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AG/J/3441

Les délégations de la Sixième Commission appellent à trouver un consensus sur la portée du principe de compétence universelle

17/10/2012
Assemblée généraleAG/J/3441
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Sixième Commission

12e séance – après-midi


LES DÉLÉGATIONS DE LA SIXIÈME COMMISSION APPELLENT À TROUVER UN CONSENSUS

SUR LA PORTÉE DU PRINCIPE DE COMPÉTENCE UNIVERSELLE


Le Président de la soixante-septième session de l’Assemblée générale, M. Vuk Jeremić, rappelle à la Commission qu’elle est le « gardien de la Charte des Nations Unies et du droit international ».


Il importe de trouver une définition commune au principe de la compétence universelle et d’en définir la portée afin de lutter efficacement contre l’impunité de crimes graves du droit international, d’éviter une application abusive et de garantir la justice internationale, ont souligné, aujourd’hui, les délégations de la Sixième Commission (chargée des questions juridiques).  En début de séance, le Président de l’Assemblée générale, M. Vuk Jeremić, est venu s’exprimer devant la Sixième Commission.


La majorité des délégations, qui ont pris la parole aujourd’hui, ont reconnu l’importance du principe de compétence universelle pour poursuivre et sanctionner les auteurs d’infractions pénales graves en vertu de traités internationaux, tels que les crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de génocide, ainsi que les actes de piraterie.


Toutefois, elles ont fortement regretté son imprécision et l’absence de consensus sur sa portée et son application.  « L’heure est désormais au dialogue afin de trouver un accord sur les éléments permettant de déterminer l’application de ce principe », a appelé le représentant du Chili, au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes.  Les délégations du Nigéria, du Sénégal et de la Tunisie ont elles aussi insisté sur la nécessité de préciser son champ d’application afin d’éviter les abus, de maintenir l’égalité souveraine des États et de sauvegarder la paix et la sécurité internationales.  « En l’absence d’une acceptation commune de règles précises pour en guider l’application, sa mise en œuvre désordonnée risque d’engendrer des conséquences fâcheuses dans la conduite des relations internationales », a mis en garde le représentant du Sénégal.  


La compétence universelle doit être exercée dans le strict respect de la Charte des Nations Unies et du droit international, en particulier le principe de souveraineté nationale, ont insisté la plupart des délégations.  « Le principe de la compétence universelle doit servir à la promotion et à la compétence de l’état de droit », a rappelé la représentante de la République de Corée.


S’adressant aux délégations de la Sixième Commission, le Président de la Sixième Commission, M. Vuk Jeremić, a qualifié la Sixième Commission de « gardien de la Charte des Nations Unies et du droit international ».  Après avoir passé en revue les points les plus importants du programme de travail de la Commission, il a insisté sur le fait que la lutte contre le terrorisme était l’une des menaces les plus compliquées auxquelles la communauté internationale a à faire face aujourd’hui.  Invitant les délégations à faire part de leurs vues sur les recommandations contenues dans le rapport du Secrétaire général, il a rappelé que « le monde était uni contre les terroristes et qu’il ne baissera jamais les bras ».


La Sixième Commission poursuivra son débat sur le principe de compétence universelle demain, jeudi 18 octobre, à partir de 10 heures.



PORTÉE ET APPLICATION DU PRINCIPE DE COMPÉTENCE UNIVERSELLE (A/67/116, A/66/93, A/66/93/Add.1 et A/65/181)


Rapport du Secrétaire général sur la portée et l’application du principe de compétence universelle (A/67/116)


Établi en application de la résolution 66/103 de l’Assemblée générale, le présent rapport donne des informations sur la portée et l’application du principe de compétence universelle à partir d’informations et d’observations adressées par les États Membres et les observateurs intéressés, y compris les informations relatives aux traités internationaux applicables, aux règles de droit interne et à la pratique judiciaire.


