AG/EF/3309

Deuxième Commission: table ronde sur la question urgente de la création d’emplois dans le contexte actuel de crise économique mondiale

11/10/2011
Assemblée généraleAG/EF/3309
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Deuxième Commission                                       

Table ronde - après-midi                                   


DEUXIÈME COMMISSION: TABLE RONDE SUR LA QUESTION URGENTE DE LA CRÉATION

D’EMPLOIS DANS LE CONTEXTE ACTUEL DE CRISE ÉCONOMIQUE MONDIALE


La table ronde examine les moyens d’instaurer un nouveau modèle de

croissancequi privilégie l’emploi et en fasse une priorité claire du développement


Après le dialogue qu’elle a eu la semaine dernière avec les Chefs des Secrétariats des Commissions économiques régionales du système des Nations Unies, la Commission économique et financière (Deuxième Commission) a poursuivi cet après-midi la série de manifestations spéciales inscrite à l’ordre du jour de ses travaux pour cette soixante-sixième session de l’Assemblée générale, en organisant une table ronde sur le thème des « Stratégies alternatives de développement pour la création d’emplois ».


Partant du constat que la crise financière et la récession économique mondiale de 2008-2009 ont porté un coup sévère à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), et que la crise économique s’est traduite en « crise de l’emploi » aussi bien dans les pays développés que dans ceux en développement, les invités, quatre experts du monde du travail, réunis en panel, ont discuté des fondements d’un nouveau modèle de croissance qui serait centré sur la création d’emplois et qui serait une priorité des agendas nationaux de développement et des institutions de Bretton Woods.  Ce débat a été présenté par le Vice-Président de la Deuxième Commission, M. Bitrus Vandy Yohana, du Nigéria, et animé par Mme Lakshmi Puri, Sous-Secrétaire générale et Directrice exécutive adjointe du Bureau de l’appui aux mécanismes intergouvernementaux et des partenariats stratégiques d’ONU-Femmes.  Quatre grandes questions ont été posées aux panélistes, dont les réponses ont été suivies d’un débat interactif.


Quelles sont actuellement les outils politiques les plus efficaces à disposition des décideurs pour promouvoir la création d’emplois et des conditions de travail décent, dans les pays développés et en développement, qui incluent les femmes et les enfants? 


Répondant à cette question, M. MASSIMILIANO LA MARCA, Spécialiste des questions politiques de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a souligné que la crise de 2008 a frappé des secteurs qui étaient déjà vulnérables, le travail précaire et non qualifié, et s’est accompagné d’un essor de l’économie informelle, qui est devenu difficile à enrayer.  Il a suggéré « la prise d’actions coordonnées centrées sur des modèles favorables à la création d’emplois » et a cité le « Pacte mondial pour l’emploi », feuille de route adoptée le 19 juin 2009 par la Conférence de l’OIT, pour surmonter les crises économique et financière grâce à la création d’emplois. 


« C’est un accord cadre tripartite, inspiré de bonnes pratiques, pas les meilleures, mais des bonnes pratiques existantes », a-t-il précisé.  Le besoin de politiques facilitant la création d’emplois au niveau des entreprises et de politiques encadrant la protection sociale a aussi été mis en exergue.  M. PETER BAKVIS, Directeur du Bureau de Washington de la Confédération internationale des syndicats libres et des Fédérations mondiales de syndicats associés, a fait remarquer que les précédentes initiatives du FMI et du G-20 avaient donné la priorité aux consolidations fiscales.  Ceci fut une erreur, car cela a contribué au ralentissement économique, a-t-il dit, et il a souhaité que les prochains travaux des institutions de Bretton Woods s’attachent à donner la priorité aux fondements de la reprise, à savoir l’emploi.  Il a cité à titre d’exemple le Brésil, pour sa politique intensive de création d’emplois. 


M. ADAM B. GREENE, Vice-Président chargé des affaires du travail et de la responsabilité incombant aux entreprises du Conseil américain pour les affaires internationales, a pour sa part interpelé les États Membres sur le fait qu’il n’existe pas de croissance mondiale unifiée et qu’il faut regarder les situations au cas par cas selon les régions du monde.  En l’occurrence, les pays émergents connaissent à l’heure actuelle des taux de croissance qui se situent autour de 6% en moyenne, ce qui n’est pas un signe indicateur d’une situation de crise.


Dans un monde de plus en plus mondialisé, comment les pays peuvent-ils se protéger de la récession économique et financière?  Est-il possible de réduire l’exposition du marché du travail à la volatilité des marchés? 


Répondant à la question, M. AKBAR NOMAN, Chargé de recherche principal de l’Initiative pour un dialogue politique, Université Columbia, a estimé que des mesures de réglementation peuvent être mises en place.  Mais, dans un monde globalisé, il est difficile pour chaque pays de protéger ses populations, car on ne peut plus s’isoler, ceci étant valable surtout pour les petites économies.  Il a estimé que la coordination globale apparait comme le meilleur moyen de protéger les populations, avec un rôle majeur pour les Nations Unies.  Il a aussi vanté les bienfaits du microcrédit, qui permet de créer de la croissance dans une économie à un niveau local, mais a déploré que ce microcrédit favorise, en outre, le secteur informel.  M. LA MARCA, de l’OIT, a quant à lui souligné que les pays peuvent se protéger en améliorant le système financier international.  Il a noté que la protection sociale est également un outil de justice sociale et d’équité, qui permet de protéger les travailleurs.


