Des États mettent en garde contre toute interprétation ou application discriminatoires d’un futur traité sur le commerce des armes
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Conférence des Nations Unies
sur les armes légères
7e séance – matin
DES ÉTATS METTENT EN GARDE CONTRE TOUTE INTERPRÉTATION OU APPLICATION DISCRIMINATOIRES
D’UN FUTUR TRAITÉ SUR LE COMMERCE DES ARMES
Des délégations exigent le respect inconditionnel du droit d’un État à acquérir
les armes dont il a besoin pour assurer sa sécurité et sa défense, garanti par la Charte de l’ONU
Ouverte la semaine dernière au Siège de l’ONU à New York, la Conférence des Nations Unies pour un traité sur le commerce des armes a poursuivi ce matin son débat général. Alors que les négociations sur le futur traité se poursuivent, des questions relatives aux critères régissant le commerce et le transfert des armes et à la possible politisation du texte et de son application ont été ce matin au cœur des débats.
Le débat général a donné à plusieurs États l’occasion de rappeler que l’objectif d’un traité sur le commerce des armes n’était pas d’interdire, mais plutôt de réguler les transferts d’armes classiques. Ainsi, les délégations du Bangladesh, du Ghana, de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, des Philippines ou encore de l’Iran ont-elles rappelé l’existence du droit inaliénable et souverain qu’ont les États d’acquérir les moyens leur permettant d’assurer leur sécurité et leur légitime défense, un droit prévu dans l’Article 51 de la Charte des Nations Unies. Le représentant de l’Iran a ainsi dit que le futur traité devra notamment respecter le droit qu’a un État d’assurer sa propre sécurité et sa défense, et qui l’autorise à acquérir –y compris à partir de sources extérieures–, fabriquer, produire, posséder, exporter, importer et transférer des armements de type conventionnel.
Citant la Charte des Nations Unies, le représentant iranien a par ailleurs souhaité que la Conférence parvienne à adopter un texte fondé sur le principe du respect de la souveraineté des États et qui, plutôt que de protéger les intérêts des grands pays producteurs et exportateurs d’armes, permette de trouver un équilibre entre les droits, les obligations et les intérêts des pays exportateurs et ceux importateurs d’armes.
Pour sa part, la délégation du Bangladesh a mis en garde contre le danger que représenterait une manipulation des critères définis dans le traité. Il serait inacceptable que certains États manipulent l’application du traité dans le seul but de promouvoir des objectifs politiques, géostratégiques et de sécurité qui leur seraient propres et serviraient leurs intérêts nationaux, a-t-il dit. Faisant écho à ces préoccupations, le représentant de la Colombie a mis en garde la Conférence contre les dangers d’un texte dont l’application pourrait être faite de manière discriminatoire pour interdire ou refuser des ventes d’armes à des États pour des raisons politiques. Le représentant a souhaité l’établissement d’un solide mécanisme de règlement des différends dans le cadre duquel les pays exportateurs informeraient, dans un délai raisonnable, les pays importateurs des raisons justifiant un refus de vente d’armes afin que l’État à qui le transfert est refusé puisse répondre aux questions et objections concernant sa demande d’achat de matériel.
S’agissant de la mise en œuvre des obligations du futur traité, plusieurs délégations sont revenues sur la nécessité qu’une assistance soit apportée aux pays qui ne seraient pas en mesure d’accomplir cet objectif. Il faut donner aux pays les moins avancés (PMA) les matériels et la technologie dont ils ont besoin et qui favoriseraient la mise en œuvre des dispositions et des objectifs contractuels du traité, a ainsi préconisé le représentant du Bangladesh.
Pour sa part, le représentant de l’Algérie a jugé important que le traité établisse une structure de coopération et d’assistance internationales au sein de laquelle les États puissent demander et recevoir une aide d’autres États ou organismes régionaux et sous-régionaux, afin que soit facilitée la mise en œuvre des obligations qui leur incombent en vertu du traité, y compris la mise à niveau de leur cadre législatif et réglementaire.
