Le Conseil de sécurité entend des propositions pour renforcer l’efficacité des opérations de maintien de la paix de l’ONU
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Soulignant que l’objectif ultime de toutes les opérations de maintien de la paix est politique, le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, M. Jean-Pierre Lacroix, a appelé, aujourd’hui, le Conseil de sécurité et l’ensemble des États Membres à mobiliser un soutien « fort, cohérent et unifié » aux missions de maintien de la paix et, en particulier, à encourager les parties à trouver et à mettre en œuvre des solutions politiques aux conflits.
« Une opération de maintien de la paix est, et devrait toujours être, l’une des expressions les plus concrètes de la détermination collective du Conseil de sécurité à régler efficacement les conflits », a déclaré M. Jean-Pierre Lacroix.
Le Secrétaire général adjoint a également souligné que l’efficacité des opérations de maintien de la paix dépend de mandats stratégiques clairs, réalisables, adaptables aux circonstances changeantes et dotés de ressources suffisantes. L’adoption de mandats longs et détaillés sans les ressources nécessaires suscite des attentes irréalistes, ce qui risque d’alimenter la frustration des États hôtes et de leurs populations et constitue un terreau fertile pour la désinformation, a-t-il mis en garde.
Préoccupé par la persistance de divisions au sein du Conseil, le Président et Directeur général de l’International Peace Institute, M. Zeid Ra’ad al-Hussein, a invité pour sa part les membres à mandater le Secrétaire général pour qu’il se rende en personne sur le terrain afin d’évaluer la situation dans les points chauds du globe et présente ensuite des suggestions. Le Conseil doit faire confiance au Secrétaire général et à son impartialité et son bon jugement lorsqu’il aborde des questions relatives à la paix et à la sécurité, a estimé M. Zeid Ra’ad al-Hussein.
Aujourd’hui, il y a un déclin de la volonté des États d’accueillir des missions qu’ils considèrent comme dépassées, tandis que les autres pays sont réticents à fournir une masse critique de soutien politique pour mettre fin à des conflits qui semblent désormais interminables. Au cœur de tout cela se trouve la confiance défaillante de l’ONU en elle-même, en sa capacité à être une organisation de paix dans les circonstances les plus difficiles, a analysé l’ancien Haut-Commissaire aux droits de l’homme.
La Slovénie a insisté sur l’impératif, pour les opérations de paix, de promouvoir l’engagement des communautés, l’autonomisation des femmes et des jeunes, et des processus politiques inclusifs, tout en se montrant capables de s’adapter à la nature évolutive des conflits mondiaux. Prévoir des objectifs stratégiques clairs qui correspondent aux attentes des gouvernements hôtes et des populations civiles est également important, a ajouté la délégation.
Il est aussi essentiel de définir des attentes claires quant aux responsabilités des États hôtes, afin de réduire le risque de retraits accélérés des missions, a ajouté le Royaume-Uni qui a insisté sur l’importance du soutien et du consentement politiques des pays hôtes pour garantir l’exécution efficace des mandats et des transitions bien planifiées.
Le Mozambique a émis des doutes quant à l’efficacité d’un « modèle unique » dans le cadre des opérations de maintien de la paix, arguant que chaque pays a ses propres complexités, et chaque conflit ses propres spécificités. Le succès de l’Opération des Nations Unies au Mozambique (ONUMOZ) peut notamment être attribué à la volonté politique des parties de mettre fin au conflit par un accord de paix, a soutenu la délégation.
À ce propos, la Suisse a plaidé pour l’élaboration de modèles de missions « modulables » afin de mieux faire face aux situations concrètes, notant en outre qu’une participation significative des femmes augmente les chances de succès et aide à réduire les risques des missions. Un point de vue partagé par Malte qui a, par ailleurs, appelé le Conseil à s’intéresser davantage aux effets négatifs que les opérations de maintien de la paix peuvent avoir sur l’environnement et les communautés d’accueil.
Présidente du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les opérations de maintien de la paix, la République de Corée a estimé pour sa part qu’une bonne gestion de la transition des opérations de paix en Afrique « est la tâche la plus urgente et la plus ardue d’aujourd’hui. » Elle a soutenu un partenariat avec l’Union africaine à cet égard, notamment par la mise en œuvre de la résolution 2719 (2023) qui, a rappelé M. Lacroix, a permis aux opérations de paix dirigées par l’Union africaine (UA) d’accéder aux contributions statutaires de l’ONU au cas par cas.
Une plus grande implication des organisations régionales telles que l’UA est cruciale, a appuyé la délégation des États-Unis qui a par ailleurs relevé que les missions multidimensionnelles ont apporté de nombreux bénéfices, tout en reconnaissant que le principe d’un mandat plus ciblé et visant quelques objectifs clairs pourrait obtenir un plus grand soutien au sein du Conseil.
La Chine a d’ailleurs recommandé que le Conseil évite d’élargir le mandat des missions à chaque renouvellement, tendance qui tend à rendre lesdits mandats trop vastes et pas assez ciblés. Il faut réduire les tâches secondaires des soldats de la paix, en particulier celles liées aux droits humains, au genre et au climat, qui détournent l’attention de l’exercice des fonctions essentielles et nécessitent un financement important, a renchéri la Fédération de Russie.
Pour sa part, la Présidente et Directrice générale de l’International Crisis Group, Mme Comfort Ero, s’est montrée prudente quant aux propositions « chronophages » de remplacer les opérations de paix par des organisations régionales ou des missions ad hoc. « Il faut valoriser et renforcer les opérations de l’ONU, et non les rejeter », a plaidé Mme Ero selon qui l’ONU doit faire davantage pour comprendre la perception des communautés et, en retour, comment elle peut répondre aux leurs attentes.
OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES
Renforcement des opérations de maintien de la paix des Nations Unies: réflexions pour l’avenir (S/2024/638)
Déclarations
M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, a souligné que l’objectif ultime de toutes les opérations de maintien de la paix est politique, notant qu’elles sont toutes conçues pour appuyer les accords de paix entre les parties à un conflit. À cet égard, il a cité en exemple le travail de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), qui mobilise les principales parties prenantes pour faire avancer des solutions politiques inclusives et consensuelles, et de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP), qui promeut un environnement propice aux négociations et à un règlement éventuel.
Pour que les forces de maintien de la paix soient efficaces, le Conseil et l’ensemble des États Membres doivent mobiliser un soutien fort, cohérent et unifié aux missions de maintien de la paix et, en particulier, encourager les parties au conflit à trouver et à mettre en œuvre des solutions politiques au conflit. Une opération de maintien de la paix est, et devrait toujours être, l’une des expressions les plus concrètes de la détermination collective du Conseil de sécurité à régler efficacement les conflits, a-t-il souligné.
De même, l’engagement bilatéral de tous les États Membres avec les parties au conflit doit être compatible avec les décisions prises par le Conseil. Il a appelé ces derniers à exercer leur influence diplomatique pour appuyer les processus politiques que les opérations de maintien de la paix sont censées soutenir, et encourager les adversaires à s’engager en faveur d’un accord de paix et de sa mise en œuvre. Le soutien des États Membres est un élément central de tous les exemples réussis d’opérations de maintien de la paix, comme au Timor-Leste, au Libéria, en Côte d’Ivoire et en Sierra Leone, a-t-il fait observer.
Le Secrétaire général adjoint a ensuite souligné que l’efficacité des opérations de maintien de la paix dépend de mandats stratégiques clairs, réalisables, adaptables aux circonstances changeantes et dotés de ressources suffisantes. Il s’agit d’un facteur essentiel pour que toute mission soit adaptée à ses objectifs, a-t-il noté. De même, les mandats doivent être dotés des ressources nécessaires pour répondre aux ambitions du Conseil. L’adoption de mandats longs et détaillés sans les ressources nécessaires suscite des attentes irréalistes, ce qui risque d’alimenter la frustration des États hôtes et de leur population et constitue un terreau pour la désinformation, a-t-il mis en garde.
Notant que de nombreux moteurs de conflit -notamment la criminalité organisée, les groupes armés non étatiques aux idéologies extrémistes et les effets des changements climatiques- ne connaissent pas de frontières, il a estimé que le maintien de la paix doit adopter un modèle opérationnel davantage intégré au système des Nations Unies et aux partenaires régionaux et internationaux. Les États Membres doivent doter les opérations de mandats, de ressources et de la souplesse administrative pour leur permettre de s’engager dans des partenariats essentiels.
Le Secrétaire général adjoint a aussi appelé à investir dans le renforcement du maintien de la paix afin de le rendre plus efficace et plus adaptable aux défis actuels et à venir. En outre, la sécurité et le bien-être des soldats de la paix demeurent une préoccupation majeure, a-t-il signalé, alertant que le nombre total d’actes hostiles à l’encontre de Casques bleus a augmenté dans toutes les missions. La menace émergente des véhicules aériens sans pilote est une source de préoccupation croissante, a-t-il ajouté, notant que l’année 2024 aura été marquée par la première attaque par un drone armé contre une mission de l’ONU. Il a également signalé que les maladies demeurent la principale cause de décès parmi les soldats de la paix.
Après avoir exhorté les États Membres à faciliter l’accès des femmes aux postes de direction militaire dans leur pays et à les désigner pour servir dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU, le Secrétaire général adjoint a prévenu des limites des opérations de paix. Les Casques bleus peuvent agir vigoureusement pour protéger les civils, mais ils ne font pas la guerre. En l’absence de cessez-le-feu ou d’accord politique, des mesures coercitives prises par les partenaires peuvent s’avérer nécessaires. Il a rappelé l’adoption de la résolution 2719 (2023), qui a permis aux opérations de paix dirigées par l’Union africaine d’accéder aux contributions statutaires de l’ONU au cas par cas.
Avant de conclure, M. Lacroix a souhaité que le Sommet de l’avenir débouche sur l’adoption d’un pacte ambitieux qui donne un mandat clair et fort pour poursuivre les efforts afin d’adapter le maintien de la paix aux défis d’aujourd’hui et de demain.
Mme COMFORT ERO, Présidente et Directrice générale de l’International Crisis Group, organisation non gouvernementale travaillant dans presque tous les pays où l’ONU a des opérations de paix, a observé que certains analystes parlent du déclin des opérations de maintien de la paix de l’ONU et suggèrent que des organisations régionales ou des missions ad hoc remplaceront les forces de l’Organisation. Toutefois, malgré le relatif rétrécissement des opérations de maintien de la paix de l’ONU au cours de la dernière décennie, la mise en place de missions ad hoc peut être un processus complexe et chronophage, a-t-elle relevé, prenant en exemple le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en Haïti. Dans ce contexte, elle s’est félicitée du fait que le projet de Pacte pour l’avenir demande au Secrétaire général de revoir toutes les formes d’opérations de paix de l’ONU. Elle a invité le Conseil et l’ONU dans son ensemble à valoriser et renforcer les opérations de l’ONU, et non les rejeter.