Il rend compte des commentaires et observations reçus depuis la publication du rapport de 2011.  Des réponses ont été reçues des pays suivants: Cuba, El Salvador, Finlande, Ghana, Koweït, Panama, Nouvelle-Zélande, Suède et Viet Nam.  La Nouvelle-Zélande a indiqué qu’elle avait présenté ses informations et observations sur la question au Secrétaire général en 2010, comme l’indique le rapport établit par celui-ci pour cette même année (A/65/181).


Le rapport présente en outre les informations reçues d’observateurs, en l’espèce de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, et la section IV contient une synthèse des questions soulevées par les gouvernements pour examen éventuel.


Allocution du Président de l’Assemblée générale


Le Président de l’Assemblée générale, M. VUK JEREMIĆ, a fait une déclaration cet après-midi devant les délégations de la Sixième Commission, en leur rappelant: « Vous êtes le gardien premier de la Charte des Nations Unies et du droit international ».  Il y a un mois, nous avions tenu une Réunion de haut niveau historique sur l’état de droit, a-t-il rappelé.  Cette Réunion de haut niveau avait insisté sur le règlement des différends internationaux par des moyens juridiques.  L’ensemble des délégations avaient souligné que les règles établies par des accords entre les États devaient servir les intérêts légitimes et ne pas les compromettre.  Elles ont toutes réaffirmé qu’elles étaient engagées à décourager le recours à la guerre et à faciliter le règlement pacifique des différends.  « Il s’agit là de la moelle épinière du multilatéralisme », a-t-il souligné.  Lors de cette Réunion de haut niveau, a déclaré le Président, les intervenants avaient réitéré la position selon laquelle le rétablissement de l’état de droit après un conflit était essentiel.  Un autre élément important est la corruption.  Cela peut être un obstacle au développement économique, a-t-il insisté.


Le Président de l’Assemblée générale a souligné que le travail de la Cour pénale internationale était un des points importants inscrits à l’ordre du jour de la Sixième Commission.  « Il serait d’ailleurs intéressant d’aborder le suivi de ses travaux à l’occasion du dixième anniversaire de la Cour pénale internationale », a-t-il dit.  La lutte contre le terrorisme est aussi l’un des points centraux.  L’un des aspects les plus frappants du terrorisme est qu’aucun pays n’est épargné, a-t-il fait remarquer.  « Le risque du terrorisme est l’une des menaces les plus compliquées auxquelles nous avons à faire face aujourd’hui », a-t-il déclaré.  Ce fléau menace tous les pays et le développement de la communauté internationale.  M. Jeremić a précisé que le rapport du Secrétaire général sur le terrorisme était un document majeur.  « Il contient plusieurs recommandations et j’aimerais connaître vos opinions sur cette question », a-t-il dit.  « Le monde est uni contre les terroristes et nous ne baisserons jamais les bras », a-t-il conclu.


Déclarations


M. OCTAVIO ERRÁZURIZ (Chili), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a souligné l’importance qu’accordait la CELAC à la question de la portée et de l’application de la compétence universelle.  Le cadre approprié pour examiner cette question est le droit international, a-t-il souligné. « L’heure est désormais au dialogue », a-t-il lancé.  « Nous devons examiner les normes applicables mais également reconnaître les points sur lesquels les vues convergent et divergent », a-t-il dit.  La compétence universelle est une notion du droit international qui permet de lutter contre l’impunité et de renforcer la justice, a souligné le représentant.  En ce sens, elle est appliquée en vertu du droit international qui en définit le cadre d’application.  Il ne faut pas confondre la compétence universelle avec la compétence pénale internationale ou avec l’obligation d’extrader, a-t-il rappelé.


