AG/J/3392

Les délégations de la Sixième Commission expriment la nécessité d’étudier plus en profondeur le principe de compétence universelle

13/10/2010
Sixième CommissionAG/J/3392
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Sixième Commission

10e & 11e séances – matin & après-midi


LES DÉLÉGATIONS DE LA SIXIÈME COMMISSION EXPRIMENT LA NÉCESSITÉ D’ÉTUDIER

PLUS EN PROFONDEUR LE PRINCIPE DE COMPÉTENCE UNIVERSELLE


Elles poursuivent leur débat sur l’état de droit aux niveaux national et international


La compétence universelle a été reconnue, aujourd’hui, par de nombreuses délégations de la Sixième Commission (chargée des questions juridiques) comme un des instruments qui contribuent à la lutte contre l’impunité de crimes graves du droit international, tout en notant qu’il n’existait pas, à ce stade, de consensus sur l’étendue de cette compétence.  La Commission a, par ailleurs, poursuivi ce matin son examen de la question de l’état de droit aux niveaux national et international.


« La compétence universelle peut être exercée par tout État.  Elle n’appartient pas seulement à certains pays et ne trouve pas non plus son origine dans une région particulière du monde », a souligné le représentant de l’Espagne, au cours de ce débat organisé à la demande du Groupe des États d’Afrique.


Les quatre Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels ont prévu une compétence universelle des juridictions nationales à l’égard des violations graves du droit international humanitaire.  À ce titre, tout État partie à ces Conventions est compétent pour juger toute personne présumée coupable d’infractions graves se trouvant sur son territoire, quelle que soit la nationalité de cette personne ou le lieu où elle a commis les infractions.  Les délégations ont rappelé à plusieurs reprises que la compétence universelle trouve aussi un fondement dans le droit international coutumier.


Dans leur majorité, les délégations ont reconnu l’importance du principe pour poursuivre les auteurs d’infractions pénales graves en vertu de traités internationaux, telles que les crimes de guerre, le génocide, la torture ou encore les actes de terrorisme.  Ces crimes portent atteinte à l’humanité tout entière et c’est pourquoi, il faut combattre l’impunité de ces crimes odieux, ont-elles souligné.


Certains intervenants ont rappelé que le recours à la compétence universelle devrait respecter les principes de l’égalité entre les États, de la non-ingérence dans les affaires intérieures des pays, de l’immunité diplomatique et notamment de l’immunité des représentants officiels des États.  Il faut éviter tout abus et toute politisation en exerçant cette compétence, ont-ils insisté.  « Le Rwanda est l’un des pays les plus touchés par l’application abusive de la compétence universelle, a précisé son représentant, en dénonçant le rôle qu’ont joué des juges de certains pays en s’arrogeant le droit de lancer des mandats d’arrêt internationaux contre des dirigeants rwandais. »


Allant dans le même sens, la plupart des délégations africaines, comme celle du Soudan, ont estimé que les poursuites engagées par des tribunaux étrangers à l’égard de chefs d’État ou de gouvernement africains ou autres fonctionnaires de haut rang devraient cesser, afin de respecter l’immunité dont jouissent ces autorités en vertu du droit international.


Le rapport du Secrétaire général publié cette année sur la portée et l’application de ce principe contient les observations de 44 États Membres et fait apparaître des doctrines et des pratiques variées en ce qui concerne ce principe et son application.


Au cours de la journée, les 36 intervenants sur cette question ont confirmé les avis divergents et les incertitudes qui pèsent sur le contenu de la notion.  En ce qui concerne les juridictions pouvant appliquer la compétence universelle, certains délégués ont fait observer qu’il s’agissait des tribunaux d’un État, mais d’autres ont ajouté les juridictions pénales internationales.


Beaucoup d’intervenants ont, en outre, souligné l’importance de ne pas confondre compétence universelle et obligation de juger ou d’extrader, tout en reconnaissant que ces deux notions sont inextricablement liées.  Certains ont, à cet égard, suggéré que la Commission du droit international examine la question de la compétence universelle, puisqu’elle examine actuellement l’autre notion.


Dans l’ensemble, les délégations ont appelé à mieux définir le champ d’application du principe, en précisant notamment l’éventail des crimes auxquels il s’applique.  Certaines ont souhaité que cette étude soit menée de façon approfondie et impartiale au sein de la Commission du droit international.  D’autres ont, au contraire, appelé à la mise en place d’un groupe de travail au sein de la Sixième Commission, afin de coordonner la réflexion sur ce sujet.


Par ailleurs, les membres de la Sixième Commission ont, ce matin, poursuivi leur débat sur « l’état de droit aux niveaux national et international », entamé hier.  L’état de droit est un élément clef du maintien de la paix et de la sécurité internationales, ont noté les délégations qui ont aussi relevé sa nécessité pour parvenir à un développement durable et pour protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales.


Au plan national, les États doivent établir un cadre juridique approprié pour mettre en œuvre les obligations souscrites au niveau international, ont soutenu la majorité des 14 délégations qui sont intervenues sur ce sujet.  Plusieurs ont souligné la nécessité, à cet égard, d’aider les pays en développement à renforcer leurs capacités nationales.  Mais cette assistance ne doit être fournie qu’à la demande de l’État et tenir compte de ses priorités nationales, ont fait observer certains orateurs.


À l’instar de nombreuses délégations qui se sont exprimées hier, le représentant de l’Équateur a appuyé l’idée de convoquer, en 2011, un débat de haut niveau à l’Assemblée générale sur l’état de droit, comme le propose le Groupe de coordination et de conseil sur l’état de droit.


La Sixième Commission achèvera ses débats sur l’état de droit et sur la compétence universelle, vendredi 15 octobre, à partir de 10 heures.  Elle devrait aussi examiner la question « l’état des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949 relatifs à la protection des victimes de conflits armés », ainsi que les « mesures propres à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires ».


L’ÉTAT DE DROIT AUX NIVEAUX NATIONAL ET INTERNATIONAL


PORTÉE ET APPLICATION DU PRINCIPE DE COMPÉTENCE UNIVERSELLE (A/65/181)


État des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949 relatifs à la protection des victimes des conflits armés (A/65/138)


Examen de mesures propres à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires (A/65/112 et A/65/112/Add.1)...


Rapport du Secrétaire général sur la portée et l’application du principe de compétence universelle (A/68/181)


Le présent rapport fait suite à la résolution 64/117 du 8 septembre 2010, par laquelle l’Assemblée générale a demandé au Secrétaire général d’établir un rapport sur la portée et l’application du principe de compétence universelle.  Le document passe d’abord en revue les observations formulées par les gouvernements touchant leur conception du sujet et certaines réflexions sur la question de la compétence universelle.  Parmi les États ayant fait des observations figurent l’Afrique du Sud, l’Allemagne, l’Arménie, l’Australie, l’Autriche, l’Azerbaïdjan, le Bélarus, la Belgique, la Bulgarie, le Cameroun, le Chili, la Chine, Chypre, le Costa Rica, Cuba et le Danemark.


À travers les observations formulées dans le rapport, on note que certains gouvernements replacent le sujet de la compétence universelle dans le cadre général de la compétence en droit international.  Pour cela, ils font remarquer que cette compétence est étroitement liée aux principes du droit international ayant trait à la souveraineté et à l’intégrité territoriale, étant noté que, l’État peut, sur son propre territoire, exercer sa compétence législative et exécutive à l’exclusion des autres États.  D’autres gouvernements, eux, s’attachent à définir la « compétence universelle », et les définitions proposées renvoient toutes à la même idée selon laquelle la preuve de l’existence d’un lien avec l’État du for est indifférente pour ce qui est de la détermination de la compétence.


Le rapport s’appesantit ensuite sur la question de la portée et de l’application de la compétence universelle selon le droit interne, les traités internationaux et la jurisprudence sur la matière.  À ce niveau, certains États fournissent des indications générales sur le fondement constitutionnel ou autre de l’application du droit international dans leur ordre juridique interne, ainsi que des renseignements plus précis sur les règles régissant l’établissement de la compétence de manière générale, et d’une éventuelle compétence universelle, en particulier.  De façon générale, les États font observer que la compétence universelle n’est qu’un titre de compétence et n’ouvre pas ainsi la voie à des poursuites éventuelles.  Par ailleurs, d’autres gouvernements distinguent la compétence universelle de la compétence pénale internationale.  Enfin, certains des commentaires émis rappellent qu’il ne faut pas confondre compétence universelle et obligation de juger ou d’extrader (aut dedere aut judicare).


