9684e séance – matin 
CS/15763

Le Conseil de sécurité proroge d’une année supplémentaire le mandat du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti

En adoptant à l’unanimité de ses membres la résolution 2743 (2024), le Conseil de sécurité a décidé, ce matin, de proroger d’une année supplémentaire, jusqu’au 15 juillet 2025, le mandat du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH). 

Par ce texte, soumis par l’Équateur et les États-Unis, porte-plumes pour le dossier haïtien, le Conseil réaffirme la nécessité pour toutes les parties prenantes haïtiennes de continuer, notamment avec l’appui du BINUH, de mener un processus politique dirigé et contrôlé par les Haïtiens qui permette la tenue d’élections présidentielle et législatives libres et régulières, avec la participation des femmes, des jeunes, de la société civile et des autres parties prenantes concernées. 

En outre, le Conseil prie instamment toutes les parties prenantes haïtiennes de créer « de toute urgence » un Conseil électoral provisoire et de convenir d’une feuille de route pour ces élections qui soit « pérenne, assortie de délais et communément acceptée ». 

Le Conseil demande par ailleurs au BINUH d’élaborer, en consultation avec le Gouvernement haïtien, une stratégie concernant les moyens qu’il emploiera pour continuer d’appuyer le processus politique dans le cadre de sa mission de bons offices et de compléter les efforts déployés par les pays voisins et par les organisations régionales et infrarégionales telles que la CARICOM (Communauté des Caraïbes), en vue de rétablir rapidement les institutions démocratiques et de favoriser la participation de tous les secteurs de la société haïtienne. 

Le texte précise que l’effectif maximal du groupe du BINUH chargé des questions touchant à la police et aux services pénitentiaires restera fixé à 70 civils et agents en détachement, chargés de renforcer l’appui stratégique aux moyens de formation et d’enquête de la Police nationale d’Haïti (PNH).  Parallèlement, le BINUH est encouragé à continuer de mener à bien d’autres tâches relevant déjà de son mandat, notamment dans les domaines de l’appui consultatif à la PNH, de la bonne gouvernance, de la justice, de la lutte contre la violence locale, les armes et les flux financiers illicites, de la gestion des ports et des frontières et de la communication d’information concernant les droits humains pour faire progresser le désarmement, la démobilisation, le démantèlement des bandes et la réintégration des membres des bandes par des approches non militaires. 

Enfin, la résolution 2743 (2024) souligne l’importance de la coordination entre le BINUH, la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), les autorités haïtiennes et d’autres partenaires internationaux et régionaux, afin d’assurer la complémentarité et d’optimiser le soutien international à la PNH. 

Cet aspect a particulièrement retenu l’attention des membres du Conseil.  L’adoption de cette résolution permet de renforcer le rôle du BINUH dans le contexte du déploiement du premier contingent de la MMAS, a salué l’Équateur, tandis que le Guyana, qui s’exprimait au nom des A3+ (Algérie, Mozambique, Sierra Leone et Guyana), insistait sur la priorité à accorder à la protection des plus vulnérables et à l’établissement d’un environnement sûr et juste pour tous les Haïtiens.  Si la MMAS peut réussir à appuyer la PNH et améliorer la situation sécuritaire, le BINUH sera davantage en mesure de mettre en œuvre son mandat, ont abondé les États-Unis.  La Chine et Malte ont quant à elles plaidé pour une coordination de tous les acteurs sur le terrain avec le Gouvernement haïtien. 

De son côté, la Fédération de Russie a dit escompter que, jusqu’à l’expiration de son mandat, le BINUH pourra renforcer sa présence à Port-au-Prince pour mettre en œuvre sa mission clef d’appui au processus politique et aux forces de l’ordre dans l’ensemble du pays.  La délégation russe a d’autre part émis l’espoir que les travaux du Conseil sur le dossier des sanctions auront lieu « dans le même esprit positif ».  Appelant pour leur part le Conseil à promouvoir le principe de responsabilité en envisageant des sanctions contre les individus et entités responsables ou complices d’actions qui menacent la paix et sécurité en Haïti, les États-Unis ont exigé la levée rapide de la mise en attente de Youri Latortue, homme politique haïtien accusé de collusion avec des gangs, sur la liste du Comité des sanctions. 

