jeunes, a-t-il estimé. 


Mme BARBARA BIRUNGI, Fondatrice et Directrice de « Women in Technology  », de l’Ouganda, a averti que l’impact de l’intelligence numérique sur l’Afrique serait différé par rapport aux autres régions du monde, « car l’évolution en Afrique est plus lente ».  Elle a prévenu que les emplois traditionnels allaient disparaître, alors que le système d’éducation actuel était conçu pour préparer seulement à ce type d’emplois.  « Des étrangers exercent partout en Afrique des fonctions que les Africains ne peuvent assumer parce que bien souvent ils n’ont pas les compétences nécessaires ».  Ceci est vrai dans le domaine des technologies, a dit Mme Birungi.  Elle a reproché aux entreprises étrangères de ne pas former les gens dans les pays africains où elles s’installent, car elles préfèrent amener du personnel de leurs pays d’origine.  Elle a donc recommandé de former les jeunes africains aux technologies pour qu’ils puissent non seulement exercer les métiers disponibles mais aussi créer leurs propres emplois.  Il faut pour cela leur permettre de poursuivre des formations postscolaires et développer la formation continue tout au long de leur carrière, a-t-elle recommandé.


En Ouganda, chaque école est dotée d’ordinateurs, mais malgré cela certains élèves du secondaire ont du mal à se servir correctement d’un clavier après trois ans de formation dans ce domaine, a dit Mme Birungi.  Elle a donc plaidé en faveur d’un enseignement plus concret et a préconisé que les effectifs d’enseignants soient renforcés.  Beaucoup d’Africains essayent de rattraper ce retard, mais tous n’y arrivent pas, a-t-elle regretté.  Avec un fort taux de fécondité en Afrique, taux qui atteint six enfants par femme en moyenne en Ouganda, il faut préparer les enfants à l’avenir, a lancé Mme Birungi.  Elle a conseillé de commencer par veiller à ce que les filles terminent l’école primaire, et qu’on mette fin aux préjugés qui font que les filles ne bénéficient pas des mêmes chances que les garçons.


L’emploi n’est pas non plus égal pour les hommes et les femmes en Afrique, a estimé Mme Birungi, regrettant qu’il n’y ait pas de législation appropriée dans ce domaine.  Il faut se concentrer sur les moyens de lutter contre l’abandon scolaire des filles, a-t-elle préconisé.  Au cours de l’étape suivante, il faut créer des opportunités d’emplois pour les femmes, a-t-elle ajouté, notamment en les formant et en les encourageant à créer leur propre emploi.  En Ouganda, le nombre de femmes qui travaillent dans le secteur des technologies de l’information et des communications (TIC) est peu élevé, malgré le nombre important de diplômées en informatique qui ne savent pas qu’elles peuvent créer leur propre emploi.  Passant aux enfants, Mme Birungi a lancé un appel pour les gouvernements et les familles changent leur mode d’éducation.  Trop souvent, les parents décident des études et du futur métier de leurs enfants, a-t-elle dit, avant de suggérer que des changements soient opérés dans les politiques d’éducation.  Il faut non seulement que le monde investisse en Afrique mais aussi qu’il investisse dans les Africains, a-t-elle conclu.  Cela implique de les aider à se former. De leur côté, les gouvernements africains doivent travailler à l’autonomisation des jeunes, a dit l’intervenante.


M. ADAM GREENE, du Conseil des États-Unis pour les affaires internationales, a rappelé que le grand défi mondial de l’heure est de créer près d’un demi-milliard d’emplois.  Il a précisé que la mise en œuvre des programmes nécessaires pour faire face à ce défi se fera au niveau national.  Il a ainsi plaidé pour la mise en place d’environnements propices à l’essor des petites et moyennes entreprises (PME).  Il a aussi évoqué le rapport « Doing business » de la Banque mondiale qui analyse cet environnement des affaires dans chaque pays en utilisant des indicateurs comme les transports, les technologies de l’information et des communications (TIC), ou la politique fiscale, entre autres.


M. Greene a noté que le meilleur indicateur d’une économie non performante est le fait que le secteur informel représente plus de la moitié du produit intérieur brut (PIB) du pays concerné.  Il a expliqué que cette situation peut signifier que les mesures fiscales et l’environnement global sont si hostiles aux affaires que les entrepreneurs contournent les obstacles en investissant dans le secteur informel, ce qui fait perdre des taxes et des devises au gouvernement.  Il a précisé qu’en vue de rendre l’économie plus performante, un gouvernement a juste besoin de modifier ses politiques et règlements.  Il a également souligné que l’accès à l’éducation pour tous, garçons et filles, est crucial pour l’essor économique d’un pays.  « Aucun pays ne peut se développer en mettant de coté la moitié de sa population et de ses cerveaux », a-t-il déclaré en appelant au respect de l’approche genre et à l’inclusion des femmes dans la vie publique et dans le monde du travail.  Il a prôné la responsabilisation des enfants afin d’en faire dans l’avenir des entrepreneurs sérieux et à succès.