M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran), au nom du Mouvement des pays non alignés, a estimé que, tout en respectant les principes universellement reconnus de l’administration de la justice, le Mouvement des pays non alignés est fermement convaincu que les principes inscrits dans la Charte des Nations Unies, particulièrement ceux de l’égalité souveraine entre les États, ainsi que leur indépendance politique et la non-ingérence dans les affaires d’un autre État, devraient être strictement observé dans toute procédure judiciaire.  À cet égard, l’exercice de la juridiction pénale par les tribunaux nationaux qui invoquent le principe de compétence universelle agit en violation du principe de souveraineté de l’État, qui est un des principes fondamentaux du droit international.  Le Mouvement des pays non alignés soutient que l’immunité des fonctionnaires de haut niveau devrait être pleinement respectée.  Les pays membres de notre Mouvement sont disposés à partager leurs pratiques et leurs informations concernant la compétence universelle, a-t-il assuré.


Mme ALICE REVELL (Nouvelle-Zélande), prenant la parole au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (CANZ), a reconnu la compétence universelle comme principe de base du droit international.  Elle a néanmoins soutenu que la responsabilité d’enquêter et d’engager des poursuites sur les crimes internationaux graves revient en priorité, et devrait toujours incomber à l’État dans lequel les événements se sont déroulés.


« L’équilibre de la justice commande que ceux ayant subi un préjudice obtiennent réparation », a insisté Mme Revell.  Elle a estimé que l’État où les crimes ont été commis devrait bénéficier de plus de transparence concernant un procès et de la responsabilité d’un verdict.  En outre, « cet État est souvent le mieux placé pour rendre justice, parce qu’il est le mieux outillé pour avoir accès aux preuves, aux témoins et aux victimes », a indiqué Mme Revell qui a présenté la compétence universelle comme un mécanisme complémentaire pour s’assurer que les accusés assument la responsabilité de leurs crimes dans les cas où l’État sur le territoire duquel ils ont été commis ne peut pas, ou ne veut pas exercer sa juridiction.


M. IBRAHIM SALEM (Égypte), s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a rappelé que les États africains reconnaissaient la juridiction universelle en tant que principe du droit international dont le but est de garantir que les personnes qui ont commis des crimes de guerre et crimes contre l’humanité ne puissent jouir de l’impunité et soient traduits en justice.  Cela est notamment reflété dans l’Acte constitutif de l’Union africaine et dans la ratification progressive par ces États de différents instruments internationaux pertinents, y compris ceux qui permettent à des individus, par le biais de la procédure de plainte, de se retourner contre leurs propres gouvernements.


Cependant, le Groupe des États d’Afrique souligne l’importance de respecter les normes du droit international dans la mise en œuvre de la juridiction universelle, y compris l’égalité souveraine entre États, les juridictions territoriales et l’immunité des officiels.  Dans ce contexte, le Groupe rappelle l’avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) qui souligne que la question de l’immunité des chefs d’État ne peut être débattue ou réexaminée, a dit le représentant. 


M. Salem a ajouté que le Groupe africain était particulièrement préoccupé par les abus du principe de juridiction universelle, notamment par les États non africains, soulignant qu’il s’agissait là d’une tendance qui pouvait mettre en danger le droit international et la lutte contre l’impunité.  Ce que les États africains et autres à travers le monde demandent, c’est que la communauté internationale adopte des mesures pour mettre fin à ces abus et autres manipulations politiques par des juges et des représentants politiques non africains, a-t-il déclaré.  Le Groupe des États d’Afrique réitère donc son appel à imposer un moratoire sur les demandes d’arrestation et autres poursuites en cours contre les dirigeants africains et des responsables de haut rang, jusqu’à ce que les discussions en cours aux Nations Unies aboutissent à des conclusions appropriées, a conclu le représentant. 