Enfin, plusieurs délégations ont, à l’image de celle du Bénin, mis l’accent sur l’importance d’empêcher l’achat et l’utilisation d’armes classiques par les acteurs non étatiques. La délégation du Soudan du Sud a expliqué que son pays et la région à laquelle il appartient avaient été dévastés par des guerres sans fin, et que ces guerres civiles avaient été exacerbées par la disponibilité d’armes classiques de tous genres sur le marché noir, ces armements étant parfois importés avec la complicité d’acteurs non étatiques. Soulevant le lien qui peut exister entre circulation illicite d’armes et actes de terreur, la représentante de l’Inde a demandé que le futur traité des Nations Unies sur le commerce des armes puisse servir d’outil de lutte contre le terrorisme en empêchant les groupes terroristes de recevoir les armes et explosifs dont ils se servent pour tuer des innocents.
La Conférence des Nations Unies pour un traité sur le commerce des armes poursuivra ses travaux demain, mercredi, le 11 juillet, à partir de 10 heures.
Suite du débat général
Souscrivant à la déclaration prononcée par le Mexique, au nom du Groupe des amis du traité sur le commerce des armes, M. MIGUEL CAMILO RUIZ (Colombie) a, dans un premier temps, jugé capital que le traité englobe les armes légères et de petit calibre (ALPC), ainsi que les munitions et les explosifs. Il a ensuite précisé qu’il importait également que les négociations du futur traité se fondent sur le principe de la responsabilité partagée entre les parties impliquées dans le transfert des armes, et ce, durant tout le cycle de vie de ces armes, depuis leur production jusqu’à leur destruction.
Le représentant de la Colombie a aussi mis l’accent sur le principe de la non-discrimination en expliquant qu’il fallait éviter que le futur traité soit utilisé de manière discriminatoire pour interdire ou refuser la vente d’armes à des États pour des raisons politiques. À cet égard, il a souhaité la mise en œuvre d’un solide mécanisme de règlement des différends. Les pays exportateurs devraient ainsi informer, dans un délai raisonnable, les pays importateurs des raisons qui ont justifié un refus de vente d’armes afin que l’État à qui le transfert est refusé puisse répondre aux questions et objections concernant sa demande et lever ainsi les doutes. Enfin, M. Ruiz a estimé qu’il était essentiel de créer un mécanisme d’échange d’informations, ainsi qu’un mécanisme d’assistance et de coopération internationales souple et rapide qui soit à la fois capable de renforcer les capacités nationales et d’encourager l’échange de bonnes pratiques et le transfert de technologies.
M. MOURAD BENMEHIDI (Algérie) a indiqué qu’il fallait parvenir à l’élaboration d’un traité pratique, qui soit de nature à rassembler aussi bien les gros exportateurs et importateurs d’armes que les États victimes du commerce illicite des armes. A contrario, un traité, qui dès le départ serait trop restrictif, pourrait avoir comme résultat d’encourager le trafic illicite d’armes, a-t-il averti. L’Algérie estime que le futur traité devrait avoir pour but de simplifier et réguler le commerce des armes et le rendre plus sûr, et également de prévenir, combattre et éradiquer le trafic illicite des armes conventionnelles sous toutes ses formes par des acteurs non étatiques (groupes terroristes et organisations criminelles). En termes de principes, l’instrument devrait être fondé sur les principes de la Charte des Nations Unies, a indiqué le représentant, en citant notamment le respect du principe de l’égalité souveraine des États.
Concernant le champ d’application d’un traité sur le commerce des armes, l’Algérie souhaite qu’y figurent les sept catégories prévues par le Registre des armes classiques des Nations Unies (résolution 46/36 de l’Assemblée générale de 1991) ainsi que les armes légères et de petite calibre, objet du Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre, adopté en juillet 2001, et de l’Instrument international visant à permettre aux États de procéder à l’identification et au traçage rapides et fiables des armes légères et de petit calibre illicites (adopté en 2005), et de leurs munitions, a souligné M. Benmehidi. S’agissant de la mise en œuvre du traité, l’Algérie juge important que celui-ci établisse une structure pour la coopération et l’assistance internationales au sein de laquelle les États puissent demander et recevoir de l’aide d’autres États ou organismes régionaux et sous-régionaux afin de faciliter la mise en œuvre des obligations qui leur incombent en vertu du traité, y compris la mise à niveau de leur cadre législatif et réglementaire. Le représentant a ensuite souligné que le traité devait être adopté par consensus, conformément aux dispositions du règlement intérieur de la Conférence. De même, en vue de parvenir à l’objectif de l’universalité du futur traité, l’adhésion des grands exportateurs et importateurs d’armement au futur texte est indispensable, a-t-il dit.