Invité par le Conseil, le représentant d’Haïti a vu dans l’adoption de la résolution 2743 (2024) le renouvellement de l’engagement de la communauté internationale à aider son pays à combattre la violence et l’insécurité créées par les gangs armés.  Ce vote constitue aussi un appui aux efforts déployés pour rétablir les institutions démocratiques, a-t-il ajouté, notant avec satisfaction que le Conseil salue les avancées réalisées sur le plan politique, telles que la mise en place du Conseil présidentiel de transition et l’investiture du Premier Ministre et de son cabinet. 

Tout en se réjouissant du déploiement en cours de la MMAS, le délégué a estimé que la prorogation du mandat du BINUH ne saurait, à elle seule, suffire pour aider le Gouvernement à faire face aux défis sécuritaire et humanitaire que connaît le pays.  Il faut faire converger les synergies et trouver des idées innovantes qui répondent à la complexité de la situation, a-t-il plaidé, avant de reprendre à son compte l’appel du Conseil encourageant les États Membres, y compris les pays de la région, à fournir un appui en matière de sécurité à la PNH. 

Au nom de la CARICOM, la représentante de Saint-Kitts-et-Nevis s’est à son tour félicitée du « signal positif » que représente cette résolution.  Le renouvellement du mandat du BINUH, associé au début du déploiement de la MMAS, constitue une opportunité cruciale de progrès en Haïti, a-t-elle applaudi, exhortant les parties prenantes haïtiennes à travailler avec le Bureau pour faire avancer le processus politique haïtien.  Elle a aussi appelé les États Membres à se conformer pleinement aux dispositions de la résolution, en particulier celles liées à l’embargo sur les armes.  « Nous ne pouvons pas alimenter l’instabilité en Haïti tout en tentant simultanément de jeter les bases de la paix », a-t-elle conclu, non sans insister sur l’importance des contributions financières pour satisfaire aux besoins budgétaires et opérationnels de la MMAS. 

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI - S/2024/508

Texte du projet de résolution (S/2024/540)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures concernant Haïti, en particulier ses résolutions 2645 (2022), 2653 (2022) et 2692 (2023),

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité d’Haïti,

Rappelant en particulier sa résolution 2476 (2019), par laquelle le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) a été mis en place à partir du 16 octobre 2019 compte tenu du rapport du Secrétaire général en date du 1er mars 2019 (S/2019/198),

Rappelant la résolution 2653 (2022), dans laquelle il a pris des mesures de sanction face à la menace que font peser sur la paix et la sécurité internationales dans la région l’extrême violence des bandes et d’autres activités criminelles, ainsi que le trafic d’armes et les flux financiers illicites, rappelant également la résolution 2700 (2023), dans laquelle il a décidé de reconduire le régime de sanctions imposé à Haïti, qui prévoit l’interdiction de voyager, le gel des avoirs et un embargo sur les armes, et rappelant en outre la résolution 2664 (2022), qui annule et remplace la dérogation au gel des avoirs visée au paragraphe 10 de la résolution 2653 (2022),

Rappelant sa résolution 2699 (2023) par laquelle, agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, il a autorisé les États Membres qui avaient informé le Secrétaire général de leur participation à constituer et à déployer une Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en Haïti en vue de soutenir l’action menée par la Police nationale d’Haïti pour rétablir la sécurité en Haïti, dans le strict respect du droit international, notamment du droit international des droits de l’homme, selon qu’il convient, et de créer les conditions de sécurité propices à la tenue d’élections libres et régulières,

Condamnant avec la plus grande fermeté l’intensification de la violence, des activités criminelles, des déplacements massifs de civils et des violations des droits humains et des atteintes à ces droits qui compromettent la paix, la stabilité et la sécurité d’Haïti et de la région, notamment les enlèvements, la violence sexuelle et fondée sur le genre, la traite des personnes et le trafic illicite de migrants, les homicides, les exécutions extrajudiciaires et l’enlèvement et le recrutement d’enfants par des groupes armés et des réseaux criminels, et notant avec une vive préoccupation les effets de la dynamique de la criminalité transnationale organisée sur les conditions de sécurité en Haïti, notamment en ce qui concerne le commerce illicite d’armes et de munitions et le trafic de drogue,

