9657e séance – matin
CS/15731

Conseil de sécurité: appels à inclure les jeunes dans les efforts de lutte contre la violence, les discours de haine et l’extrémisme motivés par la discrimination

Un an après l’adoption de la résolution 2686 (2023), la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide a fait le point, ce matin devant le Conseil de sécurité, sur la mise en œuvre de ce texte qui exhorte les États et les organisations internationales et régionales à condamner publiquement la violence, les discours de haine et l’extrémisme motivés par la discrimination.  Ce fut également l’occasion pour nombre de délégations de s’inquiéter de l’expansion de l’intolérance et la discrimination à travers le monde et d’insister sur l’importance d’inclure les jeunes aux efforts de prévention. 

« La violence ne commence pas lorsque des attaques physiques sont lancées.  Elle commence souvent par des mots; des mots de haine propageant l’intolérance et divisant les sociétés », a déclaré Mme Alice Wairimu Nderitu.  Ces discours ciblent souvent les plus vulnérables de la société, et peuvent également être un indicateur de risque et un déclencheur potentiel de crimes graves, notamment les génocides, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, a-t-elle averti.  Elle a également signalé que même si les discours de haine ne sont pas un phénomène nouveau, l’utilisation généralisée des médias sociaux permet aujourd’hui à ces discours d’atteindre plus rapidement des publics éloignés, augmentant donc le risque de préjudice hors ligne.  Dans ce contexte, a-t-elle expliqué, les minorités sont particulièrement ciblées, de même que les femmes, en particulier celles qui travaillent dans l’espace public.

La Conseillère spéciale a également mis en garde contre les entraves à la liberté d’expression sous le prétexte de lutter contre les discours de haine.  Les interdictions et les coupures d’Internet ne sont pas la solution et peuvent constituer une violation des droits humains, y compris la liberté d’expression, et faire taire les acteurs œuvrant pour lutter contre les discours de haine.

Notant que les États Membres ont le rôle principal dans la lutte contre les discours de haine, Mme Nderitu les a encouragés à élaborer des plans d’action nationaux, avec le soutien de son Bureau, insistant notamment sur l’investissement dans le pouvoir et la voix des jeunes pour contrer les discours de haine.  « Ce n’est que lorsque les jeunes sont inclus que la prévention peut progresser de manière durable », a-t-elle souligné.

Outre les jeunes, la plupart des délégations ont mis l’accent sur les femmes qui font partie des principales victimes des discours de haine et qui doivent pouvoir bénéficier de tous leurs droits, comme a noté la République de Corée.  Pour la France, il faut éviter une approche fragmentée qui discrimine certains droits comme ceux des LGBT, alors que le Mozambique a expliqué que c’est la peur de l’autre qui alimente les conflits.  L’humanité à davantage de choses en commun que de choses qui la divisent, a souligné la délégation.  Le monde est assez grand pour que tous les pays puissent grandir et collaborer entre eux, a confirmé la Chine.  Il faut mettre l’accent sur le dialogue entre les civilisations, a-t-elle plaidé, tout en notant que c’est la soi-disant supériorité civilisationnelle qui crée des tensions et des conflits. 

Pour le Guyana, le dialogue est l’antidote de l’incompréhension et l’intolérance.  Même son de cloche pour la Sierra Leone qui a souligné que le dialogue permet de lutter contre les idéologies racistes, l’Équateur appelant de son côté à aider les États à mettre en œuvre les préceptes des programmes pour les femmes, la paix et la sécurité, et pour les jeunes, la paix et la sécurité. La Fédération de Russie s’est inquiétée de la persistance des notions de supériorité raciale et de la résurgence du nazisme.  De plus, a affirmé la délégation, certains États ne répriment pas ces fléaux alors que d’autres les intègrent dans leur fonctionnement, comme c’est le cas en Ukraine où la discrimination antirusse est en marche depuis 2014. 

Pour la Slovénie, seules les sociétés promouvant la diversité favorisent davantage la tolérance. De même, seules les sociétés respectant les droits des femmes accordent plus de place à la tolérance.  Agir pour les droits humains, c’est agir pour la paix, a renchéri la Suisse, tandis que les États-Unis ont promis qu’ils allaient continuer de défendre les défenseurs des droits partout où ils sont en danger. Il faut s’assurer que la résolution 2686 (2023) ne soit pas utilisée à mauvais escient pour réprimer les populations sous le prétexte de la lutte contre l’intolérance, a averti la délégation. 