M. MILORAD ŠĆEPANOVIĆ (Monténégro) a estimé que le futur traité sur le commerce des armes changerait les choses en faveur de la paix et de la sécurité internationales, ainsi qu’en faveur d’un meilleur respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. C’est la raison pour laquelle, il a plaidé pour la négociation de critères vigoureux et clairement définis devant être inclus dans le traité. Il a également estimé que le traité devrait comprendre un mécanisme de présentation des rapports rendant obligatoire la soumission de rapports nationaux et tenant compte des capacités limitées des petits États.
Le représentant a ensuite appelé tous les États à agir de façon transparente au cours du processus de négociation. « Nous savons que chaque pays a un enjeu en ce qui concerne l’issue à laquelle nous allons parvenir sur la question de l’élaboration du traité », a dit le représentant. « Mais nous devons garder à l’esprit notre objectif commun, qui était exprimé dans la résolution 64/48 de l’Assemblée générale de 2009, et qui visait la conclusion d’un accord afin de prévenir les pertes de vies innocentes et de soulager les millions de personnes qui, chaque jour, souffrent de la violence armée », a-t-il déclaré.
M. MD. NOJIBUR RAHMAN (Bangladesh) a estimé que le texte ne reprenait pas de manière appropriée les buts et objectifs assignés au futur traité et qu’il fallait revoir la partie concernée du document. Il a rappelé que l’objectif ultime était la prévention et la lutte contre le trafic des armes classiques, tout en insistant sur la nécessité que le futur traité n’aille pas à l’encontre du droit des États à la légitime défense. Le Bangladesh estime que le traité doit avoir une portée globale et que sa mise en œuvre doit être faisable. Le représentant a ensuite dit que la définition qui sera faite des armes classiques dans le traité devra être souple et adaptable aux avancées technologiques. S’agissant de la question des critères, il a souligné le danger d’une manipulation de ceux-ci par certains États qui chercheraient, à travers ce traité, à promouvoir des objectifs politiques, géostratégiques et de sécurité qui leur seraient propres. En ce qui concerne la mise en œuvre, le représentant a souligné que certains pays ne disposaient pas de systèmes nationaux de contrôle efficaces et qu’il fallait y remédier grâce à la coopération et l’assistance internationales. Il faut donner aux pays les moins avancés (PMA) les matériels et la technologie dont ils ont besoin et qui favoriseraient la mise en œuvre des dispositions et des objectifs contractuels du traité, a-t-il préconisé. Pour conclure, il a rappelé que l’objectif à atteindre était de parvenir à l’élaboration d’un traité solide qui résolve le problème posé par le trafic illicite des armes.
M. ENRIQUE ROMÁN-MOREY (Pérou) a jugé que les Nations Unies traversaient une crise en termes d’image et de résultats, et que les questions touchant au désarmement et au contrôle des armements n’étaient pas épargnées par cette crise. Il a fait remarquer que, depuis 15 ans, à Genève, la Conférence du désarmement ne parvenait pas à sortir de l’impasse dans laquelle elle est enfermée, tandis que, depuis 13 ans, la Commission du désarmement se montrait incapable de formuler des recommandations à l’Assemblée générale. « Et que dire de l’image qu’a le monde des Nations Unies intervenant dans d’autres crises? », a-t-il ajouté.
Dans ce contexte, le représentant a considéré que la négociation par les 193 États Membres de l’ONU d’un traité sur le commerce des armes relevait du défi, et il a noté que chaque État et chaque région étaient venus à cette rencontre avec ses préoccupations propres. S’agissant des préoccupations du Pérou, M. Román-Morey a mentionné la question centrale des armes légères et de petit calibre étant donné, a-t-il dit, que le Pérou est situé dans une région où circuleraient, en moyenne, entre 45 à 80 millions d’armes à feu, et où l’on enregistre chaque année plus de 40% d’homicides perpétrés avec des armes qui ne sont pas produites dans la région. Il a plaidé pour une approche multilatérale de cette question et pour une responsabilité partagée entre exportateurs et importateurs.
