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TAD/2044

LA CNUCED XII PRÔNE UN AUTRE CALCUL DE VIABILITÉ DE LA DETTE ET VOIT DANS LES RESSOURCES ET LES CONNAISSANCES UN MOTEUR DU RENFORCEMENT DES CAPACITÉS PRODUCTIVES DES PMA

24/04/2008
Conseil économique et socialTAD/2044
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TAD/2044


LA CNUCED XII PRÔNE UN AUTRE CALCUL DE VIABILITÉ DE LA DETTE ET VOIT DANS LES RESSOURCES ET LES CONNAISSANCES UN MOTEUR DU RENFORCEMENT DES CAPACITÉS PRODUCTIVES DES PMA


(Publié tel que reçu)


Accra, GHANA, 24 avril –- La douzième Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED XII), qui terminera ses travaux demain à Accra, a tenu aujourd’hui deux tables rondes sur la contribution de la gestion de la dette au commerce et au développement et sur le renforcement des capacités productives dans les pays les moins avancés (PMA). 


Si les discussions menées sur le deuxième thème ont permis d’identifier les ressources financières et les connaissances comme étant le moteur du renforcement des capacités productives des pays les moins avancés (PMA), celles sur la gestion de la dette ont abouti à la conclusion que les programmes tels que l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) et l’Initiative d’allègement de la dette multilatérale, toutes deux décriées pour leur lenteur et leur lourdeur, ne suffiront pas à prévenir une crise de la dette.  Seul le calcul de sa viabilité évitera aux pays de connaître une crise comme celle qui avait secoué les pays d’Asie du Sud-Est en 1997.


Cette viabilité de la dette dépend surtout, a fait valoir le Secrétaire d’État au développement international de la Norvège, à la fois du degré de responsabilité des créanciers et des débiteurs, de la bonne gouvernance, des politiques macroéconomiques saines et de l’absence de corruption.


Mais comment la calculer?  Le Directeur général adjoint à la politique de développement au Ministère de la coopération économique et du développement de l’Allemagne a émis des doutes sur la fiabilité d’un calcul fondé sur le volume de la dette extérieure, compte tenu de la place de plus en plus importante que prend la dette intérieure dans l’endettement total d’un pays débiteur.  Il a jugé plus pertinent d’analyser la structure de la dette, à savoir la dynamique existant entre les deux types de dette, qui ne comportent pas les mêmes risques, et de se pencher sur la courbe de la croissance économique.


Le Gouverneur de la Banque centrale de l’Iraq s’est, par exemple, dit satisfait d’une dette qui, étant passé de 100 à 50 milliards de dollars, « ne constitue plus un obstacle au développement » de l’Iraq.  Dans les calculs de viabilité de la dette, a fait observer le représentant allemand, on oublie aussi trop souvent l’impact des chocs extérieurs.  La tendance à la hausse des cours des produits de base ne doit pas faire oublier l’instabilité inhérente à ce secteur, a-t-il insisté. 


Après avoir relevé les faiblesses du Cadre de viabilité de la dette (CVD) créé par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, le Directeur général adjoint allemand a appelé la CNUCED à continuer à s’occuper de ces questions et à examiner plus particulièrement le rôle des fonds spéculatifs dans les crises de la dette et l’impact de l’aide publique au développement (APD) sur sa viabilité.  L’APD, dont le montant total a atteint un montant de 82 milliards grâce aux mesures d’allègement de la dette, n’est pas seulement à la hauteur des objectifs fixés, mais elle reste aussi marquée par la sélectivité et l’instabilité*.


L’importance de l’APD a été réitérée lors de la table ronde sur le renforcement des capacités productives des PMA.  L’accent a en outre été mis sur l’amélioration d’un environnement propice au renforcement de ces capacités, ainsi que sur le commerce, l’investissement et la mise à profit des connaissances.


La solution aux problèmes structurels des PMA; qui se caractérisent par le faible niveau de l’infrastructure et des ressources humaines de ces pays, le mauvais fonctionnement des systèmes financiers et des mécanismes du savoir, et la faiblesse du secteur national des entreprises; doit se fonder sur les éléments fondamentaux que sont les ressources financières et les connaissances, estime la CNUCED.  L’envolée actuelle des prix des produits de base peut être une occasion à saisir, mais il faut pour cela que le fruit de ces rentes exceptionnelles soit consacré à l’outil de production et à l’amélioration de la trajectoire de croissance**.