La partie finale du rapport est constituée de deux tableaux.  Le premier répertorie les infractions mentionnées dans les diverses observations des gouvernements, pour lesquelles différents codes prévoient la compétence universelle (ainsi que d’autres formes de compétence), tandis que le second donne une liste des textes intéressant le sujet.


Déclarations


M. RETA ALEMU MNEGA (Éthiopie) s’est dit convaincu que les discussions menées au sein de la Sixième Commission contribueraient à assurer une meilleure compréhension de l’état de droit.  Une adhésion de tous les États Membres à cette notion est fondamentale pour la coexistence pacifique entre les États, a-t-il soutenu.  En tant que membre fondateur de l’ONU, l’Éthiopie, a rappelé son représentant, a toujours montré son attachement aux principes fondamentaux consacrés dans la Charte de l’ONU.  Le respect de principes, a-t-il précisé, est essentiel pour garantir l’état de droit au niveau international.  Il a poursuivi en expliquant qu’il incombait aux Nations Unies de déterminer les normes devant être respectées par l’ensemble des membres de la communauté internationale.  En tant qu’organe législatif international, l’ONU doit faire avancer les objectifs communs.  Le délégué a également estimé qu’il était aussi temps de réformer le Conseil de sécurité et d’élargir les pouvoirs de l’Assemblée générale de l’ONU.


Au plan national, le représentant a reconnu la nécessité d’établir un cadre juridique approprié pour mettre en œuvre les obligations internationales et, dans ce contexte, il a détaillé le processus permettant d’intégrer les dispositions des traités ratifiés par l’Éthiopie dans la législation nationale.  Son pays, a-t-il annoncé, est engagé dans un processus de réforme de son système judiciaire.  Le délégué a par ailleurs souligné l’importance de fournir aux pays en développement une assistance en matière d’état de droit.  Cette assistance ne peut être fournie qu’à la demande de l’État et doit tenir compte de ses priorités nationales, a-t-il précisé.


Mme CLAUDIA LOZA (Nicaragua) a rappelé que sa région avait subi récemment une atteinte à l’état de droit, faisant référence à la tentative de coup d’État en Équateur.  Le Nicaragua a adopté les principes fondamentaux permettant de parvenir à un ordre international juste, a-t-elle dit.  Le Nicaragua fonde ses relations internationales sur la solidarité, la réciprocité et l’amitié entre les peuples et c’est pourquoi, a-t-elle dit, il opte pour le recours aux moyens de règlement pacifique des différends.  La représentante a aussi assuré que son pays respectait ses engagements internationaux de bonne foi et qu’il était engagé dans la promotion de l’état de droit aux niveaux national et international, ayant  notamment adhéré à de nombreux instruments sous-régionaux, régionaux et internationaux.  Dans cet esprit, elle a rejeté ceux qui choisissent une application sélective du droit international en appliquant des mesures unilatérales et en menaçant de recourir à la force.  La représentante a aussi souhaité que la coopération internationale tienne compte des nécessités nationales.  Elle a enfin attiré l’attention sur les campagnes de désinformation lancées dans les médias, qui encouragent les atteintes à l’état de droit et à la démocratie.


M. PATRICIO TROYA (Équateur), soulignant le lien entre l’état de droit et la démocratie, a déclaré que toute tentative de briser l’ordre constitutionnel doit toujours être rejeté et condamné fermement.  Concernant le respect des engagements internationaux, il a souligné la nécessité de comprendre les priorités et les particularités des États Membres afin de définir au mieux les textes internationaux devant être adoptés par la communauté internationale.  Sa délégation, a-t-il assuré, appuie l’idée de convoquer, en 2011, un débat de haut niveau à l’Assemblée générale sur l’état de droit, comme le propose le Groupe de coordination et de conseil sur l’état de droit.


M. K. VENUGOPAL (Inde) a déclaré que le respect de l’état de droit était un élément clef pour assurer un développement durable, la protection des droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales.  L’état de droit est également essentiel pour préserver la paix et la sécurité internationales, a-t-il ajouté.  La Constitution indienne est le fondement même de l’état de droit, a-t-il dit, précisant que le Gouvernement central a la responsabilité de l’application des traités internationaux sur le plan interne.  L’application par les États des obligations qu’ils souscrivent en vertu des traités internationaux est un aspect important de l’état de droit, a-t-il souligné.


Le représentant a ensuite expliqué la réforme des institutions judiciaires entreprise par son pays pour renforcer l’état de droit au niveau national.  Il a également signalé les nombreux programmes de développement social mis en œuvre dans son pays en vue de réduire la pauvreté et d’assurer un développement profitant à l’ensemble de la société.  En ce qui concerne les activités de l’ONU sur l’état de droit, il a estimé que le mandat de l’organe de l’ONU chargé de cette question ne doit pas faire double emploi avec les travaux d’autres organes des Nations Unies.  Il faudrait fournir une assistance accrue aux pays en développement pour leur permettre de renforcer l’état de droit au niveau national.


M. AMANUEL AJAWIN (Soudan) a déclaré que la Constitution provisoire de 2005 de son pays avait établi les principes de base sur lesquels s’appuie l’état de droit.  Cette constitution a conçu un pacte entre le peuple soudanais et son gouvernement, a-t-il affirmé.  Le Soudan défend le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États et celui du respect de l’indépendance politique de chaque État, a poursuivi le représentant, qui a condamné « la politisation de la justice pénale internationale ». L’immunité du chef d’État, du Premier Ministre et du Ministre des affaires étrangères est bien établie en droit international, a-t-il affirmé, en précisant que cette immunité était confortée par l'arrêt Yerodiade laCour internationale de Justice, datant du14 février 2002 (affaire « RDC contre Belgique »).  « Il y a une volonté politique sans fondement juridique aucun dans les accusations portées contre le Président du Soudan et il s’agit ici d’un précédent dangereux » a soutenu M. Ajawin.  Il a jugé logique que l‘Union africaine et le Président de la Commission africaine aient condamné « l’action illégale et politicienne » de la Cour pénale internationale.  Il a conclu en soulignant la nécessité de soutenir les États en développement à renforcer leurs capacités juridiques dans le domaine de la promotion de l’état de droit.


M. SAMIR SHARIFOV (Azerbaïdjan) s’est félicité des travaux menés par le Groupe de coordination et de conseil sur l’état de droit mis en place aux Nations Unies.  Relevant l’importance du respect du droit international pour faire prévaloir l’état de droit, il a expliqué qu’en Azerbaïdjan, lorsqu’il y a conflit entre une loi nationale et un texte international, c’est l’accord international qui l’emporte.  Il a aussi indiqué que les dispositions internationales relatives aux droits de l’homme sont appliquées directement au plan national.  Le représentant a appuyé la codification progressive du droit international, ainsi que les activités menées par les Nations Unies à tous les niveaux pour renforcer l’état de droit.  Les résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité doivent être appliquées sans la moindre sélectivité, a-t-il par ailleurs déclaré.  Enfin, il a regretté que les violations du droit international soient encore trop fréquentes et que la volonté de respecter ce droit de la part de la communauté internationale soit encore trop faible.


M. EDEN CHARLES (Trinité-et-Tobago) a estimé que la promotion de l’état de droit aux niveaux national et international était essentielle pour parvenir à la paix et à la sécurité internationales et au développement des États.  Il a ensuite salué le travail accompli par l’ONU dans le domaine du renforcement des capacités des États.  À cet égard, il a appelé à octroyer au Groupe de coordination et de conseil sur l’état de droit, les ressources nécessaires pour lui permettre de s’acquitter de son mandat.  Il a salué les activités menées dans ce domaine par l’UNITAR à l’intention des diplomates et fonctionnaires des États.  Le représentant a appelé à une véritable coopération entre les États afin de faire face à la menace que représente la criminalité transnationale organisée qui « sape les efforts menés dans le domaine de la promotion de l’état de droit par les petits États insulaires en développement comme le sien.  Il a poursuivi en soulignant l’importance de la Cour pénale internationale dans la lutte contre l’impunité et, ce, dans le respect de l’état de droit, avant de détailler une série de mesures adoptées par son pays en matière de justice interne.  « Le respect de l’état de droit est fondamental pour une gouvernance mondiale efficace », a-t-il conclu.


