La formation Sierra Leone de la Commission de consolidation de la paix s’inquiète de l’insuffisance du financement de l’« Agenda pour le changement »
| |||
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York |
Commission de consolidation de la paix
Comité d’organisation
Quatrième session
1ère séance – après-midi
LA FORMATION SIERRA LEONE DE LA COMMISSION DE CONSOLIDATION DE LA PAIX S’INQUIÈTE
DE L’INSUFFISANCE DU FINANCEMENT DE L’« AGENDA POUR LE CHANGEMENT »
La formation Sierra Leone de la Commission de consolidation de la paix (CCP) s’est réunie cet après-midi sous la présidence du Représentant permanent du Canada, M. John McNee, pour examiner et adopter le Document final de la session extraordinaire de haut niveau de la Commission de consolidation de la paix sur la Sierra Leone, tenue le 10 juin 2009. Les délégations présentes ont salué les progrès réalisés par le pays mais se sont dites « préoccupées » par le peu de financement alloués à ce jour au financement de l’« Agenda pour le changement », qui est le programme national de développement du pays.
Les Ministres des affaires étrangères et des finances de la Sierra Leone, ainsi que le Représentant exécutif du Secrétaire général dans ce pays, M. Michael von der Schulenburg, ont participé à cette réunion formelle, la première depuis la Réunion de haut niveau de juin 2009. En outre, par le truchement d’une vidéoconférence, plusieurs représentants de la société civile sierra-léonaise ont pu suivre la réunion depuis les locaux du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Sierra Leone (BINUCSIL), à Freetown.
Dans le document adopté cet après-midi par ses membres, intitulé « Projet d’examen du document final de la session extraordinaire de haut niveau de la Commission de consolidation de la paix sur la Sierra Leone », la Commission tire un premier bilan de l’« Agenda pour le changement », document de stratégie nationale de développement adopté par le Gouvernement de la Sierra Leone et entériné lors de la Réunion de haut niveau de juin 2009. M. McNee a salué le leadership du Gouvernement de la Sierra Leone dans l’élaboration de ce rapport et pour l’esprit de concertation dont il a fait preuve à cette occasion.
La Ministre des affaires étrangères de la Sierra Leone, Mme Zainab H. Bangura, a remercié les membres de la formation Sierra Leone de la CCP et a estimé que cet exercice de bilan était très important. La Sierra Leone a fait des progrès très importants en matière de consolidation de la paix, a affirmé la Ministre, qui a ajouté que le Gouvernement reconnaissait le rôle essentiel joué par la CCP en matière de mobilisation de la communauté internationale. La paix est revenue en Sierra Leone, mais la pauvreté y demeure, a-t-elle néanmoins fait remarquer. C’est pourquoi le Gouvernement sierra-léonais avait salué la Réunion formelle de haut niveau tenue en juin 2009, qui a permis de renforcer la mobilisation des ressources et de l’assistance pour la mise en œuvre de l’Agenda pour le changement, a-t-elle relevé. Malgré les importants progrès accomplis, la Sierra Leone n’a pas bénéficié de l’afflux de ressources normalement nécessaires pour le relèvement d’un pays, a ajouté Mme Bangura, qui a estimé que le moment était venu d’accorder à la Sierra Leone le statut de « modèle pour la consolidation de la paix ».
M. Samura Kamara, Ministre des finances de la Sierra Leone, a ensuite rappelé que l’Agenda pour le changement, qui est le deuxième document pour la réduction de la pauvreté adopté par le pays, avait fait l’objet d’une large consultation de la population. L’an dernier, le Gouvernement de la Sierra Leone avait demandé à la CCP d’appuyer cet agenda qui met l’accent sur cinq secteurs essentiels vers lesquels orienter les efforts: l’énergie; l’agriculture et la sécurité alimentaire; l’industrie; les transports et la santé a rappelé le Ministre. Pour M. Kamara, le rapport conjoint reflète un effort de l’ensemble des secteurs du Gouvernement ainsi que des partenaires internationaux. Il s’agit de montrer les résultats obtenus, les défis qui demeurent et les actions que le Gouvernement souhaite adopter, dans le contexte international actuel, a-t-il souligné.
Il faut maintenir et consolider la paix, a affirmé le Ministre des finances sierra-léonais, qui a rappelé qu’après déjà deux cycles d’élections, cinq autres scrutins doivent avoir lieu en 2012, alors que l’évolution du pays s’accompagne de changements qui se produisent dans le cadre de l’accompagnement qui lui est offert par les partenaires au développement, y compris à travers les activités du système des Nations Unies. M. Kamara a mis l’accent sur l’importance d’une bonne préparation des élections de 2012, ajoutant que le pays agissait en ce sens, y compris par la préparation d’un projet de loi sur la liberté de l’information. Il a en outre rappelé la création d’une commission de lutte contre la corruption. Le ministre a toutefois rappelé qu’il ne fallait pas oublier l’importance du secteur de la sécurité nationale, avant de faire observer que, 10 ans après être sortie d’un conflit sanglant, la Sierra Leone envoyait aujourd’hui des Casques bleus dans d’autres pays. Il a dit suivre avec attention l’évolution de la situation en Guinée voisine.