Mme Ero a ensuite rappelé que de nombreux civils jugent les opérations de paix à l’aune de la sécurité physique qu’elles peuvent offrir. Tout en signalant les manifestations de colère de la population en République démocratique du Congo face à l’incapacité des Casques bleus à mettre un terme à la violence contre les civils ou encore le scepticisme des Centrafricains face à l’action de l’ONU, elle a observé que, lorsque la violence éclate, les civils fuient vers les bases onusiennes dans l’espoir d’être en sécurité. Plus généralement, les civils ne comprennent pas les mandats et les limites auxquels sont confrontées les forces de maintien de la paix, a constaté l’intervenante, pour qui l’ONU doit faire davantage pour comprendre comment les communautés la perçoivent et, en retour, comment elle peut œuvrer pour répondre aux leurs attentes.
La responsable de l’International Crisis Group a par ailleurs noté que, dans de nombreux pays que couvre cette ONG, les opérations de maintien de la paix de l’ONU ne jouent plus un rôle politique majeur, même lorsque l’Organisation y compte des milliers de personnels. Après avoir longtemps joué un rôle de médiateur pour mettre fin à des guerres, l’ONU s’en remet aujourd’hui à d’autres acteurs, États individuels ou organisations régionales, pour diriger le processus de rétablissement de la paix et la médiation, a-t-elle constaté, y voyant une « bonne stratégie ». Dans certains cas, comme au Soudan du Sud, l’ONU a réussi à soutenir des initiatives de paix au niveau communautaire, même lorsque son influence au niveau national s’est réduite, a-t-elle salué, regrettant toutefois que, dans le cas du Sahara occidental, l’ONU maintienne des forces de maintien de la paix dans des endroits où les stratégies politiques qu’elles étaient censées servir ont depuis longtemps disparu. Le Conseil a la capacité et le devoir de combler ce « vide politique », a-t-elle conclu.
M. ZEID RA’AD AL-HUSSEIN, Président et Directeur général de l’International Peace Institute, a rappelé qu’il y a 30 ans, en Croatie, l’ONU comptait 15 bataillons ou unités constituées provenant de 11 pays différents de partout dans le monde. Des unités constituées américaines et russes travaillaient sur le même théâtre d’opérations, sous un commandement militaire de l’ONU dirigé par la France, a-t-il souligné en précisant que toutes les unités répondaient au Représentant spécial japonais Yasushi Akashi. Tout cela ne veut pas dire que le succès était garanti, a-t-il reconnu mais malgré des échecs, comme au Rwanda en 1994, « nous étions là, presque tous ensemble pour vivre la douleur ensemble, et, espérons-le, en tirer des leçons, ensemble ».
Aujourd’hui, a constaté l’orateur, il y a un déclin de la volonté des États d’accueillir des missions qu’ils considèrent comme dépassées, tandis que les autres pays sont réticents à fournir une masse critique de soutien politique pour mettre fin à des conflits qui semblent désormais interminables. Au cœur de tout cela se trouve la confiance défaillante de l’ONU en elle-même, en sa capacité à être une organisation de paix dans les circonstances les plus difficiles, a-t-il analysé.
Selon lui, l’Union africaine doit être considérée comme un partenaire stratégique de l’ONU, rien de moins. Il a aussi suggéré que le Conseil de sécurité se préoccupe moins de la structure précise des mandats et se concentre davantage sur le choix des bonnes personnes, conformément à l’Article 101, paragraphe 3 de la Charte des Nations Unies. Il faut également, a-t-il ajouté, laisser travailler les missions sans qu’elles soient entravées par les instructions contraignantes figurant dans les mandats.
Le Conseil étant si divisé, nous recommandons qu’il revienne aux fondamentaux, a poursuivi M. al-Hussein. Ainsi, lorsqu’une menace émergente ou réelle à la paix et à la sécurité internationales se manifeste, le Conseil devrait mandater le Secrétaire général pour qu’il se rende en personne au cœur du point chaud afin d’évaluer la situation, avant de faire rapport au Conseil avec des suggestions. C’est après ce rapport que le Conseil peut commencer à élaborer une réponse logique, a estimé l’orateur. Il a rappelé que c’est bien le Conseil qui choisit le Secrétaire général avant que l’Assemblée générale ne le nomme. De ce fait, le Conseil a le devoir de faire confiance au Secrétaire général et à son impartialité et son bon jugement lorsqu’il aborde des questions relatives à la paix et à la sécurité. « Si vous pensez que le Secrétaire général en est capable, respectez ses capacités en conséquence, donnez-lui un mandat et missionnez-le, écoutez-le et répondez à la crise en conséquence. »
Le représentant de la Slovénie a déclaré que pour améliorer les opérations de maintien de la paix de l’ONU, il faut prévoir des objectifs stratégiques clairs qui correspondent aux attentes des gouvernements hôtes et des populations civiles. Ces opérations devraient promouvoir l’engagement des communautés, l’autonomisation des femmes et des jeunes, des processus politiques inclusifs, la responsabilité et la transparence, a-t-il énuméré. Il a ajouté que les opérations de paix devraient bénéficier de partenariats renforcés et solides avec les organisations régionales, nationales et locales pour une meilleure compréhension des dynamiques locales dans lesquelles elles évoluent. De plus, a proposé le délégué, les opérations de maintien de la paix doivent être plus agiles et réactives pour s’adapter à la nature évolutive des conflits mondiaux. Pour leur part, les gouvernements des pays hôtes devraient améliorer la gouvernance et la protection des populations civiles, a exhorté le représentant.
Le représentant du Royaume-Uni a estimé important de protéger et d’améliorer l’outil que constituent les opérations de maintien de la paix face aux défis nouveaux et systémiques. Pour ce faire, il est essentiel de définir des attentes claires quant aux responsabilités des États hôtes, afin de réduire le risque de retraits accélérés des missions. Nous avons besoin d’un partenariat et d’une collaboration plus solides, ainsi que du soutien et du consentement politiques des pays hôtes et des dirigeants des opérations de maintien de la paix, pour garantir l’exécution efficace des mandats et des transitions bien planifiées, a-t-il affirmé, avant de plaider pour des missions plus agiles et plus flexibles, avec des mandats ciblés et réalistes.
