Deuxième Commission: la table ronde sur les objectifs du développement durable estime que ceux-ci devront être définis de manière à être clairs et réalistes
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Deuxième Commission
Table ronde – matin
DEUXIÈME COMMISSION: LA TABLE RONDE SUR LES OBJECTIFS DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ESTIME
QUE CEUX-CI DEVRONT ÊTRE DÉFINIS DE MANIÈRE À ÊTRE CLAIRS ET RÉALISTES
La Commission économique et financière (Deuxième Commission) a entamé ce matin la série de six manifestations spéciales inscrites à l’ordre du jour de ses travaux pour cette soixante-septième session de l’Assemblée générale en organisant une table ronde sur le thème « Conceptualiser un ensemble d’objectifs de développement durable ».
« On parle beaucoup des objectifs de développement durable (ODD) et nous voulions engager, à cet égard, un débat sur le fond pour peut-être parvenir à un accord », a expliqué M. George Talbot, Président de la Deuxième Commission, précisant que le Document final de la Conférence sur le développement durable Rio+20 servait de point de départ aux discussions. Le modérateur de la table ronde, M. Andrew Revkin, de l’Université Pace, a prévenu qu’« il n’y a pas de voie parfaite concernant les objectifs de développement durable ».
Posant le débat, M. Mootaz Ahmadein Khalil, le Représentant permanent de l’Égypte auprès des Nations Unies, invité comme expert-panéliste, a déclaré qu’il s’agissait de savoir comment les ODD pouvaient compléter les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), dont la date-butoir de réalisation est fixée à l’année 2015, et d’intégrer dans ce paradigme les trois piliers du développement durable que sont l’environnement, la croissance économique et le progrès social.
Parce qu’ils devront avoir un caractère universel, les ODD seront plus complexes à définir et à mettre en œuvre que les OMD, a estimé le représentant. Le double défi posé à la communauté internationale sera d’élaborer des objectifs clairs qui répondent aux besoins, caractéristiques et réalités des différents pays. Mais comment faire pour y parvenir? Une des démarches possibles consisterait à adopter des objectifs pour les pays développés et d’autres pour les pays en développement, a proposé M. Khalil. Une autre possibilité serait d’avoir une seule série d’objectifs pour tirer vers le haut les pays en développement.
Les panélistes ont tous souligné qu’il fallait également se garder de se fixer trop d’objectifs de développement pour l’après-2015, mais au contraire établir des priorités en suivant des principes réalistes. Le groupe à composition non limitée qui sera chargé d’entamer le processus d’élaboration des objectifs de développement durable ne devra pas se contenter d’une déclaration remplie d’aspirations, mais il devra définir des objectifs de développement durable qui produisent des résultats, a fait remarquer M. Charles Kenny, du Centre pour le développement mondial.
La Deuxième Commission reprendra ses travaux demain, mercredi 17 octobre, à partir de 10 heures, et examinera la question de son ordre du jour consacrée aux Groupes de pays en situation particulière.
TABLE RONDE SUR LE THÈME « CONCEPTUALISER UN ENSEMBLE D’OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE »
Interventions des panélistes
M. MOOTAZ AHMADEIN KHALIL, Représentant permanent de l’Égypte auprès des Nations Unies, a posé la question de savoir comment les objectifs de développement durable pouvaient compléter les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et intégrer les trois piliers du développement durable, que sont l’environnement, la croissance économique et le progrès social. Il faut aussi s’interroger sur les moyens de répondre aux besoins, caractéristiques et réalités des différents pays, a-t-il préconisé. Il a aussi souligné la nécessité d’élaborer des objectifs clairs. Les ODD seront plus complexes à définir et à mettre en œuvre que les OMD, a-t-il relevé, parce qu’ils doivent prendre en compte les trois piliers du développement durable et parce qu’ils ne se limitent pas aux seuls pays en développement. Ils auront un caractère universel.
