LA DEUXIEME COMMISSION ENTAME SON DEBAT GENERAL SUR FOND DE MONDIALISATION ET DE CRISE DANS LES PAYS DE L'ASIE DE L'EST
Communiqué de Presse
AG/EF/214
LA DEUXIEME COMMISSION ENTAME SON DEBAT GENERAL SUR FOND DE MONDIALISATION ET DE CRISE DANS LES PAYS DE L'ASIE DE L'EST
19981006 La Commission économique et financière (Deuxième Commission) a commencé ce matin ses travaux par un débat général sur toutes les questions inscrites à son ordre du jour. La mondialisation, ses avantages et ses désavantages, a été au coeur du débat, et la Commission a entendu, à ce sujet, le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales qui a donné une définition de ce phénomène qui, selon lui, est, entre autres, l'élargissement et l'approfondissement des transactions économiques, politiques et sociales au-delà des frontières nationales et entre les citoyens, les entreprises et les gouvernements. Elle a en outre entendu des délégations qui ont souligné que la mondialisation de l'économie devra être maîtrisée, notamment à la lumière des récentes crises en Asie de l'Est.La Commission a suivi le raisonnement des délégations qui, pour la plupart, ont souligné les avantages de la mondialisation qui a conduit, ont-elles indiqué, à la croissance dans les domaines du commerce, des finances, de l'information ou encore de la technologie. La mondialisation porte en elle les promesses de nouvelles opportunités et d'une prospérité nouvelle pour les pays qui ont eu la capacité de s'intégrer au marché mondial, ont-elles déclaré. Le problème est que le mouvement rapide des capitaux - caractéristique importante de la mondialisation - expose les économies vulnérables aux caprices du secteur privé à la recherche constante de profits; le marché des changes est aujourd'hui dix fois supérieur au Produit intérieur brut mondial. Le caractère incontrôlable du mouvement des capitaux compromettant le progrès économique et social, les délégations ont plaidé pour la création d'une organisation financière internationale chargée de contrôler et de réguler le marché des capitaux. Elles ont en outre plaidé pour le renforcement des institutions de Bretton Woods de façon à ce qu'elles soient en mesure de prévenir les crises et d'aider les pays affectés à en alléger les coûts sociaux, compte tenu de l'impact énorme des crises sur le tissu social.
La Commission, outre le Ministre de la coopération au développement des Pays-Bas, a entendu le Premier Vice-Ministre des affaires étrangères du Bélarus, le Président de la Commission ainsi que les représentants des pays suivants: Indonésie, au nom du Groupe des 77 et la Chine, Autriche, au nom de l'Union européenne, Bangladesh, Etats-Unis, Turquie, Ouganda, Cuba, Chine et Pakistan.
(à suivre 1a)
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La Commission est présidée par M. Bagher Asadi (Iran) et MM. David Prendergast (Jamaïque), Burak Özügergin (Turquie) et Odyek Agona (Ouganda) en sont les Vice-Présidents. M. Vladimir Gerus assume les fonctions de Rapporteur.
La Deuxième Commission poursuivra son débat général cet après-midi à 15 heures.
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Débat général
M. BAGHER ASADI, Président de la Deuxième Commission, a constaté que la situation économique mondiale ne correspond pas aux attentes et souligné que l'environnement économique, au niveau international, est généralement défavorable et ne constitue pas une raison d'être d'optimisme pour ce qui est de la croissance et du développement. Il faut attendre de cette situation un accroissement de la pauvreté, des difficultés sociopolitiques, une tension sociale et une instabilité politique. Le dialogue de haut niveau, qui a lieu au début de cette session, a accru la compréhension du processus de mondialisation en cours, de ses dangers et de ses opportunités et promesses qui doivent encore être réalisés dans la plupart des pays en développement. La menace de turbulences économiques constitue une autre préoccupation grave pour chacun de nous.
La leçon à tirer de ces faits est que toute solution possible exige une coopération internationale à un niveau mondial. La Commission est le plus haut mécanisme intergouvernemental chargé de formuler et d'évaluer les politiques dans les domaines économique et du développement. Elle doit donc jouer son rôle. Elle doit faire valoir sa position unique pour promouvoir et faire progresser un dialogue constructif et un véritable partenariat, et apporter sa contribution à la formulation de politiques et mesures internationalement acceptées.
