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AG/J/298

LA SIXIEME COMMISSION EXAMINE LE TEXTE DU PROJET DE DIRECTIVES SUR LES RESERVES AUX TRAITES ADOPTE EN PREMIERE LECTURE PAR LA CDI

2 novembre 1999


Communiqué de Presse
AG/J/298


LA SIXIEME COMMISSION EXAMINE LE TEXTE DU PROJET DE DIRECTIVES SUR LES RESERVES AUX TRAITES ADOPTE EN PREMIERE LECTURE PAR LA CDI

19991102

La Sixième Commission a poursuivi cet après-midi l'examen du rapport de la Commission du droit international (CDI). Dans ce contexte elle s'est penchée sur l'examen du Chapitre VI du rapport, relatif aux "Réserves aux traités".

Dans ce contexte, les représentants se sont penchés sur le texte du projet de directives concernant les réserves aux traités, adopté à titre provisoire par la CDI en première lecture. L'expression réserve s'entend d'une déclaration unilatérale faite par un Etat ou une organisation internationale, à l'acceptation ou à l'approbation d'un traité, par laquelle cet Etat ou organisation vise à exclure ou à modifier l'effet juridique de certaines dispositions du traité. Le représentant de la France a affirmé que l'expression "lignes directrices" serait plus appropriée que le terme "directives" pour qualifier les dispositions relatives aux réserves aux traités. En effet, le terme "directive" laisse à penser que des règles contraignantes sont adoptées alors que la codification aboutira à un guide destiné à aider les Etats.

Les intervenants, qui ont abordé dans le détail le projet de texte, se sont notamment prononcés sur la question des réserves aux traités relatifs aux droits de l'homme. Dans ce contexte, plusieurs représentants ont souligné le vide juridique des conventions de Vienne de 1969 et 1986 sur les réserves aux traités. Le représentant de l'Italie a pour sa part affirmé que les traités relatifs aux droits de l'homme, en raison de leur objet, représentent une catégorie spéciale d'accords pour laquelle le régime prévu par la Convention de Vienne de 1969 s'avère, à l'évidence, inadéquat. Dressant le même constat, plusieurs autres intervenants ont préconisé la mise au point d'un régime séparé, abordant de façon distincte la question des réserves aux traités relatifs aux droits de l'homme.

Ont pris la parole, les représentants des pays suivants: Italie, Royaume-Uni, Hongrie, France et Suède (au nom des pays nordiques).

La Sixième Commission reprendra ses travaux demain mercredi 3 novembre, à 15 heures.

- 2 - AG/J/298 2 novembre 1999

EXAMEN DU RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE ET UNIEME SESSION

M. Zdzislaw Galicki (Pologne), Président de la Commission du droit international (CDI), présentant le chapitre VI du rapport relatif aux réserves aux traités, a indiqué qu'à sa cinquantième session, la CDI a adopté provisoirement - sur recommandation du Comité de rédaction -les projets de directives portant sur les questions suivantes: définition des réserves; objet des réserves; cas dans lesquels une réserve peut être formulée; réserves à portée territoriale; réserves formulées à l'occasion d'une notification d'application territoriale; réserves formulées conjointement, ainsi qu'un projet de directive visant la relation entre la définition et la licéité des réserves. Elle a aussi adopté les commentaires de ces projets de directives. La définition adoptée par la CDI comble le vide créé par les Conventions de Vienne de 1969 et de 1986 sur le droit des traités. La directive sur la définition permettra de clarifier la distinction entre les déclarations interprétatives et les réserves ou autres types de déclarations unilatérales faites à l'égard d'un traité, souvent à l'occasion de l'expression du consentement par ses auteurs. Les déclarations interprétatives visent à interpréter le traité dans son ensemble ou certaines de ses dispositions alors que les réserves ont pour objectif d'exclure ou de modifier l'effet juridique de certaines dispositions du traité dans leur application à l'égard de leur auteur.

