9880e séance – matin
CS/16021

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA)

Constatant qu’il importe toujours de régler les problèmes complexes auxquels se heurte l’Afghanistan, le Conseil de sécurité a, ce matin, prorogé d’un an, jusqu’au 17 mars 2026, le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies dans ce pays (MANUA). 

En adoptant à l’unanimité de ses 15 membres la résolution 2777 (2025), le Conseil souligne qu’il importe « au plus haut point » de pouvoir compter sur une présence constante de la MANUA et des autres organismes, fonds et programmes des Nations Unies dans tout l’Afghanistan.  À cet égard, il demande à tous les acteurs politiques et parties prenantes dans le pays, notamment aux « autorités compétentes », ainsi qu’aux acteurs internationaux de se coordonner avec la Mission dans le cadre de l’exécution de son mandat et d’assurer la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé. 

Le Danemark, qui a codirigé les négociations avec la Chine sur ce texte de résolution, s’est félicité que le mandat de la MANUA soit renouvelé pour la première fois depuis 2022 avec « d’importantes mises à jour, reflétant les dernières évolutions sur le terrain », une avancée également saluée par la République de Corée.  Pour ce pays, il est particulièrement important que la détérioration des droits humains, en particulier des femmes et des filles, soit prise en compte.  « Le message du Conseil est clair: les femmes jouent un rôle indispensable dans la société afghane. »

Dans son préambule, le projet de résolution exprime la préoccupation du Conseil devant l’érosion croissante du respect des droits humains et des libertés fondamentales, « en particulier en ce qui concerne les femmes et les filles, qui n’ont pas un accès égal à l’éducation, à l’emploi, à la justice, aux possibilités économiques, à la participation pleine, égale et véritable à la vie publique, à la liberté de circulation et qui ne peuvent jouir des services de base ». 

Une telle situation rend aux yeux des membres du Conseil la paix, la stabilité et la prospérité dans le pays « irréalisables », raison pour laquelle il est de nouveau demandé aux Taliban de revenir rapidement sur ces politiques et pratiques, notamment la directive sur « le vice et la vertu » et la décision de suspendre l’accès des femmes et des filles à l’éducation dans les institutions médicales privées et publiques, ainsi que la décision d’interdire aux Afghanes de travailler pour l’ONU et des organisations non gouvernementales.  La Somalie, au nom des A3+ (Algérie, Sierra Leone, Somalie et Guyana) a réaffirmé son attachement à une approche « sans exclusive » reposant sur le respect des libertés fondamentales « de tous les Afghans et Afghanes ». 

Pour le représentant de l’Afghanistan, qui n’est pas affilié au régime des Taliban, la présence de la MANUA et du système des Nations Unies sur place demeure indispensable, et la réintégration de son pays au sein de la communauté internationale exigera une gouvernance fondée sur la justice et la primauté du droit afin de répondre aux besoins du peuple afghan.  Les Taliban doivent en effet prendre des mesures concrètes attestant de leur volonté de s’acquitter de leurs engagements internationaux, notamment en matière d’antiterrorisme, ont estimé les États-Unis, en demandant la mise en œuvre de la résolution 2721 (2023).  Soulignant la nécessité d’un engagement accru avec le « Gouvernement intérimaire » afin de parvenir à des interactions positives, la Chine a émis l’espoir que ce gouvernement réponde aux préoccupations légitimes de la communauté internationale.

La Fédération de Russie a elle aussi défendu une coopération pragmatique avec les autorités de facto, la priorité de la Mission devant être, selon elle, de nature humanitaire, afin d’aider les plus vulnérables, notamment les femmes.  Elle s’est dite partisane d’une approche globale, en vue d’une réintégration progressive de l’Afghanistan au sein de la communauté internationale. 