M. Khalil a ensuite replacé les OMD dans le contexte de l’époque, rappelant la série de sommets et de grandes conférences multilatérales tenues sous l’égide de l’ONU qui ont eu lieu dans les années 90, comme le Sommet de la Terre de Rio, celui de Beijing, et finalement le Sommet du Millénaire qui a conduit à l’adoption des OMD. Ces Objectifs, élaborés par le Secrétariat avec l’aide de consultants, étaient tout à fait consensuels et ils ont tracé la voie du programme de travail des 12 dernières années en matière de développement, a-t-il indiqué. Après le 11 septembre 2001, on a davantage mis l’accent sur la lutte contre le terrorisme, le climat mondial étant alors devenu moins optimiste, a relevé M. Khalil. À l’occasion de l’adoption de plusieurs traités, portant notamment sur les changements climatiques et la biodiversité, des avis divergents ont émergé, a-t-il rappelé. Puis, a poursuivi M. Khalil, la crise économique et financière a frappé les grandes économies, ce qui a entraîné une érosion de la confiance entre les pays. Il a noté les positions très tranchées et bien souvent divergentes des différents pays sur des sujets comme l’économie verte et la gouvernance internationale. Il a fallu examiner le coût de la lutte contre le réchauffement climatique qui affecte le globe terrestre, évalué à plusieurs milliards de dollars, tandis que le coût de la prévention de la perte en diversité biologique est en cours d’évaluation. Si certains OMD n’ont pas été atteints, il faut y arriver au-delà de 2015, a préconisé le représentant.
Comment intégrer les trois piliers au sein des objectifs de développement durable? Comment s’assurer que le programme des objectifs de développement durable soit universel et tienne compte des priorités de tous les pays? Une démarche consisterait à adopter des objectifs pour les pays développés et d’autres pour les pays en développement, a répondu M. Khalil. Une autre possibilité serait d’avoir une seule série d’objectifs pour tirer vers le haut les pays en développement. On pourrait garder les OMD en y ajoutant une « couche de complexité ». Désormais, il ne s’agit pas seulement, par exemple, de réduire la mortalité infantile, mais aussi de garantir de bonnes conditions de vie pour les enfants, a-t-il expliqué.
Dans ce processus, il faudra s’en tenir aux principes des Nations Unies, comme la responsabilité commune mais différenciée, a poursuivi M. Khalil. Il a ajouté que le but était d’élaborer un cadre robuste pour les nouveaux objectifs et un mécanisme de suivi très précis. Il faut aussi éviter une prolifération d’objectifs après-2015, a-t-il averti. Enfin, le représentant a remarqué que le groupe à composition non limitée qui sera chargé d’entamer le processus d’élaboration des objectifs de développement durable n’avait pas encore été créé. Il a proposé que ce groupe se concentre sur la façon de répartir ses sièges entre les différents groupes régionaux et réfléchisse sur les modes de sélection des pays devant y être représentés.
M. MANISH BAPNA, Vice-Président exécutif et Directeur général de l’Institut des ressources mondiales, a avancé plusieurs propositions afin d’aider à définir la nouvelle génération d’objectifs de développement durable (ODD). Tout d’abord, ces objectifs devraient être tournés vers l’avenir pour « traiter les problèmes de demain et non pas ceux d’hier », notamment en ce qui concerne la pauvreté, qui va se concentrer surtout en Afrique dans les années à venir, a-t-il estimé. L’inégalité augmente et doit constituer un dossier essentiel si la communauté internationale veut que la croissance mène à une réduction de la pauvreté, qui reste le premier Objectif du Millénaire pour le développement, a rappelé M. Bapna.
De plus, les seuils écologiques sont de plus en plus malmenés, comme le montrent la pénurie hydrique ou les émissions de dioxyde de carbone, et « il serait peut-être bon de se pencher sur la façon dont la viabilité environnementale est incluse dans les ODD ». Le social, l’écologie et l’économie sont trois piliers essentiels du développement durable que les ODD doivent intégrer, a dit M. Bapna, et les objectifs doivent être multidimensionnels pour parvenir à l’équité.
L’expert a souligné que ces objectifs doivent être restreints en nombre: le champ d’activité est en effet très vaste et certaines propositions sont liées aux OMD (santé, parité, pauvreté). Mais il va falloir établir des priorités, ce qui sera le défi essentiel à relever par le groupe de haut niveau à composition non limitée. Les futurs ODD devront d’autre part être universels, a poursuivi M. Bapna, car tous les pays doivent agir de concert en ce qui concerne par exemple, les migrations ou les changements climatiques.