M. FILIP DE CLERCQ(Belgique) a dit que pour gagner du temps, il laissait son discours à disposition par écrit. La Belgique s’associe pleinement à la déclaration de l’Union européenne, a-t-il indiqué. Dans la déclaration distribuée aux participants, la délégation belge indique que la Belgique veut élaborer un traité robuste et fort qui pourra être signé et ratifié par le plus grand nombre d’États possible, y compris les producteurs et exportateurs majeurs. Le Parlement fédéral belge et le Gouvernement partagent le même niveau d’ambition et d’engagement pour un traité fort. La Belgique estime qu’à travers une mise en œuvre concrète et transparente, ce traité fera la différence sur le terrain. Le lien entre un traité sur le commerce des armes et le sort inacceptable d’enfants dans des zones de combat est un élément particulièrement important pour la Belgique. Le drame des enfants soldats, qui sont à la fois victimes d’abus brutaux et auteurs de violences aveugles, trouve trop souvent son origine dans la dissémination incontrôlée d’armes légères et de petit calibre. La loi belge sur le commerce des armes contient une clause d’interdiction spécifique liée à ce problème. Dans le cadre du traité en négociation, cette problématique devrait être abordée sous l’angle des critères d’évaluation d’une demande d’autorisation de transfert d’armes. L’impact du transfert d’armes sur le développement durable économique et social du pays destinataire devrait être un de ces critères d’évaluation.
M. JUSTIN N. SERUHERE (République-Unie de Tanzanie) a rappelé que les pays limitrophes de la Tanzanie connaissaient des conflits intra-étatiques, et que la fabrication et les transferts d’armes ont contribué à créer l’instabilité dans certaines régions. Il a appelé à interdire les transferts d’armes qui peuvent mettre en cause le droit humanitaire. Pour la Tanzanie, le traité sera garant de paix, de stabilité et de sécurité, et permettra de réduire les pertes en vies humaines, a dit M. Seruhere. Le représentant a appelé à la mise en œuvre d’un traité qui soit un instrument juridiquement contraignant contenant les normes les plus strictes possibles. Il a toutefois rappelé le droit à la légitime défense des États. Il ne s’agit pas d’interdire, mais plutôt de réguler le commerce ces armes, a-t-il dit. La Tanzanie salue le document de la présidence, qui constitue une bonne base pour les négociations, a indiqué le représentant. Il a cependant estimé que plusieurs points du texte soumis à négociation méritaient d’être précisés et éclaircis. Il a par ailleurs souligné qu’il fallait éviter toute interprétation ou application discriminatoire ou sélective du traité, qui doit concerner tous les États Membres et inclure toutes les armes. La Tanzanie appelle à l’adoption d’un traité solide et inclusif afin d’atteindre les buts et les objectifs qui lui sont assignés.
M. SANTIAGO (Philippines) a fait remarquer que sa délégation avait soulevé plusieurs questions de procédure et de fond lors de la dernière réunion du Comité préparatoire en vue d’un traité sur le commerce des armes, qui s’est tenue en février 2012, et il a émis l’espoir que celles-ci puissent être prises en compte. M. Santiago n’a toutefois pas voulu de nouveau énoncer les questions qu’il avait soulevées au mois de février dernier. Il a souligné que les Philippines attendaient de la Conférence la conclusion d’un accord qui permettrait de défendre le droit inhérent des États à la légitime défense et au respect de leur intégrité territoriale. Il a, en outre, mis l’accent sur la nécessité pour la communauté internationale d’aborder la question du renforcement des capacités, étant donné que la mise en œuvre du traité nécessitera des ressources importantes qui parfois font défaut aux pays en développement.
M. OSMAN KEH KAMARA (Sierra Leone) a souligné le lien entre les crises politiques et l’accès facile aux armes dans la région du Sahel. Les groupes rebelles ont facilement accès aux armes et cela conduit à des déplacements de personnes et de populations, les premières touchées étant les femmes et les enfants, a-t-il ajouté. Il a souligné que les armes légères et de petit calibre sont des armes de destruction massive en Afrique. La Sierra Leone appelle à l’adoption d’un traité qui englobe les armes classiques et qui prévoit des contraintes juridiques, c'est-à-dire un texte qui empêche tout transfert s’il y a un risque de violation du droit humanitaire. Ce traité permettra de mettre tous les acteurs sur un pied d’égalité pour qu’ils respectent tous l’ensemble de normes s’appliquant aux transferts, a-t-il conclu, en appelant la Conférence à adopter un traité effectif.