M. NITIN DESAI, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a déclaré qu'aujourd'hui, la question est de savoir pourquoi une crise aussi profonde a frappé l'économie mondiale à un moment où les perspectives semblaient prometteuses. La crise actuelle a entraîné une perte de production, un effondrement de la croissance avec des conséquences humaines et sociales redoutables. Elle a compromis en outre les possibilités de développement. Si la croissance se maintenait dans certains pays, et en particulier les pays développés, il faut dire que la capacité de l'économie mondiale d'absorber de nouvelles tensions se réduit. Il suffirait d'une ou de deux crises supplémentaires pour que cette économie s'engage définitivement dans la voie de la récession. L'une des priorités serait donc de renforcer les institutions de contrôle des échanges financiers aux niveaux national comme international et de réagir avant le déclenchement des crises.
Les années 90 ont donné lieu à un dédoublement économique où l'on voit d'un côté, l'économie réelle et de l'autre, l'économie financière. Le marché des changes, aujourd'hui, est dix fois supérieur au Produit intérieur brut (PIB) mondial. Les échanges atteignent quelque 300 à 400 billions de dollars par an. Si 2 % seulement de ces échanges font l'objet de transactions, leur totalité a une incidence réelle sur les taux de change. Des approches politiques ont été formulées et des institutions établies pour contrer les déséquilibres des comptes courants à court terme.
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Aujourd'hui pourtant, le problème principal est de redresser l'instabilité des comptes de capitaux. Par conséquent, les taux de change et les taux d'intérêt n'ont plus aucun rapport avec la réalité : personne ne peut croire que l'économie mondiale a besoin d'un taux d'intérêt de 50 %.
La question de la contagion des crises est également importante. Les analyses ont trop tendance à se concentrer sur la contagion entre pays directement liés par des transactions financières. Il faut tenir compte de la contagion psychologique qui, par exemple, fait que les courants de capitaux vers les pays en développement s'assèchent. Il faut aussi tenir compte du fait que les crises financières ont une incidence sur le commerce des biens puisqu'elles entraînent, par exemple, la chute des prix des matières premières. Les mesures politiques doivent donc se fonder sur une conception plus large de la contagion. Le monde d'aujourd'hui est également caractérisé par le fait que les décisions privées ont souvent des conséquences publiques. Les crises de solvabilité, telles qu'on les observe aujourd'hui, sont presque toujours engendrées par le secteur privé, soit en tant que prêteur, soit en tant qu'emprunteur.
Il est donc possible, aujourd'hui, de définir la mondialisation comme l'élargissement et l'approfondissement des transactions économiques, politiques et sociales au-delà des frontières nationales et entre les citoyens, les entreprises et les gouvernements. La mondialisation ne se limite pas seulement au commerce et aux finances mais elle touche également les domaines politique et culturel. Si les avantages de la mondialisation sont bien connus, ses effets délétères se sont révélés très préoccupants. Partant, la tentation est bel et bien de faire marche arrière faute d'institutions pour la gérer. Il faut mettre l'accent sur le fait que mondialisation sans multilatéralisme ne peut qu'entraîner des crises. L'ONU peut en cela jouer un rôle important.
M. MAKARIM WIBISONO (Indonésie) a indiqué, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, que les promesses et les attentes liées à la mondialisation et à la libéralisation sont toujours valides, mais que de nombreux pays remettent en cause leur impact sur leurs économies. Les pays les moins développés ont notamment vu leur rythme de croissance économique ralentir, le chômage augmenter, le poids de la dette s'alourdir, et des problèmes sociaux énormes surgir. Aujourd'hui, beaucoup d'économies des pays d'Asie sont en ruine. La leçon qu'il faut tirer de cette débâcle est que le marché est basé sur le sentiment et la perception ainsi que sur des faits tangibles. La crise s'étend partout dans le monde et, comme l'indique le dernier rapport du FMI, les perspectives sont sombres pour l'ensemble du monde. Une solution ne peut venir que d'une coopération multilatérale, d'où le rôle unique de forum international que peut jouer l'ONU. Le dialogue de haut niveau qui s'est tenu les 17 et 18 septembre de cette année a abouti à des conclusions très intéressantes permettant d'évaluer les moyens d'aborder les différents aspects de la mondialisation.