À propos du financement du développement, M. Bapna a rappelé que l’aide et les investissements privés sont devenus bien plus importants aujourd’hui que l’aide publique au développement (APD): des philanthropes privés ont augmenté leurs apports de façon considérable et l’aide bilatérale traditionnelle représente moins de 50% de l’aide au développement, a-t-il fait remarquer. Les ODD devront assurer une cohérence dans la programmation face à un paysage plus complexe de l’aide, devenue aujourd’hui beaucoup plus fragmentée. En conclusion, les objectifs de développement durable doivent être un processus transparent inclusif, plus que ne l’ont été les OMD, a précisé l’expert. Les OMD ont de grandes qualités et des lacunes, et il faut que les États et leurs partenaires soient unis sur les bonnes décisions pour pallier aux aspects négatifs affectant la mise en œuvre de ces objectifs. M. Bapna a regretté qu’en ce qui concerne les OMD, une des parties prenantes n’ait pas été suffisamment consultée. Cette partie prenante, a-t-il précisé, ce sont les pauvres eux-mêmes.
Mme KATE RAWORTH, Maître de recherche à Oxfam-Royaume-Uni, a décliné son intervention sur le thème « créer un espace sûr et juste pour l’humanité ». Elle a retracé l’évolution des températures sur le globe terrestre, expliquant que les 10 ou 20 000 dernières années correspondent à l’ère géologique appelée « holocène » qui a connu les débuts de l’agriculture. Il serait absurde de quitter cette période qui nous a permis de tirer parti de la terre, a-t-elle dit. Mme Raworth a indiqué que, selon des recherches scientifiques, il y a 9 « frontières planétaires » sur lesquelles nous ne devons pas exercer trop de pression pour éviter de mettre en péril l’équilibre actuel de la planète. Elle a cité notamment l’utilisation, trop importante, de l’eau et des engrais, l’acidification des océans, la pollution, l’empoisonnement de l’air par les aérosols, toutes ces actions rendent la planète beaucoup moins résiliente par rapport aux chocs. Les plus grosses pressions exercées sur ces frontières sont le changement climatique, l’utilisation excessive des produits contenant de l’azote et la perte de la biodiversité, a-t-elle précisé. Au Tchad, par exemple, des lacs entiers ont disparu, a-t-elle indiqué pour illustrer les risques déjà devenus réalité. Mme Raworth a averti que l’abus des ressources internes limitées de la planète pourrait provoquer une disparition de l’espèce humaine.
Il faut défendre le droit des hommes à l’eau, à l’utilisation de la terre, à vivre sans pollution, a plaidé Mme Raworth, signalant que 11 dimensions sociales à protéger ont ainsi été identifiées. Mais beaucoup de retard a été pris pour réaliser ces droits, a-t-elle prévenu, indiquant par exemple que 13% de la population mondiale ne reçoivent pas les aliments dont ils ont besoin et que 19% de personnes vivent à travers le monde sans électricité. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), il suffirait d’augmenter de seulement 3% la production alimentaire pour fournir une alimentation à tous. Mme Raworth a ajouté que 50% des émissions de gaz à effet de serre sont produits par 11% de la population du globe. « Nous sommes tous des pays en développement » puisque nous visons tous à vivre dans la prospérité en utilisant les moyens de la planète, a-t-elle estimé. Pour y arriver, Mme Raworth a appelé à modifier les modèles de consommation ainsi que les modes de production actuels des entreprises qui, pour l’heure, abusent des ressources naturelles. Elle a proposé d’adopter une seule série d’objectifs, en intégrant les piliers social, environnemental et économique du développement. Il faudrait aussi définir des objectifs, pour chaque pays, qui en reflètent les réalités et les capacités nationales, a-t-elle ajouté.
