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AG/J/3403

Sixième Commission: le Président de la CIJ se dit préoccupé par les obstacles politico-juridiques qui empêchent les États d’exécuter les arrêts de la cour

29/10/2010
Sixième CommissionAG/J/3403
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Sixième Commission                                         

24e & 25e séances – matin et après-midi                     


SIXIÈME COMMISSION: LE PRÉSIDENT DE LA CIJ SE DIT PRÉOCCUPÉ PAR LES OBSTACLES POLITICO-JURIDIQUES

QUI EMPÊCHENT LES ÉTATS D’EXÉCUTER LES ARRÊTS DE LA COUR


Les délégations insistent sur le respect de divers principes fondamentaux dans

le cadre de la protection des personnes et examinent de nouveaux chapitres du rapport de la CDI


« L’impossibilité pour un État d’exécuter un arrêt de la Cour internationale de Justice (CIJ), pour des motifs politico-juridiques, peut avoir des incidences sur l’état de droit au niveau international », a souligné, ce matin, le Président de la CIJ, M. Hisashi Owada, qui intervenait, selon la pratique établie ces dernières années, devant les délégations de la Sixième Commission (chargée des questions juridiques).  La Commission juridique a ensuite poursuivi l’examen du rapportde la Commission du droit international (CDI).


L’exécution des arrêts de la CIJ, qui est un pan notable de l’action de la Cour en matière de règlement pacifique des différends, constitue la pierre angulaire de la primauté du droit au sein de la communauté internationale, a soutenu par ailleurs le Juge Owada.  Tout en estimant que le bilan de la Cour dans ce domaine peut être considéré comme positif, il a déploré que de plus en plus d’États n’exécutaient pas les arrêts de la Cour, en raisons d’obstacles juridiques et structurels propres à leur ordre juridique interne. 


L’Article 94 de la Charte des Nations Unies stipule notamment que « chaque membre des Nations Unies s’engage à se conformer à la décision de la Cour internationale de Justice dans tout litige auquel il est partie ».  Les États sont souvent résolus à se conformer de bonne foi aux décisions qui seront prises par la CIJ, a reconnu M. Owada, en expliquant que la situation devient différente à l’étape de leur application.  


Dans ce contexte, il a évoqué l’arrêt concernant l’affaire Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique c. États-Unis d’Amérique) auquelles États-Unis ont décidé de ne pas s’y conformer, parce que sa mise en œuvre posait des difficultés dans leur ordre juridique interne.  En l’espèce, a-t-il indiqué, la Cour suprême des États-Unis avait décidé que l’arrêt de la CIJ ne pouvait pas s’appliquer par les juridictions américaines « puisqu’il ne créait pas d’obligation contraignante, en particulier en l’absence de lois d’application ».  En raison de la structure fédérale de son gouvernement, le Nigéria avait lui aussi eu du mal à appliquer l’arrêt de la CIJ du 10 octobre 2002 portant règlement du différend frontalier sur la péninsule de Bakassi, a rappelé M. Owada.


Il y a ici un véritable conflit entre ordre juridique international et ordre juridique national qui risque de s’intensifier, avec l’intégration croissante du premier dans le second, en particulier dans des domaines comme la protection de l’environnement, la coopération judiciaire et la protection des droits de l’homme qui, traditionnellement, relève du domaine réservé des États souverains mais qui sont de plus en plus règlementés au niveau international, a par ailleurs fait observer le Juge Owada.


Cette question des droits de l’homme a d’ailleurs été mise en exergue durant le débat sur « la protection des personnes en cas de catastrophes ».  Les délégations ont rappelé que les personnes touchées par les catastrophes avaient droit au respect de leurs droits fondamentaux.  Elles ont, en outre, toutes reconnu l’importance de souligner, dans le projet d’articles, la nécessaire coopération entre les États en cas de catastrophe.  Certaines ont, cependant, souhaité que la CDI s’assure du respect des principes de souveraineté des États et de non-ingérence dans leurs affaires intérieures.  De même, elles ont souligné que toute action extérieure visant à apporter secours et protection à des populations victimes d’une catastrophe exigeait le consentement préalable de l’État concerné.


Certaines délégations sont aussi intervenues sur les thèmes de « l’expulsion des étrangers », et des « effets des conflits armés sur les traités ».  Sur ce denier chapitre, des intervenants ont soutenu l’idée selon laquelle l’éclatement d’un conflit armé ne saurait automatiquement entraîner des effets sur l’application d’un traité.  D’autres, comme la représentante de la Grèce, ont fait valoir que la proposition de conférer aux parties en conflits un pouvoir de notification de la suspension d’un traité n’était pas possible.  « Il fautprivilégier l’application automatique de la suspension du traité, dès que certaines conditions seraient remplies, et écarter toute possibilité de conférer un pouvoir discrétionnaire aux parties », a estimé le représentant du Japon.


À la suite des remarques faites par le Rapporteur spécial pour le sujet de « la protection des personnes en cas de catastrophe », M. Valencia-Ospina (Colombie), la Sixième Commission a pris note du rapport du Groupe de travail sur « la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite », présenté par le Président du Groupe, M. Reta Alemu Nega (Éthiopie), qui a également présenté le projet de résolution sur la même question.  Quatre autres projets de résolution* relatifs à la CNUDCI ont été présentés par ailleurs, par la représentante de l’Autriche.


En fin de séance, le Président de la CDI, M. Nugroho Wisnumurti (Indonésie), comme les jours précédents, a exposé les progrès accomplis, cette année, par la Commission sur les sujets de « l’obligation d’extrader ou de poursuivre » (chap. VIII), « les traités dans le temps » (chap. X), « la clause de la nation la plus favorisée » (chap. VIII), et les « ressources naturelles partagées » (chap. XII).  Les premières délégations qui sont intervenues sur ces questions ont exprimé des divergences de vues sur la recommandation de la CDI de renoncer à l’étude des ressources en pétrole et gaz dans le cadre de l’examen des ressources naturelles partagées.


La Sixième Commission poursuivra son débat sur le rapport de la Commission du droit international, lundi 1er novembre, à 10 heures.


*    A/C.6/65/L.4, A/C.6/65/L.5, A/C.6/65/L.6 et A/C.6/65/L.7.


RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DEUXIÈME SESSION (A/65/10 et A/65/186)


Exposé du Président de la Cour internationale de Justice


M. HISASHI OWADA, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), s’est félicité de l’augmentation des ressources humaines de la Cour, avec la nomination de six assistants juridiques pour les membres de la Cour, sélectionnés parmi 1 600 candidats.  Ces postes s’ajoutent aux huit que la Cour employait déjà, ce qui permet à chaque juge d’avoir un assistant, a-t-il dit.


En 2006, le Secrétaire général de l’ONU a décidé de créer un Groupe de la coordination pour l’état de droit, a rappelé M. Owada, ce qui permet de diffuser la notion d’état de droit dans toutes les activités des Nations Unies.  Il a aussi rappelé la réunion du Conseil de sécurité, le 29 juin dernier, qui a porté sur la promotion et le renforcement de l’état de droit dans les activités de maintien de la paix et de la sécurité internationales.  La question du respect et de l’exécution des décisions rendues par la CIJ est très importante pour la consolidation de l’état de droit dans le droit international, a-t-il ajouté.  La Cour étant un organe judiciaire, toute décision qu’elle rend pour régler un différend a nécessairement force obligatoire, a-t-il expliqué.