Soulignant que c’est au Gouvernement haïtien qu’il incombe au premier chef de s’attaquer aux causes profondes de l’instabilité et de l’inégalité, de faire respecter, de promouvoir et de protéger tous les droits humains, et de se concerter avec les autres parties prenantes, à savoir la société civile, les jeunes et le secteur privé, en vue d’apporter des solutions durables aux problèmes immédiats et à long terme d’Haïti, et de garantir la participation pleine, égale, véritable, en toute sécurité, des femmes,

Insistant sur la nécessité de parvenir à des solutions politiques pour remédier aux causes profondes de l’instabilité en Haïti et soulignant à cet égard qu’il importe de toute urgence d’encourager une plus grande participation au processus politique en forgeant le consensus le plus large possible en vue de la tenue d’élections libres et régulières qui soient crédibles et du rétablissement des institutions démocratiques,

Saluant la mise en place du dispositif de gouvernance transitoire en Haïti, conformément à la déclaration de la CARICOM publiée le 11 mars 2024, ainsi que la création subséquente du Conseil présidentiel de transition et l’investiture du Premier Ministre par intérim et de son Cabinet,

Félicitant la Police nationale d’Haïti de continuer de s’acquitter de ses fonctions et de sécuriser les infrastructures critiques, et prenant note de l’arrivée du premier contingent déployé dans le cadre de la Mission multinationale d’appui à la sécurité en vue de soutenir l’action menée par la Police nationale d’Haïti pour rétablir la sécurité en Haïti et créer les conditions de sécurité propices à la tenue d’élections libres et régulières,

Réaffirmant l’importance de l’état de droit, des droits humains et du rétablissement d’institutions judiciaires efficientes pour renforcer la lutte contre l’impunité, notant qu’il importe que le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme fournisse une assistance technique et un appui au renforcement des capacités de l’appareil judiciaire, des forces de sécurité et de l’administration pénitentiaire haïtiens, en collaboration avec le BINUH, et condamnant à nouveau avec la plus grande fermeté l’assassinat du Président d’Haïti, Jovenel Moïse, le 7 juillet 2021, et exhortant le Gouvernement haïtien à redoubler d’efforts pour en traduire les auteurs en justice dans les meilleurs délais et dans le respect du droit international des droits humains,

Réitérant l’importance de la mission de bons offices que mène le BINUH afin de favoriser un processus politique dirigé et contrôlé par les Haïtiens, devant aboutir à la tenue d’élections libres et régulières, et plus particulièrement de soutenir un dialogue national associant tous les secteurs de la société haïtienne, notamment les populations vivant dans les secteurs contrôlés par les bandes, et de favoriser une large participation, y compris des femmes et des jeunes, à la vie politique, suivant le calendrier de transition arrêté par les parties prenantes haïtiennes,

Se déclarant vivement préoccupé par le recours à la violence sexuelle et fondée sur le genre, perpétrée par des éléments appartenant à des bandes,

Notant avec une profonde préoccupation les crises intervenues sur les plans politique, économique, humanitaire, de la sécurité et des droits humains ainsi que les crises alimentaire et nutritionnelle aiguës qui s’accentuent en Haïti et les restrictions imposées à l’accès humanitaire, et réaffirmant la volonté de la communauté internationale de continuer d’accompagner le peuple haïtien,

Sachant que les catastrophes naturelles, notamment les ouragans, les séismes et les inondations et autres phénomènes météorologiques associés aux effets néfastes des changements climatiques, entre autres facteurs, peuvent avoir une incidence préjudiciable sur la sécurité alimentaire, la raréfaction de l’eau et la situation humanitaire en Haïti et aggraver l’instabilité existante, et se déclarant préoccupé par le fait que la violence des bandes et d’autres activités criminelles, entre autres facteurs, pourraient entraver les mesures de réduction des risques de catastrophe, de préparation et de renforcement de la résilience visant à faire face à ces phénomènes,