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse 
est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Exposé

Mme ALICE WAIRIMU NDERITU, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide, a relevé que la violence ne commence pas lorsque des attaques physiques sont lancées.  Elle commence souvent par des mots; des mots de haine propageant l’intolérance et divisant les sociétés.  Elle a indiqué que les discours de haine peuvent contribuer à l’apparition, à l’escalade et à la récurrence de la violence.  Et ces discours ciblent souvent les plus vulnérables de la société, notamment les groupes ethniques, religieux, raciaux et les minorités nationales et parfois des groupes vulnérables tels que les femmes, les réfugiés et les migrants. 

Dans les situations les plus graves, les discours de haine peuvent également être un indicateur de risque et un déclencheur potentiel de crimes graves, notamment les génocides, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, a-t-elle souligné.  Elle a précisé que les discours de haine ne sont pas un phénomène nouveau, cependant, aujourd’hui, l’utilisation généralisée des médias sociaux permet à ces discours d’être utilisés par n’importe qui, atteignant plus rapidement des publics éloignés, et donc augmentant le risque de préjudice hors ligne.  Dans ce contexte, a-t-elle expliqué, les minorités sont particulièrement ciblées, et c’est aussi le cas des femmes, en particulier celles qui travaillent dans l’espace public.

La Conseillère spéciale a mis en garde contre les entraves à la liberté d’expression sous le prétexte de lutter contre les discours de haine.  Par exemple, les interdictions et les coupures d’Internet ne sont pas la solution et peuvent constituer une violation des droits humains, y compris la liberté d’expression.  Ils peuvent aussi faire taire les acteurs œuvrant pour lutter contre les discours de haine, y compris la société civile, les défenseurs des droits et les journalistes, a-t-elle expliqué.  Elle a rappelé que la Stratégie et le Plan d’action des Nations Unies contre les discours de haine fournissent un cadre global de lutte contre le fléau, conformément aux normes internationales en matière de protection des droits de l’homme.  Ce plan met l’accent sur une approche multidimensionnelle pour lutter contre les discours de haine « en utilisant tous les éléments de notre boîte à outils, du dialogue à la sensibilisation, en passant par l’éducation et la promotion de la cohésion sociale, la non-discrimination et la paix », a-t-elle fait observer. 

Par l’intermédiaire du Bureau de la Conseillère spéciale, plus de 20 équipes de pays des Nations Unies et des opérations de maintien de la paix ont été soutenues dans l’élaboration de leurs propres plans d’action de lutte contre les discours de haine. De même, certains États Membres ont commencé à élaborer et à adopter leurs propres plans d’action nationaux pour lutter contre les discours de haine.  Mme Nderitu a déclaré que la Stratégie et le Plan d’action des Nations Unies contre les discours de haine sont également un outil pouvant inspirer les entreprises de technologie et de médias sociaux pour qu’elles fassent davantage en ligne.

La Conseillère spéciale a indiqué que depuis l’adoption de la résolution l’an dernier, le Conseil de sécurité a également abordé ces questions dans sept résolutions liées à la République centrafricaine, la République démocratique du Congo, la Libye, la Somalie, le Soudan du Sud et le Moyen-Orient (Force intérimaire des Nations Unies au Liban-FINUL).  Dans le même temps, diverses missions politiques spéciales et les opérations de maintien de la paix surveillent les discours de haine, notamment ceux fondés sur le genre.  Elle a évoqué des initiatives spécifiques prises par certaines missions de la paix et les envoyés et représentants spéciaux.  Ces efforts déjà mis en œuvre dans l’ensemble du système des Nations Unies constituent des étapes importantes qui doivent être davantage soutenues, a-t-elle plaidé en appelant à un financement dédié.  Cela nécessite également l’engagement politique et le soutien du Conseil de sécurité, a-t-elle argué.

Enfin, puisque les États Membres ont le rôle principal dans la lutte contre les discours de haine, Mme Nderitu les a encouragés à élaborer des plans d’action nationaux, avec le soutien de son Bureau qui est le point focal des Nations Unies sur le discours de haine.  Elle a terminé en annonçant une cérémonie spéciale, le 18 juin prochain dans la salle de l’ECOSOC, dans le cadre de la troisième Journée internationale de lutte contre les discours de haine.  L’accent sera mis sur l’investissement dans le pouvoir et la voix des jeunes pour contrer les discours de haine.  « Ce n’est que lorsque les jeunes sont inclus que la prévention peut progresser de manière durable », a-t-elle conclu.

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