Cependant, a-t-il dit, le respect d’un arrêt de la Cour dans l’ordre juridique international doit s’apprécier dans une perspective plus large, à l’aune du respect des règles de droit international par les États.  Il a fait remarquer qu’en droit interne, l’État a l’autorité et les moyens d’exécuter un jugement.  En revanche, l’exécution des arrêts de la Cour, réglée par l’Article 94 de la Charte des Nations Unies, dépend de l’initiative de l’une des parties à l’affaire, qui peut décider de saisir le Conseil de sécurité si l’autre partie ne s’acquitte pas d’une obligation résultant de l’arrêt.  Le Conseil de sécurité, s’il le juge nécessaire, peut alors faire des recommandations ou décider des mesures à prendre en vertu des Chapitres VI et VII de la Charte.  L’exécution relève donc de la compétence du Conseil de sécurité, a précisé le Président de la CIJ.


Depuis la création de l’ONU, le Conseil de sécurité n’a été saisi qu’une fois pour ordonner l’exécution de l’arrêt de la Cour dans l’affaire « Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis) », a rappelé le Président de la CIJ.  Ce fut cependant un coup d’épée dans l’eau car la partie adverse, qui est un membre permanent du Conseil de sécurité, avait pu opposer son véto, a-t-il dit.  Le Nicaragua s’était alors tourné vers l’Assemblée générale, en invoquant l’Article 10 de la Charte.  M. Owada a aussi relevé que le système mis en place par la Charte et le Statut de la Cour ne prévoyait pas de procédure systématique de suivi de la mise en œuvre des arrêts de la Cour, contrairement au suivi périodique assuré par les organes créés en vertu d’instruments relatifs aux droits de l’homme.


M. Owada a cependant relevé que, dans l’ensemble, les parties se conforment aux arrêts définitifs de la Cour, sauf dans quatre affaires.  Peut-on en déduire qu’il s’agit là d’un bilan trop optimiste de l’exécution des décisions de la Cour? S’est interrogé M. Owada.  Les exemples de non-respect dans la jurisprudence de la Cour sont très rares, voire même inexistants dans la période la plus récente, a-t-il assuré.  Cela montre que les États sont conscients de leur obligation de se conformer aux décisions de la Cour.  Les plus grandes difficultés se posent bien souvent lorsqu’il s’agit pour les États d’honorer effectivement leur obligation découlant de l’arrêt de la Cour.


Il a cité l’affaire « Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique c. États-Unis d’Amérique) » dans laquelle la Cour avait conclu que les États-Unis devraient réexaminer les verdicts de culpabilité et des peines prononcées contre les ressortissants mexicains visés.  Mais cet arrêt n’a pas été exécuté par les tribunaux du Texas ni par la Cour suprême des États-Unis, celle-ci jugeant que l’arrêt de la CIJ ne pouvait pas s’appliquer comme tel par les juridictions américaines puisqu’il ne créait pas d’obligation contraignante, en particulier en l’absence de lois d’application.  Le Président a ainsi souligné la complexité de l’exécution de l’arrêt « Avena  » qui met en péril l’efficacité des arrêts de la CIJ.  Pour illustrer les difficultés liées à l’exécution des arrêts de la Cour, le Juge Owada a cité les affaires « Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigeria (Cameroun c. Nigeria)  », « Détroit de Corfou  », entre l’Albanie et le Royaume-Uni, et « Temple de Préah Vihear  » opposant le Cambodge et la Thaïlande. Le Président a également souligné qu’en raison de la structure de son gouvernement, le Nigéria avait eu du mal à faire appliquer la décision de la CIJ relative à l’affaire de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria).


Le Président de la CIJ a conclu que, d’une manière générale, le bilan de la Cour était positif en ce qui concerne l’exécution de ses décisions relatives à la délimitation des frontières terrestres et maritimes, ainsi qu’à la responsabilité des États.  Lorsque le non-respect d’une obligation mise à la charge d’une partie par un arrêt résulte de l’impossibilité d’exécuter un arrêt de la Cour dans l’ordre juridique interne, pour des raisons politico-juridiques, la situation peut être considérée comme sérieuse puisqu’elle a des incidences sur le processus de l’état de droit dans le cadre de l’ordre juridique mondial qui, a-t-il fait remarquer, comprend l’ordre juridique interne et l’ordre juridique international.  Le Juge Owada a expliqué que le conflit entre ces deux ordres ne pouvait que s’intensifier, avec l’intégration croissante du premier dans le second dans des domaines comme la protection des droits de l’homme, la protection de l’environnement et la coopération judiciaire qui, traditionnellement, relèvent du domaine réservé des États souverains mais qui sont de plus en plus règlementés au niveau international.


Dialogue entre le Président de la CIJ et les délégations


Intervenant en premier, le représentant du Ghana s’est d’abord inquiété de la non-application des exigences de l’Article 94 de la Charte de l’ONU relative à l’exécution des décisions de justice.  Cet article stipule, a-t-il rappelé, que chaque État Membre des Nations Unies s’engage à se conformer à la décision de la Cour internationale de Justice concernant un différend auquel il est partie. Il a déploré ensuite la difficulté que rencontre la Cour internationale de Justice pour faire appliquer ses arrêts, ainsi que son incapacité à demander au Conseil de sécurité de les faire respecter.  Il a aussi regretté le fait que la Cour, contrairement à la Cour pénale internationale, ne puisse pas renvoyer d’affaires devant le Conseil de sécurité.  Le délégué de l’Autriche a aussi évoqué la non-application de l’Article 94 de la Charte, en demandant à M. Owada s’il entendait discuter de la possibilité de contourner cette disposition, sans aller vers un amendement de la Charte.  Il a demandé s’il ne serait pas utile de créer un mécanisme novateur pour assurer une meilleure application des décisions de la CIJ.  Le représentant de Trinité-et-Tobago, a demandé au Président de la Cour d’indiquer la manière dont il entendait faire face à ce problème.


En réponse à cette première série de questions, le Président de la CIJ a expliqué qu’il n’appelait pas à un changement du système actuel, mais qu’il voulait avant tout attirer l’attention des États Membres sur la situation particulière, en droit international, que pose l’exécution des décisions de justice.  Il existe un contraste évident entre les systèmes nationaux et le système judiciaire international concernant l’application des jugements ou arrêts


Au niveau international, contrairement au droit interne, le pouvoir de faire appliquer une décision de justice n’incombe en principe à aucune entité.  Cependant, quand la CIJ rend un arrêt, il revient aux organes de l’ONU de le faire appliquer.  Répondant plus spécifiquement à l’Autriche, il a expliqué qu’en vertu de l’Article 94 de la Charte de l’ONU, le Conseil peut, s’il le juge nécessaire, faire des recommandations ou décider de prendre des mesures pour faire exécuter l’obligation.  « Il ne peut pas jouer le rôle de gendarme, mais il a une responsabilité en ce domaine, tout en tenant compte bien sûr des facteurs politiques », a-t-il précisé.


Répondant au délégué de Trinité-et-Tobago, il a indiqué que la question de l’exécution des arrêts de la CIJ intégrait le cadre plus large de la réalisation de l’état de droit au niveau international, objectif auquel contribue également la Cour.  Il est évident que l’ordre juridique international ne peut être effectif que si les États s’engagent à respecter et à intégrer les normes internationales dans toutes les sphères de la société.


Prenant ensuite la parole, le représentant de la Thaïlande a demandé au Président de la CIJ, d’expliquer l’augmentation croissante des demandes d’avis auprès de la CIJ, que l’on constate actuellement.  La tendance de la CIJ à rendre de plus en plus d’avis conduit la doctrine à évoquer l’idée d’un nouvel activisme de la CIJ à travers ses avis consultatifs, a-t-il fait remarquer.  Il a demandé au Président de la Cour de donner son point de vue sur la question et de fournir des éclaircissements sur l’éventuelle augmentation des juges de la CIJ afin d’assurer une plus grande représentation géographique et juridique.


Le représentant de la Belgique a, quant à lui, indiqué que la Commission européenne était habilitée à demander à la Cour de justice de l’Union européenned’imposer des sanctions financières à des États n’exécutant pas les décisions de justice.  Il a voulu savoir si une telle possibilité était envisageable pour la CIJ.  Enfin, le délégué du Mexique a reconnu la réalité du problème que pose la non-application des arrêts de la CIJ par les États concernés, en s’interrogeant sur les effets futurs de cette nouvelle donne, notamment dans les rapports entre États.


