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AG/J/341

ACCORD EN SIXIEME COMMISSION SUR LA CREATION D'UN COMITE SPECIAL SUR LES IMMUNITES JURIDICTIONNELLES DES ETATS ET DE LEURS BIENS

16 novembre 2000


Communiqué de Presse
AG/J/341


ACCORD EN SIXIEME COMMISSION SUR LA CREATION D'UN COMITE SPECIAL SUR LES IMMUNITES JURIDICTIONNELLES DES ETATS ET DE LEURS BIENS

20001116

La Sixième Commission a adopté ce matin, sans vote, un projet de résolution sur la question des immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens, aux termes duquel l’Assemblée générale déciderait d’établir un Comité spécial sur cette question aux fins de consolider les points de convergence et de régler les questions en suspens, l’objectif étant d’élaborer un instrument susceptible d’emporter l’adhésion générale sur la base du projet d’articles relatifs aux immunités juridictionnelles adopté par la Commission du droit international à sa quarante-troisième session, et des discussions et conclusions du Groupe de travail à composition non limitée de la Sixième Commission créé en application des résolutions 53/98 et 54/101. Elle déciderait que le Comité spécial se réunira pour une durée de deux semaines en mars 2002.

Pour l’examen de ce point, la Commission était saisie d'un rapport du Secrétaire général et d'un rapport du Président du Groupe de travail sur la question, qui s'était réuni la semaine dernière.

Les représentants des pays suivants se sont exprimés: Colombie, au nom du Groupe de Rio, Cuba, Chine, Ukraine, Royaume-Uni, Slovaquie, France, Grèce et Belgique. Tous ont estimé que les travaux avaient bien progressé dans le cadre du Groupe de travail, en raison du climat très positif qui y a présidé. Ils ont rappelé l'importance de la question, en raison notamment de ses conséquences sur les relations commerciales des Etats, qui exigent une certaine prévisibilité. Un système uniforme d'immunités juridictionnelles fournirait aux Etats et aux entités privées des certitudes et des garanties en cas de litige et encouragerait donc le commerce international, a noté le représentant de l'Ukraine.

Le Président du Groupe de travail avait identifié cinq questions posant problème: la notion d'Etat aux fins de l'immunité, les contrats de travail, la notion d'entreprise d'Etat ou autre entité d'Etat en matière de transactions commerciales, les critères à appliquer pour déterminer le caractère commercial d'un contrat ou d'une transaction, et les mesures de contrainte contre les biens appartenant à un Etat. Le représentant de la Slovaquie a estimé qu'on était vraiment proche d'un accord sur les trois premiers points.

Il faut en tout cas harmoniser les lois nationales. A l'heure actuelle, celles-ci diffèrent substantiellement d'un Etat à un autre, a déclaré le représentant de la Slovaquie, pour qui on peut observer un éventail très large de positions allant de la doctrine de l'immunité absolue à des doctrines beaucoup

plus restrictives. Le représentant de l'Ukraine a toutefois estimé que ces différences ne sont en fait pas aussi grandes qu'il y paraît: lors des travaux au sein du Groupe, même les Etats qui avaient d'abord insisté sur le caractère absolu des immunités juridictionnelles acceptent aujourd'hui des concepts plus limités, a-t-il affirmé. Les représentantes de la Grèce et de Cuba ont elles aussi noté que la pratique était en évolution, s'éloignant de plus en plus du principe du jure imperii (immunité absolue) pour aller vers celui du jure gestionis.

Pour la représentante de Cuba, le projet d'articles devra réaffirmer le principe général que tout Etat, pour lui-même et pour ses biens, bénéficie de l'immunité de juridiction face aux tribunaux étrangers, sauf pour les exceptions qui seraient prévues. Il faut aussi partir du principe que l'obligation de respecter les immunités juridictionnelles est une obligation internationale.