M. CHARLES KENNY, Associé principal au Centre pour le développement mondial, qui a tenu à préciser qu’il n’est pas un expert en environnement, a ébauché quelques conclusions sur la mise en œuvre des Objectifs du Millénaire pour le développement. Les OMD ont contribué à faire avancer le dialogue sur le développement, et on peut constater que des progrès ont déjà été enregistrés sur des questions essentielles comme la mortalité infantile, grâce à l’aide, certes, mais aussi grâce aux personnes impliquées. Les OMD sont concentrés sur un nombre limité de sujets, et ils sont chiffrables, ce qui explique aussi leur succès, a estimé M. Kenny. Néanmoins, certains de ces objectifs ne sont pas tout à fait réalistes pour certains pays, comme par exemple celui de l’éducation primaire pour tous, ce qui explique que ces pays n’ont pas encore pu les atteindre.
Concernant les objectifs de développement durable (ODD), M. Kenny a posé la question de savoir en quoi une déclaration remplie d’aspirations peut avoir un caractère contraignant et produire des résultats. « Si l’on étudie les tendances du passé et que l’on a une vision optimiste, où en sera le monde en 2030 en termes d’espérance de vie, d’éducation, de mortalité infantile? », s’est-t-il interrogé. L’intervenant a estimé plausible que le monde parvienne à atteindre un taux de pauvreté zéro d’ici à 2030, que l’ensemble de la planète sera alphabétisée d’ici à 2025, ou que les dépenses militaires seront réduites d’un tiers d’ici à 2030.
Concernant les objectifs environnementaux, il a souligné que plusieurs conférences sont arrivées à des conclusions similaires concernant notamment les objectifs à atteindre en matière de conservation de la biodiversité. L’espoir est permis en ce qui concerne la possibilité de voir une baisse des émissions de gaz à effet de serre, grâce notamment aux développements scientifiques et technologiques, a estimé le panéliste. En conclusion, M. Kenny a conseillé aux États Membres et à toutes parties prenantes de réfléchir afin de parvenir à un libellé acceptable des futurs ODD.
Mme SHAMSHAD AKHTAR, Sous-Secrétaire générale aux affaires économiques et sociales, qui a été antérieurement Gouverneure de la Banque centrale du Pakistan, a reconnu que les Objectifs du Millénaire pour le développement ont été bénéfiques pour le développement humain. Nous avons été mieux informés au cours des dernières décennies sur les défis à relever sur la voie du développement, comme notamment le fardeau dû à une croissance démographique non contrôlée et les modes de production non viables. Nous n’ignorions pas les besoins, mais nous ne savions pas comment gérer de façon durable les ressources, a-t-elle remarqué. Nous n’avons pas besoin de continuer à écrire sur le sujet, a-t-elle estimé, appelant les acteurs du développement à aller sur le terrain. Elle s’est réjouie que les Nations Unies aient mis en route un processus inclusif pour élaborer les futurs objectifs de développement durable, en établissant un groupe de haut niveau et bientôt un groupe à composition non limitée. Elle a invité les États Membres à apporter leur soutien aux travaux de l’équipe technique, composée de membres issus de 60 agences onusiennes.
Trois cibles des OMD ont été réalisées, a indiqué Mme Akhtar, citant la réduction de l’extrême pauvreté, l’amélioration de l’accès à l’eau et la réduction du nombre de personnes vivant dans des bidonvilles. Mais il reste encore beaucoup à faire, a-t-elle relevé, notamment pour améliorer l’accès aux marchés. Elle a souhaité que le programme de développement actuel couvre les travaux de toutes les agences onusiennes en se basant sur le processus intergouvernemental en cours en vue de l’élaboration des objectifs de développement durable. Elle a appelé à élaborer des cibles claires et précises, ainsi qu’une architecture de gouvernance en matière de développement. Nous devons favoriser l’autonomisation des peuples, a-t-elle ajouté, plaidant aussi pour que le développement d’après-2015 conserve l’élan donné par les efforts destinés à la réalisation des OMD.
La Sous-Secrétaire générale a aussi soutenu le respect du principe de responsabilité commune mais différenciée, invitant la communauté internationale à donner de l’autonomie et une marge de manœuvre aux pays qui ont besoin d’établir leurs priorités nationales. Pour mettre en œuvre le Document final de Rio+20, elle a rappelé la nécessité de renforcer le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), et de développer l’économie verte au service du développement. En ce qui concerne le financement du développement durable, un groupe de 30 personnes va être constitué pour débuter des travaux sur cette question. Le Document de Rio+20 mentionne aussi le renforcement des mécanismes de transfert de technologies pour lequel il reste encore beaucoup à faire, a conclu Mme Akhtar.