Pendant la table ronde, de nombreux intervenants ont, en effet, souligné l’importance pour ces pays de se doter d’un nouveau « paradigme » de production, en créant de la valeur ajoutée tout en répondant aux normes internationales de qualité les plus rigoureuses, seul moyen d’être compétitifs sur des marchés externes hyperconcurrentiels.  Pour y parvenir, un environnement institutionnel sain doit être mis en place, en prenant appui sur la progression actuelle de la bonne gouvernance démocratique sur le continent africain, ont préconisé les intervenants.


*     TD/424

**    TD/420


Table ronde sur le thème: Contribution de la gestion de la dette au commerce et au développement


Nous savons tous, a dit en introduction Ellias E. Ngalande, le Directeur exécutif de l’Institut de gestion macroéconomique et financière de l’Afrique orientale et australe (MEFMI), que les mesures d’allègement de la dette ont aidé de nombreux pays en développement.  Mais dans un contexte marqué par les turbulences des marchés financiers internationaux, a prévenu Ellias Ngalande, il faudra sans doute faire plus pour les pays en développement qui, fort heureusement d’ailleurs, accueillent de plus en plus d’investissements étrangers directs (IED). 


La dette, a poursuivi le Secrétaire d’État au développement international de la Norvège, Hakon Gulbrandsen, est une des questions les plus difficiles à régler en vue d’assurer le financement du développement.  Depuis le lancement de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (Initiative PPTE), beaucoup a été fait, mais on sait que le système reste fragile.  La priorité, a préconisé le Secrétaire d’État, doit être accordée à l’analyse, en toute transparence, des conditions de prêts, en tenant compte des risques de surendettement.  En la matière, la transparence s’impose, a-t-il recommandé.  Pour sa part, la Norvège essaie de faire le ménage, et c’est la raison pour laquelle elle a demandé à la Banque mondiale et à la CNUCED des études sur l’endettement souverain.  Les études, a poursuivi le Secrétaire d’État, ont montré la nécessité pour les créanciers et les débiteurs de faire preuve de la plus grande responsabilité et d’assainir les politiques en vigueur. 


Mais, a reconnu M. Gulbrandsen, la responsabilité et les programmes d’allègement de la dette ne suffiront pas à éviter une nouvelle crise de la dette si, par l’assistance technique, on ne renforce pas les capacités de gestion de la dette des pays en développement.  La Norvège, a rappelé le Secrétaire d’État, est le principal financier des études menées par la CNUCED sur cette question et des efforts déployés par la Banque mondiale, qui tendent à renforcer le cadre juridique et politique des questions de l’endettement.  En plus de mener une bonne gestion de la dette pour éviter les crises, il faut veiller à ajouter à cet effort les facteurs déterminants que sont la bonne gouvernance, les politiques macroéconomiques saines et l’absence de corruption, a préconisé le Secrétaire d’État norvégien.  Ces derniers propos ont été particulièrement appuyés par le représentant des États-Unis.  


D’autres remarques concernant notamment les « prêts à tout-venant des années 80 qui ont conduit à un système ingérable » ont reçu le soutien du Gouvernement de la Banque centrale de l’Iraq, Sinan Al-Shabibi, qui a ainsi indiqué que la majeure partie de la dette iraquienne a été accumulée, au cours des années évoquées plus haut, pour assurer essentiellement le financement de conflits.  La partie principale de l’encours de cette dette est principalement due aux retards de paiement causés par les guerres, puis par les sanctions.  Arrivé au pouvoir, le Gouvernement provisoire iraquien a trouvé une dette de 100 milliards de dollars, ce qui représentait le plus gros endettement au monde, a indiqué Sinan Al-Shabibi. 


La moitié de ce montant était due au Club de Paris, 20 milliards à des créanciers privés, 20 aux bailleurs de fonds des pays voisins et le reste à différentes parties, a-t-il précisé.  La dette de l’Iraq, a souligné le Gouverneur de la Banque centrale, était six fois supérieure au produit intérieur brut (PIB) du pays, ce qui était une véritable entrave à la reconstruction. 

Après des négociations intenses avec les créanciers du Club de Paris, l’Iraq a obtenu un taux net de réduction de la dette de 89% d’ici à 2011.  En outre, les créanciers privés ont consenti 70% de réduction de leurs créances, et les négociations sur la question de la dette vont bon train avec les pays du Golfe.  Aujourd’hui, l’encours de la dette est de l’ordre de 50 milliards de dollars, ce qui n’entrave plus du tout le développement de l’Iraq, a dit le Gouverneur de la Banque centrale. 