Répondant à la délégation de la Thaïlande, le Président de la CIJ a affirmé que la Cour n’adoptait pas d’attitude plus libérale lorsqu’elle exerce sa compétence consultative.  Elle ne fait qu’exercer son mandat qui est de nature exclusivement juridique, a-t-il précisé.  La Cour, en tant qu’organe principal judiciaire des Nations Unies, doit s’acquitter de ses fonctions quand on le lui demande, a-t-il ajouté.  Dans l’affaire du « mur », la Cour a examiné la situation de manière approfondie et décidé qu’il n’y avait pas de raison majeure qui l’empêchait de le faire.  La Cour a fait preuve de cohérence, a-t-il assuré.


M. Owada a aussi rappelé que le nombre de juges de la CIJ était déterminé par le Statut de la Cour et non par la Charte de l’ONU.  Il a ensuite fait part de son opinion personnelle, basée sur son expérience au sein de la Cour, rappelant que les membres permanents du Conseil de sécurité siégeaient également au sein de la Cour.  L’argument selon lequel un membre permanent du Conseil de sécurité devrait toujours être représenté à la CIJ n’est pas une conclusion qui va de soi, a-t-il dit, rappelant que le Conseil et la Cour sont des organes différents des Nations Unies.  Il a souhaité que la Cour reflète la composition de la communauté internationale et les différentes régions du monde, comme le prévoit son statut.  Il a aussi rappelé que les candidats à l’élection des juges de la Cour devraient être des juristes aspirant aux plus hautes fonctions judiciaires dans leur pays, conformément au Statut de la CIJ.


Si l’analogie exprimée par la délégation de la Belgique entre la CIJ et la Cour de justice de l’Union européenne peut être intéressante, elle ne peut cependant pas être appliquée à la CIJ, a déclaré M. Owada.  Répondant au représentant du Mexique, il a rappelé que l’exécution des arrêts de la Cour représente un défi pour la Cour, a-t-il reconnu, mais surtout pour la communauté internationale et les États Membres.


Enfin, le représentant de la Jamahiriya arabe libyenne, faisant remarquer que l’exécution d’un arrêt de la CIJ était une deuxième étape dans la procédure, après la reddition de l’arrêt, s’est plaint du manque d’informations dans ce domaine.  Il a toutefois reconnu que les dispositions de la Charte de l’ONU garantissent l’exécution des arrêts de la Cour.  Le Président de la CIJ a confirmé que l’exécution n’était pas une fonction de la Cour.


Déclarations


M. DJAMCHID MOMTAZ (République islamique d’Iran) a d’abord évoqué la question de « l’expulsion des étrangers » en soutenant qu’il ne fait guère de doute que tout État a le droit d’expulser les étrangers qui vivent sur son sol, s’ils présentent une menace pour sa sécurité ou son ordre public.  Il appartient à l’État d’apprécier et de déterminer les définitions de ces deux termes, a-t-il souligné, en estimant qu’il serait par conséquent vain de vouloir dresser la liste des motifs qui pourraient être invoqués par l’État pour justifier l’expulsion des étrangers.  Toutefois, a-t-il dit, deux limites s’imposent au droit souverain de l’État, l’expulsion en masse et l’expulsion déguisée.  Une fois décidée, a-t-il ajouté, l’expulsion doit se faire dans le respect des droits fondamentaux de l’individu concerné.


Abordant ensuite la question des « effets des conflits armés sur les traités », le représentant a estimé qu’il n’était pas opportun d’inclure dans le champ d’application du projet, les conflits armés non internationaux, le Rapporteur spécial ayant lui-même reconnu que des difficultés pourraient en résulter.  De l’avis de M. Momtaz, les conséquences possibles que peuvent avoir ce genre de conflits sur les traités sont déjà couvertes par les projets d’articles sur la responsabilité internationale des États relatifs aux circonstances excluant l’illicéité.  Il a en outre invité la CDI à revoir la définition du « conflit armé », adoptée en première lecture par elle, sans tenir compte des définitions des Conventions de Genève de 1949.  Tout en se réjouissant de voir les projets d’articles inclure dans la liste de traités qui demeurent applicables en période de conflits armés, ceux qui établissent ou modifient des frontières terrestres ou maritimes, le représentant a cependant souligné que l’applicabilité de cette catégorie de textes pourrait être remise en cause par la disposition du projet d’article qui est consacré à la notification de l’extinction ou de la suspension du traité.  Enfin, s’agissant du sujet sur « la protection des personnes en cas de catastrophe », le délégué a soutenu la décision du Rapporteur spécial de considérer comme non pertinente la notion de « responsabilité de protéger » dans le cadre des travaux sur ce sujet.  Pour M. Momtaz, le refus d’une aide extérieure par un État ne peut être considéré comme un acte internationalement illicite.  L’obligation de coopérer n’oblige nullement l’État affecté par une catastrophe d’accepter les secours, l’aide humanitaire restant soumise au consentement de ce dernier, a-t-il conclu.


Mme MARIA TELALIAN (Grèce) a consacré sa déclaration exclusivement à la question « des effets des conflits armés sur les traités », en appuyant la limitation du champ d’application du sujet présenté par le Rapporteur spécial qui établit que le projet d’article ne concerne pas les relations contractuelles entre États et organisations internationales.  Elle a cependant reconnu que certaines organisations internationales, parties à un traité, pourraient, dans certains cas, avoir un impact bien significatif sur les relations conventionnelles entre les États parties à cet instrument.  L’Union européenne est un cas exemplaire de ce type d’organisation, a-t-elle fait observer.  Elle a ensuite fait part de sa préférence pour la définition de l’expression « conflits armés », adoptée en première lecture par la CDI, qui était non seulement plus équilibrée, mais se fondait aussi sur les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels de 1977.


La déléguée a, par ailleurs, accueilli avec satisfaction l’inclusion du terme ipso facto dans le projet d’article.  Celui-ci traduit efficacement l’idée fondamentale que l’apparition d’un conflit armé ne saurait automatiquement entraîner des effets sur l’application d’un traité, s’est-t-elle réjouie.  Elle a également partagé l’évaluation faite par le Rapporteur spécial sur l’insertion, en annexe du projet d’articles, de la liste des traités qui doivent absolument être appliqués en temps de conflit.  Mme Telalian a, en outre, estimé qu’il serait difficile pour les États de répondre aux mécanismes de notification de l’extinction, du retrait ou de la suspension d’un traité, comme le suggère le Rapporteur spécial.  Ces mécanismes correspondent, en réalité, au processus actuel du développement progressif du droit international.  Aussi, la Grèce estime que la CDI sur ce point devrait plutôt privilégier l’application des dispositions propres au traité et établir des règles pour sa suspension, au lieu de créer de nouvelles normes en cette matière.  Mme Telalian s’est dite enfin favorable à l’inclusion, dans le projet d’article, de dispositions portant sur le règlement des différends qui réaffirment l’interdiction de la menace ou de l’usage de la force, conformément à l’Article 2 de la Charte des Nations Unies.


Mme ALINA OROSAN (Roumanie) a souhaité que les questions soulevées au sein de la Commission du droit international (CDI) sur « l’expulsion des étrangers » soient réexaminées afin de tenir dûment compte de l’état actuel de la pratique sur ce « sujet sensible ».  Sa délégation, a-t-elle dit, est d’avis que le principe de la « dignité humaine » tel qu’il figure dans le projet d’article sur ce sujet est un principe général et non un droit fondamental particulier.  Elle a aussi approuvé l’inclusion dans le projet d’article de dispositions sur « l’expulsion déguisée », pour tenir compte de l’intention réelle de l’État.  De même, elle s’est dite favorable à un projet d’article sur « l’extradition déguisée en expulsion », pour empêcher un État d’avoir recours à l’expulsion quand l’extradition ne peut être réalisée.  Elle a également estimé que le fondement de l’expulsion ne devrait pas être limité à l’ordre public ou à la sécurité nationale.  Il faut laisser à l’État son pouvoir discrétionnaire de définir dans sa loi interne les fondements possibles de l’expulsion d’un étranger, a-t-elle précisé.  Mme Orosan a également commenté les travaux de la CDI sur les « effets des conflits armés sur les traités » et la « protection des personnes en cas de catastrophe ».