M. YURY NIKOLAICHIK(Bélarus) a mis le doigt sur le lien complexe qui existe entre législation nationale et droit international.  Il faut savoir qu’actuellement, la compétence quasi-universelle a été consacrée dans le droit international, mais la compétence universelle ne doit pas entrer en conflit avec les principes universellement reconnus tels que le principe de la souveraineté des États et celui de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures d’un État.  Il faut, a encouragé le représentant, se débarrasser des carences relevées dans les principes de la compétence universelle qui sapent l’état de droit.  Faisant ainsi référence à la politisation de la notion, le représentant a voulu un juste équilibre entre la volonté de faire avancer ce principe et ceux qui sont énoncés dans la Charte des Nations Unies.


M. YIBZA AYNEKULLU(Éthiopie) a souligné que le principe de compétence universelle était un principe double.  L’ambigüité tient au fait qu’il faut déterminer quels actes constituent des crimes, au regard du droit international, et quels sont ceux qui sont concernés par la compétence universelle.  Les différences d’appréciation pour la portée et l’application de ce principe résultent de considérations subjectives qui peuvent compromette l’unité devant la lutte contre l’impunité.  Le représentant a affirmé que le principe de compétence universelle est inscrit dans le Code pénal éthiopien comme un instrument de juridiction complémentaire pour combattre l’impunité.


Mme MOON JLHYE (République de Corée) a indiqué que beaucoup restait à faire sur la question de la portée et de l’application de la compétence universelle.  S’agissant de la portée, il semblerait qu’il y ait un large consensus sur la piraterie et les crimes de guerre, a-t-elle indiqué, mais nous devons voir si le principe peut être élargi à d’autres crimes tels que le terrorisme.  L’application de la compétence universelle est, a-t-elle estimé, liée à de nombreuses questions pratiques.  C’est pourquoi nous avons besoin de normes claires en la matière.  Le principe de la compétence universelle ne doit pas être utilisé à mauvais escient, par exemple, pour servir des intérêts nationaux.  Ce principe doit servir à la promotion de l’état de droit, a-t-elle tranché.


M. PETR VÁLEK (République tchèque) a déclaré que la portée et l’application de la compétence universelle était plus une question juridique que politique.  De ce fait, son pays propose que la Commission du droit international soit saisie de l’examen de cette question en vue d’en préparer une étude, compte tenu de sa complexité juridique qui n’a pas échappé à la Cour internationale de justice (CIJ) dans son avis concernant l’affaire « Les questions relatives à l’obligation de poursuivre ou d’extrader » entre le Sénégal et la Belgique, le 20 juillet 2012. 


M. Válek a estimé que les discussions au sein du Groupe de travail ont montré leurs limites, s’inquiétant que le même scenario ne se reproduise cette année.  Il a souligné l’urgence de traiter, en particulier, la question des crimes relevant de la compétence universelle, laquelle mérite une plus grande attention dans un contexte qui s’y prête, contrairement au rythme effréné des travaux de la Sixième commission.  Sa délégation, a-t-il dit, opte pour la Commission du droit international.  Tout en étant conscient que cette proposition ne faisait pas encore l’unanimité, M. Válek a assuré que son pays continuait à appuyer toute initiative visant la mise en place d’un mécanisme international ayant le pouvoir d’interférer avec les procédures pénales nationales sur la base de la compétence universelle.


M. ABDOU SALAM DIALLO (Sénégal) a reconnu que la portée et l’application de la compétence universelle étaient aujourd’hui au cœur des préoccupations de la communauté internationale.  « En l’absence d’une acceptation commune de règles précises pour en guider l’application, sa mise en œuvre désordonnée risque d’engendrer des conséquences fâcheuses dans la conduite des relations internationales », a-t-il mis en garde.  Après avoir souligné l’absence de consensus sur une compréhension commune de cette notion, M. Diallo a estimé que l’application de la juridiction universelle ne saurait faire fi d’autres principes importants consacrés depuis longtemps par le droit international, tels que les immunités de juridiction reconnues aux représentants des États.