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Le défi essentiel que rencontre la coopération internationale est de mettre un terme à la crise. La communauté internationale doit chercher à mettre en place une nouvelle structure, transparente et participative, qui renforce son rôle, notamment en matière monétaire et financière, qui contrôle et régule les flux de capitaux à court terme et la volatilité des marchés monétaires, sans pour autant restreindre la libéralisation des économies.
L'un des facteurs qui, aujourd'hui, remet le plus en cause le développement est le manque de financement. L'APD a été l'une des premières victimes de la mondialisation. Les marchés financiers, s'ils sont laissés à eux-mêmes, portent atteinte aux pays développement, et si les flux financiers vont vers ces pays, ils peuvent en repartir aussi rapidement. En outre, l'endettement est un problème chronique. Le Groupe des 77 considère que les mesures du FMI et de la Banque mondiale en faveur des pays pauvres et des pays en développement sont positives, mais il faut accélérer les efforts. Il faut également prendre des mesures d'allégement de la dette. Le manque d'accès au marché pour leurs exportations est aussi un problème auquel doivent faire face les pays en développement. Ces pays devraient avoir un accès équitable aux marchés. Si tel était le cas, les revenus qu'ils obtiendraient du commerce international leur permettraient de faire face à leurs obligations financières. L'ouverture des pays développés aux pays en développement permettrait également d'éviter une récession mondiale.
L'ONU doit chercher un financement des activités opérationnelles pour le développement et faire en sorte que l'examen triennal ne prenne en compte que les besoins traditionnels des pays, en se souvenant, qu'à l'origine, les activités opérationnelles des Nations Unies avaient pour objectif de servir les intérêts des pays en développement. En matière de développement durable, et en particulier de désertification et de changement climatique, le principe de la responsabilité commune est pleinement partagé et doit être appliqué.
Le représentant a souligné qu'il est indispensable d'élargir et de renforcer la coopération Sud-Sud pour que le dialogue Nord-Sud puisse être bénéfique. Les pays en développement, de par leur complémentarité, et la communauté internationale en général, ont un rôle à jouer à l'appui de la coopération Sud-Sud.
M. HANS-PETER GLANZER (Autriche) a indiqué, au nom de l'Union européenne, qu'il faudrait continuer d'apporter une réponse politique aux troubles financiers internationaux, qui affectent désormais le monde entier d'une façon ou d'une autre. Il est évident que les changements socio- économiques qu'implique la mondialisation ont un impact important sur le sens et le rôle des institutions internationales. Des acteurs non-étatiques se sont développés de façon indépendante sur la scène internationale. C'est notamment vrai au plan économique où le secteur privé constitue un élément très important des relations internationales. Cela se vérifie également pour la société civile et les ONG.
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La crise économique et financière actuelle a montré qu'il est plus que jamais nécessaire que soient renforcées les institutions nationales et internationales afin de favoriser un développement durable dans le cadre d'un partenariat mondial. De par son rôle normatif, les Nations Unies devraient avoir un impact fort sur leurs activités opérationnelles et faire en sorte que les pays appliquent les résultats des conférences du système des Nations Unies. Pour que l'objectif d'éradication de la pauvreté soit atteint, l'Union européenne est prête à mettre la lutte contre la pauvreté au coeur de la coopération internationale. Cette lutte doit prendre en compte les notions d'équité, d'égalité entre les sexes, de justice sociale, de démocratie, de droits de l'homme, de prévention des conflits et d'accès aux services sociaux de base tout en promouvant la croissance économique des pays pauvres. L'Union européenne continuera de soutenir le développement et la mise en oeuvre des stratégies nationales d'élimination de la pauvreté et les programmes qui sont pris en charge par les gouvernements, la société et le secteur privé.
