LA SIXIÈME COMMISSION RECOMMANDE À L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE D’OCTROYER LE STATUT D’OBSERVATEUR À TROIS ORGANISATIONS
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Sixième Commission
10e séance – matin
LA SIXIÈME COMMISSION RECOMMANDE À L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE D’OCTROYER LE STATUT D’OBSERVATEUR À TROIS ORGANISATIONS
Elle poursuit son débat sur les questions de la protection diplomatique et de la responsabilité internationale en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses
La Sixième Commission (chargée des questions juridiques) a adopté ce matin trois projets de résolution* aux termes desquels l’Assemblée générale déciderait d’inviter à participer à ses sessions et travaux en qualité d’observateur la Commission de l’océan Indien, le Fonds de l’OPEP pour le développement international et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE). Siéger en qualité d’observateur aux débats de l’Assemblée générale permettrait à ces trois entités de renforcer leur coopération avec l’ONU dans les domaines de la croissance et du développement économiques.
Le Fonds de l’OPEP, créé en 1976, renforce l’aide financière aux pays en développement. Son domaine de coopération avec l’ONU porte notamment sur la promotion du développement économique, l’intégration sociale et l’étude du droit international. Pour sa part, la Commission de l’océan Indien œuvre en faveur des questions intéressant les petites économies vulnérables et a été désignée comme l’un des trois mécanismes régionaux de l’ONU pour la coordination des petits États insulaires en développement, tandis que l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est a pour objectifs d’accélérer la croissance économique, le progrès social et le développement culturel de la région, et de promouvoir la paix et la stabilité régionales. Sa coopération avec le PNUD à partir de 1967 s’est renforcée avec l’adoption, par l’Assemblée générale, de résolutions encourageant l’ANASE et l’ONU à définir d’autres domaines de coopération.
Les délégations se sont également penchées sur l’examen du rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa cinquante-huitième session. D’une manière générale, elles se sont félicitées de l’adoption par la CDI de 19 projets d’articles sur la protection diplomatique et de huit projets de principes sur la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, saluant ainsi le travail de codification et de développement progressif du droit international réalisé par la Commission.
Une question a suscité force remarques et rappels de la part de nombreuses délégations, notamment celles de la Chine, du Japon et des États-Unis, selon lesquelles la protection diplomatique est un droit de l’État de nationalité et non une obligation. L’Afrique du Sud s’est inquiétée des implications du projet d’article 19, nouvelle disposition qui prévoit qu’un État habilité à exercer sa protection diplomatique « devrait prendre dûment en considération la possibilité d’exercer sa protection diplomatique, en particulier lorsqu’un préjudice important a été causé ». Cette disposition est explicitée par le commentaire sur le projet d’article 2. « De nos jours, précise le commentaire, certaines législations nationaleset décisions judiciairesaccréditent l’idée que l’État a une obligation, aussi limitée soit-elle, en droit interne ou en droit international, de protéger ses nationaux à l’étranger lorsque leurs droits fondamentaux ont été gravement violés. » Pour le Royaume-Uni, une disposition comme celle contenue dans le projet d’article 19 n’a pas lieu d’être car elle risque de saper les règles du droit international coutumier. L’Allemagne pour sa part a estimé que le projet d’article 19, qui encourage les États à exercer cette protection, n’en affaiblit pas moins le projet d’article 2.
Certaines délégations ont apprécié l’étendue du champ d’application de la protection diplomatique aux apatrides et aux réfugiés. La Norvège a estimé très important de pouvoir fournir une protection diplomatique à ces personnes. Les pays nordiques auraient cependant préféré un critère plus large comme celui de « séjour légal » plutôt que celui de « résidence légale et habituelle » qui a été retenu. Pour le Portugal aussi, le critère de résidence légale et habituelle est une exigence trop sévère. Compte tenu de ces considérations et d’autres points encore sujets à discussion, plusieurs pays ont préconisé que la CDI poursuive l’examen de ce projet d’articles, avant éventuellement d’en faire une convention.
Intervenant sur le chapitre de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, le représentant des États-Unis a encouragé l’Assemblée générale à approuver les projets de principes adoptés par la CDI et exhorté les États à les mettre en pratique. À l’instar d’autres délégations, il a estimé que l’Assemblée générale ne devrait pas en faire une convention. La délégation argentine a en revanche affirmé son soutien à l’élaboration d’une convention qui imposerait à l’État l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer une indemnisation rapide et adéquate des victimes d’un dommage transfrontière découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international.