M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a estimé que ce n’est que par le respect de l’état de droit et de la justice qu’on peut maintenir un ordre international pacifique et prospère, avant de regretter la publication tardive du rapport du Secrétaire général sur la question.  La démarche de l’ONU dans le domaine de l’état de droit doit être fondée sur les principes figurant dans la Charte des Nations Unies, a-t-il affirmé.  Notant que le rapport semble suggérer que les activités de l’ONU en matière d’état de droit se concentrent sur certains domaines, il a invité à adopter une approche équilibrée et inclusive et à diriger davantage ces activités vers la justice économique et sociale.  Chaque État a la responsabilité de mettre en place un système permettant l’état de droit, a-t-il ensuite rappelé.  La communauté internationale peut contribuer à ces efforts en offrant une assistance technique, a-t-il poursuivi, tout en précisant que cette aide devrait être offerte à la demande des États et être basée sur les priorités des pays bénéficiaires.


Tous les Iraniens, hommes et femmes, jouissent de droits égaux, sans discrimination, a affirmé le représentant.  Il a expliqué tout le processus qui permet, dans son pays, de mettre en œuvre des dispositions internationales dans l’ordre juridique interne.  Il a en outre souligné le rôle unique des Nations Unies dans le renforcement de l’état de droit, par le biais de la codification, de la promotion, de la diffusion et de la mise en œuvre du droit international.  Les Nations Unies sont donc au centre des efforts de renforcement de l’état de droit.  Enfin, il a demandé que les fonctionnaires des Nations Unies aient accès à un bon système de justice interne, saluant à cet égard le nouveau système en place à l’ONU.


     M. GHAZI JOMAA (Tunisie) a expliqué que l’article 5 de la constitution de son pays mentionne que l’état de droit constitue l’un des principes sur lesquels la République est fondée.  Il a ensuite rappelé que la Tunisie adhère aux conventions et aux traités adoptés par la communauté internationale dans divers domaines.  Tout récemment, lors de la cérémonie des traités de l’ONU, la Tunisie a ainsi soumis son instrument de ratification à la Convention sur les armes à sous-munitions, et celui relatif à son adhésion à la Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme nucléaire.  En vertu de l’article 32 de la constitution tunisienne, qui dispose que les traités ratifiés par le président de la République et approuvés par la chambre des députés ont une autorité supérieure à celle des lois, ces conventions, comme les autres, deviendront une source de droit obligatoire en Tunisie, a précisé le représentant.


L’état de droit est lié au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à la démocratie et à la justice pénale, qui sont des principes essentiels auxquels la Tunisie adhère, a affirmé le représentant.  Mais le renforcement de l’état de droit passe aussi par le respect par tous les États, sans distinction, des résolutions du Conseil de sécurité, a-t-il ajouté, regrettant que bon nombre de ces résolutions demeurent à ce jour ignorées.  De plus, le renforcement de l’état de droit aux plan national et international exige que tous se mobilisent en vue d’assurer une plus grande adhésion à l’ensemble des instruments du cadre juridique international, ainsi que le respect des normes et règles développées par la communauté internationale, sans distinction, a-t-il insisté.  Le représentant a par ailleurs appuyé l’idée de convoquer, en 2011, un débat de haut niveau à l’Assemblée générale sur l’état de droit, comme le propose le Groupe de coordination et de conseil sur l’état de droit.


Mme ELSA HAILE (Érythrée) a assuré que son pays respectait l’ordre international fondé sur le droit international, en particulier les droits de l’homme et l’état de droit.  Elle a estimé important d’établir des règles claires dans ce domaine, de les respecter pleinement et de disposer d’un système multilatéral efficace pour prévenir et sanctionner les violations de ces règles.  Les Nations Unies, les États-Membres et les organisations régionales et sous-régionales doivent joindre leurs efforts afin de renforcer l’état de droit dans toutes ses dimensions, a-t-elle affirmé, ajoutant que cela permettrait d’éviter qu’un gouvernement utilise ses pouvoirs de façon arbitraire dans ses relations internationales, avant d’appeler l’Assemblée générale à jouer un rôle directeur dans ce domaine.  Elle a aussi souhaité que la communauté internationale ne se substitue pas aux autorités nationales dans le renforcement de l’état de droit.  Les Nations Unies doivent jouer un rôle important pour que ses membres soient tous régis par les mêmes normes, a aussi estimé Mme Haile, qui a, par ailleurs, noté que la promotion de l’état de droit bénéficiait aussi au développement économique et social.  Elle a enfin souhaité que les États Membres arrivent à un consensus sur l’état de droit. 


M. AYO OLUKANNI (Nigéria) a souligné le lien entre l’état de droit et le maintien de la paix et de la sécurité internationales, avant d’appuyer les efforts déployés par le Groupe de coordination et de conseil sur l’état de droit dans le renforcement de l’état de droit au sein des pays en développement.  Au Nigéria, les principes sur lesquels se fondent l’état de droit ont toujours été défendus et sont au cœur de l’action gouvernementale, a affirmé le représentant, qui a expliqué que la constitution du Nigéria avait été amendée pour y introduire des principes de base qui renvoient, entre autres, à l’égalité et à la justice.  Il a indiqué que les réformes judiciaires actuellement conduites s’attelaient par exemple à accorder un meilleur traitement aux personnes incarcérées, conformément aux normes internationales.  De façon générale, le Nigéria veut aller vers un développement de son droit général afin de le rendre véritablement conforme au droit international, a poursuivi le représentant.


Évoquant la question du maintien de la paix, M. Olukanni a rappelé le rôle actif joué par les troupes nigérianes déployées à travers le monde au service des Nations Unies.  Par leur action, elles œuvrent à l’établissement de l’état de droit sur la planète, s’est-il félicité, en appelant à une amélioration des opérations de maintien de la paix.  Au plan régional, le Nigéria est également actif dans la promotion de l’état de droit, a encore déclaré M. Olukanni, qui a précisé que des juges nigérians apportaient leur expertise aux instances judiciaires des pays de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO).


Mgr FRANCIS CHULLIKATT, Observateur du Saint-Siège, a fait observer que la loi ne devait pas seulement refléter le résultat de délibérations juridiques civiles, mais devait aussi intégrer le droit moral naturel, qui n’est que la reconnaissance des conséquences sociales de la dignité humaine.  Il a regretté que, trop souvent, les instances légales et judiciaires omettent cette considération d’ordre moral.  Soulignant la vision positiviste et utilitaire du droit, il a noté qu’il s´écarte ainsi de sa responsabilité sociale.  Il a notamment averti du risque d’arriver à la conclusion erronée que ce qui est licite est juste. 


Mgr Chullikatt a ensuite observé que l’importance du commerce international et du développement avait conduit à reconnaître la nécessité de disposer de normes internationale justes dans ces domaines.  Les marchés internationaux du travail ont reçu davantage d’attention de la part de la communauté internationale, afin de  promouvoir des lois plus équitables qui protègent la dignité des travailleurs et des migrants, a-t-il déclaré.  Il a donc invité à réformer le mandat et les règles des principales institutions financières multilatérales, comme le FMI et la Banque mondiale.  Enfin, il a dénoncé la tendance de certains organes de traités à étendre la portée des instruments, ce qui sape le système international de traités et conduit, dans certains cas, à faillir au devoir de protéger la vie.


M. ROBERT YOUNG, Comité international de la Croix-Rouge, a souligné la nécessité de faire en sorte que l’état de droit soit véritablement garanti sur le plan national, afin que les États s’acquittent de leurs obligations en vertu des conventions internationales.  Seul un cadre juridique solide prévoyant des sanctions appropriées est à même de garantir que les auteurs de violations du droit international humanitaire devront répondre de leurs actes, a-t-il dit.  Le CICR s’efforce activement de promouvoir l’état de droit tant au niveau national qu’au niveau international, a indiqué le représentant, qui a mentionné les services consultatifs du CICR qui fournissent un soutien direct aux États dans le cadre de l’élaboration de leurs législations nationales.  Le CICR organise aussi des réunions régionales et internationales, créant des espaces propres à favoriser les échanges entre les États sur les évolutions du droit international humanitaire, a expliqué le représentant.  Parmi les outils que le CICR a élaborés, il a cité notamment une base de données des législations nationales, qui peut être consultée sur son site Internet.