La révision triennale des activités opérationnelles mettra l'accent sur trois axes: la gouvernance, l'efficacité des opérations et les questions de budget. L'Union européenne est particulièrement préoccupée par le déclin des ressources des activités opérationnelles, et des efforts doivent être faits pour atteindre l'objectif de l'APD égal à 0,7% du PNB. L'Union européenne soutient l'idée qu'il faut accroître les ressources de base, sans qu'augmente la dépendance à l'égard d'un petit groupe de pays donateurs. D'autre part, la dette extérieure constitue une entrave grave au développement durable. Aussi, l'initiative HIPC devrait être étendue rapidement à un plus grand nombre de pays.
En matière d'environnement, l'Union européenne est prête à jouer un rôle actif lors des conférences à venir sur les conventions concernant les changements de climat et la désertification.
MME EVELINE HERFKENS, Ministre de la coopération au développement des Pays-Bas, a estimé que dans le contexte de la mondialisation, les Nations Unies représentent l'instance capable d'harmoniser les efforts de la communauté internationale. Les Pays-Bas entendent y contribuer en termes d'idées et de ressources. A cet égard, le Gouvernement néerlandais a l'intention de dépasser l'objectif fixé pour l'Aide publique au développement de 0,7 % du PNB pour le faire passer à 0,8 % durant les quatre prochaines années, soit un montant de trois milliards de dollars. La croissance économique s'accompagnera donc d'une croissance de l'aide au développement. Au sein des Nations Unies, il est important que le fardeau des contributions soit partagé par d'autres pays influents et par les Etats nouvellement industrialisés. Les ressources devant être sûres et prévisibles, il faut diversifier les sources des fonds, notamment en faisant appel aux secteurs privé et public, interne et international. Lorsque l'on parle du développement, il faut parler du développement durable qui doit comprendre les besoins de base, le respect des droits de l'homme et le renforcement des capacités humaines. Le développement durable doit viser le bien-être social.
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En ce qui concerne le lien entre coopération multilatérale et développement, il faut souligner que cette coopération ne concerne pas seulement l'aspect financier. Il s'agit aussi de développer les capacités. A cet égard, il doit être souligné que depuis cinq ans, les pays en développement ont dépensé plus dans le remboursement de la dette et pour le service de la dette qu'ils n'ont reçu d'aide bilatérale. Il faut souligner que le développement ne peut être assuré entièrement par des sources publiques bilatérales ou multilatérales. La tâche du développement revient aujourd'hui au secteur privé, comme c'est déjà le cas dans plusieurs pays du Sud. Dans le même temps, si toutes les institutions internationales joignaient leurs efforts, elles pourraient avoir plus d'impact sur les pays bénéficiaires que les programmes d'aide bilatérale des différents pays donateurs.
Aujourd'hui, il faut mettre en oeuvre d'urgence les recommandations des différentes conférences internationales des Nations Unies. Il faut s'assurer que tous les pays en développement participent au processus de mondialisation sur un pied d'égalité. Les Pays-Bas ont lancé un cadre d'intégration pour aider les pays les moins avancés à réussir leur entrée sur les marchés mondiaux. Dans un tel contexte, il faut souligner l'importance de la réforme des Nations Unies, à la fois sur le plan interne et sur les plans de la coopération interinstitutions et des mécanismes intergouvernementaux.
S'agissant de la coopération interinstitutions, il faut rapprocher des institutions telles que la Banque mondiale, les banques régionales et les donateurs bilatéraux. Il faut améliorer les relations entre le système des Nations Unies et les institutions de Bretton Woods. Au niveau des pays, il convient d'améliorer la coordination entre les différents ministères qui travaillent chacun de leur côté avec une institution spécialisée des Nations Unies.
M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a indiqué que les crises ont révélé les risques de la mondialisation et d'une dérégulation sans limite. Il faut en conclure que le système financier international est incapable de prévoir de telles crises et que les potions du FMI demeurent rigides et trop éloignées des besoins des économies individuelles. Le représentant espère que les discussions donneront naissance à des mesures novatrices qui permettront aux institutions compétentes d'éviter les crises dans le futur. La communauté internationale devrait regarder avec particulièrement d'attention le cas des pays qui n'ont pas réussi à avoir des taux de croissance satisfaisants, au cours de la dernière décennie. Il faut que soit mise en place une approche prenant en compte à la fois la suppression de la dette, l'arrêt du déclin de l'aide, ainsi que des mesures assurant l'accès au marché.
