Soixante-huitième session
10e et 11e séances plénières – matin & après-midi
FEM/2235

Commission de la condition de la femme: présentation de 10 exposés volontaires sur les systèmes de protection sociale

La Commission de la condition de la femme a entendu, aujourd’hui, 10 exposés volontaires sur « Les systèmes de protection sociale, l’accès aux services publics et infrastructures pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles », thème de sa soixante-troisième session (2019).

Dix États Membres, à savoir l’Australie, la Colombie, l’Iran, la Jordanie, le Mali, le Maroc, le Mexique, la Pologne, le Rwanda et l’Ukraine, et se sont soumis à cet exercice qui prévoit la possibilité d’un dialogue interactif avec les membres de la Commission.

Venue présenter le rapport du Secrétaire général (E/CN.6/2024/4) relatif à la mise en œuvre des conclusions concertées de la soixante-troisième session de la Commission de la condition de la femme sur le thème précité, une responsable d’ONU-Femmes a souligné que des investissements et des efforts de développement renouvelés et solides sont nécessaires pour renforcer la protection sociale, les services publics et les infrastructures durables afin de garantir la sécurité économique et sociale, la résilience et le bien-être des femmes et des filles. 

La délégation de l’Australie a ensuite présenté son plan en la matière, qui vise notamment à remédier aux risques qui pèsent sur les femmes à chaque étape de leur vie.  Une représentante de la société civile et des peuples autochtones a ajouté que ce plan cherche également à remédier à la marginalisation des femmes autochtones, celles-ci étant surreprésentées en prison et sous-représentées dans les processus de prise de décisions. 

La présentation de l’Ukraine a été dominée par la « guerre totale » déclenchée par la Russie, qui a causé la mort de 29 330 civils, dont 1 822 enfants, et provoqué le déplacement de 4 965 000 Ukrainiens, dont 60% sont des femmes.  Malgré la guerre, l’Ukraine continue de mettre en œuvre sa politique nationale d’égalité des genres, a assuré la délégation qui a rappelé que son pays a ratifié l’an dernier la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.  Elle a mentionné la création de 11 centres d’aide aux survivants afin de remédier aux traumatismes de guerre et a fait savoir qu’en 2023 une aide a été apportée à 91 000 victimes de violence sexo-spécifique.  Enfin, elle a indiqué que le plan de relèvement de l’Ukraine, qui court de 2024 à 2027 et est doté de 50 milliards d’euros, comprend une section consacrée à l’égalité des genres. 

À son tour, la délégation du Maroc a précisé que la Constitution du pays promeut les droits des femmes et de la famille et consacre l’accès de tous les Marocains et Marocaines aux services sociaux.  Le Ministère du bien-être social a également engagé plusieurs réformes, avec notamment la mise en place en 2023 d’un registre unifié permettant d’identifier les familles ayant besoin d’une aide sociale. Plus de 22 millions de personnes ont pu bénéficier d’une couverture sanitaire universelle.  Cela a été rendu possible grâce à une diversification des sources de financement, a déclaré le délégué qui a reconnu que « la santé coûte cher ».  Il a également détaillé la politique visant à offrir un logement décent, ainsi que les efforts de relèvement après le récent tremblement de terre qui a frappé le Maroc. 

La délégation du Rwanda a elle aussi donné un aperçu de la politique nationale de protection sociale, citant la loi de 2020 établissant le régime de congé de maternité, ainsi qu’un texte de 2021 qui garantit l’égalité des droits des femmes et des hommes en matière d’accès, de propriété et d’utilisation des terres.  Dans un pays où les ménages dirigés par des femmes représentent 17% des 460 000 foyers les plus pauvres, le programme de protection sociale a joué un rôle important dans l’amélioration des moyens de subsistance, contribuant à une réduction de la pauvreté entre 2019 et 2023, tandis que l’assurance maladie a considérablement amélioré l’accès aux services de santé pour les femmes enceintes.  En outre, 82% de la population a accès à l’eau potable à 200 mètres de leur domicile en zone urbaine et à 500 mètres en zone rurale, ce qui joue en faveur des femmes généralement en charge de la collecte d’eau, a encore expliqué l’intervenante. 

Comment l’intégration de la perspective de genre dans la budgétisation a-t-elle permis de renforcer les programmes de protection sociale, a voulu savoir le Maroc, suite à quoi la représentante du Rwanda a précisé que les ressources budgétaires sont équitablement réparties afin de promouvoir l’égalité de genre au niveau national, à l’instar du programme « une vache par famille ».  Le Gouvernement mise également sur des infrastructures durables qui contribuent à l’autonomisation des femmes, notamment en termes d’assainissement, d’accès à l’eau potable et à l’énergie.  Passant à la question de la Hongrie sur le rôle de la redevabilité dans l’avancement de l’égalité de genres, l’intervenante a expliqué que la législation joue un rôle de premier plan pour aborder les inégalités au sein des communautés. 