M. PATRIZIO CIVILI, Observateur de l’Organisation internationale de droit du développement (OIDD), a présenté une série d’activités menées par son organisation en vue de la promotion de l’état de droit à  travers le monde.  Ainsi, a-t-il expliqué, en Afghanistan, l’OIDD s’est lancée dans la formation des acteurs du monde judiciaire et a mis en place une unité d’assistance juridique au service des plus pauvres.  Par ailleurs, un programme à la préparation aux changements climatiques a été récemment mis en place et sera distribué aux états.  M. Civili s’est dit satisfait de la coopération active entre son organisation et les petits États insulaires en développement, qui subissent déjà les conséquences de ces changements.


Sur la question de la coordination des efforts internationaux, M. Civili a appelé au renforcement de la coopération avec les entités de l’ONU, tout en saluant le travail du Groupe de l’état de droit des Nations Unies.  Évoquant le travail de la Commission de consolidation de la paix dont il suit les activités, il a dit partager son approche large de l’état de droit, qui intègre non seulement les aspects militaires et de police mais aussi les questions de développement à long terme.  Il a enfin appuyé l’appel du Secrétaire général en faveur du renforcement des structures judiciaires nationales, afin d’accélérer l’ancrage de l’état de droit.


Mme ALEJANDRA QUEZADA (Chili), s’exprimant au nom du Groupe de Rio, a expliqué que l’examen du principe de compétence universelle devrait être exclusivement mené sous l’angle juridique et sur les bases du droit international.  Elle a ensuite rappelé que ce principe ne devrait pas être confondu avec la compétence pénale internationale exercée par les tribunaux pénaux internationaux et la Cour pénale internationale. « Il faut aussi distinguer cette compétence de l’obligation de juger et d’extrader », a-t-elle insisté.


À cette étape de la réflexion au sein de la Sixième Commission, les États Membres n’expriment pas une position claire sur la pertinence de travaux futurs sur cette question, a-t-elle noté.  C’est pourquoi, elle a proposé de créer un groupe de travail chargé de coordonner la réflexion sur cette compétence universelle. L’inscription de nouveaux points à l’ordre du jour de la Sixième Commission ne doit pas créer de double emploi avec les travaux de la Commission du droit international, a-t-elle prévenu.


M. MABVUTO KATEMULA (Malawi), parlant au nom du Groupe des États d’Afrique, a souhaité que la Sixième Commission adopte une démarche prudente pour examiner le principe de la compétence universelle, avant de se prononcer sur cette question.  Il s’est préoccupé de l’application de ce principe qui n’est défini à ce jour que de manière vague.  Les poursuites lancées par des tribunaux étrangers à l’encontre de chefs d’État ou de gouvernement africains ou autres fonctionnaires de haut rang doivent cesser sans tarder, afin de respecter l’immunité dont ils jouissent en vertu du droit international, a-t-il insisté.  Il a rappelé l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice selon lequel le principe de l’immunité des chefs d’État ne devrait pas être remis en question.


Plusieurs gouvernements ont indiqué, note le Secrétaire général dans son rapport, qu’il existe des avis divergents sur le type ou le nombre de crimes pour lesquels la compétence universelle pourrait être invoquée, a relevé le représentant.  Le Groupe des États d’Afrique sait que certains États non africains ont cherché à justifier l’application arbitraire et unilatérale de ce principe, mais il n’y a pas de définition universellement acceptée de la compétence universelle, a-t-il insisté, appelant à éviter tout abus dans ce domaine.  Ce ne sont pas seulement les pays africains qui se préoccupent de ce risque, a-t-il fait remarquer.   Les pays africains ont contribué à la promotion d’un régime de droit pénal international, a-t-il fait remarquer, rappelant notamment que ces pays avaient appuyé la création des Tribunaux spéciaux pour le Rwanda et la Sierra Leone.  L’acte constitutif de l’Union africaine prévoit aussi le droit de cette organisation régionale d’intervenir dans les affaires d’un État Membre à la demande d’un autre, pour prévenir un génocide ou des crimes contre l’humanité, a-t-il rappelé.  Il a conclu en réitérant l’appel lancé par les chefs d’État et de gouvernement africains pour que soit levé tout mandat d’arrêt lancé à l’encontre de dirigeants africains ou autres fonctionnaires de haut rang qui bénéficient de l’immunité en vertu du droit international.


M. KEITH MORRILL (Canada), s’exprimant également au nom de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (CANZ), a indiqué que le principe de compétence universelle était bien établi en droit international avant de reconnaître que son application suscite encore des controverses.  Le représentant a souligné qu’il incombait aux États de mener des enquêtes et de poursuivre en justice les auteurs de crimes commis sur leur territoire.  Il a ensuite appelé les États Membres ne l’ayant pas encore fait à établir leur compétence en ce qui concerne les crimes graves.  Puis, il a souligné l’importance de la coopération entre les acteurs de la communauté internationale dans le domaine de la lutte contre l’impunité.  Le délégué a d’autre part  estimé que la communauté internationale devrait assister les pays, qui en font la demande, à renforcer leurs capacités dans le domaine de la justice.    Il a ensuite souhaité que les délégations fassent une distinction entre l’étude du principe de compétence universelle et celui de l’immunité.


M. HATEM TAG-ELDIN (Égypte) a affirmé que la compétence universelle couvrait les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et l’esclavage et que ce principe était, par conséquent, d’une grande importance en droit international.  Il incombe en premier lieu aux États, sur le territoire desquels un de ces crimes est commis, d’enquêter et de poursuivre ses auteurs en justice.  Il existe des divergences profondes sur l’application du principe de compétence universelle.  Il est important, a-t-il estimé, de définir le champ d’application de ce principe de compétence universelle, afin de préserver les relations amicales entre les États. Le représentant a appuyé la position de l’Union africaine qui dénonce « le recours abusif de la compétence universelle par la Cour pénale internationale ». Le délégué a aussi appelé à distinguer la compétence universelle de l’obligation d’extrader.


Mme ANA CRISTINA RODRIGUEZ-PINEDA (Guatemala) a indiqué que la compétence universelle au Guatemala était fondée sur le Code pénal, en conformité avec les traités ratifiés par le Guatemala.  Les sources de la compétence universelle sont les traités, le droit international coutumier et les crimes universellement reconnus.  C’est un domaine où il y a beaucoup d’interprétations différentes et donc de confusion, a-t-elle fait remarquer.  Elle a souligné que la compétence universelle ne devrait s’appliquer qu’à des crimes graves aux yeux de la communauté internationale.  Elle a distingué la compétence universelle du principe aut dedere aut judicare (obligation de poursuivre ou d’extrader), expliquant que l’extradition est avant tout un mécanisme de coopération visant à éviter l’impunité en mettant un criminel présumé à la disposition d’un pays.


La représentante a espéré que les efforts de définition de la compétence universelle permettront de définir aussi ce qu’elle ne recouvre pas.  Il faudra aussi examiner jusqu’à quel point les tribunaux ont l’obligation d’exercer cette compétence.  Elle a également invité à normaliser le recours à la compétence universelle pour éviter tout abus.  Une démarche juridique et globale est nécessaire, a-t-elle ajouté.  Enfin, elle s’est dite favorable à ce que le Secrétariat établisse un rapport sur la question et à la constitution par la Sixième Commission d’un groupe de travail à composition non limitée qui sera chargé d’examiner cette question, en mettant l’accent sur la primauté ou la subsidiarité de la compétence universelle et en précisant son lien avec le principe aut dedere et judicare.  Il faudrait aussi qu’il se penche sur les exceptions à cette compétence, a-t-elle proposé.