L'interprétation a pour objet de clarifier le sens et le champ d'application que l'auteur, un Etat ou une organisation, attribue unilatéralement au traité ou à certaines de ses dispositions. Toutefois, cela ne devrait pas servir à encourager la formulation de déclarations interprétatives à un moment inapproprié, dans la mesure où cela pourrait conduire à des abus et créer des difficultés. Les déclarations interprétatives conditionnelles sont plus proches des réserves que les simples déclarations interprétatives. Selon le projet de directives, le caractère d'une déclaration unilatérale en tant que réserve ou de déclaration interprétative est déterminée par l'effet juridique qu'elle vise à produire. De l'avis de la CDI, alors que les règles offrent des indications utiles, elles ne peuvent être purement et simplement transposées aux réserves et aux déclarations interprétatives en raison de leur nature particulière. Le projet de directives prévoit également une clause d'exclusion visant à restreindre le champ d'application du guide de la pratique sur les réserves et les déclarations interprétatives, à exclure les autres déclarations unilatérales de toute sorte qui sont formulées en relation à un traité. Le projet de directives envisage enfin le cas des déclarations unilatérales concernant les traités bilatéraux.

Déclarations

M. UMBERTO LEANZA (Italie) a partagé la décision prise par la Commission d'alléger et de simplifier le Chapitre III du projet d'articles sur la responsabilité des Etats. En effet, la surabondance de dispositions rend toujours difficile la compréhension d'un instrument conventionnel. Le représentant a toutefois regretté la simplification des articles 20, 21 et 23 du projet qui permettaient à l'origine de mieux distinguer entre les obligations de conduite, les obligations de résultat, les obligations de résultat élargies et l'obligation de prévention. L'élimination de normes surabondantes ne doit pas aller jusqu'à méconnaître la pratique courante des Etats dans les relations internationales, a-t-il affirmé. L'analyse de la jurisprudence des Cours internationales montre que le recours aux notions précitées est courant, a-t-il ajouté. L'Italie n'est pas en faveur d'une inclusion de la distinction entre obligations dans le commentaire, car elle n'aurait alors qu'une valeur interprétative. Le représentant a par ailleurs estimé qu'il est d'une grande importance de reconsidérer la question de l'épuisement des voies de recours internes. Il s'agit là, a-t-il précisé, d'une question de fond. Abordant le Chapitre V relatif aux circonstances excluant l'illicéité et soulignant son importance majeure, le représentant a estimé que le débat qui s'est instauré a permis d'assouplir les positions excessivement radicales et absolument non conformes à la pratique des Etats. En ce qui concerne les contre-mesures, M. Leanza a souligné que la pratique internationale est loin d'être univoque sur le point de savoir si les Etats ne peuvent y recourir qu'après avoir mis en oeuvre tous les moyens en vue d'une solution concertée du différend.

Le représentant a ensuite abordé la question de la mise au point de directives pour les réserves aux traités. Dans ce contexte, il a estimé que la décision de réexaminer la formulation de la directive 1 présente l'avantage d'éclaircir les termes dans lesquels il est possible "in abstracto" de concevoir une réserve portant sur le traité tout entier. Toutefois, elle rend nécessaire un approfondissement des divers aspects de la question connexe, à savoir, celle des limites à l'admission des réserves. L'Italie considère par ailleurs que les traités relatifs aux droits de l'homme, en raison de leur objet, représentent une catégorie spéciale d'accords internationaux pour laquelle le régime prévu par la Convention de Vienne de 1969 s'avère, à l'évidence, inadéquat. Dans ce contexte, le représentant a invité la CDI à s'inspirer pour ses travaux à venir sur la question, de la pratique des objections concertées pour établir et appliquer un régime spécial destiné aux réserves apposées aux traités non synallagmatiques. En conclusion de son intervention le représentant a estimé que le projet de directives adopté par la CDI dans sa session précédente est extrêmement clair et détaillé. Toutefois, il a indiqué qu'il faut tenir compte des critiques toujours plus fréquentes sur l'inefficacité du système actuel des réserves par rapport aux accords non synallagmatiques.