Souscrivant aux déclarations prononcées au nom de l’Union africaine et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), M. ABIODUN RICHARDS ADEJOLA (Nigéria) a d’abord rappelé que son pays avait été l’un des coauteurs de la résolution 61/89 de l’Assemblée générale, adoptée en 2006, et intitulée « Vers un traité sur le commerce des armes ». Il a ensuite fait remarquer que les armes légères et de petit calibre (ALPC) avaient brisé les rêves des populations de nombreux pays d’Afrique et contribué à d’importants déplacements de populations. C’est la raison pour laquelle le Nigéria insiste pour que ces armes légères et de petit calibre, ainsi que leurs munitions et leurs différents éléments, soient au cœur du traité à venir, a souligné M. Adejola. Il a précisé que le Nigéria était également prêt à travailler avec des organismes régionaux comme la Communauté des Caraïbes (CARICOM) pour parvenir à l’éradication du transfert illicite de ces armes. Il a plaidé pour l’inclusion, sans ambigüité, des ALPC dans le futur traité comme cela est suggéré par de nombreuses délégations et reflété dans le « document de discussion » qui fait l’objet des négociations. « Il s’agit là d’un pas dans la bonne direction si nous voulons parvenir à un accord devenu indispensable en raison de la disponibilité et de l’accès facile à ces armes », a-t-il dit. « Ces armes constituent un instrument parfait de destruction massive et de déstabilisation, tuant aveuglément femmes et enfants. »
Mme SUJATA MEHTA (Inde) a indiqué que le futur traité sur le commerce des armes devait aider à lutter contre le terrorisme. La représentante a ensuite rappelé la nécessité de respecter le principe du droit des États à la légitime défense. Pour l’Inde, le projet de traité doit respecter les différents systèmes qui existent dans les différents pays, et il s’agit de travailler à l’élaboration d’un instrument équilibré, qui puisse être mis en œuvre, et qui soit fondé sur le consensus. Il est important de parvenir à une acceptation universelle du texte, a préconisé la représentante. Elle a précisé que les efforts actuels ne partaient pas de zéro, puisqu’il existait déjà des accords et des instruments de contrôle des armements classiques comme que le Registre des armes classiques, le Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce
illicite des armes légères, ou encore l’Instrument international visant à permettre aux États de procéder à l’identification et au traçage rapides et fiables des armes légères et de petit calibre illicites.M. AMANUEL YOANES AJAWIN(Soudan du Sud) a expliqué que son pays et la région à laquelle il appartient avaient été dévastés par des guerres sans fin et que ces guerres civiles avaient été exacerbées par la disponibilité d’armes classiques de tous genres sur le marché noir, ainsi que par des armes qui sont parfois importées avec la complicité d’acteurs non étatiques, a-t-il précisé. Il a ensuite, parlant des négociations en vue du futur traité, mis l’accent sur la nécessité de respecter le droit inhérent de chaque État à fabriquer, à exporter, à transférer et à maintenir des armes classiques pour ses besoins de légitime défense et pour sa sécurité, ou en vue de participer à des opérations de maintien de la paix. Il a également estimé que le texte actuel, soumis à négociation, pouvait être davantage amélioré s’agissant de la mise en œuvre du futur traité, et il a émis l’espoir que les négociations des jours à venir puissent conduire à un traité juridiquement contraignant permettant de prévenir d’autres souffrances humaines.
M. MOHAMMAD KHAZAEE (République islamique d’Iran) a tenu à exprimer des réserves sur l’opportunité de mettre au point un traité sur le commerce des armes à ce stade, indiquant néanmoins que son pays participait aux discussions. Il a précisé que face à l’absence d’un texte de négociation acceptable pour pouvoir débattre de ce traité complexe, il était nécessaire de compiler les propositions faites par les différents États Membres pour faciliter les négociations. Pour l’Iran, le seul objectif d’un futur traité doit être d’éviter que le transfert légitime d’armes conventionnelles ne soit détourné vers un commerce illicite. À cet égard, le futur texte devra respecter le droit de chaque État de participer au commerce d’armes classiques, en accord avec le droit inhérent de chaque État à assurer sa propre sécurité et sa défense, a-t-il précisé.