Pour le Pakistan, le premier défi auquel est confronté son voisin est le terrorisme.  Les Taliban n’ont pas éliminé Daech et ont toléré d’autres groupes auteurs d’attaques contre le Pakistan, a accusé le représentant de ce pays.  Il est revenu sur l’attaque perpétrée le 11 mars contre un train –le Jaffa Express-dans la province du Baloutchistan, au Pakistan, au cours de laquelle plusieurs centaines de civils ont été pris en otage et 25 d’entre eux tués par la brigade Majid.  Le délégué a assuré que tout au long de cette attaque, les terroristes étaient en contact direct avec leurs parrains en Afghanistan, pays à partir duquel l’attentat aurait été organisé et dirigé.  Nous savons aussi que cette attaque a été initiée et financée par notre « principal adversaire », a-t-il dit.  Selon lui, l’objectif était de déstabiliser le Pakistan et de mettre à mal sa coopération avec la Chine.

 

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La situation en Afghanistan 

Texte de la résolution (S/2025/109)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions antérieures sur l’Afghanistan, en particulier sa résolution 2626 (2022) définissant le mandat actuel de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) et ses résolutions 2678 (2023) et 2727 (2024) portant prorogation jusqu’au 17 mars 2025 de ce mandat,

Insistant sur le rôle important que l’Organisation des Nations Unies continuera de jouer dans la promotion de la paix et de la stabilité en Afghanistan,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de l’Afghanistan, ainsi que son appui continu au peuple afghan,

Constatant qu’il importe toujours de régler les problèmes complexes auxquels se heurte l’Afghanistan, réaffirmant qu’il est indispensable que les acteurs concernés sur le plan politique et en matière d’action humanitaire et de développement, au sein et en dehors du système des Nations Unies, adoptent une approche intégrée et cohérente, conforme à leur mandat respectif, pour consolider et pérenniser la paix en Afghanistan,

Se déclarant vivement préoccupé par l’érosion croissante du respect des droits humains et des libertés fondamentales, en particulier en ce qui concerne les femmes et les filles, qui n’ont pas un accès égal à l’éducation, à l’emploi, à la justice, aux possibilités économiques, à la participation pleine, égale et véritable à la vie publique, à la liberté de circulation et qui ne peuvent jouir des services de base, ce qui rend la paix, la stabilité et la prospérité dans le pays irréalisables, et demandant de nouveau aux Taliban, à cet égard, de revenir rapidement sur ces politiques et pratiques, notamment la directive sur « le vice et la vertu » et la décision de suspendre l’accès des femmes et des filles à l’éducation dans les institutions médicales privées et publiques, ainsi que la décision d’interdire aux femmes afghanes de travailler pour l’Organisation des Nations Unies et pour des organisations non gouvernementales en Afghanistan, conscient du rôle indispensable que les femmes jouent dans la société afghane et de la nécessité d’associer et de faire participer davantage les femmes à la prise de décisions,

Soulignant sa vive préoccupation face à la situation économique et humanitaire désastreuse qui règne en Afghanistan, y compris le déficit de financement des opérations humanitaires et les entraves persistantes auxquelles se heurtent celles-ci, conscient qu’il faut contribuer à remédier aux problèmes considérables qui pèsent sur l’économie afghane, notamment en s’efforçant de rétablir les systèmes bancaire et financier et de permettre l’utilisation des actifs appartenant à la Banque centrale d’Afghanistan au profit du peuple afghan, soulignant par ailleurs qu’il est important de redoubler d’efforts pour fournir une aide humanitaire et mener d’autres activités visant à répondre aux besoins humains de base en Afghanistan, conformément à la résolution 2615 (2021), ayant conscience du rôle de coordination important que l’Organisation des Nations Unies joue à cet égard, et soulignant une fois de plus qu’il est essentiel de permettre, conformément au droit international humanitaire et aux autres obligations juridiques internationales applicables, un accès total, sûr, rapide et sans entrave à tout le personnel humanitaire, y compris les femmes et les organisations non gouvernementales nationales et internationales,