M. YURI NIKOLAICHIK (Bélarus) a déclaré que la législation nationale du Bélarus n’a pas clairement établi de compétence universelle.  La doctrine définit ce principe comme étant « la possibilité de poursuivre l’auteur d’un crime grave quelle que soit sa nationalité et quel que soit le lieu où a été commis le crime ».  Le représentant a par ailleurs soutenu l’idée développée par le délégué de l’Iran d’établir une liste des crimes graves, en appelant à y inclure la piraterie.  Au plan interne, a-t-il poursuivi, le droit interne du Bélarus a déjà répertorié certains crimes graves, tels que l’utilisation d’armes de destruction massive et le crime de génocide.


Le Bélarus, a-t-il ajouté, n’applique de compétence extraterritoriale qu’à l’égard des crimes visés par les conventions auxquelles il est partie, afin de respecter la souveraineté nationale et la coexistence pacifique entre les États. Le délégué a estimé que le recours à la compétence universelle ne doit pas se faire de manière sélective.  Le représentant a souhaité que la Sixième Commission et la Commission du droit international examinent de manière approfondie et impartiale l’application de ce principe, en établissant une distinction claire entrel’obligation d’extraderou de poursuivre (autdedere autjudicare) et le principe de compétence universelle.


M. ROBERTO RODRIGUEZ (Pérou) a énuméré plusieurs éléments qui ressortent du rapport du Secrétaire général, qui est basé sur les observations des gouvernements, et des déclarations des États Membres au cours de la session précédente, en ce qui concerne la compétence universelle.  Il a d’abord noté que la compétence universelle constituait un critère d’attribution de la compétence que peuvent exercer les États afin de sanctionner des crimes définis par le droit international.  La compétence universelle est en outre liée à des crimes graves.  L’exercice de la compétence universelle doit se faire en conformité au droit international, notamment les droits de l’homme, a-t-il ajouté.  Il a aussi fait remarquer que la compétence universelle a un caractère complémentaire des autres critères d’attribution de compétence juridictionnelle et qu’elle est donc indispensable pour la lutte contre l’impunité.  En outre, il ressort que la compétence universelle est différente du principe aut dedere aut judicare (obligation de poursuivre ou d’extrader) et différente de la compétence pénale internationale.


Le sujet est assez large, a fait observer le représentant qui a souhaité plus de clarté dans l’examen de cette question.  Il a cependant noté que les États avaient choisi d’examiner ce sujet seulement dans le cadre de la responsabilité pénale des individus.  Il faudrait maintenant identifier les résultats que les États souhaitent obtenir en procédant à l’examen de cette question, a-t-il dit.  Sa délégation, est favorable à la constitution d’un groupe de travail au sein de la Sixième Commission qui serait chargé de l’examen de cette question, afin d’identifier notamment les éléments constitutifs de la compétence universelle, à la lumière des positions exprimées par les délégations.


M. SAMIR GOUIDER (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré que la compétence universelle exigeait une définition acceptable sur le plan international.  Rappelant qu’elle ne doit concerner que les crimes les plus graves, il a prévenu que son application ne devrait pas avoir pour conséquence de porter atteinte à la souveraineté des États, ni à l’immunité juridictionnelle des États et de leurs dirigeants.  Les procédures de certains organes judiciaires nationaux se sont éloignées de ces exigences, a-t-il constaté.  C’est pourquoi, il a appelé à mettre un terme aux pratiques qui, sous prétexte de lutter contre l’impunité, vont à l’encontre des dispositions de l’Acte constitutif de l’Union africaine.  La Sixième Commission doit déterminer le cadre de la compétence universelle, a-t-il dit, pour mettre en œuvre ce principe en tenant compte des expertises juridiques internationales reconnues.  Il a invité à progresser au cours de la présente session afin de trouver un consensus sur le principe de compétence universelle et son application.


M. OLIVIER NDUHUNGIREHE (Rwanda) a rappelé que son pays était l’un des plus touchés par l’abus du principe de compétence universelle, car des juges de certains pays se sont arrogé le droit de lancer des mandats d’arrêt internationaux contre ses dirigeants.  Cela a été fait à l’issue d’enquêtes purement politiques au cours desquelles les règles élémentaires de procédures judiciaires ont été bafouées.  Le Rwanda n’est pas opposé au principe de compétence universelle qui possède bien des mérites, non seulement sur le plan du développement du droit international, mais surtout sur le plan du respect des droits de l’homme, avec l’objectif d’éradiquer toute forme d’impunité pour les crimes les plus graves, a dit le délégué.


En revanche, le problème réside, a-t-il poursuivi, dans le recours abusif à l’application de ce principe et ceci apparaît lorsque des juges individuels, poursuivant manifestement des buts politiques, délivrent des mandats internationaux contre les dirigeants d’un pays en violation des règles applicables à une instruction.  À l’instar du Groupe des États d’Afrique, le représentant a proposé d’instaurer un moratoire sur les mandats déjà lancés jusqu’à ce que les discussions engagées sur le plan international aboutissent à une conclusion définitive.  Il a aussi proposé d’instituer la possibilité du réexamen des décisions prises par des juges individuels.  « Il est anormal qu’un juge puisse disposer d’un pouvoir illimité lui permettant de se retrancher derrière le principe de compétence universelle pour prendre en otage un État indépendant et souverain, pour des gains uniquement politiques », a conclu le représentant.


M. ASMUND ERIKSEN (Norvège) a expliqué que l’exercice de la compétence universelle se justifiait par la gravité extrême du crime commis qui, a-t-il précisé, affecte l’ensemble de la communauté internationale.  L’autorité compétente pour l’exercer est fondée sur le droit international coutumier, a-t-il précisé.  La compétence universelle contribue à la lutte contre l’impunité, a-t-il fait remarquer, en souhaitant que les éléments de cette compétence soient progressivement clarifiés tout en adoptant une approche prudente.


M. Eriksen, notant que le rapport du Secrétaire général établissait clairement l’existence d’une vaste gamme d’opinions sur tous les crimes devant tomber sous le coup de la compétence universelle,  a suggéré que la Sixième Commission étudie plutôt les procédures sur lesquelles on pourrait se mettre d’accord.  Les Principes directeurs des Nations Unies sur le rôle des procureurs pourraient servir de base à cet égard, a-t-il estimé.  Sa délégation, a-t-il dit, estime qu’il n’est pas nécessaire de poursuivre le débat sur la question de l’impunité, afin d’éviter tout chevauchement avec les travaux de la Commission du droit international.


Mme MATTANEE KAEWPANYA (Thaïlande) a reconnu que la question de la portée et de l’application du principe de compétence universelle continuait de diviser les juristes et la communauté internationale.  Elle a ensuite expliqué que les tribunaux de son pays sont habilités à juger les auteurs d’infractions pénales graves, en vertu de ce principe.  Concernant l’étude de cette question, la déléguée a souligné la nécessité de faire une distinction claire entre le principe de compétence universelle et l’obligation d’extrader.


La compétence universelle exercée par les tribunaux nationaux doit être également distinguée de la compétence des juridictions pénales internationales qui, a-t-elle rappelé, est complémentaire de celle des juridictions nationales.  Convaincue qu’il faut sanctionner les auteurs de crimes graves, elle a estimé cependant qu’il faudrait respecter le droit international en la matière.


M. CHULL-JOO PARK (République de Corée) a rappelé que la compétence universelle était une prérogative de l’État pour poursuivre les auteurs de certains crimes commis en dehors de sa compétence territoriale.  Il a expliqué que son pays était libre d’exercer sa compétence universelle en vertu du droit coutumier.  L’obligation d’extrader ou de juger (aut dedere aut judicare) n’est pas synonyme de la compétence universelle, a-t-il précisé, tout en reconnaissant qu’il est lié de façon inextricable à la compétence universelle.  La République de Corée a adopté des lois stipulant que les ressortissants d’un autre État ayant commis un crime susceptible de poursuites en vertu de la compétence universelle doivent se trouver sur le territoire de la Corée, a-t-il indiqué.  La compétence universelle doit aussi être exercée de façon à éviter un conflit avec une autre règle de droit international.  Pour les discussions futures sur ce sujet, il a estimé que la Commission du droit international pourrait apporter une contribution utile, dans la mesure où elle examine actuellement la question de l’obligation d’extrader ou de juger.