Rappelant qu’il importe d’assurer la protection des enfants et de prendre les mesures appropriées à cet égard, conformément à ses résolutions pertinentes, et se déclarant préoccupé par la gravité et le nombre alarmant de violations des droits humains des enfants et d’atteintes à ces droits qui ont été signalées, et se félicitant de la signature, en janvier 2024, d’un protocole convenu entre le Gouvernement et les Nations Unies concernant le transfert, aux acteurs civils de la protection de l’enfance, des enfants présumés associés à des groupes armés,

Exhortant les autorités haïtiennes à réduire la violence de manière globale et urgente, notamment par le renforcement de l’état de droit, des mesures socioéconomiques, des programmes de réduction de la violence, visant notamment à combattre la violence sexuelle et fondée sur le genre, des mesures de protection de l’enfance, la gestion des armes et des munitions et le renforcement des mécanismes nationaux de protection et d’établissement des responsabilités, ainsi que par toute initiative visant à aider au bon fonctionnement de l’appareil judiciaire et à rétablir des institutions judiciaires efficientes,

Condamnant fermement les violations et atteintes commises sur la personne d’enfants en Haïti et très préoccupé par leur gravité et leur nombre, et exhortant tous les acteurs, en particulier les bandes organisées et les réseaux criminels, à faire cesser immédiatement et à prévenir toutes les violations et atteintes commises sur la personne d’enfants, notamment les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique, le recrutement et l’utilisation d’enfants, les viols et les autres formes de violence sexuelle et fondée sur le genre, dont sont victimes notamment les filles, les attaques contre les écoles et les hôpitaux, les enlèvements et les refus d’accès humanitaire,

Vivement préoccupé par la circulation continue d’armes et de munitions illicites à destination de Haïti, soulignant à nouveau la forte corrélation qui existe entre le commerce illicite d’armes et de munitions à destination de Haïti, l’extension du contrôle territorial par des bandes armées et la violence extrême, y compris la violence sexuelle et fondée sur le genre, qui conduit à la dégradation des conditions de sécurité, et réaffirmant par conséquent le besoin urgent d’interdire le transfert d’armes et de matériel connexe de tous types à des acteurs non étatiques participant à la violence en bande organisée et à des activités criminelles ou à des atteintes aux droits humains en Haïti ou appuyant de tels actes, ainsi que d’en prévenir le commerce et le détournement illicites, 

Rappelant la signature par le Gouvernement haïtien du Plan d’action national visant à appliquer la Feuille de route pour l’exécution durable des mesures prioritaires des Caraïbes contre la prolifération illicite des armes à feu et des munitions dans les Caraïbes à l’horizon 2030, afin de remédier à la prolifération des armes et des munitions illicites, et demandant de nouveau au Gouvernement haïtien d’appliquer rapidement le Plan d’action national,

Rappelant qu’il importe de toute urgence de remédier au problème des flux financiers illicites à destination d’Haïti, qui permettent aux bandes armées d’opérer, menaçant de plus en plus la stabilité du pays, notamment en s’employant prioritairement à rompre les liens entre les acteurs politiques et économiques et les bandes armées,

Réaffirmant son appui au Panier de fonds des Nations Unies pour l’assistance à la sécurité en Haïti, élaboré avec l’appui du Programme des Nations Unies pour le développement, et engageant le BINUH à jouer un rôle de coordination pour ce qui est de l’assistance externe à la sécurité offerte à Haïti par l’intermédiaire de ce fonds,

Conscient du rôle important que jouent les pays voisins ainsi que les organisations régionales et infrarégionales telles que la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et d’autres partenaires internationaux, demandant à la communauté internationale de continuer d’appuyer les efforts faits par Haïti pour surmonter l’impasse politique actuelle et remédier à l’état de la sécurité, se félicitant des mesures prises par les États Membres pour intensifier la formation et le mentorat et améliorer la capacité opérationnelle de la Police nationale d’Haïti et encourageant l’appui et le financement d’activités visant à régler les problèmes auxquels se heurte Haïti sur les plans humanitaire, de la stabilisation, de la reconstruction, de la réduction des risques de catastrophe, de la réintégration et de la résilience et des problèmes liés au développement durable, notamment dans les secteurs agricole, industriel et éducatif,