Le Ministre a encore estimé que la Sierra Leone avait bien géré son économie, qui a connu depuis la fin de la guerre, un taux de croissance annuel de 7% en moyenne, qui a toutefois baissé avec la crise mondiale et reste insuffisant, bien que le pays ait plutôt bien résisté à ladite crise, en partie grâce à l’appui de la communauté internationale. M. Kamara a estimé que l’agriculture –une des priorités de l’Agenda pour le changement- est essentielle non seulement pour garantir la sécurité alimentaire, mais aussi pour créer de nombreux emplois, et a ajouté que le Gouvernement avait préparé un programme pour améliorer la productivité agricole. La pêche représente aussi une ressource importante, mais le pays souffre de la pêche illégale, a-t-il noté. Le Ministre a également rappelé les investissements effectués dans les infrastructures routières et le potentiel des revenus issus de l’exploitation minière. Rappelant que le Gouvernement de la Sierra Leone avait signé récemment des accords importants en ce sens, il a ajouté que celui-ci comprend bien la nécessité d’un suivi et d’un contrôle des accords signés, et est conscient du risque d’une trop grande dépendance de l’économie aux exportations minières.
Mme Cheng-Hopkins, Sous-Secrétaire générale à l’appui à la consolidation de la paix et Chef du Bureau d’appui à la consolidation de la paix, a estimé que la Sierra Leone était un pays riche en ressources minières, avec aussi un potentiel agricole important. Elle s’est dite heureuse qu’on ait axé les travaux de la CCP sur quelques domaines bien définis, et notamment la bonne gouvernance et la primauté du droit. Elle a rappelé que les quelque 37 millions de dollars que le Fonds pour la consolidation de la paix avait alloués à la Sierra Leone en 2006 ont presque été entièrement dépensés. Une nouvelle tranche sera lancée, a déclaré Mme Cheng-Hopkins. Mais elle sera sans doute moindre que celle accordée en 2006, du fait de la limitation des financements et aussi de ce que de nouveaux pays ont été inscrits depuis lors sur la liste des bénéficiaires du Fonds. Mme Cheng-Hopkins a par ailleurs fait part de certaines préoccupations concernant les élections de 2012, tout en ajoutant que cette date était encore éloignée et qu’il fallait donc prendre dès aujourd’hui des mesures de sauvegarde pour assurer un bon déroulement des scrutins. Elle a aussi reconnu que les ressources allouées au Fonds multi-donateurs restaient très limitées.
La quinzaine de délégations qui ont ensuite pris la parole ont mis l’accent sur les trois priorités définies l’an dernier par la Commission de consolidation de la paix, à savoir la promotion de la bonne gouvernance et de l’état de droit, la lutte contre le trafic de drogues, et la recherche d’une solution au problème du chômage des jeunes. Le représentant du Pérou a ainsi insisté sur la lutte contre la corruption et le respect de l’État de droit, qui seuls, avec la sécurité, permettront d’attirer les capitaux étrangers nécessaires au développement. À l’image des représentants de l’Autriche, de l’Union européenne ou encore du Japon, plusieurs intervenants ont également mis l’accent sur l’importance d’un déroulement pacifique et régulier des élections de 2012.
Les résultats obtenus à ce jour sur le terrain ont été largement salués. Le représentant du Maroc a estimé que la Formation Sierra Leone apparaissait comme un modèle pour d’autres au sein de la CCP. Son homologue du Portugal a jugé l’expérience exemplaire, à la fois pour l’Afrique de l’Ouest dans son ensemble, mais aussi pour les autres pays inscrits à l’ordre du jour de la CCP. Faisant référence à la réunion tenue le matin même au Conseil de sécurité, le représentant du Japon a déclaré que son pays soutenait la prolongation du mandat du BINUCSIL d’un an.
De nombreuses délégations ont toutefois fait part de leurs préoccupations quant aux ressources disponibles pour la mise en œuvre de l’Agenda pour le changement. Tout en estimant que la CCP pourrait jouer un rôle majeur dans la bonne tenue des élections de 2012, le représentant du Royaume-Uni, a rappelé qu’il était nécessaire d’avoir un engagement au-delà des deux prochaines années. Pour lui, les investissements étrangers directs dans le pays pourraient apporter d’importants progrès, y compris pour l’emploi des jeunes et les recettes fiscales du Gouvernement, ce qui permettrait ensuite aux bailleurs de fonds de se retirer progressivement. Le représentant de l’Australie a lui aussi estimé qu’il fallait travailler à une stratégie réussie de mobilisation des ressources tournée vers l’avenir.