Outre ceux déjà cités, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Nouvelle-Zélande, Canada, Australie, République de Corée, Roumanie, France, Ukraine et Grèce.
La Sixième Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 26 octobre à 10 heures.
*Projets de résolution :
A/61/141 et A/C.6/61/L.3
A/61/487 et A/C.6/61/L.2
A/61/510 et A/C.6/61/L.4
RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE-HUITIEME SESSION (A/61/10)
Déclarations
M. HIROSHI TAJIMA (Japon) a félicité la Commission du droit international (CDI) d’avoir finalisé ses travaux sur la protection diplomatique et l’a remerciée pour ses projets d’articles sur la protection diplomatique des apatrides et des réfugiés, mais a rappelé que le rôle de la CDI est de codifier le droit international. C’est pourquoi, il s’est également félicité de ce que la Commission ait souligné la nature discrétionnaire des droits des États. La Commission, a-t-il ajouté, a indiqué qu’il existe un appui croissant pour ce qui est de l’obligation des États de protéger leurs ressortissants à l’étranger en cas de violation de leurs droits fondamentaux et, tout en comprenant ce qui sous-tend cette aspiration, a exprimé des doutes. S’agissant de la responsabilité internationale en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses, M. Tajima a félicité la Commission d’avoir adopté un projet de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses et a souligné que la Commission avait respecté ses tâches en la matière, à savoir la codification et l’élaboration du droit international. Il a ensuite reconnu que la clause de nation la plus favorisée joue un rôle considérable dans les activités économiques de la communauté internationale et a déploré que les projets d’articles adoptés par la Commission en 1978 n’aient pas été adoptés par l’Assemblée générale en raison de problèmes politiques. Il a donc exprimé des doutes quant à la reprise d’un débat sur cette question, jugeant que la Commission pouvait contribuer au renforcement du droit international dans de nombreux autres domaines.
M. DIRE TLADI (Afrique du Sud) a tout d’abord rappelé que, s’agissant de la protection diplomatique, l’Afrique du Sud appuie les travaux de la CDI, soulignant le bien-fondé du projet d’article 2, qui confère aux États le droit d’exercer la protection diplomatique. En vertu du droit international, a-t-il rappelé, il n’y a pas obligation pour un État d’assurer cette protection. Il a ensuite exprimé les préoccupations de son pays sur les implications du projet d’article 19 qui indique, selon le commentaire qui en est fait, qu’au regard du droit international ou national, l’État a pour obligation d’exercer la protection diplomatique, et bien que cet article ne soit pas contraignant, il pourrait être une porte ouverte à des abus de la part de nationaux qui forceraient des États parties à invoquer la protection diplomatique pour des revendications frivoles. Il a conclu en disant que l’Afrique du Sud assure la protection diplomatique de ses nationaux à l’étranger et qu’elle l’accorde également lorsqu’on la lui demande, mais qu’il s’agit là d’un droit et non pas d’une obligation. S’agissant du chapitre V du rapport de la CDI relatif à la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, le représentant de l’Afrique du Sud a appuyé une définition large des dommages, afin d’y inclure l’environnement mais s’est demandé qui, de l’État ou de la communauté, recevrait une indemnisation. Il a demandé à la Commission et aux États Membres d’étudier la question. Enfin, il a proposé que les projets de principe prévoient des clauses de limitation ou d’exclusion des responsabilités au cas où la victime ou la partie tierce aurait contribué aux dommages subis.
M. OSVALDO MARCICO (Argentine) s’est félicité de l’achèvement par la CDI de ses projets sur la protection diplomatique, les actes unilatéraux, la responsabilité des États et la fragmentation du droit international. Le chapitre 4 de son rapport sur la protection diplomatique, a-t-il ajouté, résume non seulement les pratiques coutumières des États sur les conditions de l’exercice de cette protection, mais inclut également des points sur l’élaboration progressive du droit international. Le représentant a rappelé que son pays approuvait la définition de la protection diplomatique faite au projet d’article premier et soutenait, comme cela est dit au projet d’article 2, le pouvoir discrétionnaire des États d’exercer cette protection ainsi que l’octroi de cette même protection aux apatrides et aux réfugiés. La délégation est favorable à l’élaboration d’une convention sur la base de ces projets d’articles mais préfère attendre la décision de l’Assemblée générale sur la responsabilité des États pour faits illicites. S’agissant de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, l’Argentine s’est félicitée du consensus en la matière auquel est parvenue la Commission après 25 ans d’études et a souligné qu’elle partageait l’approche conceptuelle reflétée par les projets de principes. Enfin, la délégation argentine a affirmé son soutien à l’élaboration d’une convention qui indiquerait que l’État a l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer une indemnisation rapide et adéquate des victimes de dommages transfrontières découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international.