La question de la forme finale du projet a été également discutée et le représentant de la Slovaquie a constaté qu'elle avait même contribué quelque peu aux blocages. Lui s'est prononcé en faveur d'une convention contraignante, tout comme les représentants de la Colombie, au nom du Groupe de Rio et de l'Ukraine. La représentante du Royaume-Uni a, quant à elle, estimé qu'il ne fallait préjuger de la forme juridique finale du projet d'articles. La représentante du Canada a émis la même opinion avant l'adoption du projet de résolution sur la question, se prononçant même pour un instrument de forme plus souple, comme des lignes directrices.

Par ailleurs, la Commission a examiné le point de son ordre du jour relatif à "la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession d'Etats", et adopté, sans vote, un projet de résolution aux termes duquel l'Assemblée générale prendrait note des articles sur le sujet présentés par la Commission du droit international sous la forme d’une déclaration et inviterait les gouvernements à tenir compte des dispositions figurant dans l’annexe.

Enfin, la Commission a adopté un projet de résolution relatif à la révision du Statut du tribunal administratif des Nations Unies, présenté par le Royaume- Uni, aux termes duquel l’Assemblée générale déciderait d’apporter un certain nombre de modifications au Statut du tribunal, avec effet au 1er janvier 2001. Le nouveau Statut du tribunal est annexé au projet de résolution.

La Sixième Commission reprendra ses travaux cet après-midi à 15 h 30. Elle entendra la présentation du rapport de décision concernant l'octroi à l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale du statut d'observateur auprès de l'Assemblée générale. Elle examinera également un nouveau point inscrit à son ordre du jour: l'octroi à la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale du statut d'observateur auprès de l'Assemblée générale.

LA NATIONALITE DES PERSONNES PHYSIQUES EN RELATION AVEC LA SUCCESSION D’ETATS

Présentation du projet de résolution A/C.6/55/L.16

Le représentant de l'Equateur a présenté le projet de résolution A/C.6/55/L.16 sur la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession d'Etats. Il a indiqué que deux séances de consultations officieuses ont eu lieu. Beaucoup de délégations ont appuyé la déclaration sur le sujet, tandis que d'autres ont préféré faire un pas moins décisif, a-t-t-il précisé. Certains autres encore ont souhaité qu'une convention soit adoptée en temps opportun. Il a indiqué qu'un accord a pu toutefois se réaliser sur le projet de résolution qui comporte un préambule, un dispositif et une annexe comprenant le texte du projet d'articles.

Explication de position

La représentante de la Slovénie a rappelé que son pays s'est déjà expliqué sur les problèmes posés par le projet de résolution. La Slovénie est en faveur du projet, qui est meilleur que celui proposé l'an dernier, a-t-elle ajouté. Mais, il y a deux ans et encore l'an dernier, la Slovénie avait mis l'accent sur la pratique des Etats dans sa région. Or, le texte fixe d'autres règles. Il est donc entendu que pour la Slovénie, la résolution servira de ligne directrice pour la pratique en la matière et ne représente en aucune façon une contrainte pour les Etats qui ont choisi une voie différente en matière de législation.

Adoption du projet de résolution A/C.6/55/L.16

La Commission a adopté sans vote le projet de résolution A/C.6/55/L.16, relatif à la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession d’Etats, aux termes duquel l'Assemblée générale prendrait note des articles sur la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession d’Etats présentés par la Commission du droit international sous la forme d’une déclaration dont le texte est joint en annexe à la présente résolution et inviterait les gouvernements à tenir compte, selon qu’il conviendra, des dispositions figurant dans l’annexe concernant les questions liées à la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession d’Etats. Elle déciderait d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa cinquante-neuvième session une question intitulée «La nationalité des personnes physiques en relation avec la succession d’Etats».

CONVENTION SUR LES IMMUNITES JURIDICTIONNELLES DES ETATS ET LEURS BIENS

DOCUMENTATION

Rapport du Secrétaire général sur la Convention sur les immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens (A/55/298)

Le présent rapport est établi en application de la résolution 54/101 de l'Assemblée générale, en date du 9 décembre 1999, et intitulée «Convention sur les immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens». Par cette résolution, l’Assemblée générale avait invité les Etats à présenter au Secrétaire général leurs observations sur le projet de convention sur les immunités juridictionnelles.