Le représentant de l’Union européenne a rappelé que l’aide de celle-ci représentait 300 millions de dollars jusqu’en 2013. Le représentant de l’Allemagne a annoncé un doublement de la contribution de son pays au Fonds pour la consolidation de la paix, qui sera portée à 5 millions de dollars d’ici à la fin de l’année. Le représentant de la Suède a affirmé que son pays continuera de soutenir financièrement les travaux du Tribunal spécial pour la Sierra Leone. Le représentant de la Banque mondiale a rappelé que celle-ci avait fourni plus de 100 millions de dollars de soutien financier. La représentante de l’Irlande a annoncé une nouvelle stratégie d’assistance pour 2010-2012, qui mettra l’accent sur le secteur social et l’aide aux petits exploitants agricoles.
Le représentant de l’Afrique du Sud a, quant à lui, mis l’accent sur la rareté des ressources, rappelant que seuls 10 millions sur les 204 jugés nécessaires pour le Fonds multidonateurs avaient été réunis. Pour le représentant du Brésil, la question des ressources est, avec celle du chômage des jeunes, la plus importante pour l’avenir de la Sierra Leone. La représentante de l’Organisation internationale des migrations a notamment indiqué que le manque de financement mettait en péril un important programme de réparation financière au profit de victimes du conflit. Expliquant que plus de 32 000 victimes, notamment de violences sexuelles, avaient déposé des demandes de réparations, elle a jugé le programme essentiel pour le processus de réconciliation, d’autant que les anciens combattants, eux, reçoivent des pensions dans le cadre du processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR). Elle a estimé qu’alors qu’approche le dixième anniversaire de l’adoption de la résolution 1325 (2000) sur les femmes et la paix, l’arrêt du programme de réparations faute de financement serait un message terrible, en particulier pour les femmes violées du monde entier.
En fin de séance, le Représentant exécutif du Secrétaire général dans ce pays, M. Michael von der Schulenburg, a rappelé que la formation Sierra Leone de la CCP avait vu le jour dès 2005 et avait donc cinq ans d’existence. À cette époque, la plupart des Sierra-léonais pensaient encore à la guerre civile, alors qu’aujourd’hui une page semble tournée, et les habitants pensent surtout à l’avenir, a-t-il affirmé. Il a rappelé que, malgré un ralentissement dû à la crise mondiale, la croissance économique du pays a été permanente, avant d’insister sur la vigueur de la vie politique, l’activité intense de la société civile et des ONG ou encore la présence d’une presse libre. Pour un pays qui se relève d’une terrible guerre civile, la Sierra Leone ne connaît plus d’abus des droits de l’homme, a ajouté le Représentant exécutif. Il y a certes des crimes, des viols, mais ils ne sont pas liés à la guerre civile, a-t-il ajouté.
M. von der Schulenburg a déclaré qu’il reste néanmoins de nombreux défis à relever, et avant tout celui de la pauvreté. La communauté internationale doit donc être présente aux côtés du pays, même si les ressources apportées par l’exploitation minière seront importantes dans l’avenir, a ajouté le Représentant exécutif, qui a, lui aussi, insisté sur le besoin de résorber le chômage des jeunes. Il a en outre estimé que la communauté internationale devrait soutenir de manière appropriée les élections de 2012.
Pour M. von der Schulenburg, la Sierra Leone est passée d’une transition de l’insécurité à la stabilité, à une transition de la stabilité vers le développement. Rappelant que la question de l’appropriation nationale est essentielle, il a déclaré qu’après la session extraordinaire de juin 2009 que la CCP lui avait consacrée, la Sierra Leone avait été le premier pays dont la stratégie de développement nationale avait été adoptée comme stratégie de consolidation de la paix par ses partenaires. Le rapport d’étape que nous présentons aujourd’hui est aussi un reflet de l’appropriation nationale, a encore affirmé M. von der Schulenburg, qui a insisté sur le fait que « tout, dans ce rapport, a été fait par le Gouvernement sierra-léonais avec l’aide de la société civile et des partenaires, et non par des consultants extérieurs » embauchés.
M. von der Schulenburg a enfin plaidé pour un financement approprié de l’Agenda pour le changement, jugeant « vraiment terrible » que seuls 10 millions de dollars aient été versés au fonds multidonateurs sur les quelques 200 millions demandés. Ces 200 millions représentent les fonds nécessaires pour quatre ans au service de la paix et du développement, alors qu’ils représentaient aussi le coût de quatre mois de l’Opération des Nations Unies en Sierra Leone, a-t-il fait observer.
M. McNee s’est dit lui aussi préoccupé par la lenteur des versements au fonds multidonateurs, avant de rappeler que seuls le Canada et la structure « Unis dans l’action » de l’ONU avaient apporté des financements.
* *** *
À l’intention des organes d’information • Document non officiel