Le prochain exposé volontaire était celui de la Pologne qui a mis l’accent sur plusieurs mesures phares visant à promouvoir l’autonomisation des femmes, à savoir la rémunération égale pour travail égal et l’accès des femmes aux technologies et au numérique ainsi qu’à des opportunités équitables sur le marché du travail.  Des efforts sont déployés pour garantir un équilibre entre vie privée et vie professionnelle.  Un soutien de 200$ par mois et par enfant est accordé, et à partir du troisième enfant les allocations augmentent, a expliqué la Ministre pour l’égalité des genres. Les mères ont des cartes de soins pour elles et leurs enfants en bas âge.  En outre, pour faciliter le retour au travail rémunéré des femmes, le système des crèches et des assistantes familiales a été développé et les congés parentaux couvrent 41 semaines.  Les écarts de salaire sont cependant toujours bien réels et il faudra opter pour des mesures ciblées pour renforcer la transparence dans ce domaine et rallier les hommes à ces efforts.  En termes de discrimination positive, elle a expliqué que l’âge de la retraite est de 60 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes. 

Suite à une question de la Géorgie qui s’est intéressée aux répercussions de l’arrivée de 2 millions de réfugiés ukrainiens en Pologne, la Ministre polonaise a indiqué que différents services sociaux leur sont offerts, de même qu’une assistance pécuniaire et non pécuniaire. Qu’en est-il de l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et filles rurales? a demandé le Panama, valant à l’intervenant d’expliquer que le programme 2022-2029 prévoit la prise en charge des enfants en zone rurale dans des crèches et autres centres privés, y compris en termes de transport. 

De son côté, la Vice-Présidente chargée des questions relatives aux femmes et à la famille de l’Iran a indiqué que le plan-cadre iranien accorde une attention particulière à la prise en charge de la problématique hommes-femmes dans la justice et que 1% de tous les budgets publics sont alloués à la famille et aux femmes.  Elle a également fait état de mesures spécifiques en faveur des femmes en situation de vulnérabilité, de facilités de financement pour l’entrepreneuriat féminin et de soutien aux femmes en milieu rural, y compris les nomades. Cela inclus la protection sociale et l’assurance maladie.  Elle a également signalé que les sanctions unilatérales qui visent son pays ont mis à mal le bien-être de la population iranienne. 

Suite à une question du Bélarus qui a demandé plus d’informations sur l’impact des mesures unilatérales sur les femmes et les filles en Iran, la représentante a expliqué que ces mesures empêchent notamment le développement des services de base de tous, pointant les difficultés d’accès aux médicaments des malades atteints du VIH/sida, d’autisme ou d’hémophilie.  Par ailleurs, le Gouvernement ne peut pas suffisamment investir dans les infrastructures de santé et les étudiants iraniens n’ont pas accès aux bourses d’étude à l’étranger. 

La Jordanie a voulu en savoir plus sur les dispositions juridiques permettant d’augmenter la participation des femmes iraniennes à la vie publique.  Afin de les aider à trouver un équilibre entre vie de famille et vie professionnelle, les femmes iraniennes bénéficient de neuf mois de congés de maternité et d’un système de crèches.  Elles ont également accès aux prêts bancaires garantis par l’État.  La délégation a également détaillé les aides aux femmes cheffes de famille, répondant ainsi à la question de la Malaisie sur les mesures en faveur de l’inclusivité financière des femmes. 

Ce fut ensuite au tour de la Jordanie qui a expliqué que les Jordaniennes et les étrangères qui se trouvent dans le pays ont accès à des services de santé sexuelle, une assistance en nature et en espèce, et des programmes de formation professionnelle.  Aujourd’hui, le taux de participation des femmes au système de protection sociale est supérieur à celui des hommes, s’est félicitée la Ministre du développement social.  La commission nationale pour l’autonomisation des femmes travaille en outre à l’inclusion numérique des femmes et les accompagne dans leur passage de l’économie informelle vers l’économie formelle, notamment par l’accès aux financements. 

Notant que le pays compte de nombreuses femmes cheffes d’entreprise, l’Égypte s’est intéressée au système de prise en charge des enfants.  La Ministre a expliqué que le système de garderies d’enfants a été étoffé et se montre particulièrement souple vis-à-vis de crèches à domicile qui n’ont pas besoin de licence.  Elle a également indiqué que les écarts de salaire et le harcèlement sexuel dans le cadre du travail sont pénalisés par la loi et que des quotas ont été fixés en termes de pourcentage de femmes qui siègent dans les Conseils d’administration. 

Répondant aux demandes de précisions du Maroc au sujet du fonds national d’éradication de la pauvreté, la Ministre a expliqué que ce mécanisme identifie, entre autres, les familles en proie à la violence domestique et que 66% de ses bénéficiaires sont des familles qui ont à leur tête une femme. 

