La Commission du développement social se prépare au deuxième Sommet mondial pour le développement social avec les commissions régionales
La quatrième journée de la soixante-troisième session de la Commission du développement social a été consacrée, en partie, à préparer le deuxième Sommet mondial pour le développement social, qui se tiendra en novembre à Doha (Qatar). Les participants ont ainsi dialogué, le matin, avec de hautes et hauts responsables du système des Nations Unies pour préparer cette rencontre, avant de tenir l’après-midi un dialogue multipartite sur la solidarité et la cohésion sociale à travers les coopératives et l’économie sociale et solidaire. Le rôle et la participation de la société civile -avant, pendant et après le Sommet- ont animé les discussions.
Des politiques sociales résilientes sont absolument nécessaires dans le contexte actuel (conflits, instabilité économique, stress climatique et transformation numérique), a relevé tout d’abord la Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO) dans le cadre du premier dialogue concernant les préparatifs du Sommet. La CESAO a engagé des consultations avec ses États membres pour identifier leurs priorités lors du Sommet, en mettant l’accent précisément sur la résilience des politiques sociales face aux conflits et à l’instabilité.
L’emploi reste au cœur du développement social, a dit l’oratrice qui a plaidé en faveur de politiques garantissant des emplois décents et l’accessibilité à la formation professionnelle. Elle a souligné l’importance de l’équité intergénérationnelle, qui nécessite la viabilité des systèmes de retraite et la transmission des savoirs entre les générations. Elle a relevé à cet égard l’importance cruciale de la technologie et de la transformation numérique, à condition qu’elles soient gérées de manière inclusive. Face à la fracture numérique dans la région arabe, il faut adopter des politiques d’inclusion numérique, a donc recommandé la Secrétaire exécutive avant de prôner l’intégration des principes de transition juste dans l’action climatique. Les politiques vertes créent des emplois et renforcent les économies locales, a-t-elle justifié.
Coalition mondiale pour la justice sociale
Le deuxième Sommet mondial pour le développement social est justement l’occasion de proposer une réponse collective et inclusive aux défis mondiaux tels que l’innovation technologique, les changements climatiques et les tensions géopolitiques, a estimé la Directrice générale adjointe pour les relations extérieures et avec les entreprises de l’Organisation internationale du travail (OIT), s’exprimant au nom du Directeur général. Elle a rappelé l’importance du premier Sommet mondial, en 1995, qui avait conduit à la création du programme pour un travail décent de l’OIT. Elle a mis en avant la nécessité de systèmes de protection sociale réactifs face aux perturbations climatiques et économiques et plaidé pour une protection sociale universelle, regrettant que 3,8 milliards de personnes en soient privées. L’OIT recommande des engagements concrets pour réduire le chômage des jeunes, qui touche un jeune sur cinq dans le monde, a-t-elle dit.
L’emploi des jeunes est d’ailleurs un des domaines sur lesquels travaille la Coalition mondiale pour la justice sociale, récemment créée par l’OIT, qui compte 330 partenaires, dont 90 gouvernements et 23 organisations internationales, des partenaires sociaux, des ONG et des membres du secteur privé. La Coalition met également l’accent sur l’impact de l’intelligence artificielle et de la numérisation sur le travail, ainsi que sur la résilience humaine face aux perturbations environnementales et l’emploi des jeunes. Le but recherché est d’arriver à un contrat social mondial renouvelé pour gérer les transitions mondiales avec une approche centrée sur l’humain, a expliqué la Directrice générale adjointe.
Les contributions de la région Amérique latine et Caraïbes au deuxième Sommet mondial ont ensuite été présentées par le spécialiste des questions sociales à la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), qui a souligné l’importance d’avoir des systèmes de protection sociale universels et des politiques d’inclusion dans le monde du travail. Il a mis en avant la nécessité de renforcer les institutions sociales et de promouvoir la coopération multilatérale pour un développement social inclusif.
Évaluer les progrès accomplis depuis la Déclaration de Copenhague
Le deuxième Sommet mondial pour le développement social, selon la Directrice de l’Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social (UNRISD), devra être l’occasion d’évaluer les progrès accomplis depuis la Déclaration de Copenhague de 1995. Elle a réaffirmé les engagements de son Institut en faveur de l’éradication de la pauvreté, du travail décent pour tous et de l’intégration sociale, tout en relevant les défis contemporains tels que les inégalités, les changements climatiques et l’instabilité mondiale.
L’UNRISD est une institution dédiée à la recherche sur les dimensions sociales du développement. Avec plus de 60 ans de recherche appliquée et un réseau de 20 000 experts, l’UNRISD est bien placée pour faciliter des consultations inclusives et élaborer des solutions fondées sur des données probantes. Ces consultations mondiales et régionales visent à recueillir divers points de vue sur les défis urgents en matière de développement social et les solutions réalisables, assurant ainsi une base solide et inclusive pour les résultats du Sommet de 2025.