Déclarations liminaires
M. GEORGE WILFRED TALBOT (Guyana), Président de la Deuxième Commission, a présenté la première des six manifestations spéciales de la Deuxième Commission. « On parle beaucoup des objectifs de développement durable (ODD), qui ne sont pas encore définis, et nous voulions engager un débat sur le fond pour peut-être obtenir un accord », a-t-il expliqué. Le Document final de la Conférence sur le développement durable Rio+20 a servi de point de départ aux discussions de cette Table ronde, a indiqué M. Talbot. « Les États Membres doivent exprimer leurs points de vue fondamentaux sur les ODD, mais nous devons aussi entendre la voix d’experts distingués de la communauté scientifique, ce qui est un bon exemple de coopération entre cette Commission et le monde extérieur», a souligné M. Talbot.
M. ANDREW REVKIN, Associé principal à l’Académie pour les études environnementales appliquées de l’Université Pace, a indiqué qu’il allait assumer le rôle de modérateur de la Table ronde. « Il n’y a pas de voie parfaite concernant les ODD et notamment compte tenu des Objectifs du Millénaire pour le développement. Il s’agit donc pour la communauté internationale de développer une approche résiliente et souple pour les années à venir » et de tenir compte des erreurs qui seront « probablement » commises concernant la définition des objectifs de développement, leur mise en œuvre et leur synergie et compatibilité avec les OMD, a-t-il précisé. Avant de laisser la parole aux experts et aux délégations, il a déclaré qu’au terme de cet exercice il faudrait parvenir à satisfaire non seulement le monde diplomatique, mais aussi le monde réel.
Dialogue interactif
Ouvrant le débat, la représentante du Brésil, pays qui a accueilli deux Conférences des Nations Unies sur le développement durable, a regretté que le processus découlant du Document final de la Conférence Rio+20 n’ait pas commencé, et que le groupe intergouvernemental ne soit pas encore au travail. « Les objectifs de développement durable sont des éléments accélérateurs de ce que nous avons déjà fait », a dit la déléguée, en réagissant au discours tenu par M. Kenny. Elle a souligné qu’il était nécessaire de faire fond sur les engagements préalablement pris par la communauté internationale et de garder un esprit ouvert pour ne pas entamer les discussions relatives aux objectifs de développement durable à partir d’idées préconçues.
S’interrogeant sur le rôle que joueront à l’avenir les OMD, la délégation del’Union européenne auprès des Nations Unies a invité la Commission à s’appuyer sur les OMD, qui offrent de bonnes bases pour le programme de développement de l’après-2015. Le représentant de l’Union européenne a espéré la participation des grands groupes au processus d’élaboration des objectifs de développement durable et a dit attendre avec intérêt la création du groupe à composition non limitée, ce qu’a également soutenu la représentante de l’Argentine.
Les OMD comportent des lacunes que les objectifs de développement durable devront combler, a estimé de son côté la représentante du Gabon, appuyant l’avis exprimé par le Directeur général de l’Institut des ressources mondiales. Elle a constaté, elle aussi, que les pauvres n’ont jamais été consultés dans l’élaboration des objectifs et programmes de réduction de la pauvreté. « Mais de quels pauvres parlons-nous ici? » a-t-elle demandé. « De ceux qui ne disposent pas du minimum vital ou des autres? »
La représentante du Bénin a expliqué que les Objectifs du Millénaire pour le développement sont le but à atteindre par le monde en développement. Le Bénin, qui est dans la catégorie des pays les moins avancés (PMA), a des contraintes supplémentaires à surmonter pour la réalisation des OMD, et certains de ces objectifs ne seront pas atteints. Le nouveau processus concernant les objectifs de développement durable doit aussi partir d’une réalité: que des conditions soient remplies avant d’espérer que tous les pays atteignent les mêmes résultats, a-t-elle conclu.