M. JAMES KINGSTON (Irlande), regrettant la publication tardive du rapport de la Commission du droit international (CDI), a suggéré que la question des sessions de la CDI soit réexaminée afin de lui permettre de finaliser ce document dans les délais impartis.  Il a également regretté que la CDI n’ait pas examiné, cette année, la question de « l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État » et souhaité qu’elle reprenne l’examen de cette question à sa prochaine session.  Passant au thème de la « protection des personnes en cas de catastrophe », le représentant a estimé que le champ d’application de cette étude ne devrait pas s’étendre aux personnes morales.  Certaines dispositions, comme l’évaluation des besoins de « survie », a-t-il dit, ne pourront pas s’appliquer aux personnes morales.


En ce qui concerne la définition du terme « catastrophe », formulée dans le projet d’article 3, M. Kingston a estimé qu’il était essentiel de préciser dans le texte que la catastrophe « perturbe gravement le fonctionnement de la société ».  Il s’est toutefois interrogé sur la nécessité de préciser le terme « société » pour déterminer s’il recouvre la population d’un État ou celle d’une région d’un État pour assurer la protection.  M. Kingston a ensuite suggéré d’établir une distinction entre les projets d’articles 6 (principes humanitaires de la réaction en cas de catastrophe), d’une part, et les projets d’articles 7 et 8 (dignité humaine et droits de l’homme), d’autre part.  En ce qui concerne le projet d’article 6, il a fait remarquer que le principe de neutralité risquait de créer une confusion et des complications inutiles dans les dispositions des projets d’articles en raison de l’interprétation qui lui sera donnée.  L’obligation de non-discrimination devrait suffire dans le contexte des secours après une catastrophe, a-t-il estimé.  Les projets d’articles 7 et 8 devraient, selon lui, figurer dans le préambule du texte.


M. ASAD MAJEED KHAN (Pakistan) s’est dit satisfait de la décision du Rapporteur spécial de souligner les principes d’humanité, de neutralité et d’impartialité dans la conduite de toute réponse à une catastrophe.  Il s’est aussi félicité des dispositions reconnaissant la responsabilité première de l’État affecté dans la coordination de l’assistance humanitaire qui lui est offerte.  En vertu du principe de neutralité, les acteurs étrangers, les organisations internationales et la communauté internationale, impliquée dans une action de secours, ne doivent pas s’immiscer dans les affaires intérieures des États affectés et respecter leur souveraineté, a-t-il insisté.  Seul l’État touché par la catastrophe, a-t-il précisé, est à même d’évaluer ses besoins en matière d’assistance.  M. Khan a, par ailleurs, apprécié le choix du Rapporteur spécial d’établir clairement que la protection des personnes incombe en premier lieu à l’État affecté et que son consentement est nécessaire avant toute intervention extérieure.


M. NICK MINOGUE (Royaume-Uni), rappelant la position de son pays à l’égard du thème de l’« expulsion des étrangers », a fait remarquer que cette question soulève des questions complexes et difficiles et touche directement à la sphère de compétence interne des États.  Il est donc très problématique pour la CDI et ne devrait pas faire l’objet de codification ou de consolidation pour le moment, a-t-il dit.


S’agissant de la question des « effets des conflits armés sur les traités », le représentant a notamment appuyé l’analyse du Rapporteur spécial concernant les effets sur les traités auxquels des organisations internationales sont parties.  En revanche, il a demandé des éclaircissements concernant le cas où un seul État partie à un traité bilatéral ou international, était partie à un conflit.  Par ailleurs, il a estimé qu’il faudrait veiller à bien définir la notion de « conflit armé » et a donné la préférence pour la formulation utilisée en 1995 par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) dans son arrêt Tadic, avec quelques restrictions.  Il a également souhaité qu’on évite de recourir au terme « agression » dans le projet d’article 15, cette notion n’étant pas définie dans la Charte de l’ONU, alors que celle donnée par l’Assemblée générale dans sa résolution 3314 (XXIX) reste sujette à controverse.


Avant de conclure, M. Minogue a estimé que le thème de la « protection des personnes en cas de catastrophe » ne se prêtait pas à un exercice de codification et de développement du droit international par le biais de règles juridiques détaillées, mais devrait plutôt aboutir à l’établissement de lignes directrices et d’un cadre de principes d’action, lesquels seraient sans doute plus pratiques et pourraient recevoir un soutien plus large.


M. HASAN KLEIB (Indonésie) a appuyé la démarche adoptée par le Rapporteur spécial  dans l’étude sur « l’expulsion des étrangers », en soulignant que le droit international restreint déjà les pouvoirs des États dans le cadre des procédures d’expulsion, en les invitant à respecter les droits fondamentaux, de cette catégorie de personnes.  Concernant les « effets des conflits armés sur les traités », il s’est rallié à la position du Rapporteur spécial selon laquelle la portée du sujet doit être limitée aux conflits armés internationaux, excluant ainsi les conflits internes qui n’affectent pas nécessairement les traités conclus librement par deux États.  Dans tous les cas, il est utile de procéder à une évaluation spécifique de chaque conflit interne, avant d’envisager leur impact sur les traités.  Il a souscrit à l’orientation générale adoptée par la CDI pour l’examen du sujet de « la protection des personnes en cas de catastrophe », rappelant que son pays avait été victime d’un tsunami destructeur en 2004.  Dans le cadre de cette protection, il est fondamental que la souveraineté des États et le principe de non-ingérence dans leurs affaires intérieures soient absolument respectés, a insisté M. Kleib, avant d’appeler à une application équilibrée des principes  d’humanité, de neutralité et d’impartialité énoncés dans le projet d’article sur ce sujet.  Il a également souligné que le consentement des États affectés était nécessaire avant toute opération extérieure.  De même, il incombe en premier lieu à l’État touché de porter secours aux personnes affectées par une catastrophe sur son territoire, a-t-il dit avant de conclure.


M. EBENEZER APPREKU (Ghana) s’est joint à l’appel en faveur de la publication, dans les délais impartis, du rapport de la Commission du droit international (CDI) afin de permettre aux délégations de l’examiner de manière approfondie et de formuler leurs commentaires de manière détaillée.  Concernant la question de l’« expulsion des étrangers », il a ensuite estimé que le projet d’article C1 pourrait être renforcé par l’addition d’un paragraphe exigeant de l’État expulsant qu’il accorde un délai raisonnable à l’individu visé par une expulsion pour lui permettre de rassembler ses effets personnels, acquis légalement pendant son séjour, légal ou illégal, sur le territoire.  Les projets d’articles doivent indiquer clairement que l’État expulsant ne doit pas soumettre la personne d’origine étrangère à des traitements cruels, inhumains ou dégradants.  Ces projets d’articles doivent, a insisté le représentant, proposer des normes plus humaines de traitement pour les étrangers visés par une expulsion et exiger de tous les États de s’abstenir de traiter ces personnes de manière dégradante ou cruelle, tout en respectant les garanties de procédure régulière.  Grâce à de telles dispositions, des accords bilatéraux susceptibles de permettre aux États de contourner de telles exigences ne pourraient pas être conclus.  S’agissant de la question de la « protection des personnes en cas de catastrophe », le représentant a jugé qu’il était temps d’envisager sérieusement une codification de toutes les dispositions existantes établies progressivement par les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.  Il a invité le Rapporteur spécial à accorder une attention particulière aux effets des conflits armés sur l’évolution de la Charte des Nations Unies elle-même, y compris sur la dimension du maintien de la paix, dont certaines situations n’ont pas été prévues explicitement par la Charte.