En matière de viabilité de la dette, les calculs, a alerté Jürgen Zattler, Directeur général adjoint à la politique de développement au Ministère de la coopération économique et du développement de l’Allemagne, ont trop pris en compte les risques concernant l’emprunt extérieur au détriment de la structure de la dette.  La composition de la dette, a-t-il insisté, est tout aussi importante que le volume de l’endettement en monnaie locale et en devises.  Il faut lier l’endettement à la capacité des emprunteurs à assurer le service de la dette.  Quand on parle de la viabilité de la dette, il faut s’attarder sur la trajectoire de la croissance, soit celle des bénéfices tirés des investissements, a-t-il recommandé.


Même lorsque l’on examine l’emprunt extérieur, il faut voir de quelle manière il permettra de déboucher sur le renforcement de la capacité productive des pays et la manière dont les fonds sont utilisés et investis.  En outre, dans les calculs de viabilité de la dette, on oublie aussi l’impact des chocs extérieurs, a fait remarquer M. Zattler.  Il faut savoir, a d’autre part indiqué le Directeur général adjoint, que les pays subissent de tels chocs tous les quatre ans en moyenne.  Par exemple, les termes de l’échange sont quatre fois plus instables dans les pays d’Afrique subsaharienne que dans les pays développés, et deux fois plus qu’en Asie du Sud-Est.  La tendance à la hausse des cours des produits de base ne doit pas faire oublier l’instabilité traditionnelle de ce secteur. 


Le principe du Cadre de viabilité de la dette (CVD) du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale est un outil précieux, a estimé le Directeur général adjoint chargé de la politique du développement multilatérale et européenne de l’Allemagne, avant de pointer du doigt ses forces et ses faiblesses.  Le Cadre, a-t-il estimé, ne tient pas assez compte des questions afférentes à la croissance.  Il doit permettre un certain degré de souplesse pour les investissements qui ont un fort impact sur la croissance et pour l’impact des chocs exogènes.  Le Cadre doit également tenir compte des mécanismes tels que les paiements différés, le financement lié au PIB et les financements compensatoires.  Il doit aussi se soucier de l’impact de la dette intérieure, qui prend une part de plus en plus grande dans le volume de la dette.


En outre, la manière dont le Cadre se propose d’analyser la qualité des institutions et des politiques pour déterminer la viabilité de la dette n’est pas satisfaisante, a poursuivi M. Zattler.  Le Cadre n’est pas un instrument statique; il doit être dynamique, a-t-il dit sur un ton d’encouragement, avant d’appeler la CNUCED à continuer son travail en la matière, en mettant notamment l’accent sur l’impact qu’ont les fonds spéculatifs sur les crises financières, ainsi que sur celui des politiques macroéconomiques sur le développement et la croissance, élément clef de la viabilité de la dette, et sur l’APD. 


Par « souci de clarté », le représentant des États-Unis a précisé que son pays n’avait jamais accepté l’objectif officiel consistant à ce que les pays développés consacrent 0,7% de leur produit national brut (PNB) à l’aide publique au développement (APD).  Aujourd’hui, a-t-il rappelé, le Président Bush a atteint l’objectif, déclaré en 2002, de doubler l’APD américaine en 2006.  À cette date, en effet, l’APD américaine destinée à l’Afrique a doublé, a insisté le représentant, en appelant les créanciers des pays émergents à adhérer au CVD. 


La viabilité de l’endettement, a pour sa part ajouté le Directeur général adjoint au Ministère de la coopération économique de l’Allemagne, exige que prêteurs et emprunteurs fassent preuve de plus de responsabilité.  Les premiers doivent rendre des rapports de meilleure qualité, et les seconds, renforcer les mécanismes de contrôle et de reddition des comptes.   


Table ronde sur le thème: Développer les capacités de production dans les pays les moins avancés


La CNUCED XII a organisé cet après-midi une seconde table ronde au cours de laquelle les participants ont réfléchi aux moyens de développer les capacités de production dans les pays les moins avancés (PMA).  L’accent a été mis sur l’amélioration d’un environnement propice à renforcer ces capacités, ainsi que le commerce et l’investissement, et mettre à profit les connaissances pour le développement.


Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), Kandeh Yumkella, a indiqué que 34 des 50 PMA que compte le monde étaient situés en Afrique.  Sur ce continent, la population aura doublé d’ici à 2050 et la pauvreté prendra un nouveau visage, puisqu’elle migrera des campagnes aux villes.  Si cette tendance démographique se confirme, l’agriculture va redevenir plus importante encore que par le passé, a prévenu Kandeh Yumkella.  Mais il est fortement recommandé de la lier à la production de biens manufacturés, a-t-il préconisé.  Ainsi, a-t-il expliqué, les producteurs de coton disent qu’ils ne veulent plus vendre de coton, mais des tissus.  « J’arrive du Nigeria, où, dans les zones rurales, 40% des produits de base pourrissent sur place, sur le site même de l’exploitation, ou au cours de leur acheminement.  Le nouveau paradigme de production devra donc intégrer valeur ajoutée et renforcement de la chaîne logistique », a relevé le Directeur général de l’ONUDI.