Le représentant du Maroc a invité la Commission à ne pas négliger la valeur ajoutée générée par les réunions de haut niveau organisées en début de chaque session plénière de l’Assemblée générale, car elles permettent à chaque pays d’exprimer son point de vue sur le programme de travail de l’ONU. Changements climatiques et sécurité internationale; eau et sécurité; droit international relatif à l’accès à l’eau; les problèmes transfrontaliers relatifs à l’eau, sont des questions qui pourraient être examinées à cette occasion. « Faut-il être plus exigeant avec nous-mêmes et nous focaliser sur la diplomatie préventive?», a-t-il demandé.
Rappelant que le temps est la ressource ultime, le représentant de l’Union interparlementaire (UIP) a suggéré aux pays développés de changer de paradigme en adoptant un modèle qui vise à réduire le temps de travail. Cela nous amènerait à repenser le modèle de croissance actuel, a-t-il expliqué. Il a aussi souligné la responsabilité à donner au secteur privé, quand on sait que les objectifs de développement ne seront pas réalisés sans l’implication de ce secteur.
Si le représentant de l’Australie s’est dit favorable à la définition d’un seul ensemble d’objectifs de développement durable, cela n’a pas été l’avis du représentant du Nigéria qui a proposé d’abandonner l’idée d’élaborer des objectifs universels, préférant que différents objectifs soient définis pour chaque groupe de pays en respectant leurs besoins et réalités.
Le représentant du Mexique a considéré qu’il n’y avait pas d’objectifs absolus qui soient valables pour tous les États. Il a jugé essentiel que trois questions principales soient résolues dans ce processus, à savoir le financement, la définition des objectifs de développement durable, et la mise en place des institutions nécessaires à leur mise en œuvre. « Nous avons besoin de financements », a également observé le représentant du Groupe des jeunes et des enfants, un des grands groupes qui ont pris la parole ce matin à la Deuxième Commission. Cet intervenant a parlé de la nécessité de promouvoir l’« équité intergénérationnelle » qui ferait en sorte que tous les peuples se développent de manière durable.
De son côté, la représentante du Groupe des femmes a estimé que les ODD ne constitueront qu’une partie du cadre mondial de développement. Nous voulons un programme plus large qui permette une transformation en intégrant la dimension du genre dans tous les objectifs. Il faut notamment y prévoir la lutte contre la discrimination et il faut y inclure des mesures qui permettent de contrôler la violence faite aux femmes, a-t-elle préconisé. Elle a demandé comment les objectifs de développement durable pourraient inclure ce processus de transformation.
Le représentant de la République-Unie de Tanzanie a demandé d’examiner les rapports de la Banque mondiale pour constater l’ampleur de la pauvreté dans le monde. « Comment les objectifs de développement durable peuvent-ils être liés à l’environnement respectif de chaque pays? », a-t-il demandé. La délégation des États-Unis a repris, à son compte, cette idée de se concentrer sur la pauvreté et la protection de l’environnement. Nous devrons mener un processus de consultation efficace en ayant en main les bonnes données, pour analyser les causes des problèmes et envisager les moyens d’y remédier, a dit cette délégation. « Nous ignorons encore beaucoup de choses sur les objectifs prioritaires à mettre en place, car des données statistiques nous manquent », a pour sa part reconnu la représentante du Brésil.
Répondant à l’ensemble de ces observations, le représentant de l’Égypte a reconnu qu’il fallait réduire la dépendance des pays à l’aide extérieure. En ce qui concerne la nécessité de changer les modes de consommation et de production actuels, il a dit que cela concernait avant tout les pays développés. Il a estimé qu’élaborer des objectifs pour les pays développés et d’autres pour les pays en développement n’était pas contradictoire. Il a aussi reconnu l’importance de l’intégration de la question du genre dans les futurs ODD.
L’intégration du genre dans les objectifs de développement durable permettra notamment à davantage de pauvres de faire entendre leur voix, a ajouté le représentant du Centre pour le développement mondial. Il s’est réjoui par ailleurs que la collecte de données se soit améliorée. « Je vous implore d’élaborer un seul ensemble d’objectifs de développement durable », a-t-il martelé. Les OMD sont bien connus en Europe et en Afrique, mais ce n’est pas le cas aux États-Unis et en Chine, a-t-il ajouté pour expliquer la nécessité de disposer d’un seul bloc d’objectifs. Cela facilitera la mobilisation des efforts en vue de leur réalisation, a-t-il estimé.
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