Le rapport contient le texte des réponses reçues au 15 août 2000. Ces réponses ont été fournies par les Etats suivants: Arabie saoudite, Chili, Jamahiriya arabe libyenne et Pakistan.

Rapport du Président du Groupe de travail (A/C.6/55/L.12)

Le rapport rappelle que le Groupe de travail a tenu six réunions entre le 6 et le 10 novembre 2000, sous la présidence de M. Gerhard Hafner (Autriche). Il résume l'échange de vues général fait à cette occasion et énonce ensuite les cinq questions substantielles encore en suspens. Il s'agit de la notion d'Etat aux fins de l'immunité, des critères à appliquer pour déterminer le caractère commercial d'un contrat ou d'une transaction, de la notion d'entreprise d'Etat ou autre entité d'Etat en matière de transactions commerciales, des contrats de travail, et enfin des mesures de contrainte contre les biens appartenant à un Etat. Le rapport aborde ensuite la question des travaux futurs sur le sujet et présente des suggestions du Président du Groupe de travail.

DEBAT

MME MIRZA CRISTINA GNECCO (Colombie, au nom des Etats membres du Groupe de Rio) a rappelé que l'Etat doit avoir une immunité absolue, critère qui est aussi retenu par les tribunaux. Cependant, a-t-elle relevé, les critères de distinction se révèlent difficiles d'application dans la pratique, comme l'a révélé la jurisprudence. Dès lors, la codification au plan universel est très importante. Le Groupe de Rio estime indispensable de définir les critères à appliquer. Elle a expliqué que la CDI est arrivée à adopter un projet final d'articles et que le Groupe de Rio a appuyé ce projet. Les questions en suspens sont recensées mais il n'y a pas encore de solution pour tous les problèmes. Elle a remercié le professeur Hafner pour le travail accompli et a noté les progrès importants réalisés au cours des négociations.

Le Groupe de Rio est partisan d'une convention, a-t-elle déclaré, car un tel instrument permettra de régler les différents conflits qui ne manquent pas dans la pratique. Elle a aussi appuyé la proposition du Danemark et la création d'un groupe spécial sur le sujet afin de régler les questions de fond et éventuellement prévoir une conférence internationale. Le Groupe de Rio s'engage à apporter sa coopération en vue de mener à bien ce processus.

MME CUETO (Cuba) a déclaré que la question de ce jour est particulièrement intéressante et pertinente. La proposition d'élaborer une convention internationale sur les immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens s’est révélée dès le début intéressante et nécessaire. Cuba est d'accord avec la décision de la Sixième Commission de créer un Groupe de travail sur la question. Cuba a participé avec intérêt aux discussions de la dernière session du Groupe de travail, qui, a-t-elle estimé, a oeuvré dans un climat industrieux et constructif. Cuba présentera dans un proche avenir des observations plus détaillées sur chacune des cinq questions identifiées dans le rapport du Président.

Pour Mme Cueto, il faut partir de l'idée que la question des immunités juridictionnelles est un sujet en constante évolution, qui a été affecté par les innovations apparues au plan de la législation et de la pratique des Etats. Manifestement, la pratique évolue de plus en plus du principe du jure imperii au jure gestionis. Toutefois, le projet d'articles devra réaffirmer le principe général que tout Etat, pour lui-même et pour ses biens, bénéficie de l'immunité de juridiction face aux tribunaux étrangers, sauf pour les exceptions qui seraient prévues par la convention. Il faut aussi partir du principe que l'obligation de respecter les immunités juridictionnelles est une obligation internationale. Cela contribuerait à réaffirmer le principe que l'immunité de juridiction est un droit de l'Etat, a expliqué la représentante.

Il doit y avoir un équilibre entre le principe de la souveraineté de l'Etat et les intérêts qui interviennent quand un particulier conclut une transaction avec un Etat, a affirmé Mme Cueto. On pourrait à cet égard faire la distinction entre les actes ayant un caractère souverain, public ou gouvernemental, et ceux qui ont un caractère commercial ou privé. La question des mesures de contrainte mérite un examen particulier en raison de sa complexité. Cuba souscrit au principe général selon lequel les mesures de contrainte ne peuvent être décrétées que dans le cadre d'un processus judiciaire, ce qui impliquerait que ledit Etat se soumette à ce processus. Il faut partir du principe de l'interdiction de ces mesures de contraintes, en prévoyant la possibilité d'exceptions à ce principe.