Déplorant les perturbations que connaissent les jeunes sur le plan de l’éducation et des perspectives économiques, conscient de la nécessité d’introduire des mesures appropriées pour permettre le rétablissement physique et psychologique, la fourniture d’une aide, notamment juridique, et la réintégration sociale des jeunes survivants, tout en veillant à ce que les besoins respectifs des filles et des garçons et ceux des enfants handicapés soient pris en compte, notamment en ce qui concerne l’accès à des soins de santé, un soutien psychosocial et des programmes éducatifs qui contribuent au bien-être des enfants et à la paix et à la sécurité durables, réaffirmant la nécessité de renforcer l’aide internationale pour donner accès à des possibilités d’éducation et de développement de compétences telles que la formation professionnelle, et soulignant le rôle central et constructif que les jeunes peuvent jouer dans la prévention et le règlement des conflits,

Insistant sur la nécessité de remédier à la perte de sources de revenus et de sécurité alimentaire, nutritionnelle et sanitaire, au déplacement interne et au manque d’accès aux infrastructures sociales, et soulignant qu’il est essentiel de progresser sur les plans du relèvement, de la reconstruction et du renforcement de la résilience d’Haïti pour instaurer durablement la stabilité, la sécurité et le développement socioéconomique et à cet égard saluant la collaboration pluri-institutions à cette fin et la nécessité de satisfaire les besoins humanitaires les plus urgents,

Prenant note de la forte détérioration des conditions de sécurité résultant de l’instabilité politique et de la violence des bandes qui nuisent à l’autorité de l’État dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, de la propagation de ces phénomènes aux départements voisins et de leur impact sur l’environnement opérationnel du BINUH, et condamnant dans les termes les plus forts les actes de violence perpétrés par les gangs armés,

Soulignant qu’il lui incombe d’imposer des sanctions aux personnes et aux entités qui sont responsables ou complices d’activités faisant peser une menace sur la paix, la sécurité ou la stabilité en Haïti et soulignant également qu’il incombe au BINUH de faire connaître l’existence et le champ d’application de l’embargo territorial sur les armes imposé à Haïti en application des résolutions 2653 (2022) et 2700 (2023),

Notant avec inquiétude les signalements répétés du Groupe d’experts du Comité des sanctions créé en application de la résolution 2653 (2022) selon lesquels, malgré l’embargo territorial sur les armes imposé en octobre 2023 en application des résolutions 2699 (2023) et 2700 (2023), les bandes et autres acteurs non étatiques continuent de se procurer illégalement des armes et des munitions, en partie en raison du fait que les dispositions de l’embargo sont mal connues des institutions censées les faire appliquer,

Prenant note de la perturbation prolongée des vols commerciaux ainsi que des barrages routiers sur les principales routes, qui ont fortement limité l’accès au pays et à la capitale, augmenté les risques de sécurité pour le personnel du BINUH, sévèrement entravé la mobilité du personnel du BINUH à l’intérieur et à l’extérieur du lieu d’affectation et entraîné une réduction temporaire de la présence internationale à Port-au-Prince,

Soulignant qu’il faut renforcer les capacités et l’efficacité de la Police nationale d’Haïti, notamment en rouvrant les postes de police endommagés ou mis hors services en raison de la violence des bandes, afin d’étendre l’autorité de l’État et d’assurer une présence policière permanente dans toutes les communautés, 

1.    Décide de proroger jusqu’au 15 juillet 2025 le mandat du BINUH défini dans sa résolution 2476 (2019), sachant que le Bureau sera dirigé par un Représentant spécial du Secrétaire général, et de reconduire les dispositions relatives à la présentation de rapports énoncées au paragraphe 1 de la résolution 2645 (2022);