Mme CONCEPCIÓN ESCOBAR HERNÁNDEZ (Espagne) a déclaré que sa délégation attachait beaucoup d’importance au sujet de « l’expulsion des étrangers ».  Elle a souhaité que la Commission du droit international (CDI) adopte le plan définitif du projet d’article pour assurer une meilleure compréhension de l’ensemble du texte.  Elle s’est cependant dite surprise que le chapitre sur cette question se réfère à une pratique en Espagne, en se basant uniquement sur des informations fournies par une organisation non gouvernementale.  Elle a suggéré qu’à l’avenir, la CDI ait recours à des sources officielles d’information.  Elle a appuyé le choix de la CDI d’inclure la notion « expulsion déguisée » dans le projet d’article, tout en se disant préoccupée par les exemples de la pratique dans ce domaine, en particulier concernant son pays.  Certains exemples ne correspondent pas à une expulsion déguisée mais sont des formes de retour volontaire autorisées par le droit international, a-t-elle précisé.  Le projet d’article sur l’« extradition déguisée en expulsion », tel que formulé à ce stade, risque de créer une confusion, a-t-elle dit, en souhaitant que le Rapporteur spécial ne retienne pas les dispositions en la matière.


En ce qui concerne les « effets des conflits armés sur les traités », la représentante a approuvé l’inclusion des « conflits armés non internationaux » dans le champ d’application du projet d’article, afin de tenir compte de la pratique internationale et du fait que la plupart des conflits armés sont internes.  Elle a estimé que les traités, dont l’application pourrait être affectée par des conflits armés, ne doivent pas figurer dans la liste qui sera annexée au projet d’article.  Elle a suggéré que les traités auxquels sont parties des organisations internationales ne soient pas exclus du champ d’application du projet.  Avant de conclure, Mme Hernández a présenté quelques observations sur la « protection des personnes en cas de catastrophe », question d’actualité qu’elle a qualifiée de très importante.  Elle a appuyé la démarche choisie par le Rapporteur spécial pour traiter des principes applicables à la protection, à savoir les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et de non-discrimination.


M. JOEL HERNANDEZ (Mexique) a uniquement abordé le chapitre du rapport de la Commission du droit international (CDI) relatif à la « protection des personnes en cas de catastrophe », en appuyant la décision de la Commission d’inclure le respect de la dignité humaine dans le projet d’article.  La délégation mexicaine, a-t-il poursuivi, estime que toute coopération menée en cas de catastrophe doit se faire dans le plein respect des principes de non-ingérence dans les affaires intérieures des États et de neutralité, consacrés par la Charte des Nations Unies.  Par ailleurs, le représentant a souligné que l’assistance extérieure doit, au préalable, être autorisée par l’État affecté par la catastrophe.  La protection des personnes touchées par une catastrophe incombe en premier lieu à l’État sur lequel s’est produite la catastrophe, a-t-il rappelé.  Le Mexique reconnaît cependant que la communauté internationale doit, à titre complémentaire, assister l’État en vue de protéger et secourir les personnes victimes d’une catastrophe, a-t-il déclaré, en soulignant que cette coopération devrait se fonder sur le principe du respect de la souveraineté des États.


M. MARK SIMONOFF (États-Unis) a reconnu la complexité des projets d’articles sur « l’expulsion des étrangers » élaborés par la Commission du droit international (CDI) et demandé au Rapporteur spécial chargé de ce sujet, ainsi qu’aux autres membres de la CDI, de réviser les projets d’articles relatifs aux droits de l’homme des étrangers soumis à l’expulsion.  Il a constaté que, dans l’ensemble, les commentaires des délégations sur ce sujet illustrent leurs préoccupations quant à la restriction des droits inhérents à la souveraineté qui pourrait résulter de ce projet de texte.  Plutôt que de chercher à codifier de nouveaux droits spécifiques à l’expulsion et à importer des notions issues de la jurisprudence régionale, les projets d’articles devraient refléter les principes bien établis du droit contenus dans les conventions sur les droits de l’homme qui sont largement ratifiées, a-t-il estimé.  Le représentant s’est déclaré d’avis que l’extradition devrait être exclue du champ d’application des projets d’articles, car elle ne recouvre pas la même situation.  L’extradition est le transfert d’une personne, étrangère ou nationale, pour les besoins de l’application d’une loi, a-t-il précisé.


En ce qui concerne les « effets des conflits armés sur les traités », le représentant a noté la nouvelle définition des conflits armés adoptée par le projet d’article, qui se base sur celle donnée par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie dans l’affaire Tadic.  Il a toutefois estimé que toute tentative de définir ce terme était à la fois source de confusion et contreproductive.  Il a proposé plutôt de se référer à l’ensemble de conflits couverts par les articles 2 et 3 des Conventions de Genève qui mentionnent un univers de conflits de caractère international et non international.  Abordant la « protection des personnes en cas de catastrophe », le représentant a estimé que des progrès importants avaient été réalisés concernant le projet d’article en cours d’élaboration à la CDI.  Celle-ci pourrait contribuer largement aux efforts des États en vue de se préparer aux secours en cas de catastrophe.  Il a invité la Commission à développer un outil à vocation pratique pour la communauté internationale, en évitant peut-être d’imposer, en premier lieu, la responsabilité de protéger à l’État touché, faisant observer que ce sujet suscite des divergences de vues.


M. LIONEL YEE (Singapour) a exprimé ses réserves sur l’utilisation de l’expression « droits fondamentaux » à la place des « droits de l’homme » dans le projet d’article 8 élaboré par la Commission du droit international (CDI).  En effet, compte tenu des circonstances dans lesquelles peut se produire une expulsion, a-t-il fait remarquer, il ne semble pas prudent d’employer une formulation sujette à ambiguïté.  Selon lui, l’expression « droits de l’homme » a, pour avantage, de couvrir l’ensemble des droits s’appliquant dans toute situation.  S’agissant du projet d’article 14 (2), la délégation s’est opposée à l’idée selon laquelle un État, qui a aboli la peine capitale, aurait, en vertu du droit international, l’obligation de ne pas expulser un individu vers un autre pays où il a été condamné à la même peine et pourrait y être exécuté.  Comme le Rapporteur spécial l’a mentionné, en droit international, le droit à la vie n’implique pas l’interdiction de la peine de mort, a fait observer le représentant.  M. Yee a, par ailleurs, jugé que le projet d’article 8 relatif à l’extradition déguisée en expulsion avait été, dans un premier temps, élaboré d’une manière susceptible d’entraîner des difficultés pratiques dans sa mise en œuvre.  L’exigence de consentement de la part de la personne en cours d’expulsion se serait presque immanquablement traduite par le refus de cette même personne d’être expulsée, a-t-il expliqué.  Il s’est donc félicité que la version révisée de ce projet d’article renonce à la notion de consentement, tout en demandant que les droits de la personne en voie d’expulsion soient protégés par le droit international.


M. HOLGER FEDERICO MARTINSEN (Argentine) a estimé que l’applicabilité des normes relatives aux droits de l’homme ne devrait pas être rappelée dans les projets d’articles sur « l’expulsion des étrangers », car elles doivent être respectées et appliquées. Cependant, dans la pratique des États, rien ne garantit que cette application est automatique, a-t-il reconnu.  Abordant la question des « effets des conflits armés sur les traités », il a estimé qu’il serait utile pour la CDI d’envisager l’étude de la pratique des États sur ce plan.  Le fait pour un État, partie à un traité, d’être impliqué dans un conflit armé ne doit pas l’amener à se soustraire à ses obligations conventionnelles, a-t-il souligné.  En ce qui concerne « la protection des personnes en cas de catastrophe », le représentant a déclaré que sa délégation avait un intérêt particulier pour cette étude, car elle devrait établir de nouvelles règles en matière d’assistance et de secours aux populations victimes de catastrophes.  Comme le suggère le Rapporteur spécial, il est logique que l’assistance extérieure soit assurée dans le respect des principes d’humanité, de neutralité et d’impartialité, lesquels sont liés au respect de la souveraineté des États et de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États, a-t-il rappelé avant de conclure.