De la même manière, a poursuivi M. Khazaee, un potentiel traité devra pleinement respecter le droit inaliénable de chaque État d’acquérir –y compris à partir de sources extérieures– de fabriquer, de produire, de posséder, d’exporter, d’importer et de transférer des armes conventionnelles. L’Iran souhaite par ailleurs l’adoption d’un texte fondé sur le principe du respect de la souveraineté de tous les États, et qui, plutôt que protéger les intérêts des grands pays producteurs et exportateurs, permette de trouver un équilibre entre les droits, les obligations et les intérêts des pays exportateurs et importateurs d’armes. Le représentant a ensuite tenu à rappeler le principe de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États. Il a souhaité que le traité respecte le droit inhérent de chaque État de déterminer librement ses politiques de défense ainsi que le droit naturel à la légitime défense, individuelle ou collective, conformément à l’Article 51 de la Charte des Nations unies. L’Iran tient par ailleurs à rappeler que les États jouissent d’un droit souverain de réglementer leur production nationale d’armes sans subir de pression et d’ingérence extérieures, a souligné le représentant. Il a affirmé également que les États Membres parties aux négociations sur le traité devraient réaffirmer dans le futur texte l’obligation, pour tout État ou groupe de pays, de s’abstenir d’avoir recours à des mesures coercitives unilatérales qui saperaient les besoins sécuritaires d’un autre État. Le représentant de l’Iran a par ailleurs fait savoir que son pays était hostile à toute tentative d’inclusion des missiles, des armes légères et de petit calibre et de leurs munitions dans le champ d’application du traité. Le représentant a souhaité que le traité veille à ce que le transfert international des équipements et des technologies à des fins civiles ne fasse en rien l’objet de refus ou restrictions. L’Iran appelle à l’adoption d’un traité qui soit universel et qui puisse être ratifié par le plus grand nombre possible d’États, a dit M. Khazaee.
M. NELSON MESSONE (Gabon) a fait remarquer que son pays avait apporté une contribution significative à la résolution de conflits armés dans certains pays frères où les armes et leur circulation avaient contribué à la propagation des conflits. Il a ensuite estimé que la Conférence devait constituer un tournant « contre le mouvement déstabilisateur des armes », affirmant dans la foulée la volonté du Gabon de contribuer pleinement aux travaux. Le représentant a aussi considéré que les résolutions 61/89 et 63/240 de l’Assemblée générale avaient clairement affiché la détermination de la communauté internationale à adopter un traité sur le commerce des armes et à établir des normes communes solides pour l’importation, l’exportation et le transfert des armes classiques. Il a expliqué que les armes classiques étaient devenues pour les États en développement de véritables armes de destruction massive.
S’agissant de la portée du traité, M. Messone a mis l’accent sur la nécessité, pour les dispositions du traité, de couvrir l’importation, l’exportation, le transit et le courtage des armes légères et de petit calibre (ALPC), ainsi que toutes les armes utilisées par la police et par les forces armées ou de défense. Il a ensuite appuyé le document informel présenté par le Président de la Conférence, notamment la référence qui y est faite à la responsabilité et à la transparence, a-t-il précisé. Le représentant a ajouté qu’il était absolument nécessaire de prohiber la vente d’armes à des agents et à des milices sans scrupules ou à des acteurs qui pourraient les utiliser contre les femmes et les enfants ou pour commettre des violences sexuelles.
M. BONAVENTURE D’OLIVEIRA (Bénin) a appelé à l’adoption d’un texte de traité robuste et contraignant. Il a dit que la régulation du commerce des armes constituait une impérieuse nécessité. Le représentant a souhaité l’adoption d’un traité non discriminatoire, et qui permette de faire en sorte que les armes ne tombent pas entre les mains d’acteurs non étatiques. Le Bénin, à l’instar de tous les pays en développement, place de nombreux espoirs dans ce texte, et souhaite que l’accent y soit mis sur les armes légères et de petit calibre, a dit M. d’Oliveira. Le représentant a souligné que ces armes étaient des armes de destruction de masse et qu’elles semaient la terreur et la désolation au sein des paisibles populations d’Afrique. Il a appelé à conclure un traité qui contienne des dispositions claires et des dispositifs appropriés pour une lutte efficace et coordonnée contre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre. Pour conclure, il a invité à la plus grande prudence sur la question des exceptions: les armes qui seront visées dans la liste des exceptions créeront, à coup sûr, des ouvertures qui permettront de contourner facilement le traité, pour finalement en faire un texte inefficace, a-t-il dit.
M. JONES APPLERH (Ghana) a tenu à rappeler qu’un traité sur le commerce des armes permettrait de réglementer les transferts d’armes classiques et de répondre à des préoccupations fondamentales de la communauté internationale. Il a cependant précisé que le texte du futur traité devrait préserver le droit légitime des États à assurer leur défense, conformément à l’Article 51 de la Charte des Nations Unies, rappelant que l’objectif était de réglementer et non d’interdire l’utilisation des armes.