M. ROLF EINAR FIFE (Norvège), s’exprimant au nom des cinq pays nordiques, a manifesté son appréciation quant à la rapidité avec laquelle la Commission du droit international (CDI) a achevé ses travaux sur la protection diplomatique. Ce projet parvient à un bon équilibre entre la codification et le développement progressif du droit international. Sur le projet d’article 2, selon lequel les États ont un droit et non un devoir d’exercer cette protection, il a précisé que l’exercice de ce droit doit se faire sans préjudice du droit consulaire. Sur le projet d’article 5, qui pose le critère de la continuité de la nationalité du ressortissant à l’égard de qui s’exerce la protection, il a apprécié la position de la CDI selon laquelle un État est en droit d’exercer la protection diplomatique à l’égard d’une personne qui avait sa nationalité de manière continue depuis la date du préjudice jusqu’à la date de la présentation officielle de la réclamation. En ce qui concerne le projet d’article 6, qui prévoit le cas de nationalités multiples, M. Fife a appuyé le principe posé par la Commission. Il a considéré, par ailleurs, très important de pouvoir fournir une protection diplomatique à l’égard des apatrides et des réfugiés (projet d’article 8). Le terme réfugié n’est pas limité à la définition de la Convention sur les réfugiés et à son protocole, a-t-il estimé, mais il aurait préféré une portée plus large. Les pays nordiques auraient en effet préféré un critère de « séjour légal » plutôt que celui de « résidence légale et habituelle ». Sur l’exercice de la protection diplomatique à l’égard des actionnaires, il s’est réjouit de la cohérence des dispositions du projet d’article 11 avec les décisions de la Cour internationale de Justice. S’agissant du projet d’article 18, qui vise le cas de la protection des équipages des navires, il a apprécié que les règles du droit de la mer soient respectées. Pour ce qui est du projet d’article 19, il lui a semblé équitable d’établir une pratique recommandée pour demander à l’État de transmettre à la personne lésée toute indemnisation obtenue, sous réserves des déductions raisonnables. M. Fife a conclu en souhaitant que le projet de texte sur la protection diplomatique soit rapidement adopté sous la forme d’une convention.
M. GEORG WITSCHEL (Allemagne) a considéré que le sujet de la protection diplomatique et celui de la responsabilité des États sont complémentaires. Alors que les règles régissant la responsabilité internationale déterminent les cas où un État peut être tenu responsable des ses actes, les règles de la protection diplomatique mettent en place un cadre juridique dans lequel une telle responsabilité peut être invoquée et mise en œuvre. C’est un cadre juridique comme un autre, selon le représentant qui a dit apprécier le projet d’article 16 envisageant les actions ou procédures autres que la protection diplomatique. Il s’est prononcé en faveur du projet d’article 2 qui prévoit un droit d’exercer cette protection diplomatique pour les États et non un devoir. Le projet d’article 19 qui encourage les États à exercer cette protection, a-t-il estimé, n’en affaiblit pas moins le projet d’article 2. Même au niveau national, si un État a l’obligation d’exercer cette protection diplomatique en vertu de sa constitution, il doit avoir une marge de manœuvre sur la façon dont il exercera cette obligation. M. Witschel a ensuite apprécié la définition de l’État de nationalité donnée au projet d’article 4, se disant en outre satisfait que la notion de « lien véritable » n’ait pas été retenue car elle aurait pu causer des difficultés à des millions de personnes qui n’ont pas la nationalité du pays qui les accueille.
Le représentant s’est félicité des dispositions du projet de texte relatives à la nationalité des personnes morales, jugeant cependant trop rigides les exceptions figurant à l’article 11 relatif à la protection des actionnaires. Pour ce qui est du projet d’article 15, qui prévoit les exceptions à la règle de l’épuisement de ces recours, notamment le cas où il n’y a pas de lien pertinent entre la personne lésée et l’État prétendument responsable à la date du préjudice, il a émis des doutes sur la réalité d’une pratique établie dans ce domaine. Quant au projet d’article 19, tout en appréciant l’analyse pertinente du commentaire qui l’accompagne, il a souhaité qu’il soit retiré du texte. On pourrait à la place introduire un commentaire pour le projet d’article 2 allant dans le même sens, a-t-il suggéré. En conclusion, le représentant a estimé que le projet n’est pas encore mûr pour être déjà adopté sous la forme d’une convention.