Se déclarant gravement préoccupé par la présence de groupes terroristes en Afghanistan, condamnant dans les termes les plus vigoureux toutes les activités terroristes et toutes les attaques terroristes, réaffirmant qu’il importe de combattre le terrorisme en Afghanistan, réaffirmant également qu’il faut veiller à ce que le territoire de l’Afghanistan ne soit pas utilisé pour menacer ou attaquer tout autre pays, pour planifier ou financer des actes terroristes, ni pour abriter ou entraîner des terroristes, et à ce qu’aucun groupe ou individu afghan ne soutienne des terroristes opérant sur le territoire d’un pays ou d’un autre, et demandant aux Taliban de prendre des mesures énergiques pour renforcer ces efforts afin de lutter contre le terrorisme, y compris les personnes, groupes, entités ou entreprises désignés par le Comité du Conseil de sécurité faisant suite aux résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015), et soulignant qu’un des objectifs premiers de toute stratégie antiterroriste doit être d’instaurer durablement la paix et la sécurité,

Renouvelant son soutien à la lutte contre la culture, la production, le commerce et le trafic de drogues illicites en provenance d’Afghanistan et de précurseurs chimiques à destination de ce pays, constatant que le produit illicite du trafic de drogues en Afghanistan continue d’être une source de financement des groupes terroristes et des acteurs non étatiques qui menacent la sécurité régionale et internationale, conscient de la menace que les groupes terroristes et les acteurs non étatiques qui se livrent au trafic de stupéfiants, ainsi qu’à l’exploitation illicite des ressources naturelles, continue de représenter pour la sécurité et la stabilité en Afghanistan, demandant aux États de renforcer la coopération internationale et régionale pour lutter contre cette menace et ayant conscience de l’importance du rôle joué par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, notamment pour ce qui est de promouvoir d’autres moyens de subsistance pour maintenir la réduction de la production d’opium,

Réaffirmant son soutien aux initiatives régionales et internationales visant à prévenir et combattre le commerce illicite et l’accumulation déstabilisatrice d’armes légères et de petit calibre et leur détournement en Afghanistan et dans la région,

Réaffirmant également son soutien aux efforts visant à créer des conditions propices au retour et à la réintégration volontaires, sûrs, dignes et durables des personnes déplacées à l’intérieur du pays et des populations réfugiées,

Soulignant qu’il est nécessaire de réduire les risques de catastrophe pour faire face aux conséquences des catastrophes naturelles telles que les inondations ou la sécheresse qui peuvent influer sur la situation humanitaire et nuire à la stabilité socioéconomique en Afghanistan, notamment en aggravant l’insécurité alimentaire, la pénurie d’eau et la dégradation des terres,

1.    Salue la détermination à aider le peuple afghan dont l’Organisation des Nations Unies fait preuve depuis longtemps, réaffirme son soutien sans réserve aux activités de la MANUA et de la Représentante spéciale du Secrétaire général, et souligne qu’il importe que la Mission maintienne sa présence sur le terrain;

2.    Se félicite des efforts constants de la MANUA dans l’exécution des tâches et activités prioritaires qui lui ont été confiées;

3.    Décide de proroger jusqu’au 17 mars 2026 le mandat de la MANUA, tel qu’il a été défini dans sa résolution 2626 (2022);

4.    Souligne qu’il importe au plus haut point de pouvoir compter sur une présence constante de la MANUA et des autres organismes, fonds et programmes des Nations Unies dans tout l’Afghanistan, et demande à tous les acteurs politiques et parties prenantes en Afghanistan, notamment aux autorités compétentes, le cas échéant, ainsi qu’aux acteurs internationaux de se coordonner avec la MANUA dans le cadre de l’exécution de son mandat et d’assurer la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé dans tout le pays;

5.    Prie le Secrétaire général de lui présenter tous les trois mois un rapport sur la situation en Afghanistan et sur l’exécution du mandat de la MANUA, y compris au niveau infranational;

6.    Décide de rester activement saisi de la question.

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