Sans accord sur un système de poursuite international applicable à tous les coupables de crimes graves, quelle que soit leur nationalité, il n’est pas envisageable d’emporter l’adhésion de tous les pays à ce principe, a-t-il prévenu.  Il va sans dire que cette politisation qui a pour conséquence la sélectivité dans l’application de ce principe ne pourrait qu’affaiblir et l’éloigner de son objectif.  Le représentant a souligné la nécessité de réguler l’application afin d’éviter les abus, de maintenir l’égalité souveraine des États et de sauvegarder la paix et la sécurité internationales.


M. JOAQUIN MAZA MARTELLI (El Salvador) a déclaré: « nous savons que la compétence universelle permet d’éviter que l’arbitraire ne règne dans certaines régions du monde ».  La capacité punitive des États est liée à leur souveraineté.  En cas de délits commis sur son territoire, l’État est le mieux placé pour effectuer les poursuites et pour faire respecter les peines, sans compter les effets positifs sur les populations, a ajouté le représentant.


Il a estimé que le rapport « important » du Secrétaire général démontre qu’un nombre considérable d’États acceptent le principe de compétence universelle ».  Nous informons les délégations, a-t-il indiqué à son tour, que notre Code pénal a bien intégré le principe de compétence universelle.  La réforme de ce Code pénal a d’ailleurs entraîné un changement dans la place de la torture qui se trouve inclus dans les crimes contre l’humanité.  


M. JOSÉ ANTONIO GONZALEZ(Chili) a souligné que la compétence universelle était un élément indissociable de l’état de droit et qu’elle ne devrait s’appliquer que de manière exceptionnelle.  Cette compétence ne devrait s’appliquer qu’en cas de crimes graves définis par le droit international, a-t-il insisté.  Le représentant a mentionné les crimes définis dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels.  Toutefois, il a estimé que ce principe peut être appliqué sur la base du droit international et plus spécifiquement du droit international des traités.  


« Nous sommes convaincus qu’il est possible de s’accorder sur certains éléments qui pourront déterminer l’application du principe de compétence universelle. »  « Pour que le principe de compétence universelle puisse s’appliquer, la compétence d’un État de l’exercer doit être établie dans un traité international largement accepté ».  La compétence universelle ne saurait donc se fonder sur la législation interne et si des doutes sont émis sur l’application du principe, la communauté internationale doit se doter de règles pour faire face à ces cas de figure, a estimé le représentant.


M. ABUSABIB (Soudan) a estimé que la question de la portée et de l’application du principe de compétence universelle n’est pas nouvelle.  Cette question est notamment liée à la piraterie, a-t-il dit en se montrant méfiant devant les tentatives de certains États d’en élargir la portée.  Le principe de la compétence universelle, sa portée et son application complètent le rôle du pouvoir judiciaire national, a souligné le représentant.  Il ne faut pas chercher à appliquer de façon unilatérale ce principe sans l’accord de l’État où le crime a été commis, ou de l’État dont l’auteur du crime est ressortissant.  La définition des crimes et des infractions doit être décidée par les États eux-mêmes, sinon, a-t-il prévenu, nous aurons une mise en œuvre inégale du principe.  Dénonçant déjà la politique des « deux poids deux mesures », le représentant a insisté sur le respect du droit international coutumier. 


M. FARID DAHMANE (Algérie) a déclaré que le combat contre l’impunité était une exigence juridique et un impératif moral qui a le plein soutien de l’Algérie.  Le principe de la compétence universelle s’insère comme un moyen complémentaire et subsidiaire de l’architecture constituée par les dispositifs juridiques nationaux et les mécanismes de coopération pénale internationale, a-t-il ajouté.  La compétence universelle devrait s’exercer de bonne foi et en conformité avec les règles et principes en vigueur du droit international, loin de toute utilisation sélective et abusive qui obéit à des considérations autres que celles de la justice et du droit, a-t-il prévenu.