M. JOHN B. BELLINGER III (États-Unis) a rappelé que la Secrétaire d’État, Condoleezza Rice, était très reconnaissante à la CDI pour le travail important qu’elle accomplissait. Il s’est ensuite félicité du travail réalisé sur la protection diplomatique mais a ajouté que son pays ne jugeait pas utile d’adopter un instrument contraignant en la matière, et que, compte tenu du nombre de questions examinées dans les projets d’articles, il a estimé que durant la présente session, l’Assemblée générale devrait remercier la Commission pour son travail, prendre note des projets d’articles et des commentaires, et recommander que les gouvernements les examinent avec soin. Les États-Unis, a-t-il ajouté, ont accueilli avec satisfaction les changements apportés par la Commission visant à mieux refléter le droit international coutumier, ainsi que le commentaire au projet d’article 2 qui réaffirme que l’État n’a pas pour obligation d’exercer la protection diplomatique. De l’avis de son pays, a-t-il continué, les projets d’articles 5 et 10, et conséquemment 7 et 8, s’écartent du droit international coutumier, lequel doit refléter la pratique des États. Il s’est également félicité de la réaffirmation du projet d’article 14 qui pose le principe de l’épuisement des recours internes par la personne lésée. S’agissant de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international (responsabilité internationale en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses), le représentant a estimé que ces principes constituent une mesure positive encourageant les États à mettre en place des mécanismes permettant de verser rapidement des compensations aux victimes de dommages transfrontières. Soulignant qu’il n’existait pas de consensus sur la responsabilité et la répartition des pertes pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, le représentant encourage l’Assemblée générale à approuver ces principes, exhorte les États à les mettre en pratique mais a estimé que l’Assemblée générale ne devrait pas en faire une convention. Enfin, il a indiqué que la CDI devrait examiner en priorité des sujets tels que la protection des personnes en cas de catastrophe, mais a jugé moins utile le travail sur la protection des données personnelles sur les flux d’information transfrontières.
Mme ROSEMARY BANKS (Nouvelle-Zélande) a apporté son soutien au rôle central de la CDI dans la codification et le développement progressif du droit international. Elle a salué l’avancement significatif des travaux concernant plusieurs sujets, ainsi que les efforts des rapporteurs spéciaux. Sa délégation, a-t-elle ajouté, est favorable à une rétribution financière pour ces derniers. Le rôle traditionnel de la Commission a changé, a-t-elle fait remarquer, rappelant les contributions importantes qu’elle apporte. Pour que la Commission puisse s’adapter aux nouveaux défis, Mme Banks a suggéré qu’elle utilise de plus en plus les services d’experts extérieurs et collabore davantage avec d’autres organisations internationales. Abordant le sujet de la protection diplomatique, Mme Banks s’est félicitée de l’adoption du projet d’articles par la Commission. La codification de cette question est principalement résiduelle, a-t-elle noté, l’essentiel des principes provenant des traités sur les droits de l’homme. Mais à certains égards, la protection diplomatique pourra fournir la seule option en droit international pour assurer aux victimes une réparation de la part d’un État étranger. Pour la Nouvelle-Zélande, le texte final est bien équilibré. Mme Banks a relevé avec satisfaction que le projet d’article 1 n’inclut pas des démarches ou d’autres actions diplomatiques, comme le précise son commentaire. Elle a aussi apprécié la formulation, au projet d’article 19, de la pratique recommandée pour les États exerçant la protection diplomatique.
En ce qui concerne la responsabilité internationale pour dommages transfrontières, Mme Banks a salué l’excellent travail de la Commission qui a permis l’adoption des projets de principes. Elle a noté l’importance croissante du sujet depuis 25 ans, avec l’avancée des nouvelles technologies. Après avoir réglé la question de la prévention avec le premier projet de principes, il est important de savoir qui doit subir les pertes dans des circonstances où, malgré la prévention, des pertes ont quand même eu lieu. Elle a rappelé que le consensus sur cette question délicate a été longtemps difficile et a pu être trouvé sous forme de principes. Elle a souhaité que l’Assemblée générale entérine cet ensemble de principes, en exhortant les États à prendre des mesures d’application au niveau national.