Il est préoccupant que les relations internationales aient recours à des procédures coercitives incompatibles avec le droit international, a déclaré la représentante. Par exemple, il est préoccupant qu'un Etat puisse imposer des dommages punitifs à un autre Etat et faire saisir les biens de celui-ci se trouvant sur son territoire. Cuba appuie l'idée d'une convention internationale et exprime l'espoir que la Commission du droit international et la Sixième Commission seront en mesure de promouvoir l'adoption d'une convention internationale qui aurait l'avantage de refléter les domaines où il existe un accord international et de déterminer le plus précisément possible ce qu'est une immunité de juridiction, avec les exceptions éventuelles.

M. GUAN JIAN (Chine) a relevé que la création d'un système d'immunité des Etats et de leurs biens universellement applicable est une question complexe en droit international. Il a considéré que le projet d'articles de 1991 sur le sujet constitue une base en vue de l’élaboration d’un instrument juridique dans la mesure où il tient compte des théories, des lois et des pratiques judiciaires de divers pays. Il a noté trois problèmes majeurs qui demeurent, à savoir: la nature commerciale ou non d'un contrat ou d'une transaction, les rapports entre un Etat et une entreprise d'Etat et les mesures de contrainte. Sur la question des critères, il estime qu'il faut d'abord examiner la nature des transactions, puis l'objectif visé par celles-ci comme critère complémentaire. Cela devrait permettre de résoudre tout problème juridique résultant des différences entre les législations des pays. Une situation équilibrée résulterait ainsi du projet de 1991 s'il était maintenu, car il ne compromet pas la juridiction d'un Etat sur un contrat commercial d'Etat.

En ce qui concerne les entreprises d'Etat, il a fait observer qu'elles ne sont pas uniques et qu'elles n'existent pas que dans certains pays. En outre, les biens de ces entreprises peuvent prendre différentes formes. En Chine, a-t-il expliqué, ces biens peuvent être possédés par des personnes physiques ou des personnes morales, sans que l'Etat n'en soit propriétaire. Selon la loi chinoise, les entreprises d'Etat ont le droit de disposer de leurs biens et sont indépendantes les unes des autres. Le Gouvernement chinois estime que l'article 10 paragraphe 3 du projet de 1991 doit être retenu car il ne crée pas d’avantages pour les entreprises d'Etat ou pour l'Etat.

S'agissant des mesures de contrainte, le représentant de la Chine a estimé que ces mesures ne peuvent être imposées qu'avec l'accord de l'Etat sur le territoire duquel se trouvent les biens et doivent être limitées. Il est favorable à la période de grâce de deux ou trois mois qui est prévue pour que l'Etat applique ces règles. Enfin, il a rappelé l'importance de la question et a souhaité que des résultats concrets soient atteints.

M. MARKIYAN KULYK (Ukraine) a estimé que des progrès sur la question des immunités juridictionnelles ont été réalisés lors de la session du Groupe de travail. La question est importante, a-t-il affirmé, car elle a une influence directe sur les activités des Etats dans différents domaines, dont les transactions commerciales, pour lesquelles la prévisibilité est indispensable.

Au sein du Groupe de travail, les efforts de codification ont pris un élan nouveau, a déclaré le représentant. L'Ukraine appuie la création d'un Comité ad hoc, visant à l'élaboration d'un instrument juridique généralement acceptable. L'Ukraine est favorable à ce que cet instrument prenne la forme d'une convention internationale. Cette idée est réaliste et réalisable, a affirmé M. Kulyk, pour qui il existe suffisamment de coutumes et de pratiques pour rendre possible une codification sur la question des immunités juridictionnelles. Certes, il existe et il existera toujours des différences dans la pratique entre les Etats. Mais, en fait, ces différences ne sont pas aussi grandes qu'il y paraît. Lors des travaux au sein du Groupe, même les Etats qui avaient d'abord insisté sur le caractère absolu acceptent aujourd'hui des concepts plus limités, a-t-il affirmé. Un système uniforme d'immunités juridictionnelles donnera aux Etats et aux entités privées des certitudes et des garanties en cas de litige et encouragera donc le commerce international. L'Ukraine est fortement engagée dans la recherche de solutions équilibrées pour parvenir à un instrument acceptable. Le texte du projet de résolution représente clairement une approche pragmatique et souple de la question et il est souhaitable qu'une telle approche persiste, a conclu M. Kulyk.