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Pour les pays en développement, et plus particulièrement pour les moins avancés, l'aide qui leur vient de l'extérieur demeure essentielle pour faire face aux besoins en matière d'investissement, de commerce extérieur et de développement humain. A cet égard, le rôle joué par les activités opérationnelles des Nations Unies est crucial pour le développement humain. Aussi, est-il indispensable que les pays développés fassent tous les efforts possibles pour atteindre les objectifs fixés en matière d'APD. Il est également nécessaire que le montant de la dette et les frais qui en découlent soient réduits fortement. L'Initiative HIPC demeure insuffisamment flexible, trop lente et trop restrictive. Les transferts nets de capitaux provenant des institutions financières multilatérales, comme la Banque mondiale et les banques régionales de développement, n'ont cessé de décliné. Cette situation doit changer. Outre les mesures que doivent prendre les pays industrialisés, les pays en développement doivent explorer toutes les potentialités de la coopération Sud-Sud.
MME BETTY KING (Etats-Unis) a estimé qu'aujourd'hui la question est de savoir comment l'Assemblée générale peut apporter une contribution à la recherche de solutions aux problèmes créés par le processus de la mondialisation. Pour les Etats-Unis, il est clair que les Etats doivent assumer la responsabilité de tirer les avantages de la mondialisation. Dans le cadre de la coopération au développement, l'administration américaine a mis l'accent sur les programmes d'aide bilatérale et sur la mise en place de filets de protection sociale pour les pauvres. Le Président Clinton a demandé à son Gouvernement de mettre au point des politiques visant à ce que les pays puissent bénéficier des avantages de la liberté de mouvements des capitaux. Il a interpellé le FMI pour qu'il prévienne les crises et mette tout en oeuvre pour réduire leur coût humain. Le Secrétariat du Trésor a été, pour sa part, chargé d'esquisser les contours de l'architecture financière future. Il en ressort la nécessité d'adopter des politiques stables permettant de promouvoir la croissance et de fournir un appui accru pour renforcer les bases des économies fondées sur la libre entreprise. Il est également prévu de renforcer le FMI pour qu'il puisse répondre aux situations difficiles des pays et un appel a été lancé à la Banque mondiale pour qu'elle se concentre sur les groupes les plus vulnérables des sociétés.
Pour les pays lourdement endettés, les Etats-Unis ont demandé aux créditeurs d'accorder un allégement de la dette à l'appui des réformes plutôt que de conditionner cet allégement aux réformes. De l'avis des Etats-Unis, le FMI et les autres institutions de Bretton Woods sont les organes les mieux placés pour lutter contre la crise financière actuelle. La Deuxième Commission ou la CNUCED ne devraient pas les remplacer et les Etats-Unis ne croient pas non plus en la création d'une organisation financière mondiale comme cela a été suggéré. Mon pays attache une grande importance à la question de la création d'un environnement favorable au développement qui a fait l'objet des derniers travaux du Conseil économique et social. Il est apparu que la bonne gouvernance et la transparence sont les éléments
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essentiels d'un tel environnement. Ces efforts ont conduit à l'adoption par l'OCDE d'une convention sur la lutte contre la corruption. Les Etats-Unis souhaitent mettre l'accent sur la nécessité de mettre en oeuvre les recommandations du Groupe de travail sur l'environnement et l'habitat.
M. BURAK ÖZÜGERGIN (Turquie) a indiqué qu'une coopération internationale cohérente est nécessaire pour mettre un terme aux difficultés économiques que rencontrent actuellement la plupart des pays du monde, même si les événements des dernières années ont remis en cause l'efficacité des mécanismes internationaux existants en matière de dialogue et de coordination. Le risque le plus grand, auquel le monde est actuellement confronté, réside dans une récession généralisée.