M. PETR VALEK (République tchèque) a estimé que le principe de la compétence universelle était étroitement lié à la lutte contre l’impunité.  La République tchèque, a-t-il insisté, ne peut se joindre aux États qui veulent limiter la portée de ce principe.  Le représentant a reconnu cependant qu’il était nécessaire de clarifier sa portée.  Il a ensuite jugé « inacceptable la proposition d’instituer un examen des décisions de justice qui seraient rendues par des juridictions nationales, en vertu de ce principe de compétence universelle ».  La question de la compétence universelle est avant tout une question juridique et non politique et cela justifie son inscription à l’ordre du jour de la Commission du droit international, sans porter préjudice aux travaux menés par cette entité sur l’obligation d’extrader, a-t-il conclu.


M. NDIAYE (Sénégal) a relevé les divergences de conceptions sur beaucoup d’aspects de la question de la compétence universelle, ce qui renforce la nécessité de la définir clairement et de préciser les règles guidant son application.  Il a parlé du potentiel de tensions dont peut être porteur le principe de compétence universelle ainsi que les conséquences fâcheuses que son application non régulée risque d’engendrer dans la conduite des relations internationales si certaines imprécisions ne sont pas levées.  Le principe de la compétence universelle a pour essentiel de veiller à ce que les auteurs de crimes graves ne bénéficient pas de l’impunité, a-t-il dit.


En ce qui concerne la portée du principe, le représentant a rappelé que le droit coutumier reconnaissait la compétence universelle pour juger les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et les faits de torture commis à l’étranger, même si, à l’origine, elle a été instituée pour punir les crimes de piraterie.  Il a cité les Conventions de Genève de 1949 qui ont reconnu ce principe, mais estimé que son extension en dehors du cadre des traités est source de controverse.  Le principe de compétence universelle, a-t-il rappelé, reste une exception aux règles de compétence traditionnelles reconnues par le droit international: la compétence territoriale qui permet aux États de juger les crimes commis sur leurs territoires; les compétences personnelles actives et passives qui permettent de juger les nationaux auteurs de crimes commis à l’encontre d’autres nationaux et la compétence réelle qui autorise les États à juger les crimes portant atteinte aux principes fondamentaux de leurs nations.  Le représentant a averti que la compétence universelle ne s’applique pas à tous les délits et qu’elle risque de ne pas respecter les règles du droit international comme celles régissant les immunités des fonctionnaires.  Mais, a-t-il souligné, la compétence universelle est soumise aux principes de la légalité internationale.  Il a aussi appelé à éviter la politique de « deux poids deux mesures », parfois observée dans l’application de la doctrine de la compétence universelle, ce qui témoigne d’une certaine politisation.  Tout exercice abusif de cette doctrine pourrait mettre en péril le droit international, a-t-il prévenu.


M. YANEL BARNUEVO (Espagne) a salué la distinction faite dans le rapport du Secrétaire général entre le principe de la compétence universelle exercé par les juridictions nationales et celui exercé par les juridictions pénales internationales.  Il a aussi salué la distinction opérée entre la compétence universelle et l’obligation de juger ou d’extrader (aut dedere aut judicare).  Pour le délégué, la compétence universelle est « avant tout une institution commune à l’ensemble des États et elle n’appartient pas à certains pays, ni ne trouve son origine dans une région particulière du monde ».


Abordant la pratique de l’Espagne dans ce domaine, le représentant a expliqué que depuis l’entrée en vigueur, le 5 novembre 2009, de la loi sur les pouvoirs des juges espagnols, ceux-ci ne peuvent engager de poursuites en vertu de cette compétence universelle, qu’en dernier ressort, si, et seulement si, les juridictions pénales internationales n’ont pas engagé de procédure. Il faut  que   les auteurs des crimes se trouvent sur le sol espagnol ou encore que les victimes de ces crimes soient de nationalité espagnole.  Il a poursuivi en se déclarant favorable au renvoi de l’examen de cette question de la compétence universelle à la Commission du droit international qui dispose de l’expertise adéquate et qui examine déjà la question de l’obligation d’extrader.  Ce renvoi permettrait également de situer cette question dans un cadre véritablement technique.  Néanmoins, a-t-il précisé, l’Espagne est prête à envisager la création d’un groupe de travail au sein de la Sixième Commission, à titre transitoire avant le renvoi du point à la CDI.


Mme SANJA STIGLIC (Slovénie), tout en reconnaissant que la compétence universelle vise à éliminer l’impunité pour les crimes graves qui affectent la communauté internationale tout entière, a souhaité que des mesures soient prises pour prévenir une application abusive de cette compétence universelle.  La plupart des États subordonnent les poursuites en vertu de la compétence universelle à certaines conditions, a-t-elle fait observer.  C’est pourquoi, a-t-elle estimé, la compétence universelle ne peut être invoquée qu’en dernier ressort.  Les poursuites engagées sur la base de la compétence universelle sont difficiles à mener et donc rares.  Si la compétence universelle constitue un outil pour mettre fin à l’impunité, il faut cependant adopter une démarche prudente, a préconisé la représentante.


Mme GUO ZIAOMEI (Chine) a estimé que la question de la compétence universelle demeurait encore très complexe, avant de souligner que, dans son pays, la piraterie demeure le crime grave pour lequel cette compétence peut être exercée par une juridiction nationale.  À ce propos, elle a noté une absence de consensus sur la liste des crimes graves visés par le principe de la compétence universelle. Elle a ensuite reconnu la nécessité de débattre de la portée de ce principe, en relevant la différence qui existe avec celui de l’obligation d’extrader.


Pour la représentante l’exercice de la compétence universelle en droit interne ne doit pas compromettre les immunités reconnues aux responsables de chaque État. « Il faut en outre veiller à ce que l’application du principe ne porte pas préjudice aux bonnes relations entre les États », a-t-elle conclu.


M. FARID DAHMANE (Algérie) a souligné que le combat contre l’impunité doit impérativement se tenir dans un cadre balisé et transparent.  Le principe de compétence universelle s’insère dans ce cadre comme un moyen complémentaire, voire subsidiaire, des dispositifs juridiques nationaux et des mécanismes de coopération internationale, a-t-il ajouté, estimant que la compétence universelle ne pouvait dès lors constituer qu’un ultime recours contre l’impunité.


Le représentant a également rappelé la nécessité de définir avec précision les types de crimes qui constitueront le champ d’application du principe, et de suspendre son exercice dans des situations couvertes par des normes du droit international qui sont contradictoires avec son application.  Une telle délimitation permettra de limiter l’utilisation abusive du principe de compétence universelle et d’enrayer la politisation de son usage, a-t-il ajouté.


Mme FERNANDA MILLICAY (Argentine) a souhaité qu’une distinction soit faite entre la compétence universelle et l’obligation d’extrader ou de juger (aut dedere aut judicare).  Si la Sixième Commission poursuit l’examen de cette question, elle doit éviter tout double emploi avec les activités de la Commission du droit international qui examine actuellement la question de l’obligation d’extrader ou de juger, a-t-elle souhaité.  Elle aurait aussi préféré que la Sixième Commission examine seulement les éléments objectifs de la compétence universelle.  Elle a noté par ailleurs des divergences de vues sur ce qui constitue la base de la compétence universelle.  Elle a estimé que le Secrétaire général devrait établir une compilation des normes internationales portant sur la compétence universelle, afin de l’examiner lors de la prochaine session de l’Assemblée générale.  Sa délégation exprimera sa position sur la question au moment opportun.


M. ZÉNON MUKONGO KAY (République démocratique du Congo) a observé que, s’il est bon que les États exercent leur compétence universelle pour ne pas laisser impunis des crimes tels que le crime contre l’humanité et le génocide, il existe des préalables sur lesquels un consensus est nécessaire pour faciliter l’exercice sans heurt de cette compétence.  Il a fait remarquer que l’obligation d’« extrader ou poursuivre » énoncée dans certains traités multilatéraux ne doit pas être considérée comme une panacée dont l’application pourrait servir de remède aux faiblesses et défaillances dont souffre depuis longtemps l’extradition.  Le faire reviendrait à abuser du principe de compétence universelle, a-t-il estimé.


