En cours au Siège de l'ONU

Soixante-neuvième session,
8e séance plénière – matin
FEM/2243

Commission de la condition de la femme: vibrant plaidoyer en faveur d’une revitalisation de l’instance, malgré les coupes budgétaires annoncées

À l’occasion d’un dialogue interactif de haut niveau, organisé ce matin par la Commission de la condition de la femme, des appels convergents ont résonné en faveur d’une revitalisation de cet organe onusien, principale instance intergouvernementale dédiée exclusivement à la promotion de l’égalité des genres et de l’autonomisation des femmes, afin que ses travaux concourent à accélérer la mise en œuvre du Programme d’action de Beijing, adopté il y a 30 ans mais en perte de vitesse.  Cette volonté de changement a toutefois été contrariée par les annonces de coupes budgétaires dans le système de l’ONU. 

En ouvrant ce dialogue, qu’il présidait, M. Fernando Elísio Freire, Ministre de la famille, de l’inclusion et du développement social de Cabo Verde, a appelé à « cocréer » une commission de la condition de la femme qui soit véritablement à même de relever les défis en constante évolution auxquels sont confrontées les femmes et les filles, « aujourd’hui et demain ».  Selon lui, cet organe subsidiaire du Conseil économique et social (ECOSOC) devrait jouer un rôle plus large dans le renforcement des mécanismes nationaux de promotion de l’égalité des genres et l’échange de bonnes pratiques. 

Comodératrice des échanges, Mme Jennifer Carroll MacNeill, Ministre de la santé de l’Irlande, a rappelé le contexte de recul des droits des femmes dans lequel se tient ce dialogue.  Si les tendances restent les mêmes, il est fort probable qu’une fille née aujourd’hui ne verra pas l’égalité à des postes de responsabilité, a-t-elle observé.  Cette même femme devra atteindre l’âge de 68 ans avant de se réjouir de la fin des mariages précoces des filles, s’est désolée l’autre modératrice, Mme Lesego Chombo, Ministre de la jeunesse et des affaires de genre du Botswana

Revitaliser la Commission malgré la baisse attendue de ses ressources 

À cette aune, M. Abdulaziz M. Alwasil, Président de la soixante-neuvième session de la Commission, a estimé que cet organe « ne doit plus seulement être un forum de promesses » mais une instance ancrée dans l’action. Au-delà de la nécessaire revitalisation de la Commission, il faut s’assurer que les résolutions qu’elle adopte sont mises en œuvre à travers les législations des États Membres, a-t-il plaidé. 

Le Président du Conseil économique et social (ECOSOC) est venu tempérer l’enthousiasme de la salle en faisant remarquer que ce processus intervient dans des circonstances budgétaires « difficiles », en raison des annonces faites par « un certain nombre d’États Membres » concernant le financement du système de l’ONU. Faisant état d’une possible coupe de 60 milliards de dollars pour l’aide publique au développement à l’horizon 2027, M. Bob Rae a jugé indispensable de « repenser la façon dont nous travaillons ». 

En dépit de la « restructuration importante » qui s’amorce, il a appelé à préserver et consolider les progrès réalisés en matière d’égalité des genres.  « On ne peut pas perdre les avancées obtenues par les femmes et pour les femmes », a-t-il dit, souhaitant que la revitalisation de la Commission soit « bien réelle » mais assortie d’un souci d’efficacité. 

Cette baisse annoncée des ressources ne doit pas empêcher la Commission de jouer son rôle de chef de file, a réagi la représentante à New York du Comité des ONG sur la condition de la femme, pour qui il importe de revitaliser cet organe essentiel afin qu’il fasse mieux entendre sa voix et ses décisions.  À cet égard, Mme Joanne Sandler a fait part des résultats d’une consultation menée l’an dernier par le Comité sur ce thème. 

Appels en faveur d’une Commission plus axée sur les résultats 

Des quelque 600 réponses reçues lors de cette enquête, il ressort que la demande la plus souvent formulée est de faire en sorte que la Commission soit axée sur les résultats et le terrain, et qu’en sa qualité d’« épicentre mondial pour l’égalité des genres », elle continue d’agir de manière décisive en faveur du changement.  Parmi les propositions avancées, la militante a retenu la possibilité pour la Commission d’élaborer chaque année un programme d’action concret de deux pages, avec une liste de tâches à accomplir.  L’examen des progrès réalisés permettrait de promouvoir les pratiques innovantes. 

Selon Mme Sandler, la majorité des personnes interrogées souhaitent en outre que la Commission aborde toutes les questions d’actualité, notamment l’intelligence artificielle, la crise climatique et la cyberviolence, et qu’elle fasse progresser la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles. 

Constatant par ailleurs que trop de personnes sont exclues des travaux de la Commission du fait d’obstacles bureaucratiques et administratifs, elle a avancé l’idée d’avoir deux représentantes d’ONG au Bureau de la Commission et dans les bureaux régionaux de l’organe.  « Ce serait une reconnaissance du rôle essentiel et du leadership des organisations et réseaux de défense des droits des femmes », a-t-elle fait valoir. 

Des propositions de réforme très diverses

Dans la même veine, l’Allemagne a estimé que la revitalisation proposée permettrait une plus grande représentation de la société civile dans les travaux de la Commission, un avis partagé par l’Union européenne, qui, outre les ONG de femmes, a souhaité une participation accrue des jeunes et du secteur académique.  La délégation européenne a insisté sur le fait que le mandat de la Commission doit rester inchangé.  De même, le processus de revitalisation ne doit pas modifier la nature intergouvernementale de l’organe, a souligné Cuba

Si l’on plaide pour la parité des genres, alors il faut commencer par l’ONU elle-même, ont considéré les Philippines, favorables comme beaucoup d’autres États Membres à l’élection d’une femme au poste de secrétaire général de l’Organisation.  Pour l’Égypte, les Nations Unies doivent soutenir en priorité les pays en développement, qui sont en proie à de multiples crises ayant un impact direct sur la condition de la femme, de la pauvreté aux effets des changements climatiques en passant par la fracture numérique. 

Dans une intervention très applaudie, Guyana a décrit le paradoxe d’une salle de réunion pleine de représentantes alors que de nombreuses autres femmes n’y ont pas accès.  La délégation a souhaité que la salle de l’Assemblée générale, qui reste vide pendant le conclave annuel des femmes, soit désormais mise à contribution. Israël a, pour sa part, déploré que les travaux de la Commission soient le reflet de ceux des autres organes onusiens. De l’avis de la délégation israélienne, il serait utile de modifier le format des sessions pour rendre cet organe « plus productif », et non enchaîner les débats, tables rondes et discussions générales comme ailleurs. 

Pendant que l’on parle de revitalisation de la Commission, les femmes de l’est de la République démocratique du Congo (RDC) meurent « dans le silence assourdissant des soi-disant féministes du monde », s’est offusquée la représentante congolaise.  Son homologue de l’Ouganda a, elle, assuré que son pays accueille des milliers de réfugiées de RDC qui fuient les combats. 

Demain, vendredi 14 mars, la Commission tiendra à 15 heures un autre dialogue interactif de haut niveau avec les représentantes et représentants de la jeunesse. 

 

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