M. ALAN KESSEL (Canada) après avoir félicité la Commission d’avoir achevé ses travaux sur un certain nombre de sujets -protection diplomatique, responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, actes unilatéraux des États- a rappelé que les membres de la Commission travaillent à titre personnel pour promouvoir le développement du droit international. Il s’est félicité en particulier de ce que le Rapporteur spécial chargé de la question ait dissipé la confusion entre protection diplomatique et assistance consulaire, et entre fonction diplomatique et fonction consulaire entre lesquelles il existe une distinction réelle sur le plan juridique. Par ailleurs, a-t-il ajouté, les dispositions du projet d’article 7 visant « le cas de nationalités multiples et la réclamation à l’encontre d’un État de nationalité » ont créé une certaine confusion dans un autre domaine du droit consulaire, car le Canada estime que le concept de nationalité dominante ne peut se prêter à définir l’obligation principale d’aviser les ressortissants étrangers de leur droit de communiquer avec leur consul.
M. DANIEL BETHLEHEM (Royaume-Uni) a félicité les membres de la CDI pour les importants travaux qu’elle mène et pour une année très productive. Il est clair que certaines questions seront mieux mises en valeur par l’élaboration d’une convention, tandis que pour d’autres il sera plus approprié d’adopter des projets d’articles. Dans ces derniers cas, il ne faut pas considérer que le travail de la Commission du droit international reste incomplet. En ce qui concerne les méthodes de travail, M. Bethlehem a apprécié la possibilité de faire des observations sur les activités de la Commission.
Abordant la question de la protection diplomatique, le représentant a remarqué que l’exercice de la protection diplomatique est une faculté discrétionnaire de l’État, ce qui est un principe cardinal. Il a salué les articles 5 et 10 qui instaurent une présomption de fait réfrangible en ce qui concerne la nationalité continue. Sur les projets d’articles 6 et 7, il a regretté que ces dispositions dévient de la pratique. Concernant le projet d’article 8, il a considéré qu’il s’agit de dispositions de lex ferenda. Dès lors la référence au projet d’article 8 faite au projet d’article 3 n’est pas, selon lui, conforme au droit international coutumier. Pour ce qui est du projet d’article 15, sur les recours internes, il a jugé que cette clause constitue un exercice de développement progressif du droit international. Enfin, une disposition comme celle contenue dans le projet d’article 19 n’a pas lieu dans le projet de texte sur la protection diplomatique, selon le représentant, surtout s’il est adopté sous forme de convention. Le droit d’exercer la protection diplomatique est discrétionnaire, a-t-il réaffirmé. Ce projet d’article 19 risque donc de saper les règles de droit international coutumier. Sur la forme que devrait prendre le projet, il a rappelé le large réservoir de pratiques nationales en vigueur. Nous ne pensons pas qu’il soit utile dès maintenant de passer à une convention, ce qui risquerait de saper le travail de consolidation et de commentaires. Il est donc favorable à donner un certain délai aux États à cet effet.
Passant à la question de la responsabilité internationale, le représentant a salué les projets de principes élaborés pour faire face aux dommages transfrontières. Il est favorable à une forme non contraignante du texte final. Il y a en effet plusieurs aspects qui ne correspondent pas au droit international coutumier et qui sont trop généraux pour devenir lex feranda, a-t-il souligné. Il a indiqué que des commentaires plus précis de sa délégation sur ces deux sujets sont développés dans une déclaration écrite.
Mme MIA GOLDSMITH (Australie) a salué l’achèvement des projets d’articles sur la protection diplomatique, lesquels complèteront les travaux de la Commission sur la responsabilité des États. Le Gouvernement australien est déterminé à assurer à ses citoyens les services consulaires appropriés, lesquels ont une fonction préventive, mais en cas de dommages transfrontières résultant de faits illicites, la protection diplomatique est un remède potentiel important. L’Australie convient, avec la Commission du droit international, que l’exercice de la protection diplomatique est un droit et non pas une obligation. Notant la recommandation faite par la Commission à l’Assemblée générale d’élaborer une nouvelle convention sur la base de ces projets d’articles, la représentante de l’Australie a jugé préférable de ne pas s’engager sur cette voie. Elle s’est ensuite félicitée de l’achèvement des travaux de la Commission sur la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international et a noté que les projets de principes y afférents constituent un mélange de codification et d’élaboration progressive du droit international sur l’environnement. La Commission a évité la difficulté qu’aurait constituée toute tentative d’harmoniser les législations nationales et les systèmes juridiques. Mme Goldsmith a enfin proposé que les États prennent le temps d’examiner ces projets de principes avant de prendre une décision y relative.