MME BURNETT (Royaume-Uni) a noté les progrès accomplis par le Groupe de travail, mais aussi l'importance des travaux qui restent à accomplir. En ce qui concerne la définition de l'Etat en matière d’immunités, elle s’est félicitée des clarifications proposées par le Président pour la cinquième partie du rapport. A son avis, il est important que les entités auxquelles il est fait référence aient non seulement la capacité d'agir, mais agissent effectivement en fonction de cette capacité. Sur la question importante des critères permettant de déterminer le caractère commercial ou non d'un contrat ou d'une transaction, il a noté que les variantes ont été réduites mais que subsistent encore des divergences, ainsi que sur les questions relatives aux contrats de travail.

La question relative aux biens d'Etat est fondamentale, selon elle, et l'instrument qui sera adopté doit offrir une bonne base sur laquelle pourront reposer les jugements. Elle est favorable à des lignes directrices ou une Loi- type. Pour ce faire, elle a recommandé que le Comité spécial travaille sur un instrument dont la forme et le contenu sont acceptables pour tous. Elle a souligné enfin l'importance de prendre comme base de travail les rapports du Président du Groupe de travail de la Sixième Commission et ceux du Groupe de travail de la Commission du droit international, pour ne pas perdre les acquis. M. DRAHOSLAV STEFANEK (Slovaquie) a déclaré que la question des immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens est d'une nature très concrète. Les organes et représentants des Etats, en particulier dans les missions diplomatiques et consulaires, sont confrontés quotidiennement à des situations mettant en jeu la question des immunités. L'absence de normes contraignantes et généralement acceptées au niveau international crée une incertitude juridique considérable. Il est donc nécessaire d'harmoniser les lois nationales, qui diffèrent substantiellement d'un Etat à un autre. Actuellement, on peut observer un éventail très large de positions, allant de la doctrine de l'immunité absolue à des doctrines beaucoup plus restrictives, a-t-il rappelé.

La question est de savoir comment remédier à cet état de fait, a remarqué M. Stefanek. Or, la question de la forme que devra prendre le futur instrument juridique a été largement discutée et a même contribué aux divergences entre Etats. La Slovaquie souhaite l'adoption d'un instrument juridique contraignant, à savoir une convention internationale. En même temps, elle demande que le travail porte désormais sur le contenu du projet.

M. Stefanek s'est dit très satisfait de la conduite des délibérations dans le cadre du Groupe de travail de la Sixième Commission. L'esprit de coopération et de souplesse qui y a prévalu a permis de réaliser des progrès importants dans les cinq domaines en suspens identifiés par le Président du Groupe de travail dans son rapport, a estimé le représentant. Ainsi, la Slovaquie estime-t-elle que l'on est désormais très près d'un accord sur trois de ces points: la notion d'Etat aux fins de l'immunité, la notion d'entreprise d'Etat ou autre entité d'Etat en matière de transactions commerciales et les contrats de travail. Un accord sur ces trois points est vraiment à notre portée, a estimé M. Stefanek.

Le représentant a rappelé que la question des critères à appliquer pour déterminer le caractère commercial d'un contrat ou d'une transaction avait été plus ou moins responsable du blocage lors des précédentes négociations. C'est pourquoi la Slovaquie s'est félicitée de la proposition faite l'an dernier à la Commission du droit international, tendant à supprimer tout critère spécifique et à laisser à des tribunaux le soin de déterminer le caractère d'un contrat ou d'une transaction. Cette approche, a rappelé M. Stefanek, a reçu un soutien considérable de la part de nombreuses délégations. Néanmoins, la Slovaquie fait preuve de souplesse sur ce point et est prête à poursuivre les discussions avec les délégations qui souhaitent maintenir certaines dispositions sur les critères de détermination du caractère commercial d'un contrat ou d'une transaction dans le projet d'articles. Enfin, la question des mesures de contrainte contre les biens appartenant à un Etat reste le point sur lequel un accord reste le plus difficile à obtenir. Néanmoins, la Slovaquie voit dans les travaux du Groupe de travail des signes prometteurs, notamment dans le document de travail numéro 3.

