En cours au Siège de l'ONU

9875e séance – après-midi
CS/16015

Conseil de sécurité: l’heure est venue pour les Taliban de faire preuve de réalisme et pour l’Afghanistan de respecter ses obligations internationales

(Le résumé complet de la réunion sera disponible ultérieurement.)

« Comment pouvons-nous aller de l’avant, compte tenu des tendances négatives à l’œuvre en Afghanistan? » s’est demandé, cet après-midi, au Conseil de sécurité, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour ce pays. « C’est le moment de faire preuve de réalisme », a estimé Mme Roza Otunbayeva, en regrettant que les Taliban continuent de faire obstacle à la réintégration de Kaboul dans le giron de la communauté internationale. 

Venue présenter le dernier rapport en date du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales, la haute fonctionnaire a en effet rappelé que cette réintégration pleine et entière dans le concert des nations reste subordonnée au respect par les autorités de facto dans le pays de leurs obligations juridiques internationales.  C’est l’une des conditions posées par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2679 (2023), adoptée en novembre 2023. 

(À suivre)

 

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La situation en Afghanistan (S/2025/109)

Exposé

Mme ROZA OTUNBAYEVA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour l’Afghanistan et Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), a rappelé que l’évaluation indépendante demandée par le Conseil de sécurité en novembre 2023 appelle à une voie politique par laquelle les intérêts de toutes les parties – le peuple afghan, la communauté internationale et les autorités de facto – peuvent être équitablement discutés afin que l’Afghanistan puisse être pleinement réintégré dans le système international dans le respect de ses obligations juridiques internationales.  « L’élaboration de cette voie politique a été notre tâche fondamentale au cours des derniers mois », a expliqué la haute fonctionnaire. 

Des défis subsistent, a-t-elle reconnu, en expliquant que les autorités de facto ont jusqu’à présent traité de manière sélective la question des obligations internationales de l’État afghan, en rejetant certaines au motif qu’elles empiéteraient sur la souveraineté du pays ou violeraient ses traditions.  De plus en plus d’Afghans s’adressent à la MANUA pour exprimer leurs préoccupations, mécontents des intrusions dans leur vie privée et de l’isolement prolongé de leur pays.  Alors que les Taliban ont pris le pouvoir il y a trois ans et demi, les habitants se sont certes réjouis de l’absence de conflit et d’une plus grande stabilité et liberté de mouvement, du moins pour la population masculine. « Mais cette paix ne leur permet pas de vivre dans la dignité, dans le respect de leurs droits humains et avec la confiance dans un avenir stable », a constaté Mme Otunbayeva.

Elle a indiqué que les Afghans continuent de faire face à une grave crise humanitaire caractérisée par des décennies de conflit, une pauvreté endémique, des chocs climatiques, une forte croissance démographique et des risques croissants en matière de protection, en particulier pour les femmes et les filles. En 2025, plus de 50% de la population, soit près de 23 millions de personnes, aura besoin d’une aide humanitaire, alors que celle-ci est en chute libre.  Au cours du mois dernier, plus de 200 établissements sanitaires ont fermé, affectant quelque 1,8 million de personnes, et les services vitaux de lutte contre la malnutrition infantile ont été limités. 

Aussi la Représentante spéciale a-t-elle salué la Banque mondiale pour sa décision, la semaine dernière, de fournir 240 millions de dollars supplémentaires au secteur de la santé jusqu’en novembre 2026.  Les donateurs ont réagi en augmentant leurs propres contributions pour répondre aux besoins humains fondamentaux, qui ont atteint près de 1,6 milliard de dollars en 2024.  Bien qu’il y ait eu quelques cas d’interférence dans la distribution de l’aide, a-t-elle relevé, les autorités de facto à Kaboul et dans les provinces ont généralement coopéré avec l’ONU et leurs partenaires pour permettre la fourniture de l’aide et résoudre les cas d’interférence. 

L’économie afghane a progressé d’environ 2,7% en 2024, s’est félicitée Mme Otunbayeva, et des investissements, notamment dans les infrastructures, avec le soutien des pays de la région, sont en cours.  « Mais à court et moyen termes, les niveaux de croissance actuels ne peuvent pas compenser la baisse de l’aide étrangère et la croissance démographique.  À plus long terme, la vision positive des autorités de facto de l’autosuffisance économique ne pourra se réaliser pleinement que si les obstacles persistants à sa réintégration dans le système international sont résolus », a mis en garde la haute fonctionnaire. 

Elle s’est ensuite émue des restrictions importantes qui continuent d’être imposées aux Afghanes.  Le 2 décembre dernier, le Ministère de la santé publique a ordonné la fermeture des instituts médicaux pour les femmes, qui étaient l’une des dernières voies permettant aux femmes d’accéder à une formation professionnelle.  Cette nouvelle restriction creuse un fossé à long terme dans la capacité du pays à protéger la santé des femmes et des filles, ne faisant qu’aggraver la mortalité maternelle et infantile en Afghanistan, déjà l’une des plus élevées au monde, a déploré la Représentante spéciale.  La MANUA, a-t-elle ajouté, surveille de près l’application par les Taliban de la loi sur la prévention du vice et la promotion de la vertu, qui, a-t-elle indiqué, demeure un obstacle majeur à la mise en œuvre de la voie politique nécessaire à la réintégration de l’Afghanistan dans la communauté internationale. 

En ce qui concerne la situation sécuritaire, les autorités de facto continuent d’exercer un contrôle total sur le pays, bien que des incidents sécuritaires continuent de se produire.  L’EIIL-Province du Khorassan a revendiqué un attentat suicide contre des agents de sécurité des autorités de facto qui faisaient la queue pour recevoir leurs salaires à Konduz le 11 février, tuant 4 civils et 14 agents de sécurité de facto, et faisant un nombre inconnu de blessés. 

« Comment pouvons-nous aller de l’avant compte tenu de ces tendances négatives? » s’est demandé Mme Otunbayeva.  La tendance des événements au niveau mondial, notamment les priorités internationales concurrentes, les contraintes budgétaires et la disposition croissante des gouvernements à se concentrer sur les problèmes internes, risquent d’appauvrir l’Afghanistan, de le rendre plus vulnérable et de l’isoler davantage, a prévenu la Représentante spéciale.  Le développement le plus utile serait un signal clair de la part des autorités de facto indiquant qu’elles sont engagées dans la réintégration de l’Afghanistan dans la communauté internationale avec tout ce que cela suppose. « C’est le moment de faire preuve de réalisme », a ajouté la Représentante spéciale. 

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