Renforcer les missions passe par l’amélioration du renseignement sur le maintien de la paix, la connaissance de la situation, a ajouté le délégué en suggérant d’adopter de nouvelles technologies telles que l’intelligence artificielle et de lutter efficacement contre l’exploitation et les abus sexuels. Pour préserver les gains des missions, il a insisté sur l’importance des transitions durables, guidées par les meilleures pratiques et les leçons apprises et garantissant la protection des civils. Saluant les progrès réalisés dans le cadre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, il a appelé à veiller à ce que toutes les opérations de paix soient pleinement représentatives et sûres pour les femmes. Les contributions des femmes font partie intégrante de toutes les étapes des missions de maintien de la paix, y compris les réductions, les transitions et les retraits, a-t-il fait valoir en soulignant l’engagement du Royaume-Uni à cet égard.
La représentante de la Suisse a constaté que le maintien de la paix est aujourd’hui menacé par les tensions existantes entre les États, la diminution du consensus et l’acceptation réduite par les États hôtes. Il importe donc d’adapter cet instrument de façon anticipatoire, a-t-elle préconisé, avant de rappeler que les opérations de paix s’inscrivent dans un contexte historique, culturel, social existant et viennent soutenir un processus politique, lequel doit impliquer toutes les parties prenantes, notamment les femmes. La participation significative de celles-ci augmente les chances de succès et aide à réduire les risques des missions, a assuré la déléguée. Elle a également plaidé pour l’élaboration de modèles de missions « modulables » afin de mieux faire face aux situations concrètes, souhaitant que le Conseil dispose d’un éventail de formats de mission pouvant être engagés et séquencés selon les besoins. La représentante a enfin estimé que l’unité du Conseil est importante pour la crédibilité des opérations de paix, pour leur acceptation sur le terrain et, en fin de compte, pour la sécurité des Casques bleus.
La représentante de Malte a salué la mémoire des 196 Casques bleus ayant perdu la vie à cause d’actes malveillants entre janvier 2017 et septembre 2024. En ce qui concerne l’amélioration des opérations de maintien de la paix, elle a recommandé d’adopter une approche holistique qui intègre de nombreuses questions transversales telles que les droits humains, les changements climatiques et le programme pour les femmes et la paix et la sécurité. À cette fin, les missions de maintien de la paix doivent recueillir un large soutien politique et disposer d’un financement adéquat et prévisible, a-t-elle plaidé en demandant aussi que les missions aient des mandats crédibles et réalistes, fondés sur des stratégies politiques claires qui garantissent la protection des civils et le respect et la promotion des droits humains.
La déléguée a aussi évoqué les effets négatifs que les opérations de maintien de la paix peuvent avoir sur l’environnement et les communautés d’accueil, jugeant essentiel que le Conseil de sécurité s’intéresse davantage à ce défi et agisse en conséquence. Cela exige le déploiement de missions vertes responsables utilisant efficacement les ressources naturelles, a-t-elle ajouté. En outre, des mandats « femmes et paix et sécurité » sont essentiels pour faire progresser les droits des femmes et assurer leur pleine participation, égale, significative et sûre à tous les aspects du maintien de la paix et de la sécurité, a conseillé la déléguée.
Le représentant du Mozambique a souligné que, depuis leur création en 1948, les missions de maintien de la paix ont énormément contribué à la sécurité collective. Se basant sur la réussite de l’Opération des Nations Unies au Mozambique (ONUMOZ), il a dit que ce succès pouvait être attribué à la volonté politique des parties de mettre fin au conflit par un accord de paix contraignant entre elles et à la volonté du peuple mozambicain de mettre fin à la guerre. Elle peut aussi être attribuée au fort soutien reçu aux niveaux régional et international pour le règlement des conflits, a estimé le représentant qui a demandé à l’ONU de tenir compte de la nécessité d’avoir des mandats clairs, réalistes et bien conçus pour les opérations de maintien de la paix. Cela exige une planification minutieuse de la part du Secrétariat, ainsi que le respect de l’accord sur le statut des forces entre le pays hôte et le Secrétariat, une allocation de ressources proportionnelle à la mission prévue et une convergence complète du champ d’application des mandats entre le Conseil de sécurité et le Secrétaire général. Le délégué a de plus insisté sur la nécessité de respecter la souveraineté d’un État qui, bien que fragile ou défaillant, a droit à sa souveraineté.
Le représentant a émis des doutes quant à l’efficacité d’un « modèle unique » dans le cadre des opérations de maintien de la paix, arguant que chaque pays a ses propres complexités, et chaque conflit ses propres spécificités. Il incombe donc au Conseil de sécurité et au Secrétariat de prendre des mesures appropriées à chaque situation, a-t-il recommandé avant de recommander le renforcement du lien entre les processus de rétablissement, de maintien et de consolidation de la paix. Une opération de maintien de la paix qui est complètement détachée du rétablissement et de la consolidation de la paix a moins de chances de réussir, a-t-il expliqué.