M. KIM SUN-PYO (République de Corée) a noté que le développement des droits de l’homme sur la scène internationale a conduit à agrandir le bouclier de l’État pour protéger ses ressortissants. Il a approuvé le projet d’articles sur la protection diplomatique de façon générale. Sur la continuité de la nationalité (projet d’article 5), il a considéré que l’État nouvellement indépendant du statut de colonie devrait pouvoir exercer la protection diplomatique à l’égard de la puissance coloniale pour des dommages causés avant l’indépendance, comme exception à la règle générale. Concernant le projet d’article 7 (nationalités multiples), il a jugé qu’il s’agit d’une règle générale de droit international selon laquelle un État ne doit pas présenter une réclamation d’un national ayant plusieurs nationalités à l’encontre d’un autre État de sa nationalité. S’agissant du projet d’article 11 (protection des actionnaires), il a souligné que les dispositions prévues établissent une règle fondamentale de protection des actionnaires, conforme à la décision Barcelona Traction de la Cour internationale de Justice. Il a rappelé cependant les critiques qui avaient eu lieu après cette décision, en vue de l’amélioration du sort des actionnaires. Il a enfin jugé le projet d’article 16 inapproprié et répétitif.
Concernant le projet de principes sur la responsabilité internationale, le représentant a trouvé qu’on ne sait pas quand on peut parler de dommage significatif et qui décide de ce caractère significatif. On ne comprend pas non plus si l’indemnisation à la clause 2 du projet de principe 4 résulte en vertu d’une « responsabilité stricte » ou d’une « responsabilité absolue ». Pour ce qui est du projet de principe 6, sur les recours internes et internationaux, il a fait observer que cela risque de créer des différends entre États lorsque ces États ne s’entendent pas sur la réparation.
M. COSMIN DINESCU (Roumanie) a souligné que le chapitre du rapport de la CDI consacré à la protection diplomatique correspond à l’approche adoptée par son pays sur la question. Il a appuyé la formulation du projet d’article 2 concernant le droit, et non pas l’obligation, en ce qui concerne l’exercice de la protection diplomatique, mais indiqué que sa lecture à la lumière du projet d’article 19 recommandant toutefois aux États d’exercer au besoin ce droit, représente une avancée importante en la matière. S’agissant de la continuité de la nationalité de la personne physique, il a averti qu’il fallait se garder des abus de la part de personnes qui changeraient de nationalité pour acquérir celle d’un État plus à même de présenter une réclamation pour son compte. Il a ensuite souligné l’importance du projet d’article 8, à savoir l’extension de la protection diplomatique aux apatrides et aux réfugiés. La Roumanie, a-t-il ajouté, appuie l’adoption d’une convention sur la protection diplomatique. S’agissant de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, la Roumanie a appuyé l’adoption d’une résolution de l’Assemblée générale pour en avaliser les principes et a jugé opportun d’encourager la conclusion d’accords bilatéraux ou régionaux dans ce domaine. La délégation roumaine a également appuyé l’inscription de la question sur la protection et souligné que d’une manière générale, les règles proposées sont assez souples pour répondre à la diversité des régimes juridiques nationaux. Elle s’est félicitée de la mise à charge des États de l’obligation d’assurer une indemnisation prompte et adéquate aux victimes de dommages transfrontières, ce qui permet de retrouver le principe « pollueur-payeur », l’objectif étant de faire peser sur l’exploitant la responsabilité principale sans exonérer les États de leurs obligations en vertu du droit international.
M. LUIS SERRADAS TAVARES (Portugal) s’est félicité de l’achèvement des travaux de la CDI sur les sujets de la protection diplomatique et de la responsabilité internationale. Pour les sujets à venir, il s’est dit en faveur de l’étude par la CDI de « l’immunité des représentants des juridictions pénales étrangères », mais a émis des doutes sur la maturité des autres sujets. Concernant les méthodes de travail, il a noté que les débats interactifs avec les rapporteurs spéciaux n’ont pas vraiment été couronnés de succès. Une nouvelle commission va être mise en place avec les élections à venir et il a espéré que cela sera l’occasion de réfléchir plus sur ces questions.
Concernant le sujet de la protection diplomatique, le représentant portugais, tout en comprenant les préoccupations exprimées sur l’étendue du champ d’application, a estimé que la CDI devrait prendre note de la relation entre la protection fonctionnelle donnée par une organisation internationale et celle des États, et définir le critère pour établir qui a priorité pour exercer ce droit. Le sujet est un sujet de codification, mais le développement progressif aurait pu être inclus, a-t-il estimé. Les critères traditionnels de protection diplomatique sont bien repris dans les articles, ainsi que le caractère discrétionnaire du droit pour l’État d’exercer la protection diplomatique, a poursuivi M. Tavares. S’agissant de la protection prévue pour les apatrides et les réfugiés, il a estimé que le critère de résidence légale et habituelle est une exigence trop sévère.