Le représentant a également précisé que, pour le Ghana, le transfert des armes classiques ne pouvait pas être autorisé s’il existait un risque que ces armes soient utilisées pour aggraver les conflits et l’instabilité. En outre, le traité devrait s’appliquer à tous les transferts internationaux et devrait couvrir également les agents commerciaux et les groupes non étatiques. Le représentant a également souhaité que le traité garantisse une assistance internationale s’agissant de sa mise en œuvre par des États dont les ressources sont limitées. Il a aussi considéré que le libellé du document actuel faisant l’objet des négociations pouvait être renforcé en ce qui concerne l’assistance aux victimes de transferts d’armes irresponsables.
M. MACIEJ FALKOWSKI (Pologne) a indiqué que son pays souscrivait pleinement à la déclaration de l’Union européenne. Il a expliqué que la déclaration complète de la Pologne serait disponible sur Internet. Le représentant a toutefois tenu à indiquer qu’un traité sur le commerce des armes profiterait à toutes les parties afin de prévenir les abus commis grâce à la détention d’armes classiques, en instaurant notamment la confiance mutuelle sur les questions de sécurité.
M. RAYMOND SERGE BALÉ (Congo) a relevé l’important défi posé par le commerce incontrôlé des armes classiques, et il a estimé que la volonté exprimée par les délégations, lors du quatrième Comité préparatoire, d’aller vers la régulation de ce commerce pernicieux restait avérée et constante comme on peut le constater au sein de cette Conférence. M. Bale a expliqué qu’un traité sur le commerce des armes viendrait renforcer d’autres instruments existants, comme le Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects ou la Convention des Nations Unies contre la criminalité
transnationale organisée. « Le traité doit devenir le socle normatif de la régulation du commerce des armes », a-t-il ajouté, rappelant que son pays n’avait pas été épargné par le fléau de la circulation des armes à feu.Rappelant encore que les pays de l’Afrique centrale avaient, par le biais de la Déclaration de Sao Tomé sur une position commune de l'Afrique centrale relative au traité sur le commerce des armes de mars 2011, harmonisé leurs vues sur le champ d’application, les paramètres et la mise en œuvre du futur traité, le représentant a ensuite réaffirmé que la République du Congo était en faveur d’un instrument adopté par consensus. « La Conférence doit être l’occasion d’un dialogue sincère », a-t-il ajouté. Il a émis l’espoir que, face aux millions de vies détruites par le commerce irresponsable des armes, la Conférence ne devienne pas le lieu de confrontations risquant d’éloigner la communauté internationale de ce grand défi de sécurité.
M. ROBERT GUBA AISI (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a indiqué que sa délégation soutenait l’inclusion des ALPC dans le traité. Il a réaffirmé qu’il est indispensable que le futur traité sur le commerce des armes respecte les termes de l’Article 51 de la Charte des Nations Unies, qui garantit aux États leur droit naturel à la légitime défense, individuelle ou collective. Il a indiqué que son pays était en faveur de la mise sur pied d’un groupe institutionnel d’appui qui puisse être aussi dépositaire des rapports que les États parties au futur traité devront soumettre.
M. MOUSSA CAMARA (Burkina Faso) a tenu à souligner l’engagement, la flexibilité et l’ouverture d’esprit exprimés par les délégations lors des travaux des quatre Comités préparatoires en vue d’un traité sur le commerce des armes qui se sont tenus, et il a souhaité que les mêmes dispositions caractérisent les discussions qui ont lieu au cours de cette Conférence. Il a aussi émis l’espoir que les aspirations de paix et de sécurité puissent l’emporter sur d’autres considérations. Le représentant a ensuite expliqué que le Burkina Faso avait mis en place des institutions nationales telles qu’une Commission nationale de lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre une Haute autorité de contrôle chargée, entre autres, de la mise en œuvre des décisions prises aux niveaux national, régional et sous-régional dans le domaine des armes.
Le représentant a ensuite estimé que la Convention de la CEDEAOsur les armeslégères et de petit calibre, leurs munitions, et autres matériels connexes formait une base solide pour maitriser le commerce des armes en Afrique de l’Ouest, mais que cet instrument s’avérait inefficace du fait de l’absence de dispositions à d’autres niveaux régionaux ou au niveau mondial. Il a, dès lors, souligné l’attente légitime des États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest à cet égard et a appelé à l’avènement d’un traité robuste et juridiquement contraignant.
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