Le représentant a rappelé que son pays était coauteur du projet de résolution A/C.6/55/L.19 et qu'il en soutient l'adoption par consensus par la Commission.

M. FRANÇOIS ALABRUNE (France) a remercié le professeur Gerhard Hafner pour ses efforts constants en faveur de la recherche d'un projet acceptable pour tous. Il a indiqué que la France a présenté des observations écrites sur la question des immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens en novembre 1997 et qu'elle a exprimé ses vues lors de la réunion du Groupe de travail du 6 au 10 novembre 2000. Il a donc expliqué les principaux éléments de la position de la France sur le projet d'articles proposé par la Commission du droit international, faisant part de sa préférence pour la forme d'une convention internationale. Cette convention, fondée sur un droit uniforme et dépourvu d'ambiguïté, pourra apporter une solution adaptée aux difficultés quotidiennes rencontrées par les praticiens du droit international, a-t-il remarqué.

Sur les questions de fond, il a noté des progrès importants sur celles qui soulevaient encore des difficultés. A titre d'exemple, il a cité la notion d'Etat aux fins de l'immunité, les critères de la nature commerciale ou non d'un contrat ou d'une transaction, la notion d'entreprise d'Etat, les contrats de travail, ainsi que les mesures de contrainte contre les biens d'un Etat. Il a relevé que des difficultés demeuraient essentiellement sur les questions des critères de la nature commerciale ou non d'un contrat ou d'une transaction, ainsi que sur les mesures de contrainte. Il est certain que des solutions acceptables seront trouvées et, à cet égard, il s’est félicité de la constitution d'un Comité spécial qui se réunira en mars 2002. Le nouvel élan qui est donné sur la question devra permettre, espère t-il, l'élaboration d'un instrument satisfaisant pour tous et, partant, favoriser la codification de pratiques aujourd'hui trop diverses.

MME TELALIAN (Grèce) a félicité le Président du Groupe de travail sur les immunités juridictionnelles, grâce à qui des progrès importants ont pu être réalisés, même s'il existe encore des divergences, notamment sur les critères de détermination du caractère commercial des transactions et sur les mesures de contrainte, la représentante est convaincue que ces difficultés pourront être aplanies et des solutions de compromis trouvées. Le projet de résolution, qui prévoit la création d'un comité spécial, ouvre la voie à de tels compromis, a estimé Mme Telalian. Comme la délégation allemande l'a justement rappelé hier en présentant le projet, le Comité spécial aura en effet compétence non seulement pour examiner les problèmes mais aussi pour les régler et pour décider de l'opportunité ou non de transmettre à une conférence diplomatique un projet d'articles, a expliqué la représentante. Pour la Grèce, il est urgent d'établir un régime juridique uniforme qui reflète la pratique des Etats en la matière et qui garantisse la nécessaire prévisibilité dans les transactions commerciales des Etats. Le principe de l'immunité restreinte est ainsi aujourd'hui généralement reconnu par la plus grande partie des Etats comme une norme prépondérante, a précisé la représentante.

M. EVERT MARECHAL (Belgique) a indiqué l'importance qu'il accorde à la question des immunités des Etats et de leurs biens et a souhaité qu'elle soit codifiée. Il s'est félicité des progrès accomplis par le Groupe de travail la semaine dernière et a loué les efforts du professeur Hafner. S'agissant des travaux futurs, il s'est déclaré favorable à la constitution du Comité spécial et a exprimé l’espoir que les négociations qui auront ainsi lieu permettront aux délégations de rapprocher leurs points de vue.