De plus, de nombreux États, y compris la République démocratique du Congo, n’ont pas encore introduit les dispositions nécessaires à l’incrimination et à la poursuite des crimes internationaux, ce qui complique encore la coopération entre États a déclaré le délégué.  L’équation devient encore plus compliquée lorsqu’un État qui applique la compétence universelle va à l’encontre d’une immunité octroyée par un État tiers, a ajouté le représentant, qui a déclaré que, pour son pays, l’arrêt rendu le 14 février 2002 par la Cour internationale de Justice (CIJ) -dans l’affaire « RDC contre la Belgique »- va durablement marquer l’évolution du droit de notre temps.  Le représentant a conclu en prônant une certaine uniformisation des termes et concepts liés à la question de la compétence universelle.


M. DELGADO SANCHEZ (Cuba) a déclaré que la question de la portée et de l’application de la compétence universelle présente des aspects à la fois juridiques et politiques qui justifient son examen par l’Assemblée générale.  L’abus de la compétence universelle a des effets négatifs sur les relations internationales, a-t-il ajouté, en souhaitant la formation d’un consensus sur son contenu.  Le rapport du Secrétaire général montre bien la diversité des positions sur cette question, a-t-il fait observer.  Il a par ailleurs affirmé que « ce sont les tribunaux des pays développés qui lancent des mandats d’arrêt contre des dirigeants des États du sud ».


Dans l’exercice de la compétence universelle, il est indispensable de respecter les immunités des autorités et des responsables des États, a en outre déclaré le délégué.  De même, il a rejeté toute idée d’appliquer les dispositions d’un traité à un État qui n’y est pas partie. Par ailleurs, les États qui exercent cette compétence doivent poursuivre tous les auteurs de crimes graves quelque soit la nationalité de l’auteur, a encore estimé le représentant de Cuba, avant de juger indispensable de préciser la liste des crimes qui pourraient être visés par le principe de compétence universelle.


M. GABRIEL SWINEY (États-Unis) a rappelé que, tant que l’on a affaire à des problèmes tels que la piraterie, le génocide ou encore les crimes contre l’humanité, la compétence universelle reste pertinente.  Pourtant, et malgré l’importance de cette compétence universelle, des questions de base demeurent concernant la compétence universelle ainsi que les opinions et pratiques des États à son égard.  Au-delà de la définition même de la compétence universelle -« que voulons-nous dire lorsque nous faisons référence à la compétence universelle? »-  les autres questions concernent la portée de ce principe, ses relations avec les obligations fondées sur des traités et le besoin d’assurer que les décisions qui l’invoquent soient prises de façon appropriée, a déclaré le représentant.  Il s’est par ailleurs félicité que les observations fournies par les États Membres en réponse au paragraphe 1 de la résolution 64/117 aient été affichées sur le site Web des Nations Unies, et a invité tous les États qui n’ont pas encore répondu à le faire.


M. JEAN-CÉDRIC JANSSENS DE BISTHOVEN (Belgique) a voulu attirer l’attention sur une erreur commise dans le rapport du secrétaire Général et portant sur la contribution de la Belgique.  Dans la version originale, a-t-il expliqué, la Belgique précisait qu’elle estimait que des conventions comme les Conventions de Genève de 1949, la Convention contre la torture ou encore la Convention pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées entrainaient une obligation pour l’État de poursuivre tout suspect présent sur son territoire, même si aucune demande d’extradition n’avait été formulée à son encontre.  Une telle obligation, a-t-il fait valoir, est nettement plus contraignante qu’une obligation du type aut dedereaut judicare. 


Concernant la compétence universelle, le représentant a constaté que les États avaient proposé des définitions variées du principe.  Il a néanmoins souligné qu’il existait des convergences entre les États, notamment sur la finalité de la compétence universelle, qui est de servir la communauté internationale pour lutter contre l’impunité de certains crimes de droit international, parmi lesquels les violations graves du droit humanitaire.  La Belgique estime qu’il est important de dégager un consensus sur la portée et l’application du principe de compétence universelle, a-t-il indiqué. 


M. de Bisthoven a proposé à l’Assemblée générale d’inviter la Commission du droit international à traiter certaines questions en priorité, dont notamment « l’obligation d’extrader ou de poursuivre », « l’immunité des représentants de l’État de la juridiction pénale étrangère », ainsi que la question de la « compétence extraterritoriale ».  Il a ajouté que la Belgique avait émis des réserves sur le mécanisme proposé par l’Union africaine pour l’établissement d’une institution internationale de réglementation chargée de traiter de plaintes consécutives à une « utilisation abusive de la compétence universelle ».  S’agissant de la suite des travaux, le représentant de la Belgique a insisté sur l’utilité des travaux menés par des experts juridiques venant d’horizons différents.  « Ces textes pourraient constituer une base utile pour les travaux de la Commission », a-t-il conclu.


M. DONALD CHIDOWU (République-Unie de Tanzanie) a estimé que la compétence universelle, si elle est bien établie par le droit international, sa portée varie selon les pays.  Il est donc important que la communauté internationale puisse la définir afin de jeter toute la lumière nécessaire sur son application et les limites à son application.  Il faut que ce principe soit appliqué de façon aussi juste que possible, a-t-il souhaité.  L’examen du fond de la portée de la compétence universelle n’a jamais été discuté à l’Assemblée générale, a-t-il rappelé, jugeant dès lors essentiel de poursuivre la discussion sur cette question juridique délicate.  M. Chidowu a aussi estimé nécessaire de préciser les droits et obligations des États en vertu de la compétence universelle pour éviter sa mauvaise utilisation.  Il a apprécié les commentaires des États Membres qui sont utiles pour examiner ce principe et s’est dit prêt à en discuter plus avant.


M. PHAM VINH QUANG (Viet Nam) a rappelé que le principe de compétence universelle a été établi par la communauté internationale pour lutter contre les crimes graves et mettre fin à l’impunité des responsables de ces crimes.  Cette compétence doit être exercée dans le respect du droit international et veiller au maintien des « bonnes relations entre États », a-t-il néanmoins souligné.  Il a ajouté que cette compétence doit également respecter les principes de l’égalité entre les États, de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États, de l’immunité diplomatique et de l’immunité des représentants officiels des États.


Il a fait remarquer que le rapport du Secrétaire général mettait l’accent sur la diversité des pratiques étatiques dans l’application de ce principe, avant d’appeler les États à œuvrer pour trouver des éléments communs à la définition de la question.  Ainsi, a-t-il souhaité, que soit clarifiée la gamme des infractions pour lesquelles cette compétence peut être mise en œuvre.  Il a, à son tour, estimé que la Commission du droit international pourrait approfondir la réflexion sur la question. 


Mme YARA SAAB (Liban) a constaté que le rapport du Secrétaire général mettait en évidence l’incertitude juridique préoccupante en ce qui concerne la portée de l’application de la compétence universelle.  Le Liban est partie à des conventions contre les crimes de guerre, le génocide et la torture, a-t-elle indiqué.  La représentante a fait remarquer que si les définitions des crimes internationaux sont prévues dans les traités, les définitions de ces crimes varient d’un État à un autre.  De même, il est nécessaire de faire une distinction entre la compétence universelle et l’obligation d’extrader ou de juger (aut dedere aut judicare), a-t-elle poursuivi.  Les États ne sont pas d’accord pour savoir si la Convention de Genève, par exemple, impose une obligation de poursuivre ou d’extrader, ou permet le choix de recourir à la compétence universelle.  En tant qu’État exerçant la compétence universelle, qui agit au nom de la communauté internationale, le Liban estime qu’il est utile de disposer de normes internationales précisant cette notion et qui protégeront contre toute application abusive.  Elle a appelé à examiner les préoccupations des États avec sérieux, au cours d’un dialogue constructif.


M. ARTO HAAPEA (Finlande) a souligné qu’il était nécessaire que tous les États joignent leurs efforts pour lutter contre l’impunité des auteurs de crimes graves. À ce titre, les tribunaux pénaux internationaux, dont les ressources sont très limitées, ne peuvent, à elles seules, jouer ce rôle.  La contribution des tribunaux nationaux est importante dans cette lutte contre l’impunité, a assuré le représentant qui a ensuite soutenu que « les notions de compétence universelle et d’obligation d’extrader », bien que différentes, sont néanmoins liées.  À ce titre, il a estimé que la Commission du droit international pourrait examiner profondément tous les points en suspens concernant cette compétence universelle.