Le représentant de la République de Corée a déclaré que les opérations de maintien de la paix doivent rester un outil efficace pour maintenir la paix et la sécurité internationales. Les défis auxquels les opérations sont confrontées ne doivent pas conduire à l’échec. Présidente du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les opérations de maintien de la paix, la République de Corée vise un soutien accru pour les opérations de maintien de la paix de la part de l’ensemble des membres de l’ONU. Elle s’efforcera de créer des synergies avec le Comité spécial des opérations de maintien de la paix (Comité des 34) et la Conférence ministérielle sur le maintien de la paix, afin de redynamiser le Groupe de travail et de contribuer aux délibérations sur l’avenir des opérations de maintien de la paix, a promis le délégué. Il a suggéré une bonne gestion de la transition des opérations de paix en Afrique « qui est la tâche la plus urgente et la plus ardue d’aujourd’hui. »
Il a appelé à tirer les enseignements de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et des transitions en cours, afin de bien gérer la relation avec le pays hôte et renforcer la coopération avec les organisations régionales et sous-régionales. Il a soutenu un partenariat avec l’UA à cet égard, notamment par la mise en œuvre de la résolution 2719 (2023). Il a estimé que les opérations de paix doivent s’adapter à l’utilisation malveillante des technologies et la propagation de la mésinformation et de la désinformation et jouer un rôle essentiel dans l’atténuation des effets néfastes des changements climatiques. Enfin, les opérations de paix devraient encourager une plus grande participation des femmes et s’engager plus directement auprès des populations locales, car, a-t-il souligné, gagner les cœurs et les esprits des communautés d’accueil est essentiel au succès des opérations de maintien de la paix.
Le représentant de l’Algérie a appelé à concevoir des mandats adaptables et réalisables qui fournissent des orientations stratégiques claires pour les opérations de maintien de la paix de l’ONU. Ces dernières doivent être basées sur les réalités, les priorités et les conditions sur le terrain, a-t-il souligné. Il est également nécessaire d’inclure, dès le début de la mission, des éléments clairs qui définissent les processus de transition et la stratégie de sortie échelonnée, tout en préservant les acquis en matière de sécurité. Et toute stratégie de sortie doit être basée sur des repères réalistes et réalisables, afin de donner au Conseil et au pays hôte, dans les contextes pertinents, la visibilité nécessaire. De même, la coopération avec le pays hôte doit être encore plus renforcée, conformément aux cadres juridiques pertinents et au mandat de la mission. La coopération, a-t-il dit, doit veiller à ce que les Nations Unies respectent les priorités nationales. En outre, le mandat des missions de maintien de la paix doit inclure une composante droits humains. Sans un tel outil, la présence de la mission sur le terrain manquera de légitimité et de crédibilité, a argué le représentant. De même, il a appelé à favoriser les partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales, notamment l’Union africaine. Selon lui, la primauté des solutions politiques aux conflits doit être reflétée dans le mandat des opérations de maintien de la paix de l’ONU.
Le représentant de la France a jugé que la « clef de voûte » du maintien de la paix est le soutien aux solutions politiques, qui sont le seul moyen de favoriser une paix durable après le départ des opérations de paix. Cet objectif passe par la mobilisation de tous: membres du Conseil, États hôtes, États impliqués dans les processus de paix et pays voisins, a-t-il souligné, saluant la réussite de la coopération entre État hôte et Nations Unies opérée par les missions au Libéria, en Côte d’Ivoire ou encore en Sierra Leone. Pour le délégué, les ensembles régionaux et sous-régionaux, ainsi que les États voisins, jouent également un rôle majeur pour soutenir et faire avancer les solutions politiques, de même que la bonne articulation avec les autres moyens d’action de l’ONU. Il a souhaité à cet égard que le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général puisse renforcer cette action collective.
Dans le même temps, les opérations de maintien de la paix doivent poursuivre leurs efforts pour s’adapter aux nouveaux défis et à chaque contexte, a-t-il poursuivi, réitérant le soutien de la France à l’effort de réforme entrepris via l’initiative « Action pour le maintien de la paix » et sa stratégie de mise en œuvre « Action pour le maintien de la paix Plus » (A4P+). Ce soutien s’est traduit par l’allocation de près de 7 millions d’euros de contributions volontaires au Département des opérations de paix et au Département de l’appui opérationnel au cours des deux dernières années, a précisé le représentant, ajoutant qu’un million d’euros seront versés ces quatre prochaines années au secteur de la recherche stratégique. Enfin, après avoir plaidé pour une intensification des partenariats afin d’améliorer le fonctionnement des opérations de paix, il a estimé que l’adoption de la résolution 2719 (2023) relative aux opérations africaines de paix offre un cadre propice au renforcement de la complémentarité entre l’ONU et l’Union africaine dans la réponse aux crises en Afrique. À cet égard, il a rappelé que la France participe à ces efforts à hauteur de 250 000 dollars de contributions volontaires cette année et que l’Union européenne a alloué 1,5 milliard d’euros en soutien à la prévention des conflits et aux efforts de sécurité en Afrique subsaharienne pour la période 2021-2027.
Le représentant de la Chine a souligné l’importance pour l’ONU de faire un bilan de ses opérations de paix et de mieux calibrer les missions compte tenu de l’évolution rapide de la situation internationale en matière de sécurité. Rappelant que le consentement des pays concernés, l’impartialité des missions et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense, sont le fruit de nombreuses années de pratique, il a souhaité que ces piliers restent des principes directeurs à long terme. Comme le note le Secrétaire général note dans le Nouvel Agenda pour la paix, les opérations de paix doivent être déployées pour appuyer un processus politique clairement défini, a-t-il souligné, voyant dans cette recommandation une orientation importante pour les transformer et les redynamiser. Plaidant aussi pour un mandat clair donné aux missions, pour assurer la paix et la stabilité, le délégué a estimé que les opérations multidimensionnelles déployées pour répondre à un conflit interne ne peuvent pas remplacer les efforts des pays eux-mêmes. Le délégué a aussi souhaité que le mandat d’une opération reflète la situation sur le terrain et corresponde aux priorités des pays et non « aux priorités politiques d’autres ». Il a demandé en outre que le Conseil évite d’élargir le mandat des missions à chaque renouvellement, tendance qui tend à rendre lesdits mandats trop vastes et pas assez ciblés.
