9673e séance – matin
CS/15751

La mise en œuvre de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation par le Gouvernement centrafricain saluée au Conseil de sécurité

La Représentante spéciale pour la République centrafricaine, Mme Valentine Rugwabiza, et plusieurs délégations ont décerné, ce matin devant le Conseil de sécurité, un satisfecit au Gouvernement centrafricain pour ses efforts de mise en œuvre de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation.  Les échanges ont, en revanche, été vifs autour des campagnes de désinformation visant la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), qualifiée par la Ministre des affaires étrangères centrafricaine d’« opération de maintien dans la dépendance ».

Dans un premier temps, Mme Rugwabiza, qui est également Cheffe de la Mission, a salué le bon avancement des préparatifs des élections locales avec l’adoption le 28 mai par l’Assemblée nationale d’un code électoral révisé.  Ces élections sont un élément clef de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine, a-t-elle assuré, notant que les dernières élections locales se sont tenues il y a 36 ans. 

Elle a en revanche fait état d’une situation sécuritaire préoccupante dans les zones frontalières, évoquant une intensification de la violence contre les civils dans la préfecture du Haut-Mbomou, ainsi qu’une escalade du conflit entre le groupe armé de l’Unité pour la paix en Centrafrique (UPC) et le groupe d’autodéfense Azande.  La Mission a renforcé sa présence dans cette préfecture, qui est plus grande que la Suisse, afin de prévenir une recrudescence de la violence, a-t-elle indiqué.

En outre, le récent meurtre de 16 civils dans le village de Limé, dans la préfecture de l’Ouham-Pendé, suite à un conflit foncier impliquant des agriculteurs et des éleveurs locaux, est venu rappeler avec brutalité, selon elle, l’urgence de repositionner l’élevage et la transhumance comme facteurs de coexistence pacifique, de stabilisation et de développement économique.

À l’issue de cet exposé, nombre de délégations ont salué les efforts du Gouvernement pour renforcer la mise en œuvre de l’Accord politique, à l’instar du Mozambique, au nom des A3+ (Algérie, Mozambique, Sierra Leone et Guyana), qui a également cité le programme de désarmement, démobilisation et réintégration.

La Ministre des affaires étrangères, de la Francophonie et des Centrafricains de l’étranger, Mme Sylvie Baipo Temon, a détaillé ces progrès, tels que le redéploiement effectif des forces de défense et le redimensionnement des forces de sécurité intérieure, la gestion des armes et munitions, ainsi qu’une nouvelle donne stratégique qui a permis de garantir la paix, la sécurité, la cohésion sociale et le vivre-ensemble sur la totalité du territoire centrafricain. 

Jugeant cruciale l’organisation des élections locales en octobre pour faire progresser la réconciliation nationale, la Suisse a encouragé les autorités à garantir un processus inclusif, transparent et apaisé.  Même son de cloche du côté de la France qui a estimé que l’engagement du Gouvernement à tenir les premières élections locales depuis 1988 est un pas dans la bonne direction, encourageant dans la foulée les autorités centrafricaines à garantir l’exercice des droits civils et politiques de tous les Centrafricains.  Le Royaume-Uni a signalé pour sa part que la détention d’opposants politiques menace la crédibilité des élections futures dans le pays, en rappelant que des élections présidentielle et législatives sont prévues l’année prochaine.

Les campagnes de désinformation visant la MINUSCA ont également été au cœur de cette séance. La Représentante spéciale a averti que celles-ci font peser un risque sur la sécurité des Casques bleus tout en obérant la capacité de la Mission à exécuter ses tâches.  Le Gouvernement centrafricain doit agir afin que les personnes, y compris des fonctionnaires, qui relaient cette campagne rendent des comptes, a-t-elle insisté. 

La délégation du Royaume-Uni a, elle, dénoncé les groupes affiliés à la Fédération de Russie qui chercheraient à fragiliser la MINUSCA au moyen de campagnes de désinformation, en violation des résolutions du Conseil et de la souveraineté du pays. Les actions ciblées de la Russie contre les missions de l’ONU attestent de l’intention de ce pays de déstabiliser des États pour la poursuite d’objectifs politiques.  « C’est inacceptable », a dénoncé la délégation britannique. 

La France a indiqué qu’une part importante des violations constatées dans le pays est le fait des groupes armés et des mercenaires russes, issus de Wagner.  « Ces violations, qui recouvrent des violences sexuelles liées au conflit, dont des viols et des mariages forcés, ainsi que des violations graves des droits de l’enfant, ne doivent pas rester impunies. »  Certains prétendus partenaires de la RCA ont démontré qu’ils sont plus portés vers l’exploitation des ressources naturelles et non la sécurité du pays, a appuyé la délégation des États-Unis, en évoquant elle aussi le groupe Wagner. 

La délégation américaine a également accusé « un membre permanent du Conseil » d’avoir confisqué du matériel dédié à la MINUSCA.  L’embargo sur les armes ne concerne que les groupes armés et pas le Gouvernement centrafricain, a-t-elle précisé.