Cette compétence ne peut constituer qu’un ultime recours contre l’impunité, et ce, à défaut d’une application efficiente et satisfaisante des autres procédures judiciaires et dispositions légales existantes.  Il conviendra, a estimé le représentant, de définir avec précision les types de crimes qui constitueront le champ d’application de la compétence universelle et de suspendre son exercice dans des situations couvertes par des normes du droit international qui sont contradictoires avec son application.  Il a appelé au respect de la souveraineté des États et, en particulier, de l’immunité dont bénéficient leurs représentants en vertu du droit international.  La délimitation de la portée de l’application devra se faire au regard de la nature des crimes et des infractions et il importe, à cet égard, de délimiter le principe et définir les modalités de sa mise en œuvre, ce qui permettra de prévenir toute utilisation abusive et d’enrayer toute politisation, a ajouté le représentant.


M. LEÓN GONZALEZ (Cuba) a dit accorder une grande importance à la question de la portée et à l’application du principe de compétence universelle, l’objectif principal étant de ne pas l’utiliser de façon abusive.  « Nous nous opposons à toute politisation ou discrimination qui peut avoir des répercussions négatives », a-t-il dit.  Le représentant s’est félicité des progrès réalisés par le Groupe de travail pour trouver des solutions communes et avancer sur ce plan.


L’immunité des chefs d’État et autres fonctionnaires de haut rang ne souffre aucune contestation, a déclaré le représentant.  Cuba fait siennes les préoccupations des États africains et souligne que le principe de compétence universelle ne saurait être utilisé pour affaiblir les institutions des États en développement.  Nous condamnons la promulgation de lois nationales contre d’autres États, a-t-il dit.  La compétence universelle doit être définie au niveau international et lorsqu’un pays souhaite l’appliquer, il devrait au préalable obtenir l’autorisation du pays dans lequel le crime ou le délit a été commis pour engager une action judiciaire, a tranché le représentant.


Mme NOUR ZARROUK BOUMIZA (Tunisie) a souligné que la compétence universelle permettait de lutter contre les crimes graves.  Ce principe doit être exercé dans le strict respect de la Charte des Nations Unies et, en particulier, de la souveraineté des États, et être appliqué de manière responsable, sans abus et de manière non sélective.  Il importe, a conseillé la représentante, d’aboutir à une définition commune de ce principe pour lever les préoccupations légitimes de certains États. 


Soulignant le rôle de la Cour pénale internationale dans la lutte contre l’impunité, la représentante a fait remarquer que la Cour n’était compétente que pour connaître de crimes.  Elle a donc proposé la création d’une cour constitutionnelle internationale, « crédible par sa représentativité, sa rigueur et son indépendance » pour assurer le respect de l’engagement démocratique des États.


Mme SALAZAR(Mexique) a jugé important de marquer de façon institutionnelle la question de la compétence universelle.  Elle s’est déclarée satisfaite qu’un tel mécanisme ait été mis en place aux Nations Unies.  Il faut, a-t-elle dit, déterminer le lieu adéquat pour traiter de cette question.  La Commission du droit international qui a la charge d’encourager le développement progressif du droit international en ce qui concerne sa codification serait l’organe idoine pour analyser ce thème.


Mme PAONI TUPA MELANIE (République démocratique du Congo) a noté que les États n’étaient pas disposés à inclure la compétence universelle dans leur droit national et, même quand ils l’ont fait, à la mettre en œuvre.  Il existe, a-t-elle dit, une diversité des modalités d’application et il est plus que probable que le principe de la compétence universelle ait été utilisé de manière quelque peu abusive.  Le mandat du Groupe de travail doit permettre de poursuivre les efforts en vue de définir des règles claires, susceptibles de régir l’application de ce principe.


S’il est certes bon que les États exercent leur compétence universelle pour ne pas laisser impunis des crimes de guerre, la République démocratique du Congo pense qu’il existe des préalables sur lesquels un consensus est nécessaire pour faciliter l’exercice de la compétence universelle, a indiqué la représentante.  Elle a notamment regretté le fait que de nombreux États n’aient pas encore introduit dans leur législation interne les dispositions nécessaires à l’incrimination et la poursuite des crimes internationaux, ce qui complique, selon elle, la coopération entre les États en la matière.