2.    Réaffirme la nécessité pour toutes les parties prenantes haïtiennes de continuer, notamment avec l’appui du BINUH, de mener un processus politique dirigé et contrôlé par les Haïtiens qui permette la tenue d’élections présidentielle et législatives libres et régulières, avec la participation pleine, égale et véritable, en toute sécurité, des femmes et la participation des jeunes, de la société civile et des autres parties prenantes concernées, au moyen d’un dialogue national associant toutes les parties haïtiennes, prie instamment toutes les parties prenantes haïtiennes de créer de toute urgence un Conseil électoral provisoire et de convenir d’une feuille de route pour les élections qui soit pérenne, assortie de délais et communément acceptée, et prie à cet égard le Gouvernement haïtien de l’informer dans 90 jours des progrès accomplis;

3.    Demande au BINUH d’élaborer, en consultation avec le Gouvernement haïtien, une stratégie concernant les moyens qu’il emploiera pour continuer d’appuyer un processus politique dirigé et contrôlé par les Haïtiens dans le cadre de sa mission de bons offices et de compléter les efforts déployés par les pays voisins et par les organisations régionales et infrarégionales telles que la CARICOM, en vue de rétablir rapidement les institutions démocratiques et de favoriser la participation de tous les secteurs de la société haïtienne, dont la société civile, et d’aider les autorités électorales haïtiennes à promouvoir une transition politique, et de lui présenter un point sur cette stratégie et sa mise en œuvre dans ses rapports trimestriels, par l’intermédiaire du Secrétaire général;

4.    Réaffirme que l’effectif maximal du groupe du BINUH chargé des questions touchant à la police et aux services pénitentiaires restera fixé à 70 civils et agents en détachement, qui exerceront des fonctions de conseillers pour les questions de police et pour les affaires pénitentiaires, et que ce groupe intensifiera son appui stratégique et consultatif aux moyens de formation et d’enquête de la Police nationale d’Haïti et rappelle le paragraphe 2 de la résolution 2645 (2022), dans lequel il a décidé que le groupe des droits humains du BINUH disposerait d’une capacité particulière de lutte contre la violence sexuelle et fondée sur le genre, notamment des moyens de repérer les conseillers pour la protection des femmes, et note que cette décision est conforme au Plan-cadre de coopération des Nations Unies pour le développement durable;

5.    Note les difficultés auxquelles se heurte le BINUH en matière de sécurité, exhorte les autorités haïtiennes à assurer la protection nécessaire du personnel des Nations Unies et souligne qu’il faut créer les conditions nécessaires pour que le BINUH puisse déployer à nouveau toutes ses capacités et reprendre les activités qui lui ont été confiées en Haïti aux fins de l’exécution de son mandat;

6.    Réaffirme son appui à la mise en œuvre effective du mandat du BINUH et encourage celui-ci, tout en continuant de privilégier le soutien à un processus politique dirigé et contrôlé par les Haïtiens en vue de la tenue d’élections libres et régulières, à continuer de mener à bien d’autres tâches essentielles qui relèvent déjà de son mandat, en particulier dans les domaines de l’appui consultatif à la Police nationale d’Haïti, notamment la formation concernant les tactiques de lutte contre les bandes, le respect des normes relatives aux droits humains et l’établissement de rapports à ce sujet, et les stratégies de mobilisation de la population, et notamment à l’occasion de visites sur le terrain dans les départements extérieurs à Port-au-Prince si nécessaire, en évitant toute duplication des efforts internationaux, de la bonne gouvernance, de la lutte contre la violence locale, de la justice, notamment en apportant un soutien aux parquets et aux tribunaux pour améliorer la capacité des autorités nationales à enquêter sur les crimes graves et à poursuivre et juger les auteurs, de la responsabilité effective, de la surveillance et de la communication d’information concernant les droits humains pour faire progresser le désarmement, la démobilisation, le démantèlement des bandes et la réintégration des membres des bandes par des approches non militaires, de la lutte contre les armes et les flux financiers illicites et de la gestion des frontières et des ports, et à renforcer la concertation avec les communautés qui ont été les plus touchées par la violence des bandes, dans la mesure où les conditions de sécurité le permettent et dans la limite de ses ressources et capacités actuelles; 