M. SHIN BOO NAM (République de Corée), abordant la question de l’« expulsion des étrangers », a déclaré que tout État avait le droit d’expulser les étrangers qui agissent en violation des lois nationales ou portent gravement atteinte à ses intérêts.  Toutefois, en exerçant ce droit, l’État doit respecter les droits fondamentaux des personnes concernées à la fois en vertu du droit national et du droit international, a ajouté le représentant, qui, ensuite, a précisé que l’expulsion des étrangers dans son pays était régie par une loi sur le contrôle des étrangers.  Faisant référence au projet d’article 14 révisé relatif au non-refoulement, il a proposé que la Commission étudie les mesures que pourrait prendre l’État vers lequel l’étranger est refoulé pour respecter les droits de cette personne. 


S’agissant de la question de la « protection des personnes en cas de catastrophe », M. Shin a estimé que le consentement de l’État affecté devrait rester la condition sine qua non de la fourniture de l’assistance humanitaire, car il incombe en premier lieu à cet État d’assurer la protection de sa population.  Il a estimé que le projet d’article 8 restait flou sur la possibilité de toute personne affectée qui demanderait une assistance, et que le projet d’article 9 gardait le silence sur la question de savoir qui pourrait constater l’incapacité de l’État affecté et qui aurait la responsabilité secondaire de fournir l’assistance.  Il a demandé que la Commission examine davantage ces questions en vue de trouver une solution.


Par ailleurs, le représentant a estimé que les conflits armés avaient souvent pour conséquences d’empêcher ou de rendre difficile l’application d’un traité.  Il a estimé qu’il faudrait faire une distinction entre les traités dont l’application n’est pas affectée en cas de conflits armés et les autres traités.  Sa délégation, a-t-il assuré, appuie le projet d’article 5 ainsi que l’élaboration d’une liste indicative des traités devant s’appliquer en cas de conflit armé, qui serait annexée aux projets d’articles.


M. MEHBOOB BEG (Inde) a souhaité que le Rapporteur spécial de la CDI chargé de la question de l’« expulsion des étrangers » restructure le projet d’article qu’il a présenté et le réorganise en cinq parties.  Concernant la question des « effets des conflits armés sur les traités », il a estimé qu’il faudrait limiter la liste en annexe des projets d’articles aux traités conclus entre États et en exclure ceux auxquels sont parties des organisations internationales.  Les projets d’articles devraient aussi se limiter aux conflits armés entre États, sans prendre en compte les conflits armés internes, a-t-il ajouté.  Le représentant a jugé utile d’établir certains critères pour déterminer les traités qui s’appliqueraient expressément en cas de conflit armé et qui ne pourraient en aucune circonstance faire l’objet d’une extinction ou d’une suspension.  De même, a-t-il fait observer, les traités fixant les frontières terrestres ou maritimes ont un caractère permanent et ne doivent pas être affectés par un conflit armé.  Il s’est dit favorable à l’idée d’établir une liste de ces traités qui figurerait en annexe des projets d’articles.


Concernant la « protection des personnes en cas de catastrophe », M. Beg s’est félicité de l’adoption des cinq premiers projets d’articles par la CDI.  Il a apprécié, en particulier, le projet d’article 4 selon lequel l’ensemble du texte élaboré par la CDI « ne s’appliquerait pas aux situations couvertes par les normes du droit international humanitaire ».  Il a aussi appuyé la définition du terme « catastrophe » à l’article 3 qui fait référence à une « calamité » et précise ainsi le caractère exceptionnel des situations auxquelles les projets d’articles s’appliqueraient.  Par ailleurs, la référence au principe de neutralité n’est pas utile, puisque les États sont d’accord pour dire que les conflits armés ne seraient pas couverts par les projets d’articles, a estimé le représentant.  Il a aussi fait remarquer que le principe de non-discrimination avait été mis en évidence par la Cour internationale de Justice dans l’affaire « Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis) ».  Dans cette affaire, la Cour avait fait référence aux objectifs poursuivis par le Mouvement de la Croix-Rouge dans le contexte de l’assistance humanitaire afin de ne pas la condamner pour ingérence dans les affaires intérieures de l’État touché, a-t-il rappelé.  M. Beg a aussi bien accueilli le projet d’article 8 qui prévoit la responsabilité première de l’État touché en termes de protection des personnes et de secours humanitaires sur son territoire, comme l’Assemblée générale l’a elle-même rappelé à plusieurs occasions.


M. NOBUYUKI MURAI (Japon) a invité la Commission du droit international (CDI) à établir une distinction entre les étrangers qui résident légalement sur un territoire et ceux qui y vivent de manière illégale, et à examiner la possibilité d’adopter une approche différente pour poursuivre la réflexion sur « l’expulsion des étrangers ».  Il a aussi rappelé à la Commission que la condamnation à la peine de mort était un aspect de la politique nationale des États.  Le délégué a ensuite estimé que le sujet des « effets des conflits armés sur les traités » visait à étendre le régime établi par la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969.  Il est fondamental, a-t-il souligné, de ne pas exclure de la liste, des traités applicables en toute circonstance, qui sera annexée aux projets d’articles la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Il a aussi soutenu l’inclusion des conflits armés non internationaux dans le champ matériel de cette étude.  Il a également appuyé l’idée de privilégier l’application automatique de la suspension du traité, dès que certaines conditions seraient remplies, écartant ainsi toute possibilité de conférer un pouvoir discrétionnaire aux parties.  Il s’est enfin appesanti sur le sujet de « la  protection des personnes en cas de catastrophe »,  en espérant que la formulation de certains articles des projets d’articles 6 et 8 –portant respectivement sur la conclusion de traités pendant un conflit armé et la notification d’extinction, de retrait ou de suspension- sera améliorée par la Commission.  À son tour, il a appuyé la position suggérée par le Rapporteur spécial selon laquelle il incombe, en premier lieu, à l’État affecté par une catastrophe d’assurer les secours et la protection de sa population.


M. ROLAND TRICOT, Observateur de la délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies, intervenant sur le chapitre de « l’expulsion des étrangers », a relevé que le rapport du Rapporteur spécial mentionnait le niveau de protection des étrangers en droit européen, comme exemple pouvant servir de base aux règles internationales proposées par la CDI.  Il a cependant fait remarquer que ce rapport comportait deux lacunes, la première étant le peu d’importance accordée à la distinction fondamentale en droit européen entre les critères applicables aux citoyens de l’Union européenne, d’une part, et ceux applicables aux personnes non ressortissantes des pays membres de l’Union européenne, d’autre part.  Les normes applicables aux citoyens de l’Union européenne ne peuvent pas automatiquement être transposées aux « étrangers », a-t-il expliqué.  Les États membres de l’Union européenne appartiennent à un ordre juridique spécial qui a établi sa propre « citoyenneté », avait affirmé la Cour de justice de l’Union européenne dans sa jurisprudence, a-t-il rappelé.  L’autre insuffisance, de l’avis de M. Tricot, est l’utilisation par le Rapporteur spécial de documents européens relativement anciens, y compris de lois qui ont été révoquées ou modifiées.  Commentant ensuite les 14 projets d’articles élaborés par le CDI dans ce domaine, M. Tricot a estimé qu’ils correspondaient aux principes généraux élaborés par la directive de l’Union européenne relative à ces questions, comme le principe de non-refoulement ou la priorité donnée aux départs volontaires.  Il a cependant signalé qu’on pouvait se poser des questions sur la conformité de certains de ces articles avec la pratique des États actuelle.  Il a donc demandé à la CDI de continuer à réfléchir sur la direction à prendre, notamment en ce qui concerne les normes et principes qui ne sont pas sous-tendus par la pratique des États.