« Il serait intéressant d’exploiter les orientations fournies par la loi nationale type sur la compétence universelle en matière de crimes internationaux, que l’Union africaine avait promulguée en juillet dernier », a-t-elle suggéré en expliquant que cette loi permettra aux États africains d’ajuster leurs législations nationales respectives pour juger les auteurs de crimes internationaux au niveau national.  « La RDC reste ouverte et flexible à toute proposition qui tendrait à arrêter de manière décisive et consensuelle des critères légaux et des modalités d’application équitables de ce principe, pour qu’il retrouve la place qui lui revient dans la lutte contre l’impunité. », a conclu la déléguée.


M. ERNEST TCHILOEMBA TCHITEMBO (République du Congo) a souligné les nombreuses difficultés, notamment philosophiques, juridiques, politiques ou même terminologiques qui entourent la notion de compétence universelle.  Revenant sur les trois réunions que le Groupe de travail a tenues, le représentant a estimé que la méthodologie adoptée a permis d’esquisser les éléments qui pourraient être pris en compte.  Mais il ne faudrait pas confondre l’application du principe de compétence universelle avec l’applicabilité des décisions des juridictions nationales au-delà du territoire; la compétence universelle avec l’exercice de la juridiction pénale internationale; avec l’obligation de poursuivre ou d’extrader, ou encore avec le principe de complémentarité de la Cour pénale internationale, a prévenu le représentant en estimant cependant que, malgré les divergences de vue, il y a une marge de progression possible sur le sujet.


Le représentant a ensuite déclaré que l’exercice de la compétence universelle par une juridiction nationale, au détriment ou en concurrence de la justice internationale, sape les fondements de l’ordre juridique international et viole les principes de la Charte des Nations Unies et les normes du droit international.  Pour lui, le Groupe de travail devrait rechercher des éléments pour lever les incohérences persistantes entre, d’une part, le caractère extraterritorial des législations nationales relatives à l’exercice de la compétence universelle et, d’autre part, le statut d’État membre des Nations Unies, auxquels la Charte des Nations Unies garantit l’égalité souveraine et les principes de non ingérence dans les affaires intérieures des États.  Les conditions d’exercice de la compétence universelle ne devraient pas créer de doublon avec les institutions de justice internationale ou les organes juridictionnels prévus dans les traités et accords multilatéraux en vigueur, a insisté le représentant. 


M. MAFIROANE EDMOND MOTANYANE(Lesotho) a noté que le principe de juridiction universelle ne bénéficie d’aucune définition précise. Il y a des difficultés liées au moment où elle doit être invoquée et à quels crimes elle doit s’appliquer.  Craignant la politisation de ce principe, il a aussi mis en garde contre la tyrannie des juges.  Il convient de veiller à ce que les principes de souveraineté soient toujours respectés.  Il faudrait veiller à ce que l’application de la compétence n’aille contre l’immunité.


Aucun État ne devrait pouvoir exercer sa compétence sur le territoire d’un autre, sauf exception.  Actuellement, a fait observer le représentant, nous en sommes à un stade où le dialogue est nécessaire.  Il a indiqué que sa délégation était convaincue que les efforts déployés porteront des fruits dans un avenir proche.  C’est un instrument juridique important qui doit continuer à évoluer, a-t-il noté.  Le Lesotho, a-t-il assuré, est en faveur de la poursuite de ce débat en Sixième Commission.


M. DEREK O’BRIEN (Inde) a relevé que, au sens large, la compétence territoriale est attachée au territoire dans lequel le crime a été commis, à la nationalité, autant celle de la victime que de l’accusé, et à la prise en compte des intérêts nationaux en jeu.  Il a mis en avant le fait que la piraterie en haute mer est le seul crime sur lequel les réclamations de compétence universelle ne sont pas contestées par le droit international.  « Nous considérons que le principe de compétence universelle par rapport à la piraterie a été codifié par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer », a en effet affirmé M. O’Brien.