Rappelant que le maintien des missions sur place n’est pas une fin en soi, le représentant a recommandé que le Conseil établisse rapidement une stratégie de sortie claire une fois que la situation se stabilise, pour ouvrir la voie à une transition. De surcroît, la performance des opérations de paix devrait, selon lui, être constamment améliorée pour que le pays hôte avance sur la voie de la stabilité et du développement. L’ONU doit également améliorer ses mécanismes de riposte aux crises et réduire le nombre des victimes. Notant par ailleurs que les contributions pour le maintien de la paix représentent deux tiers de l’ensemble du budget de l’ONU, il a appelé à garantir une discipline financière et éviter le gaspillage. Enfin, après avoir exhorté les missions de l’ONU à s’intéresser à leurs effets sociaux sur le terrain et à laisser un héritage vert après leur retrait, le délégué a plaidé pour l’octroi de ressources prévisibles et adéquates aux opérations de soutien à la paix menées par l’UA, conformément aux modalités prévues par la résolution 2719 (2023).
Le représentant des États-Unis a évoqué les obstacles qui entravent la conduite des opérations de maintien de la paix, notamment les divisions au sein même du Conseil de sécurité. Il a appelé à renforcer l’appui du Conseil en faveur de cet outil incontournable, estimant possible d’améliorer le modèle actuel de ces opérations. Il a souligné que les missions multidimensionnelles ont apporté de nombreux bénéfices, même si le principe d’un mandat plus ciblé et visant quelques objectifs clairs pourrait obtenir un plus grand soutien au sein du Conseil. De même, une plus grande implication des organisations régionales telles que l’Union africaine (UA) est cruciale, a-t-il dit. Pour le représentant, les missions doivent pourvoir opérer sans obstruction ni restriction. Les opérations de maintien de la paix sont là pour servir les populations, a-t-il rappelé en insistant sur l’importance de veiller à mieux protéger les civils. Le représentant a assuré que les États-Unis sont prêts à œuvrer au sein du Conseil pour améliorer ces opérations.
Le représentant du Japon a recommandé une volonté forte et collective de la part de toutes les parties prenantes afin d’améliorer l’efficacité des opérations de maintien de la paix. Avant cela et dans le même but, il a suggéré au Conseil de sécurité d’élaborer une stratégie politique active et cohérente, en établissant des mandats réalistes et réalisables avec un objectif stratégique clair et en répondant aux besoins et aux attentes des gouvernements hôtes et de leurs populations. Le délégué a également demandé au Conseil de maintenir une communication étroite avec les pays fournisseurs de contingents et de police et les missions sur le terrain, afin de connaître les capacités et les défis. Il a aussi suggéré au Conseil d’adopter une approche horizontale qui ne se concentre pas uniquement sur le maintien de la paix dirigé par les forces armées et de police, mais qui tienne également compte de la consolidation de la paix et de la prévention.
Qui plus est, le Conseil devrait se concentrer davantage sur les femmes et les jeunes, pour que la société soit résiliente et durable, a poursuivi le délégué. À cet égard, il a demandé au Conseil de veiller à ce que les opérations de paix élaborent des stratégies de sortie et des plans de transition viables très tôt, en coordination avec les pays hôtes et les équipes de pays des Nations Unies. Par ailleurs, le délégué a souligné l’importance de la sûreté et de la sécurité des Casques bleus, insistant sur le besoin de programmes de formation dans les domaines de la lutte contre les engins explosifs improvisés, du renseignement, de la lutte contre la mésinformation et la désinformation ainsi que de capacités médicales. Le Japon et l’Uruguay organiseront en décembre la réunion préparatoire en vue de la Conférence ministérielle sur le maintien de la paix de 2025 afin d’approfondir le débat international sur la formation et le partenariat, a-t-il annoncé. Enfin, il a mis en avant le rôle des organisations régionales, en particulier l’UA, en recommandant d’améliorer les capacités de leur personnel.
Le représentant de la Sierra Leone a noté que, depuis 1948, 72 opérations de maintien de la paix de l’ONU ont été déployées dans le monde, chargées de prévenir et de gérer les conflits violents entre les États et à l’intérieur de ceux-ci, ainsi que d’aider les acteurs nationaux à protéger et à consolider la paix après un conflit. En offrant aux belligérants des possibilités de dialogue et de résolution, ces opérations réduisent l’incidence des conflits récurrents, a-t-il observé, constatant que les missions de maintien de la paix mandatées par le Conseil continuent d’être un « phare d’espoir » pour des centaines de millions d’hommes, de femmes et d’enfants dans le monde.
Toutefois, a-t-il ajouté, ces opérations n’étant pas des fins en soi, elles doivent être mises en place dans le cadre de la Charte des Nations Unies, comme le prévoit le Nouvel Agenda pour la paix. La volonté politique des États Membres, en particulier ceux du Conseil de sécurité, est primordiale pour établir la légitimité et le succès des opérations de maintien de la paix, a souligné le délégué, avant d’appeler à des modèles de mission plus adaptatifs et centrés sur les personnes. De même, il a qualifié d’essentiels les partenariats avec les accords régionaux de maintien de la paix, saluant à cet égard l’adoption de la résolution 2719 (2023) sur le financement des opérations de soutien à la paix dirigées par l’UA, ainsi que le format de partenariat innovant approuvé dans la résolution 2699 (2023), qui donne mandat à la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en Haïti.