Dans quelle mesure les syndicats peuvent-ils bâtir des synergies entre les secteurs public et privé afin de créer un environnement favorable au travail décent et à la création d’emplois?


Répondant à cette question, M. BAKVIS, Représentant des syndicats libres et des Fédérations syndicales, a cité trois pays en exemple pour les progrès sociaux issus de négociations collectives: l’Allemagne, avec l’instauration de jours de récupération qui ont permis de faire baisser le chômage malgré un recul du produit intérieur brut(PIB) en 2009; le Brésil, où de meilleures conditions de travail (salaire minimum) ont été obtenues pour les travailleurs ruraux, ce qui a même eu un impact sur le salaire minimum dans le secteur informel; et l’Inde, où une association de femmes auto-entrepreneurs a fait entrer dans le secteur formel des travailleurs informels en leur donnant un statut légal et une protection sociale.  M. GREENE, du Conseil américain pour les affaires internationales, a pour sa part tiré l’alarme contre l’écart existant entre les normes du travail et la pratique constatée dans les faits, et il a aussi relevé que l’économie informelle, qui a tendance à croître en période de crise, restait en marge du droit du travail.  Du point de vue d’une meilleure coopération public-privé, il a avancé l’idée d’une inspection du travail accrue.


Quelles sont les approches alternatives possibles pour que le secteur privé rende son marché de l’emploi plus stable?  Quelle est la responsabilité du secteur privé dans la création d’emplois et la promotion d’un travail décent?


M. Greene a répondu à cette question en soulignant que le secteur privé réagit à l’environnement dans lequel il évolue, et que l’entreprise privée est d’autant plus entreprenante que l’environnement est propice à son développement.  Dans ce contexte, la promotion de l’auto-entreprise est fonction des lois.  L’entreprise réagit, par ailleurs, à des facteurs comme la bonne gouvernance, la corruption et le dynamisme du marché interne.  M. Bakvis a noté pour sa part que les économies qui ont une régulation et une coordination assez rigoureuses ont plus de solidité et de stabilité.  M. Akbar a, quant à lui, indiqué que les petits pays semblent plus ouverts aux marchés extérieurs, car leur marché intérieur est étroit et que l’exportation va généralement en faveur du développement et des emplois. 


La question des emplois verts a également été abordée par la Modératrice qui a souligné que ce type d’emploi se trouve au croisement des priorités telles que définies dans la Conférence de Rio sur le développement durable, en termes d’avancées sociales et de promotion d’une économie verte.


Débat interactif


La délégation de la France, dont le pays assure actuellement la présidence du G-20, a noté que l’emploi est « un sujet vraiment prioritaire » pour le G-20, ce thème étant déjà à l’agenda, avec notamment une « Task force » chargée de plancher sur des recommandations.  Elle a souligné que le Pacte mondial pour l’emploi de l’OIT était une façon de répondre à la volatilité du marché de l’emploi, et a relevé que les pays émergents, grands exportateurs, sont de plus en plus sensibles au respect des droits sociaux, mondialisation aidant.  La représentante de la France s’est interrogée sur l’agenda de la Conférence de Rio sur le développement durable, Conférence qui se tient en juin 2012 à Rio au Brésil, demandant dans quelle mesure la question de l’emploi sera présente dans les travaux. 


M. Akbar a dit espérer que la prochaine réunion du G-20, prévue les 2 et 3 novembre à Cannes, fasse du développement durable une question prioritaire à son ordre du jour, et a noté la contribution des emplois verts à la fois au développement durable et à la création d’emplois. 


M. Bakvis a déploré le manque de suivi des travaux précédents du G-20 sur l’emploi et a souhaité que des recommandations du G-20 sur la question soient portées aux grandes institutions internationales comme le FMI.


La délégation des États-Unis s’est interrogée sur la manière dont les États pourraient mieux interagir avec le secteur privé sur les solutions à trouver pour créer des emplois. La Modératrice a répondu qu’une telle interaction était souhaitable et qu’il fallait que des recommandations en émergent. 


M. Bakvis a relevé qu’avec la crise de 2008 le secteur financier avait bénéficié de fonds publics sans conditions et qu’il faudrait que ces fonds reviennent aux petites et moyennes entreprises qui ont besoin aujourd’hui de crédits.  Il a aussi évoqué l’utilité d’instaurer une taxe sur les transactions financières, dont les fonds perçus pourraient être affectés à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement.


La représentante du Gabon a interpelé les panélistes sur la question du microcrédit et ses dérives, lorsqu’il favorise le secteur informel, et s’est aussi interrogée sur la technologie, destructrice d’emplois. 


M. Greene a répondu que la destruction de certains emplois par la technologie contribue à élever le niveau de compétences des travailleurs, qui évoluent vers des métiers plus qualifiés.  Sur le microcrédit, M. Akbar a suggéré une plus grande vigilance dans les processus d’attribution de financements. 


Le représentant de l’Espagne a posé la question des inégalités homme-femme sur le marché du travail, et le problème de l’emploi des jeunes. 


M. Greene a suggéré la mise en place de politiques d’encouragement à la création d’emplois au niveau des entreprises.  De son côté, M. La Marca a souligné que l’OIT a travaillé avec les universités pour produire des directives sur l’emploi des jeunes ou encore sur la promotion du travail pour les femmes.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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