M. PETER BAKVIS, Directeur de « Global Unions  » à Washington D.C., a recommandé que des formations soient données aux entrepreneurs afin qu’ils soient au fait des mutations et des nouvelles tendances de l’économie mondiale et du monde de l’emploi.  Il a relevé que le G-20 compte en son sein l’initiative « Business 20 » qui favorise les formations en faveur du patronat.  Il a regretté le fait que les inégalités sociales ne cessent de grandir à travers le monde.  Il a en outre évoqué la place du secteur informel dans les économies nationales, et il a cité le cas du Brésil, qui a mis en place de nouvelles mesures sociales pour la protection des travailleurs.  M. Bakvis a expliqué que ces mesures ont réduit le poids du secteur informel au Brésil, car beaucoup de travailleurs de ce secteur se sont intégrés au secteur formel de l’économie.  Il a par ailleurs noté qu’avec la crise financière et économique qui a débuté en 2008, le G-20 a mis en place des mesures pour encourager ses membres à protéger les emplois.  Il a plaidé par la mise en place de mesures visant la protection des droits des travailleurs à l’échelle internationale.  Il a noté que l’absence d’un environnement favorable au respect des droits des travailleurs représente un défi à relever et une opportunité d’action pour les Nations Unies.


Débat interactif


À des exposés des panélistes, un débat interactif a été lancé par le représentant du Venezuela qui est revenu sur l’histoire du capitalisme pour en dénoncer les conséquences négatives.  Évoquant la première révolution industrielle, qui a eu lieu en Angleterre, il a expliqué que l’accumulation des capitaux et de l’épargne s’était fait sur le dos d’un prolétariat dont le travail a profité à une minorité bourgeoise.  Il a estimé que le Consensus de Washington, imposé aux pays du monde au début des années 90, et dont les préceptes et politiques favorisent l’économie de marché, avait entraîné le démantèlement de l’État-providence qui faisait le lien entre le revenu des travailleurs, la production et l’emploi, et permettait ainsi une redistribution équilibrée de la richesse nationale.  Les banques ont aussi changé leur trajectoire d’activités et se sont lancées dans des investissements purement spéculatifs, a-t-il dénoncé.  Le représentant du Venezuela a prévenu que dans le monde du travail, en éliminant les processus de négociation collective, on portait atteinte à la démocratie et aux droits des travailleurs.  « On va à la catastrophe si on n’inverse pas ce processus », a-t-il averti. 


Au nom du Groupe des États d’Afrique, la représentante du Gabon a souhaité que le programme de développement pour l’après-2015 appuie la création d’emplois décents et bien rémunérés.  L’Afrique a bien progressé en termes d’utilisation des TIC ces dernières années, a-t-elle indiqué, tout en notant le potentiel important qu’il reste à exploiter dans ce domaine. 


Elle a estimé que la croissance de l’emploi devait passer par la transformation structurelle des économies africaines par le biais de l’industrialisation du continent.  Le but à atteindre est celui d’une croissance non exclusive et viable, qui puisse extraire la population de la pauvreté.  La création d’emplois sera possible si l’on améliore la formation des travailleurs, a-t-elle ajouté.  Les politiques qu’il faut adopter dans ce sens doivent accorder la priorité aux besoins particuliers des femmes et des jeunes, a-t-elle préconisé, et il faut aussi chercher à améliorer la formation en matière de technologies.  En ce qui concerne le développement agricole, elle a appelé à investir dans ce secteur afin d’améliorer la sécurité alimentaire et de réduire les disparités entre les populations rurales et urbaines.


Lutter contre le chômage est une priorité pour l’Union européenne, a indiqué pour sa part le représentant de l’Union européenne.  Il a notamment souligné l’importance des emplois verts et des politiques sociales.  Il faut utiliser au mieux les ressources disponibles et mettre l’accent sur l’instauration de conditions propices à la création d’emplois décents.  L’investissement dans l’éducation et l’innovation est aussi une priorité.  L’Union européenne prend aussi des mesures pour faire face au décalage de compétences entre les travailleurs, a-t-il ajouté.


La représentante de l’Allemagne a parlé de la tenue d’une récente conférence internationale sur la jeunesse et l’emploi dont les travaux ont conclu, notamment, qu’il fallait se fonder sur des analyses solides pour améliorer la situation de l’emploi.  Il faut ensuite favoriser un dialogue social, adopter des politiques appropriées et renforcer l’autonomisation des femmes, a-t-elle indiqué.  En outre, il faut que le personnel des entreprises soit plus diversifié.  La représentante a demandé comment l’on pouvait envisager les salaires à l’avenir, sachant que le niveau des salaires ne peut plus être basé sur la seule productivité.