La représentante du Guyana a rappelé que le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général souligne la nécessité d’une approche holistique du maintien de la paix qui intègre la prévention des conflits, le maintien et la consolidation de la paix pour créer une voie durable vers la paix et la sécurité. Il est maintenant temps pour nous de mettre en pratique les leçons apprises, a—t-elle lancé. Selon la déléguée, si les organisations régionales et sous-régionales telles que l’Union africaine et la Communauté des Caraïbes (CARICOM) jouent un rôle crucial dans leur région, cela ne dispense en aucun cas le Conseil de sécurité de sa responsabilité principale en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales.
En prélude au Sommet de l’avenir, elle a proposé de renforcer les capacités des opérations de paix en améliorant la formation et la planification stratégique, et en modernisant les équipements. En outre, les principes de transparence et de responsabilité doivent rester au premier plan des mandats. Elle a également insisté sur le respect des droits humains par les opérations de maintien de la paix, avant de conseiller de tenir compte des impacts des changements climatiques qui peuvent agir comme un multiplicateur de risques, exacerbant les vulnérabilités et aggravant les griefs existants. Enfin, elle a appelé à la participation pleine et égale des femmes à tous les niveaux de commandement des opérations de maintien de la paix, à toutes les phases des opérations et de la planification, et à tous les processus de prise de décision. C’est vraiment un ingrédient essentiel pour une paix durable, a-t-elle argué, avant de mettre également en avant le rôle des jeunes.
Le représentant de l’Équateur a souligné la nécessité d’une coordination efficace entre les acteurs impliqués dans les opérations de maintien de la paix pour s’attaquer efficacement aux causes profondes des conflits. Cette efficacité peut être garantie par un dialogue franc avec les pays hôtes sur les stratégies et les mandats, ainsi que par la prise en compte de leurs progrès. Le délégué a également jugé essentiel que les mandats soient clairs, hiérarchisés et réalisables, en étant alignés sur les réalités du terrain. Cette approche est essentielle pour définir les objectifs stratégiques et hiérarchiser les tâches de la mission, a-t-il insisté en soulignant le rôle du Conseil à cet égard. En outre, il a plaidé pour un financement adéquat et durable, soulignant l’importance de la résolution 2719 (2023) qui établit un cadre pour un financement prévisible et durable des opérations de soutien à la paix dirigées par l’UA.
Le renforcement des opérations des organisations régionales et sous-régionales est crucial pour assurer une réponse coordonnée, a-t-il ajouté. À son avis, des initiatives telles que la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en Haïti, sous la direction éminente du Kenya, avec la participation de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), et autorisées par la résolution 2699 (2023), doivent disposer de mécanismes de coordination avec la mission de l’ONU sur le terrain et être alignées avec eux. En outre, les missions devraient amorcer la planification de la transition avec les pays hôtes, les équipes de pays des Nations Unies et d’autres acteurs nationaux concernés, dès les premières étapes de leurs opérations, a souhaité le représentant. Il a enfin suggéré de jeter la lumière sur les succès, de gérer les attentes et de contrer la désinformation et les discours de haine. Une communication efficace est nécessaire pour que la coordination entre tous les acteurs devienne une réalité, a-t-il conclu.
Le représentant de la Fédération de Russie a estimé que, quels que soient les changements que subissent les opérations de maintien de la paix de l’ONU, ils doivent être fondés sur le respect inconditionnel de la souveraineté des États hôtes et des buts et principes de la Charte des Nations Unies, ainsi que sur l’impératif des principes fondamentaux du maintien de la paix: le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense et de défense du mandat. Un autre élément clef est la coopération de l’ONU avec des organisations régionales et sous-régionales constructives, a-t-il ajouté. Moscou est ainsi favorable au développement de la coopération entre l’ONU, l’Union africaine et les organisations sous-régionales, sur la base du principe « solutions africaines aux problèmes africains ». Il importe également que les pays africains conservent une marge de manœuvre pour leurs propres décisions, indépendamment de toute forme d’aide financière extérieure, a souligné le délégué, justifiant ainsi l’appui de la Fédération de Russie à la résolution du Conseil sur le financement du maintien de la paix en Afrique.
Considérant que l’efficacité des missions réside avant tout dans la création des conditions préalables à un dialogue direct entre les parties en conflit dans l’intérêt de parvenir à un règlement politique, le représentant a souligné l’importance de l’unité du Conseil, sans laquelle il est impossible de s’entendre sur un mandat clair et réaliste, de gagner la confiance de l’État hôte et de fournir un soutien efficace aux efforts régionaux. À cet égard, il a jugé nécessaire de réduire les tâches secondaires des soldats de la paix, en particulier celles liées aux droits humains, au genre et au climat, « qui détournent l’attention de l’exercice des fonctions essentielles et nécessitent un financement important ». De même, il est selon lui fondamental de prendre en compte les points de vue et les besoins des États hôtes lors de la définition du mandat d’une opération de paix. La résolution de la crise interne du pays est un processus complexe, laborieux, souvent à long terme, qui doit être de nature nationale et prendre en compte les intérêts de tous les groupes de la population, a-t-il fait valoir. Quant à la désinformation sur les activités de l’ONU, il a estimé que cette question nécessite une approche globale, « car les commentaires négatifs adressés à l’Organisation ne constituent pas toujours une tentative de ternir sa réputation ».
Déclarations des autres délégations
Les profondes divisions au sein du Conseil de sécurité ont fait l’objet de commentaires inquiets et nombreux, de la part d’États non membres comme le Chili, le Pakistan et bien d’autres encore. « Sans un soutien politique fort des 15 membres de ce Conseil, les opérations sont affaiblies dans leur orientation, leur dynamisme et leur autorité », a formulé le Portugal, résumant les réflexions de ces délégations.