En 2009, a-t-il indiqué, les tribunaux finlandais ont été saisis pour la première fois sur la base de la compétence universelle, et en juin 2010, ils ont condamné pour génocide l’individu visé par la plainte.  La Finlande est donc engagée à jouer son rôle dans ce domaine, a-t-il dit.  Avant de conclure, il a réaffirmé la nécessité de renforcer le rôle des juridictions nationales dans la lutte contre l’impunité, pour qu’elles exercent leur rôle de complémentarité avec les juridictions pénales internationales.


M. ALEXANDER PANKIN (Fédération de Russie) a souhaité que les États parviennent à une meilleure compréhension du principe de la compétence universelle afin de renforcer la confiance mutuelle.  Le rapport du Secrétaire général donne une liste des positions très variées exprimées par les États Membres sur l’application de ce principe, ce qui invite à faire prudence pour l’examen de cette question, a-t-il dit.  Le Code pénal russe admet la compétence universelle dans les situations prévues par les accords et traités internationaux qu’il a ratifiés, lorsqu’il existe un vide juridique dans la législation nationale.


Tout en reconnaissant la nécessité de punir les auteurs de crimes graves, le représentant a estimé qu’il faudrait cependant éviter toute application arbitraire de la compétence universelle.  Il a soutenu que la compétence universelle devrait correspondre aux normes du droit international coutumier, notamment celles qui régissent les immunités des fonctionnaires des États.  Il ne faut pas oublier qu’il existe d’autres moyens de lutter contre l’impunité, a-t-il rappelé, souhaitant à cet égard que les mécanismes de coopération judiciaire soient renforcés.  Il a enfin suggéré que la Commission du droit international apporte une contribution au débat sur la question de la portée de la compétence universelle.


Mme CETA NOLAND (Pays-Bas) a indiqué que les juridictions hollandaises avaient déjà été saisies de certaines affaires en vertu du principe de compétence universelle.  Elle a ensuite souligné que l’examen de la question devrait être fait uniquement sous l’angle juridique et ceci signifie qu’elle peut être renvoyée à la Commission du droit international qui examine déjà l’immunité des fonctionnaires des organisations internationales et l’obligation d’extrader.


M. EBENEZER APPREKU (Ghana) a fait remarquer que, dans certaines affaires concernant le continent africain, la compétence universelle avait été mal comprise et mal appliquée.  En vertu du droit international coutumier, la compétence universelle doit constituer une exception aux règles traditionnelles de compétence, qui permet de poursuivre une personne ayant commis un crime portant atteinte à la communauté internationale et qui fait de lui un ennemi de toute l’humanité.  La Charte est née de la volonté de la communauté internationale de promouvoir le plein respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire, a-t-il rappelé.


M. Appreku a rappelé qu’il existait un régime de justice pénale internationale, pour punir des crimes comme la torture, la traite des êtres humains, les crimes de guerre ou encore le génocide.  Il a mentionné que, lors des travaux préparatoires qui ont abouti à l’adoption de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, il n’y avait pas eu de consensus sur l’inclusion de la compétence universelle dans le texte.  Cela avait aussi été le cas, il y a plusieurs décennies, en ce qui concerne les négociations sur le projet de code des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, à la suite de divergences de vues au sein de la Commission du droit international et de la Sixième Commission.  M. Appreku s’est donc demandé si la communauté internationale devait permettre d’invoquer la doctrine de la compétence universelle pour lutter contre l’impunité, alors que les règles ne sont pas bien établies en la matière et qu’elles peuvent entrer en conflit avec des normes de droit international coutumier sur les immunités de certains hauts fonctionnaires comme les chefs d’État. 


M. GHAZI JOMAA (Tunisie) a indiqué que le Secrétaire général soulignait dans son rapportle manque d’uniformité dans la perception et l’application du principe de compétence universelle. Il y a divergence notamment sur les types de délits visés, a-t-il dit, en précisant que les États sont divisés pour déterminer s’il faut inclure ou non la piraterie ou encore l’esclavage dans l’examen de la compétence universelle. De même, a-t-il dit, le document du Secrétaire général précise que, dans certains pays, le pouvoir discrétionnaire du procureur peut parfois donner lieu à des tendances sélectives.  Il a, par ailleurs, défendu la nécessité d’appliquer ce principe en respectant les principes consacrés par la Charte des Nations Unies, que sont la souveraineté égale des États et l’obligation de ne pas enfreindre l’immunité des hauts représentants des États.  La compétence universelle, a-t-il dit, est un mécanisme qui devrait être mis en œuvre uniquement en dernier recours, en évitant les abus et les utilisations à des fins politiques qui risquent de déstabiliser les relations internationales. 


M. RETA ALEMU NEGA (Éthiopie) a rappelé que l’examen de la question de la compétence universelle répond à l’appel de l’Union africaine  d’arrêter les poursuites et de retirer les mandats d’arrêt émis contre certains chefs d’État africains en exercice.  Il a réitéré son appui aux décisions de l’Assemblée des chefs d’États de l’Union africaine et a averti des risques d’abus de l’utilisation de la compétence universelle.  Ce principe doit être exercé en conformité avec les règles reconnues du droit international, a-t-il rappelé.  Il ne doit être invoqué que pour poursuivre les auteurs des crimes les plus graves, qui touchent l’ensemble de l’humanité.


La tendance croissante au recours à la compétence universelle est un défi à la primauté du droit, a-t-il regretté, soulignant son application subjective.  Il a jugé important de créer des normes permettant d’éviter les abus et la politisation de l’application de ce principe.  Il faut aussi tenir compte des immunités auxquelles les hauts fonctionnaires ont droit et s’abstenir de les poursuivre en invoquant la compétence universelle, a-t-il demandé.  L’Assemblée générale doit tenir compte de l’appel lancé par l’Union africaine et éviter l’application du principe de la compétence universelle au delà de la primauté du droit, car cela mettrait en péril l’ordre international.  M. Nega a aussi souhaité que les aspects politiques de cette question soient examinés en plénière.  En outre, il a appelé à distinguer la compétence universelle de la compétence pénale internationale.


Mme VALENZUELA DIAZ (El Salvador) a indiqué que le droit pénal de son pays s’appliquait aux auteurs de violations des droits de l’homme reconnus universellement. Les textes internationaux peuvent être invoqués devant les juridictions nationales pour les affaires concernant des disparitions forcées, traite des personnes ou la piraterie, a-t-elle dit.  Le principe de compétence universelle est non seulement reconnu en El Salvador, mais également appliqué, a-t-elle assuré.  Comme le suggérait le Secrétaire général dans son rapport, elle a estimé que la Sixième Commission devrait établir un groupe de travail qui serait chargé d’approfondir l’examen de cette question.


M. CHRISTOPH RETZLAFF (Allemagne) a estimé que le principe de la compétence universelle était un outil important et légitime pour prévenir l’impunité.  Il a précisé que les tribunaux allemands avaient cette compétence pour des crimes commis à l’étranger, les procureurs ayant cependant la possibilité de ne pas engager de poursuites.  Les tribunaux allemands peuvent exercer leur compétence dans le cas de génocide, de crimes contre l’humanité, ainsi que dans plusieurs cas de crimes de guerre (contre les personnes, la propriété privée, les opérations humanitaires, les méthodes illégales de guerre et les moyens illégaux de guerre).  Le rapport du Secrétaire général met en évidence les préoccupations de certains États quant à l’application et la portée de la compétence universelle, a-t-il noté.  Cela pourrait justifier, a-t-il dit, le renvoi de l’examen de cette question à la Commission du droit international, qui étudie actuellement la question de l’obligation d’extrader ou de juger (aut dedere aut judicare), qui est étroitement liée à la celle de la compétence universelle.


Mme THANISA NAIDU (Afrique du Sud) a noté les observations faites par le Secrétaire général dans son rapport, sur la perception qu’ont les États du principe de compétence universelle.  Elle a noté également les divergences de vues sur les catégories de crimes pouvant relever de la compétence universelle.  « Toute incorporation dans les législations nationales de ces crimes ne saurait servir de fondement à la compétence universelle », a-t-elle fait remarquer.  La représentante a estimé que la Sixième Commission devrait constituer un groupe de travail qui serait chargé d’approfondir sa réflexion sur cette question.


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