M. FRANKLIN BERMAN, Conseiller juridique au Ministre des affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni, intervenant sur la question des méthodes de travail de la Commission du droit international, a rappelé qu'en 1970, il avait rédigé le discours du Royaume-Uni sur l'adoption de la Déclaration sur les relations amicales. La Sixième Commission présentait à l'époque certaines caractéristiques liées non seulement à la taille mais au rôle actif des délégations sur les questions à l'ordre du jour. Il a fallu sacrifier quelque chose dans ce processus. Désormais, les projets de résolution sont plus longs et plus confus. A cette époque, les projets de texte présentés pour adoption étaient plus précis et les négociations ne s'étendaient pas inutilement. Les décisions de la Sixième Commission faisaient l'objet d'un débat public et non pas de négociations secrètes. On ne peut comprendre la signification des points examinés que dans le cadre de débats. On confie la tâche à un nombre très limité de délégations, ce qui est contre-productif. Est-ce un indice des priorités de nos gouvernements ou un degré de notre engagement collectif? Le représentant a estimé qu'il est peu probable que l'on profite davantage du partage des obligations. Il n'est pas aisé d'être engagé à part entière et de manière productive aux travaux de la Sixième Commission à moins d'être juriste. Peut-être que cela nous rend unique. Dans une autre Commission, un diplomate compétent qui connaît les Nations Unies, devrait être en mesure d'agir parfaitement sur la base d'instructions décentes. Les questions que la Sixième Commission sont importantes pour tout le monde.

Le rapport de la CDI de 1999 est plus aisé à lire que ceux établis sur les travaux des sessions de 1970, 1982 et 1991. On peut estimer que des progrès considérables ont été accomplis. Au cours des dernières années, on a assisté à une évolution. A chaque groupe de travail, est assigné l'examen d'une question à l'ordre du jour de la CDI. La Commission a souscrit à la scission de ses sessions. Elle découvrira des gains d'efficacité auxquels elle n'avait jamais songé auparavant. La Commission devra consacrer la plupart de son temps à l'examen de questions juridiques importantes et pertinentes. Faisant référence au rôle de la CDI, le représentant a estimé que tout ce qui a été accompli jusqu'à maintenant a été de subdiviser le débat sur les différents thèmes abordés par le rapport de la CDI. Est-ce que la CDI a un meilleur aperçu des avis exprimés par la Sixième Commission sur les travaux accomplis au cours de la session considérée? Les membres de la CDI, intervenant dans le cadre de leur délégation nationale, exerçaient dans le passé un contrôle absolu sur l'examen du rapport de la CDI par la Sixième Commission. M. Berman a émis des doutes quant à l'efficacité d'une telle méthode. La CDI elle-même ne semble pas avoir d'idée précise sur ce qu'elle attend de la Sixième Commission. Est-ce que les délégations souhaitent le même type de débat chaque année? Quelle meilleure occasion que la réunion des conseillers juridiques des affaires étrangères des Etats membres pour exprimer la position de leur gouvernement respectif sur les travaux de la CDI! M. Berman a proposé de réduire le temps consacré au débat sur le rapport de la CDI et d'utiliser le temps économisé pour engager des échanges avec les Rapporteurs spéciaux.

M. GYORGY SZENASI (Hongrie) a appuyé, dans son ensemble, le projet de directives sur les réserves aux traités. Le représentant s'est dit satisfait des principes définis par la CDI s'agissant des cas où les réserves sont interdites. Il a appuyé l'idée selon laquelle la question de la licéité des réserves est une question distincte de celle de leur définition. Par ailleurs tout en soutenant les conclusions de la CDI visant à interpréter plus largement le régime établi par les Conventions de Vienne sur les réserves, le représentant a appelé de ses voeux la mise au point d'un régime séparé abordant de façon distincte la question des réserves aux traités multilatéraux, y compris les traités relatifs aux droits de l'homme. Ces réserves devraient faire l'objet d'un statut distinct.

Le représentant a ensuite abordé la question des déclarations unilatérales relatives aux traités bilatéraux soulignant que la conception du Rapporteur spécial sur cette question devrait être pleinement appuyée par la Sixième Commission. En effet, la Hongrie est d'avis qu'une réserve à un traité bilatéral devrait être considérée comme une proposition faite à l'autre partie d'amender le traité, autrement dit, comme une offre faite en vue de la re-négociation de l'instrument. Le représentant a enfin appuyé l'idée que les déclarations interprétatives, qui ne visent pas à modifier la portée juridique de l'instrument auquel elles se rapportent, peuvent être autorisées en matière de traités bilatéraux. Le représentant a estimé que la CDI devrait préciser plus avant la distinction entre déclarations interprétatives et déclarations interprétatives conditionnelles, et de tirer les conséquences de cette distinction en ce qui concerne les traités bilatéraux.