Le représentant a indiqué que sa délégation soutient les réformes engagées aux Nations Unies, alors que les premiers signes de ces réformes sont visibles dans des activités du système. Il s'agit de poursuivre et de consolider ce processus. Les Nations Unies ont un rôle important à jouer pour renforcer les cadres institutionnels, normatifs et juridiques qui permettront à l'économie mondiale de se développer plus efficacement et plus équitablement.
Malgré les progrès considérables en matière de cohérence et d'efficacité, résultant des activités opérationnelles, le budget stagnant, voire déclinant du système est inquiétant. Les Nations Unies doivent placer au premier rang de leurs préoccupations la nécessité du suivi et de l'applica- tion des résultats des principales conférences.
M. SERGEI N. MARTYNOV, Premier Vice-Ministre des affaires étrangères du Bélarus, a appelé les institutions de Bretton Woods et les gouvernements nationaux à définir la structure d'un nouveau système international financier et à déterminer les mécanismes de sa régulation afin de réagir rapidement à la détérioration de la situation d'une quelconque partie de la planète. Le représentant a déploré que le processus de mondialisation ait conduit à la marginalisation de plusieurs pays en développement, en particulier des pays les moins avancés. En outre, le niveau moyen des barrières tarifaires pour l'exportation des pays les moins avancés est de 30 % plus élevé que l'index mondial. Les sanctions non fondées ainsi que les normes écologiques et les règles phytosanitaires sont toujours utilisées comme instruments du protectionnisme. Plus de trente pays, dont le Bélarus, tiennent des consultations avec l'Organisation mondiale du commerce. Les procédures d'adhésion à l'OMC étant compliquées, la CNUCED et l'OMC doivent fournir une assistance technique en ce sens.
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Il faut souligner que la mondialisation de l'économie et la libéralisation du commerce international ont accru la vulnérabilité des pays les moins avancés. A cet égard, il faut tenir compte de la répartition inéquitable des investissements directs étrangers parmi les pays en développement. Soixante-quinze pour cent du flux d'investissements mondial sont partagés entre douze pays seulement. Ce fait montre, une nouvelle fois, l'importance de l'Aide publique au développement pour la majorité des pays. Le règlement de la question de la dette extérieure est également d'une importance cruciale pour le développement durable. Cette question doit être résolue dans un avenir proche par les efforts conjoints des pays créditeurs, des Etats endettés et des institutions de Bretton Woods.
La crise financière, qui a secoué la Fédération de Russie cette année, en touchant les autres pays de la Communauté des Etats indépendants, a montré la fragilité du processus de transition et souligné, une nouvelle fois, la nécessité d'inscrire à l'ordre du jour mondial la question de l'assistance aux pays dans leurs efforts de créer une économie de marché et de résister à la crise financière mondiale. Le Bélarus a fait sa transition d'une manière graduelle. En utilisant ses ressources internes et en rétablissant les liens commerciaux perdus du fait de la désintégration de l'Union Soviétique, le pays a pu enregistrer, l'année dernière, une croissance de 10 % de son PNB. Pour les premiers huit mois de 1998, la croissance du PNB a atteint les 11 % et celle des résultats industriels, 12 %. Le flux des investissements dans l'économie nationale a augmenté de 27 % par rapport à la même période, l'année dernière. Le Bélarus entend d'ailleurs convoquer en 1999 une conférence internationale sur les pays enclavés d'Europe centrale et d'Europe orientale chargée d'examiner les questions économiques, de transport et d'environnement. Il lance une invitation aux institutions spécialisées, aux fonds et programmes du système des Nations Unies ainsi qu'aux pays donateurs.