Mme ELYSE MOSQUINI, Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR), qui s’est concentrée sur le thème de la « protection des personnes en cas de catastrophe », a fait remarquer que, si l’exercice actuel doit aboutir à un nouvel ensemble de lignes directrices non contraignantes, il conviendrait d’éviter de réinventer des instruments de nature similaire déjà en place tels que les Lignes directrices relatives à la facilitation et à la réglementation nationales des opérations internationales de secours et d’assistance au relèvement initial en cas de catastrophe (dite « lignes directrices IDRL »).  En revanche, si la forme finale doit être un traité, il est essentiel que des aspects fondamentaux d’instruments internationaux existants s’y trouvent reflétés. 


Les études de la FICR ont clairement montré que, lors de la décennie écoulée, l’absence de règles bien articulées relatives à l’aide et à la régulation des acteurs de la société civile a provoqué des difficultés concrètes bien plus considérables que les ambiguïtés concernant l’assistance interétatique ou par les organisations internationales, a regretté Mme Mosquini, qui a ajouté que l’assistance à Haïti représentait un cas typique.  Les Lignes directrices IDRL traitent de ces deux questions, a-t-elle rappelé.  Mme Mosquini a estimé que si les projets d’articles actuels devaient aboutir à un traité, l’absence de dispositions relatives à la société civile constituerait une grave lacune.  Si la CDI devait élaborer un nouvel instrument non contraignant, elle pourrait simplement faire référence aux Lignes directrices IDRL et se concentrer sur d’autres questions, telles que les droits des personnes affectées par la catastrophe, a-t-elle précisé.


Mme Mosquini s’est félicitée de l’exclusion des projets d’articles sur les situations dans lesquelles le droit international humanitaire s’applique, ce qui devrait permettre d’éviter certaines confusions.  Elle a, en revanche, noté avec inquiétude, des risques de confusion dans le projet d’article 6 relatif aux principes humanitaires.  Elle a notamment fait observer que le principe d’impartialité était généralement compris par la communauté humanitaire comme un principe de non-discrimination.  Or, la non-discrimination semble être présentée dans l’actuel projet d’article comme un principe séparé, a-t-elle fait observer.  De même, la CDI présente comme un principe séparé la nécessité d’assister ceux qui en ont le plus besoin, alors qu’il représente le cœur même du principe d’humanité.  La représentante s’est, en revanche, félicitée de l’accent mis sur la dignité humaine et les droits de l’homme dans les projets d’articles 7 et 8.  Enfin, tout en jugeant  excellente la rédaction générale du projet d’article 9 sur la responsabilité de l’État affecté, elle s’est inquiétée de l’utilisation du mot « contrôle » de l’assistance.  Il ne fait aucun doute que les États ont le droit de coordonner et de réglementer l’assistance apportée par les organisations humanitaires, mais il est aussi admis que cela doit se faire dans le respect de la capacité de ces organisations à se conformer aux principes humanitaires, a-t-elle expliqué.


M. EDUARDO VALENCIA OSPINA, Rapporteur spécial de la CDI chargé de la question de la protection des personnes en cas de catastrophe, a indiqué qu’il résumerait le débat tenu à la Sixième Commission dans son prochain rapport à la CDI.  « Nous veillerons à ce que les résultats de nos travaux répondent aux préoccupations de la communauté internationale », a-t-il assuré.  Il a noté que les délégations s’étaient félicitées des progrès rapides accomplis par la CDI sur la « protection des personnes en cas de catastrophe », notamment l’adoption par consensus de neuf projets d’articles.  Il a rappelé que son troisième rapport, qui proposait un projet d’article sur les responsabilités de l’État touché, traitait déjà de la question du consentement de l’État touché.  Le paragraphe concerné a été renvoyé au Comité de rédaction qui n’a pas eu encore le temps de l’examiner, a-t-il dit.  M. Ospina s’est félicité de l’appui des délégations de la Sixième Commission à l’approche suivie par la CDI dans l’étude de ce sujet.


Présentation de la troisième partie du rapport de la Commission du droit international


M. NUGROHO WISNUMURTI, de l’Indonésie, Président de la Commission du droit international (CDI), a présenté les chapitres VIII (obligation d’extrader ou de poursuivre), X (traités dans le temps), XI (clause de la nation la plus favorisée) et XII (ressources naturelles partagées) du rapport sur les travaux accomplis par la CDI à la soixante-deuxième session.


Le sujet de « l’obligation d’extrader ou de poursuivre (aut dedere aut judicare) » est à l’ordre du jour de la CDI depuis 2005, a-t-il rappelé, précisant que le cadre général adopté pour l’examen de cette question comprend sept catégories, dont les fondements juridiques de l’obligation d’extrader ou de poursuivre; le champ d’application rationae materiae de cette obligation; son contenu ou encore la relation entre extradition et poursuites dans les dispositions pertinentes.  Le Groupe de travail sur la question, présidé par M. Alain Pellet, était saisi d’une étude de 61 conventions multilatérales susceptibles de relever des travaux de la Commission sur le sujet, établie par le Secrétariat.  Le Groupe de travail était également saisi d’un document de travail dans lequel le Rapporteur spécial, M. Zdzislaw Galicki, a attiré l’attention de la Commission sur plusieurs points, notamment les fondements juridiques de l’obligation.  Le Groupe de travail a conclu que le Rapporteur spécial devrait, à l’avenir, présenter des projets d’articles sur le sujet.


En ce qui concerne les « traités dans le temps », à l’étude depuis 2008, M. Wisnumurti a rappelé qu’un Groupe d’étude, présidé par M. Georg Nolte, avait commencé à travailler cette année sur le sujet en se basant sur la pratique et les accords pertinents, ainsi que sur la jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Les aspects abordés au cours des discussions du Groupe d’étude ont porté notamment sur le point de savoir si différents organes judiciaires ou quasi-judiciaires avaient une conception différente des accords et pratiques ultérieurs, ou ont tendance à leur attribuer un poids différent, dans l’interprétation des traités.  Au cours de la soixante-troisième session de la CDI, le Groupe d’étude devrait d’abord achever son examen du rapport introductif, puis aborder une deuxième phase de ses travaux, a indiqué M. Wisnumurti.  Le Groupe d’étude estime que les renseignements fournis par les gouvernements sur ce sujet seraient très utiles, a-t-il ajouté.


Passant au chapitre portant sur la « clause de la nation la plus favorisée », M. Wisnumurti a présenté les travaux menés par le Groupe d’étude sur la question, coprésidé par M. Donald McRae et M. Rohan Perera.  Pour tenter de mieux comprendre les problèmes que pose aujourd’hui cette clause (appelée clause NPF), le Groupe a examiné, notamment, la typologie des dispositions NPF existantes, les domaines dans lesquels le projet d’articles de 1978 reste pertinent, ainsi que la manière dont le traitement NPF s’est développé et évolue dans le cadre du GATT et de l’OMC.  Selon le sentiment général au sein du Groupe d’étude, il était prématuré, à ce stade, d’envisager l’élaboration de projets d’articles ou de réviser le projet d’article de 1978, a indiqué le Président de la Commission.  Le Groupe d’étude pourrait étudier plus avant les questions touchant aux rapports entre le commerce des services et le commerce des biens intellectuels, sous l’angle du traitement NPF au GATT et à l’OMC et dans les accords visés, et aux investissements.