7.    Souligne l’importance de la coordination nécessaire entre le BINUH, principal interlocuteur des organismes des Nations Unies concernés en Haïti, la Mission multinationale d’appui à la sécurité, les autorités haïtiennes et d’autres partenaires internationaux et régionaux, afin d’assurer la complémentarité et d’éviter les doubles emplois, et d’optimiser le soutien international à la Police nationale d’Haïti, et renouvelle la demande faite dans la résolution 2699 (2023), dans laquelle il a prié la Mission multinationale d’appui à la sécurité de coopérer avec le BINUH et les organismes compétents des Nations Unies, dont notamment l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, afin d’aider la Police nationale d’Haïti à rétablir la sécurité dans le pays et notamment à combattre le trafic et le détournement d’armes et de matériels connexes et à améliorer la gestion et le contrôle des frontières et des ports;

8.    Réitère son soutien au Panier de fonds pour l’assistance à la sécurité en Haïti, élaboré avec l’appui du Programme des Nations Unies pour le développement et le BINUH;

9.    Souligne l’importance de la coordination entre le BINUH et les organismes compétents des Nations Unies pour ce qui est de l’assistance externe à la sécurité offerte à Haïti et rappelle qu’il faut appliquer la politique de diligence voulue en matière de droits humains en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes;

10.   Réaffirme que le BINUH doit tenir pleinement compte de la question transversale de la protection de l’enfance dans toutes les activités prévues par son mandat et aider les autorités, notamment la Police nationale d’Haïti, à protéger les droits des enfants, notamment en allouant des moyens spécifiques à la protection de l’enfance;

11.   Prie le Secrétaire général de continuer à surveiller et à signaler les violations et les atteintes commises contre les enfants en Haïti, et l’encourage à utiliser les outils existants à cette fin, notamment les rapports annuels sur les enfants et les conflits armés, conformément aux résolutions 1379 (2001), 1882 (2009), 1998 (2011) et 2225 (2015);

12.   Encourage le BINUH à veiller à ce que les questions d’égalité des genres soient prises en compte de manière transversale dans toutes les activités prévues par son mandat, notamment en favorisant la participation des femmes à la vie politique, en accordant une attention particulière aux violences sexuelles et fondées sur le genre et en soutenant la mise en œuvre du plan d’action national d’Haïti pour les femmes et la paix et la sécurité, et à associer davantage les organisations féminines de la société civile aux activités de consolidation de la paix et d’aide humanitaire;

13.   Encourage le BINUH, en étroite coopération avec les organismes compétents des Nations Unies, les organisations régionales et infrarégionales et les institutions financières internationales, à envisager des moyens de renforcer le secteur de la justice pénale en Haïti pour lutter contre l’impunité et promouvoir l’application du principe de responsabilité;

14.   Demande au BINUH d’aider le Gouvernement haïtien à élaborer et exécuter un plan de communication stratégique visant notamment à lutter contre la mésinformation et la désinformation concernant le travail des institutions de l’État et le processus politique, dans la limite de ses ressources et capacités actuelles;

15.   Encourage le BINUH, dans la limite de ses ressources et capacités actuelles, et en collaboration avec le Comité des sanctions et d’autres entités compétentes, à aider les autorités haïtiennes à faire mieux connaître les mécanismes de signalement des violations potentielles des mesures de sanction, en communiquant aux responsables de toutes les institutions nationales chargées de leur application les dispositions détaillées de l’embargo territorial sur les armes, énoncées au paragraphe 14 de la résolution 2699 (2023);

16.   Engagevivement les États Membres à appliquer sans retard l’embargo territorial sur les armes prévu dans les résolutions 2699 (2023) et 2700 (2023) et à interdire la fourniture, la vente ou le transfert d’armes légères et de petit calibre et de munitions à des acteurs non étatiques qui participent à la violence en bande organisée, à des activités criminelles ou à des atteintes aux droits humains en Haïti, telles que la violence sexuelle et fondée sur le genre, ou appuient de tels actes, ainsi qu’à prendre toutes les mesures voulues pour en empêcher le commerce et le détournement illicites, et se dit prêt à prendre de nouvelles mesures appropriées à cet égard dans les meilleurs délais, notamment la reconduction des dispositions des résolutions 2653 (2022) et 2700 (2023);