En vue du deuxième Sommet mondial social, la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l’Asie et le Pacifique (CESAP) prépare, elle, plusieurs initiatives importantes, a dit son Directeur de la Division du développement social citant la réunion du 10 octobre 2024 qui a mis en évidence les principales priorités pour la région. Une consultation multipartite est également prévue la veille du Forum Asie-Pacifique pour le développement durable, le 24 février 2025, qui sera axée sur le travail décent et l’emploi, l’évolution démographique, la protection sociale, le genre, la gouvernance et les partenariats.
L’objectif est de faire émerger des solutions et des suggestions pour éclairer les discussions mondiales au cours du deuxième Sommet. La CESAP, a déclaré le Directeur, appelle à la solidarité intergénérationnelle face aux transitions démographiques rapides dans la région, à des systèmes de protection sociale solides pour assurer un développement social inclusif et durable. Elle fait aussi appel pour une inclusion numérique des femmes et des communautés mal desservies.
L’Afrique présentera ses cinq priorités au Somment, a enfin annoncé le Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA). En premier, ce sera l’éradication de la pauvreté et des inégalités sociales. Viennent ensuite le plein emploi productif et le travail décent pour tous. Le haut responsable a ajouté à cette liste l’intégration sociale et la lutte contre l’exclusion et contre toutes formes de discrimination. Il a également appelé à mettre en place une protection sociale universelle pour tous, y compris pour les plus vulnérables. Enfin, le Secrétaire exécutif a présenté, comme cinquième priorité africaine, l’éducation et l’apprentissage tout au long de la vie.
Rôle et participation de la société civile
La société civile participera-t-elle aux préparatifs du Sommet et au Sommet lui-même, ont demandé l’Union européenne et les organisations des jeunes en lançant la discussion interactive. En réponse à cette question, le Directeur de la CESAP a rappelé que la dimension tripartite qui était en vigueur au premier Sommet à Copenhague le sera aussi à Doha. Comme le document final n’est pas encore convenu, la contribution de tous les acteurs y compris celles de la société civile sont la bienvenue, a-t-il assuré. La Directrice de l’UNRISD a encouragé les États Membres à organiser avant le Sommet leurs propres consultations nationales avec la participation des membres de leur société civile. Elle les a prié d’intégrer des représentants des ONG dans leurs délégations respectives au Sommet.
L’Iran, qui a réitéré que sans accès aux financements, il n’y a pas de justice sociale, a demandé aux intervenants de préciser les mécanismes dont nous aurons besoin pour évaluer le deuxième Sommet mondial social. Qui fera le suivi de la Déclaration de Doha? La Secrétaire exécutive de la CESAO a reconnu que les problèmes de liquidités subies par l’ONU et ses entités ne permettent pas d’organiser des consultations pour écouter tout le monde. Elle a souligné l’importance de la disponibilité, de l’accessibilité et de la durabilité du financement et des solutions aux problèmes sociaux. Elle a prié de faire en sorte que la Déclaration du Sommet soit assortie d’engagements et non de promesses.
« Comment envisagez-vous les processus régionaux pour atteindre les ODD? » a demandé à son tour le Brésil en s’adressant à la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes qui a réitéré que les organisations régionales sont essentielles parce qu’elles permettent aux pays de travailler ensemble sur la voie du développement social. Le Brésil a lui aussi martelé l’importance de la participation de la société civile dans ces processus régionaux.
Le rôle crucial de la société civile est la boussole du Sommet, a reconnu le modérateur. La déclaration politique qui en sortirait devrait promouvoir et protéger la participation de la société civile, en veillant à ce que les discussions ne se limitent pas aux gouvernements mais reflètent les priorités des personnes et des communautés.
Les coopératives, essentielles pour un développement social résilient
Dans le deuxième dialogue du jour, les participants ont débattu du thème de « la solidarité et la cohésion sociale à travers les coopératives et l’économie sociale et solidaire comme voie pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD) ». Les intervenants ont noté qu’en 2025 est célébrée l’année internationale des coopératives. Les coopératives et l’économie sociale et solidaire ne sont pas seulement des outils complémentaires, mais des composantes essentielles des stratégies centrées sur les personnes, a rappelé le modérateur estimant qu’elles favorisent l’engagement communautaire, l’appropriation et la croissance équitable.
À sa suite, les autres orateurs ont noté que les coopératives promeuvent l’inclusion sociale, la résilience économique et le développement durable. Ils ont fait valoir leurs expériences et les actions menées dans leurs pays respectifs pour promouvoir la solidarité et la cohésion sociale par le biais des coopératives et de l’économie sociale et solidaire. Les mesures en ce sens concernent les cadres juridiques, l’éducation et le renforcement des capacités, ainsi que la gouvernance et l’élaboration des politiques.
Selon la France, le développement de l’économie sociale et solidaire est un puissant levier pour atteindre les ODD. Ce développement passe par un cadre législatif et règlementaire permettant de structurer l’écosystème et d’apporter des instruments de financement et de renforcement des capacités, a fait valoir la délégation.
La Commission du développement social clôturera demain, vendredi 14 février à partir de 15 heures, sa soixante-troisième session après cinq jours de travaux.