Adoption du projet de résolution A/C.6/55/L.19

La Commission a adopté, sans vote, le projet de résolution A/C.6/55/L.19, relatif à la Convention sur les immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens, présenté mercredi, aux termes duquel l’Assemblée générale déciderait d’établir un Comité spécial sur les immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens, auquel pourront aussi participer les Etats membres des institutions spécialisées, aux fins de consolider les points de convergence et de régler les questions en suspens, l’objectif étant d’élaborer un instrument susceptible d’emporter l’adhésion générale sur la base du projet d’articles relatifs aux immunités juridictionnelles adopté par la Commission du droit international à sa quarante-troisième session, et des discussions et conclusions du Groupe de travail à composition non limitée de la Sixième Commission créé en application des résolutions 53/98 et 54/101. Elle déciderait que le Comité spécial se réunira pour une durée de deux semaines en mars 2002.

En outre, l'Assemblée générale prendrait note avec satisfaction du rapport du Groupe de travail sur les immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens de la Commission du droit international. Elle demanderait instamment aux Etats qui ne l’auraient pas encore fait de communiquer leurs observations au Secrétaire général conformément à sa résolution 49/61, et inviterait également les Etats à soumettre par écrit au Secrétaire général, d’ici au 1er août 2001, leurs observations sur les rapports du Groupe de travail. Elle déciderait également d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa cinquante- sixième session la question intitulée «Convention sur les immunités juridictionnelles des Etats et de leurs biens».

Explication de position

La représentante du Canada a déclaré que, si elle se joint au consensus en formation et appuie le projet de résolution, il reste entendu que le titre de celui-ci ne préjuge en rien, pour le Canada, de la forme finale que prendront les travaux du Groupe du travail. Pour la délégation canadienne, ces travaux devraient prendre la forme de lignes directrices.

Incidences budgétaires

Le représentant du Secrétariat a déclaré qu'au cas où le projet de résolution A/C.5/55/L.19 serait adopté, les incidences financières seront incluses dans le budget 2002-2003.

REVISION DU STATUT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DES NATIONS UNIES

Présentation et adoption du projet de résolution A/C.6/55/L.18

La représentante du Royaume-Uni en présentant le projet de résolution A/C.6/55/L.18, relatif à la révision du Statut du tribunal administratif des Nations Unies et coparrainé par la France, l'Irlande et le Royaume-Uni, a déclaré qu'il reflétait bien la préoccupation des délégations qui souhaitent trouver un système juridique mondial équilibré et semblait acceptable pour tous.

La Sixième Commission a ensuite adopté, sans vote, le projet de résolution, aux termes duquel l’Assemblée générale déciderait d’apporter un certain nombre de modifications au Statut du tribunal, avec effet au 1er janvier 2001. Notamment, le paragraphe 1 de l’article 3 se lirait dorénavant comme suit: «Le Tribunal se compose de sept membres, tous de nationalité différente. Les membres possèdent les qualifications et l’expérience nécessaires, notamment en droit. Trois d’entre eux seulement siègent dans chaque espèce.». Le paragraphe 2 de l’article 3 se lirait dorénavant: «Les membres sont désignés par l’Assemblée générale pour un mandat de quatre ans, renouvelable une fois. Le membre désigné en remplacement d’un membre dont le mandat n’est pas expiré ne l’est que pour le reste du mandat de son prédécesseur; son mandat est renouvelable une fois.» Et il serait ajouté un article 8 nouveau, se lisant: «Lorsque les trois membres du Tribunal qui siègent dans une espèce considèrent que celle-ci soulève un important point de droit, ils peuvent, à tout moment avant de rendre leur jugement, soumettre l’affaire à l’examen de l’ensemble du tribunal. A cette fin, le quorum est de cinq membres.»

L'Assemblée générale déciderait également de proroger de un an le mandat des membres siégeant au tribunal au 1er janvier 2001, qui pourra par la suite être renouvelé une fois si l’intéressé n’a pas siégé au tribunal plus de sept ans. Elle déciderait en outre que le texte annexé au projet de résolution deviendrait le Statut du tribunal, le 1er janvier 2001.

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