17.   Engage les États Membres à coopérer entre eux pour empêcher le commerce et le détournement illicites d’armes, notamment au moyen de l’inspection des cargaisons à destination d’Haïti, sur leur territoire, le cas échéant et conformément à la législation interne et au droit international, et de la fourniture et de l’échange rapides d’informations actualisées afin de répertorier et de combattre les sources et les chaînes d’approvisionnement du commerce illicite;

18.   Prie le BINUH de coopérer avec le Comité des sanctions créé en application de la résolution 2653 (2022) et son groupe d’experts afin d’en faciliter les travaux;

19.   Prie le BINUH de collaborer avec l’ONUDC et d’autres organismes compétents des Nations Unies afin d’aider les autorités haïtiennes à combattre le commerce et le détournement illicites d’armes et de matériel connexe et les flux financiers illicites et à renforcer la gestion et le contrôle des frontières et des ports et d’intégrer les progrès accomplis à cet égard dans les rapports que lui fait périodiquement le Secrétaire général, et recommande que le rapport trimestriel de l’ONUDC soit porté à l’attention du Conseil de sécurité, parallèlement aux rapports périodiques du BINUH, par l’entremise du Secrétaire général, et à cet égard, prie à nouveau l’ONUDC de continuer d’établir des comptes rendus trimestriels comprenant des mises à jour sur les sources et les itinéraires du trafic d’armes et des flux financiers illicites, les activités pertinentes des Nations Unies et des recommandations;

20.   Réaffirme l’importance de la mobilisation de l’ONUDC et des autres organismes compétents des Nations Unies à l’appui de la lutte contre les bandes armées, afin d’accroître la sécurité des ports, d’améliorer la collecte des recettes douanières et d’enrayer les flux financiers illicites, et souligne la nécessité et l’importance d’obtenir des financements volontaires à l’appui de ces efforts;

21.   Prie instamment le BINUH de fournir les informations dont il dispose sur les cas de violence en bande organisée, les activités criminelles et les atteintes aux droits humains en Haïti, notamment les cas de violence sexuelle et fondée sur le genre, recueillies par le Bureau dans le cadre de l’exécution de son mandat, en annexe aux rapports que lui présentera Secrétaire général;

22.   Encourage la poursuite d’une collaboration étroite et d’une coordination renforcée entre le Bureau, l’équipe de pays des Nations Unies en Haïti, la Mission multinationale d’appui à la sécurité, les organisations régionales et infrarégionales et les institutions financières internationales, en vue d’accroître l’aide humanitaire et d’aider le Gouvernement haïtien à assumer la responsabilité de garantir la stabilité, le développement durable, la sécurité alimentaire, la réduction des risques de catastrophe, la préparation, le renforcement de la résilience et l’autosuffisance économique du pays à long terme, et encourage également le renforcement de la communication stratégique publique concernant le mandat et le rôle particulier du BINUH;

23.   Souligne qu’il importe de permettre et de faciliter le libre passage, en toute sécurité et sans entrave de l’aide humanitaire et de fournir des services essentiels à toutes les personnes qui sont dans le besoin, et d’assurer la pleine protection, la sûreté et la sécurité des membres du personnel médical et humanitaire et de leurs biens;

24.   Exhorte tous les acteurs pertinents, notamment ceux qui ont la capacité d’influencer les bandes armées, à agir pour cesser de bloquer les routes nécessaires au ravitaillement des marchés locaux et l’accès à ceux-ci et de dégrader les sources d’alimentation, notamment les cultures et le bétail, ainsi que les fournitures médicales et humanitaires;

25.   Engage les États Membres, notamment les pays de la région, à apporter un appui sur le plan de la sécurité à la Police nationale d’Haïti en réponse à l’appel lancé par Haïti et le Secrétaire général, souligne qu’il faut déployer beaucoup plus d’efforts pour répondre aux besoins budgétaires et opérationnels de la Mission multinationale d’appui à la sécurité, et à cet égard, engage également les États Membres et les organisations régionales à faire des contributions volontaires et à fournir un soutien à la Mission sous la forme de contributions financières ou de contributions en personnel ou en nature, et demande au Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies d’aider les États Membres qui ont annoncé des contributions à les verser au fonds d’affectation spéciale; 

26.   Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.