Pour ce qui est des crimes tels que le génocide, les crimes contre l’humanité ou la torture, les traités internationaux, dont les quatre Conventions de Genève de 1949 et la Convention sur l’Apartheid, ont fixé une compétence universelle, a-t-il aussi affirmé.


Mme ANNIKEN ENERSEN (Norvège) a déclaré qu’il incombait en premier lieu aux États de mener des enquêtes et entreprendre des actions en justice car mieux indiqués pour réunir des preuves, assurer la sécurité des témoins et veiller à ce que la justice soit rendue en faveur des personnes les plus affectées par le crime.  Dans ce cas, la compétence universelle ne devrait être appliquée que lorsque les États ne sont pas en mesure ou affichent un manque de volonté, a-t-elle expliqué, en soulignant qu’il y avait un consensus sur la nécessité de mettre tout en œuvre afin que les crimes les plus graves ne restent pas impunis.  La Norvège est d’avis qu’il faudrait que le principe de compétence universelle soit débattu au sein d’un groupe de travail, en réitérant sa position concernant l’immunité pénale. 


La représentante a justifié la position de son pays, notamment par le fait que la question de l’immunité, et particulièrement pour les autorités de l’État, pouvait nuire à l’examen du sujet en cours par la Commission du droit international.  Sur la question de la compétence universelle, Mme Enersen a suggéré l’identification des crimes les plus graves commis par certains États, et pour lesquels la compétence universelle a été déjà appliquée, tout en évitant de chercher à obtenir un consensus sur une liste de crimes tombant sous le coup de la compétence universelle.  En conséquence, elle a souhaité que les États ne cherchent pas à abuser ou à utiliser à mal escient la compétence universelle, notamment à des fins politiques.


Mme MILICAY (Argentine) a noté qu’il y avait, à l’heure actuelle, un vaste consensus sur le fait que les crimes internationaux les plus graves ne doivent pas rester impunis.  Il incombe en premier lieu à l’État sur le territoire duquel le crime a été commis ou à l’État qui a un lien direct avec l’infraction de prendre les mesures qui s’imposent, a-t-elle dit.  Cependant, dans certaines circonstances où les États ne peuvent exercer cette compétence, d’autres États n’ayant pas de rapport direct avec l’infraction pourraient remplir cette fonction sur la base du principe de compétence universelle. 


Mais une compétence universelle illimitée pourrait entraîner des conflits de compétence entre États, a-t-elle prévenu.  C’est pourquoi nous pensons que des règles claires qui délimitent les interprétations erronées concernant ces concepts doivent exister.  La compétence universelle est fréquemment confondue avec d’autres principes du droit comme le principe complémentaire de « aut dedere aut judicare ».   Cependant, nous devons garder à l’esprit que l’inclusion de la compétence universelle dans les traités internationaux est limitée.  La représentante a assuré que sa délégation continuera d’examiner la question pour aller de l’avant.


Mme GRACE EYOMA (Nigéria) a déclaré que les temps de plus en plus difficiles auxquels est soumise la communauté internationale ont amené certains à demander sûreté et sécurité et à définir des méthodes qui permettent de renforcer l’application du principe de compétence universelle.  C’est pourquoi il importe de définir le principe et sa portée, a-t-elle souligné.  Cette nécessité de clarté doit permettre une application impartiale, non sélective et apolitique.  La compétence universelle devrait toujours être exercée de bonne foi, conformément au droit international et au respect de la souveraineté des États et du régime d’immunité des chefs d’État, a insisté Mme Eyoma.  Elle a encouragé, avant de conclure, tous les États Membres à participer activement aux discussions afin de définir la portée et les limites de ce principe.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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