Au Mali, l’accent est mis sur le renforcement de l’accès des femmes aux financements, en adaptant le système de crédit à leurs besoins spécifiques des femmes, a témoigné la Ministre de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille qui a précisé que les femmes représentent 59,26% des bénéficiaires des prêts accordés par les systèmes de financement décentralisés.

En termes de réalisation, elle a cité le taux de couverture de la population par le régime d’assurance médicale qui est passé de 16% en 2019 à 28,09% en 2022, ainsi que la création de 17 centres de prise en charge des femmes et des filles survivantes de violence. 

Quant aux défis qui restent à relever, la Ministre a cité l’opérationnalisation du régime d’assurance maladie universelle; le renforcement du cadre législatif dans le domaine de la lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants; l’intégration de la dimension genre dans les réformes politiques et institutionnelles en cours; et l’amélioration de l’accès des femmes aux technologies de l’information et de la communication, entre autres. 

Suite aux interrogations du Cameroun au sujet de la couverture santé universelle, la Ministre a fait savoir que l’État malien a mis en place des dispositifs comme l’assurance maladie obligatoire. S’agissant des solutions envisagées pour surmonter les barrières à l’autonomisation des femmes et des filles, question soulevée par le Canada, elle a insisté sur l’impératif de travailler dans le secteur formel au lieu de l’économie informelle où 90% des femmes travaillent.  Elle s’est également inquiétée des difficultés d’accès aux financements et à la terre pour les femmes, et des répercussions de l’analphabétisme et de l’insécurité.  À une question du Qatar, elle a répondu qu’il existe un cadre de suivi et de concertation pour s’assurer de l’efficience de l’appui apporté aux femmes et aux filles. 

La Présidente de l’Institut national des femmes du Mexique a ensuite indiqué que son gouvernement entend parvenir à un système national de soins qui permette de faire reconnaître, de répartir et de rémunérer le travail de soins à la personne, travail souvent non rémunéré et qu’occupent majoritairement les femmes qui se retrouvent exclues des systèmes de protection sociale.  L’engagement en faveur des populations les plus vulnérables a permis, au cours des quatre dernières années, à 3,5 millions de femmes de sortir de la pauvreté modérée, et à près de 700 000 de sortir de la pauvreté extrême, a précisé l’intervenante.  La politique du salaire minimum a permis des gains significatifs en matière d’emploi puisqu’en 2023, plus de 3 millions de femmes de plus sont entrées sur le marché du travail par rapport à avant la pandémie.  Elle a également signalé que le nombre de féminicides a baissé de 36% et que des stratégies visant à garantir l’accès des femmes rurales et autochtones à la propriété foncière ont été mises en place.  Elle a ensuite cédé la parole à une sénatrice qui a axé son intervention sur la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, et contre les stéréotypes sexistes.  Elle a aussi mis l’accent sur la représentation des femmes au sein des structures politiques et gouvernementales, en signalant que deux femmes sont en lice pour la présidentielle au Mexique ce qui prouve un « changement radical ». 

Le Chili a voulu connaître les avantages que représente un gouvernement progressiste pour faire avancer les objectifs en termes d’égalité, ce à quoi la représentante mexicaine a répondu que cela a permis de transversaliser cette approche, y compris au niveau des états fédérés.  Un gouvernement progressiste se soucie des tous, y compris des femmes, des personnes vulnérables et des minorités, a-t-elle souligné. 

Suite à une question de l’Équateur qui s’est intéressé au problème du travail non rémunéré, la délégation mexicaine a détaillé les différentes étapes de la mise en œuvre de la Convention 189 de l’Organisation internationale du travail (OIT).

Dernier pays à présenter son exposé volontaire, la Colombie a indiqué que sa stratégie s’articule autour d’une conception qui voit les femmes comme les premières actrices du changement.  La perspective de genre est intégrée par tous les ministères, a dit la Vice-Ministre des femmes qui a qualifié l’approche intersectionelle de « capitale » car elle permet de saisir au mieux la complexité de la situation des femmes.  Elle a estimé à 16 millions le nombre de femmes dans le pays ayant besoin d’une attention spécifique.  La rémunération des personnes prodiguant des soins est un autre axe de la politique colombienne de protection sociale.  L’accompagnement des femmes au niveau local est très important, a-t-elle ajouté, de même que la budgétisation sensible au genre.  Elle a signalé que les inégalités entre les genres sont colossales en Colombie, malgré les progrès enregistrés.  Le système de santé tout comme le système judiciaire en Colombie reconnaissent néanmoins la spécificité des besoins des femmes.  Répondant à une question du Mexique sur l’intersectionnalité des discriminations, elle a d’abord indiqué qu’il s’agit d’une réalité très concrète.  Nous avons budgétisé des actions au bénéfice des femmes autochtones, avec lesquelles le dialogue est continu, a-t-elle dit.  Enfin, elle a précisé que la création du Ministère des femmes remonte à un an et demi et que l’un de ses objectifs majeurs est la prévention de la violence et des féminicides. 

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