Le Secrétaire général adjoint et Secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA) a, pour sa part, déclaré que la croissance des PMA était encourageante, grâce en partie à l’envolée des prix des produits de base.  Abdoulie Janneh a ainsi souligné que ces pays devaient s’appuyer sur cette situation pour développer et diversifier leurs capacités productives.  Il leur faut pour cela rapidement maîtriser l’exploitation de ressources naturelles considérables pour les mettre au service d’un développement axé sur la croissance, a dit M. Janneh.  Une mise en conformité avec les normes de qualité internationales est également indispensable pour permettre aux PMA de se montrer compétitifs sur les marchés extérieurs, a-t-il souligné.


Le Ministre du commerce et de l’industrie de la Mauritanie n’a pas dit autre chose lorsqu’il a clairement pointé les risques auxquels sont soumis les PMA du fait de leur dépendance à la seule exportation des produits de base.  Selon Sid’Ahmed Ould Raiss, la priorité doit être donnée à l’optimisation des ressources naturelles, à la densification du tissu industriel et à des actions propices à l’investissement.  La progression de la bonne gouvernance sur le continent africain va aussi dans le sens d’une réappropriation nationale de leurs atouts par les pays concernés, a-t-il ajouté.  Abondant en ce sens, le Directeur d’Uganda Manufacturers Association Consultancy and Information Services (UMACIS) a prôné la mise en place d’un environnement institutionnel propice au relèvement économique et à l’investissement.


La Secrétaire générale adjointe et Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat) a déclaré que la caractéristique commune de tous les PMA, c’est que l’infrastructure « productive » y est rudimentaire et sous-développée.  Or, a précisé Anna Kajumulo Tibaijuka, des goulets institutionnels de toutes sortes continuent d’entraver le développement de ces infrastructures.  L’une des premières mesures à prendre pour rétablir un environnement institutionnel sain est de donner aux femmes le rôle qui leur convient, a-t-elle affirmé.  Par ailleurs, la Secrétaire générale adjointe a estimé que le soutien le plus important que la communauté internationale peut accorder aux PMA, consiste à leur ménager des accès aux marchés libres de droits.  Une normalisation des biens et l’élimination des barrières non-tarifaires sont nécessaires.  Lorsqu’ils produisent des biens, les pays devraient être en mesure de les vendre sur des marchés garantis, a-t-elle conclu.


Le Conseiller principal sur le développement des marchés internationaux au Centre du commerce international s’est demandé, quant à lui, comment bâtir des capacités de production adaptées à chaque pays.  Cherchant à identifier des dénominateurs communs d’un pays à l’autre, M. Simone Cipriani a indiqué que le manque d’accès à l’Internet a pu entraver l’activité de certains artisans africains qui ne pouvaient communiquer avec leurs clients.  Il a également souligné l’importance de rendre accessible le microcrédit.  Concluant son  intervention, il a affirmé que les capacités productives nécessitaient une approche globale qui tienne compte des conditions socioéconomiques dans lesquelles elles doivent être renforcées.  Enfin, Joy Kategwa, d’Oxfam International, et qui s’exprimait au nom du Forum de la société civile, a déclaré qu’il y avait trois niveaux d’intervention possibles: les marchés, les champs et les usines, au-delà des marchés et des frontières.


Au cours d’un bref échange, la représentante de la Mauritanie a regretté que la question environnementale ait été complètement éludée du débat, d’autant que la plupart des PMA dépendent de l’exploitation de ressources naturelles et de l’extraction minière.  De son côté, celui du Tchad a déclaré que l’Afrique était un continent d’avenir, faisant le pari que les flux migratoires allaient s’inverser d’ici 20 à 30 ans, et que s’ils vont aujourd’hui du Sud vers le Nord, ils se feront alors du Nord vers le Sud.  Soulignant qu’il venait lui-même d’un PMA enclavé, il a rappelé que l’absence d’infrastructures routières dans son pays était dommageable au commerce national.  La pénurie d’eau et d’énergie est aussi un obstacle au développement d’un tissu industriel, a poursuivi l’intervenant.  Pour renforcer les capacités productives des PMA, il faut tenir compte de ces problèmes fondamentaux.  Selon le représentant du Luxembourg, le secteur de l’agriculture a été trop longtemps négligé.  Seul le renforcement de l’infrastructure agricole pourrait permettre de freiner les migrations massives en direction des villes, a-t-il ajouté.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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