Pour sa part, le représentant du Suriname a jugé contradictoire qu’on demande au secteur privé de créer des emplois, tout en demandant aux gouvernements de prendre des mesures, notamment des lois garantissant un salaire minimum, qui sont considérées comme des entraves à l’embauche par les entreprises.  Il a dit qu’il était aussi très étrange qu’on parle de la technologie comme si la vie des gens et l’économie relevaient d’une sorte de scénario de science-fiction.


« Pensez à combien votre vie a changé au cours des 10 dernières années », a rétorqué le Directeur, Veille et prospective à Horizons de politiques Canada pour illustrer la révolution technologique et numérique.  Il a vanté les mérites du téléphone intelligent (smart phone), une plate-forme technologique qui évolue très rapidement en termes de performance, de potentiel et de capacités.  Les gouvernements des pays en développement vont pouvoir utiliser ces technologies pour transformer l’accès à des services comme les soins de santé, a-t-il prédit.


Répondant à la délégation de l’Allemagne, le Directeur de l’Institut international d’études sociales de l’OIT a dit qu’il croyait fermement à la vertu du principe de garantie de l’emploi des jeunes, mis en œuvre avec succès dans de nombreux pays.  Il a jugé utile de créer un nouveau partenariat entre le secteur de l’enseignement, les familles et le marché du travail.  Il a aussi appelé à faciliter le retour des femmes sur ce marché de l’emploi après qu’elles aient pris un congé de maternité.  Pour promouvoir la protection sociale, il faut que les gouvernements aient une assiette financière stable, a-t-il noté en demandant une aide internationale dans ce domaine.  Le partage des bonnes pratiques est une autre action commune que peut mener la communauté internationale, a-t-il souligné.


Le Directeur de « Global Unions  », de Washington, D.C., a souhaité qu’une stratégie mondiale, entérinée par les Nations Unies, soit adoptée pour appuyer la négociation collective à l’échelon national.  Il a reconnu que, dans les années 80, on avait mis l’accent sur la déréglementation, ce qui a causé la crise de 2008.  « Il faut inverser la tendance », a-t-il dit.  Le chômage des jeunes ne sera pas résolu tant que le chômage en général n’aura pas trouvé de solution, a-t-il prévenu.  Répondant à la délégation du Suriname, il a jugé fallacieux l’argument selon lequel le maintien de salaires au niveau le plus bas était la solution qui permet aux entreprises d’engranger des bénéfices.  On ne peut pas arriver au plein emploi si les salaires versés aux travailleurs sont trop bas et ne leur permettent donc pas d’acheter les biens de consommation dont ils ont besoin ou envie, a-t-il expliqué.  Ce genre de politique crée un cercle vicieux: moins les gens ont d’argent, moins ils consomment, et moins les entreprises produisent, ce qui fait stagner l’outil de production, l’économie elle-même, et donc la création d’emplois. 


Augmenter le salaire minimum n’est pas une mesure qui va à l’encontre des intérêts des entreprises, a estimé pour sa part le représentant du Conseil pour les affaires internationales des États-Unis.  Il a cité le cas de l’Allemagne dont le système, à cet égard, fonctionne bien.  S’agissant du monde du travail et des syndicats, il a estimé qu’il fallait y établir et appliquer des normes et des réglementations.  Il faut cependant combler les écarts entre la règlementation et la pratique, pour couvrir notamment les emplois du secteur informel, a-t-il recommandé.


M. MARTIN SAJDIK (Autriche), Vice-Président du Conseil économique et social,a, dans ses remarques de clôture, rappelé que les segments de haut niveau du Conseil économique et social (ECOSOC) tenus en 2006 et 2012 avaient été consacrés à la question de l’emploi dans le monde, précisant ensuite que la création d’emplois doit être au cœur de toute stratégie de développement.  Il a noté que la Déclaration ministérielle qui a sanctionné le segment de haut niveau de l’ECOSOC de 2012 avait particulièrement porté son attention sur le chômage des jeunes. 


M. Sadjik a souligné qu’avec la technologie numérique et les mutations qu’elle est en voie d’engendrer, de nombreux emplois allaient être perdus, augmentant ainsi le nombre de chômeurs et créant des perturbations sociales.  Il a ensuite insisté sur le fait que les stratégies de développement devraient cibler la lutte contre le chômage en priorité, notamment le chômage des jeunes, et étendre les systèmes de protection sociale.  Il a, en outre, souhaité que la formation soit au cœur des nouvelles politiques d’emploi, afin que les jeunes, et en particulier les jeunes femmes, soient pourvus des capacités requises pour s’adapter aux mutations technologiques que vit le monde de l’emploi.  Il a également indiqué que dans le contexte de l’élaboration du programme de développement pour l’après-2015, il serait adéquat de considérer la mise en commun des questions d’emploi et d’éducation, d’un côté, et celles de la réduction de la pauvreté et du développement durable de l’autre.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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