Sur les articles 11 et 12, M. Tavares a pensé que la protection des actionnaires est peut-être trop généreuse, notant que l’affaire Barcelona Traction est la seule source de rédaction des dispositions pertinentes. Est-ce qu’un actionnaire devrait bénéficier d’une protection spéciale en sa qualité d’actionnaire autre que celle dont il bénéficie en tant que ressortissant ? Il faut vérifier avant tout que l’actionnaire est déjà protégé par les traités sur les investisseurs, a-t-il fait remarquer.
M. Tavares a remercié le Rapporteur spécial sur la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international pour avoir conclu ses travaux. Sur la forme définitive du projet, il a souhaité qu’on se place dans un contexte historique. Il ne faut pas avoir peur de lancer une initiative de développement dans ce domaine essentiel. Le représentant a considéré qu’on aurait dû prévoir un projet d’articles et non un projet de principes. Si le projet d’articles sur la prévention met à la charge de l’État une obligation de prévention, il faudrait prévoir une obligation pour réparer les conséquences préjudiciables découlant d’activités non interdites par le droit international. De l’avis du représentant, il faudrait adopter une déclaration de principes, en laissant une certaine marge pour le développement de la jurisprudence. Concernant la réparation des victimes (projet de principe 4), il a jugé opportun de prévoir une responsabilité partagée subsidiaire de l’État d’origine.
Mme EDWIGE BELLIARD (France) a rappelé qu’alors que s’achève le mandat quinquennal de ses membres, la CDI présente cette année un rapport témoignant de l’ampleur et de la richesse de l’œuvre qu’ils ont accomplie depuis 2001. Elle a souligné le mérite des projets de principe sur la répartition des pertes en cas de dommages transfrontières découlant d’activités dangereuses. Ces projets traitent en effet d’une question dont l’importance et l’actualité n’échappent à personne, alors même que le phénomène des activités dangereuses est fondé sur l’appréhension de la notion de risque qui suscite des appréciations divergentes. Elle a considéré que ce projet correspond à ce qui pouvait être attendu de la Commission sur un sujet aussi mouvant, en attirant l’attention des États Membres sur des aspects spécifiques d’une question complexe. En revanche, le projet lui a semblé difficilement acceptable en l’état lorsqu’il emploie une terminologie propre au droit de la responsabilité pour fait internationalement illicite.
Abordant le chapitre relatif aux actes unilatéraux des États, Mme Belliard a rappelé que la Commission a restreint l’étude au sujet des « déclarations formelles formulées par un État dans l’intention de produire des obligations en vertu du droit international ». De l’avis de sa délégation, les principes retenus ont le mérite de réunir des éléments ancrés de manière éparse dans la jurisprudence internationale. Ces principes peuvent parfois prêter à discussion, notamment en ce qui concerne la question de la rétractation arbitraire, a-t-elle jugé. Mais sur le fond, la représentante a considéré comme essentiel que la CDI ait réitéré le lien déterminant qui unit la notion d’acte unilatéral à l’intention exprimée par l’État.
Mme Belliard a ensuite fait part de ses interrogations concernant les méthodes de travail de la Commission sur le sujet de la fragmentation du droit international, notant qu’elle n’y a consacré que trois séances et a donc simplement pris note des conclusions du groupe d’étude. Elle a relevé que la CDI n’a été que le réceptacle temporaire d’une étude conduite en marge de ses débats et a donc souhaité s’abstenir de commentaires.
Abordant la question de la protection diplomatique, Mme Belliard a apprécié l’aboutissement des travaux et l’adoption en seconde lecture des projets d’articles. Pour mesurer les apports de ce texte, elle a rappelé que la CDI avait présenté, en 2001, le texte final de ses articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite, que le projet sur la protection diplomatique vient compléter. La CDI a procédé à une codification bienvenue des traits les plus saillants du mécanisme, selon la représentante. Le texte fournit ainsi des précisions équilibrées sur l’exercice de la protection diplomatique par l’État de nationalité des personnes physiques ou encore sur l’épuisement des recours internes et les exceptions à cette règle. Le projet de texte soulève également des difficultés, selon la délégation française. À certains égards, la Commission semble perdre de vue la spécificité de son sujet, qu’elle tend à élargir par le traitement de questions relevant d’autres branches du droit. Plusieurs dispositions sont empreintes d’une logique plus proche de celle qui caractérise la protection juridique des droits de la personne humaine que de celle qui doit régir la protection diplomatique. Paradoxalement, la CDI ne traite pas du sujet sous tous ses aspects, a-t-elle aussi considéré. Elle a opté pour la rédaction de l’article 11 qui avait été adoptée en première lecture, dans la mesure où elle reflétait mieux l’arrêt Barcelona Traction de la CIJ. Mme Belliard a enfin évoqué la perspective d’une convención internationale qui permettrait d’harmoniser les pratiques en la matière.