M. FRANÇOIS ALABRUNE (France) a réaffirmé que l'expression "lignes directrices" serait plus appropriée que le terme "directives" pour qualifier les dispositions relatives aux réserves aux traités. Le terme "directives" laisse à penser que des règles contraignantes sont adoptées alors que la codification aboutira à un guide destiné à aider les Etats. Il a indiqué que sa délégation est favorable au projet de directive relatif à l'objet des réserves qui précise qu'une réserve peut porter sur certaines dispositions d'un traité ou sur le traité dans son ensemble sous certains aspects particuliers. Les réserves transversales qui ne peuvent pas, à partir de leur seul énoncé, être rattachées à des dispositions conventionnelles précises et qui, pourtant, ne vident pas le traité de toute substance sont ainsi prises en considération. Concernant les déclarations visant à s'acquitter d'une obligation par équivalence, le projet de directive indique qu'une déclaration unilatérale formulée au moment de l'expression du consentement à être lié et qui vise à s'acquitter d'une obligation d'une manière différente mais équivalente à celle imposée par le traité, constitue une réserve. De l'avis de la délégation française, les projets de directives - relatifs aux déclarations visant à limiter les obligations de leur auteur et aux déclarations visant à s'acquitter d'une obligation par équivalence - pourraient être supprimés et devenir de nouveaux paragraphes dans le projet de directive relatif à l'objet des réserves.

La France est particulièrement intéressée par le projet de directive relatif à la définition des déclarations interprétatives car la pratique a montré les difficultés qui existent en la matière et il est très utile que la Commission précise cette question. La définition de la déclaration interprétative retenue par le Rapporteur spécial ne précise pas à quel moment l'Etat ou l'organisation internationale qui en est l'auteur doit la formuler. A cet égard, la délégation française estime qu'il serait préférable qu'une déclaration interprétative soit faite dans un laps de temps limité, qui pourrait être le même que celui pendant lequel la formulation d'une réserve est possible. Elle suggère qu'il soit indiqué dans la définition de la déclaration interprétative qu'elle doit être formulée au plus tard au moment où son auteur exprime son consentement à être lié. Concernant les déclarations interprétatives conditionnelles, l'élément temporel est tout aussi nécessaire que pour les déclarations interprétatives non conditionnelles.

Par ailleurs, M. Alabrune fait observer que le projet de directive concernant les déclarations relatives à la mise en oeuvre du traité au plan interne soulève, dans sa rédaction actuelle, une véritable difficulté. Rien n'est dit sur les déclarations qui sont susceptibles d'avoir une incidence sur les droits et obligations de l'Etat qui les formule vis-à-vis des autres parties contractantes dans le cas où le traité en cause a entendu rendre obligatoire des modalités déterminées d'application de ses stipulations dans les ordres juridiques internes des Etats parties. Par ailleurs, le représentant a proposé de modifier le titre du projet de directive relatif aux réserves et aux traités bilatéraux pour indiquer clairement que sont en cause des déclarations à fin de modification d'un traité bilatéral.

M. LARS MAGNUSON (Suède), au nom des pays nordiques, a évoqué la mise en place, au sein du Conseil de l'Europe, d'un Observatoire des réserves aux traités internationaux. Le représentant a expliqué que cette institution a pour but d'examiner les réserves les plus importantes apportées aux traités multilatéraux et, notamment, de s'assurer de leur compatibilité avec le droit international et plus particulièrement avec le droit international relatif aux droits de l'homme. Les pays nordiques notent avec satisfaction la réduction du nombre de réserves faites par les Etats en matière de traités relatifs aux droits de l'homme. Un autre développement positif, a précisé le représentant, résulte du fait que les Etats se sont efforcés de définir leurs réserves avec plus de précision, facilitant ainsi l'évaluation de leur portée par les autres Etats.

La CDI a maintenant adopté 25 principes du projet de directives relatif aux réserves, a indiqué le représentant. Le premier chapitre relatif à la définition de la notion de réserve semble à présent finalisé, s'est-il réjoui. La Suède appuie le projet de guide dans son ensemble. Elle estime que les réserves formulées à l'occasion d'une notification d'application territoriale devraient parfois être qualifiées de déclarations interprétatives. Ceci étant, dans la mesure où elles concernent des traités relatifs aux droits de l'homme, elles devraient effectivement être considérées comme des réserves. En conclusion de son intervention, le représentant a demandé que le Rapporteur spécial se consacre sans plus attendre à la question de l'admissibilité des réserves.

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