M. HAROLD ACEMAH (Ouganda) a déclaré que quelque chose peut et doit être fait pour limiter et, à terme, supprimer les effets négatifs de la mondialisation sur les économies des pays en développement. Les solutions résident dans la réduction des économies à l'échelle locale, la dispersion des pouvoirs économiques et la démocratisation des relations économiques internationales. Les impacts de la mondialisation ont été encore plus forts sur les économies vulnérables des pays d'Afrique et sur les pays les moins développés. Des réformes ont été mises en oeuvre en Afrique, dans l'espoir notamment d'attirer des capitaux et des investissements étrangers directs. Aucun objectif de ce type n'a pourtant été réalisé. Les conflits internes persistent et les fléaux comme la malaria et le HIV-Sida continuent d'affecter les capacités de production de la population. Le représentant demande que l'objectif de l'APD soit atteint et que soient mises en place des politiques qui ouvrent les marchés.
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Le fardeau de la dette continue d'être pour les pays d'Afrique un obstacle à leurs efforts en matière de développement économique et social. Grâce à l'initiative HIPC, l'Ouganda verra sa dette soulagée de 650 millions de dollars en termes nominaux au cours des 30 années à venir. L'Ouganda a demandé que la plus grande partie de la dette soit soulagée dans la première partie de cette période.
M. RAFAEL DAUSA CESPEDES (Cuba) a estimé que la mondialisation rend les pays de plus en plus vulnérables puisqu'ils sont davantage exposés aux forces des marchés internationaux et à celles de la spéculation. Il a fallu une crise sévère pour montrer aux tenants du libéralisme, les faiblesses de leur paradigme économique. Les recettes de la Banque mondiale et du FMI imposées par les tristement célèbres programmes d'ajustement structurel se sont avérés être de véritables échecs. Une deuxième voire une troisième génération de programmes n'y ferait rien. Les réformes internes des pays en développement ne suffiront jamais pas plus que les ajustements macroéconomiques sans un climat favorable au développement qui met fin à l'instabilité des prix des produits de base, aux ingérences dans les affaires intérieures des Etats, aux diktats ou encore aux blocus économiques.
L'Assemblée générale des Nations Unies est le forum par excellence pour examiner ces questions puisque c'est le seul endroit où les pauvres et les riches ont la même voix. Le rôle du multilatéralisme et de la coopération internationale doit être renforcé. Cuba constate, avec préoccupation, les nouvelles tentatives de trouver des solutions dans des instances élitistes, incapables pourtant de trouver des solutions durables et réalistes. Il faut être conscient que les problèmes actuels sont qualitativement nouveaux et exigent donc des solutions nouvelles. Les pays du Nord et les pays du Sud doivent participer à la recherche de solutions pour s'engager vers une mondialisation nouvelle, humaine et solidaire.
Cuba souhaite souligner l'importance du Groupe de travail chargé de préparer la conférence sur le financement du développement. Les événements récents ont montré à suffisance l'urgence d'une telle réunion. Les institutions de Bretton Woods, qui ont connu des revers et affronté leur incapacité à régler les problèmes du développement, ne peuvent faire face au défi de la mondialisation. Leur structure même ne permet pas un examen intégral du développement qui tiendrait compte de ses dimensions sociales et humanitaires. Ce sont les Nations Unies qui sont appelées à trouver des solutions universelles et justes. La Deuxième Commission se doit donc d'examiner la proposition du Comité de planification du développement visant à créer une organisation financière internationale.
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La contribution des Nations Unies dans le dégagement d'un consensus mondial est de la plus grande importance. Ce consensus doit se manifester dans les activités opérationnelles pour le développement. Le déclin actuel des ressources aux fins du développement est le sujet d'une vive préoccupation. L'effort réalisé au sein du Conseil des institutions spécialisées doit donner lieu à la mobilisation des ressources et pas un exercice vain d'imposition de nouvelles conditions pour des ressources déjà bien maigres. La mobilisation des ressources provenant de pays contributeurs sont la garantie du multilatéralisme et de la neutralité des activités opérationnelles du système des Nations Unies. Ni le secteur privé ni les ONG ne doivent devenir les principaux contributeurs aux fonds. Cuba se félicite d'autre part d'accueillir la première réunion au Sommet des pays du Sud conformément à la décision du Groupe des 77 et la Chine. Ce sera un moment important pour la concertation des positions du tiers monde et un encouragement pour la coopération Sud-Sud.