Enfin, sur la question des « ressources naturelles partagées », à l’ordre du jour de la CDI depuis 2002, le Président a indiqué que le Groupe de travail, présidé par M. Enrique Candiotti, était saisi, cette année, d’un document de travail sur le pétrole et le gaz établi par M. Shinya Murase.  Ce document de travail recommandait à la Commission de ne pas examiner plus avant la question des ressources transfrontières en pétrole et en gaz, faisant valoir qu’une majorité d’États considéraient la question des ressources transfrontières en pétrole et en gaz comme une question qui ne pouvait faire l’objet que d’accords bilatéraux et qu’elle était également très politique et technique, recouvrant des situations très diverses.  La Commission a, dans l’ensemble, approuvé cette recommandation, a indiqué le Président avant de conclure.


Déclarations


M. HELMUT TICHY (Autriche) a fait remarquer que la question des « traités dans le temps » était devenue pertinente pour son pays depuis qu’il avait rejoint l’Union européenne, en 1995, puisque le droit européen l’emporte généralement sur les traités avec des États tiers ou entre États membres de l’Union européenne.  Il a donné des exemples de la pratique de l’Autriche dans ce domaine, citant notamment le Traité d’État de l’Autriche de 1955, dont les clauses militaires et aériennes, interdisant la possession de certains types de matériel de guerre, ont été jugées comme obsolètes en 1990, ce que les autres signataires du Traité ont accepté explicitement ou implicitement.  M. Tichy a également parlé de l’Accord d’assistance mutuelle en cas de catastrophe conclu entre l’Autriche et la République fédérale d’Allemagne en 1988, qui contenait une clause dite « clause de Berlin », dont la validité n’a plus eu raison d’être après la réunification de l’Allemagne.


M. Tichy a, par ailleurs, estimé qu’il serait utile de formuler des directives sur la « clause de la nation la plus favorisée » pour assurer plus de certitude et de stabilité en droit international des investissements.  Il a donc suggéré que le Groupe de travail chargé de cette question procède à une analyse de la pratique et de la jurisprudence en la matière.  Avant de conclure, il a rappelé, en ce qui concerne les « ressources naturelles partagées », que la Sixième Commission avait déjà examiné l’idée d’étendre cette étude aux ressources en pétrole et en gaz.  Il a émis des doutes sur la possibilité de parvenir à un consensus sur des projets d’articles dans ce domaine.


Mme NATALIE RYAN (Nouvelle-Zélande) a salué l’étude faite par le secrétariat de la CDI sur les éléments constitutifs de la pratique des États dans le cadre du sujet de « l’obligation d’extrader ou de poursuivre ».  Elle a reconnu aussi la nécessité pour la Commission de vérifier si cette obligation internationale existe en vertu du droit international coutumier.  Sur la question des « traités dans le temps », la déléguée a indiqué que la pratique subséquente des États constitue un moyen d’interprétation du traité qui mérite d’être examiné de manière approfondie par la CDI.  La représentante a également souhaité que la CDI produise un guide sur les pratiques des États et organisations dans ce domaine.


Sa délégation, a-t-elle dit, se rallie à la position du Rapporteur spécial de poursuivre la réflexion sur « la clause de la nation la plus favorisée », notamment dans le domaine de la propriété intellectuelle.  La CDI devrait parvenir rapidement à proposer une forme définitive du texte du Rapporteur spécial sur le sujet, a-t-elle souhaité.  Sa délégation a fait sienne la décision de la CDI de ne pas poursuivre l’étude des ressources en pétrole et en gaz dans le cadre de l’examen de la question des « ressources naturelles partagées ».


M. CHRISTOPH RETZLAFF (Allemagne) s’est félicité des travaux réalisés par la CDI cette année sur le sujet des « traités dans le temps ».  Puisqu’un traité devrait s’appliquer sur une longue période, il a estimé qu’il serait essentiel de pouvoir l’adapter à des circonstances changeantes et de l’interpréter dans ce contexte.  Un traité doit être un instrument de droit international souple, a-t-il fait remarquer.  Le représentant a ajouté que, dans la mesure où la pratique dans ce domaine fait l’objet d’un accord et ne donne pas lieu à controverse, les cours et tribunaux ne seront même pas au courant qu’elle existe.  Sa délégation se félicite que le Groupe d’étude chargé de cette question cherche à fixer des règles prévisibles sur cette question, a-t-il dit.


M. MIGUEL DE SERPA SOARES (Portugal) a estimé qu’une étude approfondie sur le sujet de « l’obligation d’extrader ou de poursuivre » permettrait à la CDI de mieux appréhender les positions des États sur l’application de cette question, d’autant plus que celle-ci est fondamentale dans la lutte contre l’impunité des auteurs de crime graves.  Concernant la question des « traités dans le temps », il a rappelé la jurisprudence qui souligne le lien entre le traité et le droit coutumier.  La CDI ne doit pas aller au-delà des Conventions de Vienne sur le droit des traités, a-t-il insisté, avant d’appeler le Groupe de travail chargé de la question de « la clause de la nation la plus favorisée » de présenter aux États Membres de nouveaux documents de réflexion.  Pour le moment, le Portugal émet des doutes sur la nécessité d’œuvrer à la codification de cette clause, car elle n’a pas véritablement été examinée de manière approfondie, a-t-il dit.  Il faut prioritairement veiller à étudier l’utilité de cette question, avant d’envisager l’élaboration de directives en ce domaine, afin d’éviter une certaine incertitude juridique dans le domaine des investissements, a souligné le délégué.  Évoquant le sujet des « ressources naturelles partagées », le représentant a indiqué qu’il ne partageait pas l’idée de renoncer à l’examen des ressources en pétrole et en gaz dans le cadre de cette étude.  Il a estimé que cette question était importante pour les relations entre les États.  Il a ajouté que l’examen d’une telle question s’impose en raison des lacunes qui existent actuellement en droit international en la matière.


M. NICK MINOGUE (Royaume-Uni) s’est félicité de l’étude menée par le Secrétariat de la CDI sur les conventions multilatérales, dans le cadre des travaux sur « l’obligation d’extrader ou de poursuivre », constatant cependant que peu de progrès avaient été réalisés au-delà de cette étude.  Il a estimé que l’obligation d’extrader ou de poursuivre devrait découler d’une obligation souscrite en vertu d’un traité.  On n’en est pas encore au stade de considérer que c’est une règle de droit international coutumier, a-t-il dit.  Il a ensuite encouragé le Groupe de travail à composition non limitée à poursuivre ses travaux sur les questions en suspens.


En ce qui concerne les travaux de la Commission sur la « clause de la nation la plus favorisée », le représentant a estimé qu’il était prématuré, à ce stade, d’envisager l’élaboration de nouveaux projets d’articles ou de réviser ceux de 1978.  La jurisprudence limitée, qui existe dans le cadre des accords de l’OMC et de libre-échange, signifie que des principes sont difficiles à dégager, a-t-il expliqué.  C’est pourquoi, il a suggéré que le Groupe de travail chargé de cette question travaille sur l’application de la clause de la nation la plus favorisée dans le domaine des investissements.


S’agissant du thème des « ressources naturelles partagées », le représentant a émis de nouveau des doutes sur l’utilité d’une tentative de codification ou d’élaboration de projets d’articles sur le pétrole et le gaz.  « Notre expérience dans la négociation d’instruments dans ce domaine montre que si les États souhaitent coopérer entre eux sur ces questions, les accords qu’ils concluent et les solutions auxquelles ils parviennent tiennent compte de considérations pratiques basées sur des informations techniques », a-t-il fait remarquer.  Il a rappelé que d’autres États ayant une expérience pratique dans ce domaine ont fait des observations analogues.  Maintenant que les aspects relatifs au pétrole et au gaz ont été éliminés de l’étude, il a estimé que le sujet des « ressources naturelles partagées » ne devrait plus être inscrit à l’ordre du jour de la CDI.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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