Mme OKSANA PASHENIUK (Ukraine) a estimé que la protection diplomatique est une question du droit international qui se prête à la codification et c’est pourquoi elle s’est interrogée sur le rôle que ce régime juridique pourrait encore avoir, compte tenu de la mise en place d’un système sur les droits de l’homme. Elle a rappelé cependant que les affaires portées devant la Cour internationale de Justice illustraient l’importance de la protection des personnes. Elle s’est félicitée de la décision de la Commission du droit international de fonder ses projets d’articles sur des principes et sur des normes secondaires régissant la protection diplomatique. Elle a ensuite indiqué que le travail de la Commission avait, semble-t-il, porté seulement sur le droit d’un État à faire certaines réclamations dans l’intérêt de ses nationaux, mais qu’à ce droit, correspond l’obligation des autres États d’accepter ces réclamations. Le statut de la responsabilité des organisations internationales posant problème, la représentante a jugé préférable de se concentrer sur les États afin de mettre en place un régime juridique gérable. Elle a signalé ensuite que la question des relations entre une personne dont les droits sont protégés et l’État qui exerce le droit de protection diplomatique mérite d’être examinée. Après avoir indiqué que la notion de réfugiés utilisée dans le projet d’article 8 dépassait le champ d’application de la Convention sur le statut des réfugiés, et émis des réserves quant au projet d’article 9, la représentante a conclu en réaffirmant l’intérêt de son pays pour le travail de la Commission dans le domaine de l’élaboration et de la codification du droit international, en particulier pour ce qui est de la protection diplomatique.
Mme FANI DASCALOPOULOU-LEVADA (Grèce) a noté les progrès accomplis par la CDI tout d’abord sur le sujet de la protection diplomatique. Les problèmes qui y sont traités ont déjà abordés par d’autres instruments mais il était temps que la lex specialis soit codifiée. Nous acceptons de façon générale ce qui est proposé dans le projet d’articles, a indiqué Mme Dascalopoulou-Levada. En ce qui concerne le projet d’article 9, qui dispose que l’État de nationalité d’une société est celui dans lequel elle a été constituée, la représentante a relevé qu’en vertu de ces dispositions, ce ne sera que dans de rares occasions que l’État de la nationalité de la société aura à exercer la protection diplomatique. Concernant les recours locaux, elle averti de risques sérieux de chevauchement entre les recours. L’exception à l’alinéa semble tiré par les cheveux à moins de lire le commentaire, a-t-elle remarqué. En ce qui concerne les projets d’articles 16 (question des actions ou procédures autres que la protection diplomatique) et 17 (règles spéciales du droit international), il n’y a aucune raison selon elle de les traiter différemment. Elle a donc souhaité qu’ils soient fusionnés. En ce qui concerne la protection des équipages des navires, la Grèce n’accepte pas que l’État du pavillon ne présente pas une protection diplomatique stricto sensu. Elle a enfin accepté la pratique recommandée de la protection diplomatique figurant au projet d’article 19. Sa délégation estime que le texte final devrait revêtir la forme d’une convention.
Abordant ensuite la question de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, Mme Dascalopoulou-Levada a félicité la CDI pour ses travaux sur ce sujet difficile. Le projet de principes, selon elle, devrait s’appliquer non seulement aux dommages transfrontières mais aussi pour le patrimoine commun. En ce qui concerne le principe 4, elle a noté que son paragraphe 2 établit un régime de responsabilité stricte sans tenir compte de la faute. Or, a-t-elle regretté, ces dispositions atténuent le principe du pollueur-payeur. Le terme catégorie particulière d’activités dangereuses, utilisé dans le projet de principe 7, devrait être complété, a-t-elle suggéré. L’ensemble des projets de principes devrait constituer la teneur d’une convention cadre, a-t-elle estimé, convaincue qu’un tel instrument fournirait les directives requises pour éviter la fragmentation du droit international et pour parvenir à établir un équilibre dans l’ordre juridique international.
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