M. SHEN GUOFANG (Chine) a souligné les leçons à tirer de la crise financière en Asie: il faut, d'une part, être très vigilant à l'égard des effets négatifs de la mondialisation, et d'autre part, faire des efforts pour mettre en place des systèmes bancaires sains et des politiques macroéconomiques stables. D'autre part, les capacités des institutions financières internationales doivent être renforcées afin de prévenir et de trouver une réponse aux crises. Enfin, la mondialisation nécessite, de la part des pays, des actions coordonnées, afin de circonscrire ces effets pervers. Aussi, les pays qui ont une importante influence sur la situation économique en Asie devraient prendre immédiatement des mesures pour limiter les impacts de la crise et aider les pays les plus touchés à se redresser.
Les efforts des pays en développement sont freinés par de nombreux facteurs. Le protectionnisme, ainsi que l'utilisation injustifiée de mesures anti-dumping n'ont pas permis aux pays en développement de profiter des bénéfices engendrés par l'expansion du commerce international. L'APD est prise dans une spirale descendante. Beaucoup de pays ne peuvent toujours pas échapper au poids de leur dette. Aussi, est-il nécessaire de renforcer la coopération internationale pour le développement. Les pays développés devraient considérer cette coopération, non comme une faveur à l'égard des pays en développement, mais comme un investissement pour le futur. C'est aux Nations Unies que revient le rôle de favoriser cette coopération. Les discussions sur le financement pour le développement doivent se concentrer sur des actions concrètes, avec comme but principal la résolution des problèmes pratiques que rencontrent les pays en développement. D'autre part, les activités opérationnelles des Nations Unies doivent être renforcées afin de soutenir le développement économique et social des pays en développement. Les réformes globales mises en place par les Nations Unies contribuent favorablement au renforcement de ces activités de développement.
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M. AHMAD KAMAL (Pakistan) a déclaré que si les charmes de la mondialisation sont irrésistibles, le fait est qu'en dépit de la croissance énorme, l'économie mondiale est caractérisée aujourd'hui par de réelles inégalités. Entre 1965 et les années 90, le cinquième du monde n'a participé qu'à hauteur d'1 % au commerce mondial. 75% de la population mondiale ne reçoivent que 16 % des revenus mondiaux. Parallèlement, la croissance sans précédent de la consommation a été marquée par des disparités importantes. 20 % de la population mondiale dans les pays à haut revenu assurent 86 % des dépenses totales de consommation privée. En termes de pauvreté, plus d'un milliard d'individus dans le monde ne peuvent toujours pas satisfaire leurs besoins de base. Les perspectives ne sont pas encourageantes. Le taux de croissance des pays en développement en 1998 représentera la moitié du taux enregistré en 1997. A la suite de la crise asiatique, l'économie mondiale est sur la voie de la récession et les pays en développement se retrouvent piégés dans une impasse.
La mondialisation est devenue synonyme de commercialisation. Les forces du marché n'ont pourtant pas aidé les pays en développement dans leurs efforts d'intégration dans l'économie mondiale. Ils n'ont pas non plus aidé à la reconstruction des économies des pays d'Asie de l'Est. La situation s'est davantage aggravée par le déclin continu des ressources pour le développement. Le développement ne peut être laissé à la merci des flux financiers qui ne se dirigent que vers "le monde des plus grands profits". La situation des pays en développement se voit en outre compliquée par le fardeau de la dette qui épuise leurs maigres ressources. Un défi a été lancé au mythe de la supériorité du marché. Il est nécessaire d'apporter un changement au processus de prise de décisions économiques et de reconnaître que l'efficacité du marché n'est pas inhérent à l'efficacité économique assurant le bien des sociétés.
L'humanisation de la mondialisation est une nécessité mais pas un choix. Pour réaliser le développement, il faudra dépasser les mesures monétaires et fiscales. Les Nations Unies ont un rôle à jouer dans la création d'un nouveau cadre. Il faut envisager sérieusement la proposition de convoquer une conférence mondiale qui sera chargée de traiter des anciens et nouveaux problèmes du système financier international. Le Pakistan propose que le Secrétaire général présente ses recommandations à la reprise de session de la Deuxième Commission qui aura lieu au début de l'année prochaine.
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