Pour que les opérations de paix soient mieux à même d’accomplir leurs objectifs, l’Angola a suggéré au Conseil de combler l’écart grandissant entre les mandats et ce que les missions peuvent réellement accomplir sur le terrain, de « gérer les attentes des autorités et des citoyens du pays hôte » et d’éviter ainsi aux missions d’essuyer une crise de légitimité –crise observée par un pays hôte tel que l’Éthiopie. La Grèce a aussi poussé pour des « mandats réalistes », ainsi que pour des « stratégies de transition et de sortie bien réfléchies ».
Conscients de la complexité du maintien de la paix, les pays contributeurs de troupes comme les Philippines ont en parallèle demandé au Conseil de bien clarifier le mandat des opérations de maintien de la paix, afin de garantir au mieux la sécurité des Casques bleus. La Roumanie a, elle, réclamé, avec d’autres pays contributeurs de troupes tels que le Kazakhstan, des fonds robustes, du personnel bien formé et du matériel militaire approprié pour les missions.
« Nous devons éviter que les missions ne soient progressivement perçues comme faisant partie du problème et non de la solution », a formulé la Lettonie, au nom des États baltes et du groupe des pays nordiques. Selon la délégation, la planification de la transition doit se situer au cœur de toute opération de paix dès le départ, tout comme l’évaluation et l’ajustement continus des structures de mission, afin de garantir qu’elles restent adaptées à leur objectif. L’Irlande a appelé à mettre en œuvre intégralement la résolution 2594 (2021) qui veille à ce que lorsque les opérations de paix de l’ONU sont réduites, elles le soient de manière à assurer la protection des civils et à renforcer la consolidation de la paix.
Le strict respect des normes de responsabilité et de transparence est également essentiel, a noté la Croatie. Cela implique des mécanismes solides de suivi et d’évaluation des missions de maintien de la paix pour maintenir leur crédibilité, leur efficacité et leur intégrité, et pour garantir qu’elles ne compromettent pas leur tâche la plus importante: la protection des civils.
L’Éthiopie a fait porter la principale responsabilité de la baisse de confiance de la population dans les missions -« de moins en moins acceptées », a-t-elle insisté- par le manque de représentation de l’Afrique au Conseil de sécurité et par les sanctions dont certains pays hôtes sont l’objet. Ces sanctions entraînent un manque d’accès à la coopération internationale et, par un effet pervers, la mise en place d’une « concurrence » entre la mission onusienne et le pays hôte.
D’une manière générale, la majorité des délégations considèrent acquis le fait que les organisations régionales sont destinées à jouer un rôle essentiel dans le maintien de la paix. Avec la régionalisation des conflits, accorder davantage de responsabilités aux organisations régionales est logique, a résumé le Maroc. La Grèce soutient d’ailleurs l’appel du Secrétaire général pour une nouvelle génération de missions mandatées par le Conseil et dirigées par des partenaires africains, avec un financement garanti par des contributions obligatoires. Pour renforcer les synergies, il est impératif de se réunir régulièrement sur les questions liées à la paix et à la sécurité. « Pas de réunions pour le plaisir d’organiser des réunions », a précisé l’Autriche: pour parvenir à une coopération et une interaction réelles, il faut inciter l’ONU et les organisations régionales à davantage se rencontrer et mieux se coordonner.
L’avancée significative apportée par la résolution 2719 (2023) dans ce domaine a été saluée par plusieurs délégations, dont le Burundi qui a relevé l’importance de soutenir les opérations régionales avec des ressources adéquates. D’autant que permettre aux organisations régionales de se comporter de manière responsable, c’est aussi leur permettre de contribuer de manière cohérente au maintien de la paix, ont ajouté les États baltes et le groupe des pays nordiques. L’Union africaine (UA) et ses organisations sous-régionales ont démontré un avantage comparatif évident en tant que premiers intervenants dotés de la volonté politique d’entreprendre des opérations offensives dans des environnements à haut risque, a estimé l’Angola, selon qui « une architecture africaine de paix et de sécurité bien financée est dans l’intérêt supérieur de la communauté internationale ». Le Viet Nam s’est quant à lui réjoui de la collaboration entre les Nations Unies et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) dans les opérations de paix, dans le cadre du Plan d’action 2021-2025.
S’agissant d’une prise en compte adéquate des points de vue des pays hôtes et des attentes de la population civile, le Chili a proposé de renforcer les liens entre responsables militaires des opérations de maintien de la paix et acteurs locaux. Il s’agit de mettre en place un « réseau d’artisans de paix », a résumé l’Italie qui, en termes de bonnes pratiques, a cité la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) « très respectueuse des populations locales et donc très stable ».
Sri Lanka et le Timor-Leste ont pointé le rôle crucial des femmes pour un maintien de la paix plus efficace, le Guatemala notant en outre que les femmes suscitaient davantage la confiance des victimes de conflits et de violences sexuelles en période de conflit. L’Indonésie a appelé à promouvoir les soldates de la paix autant que les soldats, tandis que le Burundi a indiqué avoir préparé une unité de police de maintien de la paix presque entièrement composée de femmes, encore non déployée mais prête à intervenir en cas de besoin.
La délégation éthiopienne a critiqué la militarisation excessive des missions et une certaine emprise des nouvelles technologies contribuant, selon elle, à des « excès de prudence ». À l’inverse, pour la Pologne et la Croatie, les missions de maintien de la paix doivent s’adapter en intégrant justement des technologies avancées pour renforcer leurs capacités de renseignement, selon une stratégie d’adaptation constante.
Enfin, la Thaïlande a appelé à prévenir les conflits en s’attaquant à leurs racines: « disparités socioéconomiques, pauvreté, inégalités au sein des pays et entre eux ». « Une paix durable nécessite une approche globale de la sécurité prenant en compte les causes profondes de la violence, ainsi que la situation sociale et économique sur le terrain », a acquiescé le Brésil.