Mais du point de vue de la Russie, les sanctions entraveraient le développement socioéconomique de la RCA et continueraient de stigmatiser le pays aux yeux de la communauté internationale.  Une position partagée par la Ministre centrafricaine qui a estimé « qu’en toute logique et cohérence », ces sanctions doivent être supprimées.  Elle a également dénoncé le fait que le Gouvernement de la RCA soit systématiquement confondu avec les rebelles.

La Ministre s’est surtout livrée à un réquisitoire contre la MINUSCA, « non pas une opération de maintien de la paix mais de maintien dans la dépendance », qui n’a pas obtenu le résultat escompté.  Le Gouvernement et le peuple centrafricains voudraient enfin se réapproprier pleinement la souveraineté, à l’instar de vos pays et de vos populations, a-t-elle argué. « Ailleurs, et nous le voyons, les populations qui sont martyrisées selon votre appréciation sont armées, soutenues et béatifiées.  Pourquoi, en RCA, votre positionnement est-il différent? » a demandé la Ministre. 

Pire, toute tentative d’effort national pour répondre à la détresse du peuple centrafricain est soumise à vos accusations, s’est-elle emportée.  « La vie d’un Centrafricain n’a-t-elle pas la même valeur ou le même prix que celle d’un de vos semblables? » a lancé la Ministre, avant de citer les situations analogues avec les résistants en France ou aujourd’hui en Ukraine.

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse 
est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE (S/2024/473)

Exposé

Mme VALENTINE RUGWABIZA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République centrafricaine et Cheffe de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation dans ce pays (MINUSCA), a indiqué que les crises politiques et sécuritaires récurrentes que traverse la République centrafricaine ont eu un impact négatif sur la transhumance, transformant une pratique séculaire en l’un des principaux déclencheurs d’attaques contre les civils. Le récent meurtre de 16 civils dans le village de Limé, dans la préfecture de l’Ouham-Pendé, suite à un conflit foncier impliquant des agriculteurs et des éleveurs locaux, est venu rappeler avec brutalité l’urgence d’inverser la dynamique de la violence et de repositionner l’élevage et la transhumance comme facteurs de coexistence pacifique, de stabilisation et de développement économique, a-t-elle souligné. Elle a évoqué la tenue, le 13 mai, de la première conférence nationale de haut niveau sur la transhumance pacifique et prospère, notant que la mise en œuvre des décisions prises à cette occasion permettra d’améliorer considérablement la gestion de la transhumance, un pilier de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine.

Elle a indiqué que les préparatifs des élections locales ont connu un élan avec l’adoption le 28 mai par l’Assemblée nationale d’un code électoral révisé.  Ces élections sont un élément clef de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine.  La MINUSCA entend continuer d’apporter son soutien à ces préparatifs, y compris par des activités de sensibilisation et de mobilisation de la population, en particulier les femmes.  Elle a rappelé que les dernières élections locales se sont tenues il y a 36 ans. 

Mme Rugwabiza a ensuite signalé que la situation sécuritaire demeure préoccupante dans les zones frontalières, avec une intensification de la violence contre les civils dans la préfecture du Haut-Mbomou.  Elle a précisé qu’il y a eu une escalade du conflit entre le groupe armé de l’Union pour la paix en Centrafrique (UPC) et le groupe d’autodéfense Azande.  La Mission a renforcé sa présence dans cette préfecture, qui est plus grande que la Suisse, afin de prévenir une recrudescence de la violence.  Cette expansion, a-t-elle ajouté, a permis à la MINUSCA de renforcer la mise en œuvre de ses missions prioritaires, en particulier la protection des civils, l’acheminement de l’aide et l’appui à la consolidation de l’autorité de l’État.

La Représentante spéciale a aussi indiqué que la Mission a, en peu de temps, enregistré des progrès tangibles sur les fronts sécuritaire, humanitaire et du maintien de la paix dans le Haut-Mbomou.  Nonobstant ces progrès, la Représentante spéciale s’est dite profondément préoccupée par les campagnes de désinformation visant la MINUSCA, compliquant davantage encore l’environnement difficile dans lequel celle-ci évolue.  Le Gouvernement centrafricain doit agir afin que les personnes, y compris des fonctionnaires, qui relaient cette campagne rendent des comptes, a déclaré Mme Rugwabiza, en alertant que ces campagnes font peser un risque sur la sécurité des Casques bleus tout en obérant la capacité de la Mission à exécuter ses tâches.  Elle a aussi déploré la lenteur avec laquelle les équipements de la Mission, saisis par les douanes, lui sont rendus.

En conclusion, la Représentante spéciale a estimé que le soutien continu du Conseil et le renforcement des institutions nationales seront cruciaux pour consolider les gains enregistrés et assurer la protection de la population et de la souveraineté du pays, qui est la responsabilité première du Gouvernement centrafricain.

 

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